J. Philippe INTRODUCTION
L’hyperthyroïdie peut résulter de plusieurs causes et par con-
séquent de processus physiopathologiques totalement diffé-
rents. Pour qu’un traitement approprié puisse être administré,
il est évidemment essentiel d’identifier la cause précise.
D’un point de vue physiopathologique, l’hyperthyroïdie peut
résulter de trois mécanismes distincts:1
d’une augmentation de la synthèse des hormones thyroï-
diennes. Dans ce cas, un traitement par anti-thyroïdiens de
synthèse est approprié (tableau 1).
du relâchement dans la circulation d’hormones préformées et stockées dans la
thyroïde. Dans ce cas, comme l’hyperthyroïdie est due essentiellement à une
inflammation de la glande (thyroïdite) et non à une augmentation de la synthèse
des hormones thyroïdiennes, le traitement par anti-thyroïdiens de synthèse ne
peut être efficace (tableau 1).
de la prise d’une source exogène d’hormones thyroïdiennes.
Ces trois types d’hyperthyroïdie peuvent être facilement différenciés par
l’anamnèse et la clinique ; néanmoins, on doit parfois avoir recours à la scinti-
graphie thyroïdienne qui, dans le premier cas, démontre une augmentation de la
captation de radio-iode alors que dans les deux autres cas une captation basse
est observée.
L’hyperthyroïdie est une maladie relativement commune puisqu’elle touche
environ 1% de la population;cette prévalence peut augmenter jusqu’à 4-5% chez
les femmes âgées. Elle est plus fréquente chez la femme que chez l’homme avec
un rapportd’environ 5-10/1.
Dans cet article, nous n’aborderons pas les hyperthyroïdies secondaires à une
inflammation de la glande ou à la prise exogène d’hormones thyroïdiennes.
HYPERTHYROÏDIES DUES À UNE AUGMENTATION
DE LA SYNTHÈSE DES HORMONES THYROÏDIENNES
Outrela maladie de Basedow qui est la cause d’hyperthyroïdie la plus fré-
quente et sur laquelle nous allons revenir en détail, il faut mentionner cinq
autres causes d’hyperthyroïdie résultant d’une augmentation de la synthèse des
hormones thyroïdiennes (tableau 2).1
Adénome toxique et goitre multinodulaire toxique
L’adénome toxique et le goitre multinodulaire toxique sont le résultat d’une
Grave’s disease in 2009
Grave’s disease is an autoimmune disease of
the thyroid gland characterized by hyperthy-
roidism, a homogenous goiter and occasio-
nally an ophtalmopathy. It occurs in less than
1% of the population with a large predomi-
nance in women (10/1). Treatment is directed
to inhibit thyroid hormone synthesis with car-
bimazole during 12-18 months. Recurrence
rates after stopping treatment is about 50% ;
in these patients, radioactive iodine is the
preferred treatment.
Rev Med Suisse 2009; 5 : 764-8
La maladie de Basedow est une maladie autoimmune de la thy-
roïde qui se manifeste par une hyperthyroïdie, un goitre homo-
gène et parfois une ophtalmopathie. La fréquence de la maladie
est de moins de 1% avec une prédominance féminine de 5-10/1
homme. Le traitement consiste en l’administration d’anti-thyroï-
diens de synthèse (carbimazole) pendant douze à dix-huit mois.
Après l’arrêt du traitement, le risque de rechute est d’environ
50% ; chez ces patients, le radio-iode est le traitement de choix.
La maladie de Basedow en 2009
le point sur…
764 Revue Médicale Suisse
www.revmed.ch
8 avril 2009
PrJacques Philippe
Service d’endocrinologie,
diabétologie et nutrition
HUG, 1211 Genève14
Revue Médicale Suisse
www.revmed.ch
8 avril 2009 0
33985_764_768.qxp 2.4.2009 8:35 Page 1
Revue Médicale Suisse
www.revmed.ch
8 avril 2009 765
hyperplasie focale des cellules folliculaires thyroïdiennes
dont le fonctionnement devient autonome et indépendant
de la stimulation par la TSH
(thyréostimuline hormone)
.Pour
expliquer cette prolifération cellulaire et cette capacité de
synthétiser les hormones thyroïdiennes, des mutations
somatiques activatrices du gène du récepteur de la TSH
ou encoredela protéine Gs-α,impliquée dans la produc-
tion d’AMP cyclique, ont été retrouvées dans un certain
nombre de cas ; ces mutations n’expliquent pas tous les
adénomes ou goitres multinodulaires toxiques et il est par
conséquent probable que d’autres mutations génétiques
soient retrouvées dans le futur.2-4
La prévalence du goitre multinodulaire toxique est plus
fréquente dans les contrées où l’apport quotidien d’iode
est plutôt bas.
Hashitoxicose
Le terme d’Hashitoxicose est la combinaison des mots
«toxicose» et «Hashimoto». Cette condition est rare;elle
peut se rencontrer chez les patients qui ont une maladie
thyroïdienne autoimmune qui se présente avec une hyper-
thyroïdie causée par la présence d’anticorps anti-récepteurs
de la TSH comme dans une maladie de Basedow. Néan-
moins chez ces patients, cette période d’hyperthyroïdie est
suivie par le développement d’une hypothyroïdie résultant
d’une destruction autoimmune de la glande similaire au
processus survenant dans la maladie de Hashimoto.
Hyperthyroïdie due à un excès d’iode
Cette forme d’hyperthyroïdie peut se développer après
une surcharge en iode, comme par exemple après l’admi-
nistration de produits de contraste pour une angiographie
ou un scanner,5de produits riches en iode (algues), de cer-
tains médicaments tels que l’amiodarone6ou de produits
phytothérapeutiques (Maca). Les patients affectés par cette
forme d’hyperthyroïdie ont souvent un goitre multinodu-
laire. L’apport d’iode peut par conséquent mener à une
augmentation de la synthèse des hormones T3 et T4. Chez
ces patients, la scintigraphie thyroïdienne va montrer une
captation élevée seulement lorsque la plupart de l’iode
reçu aura été excrété. La captation sera par contre basse si
l’iode continue à être administré ou si la substance conte-
nant de l’iode a une longue durée de vie biologique et donc
reste en excès.
La durée de cette forme d’hyperthyroïdie dépend de la
persistance de la prise d’iode et de la demi-vie biologi-
que de la substance contenant de l’iode. Par exemple, si
l’apport d’iode est dû à une artériographie, l’hyperthyroïdie
sera de relativement courte durée (six à douze semaines).
Si par contre l’apport d’iode se fait par la prise d’amioda-
rone, la durée de l’hyperthyroïdie pourra persister jusqu’à
six à douze mois, due à une longue demi-vie biologique de
l’iode. Dans ces cas-là, il est évident qu’un traitement de
l’hyperthyroïdie par radio-iode est exclu pour plusieurs
semaines à plusieurs mois jusqu’à élimination de l’iode en
excès.
La maladie trophoblastique et les tumeurs
des cellules germinales
L’hyperthyroïdie peut survenir chez les femmes qui ont
une môle hydatiforme ou un choriocarcinome, ou encore
chez les hommes avec une tumeur des cellules germinales
testiculaires. Cette forme d’hyperthyroïdie est probable-
ment due à l’excès de synthèse de l’hormone gonadotrope
chorionique qui peut se lier au récepteur de la TSH et par
conséquent stimuler la biosynthèse des hormones thyr-
diennes. Le traitement est dirigé contrela tumeur ; néan-
moins les anti-thyroïdiens de synthèse peuvent être utiles.
Hyperthyroïdie due à un adénome hypophysaire
avec production de TSH
Les adénomes hypophysaires produisant de la TSH sont
généralement des macroadénomes et peuvent être même
invasifs.7La plupart de ces patients ont un goitre thyroï-
dien et souvent des déficits de vision dus à la compression
des nerfs ou du chiasma optique. Ces patients présentent
une augmentation des hormones thyroïdiennes périphéri-
ques avec une TSH qui n’est pas supprimée.
MALADIE DE BASEDOW
La maladie de Basedow affecte environ 0,5% de la po-
pulation et est la cause de la majorité des cas d’hyperthy-
roïdie (entre50 et 80%). Comme pour l’hyperthyroïdie en
général, on observe une large prédominance féminine avec
0Revue Médicale Suisse
www.revmed.ch
8 avril 2009
Augmentation de la production Augmentation du relâchement
des hormones thyroïdiennes des hormones thyroïdiennes
par inflammation de la glande
Maladie de Basedow Thyroïdite subaiguë de
Goitre multinodulaire toxique De Quervain
Adénome toxique Thyroïdite silencieuse
Hashitoxicose Autres formes secondaires à
Maladie trophoblastique (môle l’amiodarone, le radio-iode,
hydatiforme, choriocarcinome) l’interféron-α, etc.
Tumeur des cellules germinales
Tableau 1. Diagnostic différentiel de l’hyperthyroïdie
Symptômes
Perte de poids
Palpitations, dyspnée
Intolérance à la chaleur, thermophobie, sudation
Faiblesse musculaire, fatigabilité
Nervosité, irritabilité, labilité émotionnelle, dépression, difficultés
de sommeil
Dysfonction érectile, diminution de la libido, dysménorrhée
Perte de cheveux, ongles cassants
Boulimie, diarrhées, selles liquides
Irritation oculaire, larmoiement, œdème périorbitaire, diplopie
Signes physiques
• Tachycardie
Troubles du rythme cardiaque
Hypertension systolique
Erythème palmaire, onycholyse, aplatissement et amincissement des
ongles (ongles de Plummer), myxœdème prétibial, clubbing
Goitre thyroïdien homogène, frémissement à la palpation, souffle
thyroïdien systolodiastolique
Brillance du regard, retard oculo-palpébral, exophtalmie, irritation de
la conjonctive, œdème palpébral
Hyperréflexie avec décontraction musculaire raccourcie, tremblements,
force musculaire proximale diminuée
• Gynécomastie
Hyperactivité motrice, nervosité
Tableau 2. Manifestations cliniques
33985_764_768.qxp 2.4.2009 8:35 Page 2
Revue Médicale Suisse
www.revmed.ch
8 avril 2009 0
un rapport homme-femme entre 5-10/1. La maladie affecte
plutôt les femmes jeunes et d’âge moyen avec un pic entre
40 et 60 ans mais elle peut survenir à tout âge. La maladie
de Basedow est une thyroïdite autoimmune avec une
composante génétique et des facteurs environnementaux
prédisposant tous deux à la survenue de cette maladie.
Certaines sous-classes de gènes HLA de classe II ont été
identifiées comme facteurs génétiques prédisposants et,
chez les jumeaux monozygotes, la concordance d’une mala-
die de Basedow est retrouvée dans 35% des cas. L’histoire
familiale d’une maladie de Basedow est associée à un
risque accru et à une survenue à un plus jeune âge de la
maladie. Parmi les facteurs de l’environnement associés à
une maladie de Basedow, on relève les stress majeurs, les
infections et la période postgrossesse.8
Si les processus immunologiques menant à la maladie
de Basedow sont très peu connus, la cause de l’hyperthy-
roïdie est la présence d’anticorps circulants de type IgG
qui lient et activent le récepteur de la TSH. Cette activation
stimule la croissance et la prolifération des cellules folli-
culaires, cause de la croissance de la glande thyroïde, ainsi
que la production d’hormones thyroïdiennes et plus parti-
culièrement la T3 par rapport à la T4. La fraction de T3 qui
est normalement sécrétée par la glande thyroïde est d’en-
viron 20% du total alors que dans la maladie de Basedow
elle augmente à environ un tiers.
Manifestations cliniques (tableau 2)
Les manifestations cliniques de la maladie de Basedow
sont pour la plupartcelles observées dans toute forme
d’hyperthyroïdie (tableau 2).Néanmoins, quelques symp-
tômes et signes cliniques peuvent être spécifiques à la
maladie de Basedow,particulièrement les symptômes et
les signes oculaires et beaucoup plus rarement (l1% des
patients) une dermopathie très localisée (le myxœdème
prétibial) et le
clubbing
.Il est à noter que certains symp-
tômes comme la dépression et la fibrillation auriculaire
surviennent plus fréquemment chez les patients âgés que
chez les jeunes.
Tests de laboratoire (tableau 3)
Le diagnostic biologique de l’hyperthyroïdie est extrê-
mement simple puisqu’il suffit pour confirmer le diagnostic
d’avoir une TSH dont la valeur est supprimée (tableau 3).
La plupartdu temps les valeurs d’hormones périphériques
de T3 et de T4 sont largement augmentées. Le test le plus
spécifique est la mesuredes anticorps anti-récepteurs TSH.
Néanmoins dans 10 à 20% des cas, ces anticorps ne sont
pas détectables. Leur mesure n’est donc pas forcément
obligatoire, particulièrement lorsque le contexte clinique
est suffisant pour poser le diagnostic (femme jeune, goitre
homogène non douloureux, valeur de T3 élevée par rap-
port à la T4).
Imagerie
La plupart du temps, la palpation de la glande thyroïde
révèle un goitrehomogène et est suffisante pour le diag-
nostic. Néanmoins, il est parfois utile de recourir à l’ultra-
sonographie de la glande thyroïde pour l’évaluation d’éven-
tuels nodules. La scintigraphie thyroïdienne peut être utile
pour distinguer une maladie de Basedow (captation aug-
mentée) d’une thyroïdite (captation basse); elle peut aussi
êtreutile pour identifier un goitre multinodulaire toxique
ou un nodule solitaire toxique. La scintigraphie est néan-
moins requise lorsqu’un traitement au radio-iode est prévu.
Autres investigations
Dans les cas où le patient se plaint de symptômes ocu-
laires ou lorsqu’il y a une suspicion d’exophtalmie, le patient
devrait être référé à un ophtalmologue afin d’en mesurer
le degré par un exophtalmomètre de Hertel, possiblement
un champ visuel et une imagerie de la cavité orbitaire.
Dans les cas où un rythme cardiaque irrégulier est
détecté, un électrocardiogramme sera nécessaire. Chez les
femmes postménopausées, une densitométrie osseuse
peut êtreeffectuée et dans les cas de gros goitres, un scan-
ner peut êtrenécessairepour détecter une éventuelle
obstruction trachéale ou œsophagienne.
Traitement
Les options thérapeutiques pour la maladie de Basedow
sont au nombre de trois: 1) les anti-thyroïdiens de synthèse ;
2) le radio-iode et 3) la chirurgie. Ces trois traitements sont
efficaces initialement, néanmoins le risque de rechute est
plus élevé chez les patients traités par anti-thyroïdiens de
synthèse (environ 40-50%) comparé aux patients qui reçoi-
vent le radio-iode (environ 20%) et ceux traités par chirur-
gie (l5%).
Le traitement pharmacologique 9-10
Les traitements anti-thyroïdiens habituellement utilisés
sont le carbimazole (Néo-Mercazole) et le propylthiouracile
(Propycil). Leur mécanisme d’action est d’interférer avec la
synthèse des hormones thyroïdiennes en empêchant la
iodination des tyrosines de la thyroglobuline par l’enzyme
peroxydase. Les anti-thyroïdiens de synthèse sont concen-
trés sélectivement dans la glande thyroïde (le rapportthy-
roïde/plasma est d’environ 100/1). Outre l’inhibition de la
synthèse des hormones thyroïdiennes, les anti-thyroïdiens
de synthèse peuvent avoir d’autres actions telles qu’un effet
d’immunosuppression et le blocage de la conversion T4 en
T3 pour le propylthiouracile à haute dose (environ 450 mg/
jour).
Les anti-thyroïdiens de synthèse sont absorbés rapide-
ment par le tube digestif (80-100%) avec un pic sérique
observé une à deux heures après la prise. Le propylthiou-
racile est fortement lié aux protéines plasmatiques (envi-
766 Revue Médicale Suisse
www.revmed.ch
8 avril 2009
TSH supprimée
Elévation des hormones thyroïdiennes périphériques (T4 libre et T3
totale)
Présence d’anticorps anti-récepteurs de la TSH
Présence d’anticorps anti-thyroglobuline et anti-peroxydase
Augmentation des aminotransférases hépatiques
Hypercalcémie, augmentation de la phosphatase alcaline, hypercalciurie
(PTH basse)
Ostéopénie ou ostéoporose (augmentation du turnover osseux)
Baisse du cholestérol total et du LDL-cholestérol
Anémie normochrome normocytaire, leucopénie
Tableau 3.T
ests de laboratoire
TSH :thyréostimuline hormone; PTH : hormone parathyroïdienne.
33985_764_768.qxp 2.4.2009 8:35 Page 3
Revue Médicale Suisse
www.revmed.ch
8 avril 2009 767
ron 80%) alors que le carbimazole est transformé en thia-
mazole qui est partiellement lié aux protéines (40%). Les
effets anti-thyroïdiens obtenus avec ces substances durent
environ douze heures pour le propylthiouracile nécessitant
par conséquent une administration deux à trois fois/jour,
alors que pour le carbimazole les effets durent environ une
vingtaine d’heures, nécessitant une prise une à deux fois
par jour. Les anti-thyroïdiens de synthèse ont une action
antagoniste de la vitamine K et peuvent donc augmenter
les effets de l’anticoagulation.
La dose de départ est d’environ de 15-30 mg/jour pour
le carbimazole ; on obtient sous ces doses un contrôle
adéquat de l’hyperthyroïdie dans environ 90% des cas. Pour
lepropylthiouracile, la dose de départ est de 150-450 mg/
jour. La supériorité de l’un par rapport à l’autre anti-thyroï-
dien de synthèse n’est pas établie mais au vu de la demi-vie
intrathyroïdienne plus longue du carbimazole, celui-ci est
préféré; en outre quelques études ont démontré une meil-
leure efficacité et moins d’effets secondaires avec le car-
bimazole.
Les effets secondaires des anti-thyroïdiens de synthèse
sont résumés dans le tableau 4.Il faut néanmoins relever
que l’agranulocytose est l’effet secondaire le plus redouté;
il survient chez 0,1-0,3% des patients. Tous les patients chez
lesquels un traitement d’anti-thyroïdiens de synthèse est
débuté devraient être avertis des éventuels symptômes
d’agranulocytose tels que la fièvre, des douleurs évoca-
trices d’une angine ou des ulcérations buccales. L’agranu-
locytose est légèrement plus fréquente chez les patients
âgés et aux doses les plus élevées d’anti-thyroïdiens ;elle
survient la plupart du temps dans les premiers six mois de
traitement mais peut se produire à n’importe quel moment.
Une élévation des tests hépatiques peut apparaîtrecomme
effet secondaire des anti-thyroïdiens de synthèse, mais elle
peut être retrouvée dans la maladie de Basedow par l’effet
de l’hyperthyroïdie elle-même. Il est donc suggéré de mesu-
rer les tests hépatiques avant de commencer le traitement.
L’amélioration des symptômes intervient généralement
trois à quatre semaines après l’initiation du traitement. Un
traitement complémentaire de bêta-bloquants peut être
nécessaire lorsque des symptômes particulièrement mar-
qués de palpitations, de tremblements et de transpirations
sont relevés.
La dose d’anti-thyroïdiens de synthèse devrait être ajus-
tée pour normaliser les valeurs périphériques de T3 et de
T4 dans un premier temps et maintenir la dose de carbi-
mazole entre 2,5 et 10 mg/jour jusqu’à une normalisation
de la TSH. Un contrôle de la T4 libre et de la T3 totale de-
vrait être effectué toutes les trois semaines avec, si néces-
saire, une adaptation des doses de carbimazole de 5-10 mg/
jour (figure 1).
Après six à douze mois de traitement, le pourcentage de
patients entrant en rémission est d’environ 50%, mais près
de la moitié de ces patients vont rechuter. La rémission
est moins probable chez les hommes, chez les patients plus
âgés (plus de 40 ans) et chez les patients avec une maladie
plus active (goitre important, valeurs de T4 et de T3 parti-
culièrement élevées et taux d’anticorps anti-récepteurs à la
TSH élevé) (tableau 5).La durée du traitement anti-thyroï-
dien ne semble pas modifier le taux de rémission. En outre,
le traitement substitutif de T4 combiné aux anti-thyroïdiens
de synthèse ne modifie d’aucune façon le taux de rémission.
Traitement au radio-iode
Le traitement au radio-iode (Iode 131) peut êtreutilisé
comme traitement initial ou encorecomme traitement de
0Revue Médicale Suisse
www.revmed.ch
8 avril 2009
Effets secondaires Fréquence Types
Mineurs
Réactions cutanées 4-6% Urticaire ou érythème maculaire
Arthralgies 1-5%
Effets gastro- 1-5% Intolérance gastrique, nausées
intestinaux
Majeurs
Polyarthrite 1-2% Syndrome arthritique des anti-
thyroïdiens
Vasculite ANCA Rare Positivité des ANCA parfois
positive observée chez les patients non
traités ou traités mais sans
symptôme
Agranulocytose 0,1-0,5% Fréquemment dans les 3-6
premiers mois de traitement
Surtout personnes âgées et
doses élevées
Rarement accompagnée de
thrombocytopénie et d’anémie
aplastique
Hépatite immuno- 0,1-0,2% Avec propylthiouracile essen-
allergique tiellement
Cholestase Rare Avec carbimazole
Tableau 4. Effets secondaires des anti-thyroïdiens
de synthèse
Figure 1.Algorithme de prise en charge
TSH : thyréostimuline hormone.
TSH supprimée
T4 libre,T3 totaleq
Goitre homogène
non douloureux
Jeune femme
Examens
complé-
mentaires
et prise
en charge
Ultrasonographie
Selon clinique Anticorps
anti-récepteurs
TSH
• Ultrasonographie
ou scintigraphie
Carbimazole 15-30 mg
en deux prises
Contrôle de la T4 libre
et T3 totale toutes les
3-4 semaines jusqu’à
stabilisation de la dose
de carbimazole et des
valeurs de T4 libre et
T3 totale puis, si le
traitement est toujours
nécessaire, tous les
deux mois jusqu’à six
ou douze mois
Ensuite, essai de sevrage
du carbimazole
Si rechute, reprendre
le traitement et consi-
dérer le radio-iode
Doute
Non Oui
33985_764_768.qxp 2.4.2009 8:35 Page 4
Revue Médicale Suisse
www.revmed.ch
8 avril 2009 0
deuxième intention après les anti-thyroïdiens de synthèse.
En Suisse, on l’utilise généralement en seconde intention.
Un arrêt des anti-thyroïdiens de synthèse entre trois à sept
jours avant l’administration de radio-iode est nécessaire pour
maximiser son efficacité. Une scintigraphie thyroïdienne
est généralement effectuée avant le traitement, d’une part
pour confirmer la captation diffuse et augmentée, typique
de la maladie de Basedow, et, d’autre part, pour calculer
parfois la dose de radio-iode à administrer. En effet, celle-ci
peut être calculée en fonction de la captation et du volume
de la glande ou elle peut être arbitrairement fixée à une
dose standard de 15 à 20 millicuries, dose qui permet
d’obtenir environ 80% de succès. Le but du traitement est
d’induireune hypothyroïdie afin de prévenir la récidive de
la maladie de Basedow ; le succès est donc défini comme
l’absence de récurrence de la maladie qui correspond gé-
néralement à l’induction d’une hypothyroïdie. Il est à noter
que le traitement au radio-iode est évidemment contre-in-
diqué pendant la grossesse et par conséquent toute femme
préménopausée devrait effectuer un test de grossesse avant
le traitement. Une conception ne devrait être envisagée que
six à douze mois après un traitement à l’iode radioactif.
Les effets secondaires d’un traitement au radio-iode sont
une thyroïdite qui peut causer des douleurs au niveau du
cou et dans certains cas, une hyperthyroïdie transitoire. La
dose de radio-iode administrée dans la maladie de Basedow
n’a pas été associée à la survenue de cancers. Lorsque les
patients ont une ophtalmopathie de Basedow,un traite-
ment au radio-iode peut aggraver l’atteinte oculaire. Dans ce
cas-là, un traitement de corticostéroïdes est nécessaire et
une option chirurgicale est à envisager. Une prise en charge
pluridisciplinaire entre le généraliste, l’endocrinologue et
l’ophtalmologue est alors nécessaire.
Chirurgie
La thyroïdectomie est certainement le traitement le
moins utilisé. Il s’agit néanmoins d’une option thérapeuti-
que qui peut être très utile, particulièrement chez les
patients qui ont des effets secondaires sérieux des anti-
thyroïdiens de synthèse, des goitres importants ou des
nodules suspects de malignité, qui refusent le radio-iode
ou encore souhaitent un traitement rapide et définitif.11
Chez ces patients, un traitement à l’iode (solution de Lugol
ouiodure de potassium) est recommandé pendant une
semaine afin de diminuer la synthèse et la sécrétion des
hormones thyroïdiennes ainsi que la vascularisation de la
glande.
CONCLUSION
La prise en charge de la maladie de Basedow nécessite
un diagnostic précis ainsi qu’un traitement approprié. Néan-
moins, le diagnostic et le traitement sont relativement
simples. Le suivi dépend de la rapidité de la réponse et
de la survenue d’une récidive. En principe, un traitement
d’anti-thyroïdiens de synthèse est poursuivi entre douze et
dix-huit mois avec une tentative de sevrage et, si possible,
d’arrêt avant d’envisager un traitement de radio-iode si
une rémission ne survient pas. Le suivi devrait se fairees-
sentiellement par un dosage des hormones thyroïdiennes
périphériques toutes les trois semaines.
768 Revue Médicale Suisse
www.revmed.ch
8 avril 2009
1*Cooper DS. Hyperthyroidism. Lancet 2003;362:
459-68.
2Parma J, Duprez L, van Sande J, et al. Diversity and
prevalence of somatic mutations in the thyrotropin re-
ceptor and Gs-alpha genes as a cause of toxic thyroid
adenoma. JClin Endocrinol Metab 1997;82:2695-701.
3Holzapfel HP, Führer D, Wonerow P, et al.
Identification of constitutively activating somatic thyro-
tropin receptor mutations in a subset of toxic multi-
nodular goiters. J Clin Endocrinol Metab 1997;82:
4229-33.
4Pinducciu C, Borgonovo G, Arezzo A, et al. Toxic
thyroid adenoma : Absence of DNA mutations of the
TSH receptor and Gs alpha. Eur J Endocrinol 1998;
138:37-40.
5Conn JJ, Sebastian MJ, Deam D, et al.A prospective
study of the effect of nonionic contrast media on thy-
roid function.Thyroid 1996;6:107-10.
6*Harjai KJ, Licata AA. Effects of amiodarone on
thyroid function. Ann Intern Med 1997;126:63-73.
7Beck-Peccoz P, Brucker-Davis F, Persani L, et al.
Thyrotropin-secreting pituitary tumors. Endocr Rev
1996;17:610-38.
8** Brent GA. Clinical practice. Grave’s Disease. N
Engl J Med 2008;358:2594-605.
9** Cooper DS. Drug therapy.Antithyroid Drugs. N
Engl J Med 2005;352:905-17.
10 Abraham P
,Avenell A, Park CM, et al.A systematic
review of drug therapy for Graves’hyperthyroidism.
Eur J Endocrinol 2005;153:489-98.
11 Stalberg P
, Svensson A, Hessman O,Akerström G,
Hellman P
. Surgical treatment of graves’disease: Evi-
dence-based approach.World J Surg 2008;32:1269-77.
*àlire
** àlire absolument
Bibliographie
Implications pratiques
La maladie de Basedowest la cause la plus fréquente d’hy-
perthyroïdie chez la femme jeune
Le test diagnostique le plus spécifique est la mesure des anti-
corps anti-récepteurs à la TSH
Le traitement de choix consiste en l’administration d’anti-
thyroïdiens de synthèse et, en cas de non rémission ou de
récidive, de radio-iode
>
>
>
Les récidives surviennent le plus fréquemment dans les six pre-
miers mois après l’arrêt des traitements et sont inhabituelles
après deux ans.
Risque élevé de récidives en cas de :
• Hyperthyroïdie sévère
• Goitre important
• Valeurs de T3 très élevées par rapport à valeurs de T4
• Anticorps anti-récepteurs TSH élevés
TSH l1,0 mU/l sous traitement prolongé d’anti-thyroïdiens
Tableau 5. Rémissions et récidives
TSH : thyréostimuline hormone.
33985_764_768.qxp 2.4.2009 8:35 Page 5
1 / 5 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !