Presse alternative
Document d’analyse
Par Jean-Marc Fontan
Volet IV d’une recherche sous la direction de Jean-Marc Fontan
Observatoire montréalais du développement
Recherche sous la coordination de Lina Laprise-Trudel
Service aux collectivités de l’UQÀM
Octobre 2001
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Introduction
Ce document présente une analyse du matériel de recherche produit dans le but
d’aider la Corporation Vie Ouvrière dans sa réflexion sur la place qu’elle occupe au
sein de la presse écrite alternative québécoise et sur les possibilités de
réorganisation ou de repositionnement de l’organisation.
Le matériel analysé est regroupé au sein des volets I, II et III du projet de recherche
dirigé par Jean-Marc Fontan, professeur au département de sociologie de l’UQÀM et
responsable de l’Observatoire montréalais du développement. Ce projet est réalisé
en collaboration avec le Service aux collectivités de l’UQÀM.
Les volets I, II et III du projet de recherche ont été regroupés dans une publication
diffusée par Recto Verso et le Service aux collectivités de l'UQÀM.
Objet du projet de recherche
La recherche réalisée :
explore l’émergence et le développement de la presse écrite alternative au
Québec (volet I de la recherche) ;
porte un regard sur dix monographies de médias écrits alternatifs québécois (6
médias) et européens (4 médias) (volet II de la recherche) ;
décrit, à l’aide d’une monographie approfondie, le « Projet historique Recto
Verso » : de ses origines, qui remontent au début des années 1950, à nos jours
(volet III de la recherche) ;
présente une analyse récapitulative sur la presse alternative.
Contenu du présent document
Le document présente et analyse les constats extraits des volets I, II et III de la
recherche.
Contraintes et limites de la recherche
La recherche repose sur la réalisation de petites études exploratoires définies en
fonction des besoins de la Corporation. Tant les volets d’étude I, II et III que la
présente proposition de travail ont des limites inhérentes à la nature exploratoire de
la recherche effectuée.
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Contexte de réalisation de la recherche
Le projet de recherche a été implanté à la demande de représentants de la revue
Recto Verso. Ces personnes voulaient effectuer une recherche action sur la presse
alternative écrite québécoise afin d’appuyer la réflexion de Recto Verso dans le
cadre d’un événement commémoratif du cinquantième anniversaire d’existence de la
revue.
Nous avons obtenu un financement de 9 000 dollars d’un fonds de recherche interne
de l’Université du Québec à Montréal (PAFARC) pour réaliser la recherche.
Cette dernière est le fruit d’une collaboration entre :
le Service aux collectivités de l’UQÀM, représentée en la personne de Lina Lisa-
Trudel ;
l’Observatoire montréalais du développement, représenté par Jean-Marc Fontan
rattaché au département de sociologie ;
la corporation Vie Ouvrière inc qui produit la revue Recto Verso et qui est
représentée par Anne-Marie Brunelle
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Recto Verso et la presse écrite alternative
Définition de la presse écrite alternative
Dans les sections suivantes, nous allons constamment parler de la presse écrite
alternative. Afin de clarifier ce que nous entendons, nous définissons cette dernière
de la façon suivante.
Par presse écrite alternative, nous entendons l’ensemble des médias utilisant
les moyens écrits traditionnels de publication pour produire et diffuser un
contenu informationnel qui se démarque de celui produit par les médias écrits
de masse. Cette presse se démarque par la nature de sont contenu. Plus
critique, plus engagée, plus militante, elle s'occupe du non dit ou du non
couvert par les autres médias.
Cette presse alternative regroupe un ensemble hétérogène de projets
médiatiques. À un extrême du spectre, nous retrouvons des projets privilégiant
une information favorisant le développement d’une communauté territoriale
locale ou identitaire. À l’autre extrême, nous avons identifié des organisations
spécialisées dans la diffusion d’une information très campée au plan politique.
Cette presse est porteuse d'un projet, d'une intention, ou d'une finalité
sociale ou politique avant d'être économique.
Cette presse écrite alternative est indépendante des grands conglomérats de
la presse de masse. Ce qui ne veut pas dire qu’elle soit indépendante en
termes de financement. Elle est gérée par une forme de propriété participative
où le projet démocratique occupe souvent, mais pas toujours, une place
importante. Cette presse est indépendante au sein d'une structure
organisationnelle fondée sur la démocratie participative.
Enfin, cette presse écrite alternative regroupe un ensemble d’attributs que l’on
qualifie d’artisanaux, au sens où les personnes qui œuvrent à la produire sont
des artisans et artisanes de l’information, comparativement aux professionnels
des médias de l’information de masse qui œuvrent au sein de grandes
manufactures et conglomérats de l’information. Une presse artisanale aux
moyens et ressources limitées qui n'enlève rien à la qualité du produit et
de la démarche.
Il est clair qu'il n'y a pas de consensus sur la définition ni sur le libellé que nous
utilisons. Nous regroupons dans cette définition des médias qui ne se disent pas
nécessairement faire partie de la même famille ou de la même appellation.
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Des constats
I La presse écrite alternative : analyse du volet I de la recherche
Une tradition bien ancrée
Le portrait de la presse écrite alternative québécoise révèle la présence d’une
tradition forte, d’une vitalité organisationnelle faisant montre d’innovation, et d'une
capacité continue de renouvellement. Cette presse écrite s’habille de formats très
diversifiés et s’adresse, via la vente ou la gratuité, à un lectorat très spécialisé ou
composé de « petits publics ».
La presse écrite alternative québécoise se définit généralement en opposition au
néo-libéralisme. Il n’y a pas au sein de la presse écrite alternative une opposition
ferme au projet historique libéral qui a émergé il y a plus de trois siècles en
opposition à l’obscurantisme de sociétés européennes à la solde des pouvoirs de
l’aristocratie et de l’Église. Il y a toutefois un courant fort au sein la presse écrite
alternative qui s’inspire des traditions socialistes et anarchistes du 19e siècle et
dont le projet porte en partie (pour les moins radicaux) sur la consolidation ou le
renouvellement de la social-démocratie.
Ce n’est donc pas le fait d’être un « mini-média » qui donne à cette presse sa
couleur alternative, mais bien le fait de présenter un point de vue critique ou très
nuancé à l’égard des médias de masse. Ces derniers ont adopté un point de vue
libéral fortement centré sur la défense de l’ordre social établi. Leur appartenance
indique aussi une concentration de la propriété dont ils sont l’objet. Dès lors, ils
ne veulent pas ou peuvent difficilement diffuser une information critique sur
l’actualité. Ce dernier point ne veut pas dire qu’il n’existe aucune information
critique au sein de certains médias de la presse écrite de masse, mais que cette
information est inégalement présentée, souvent noyée dans une masse
d'information bigarrée et faiblement valorisée, pour ne pas dire fortement
dévalorisée par la politique éditoriale des dits médias.
Le fait que la presse, en général, et la presse écrite, en particulier, se concentrent
entre les mains de quelques grands propriétaires corporatifs ayant une vue bien
précise et limitée du type d’information à présenter à la population a pour
conséquence que des besoins en information sont non comblés auprès du grand
lectorat. Cette réalité constitue une opportunité pour des projets médiatiques qui
veulent se démarquer de l’information de masse. Une partie de cet
« espace informationnel non comblé » est occupée par de petits médias libéraux
dits locaux ou identitaires. Une autre partie est investie par des médias dits
alternatifs voulant faire de l’information dans l’optique de changer les choses et
d’apporter un point de vue critique.
Une réalité hétérogène
La tradition portée par la presse écrite alternative est traversée par un ensemble
de tendances plus ou moins liées à des mouvements sociaux, culturels ou
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