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© Université de Liège - http://reflexions.ulg.ac.be/ - 21 April 2017
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dans les deux échantillons, cette capacité fait appel à des régions pariétales impliquées dans des processus
attentionnels.
Quant à la capacité de recollection d'information, elle est drastiquement diminuée dans la maladie d'Alzheimer,
même à un stade précoce. Les chercheurs liégeois ont découvert qu'elle est liée, tant chez les patients
que chez les sujets contrôles, à l'activité du cortex cingulaire postérieur et que ce dernier « fonctionne »
chez le sujet dément. Dès lors, où se situe le problème ? Dans la perte de connectivité entre ce cortex et
les régions temporales médianes, en particulier l'hippocampe. Aussi les traces mnésiques de souvenirs
contextualisés (recollection) ne peuvent-elles être créées. « La structure la plus atrophiée dans la maladie
d'Alzheimer est l'hippocampe, et non le cortex cingulaire postérieur, fait remarquer le professeur Salmon. Selon
plusieurs auteurs, ce cortex est un nœud de communication. Recevant moins d'informations en provenance de
l'hippocampe, il présenterait un métabolisme glucidique diminué et serait incapable de redistribuer les tâches
nécessaires à l'encodage de l'information. »
La familiarité
La mémoire autobiographique rassemble toutes les informations (épisodiques et sémantiques) en relation
directe avec notre histoire personnelle. Elle nous est intimement chevillée et est éminemment subjective, car
chargée d'émotions. Le groupe Aging and Memory l'a explorée chez des patients Alzheimer et chez des sujets
âgés normaux en s'intéressant à des souvenirs autobiographiques se rapportant, les uns,à leur passé lointain
(leur vie de jeune adulte) et, les autres,à la dernière année (3).
Premier constat : même dans les formes très précoces de la maladie d'Alzheimer, les souvenirs
autobiographiques sont nettement moins riches en détails contextuels chez les patients Alzheimer.
Deuxièmement,des images réalisées par la technique du PET scan au FDG révèlent que la perte de
caractéristiques épisodiques dans les souvenirs de la période où les sujets étaient de jeunes adultes
découle notamment d'une atteinte métabolique de régions occipitales et occipito-pariétales impliquées dans
la réactivation de détails sensoriels et perceptifs. Pour les souvenirs récents, le dysfonctionnement se situe
ailleurs : au niveau de régions temporales latérales sollicitées pour la récupération d'indices sémantiques sur
les événements vécus et au niveau de régions temporo-pariétales intervenant dans la capacité d'établir une
perspective personnelle (rapporter l'information à soi-même) qui puisse favoriser le rappel épisodique.
« Il ressort de l'ensemble des expériences que nous avons menées que les patients Alzheimer utilisent plus
volontiers un sentiment de familiarité pour reconnaître une information, dans la mesure où leur mémoire
épisodique défaillante ne leur donne pas accès à des détails suffisants pour retrouver tout le contexte d'un
événement », souligne Éric Salmon.
La « familiarité » étant largement préservée au début de la maladie d'Alzheimer, son exploitation doit être
promue, car elle semble pouvoir être utilisée comme un mécanisme compensatoire permettant aux patients
de continuer à s'adonner à des tâches quotidiennes valorisantes, fussent-elles routinières.
Le poids des erreurs
La « familiarité » est un processus explicite, l'individu pouvant exprimer verbalement le sentiment de « déjà
vu » qu'il ressent. Mais elle a aussi une caractéristique commune avec le phénomène implicite d'amorçage
traduisant le fait qu'une première confrontation avec un stimulus, l'« amorce », peut nous incliner, à notre insu,
à le préférer par la suite à un autre (4). La caractéristique commune à la familiarité et à l'amorçage est la
« fluence », cette « facilité » qui préside à l'évocation de certaines informations.