III - PEIP 2

publicité
Université Pierre et Marie Curie
Licence de Chimie – 2ème année (L2)
UPMC – Licence de Chimie
Année 2009-2010
Cours de Chimie Inorganique
LC205
Chapitre III. Chimie des éléments du bloc d
III.A. Généralités sur les éléments de transition
III.A.1. Définitions
Définition restrictive : un élément de transition est un élément qui possède une sous-couche d
ou f incomplète ;
Définition élargie : un élément de transition est un élément qui possède une sous-couche d ou
f incomplète, dans l’un de ses états d'oxydation usuels.
III.A.2. Configuration électronique des éléments d
[Ar]
3d
4s
[Kr]
4d
5s
[Xe]
4f
5d
6s
Sc
1
2
Y
1
2
La
0
1
2
Ti
2
2
Zr
2
2
Hf
14
2
2
V
3
2
Nb
4
1
Ta
14
3
2
Cr
5
1
Mo
5
1
W
14
4
2
Mn
5
2
Tc*
5
2
Re
14
5
2
Fe
6
2
Ru
7
1
Os
14
6
2
Co
7
2
Rh
8
1
Ir
14
7
2
Ni
8
2
Pd
10
0
Pt
14
9
1
Cu
10
1
Ag
10
1
Au
14
10
1
Zn
10
2
Cd
10
2
Hg
14
10
2
III.A.3. Caractères généraux des éléments d
• Ce sont des métaux ;
• Ils peuvent présenter de nombreux états d'oxydation dont certains négatifs ;
• Ils forment de nombreux complexes ;
• Ces complexes sont souvent colorés et paramagnétiques ;
• La configuration électronique d’un complexe d’un élément d est de la forme dn, avec n = G
- x, où G est le numéro du groupe et x le nombre d'oxydation (algébrique) du métal.
III.B. Classification des ligands
III.B.1. Bases de Lewis
Dans le cas des complexes des cations métalliques de degré d’oxydation moyen ou
élevé (complexes de Werner, cf. III.C.), la liaison métal–ligand (ou liaison de coordination)
est assurée par un (ou plusieurs) doublet(s) d'électrons apporté(s) par le ligand (liaison
dative) : le ligand est base de Lewis ; le cation métallique est acide de Lewis.
III.B.1.a. Ligands monodentes
Classification selon l'élément donneur :
• halogène : F-, Cl-, Br-, I-.
Exemples : [FeF6]3–, [FeCl4]–, [HgI4]2–…
• oxygène : H2O, OH-, RO-, O2–, O2, O2–, O22–, NO2–...
Exemples : [FeII(H2O)6]2+, [CrVIO4]2–, [CoIII(ONO)(NH3)5]2+
• soufre : S2-, R2S, RS-, SCN-....
Exemples : [MoVIS4]2–, [CoIII(CN)5(SCN)]3–
• azote : NH3, NH2-, NH2-, N3-, pyridine, NCS-, N2, NO, NO2-...
Exemples : [CoIII(NH3)6]3+, [OsVINCl5]2–, [RuII(N2)(NH3)5]2+, [CoIII(NCS)(NH3)5]2+,
[FeI(NO)(H2O)5]2+, [IrIII(NO)Cl2(PPh3)2]
• carbone : CN–, CH3–...
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
96
Exemples : [FeIII(CN)6]3-, [W(CH3)6]
Remarque : les ligands SCN- qui peut se lier par le soufre ou par l’azote, et NO2-, qui peut se
lier par l’oxygène ou par l’azote sont ambidentes. Ils peuvent de plus adopter des modes de
coordination en pont entre deux centres métalliques (cf. III.B.1.d.).
NB : l’atome donneur est souligné.
III.B.1.b. Ligands bidentes
• CH3COCHCOCH3- (acétylacétonate : acac). Exemples : [CrIII(acac)3],
• C2O42- (oxalate : ox). Exemples : [CrIII(ox)2(H2O)2]+, [CrIII(ox)3]3–
• H2NCH2CH2NH2 (éthylènediamine : en). Exemples : [CoIIICl2(en)2]+, [CoIII(en)3]3+...
• bipyridine (bpy). Exemple : [Ru(bpy)3]2+
• H2NCH2CO2- (glycinate : gly). Exemple : [Co(gly)3]
NB : l’ion glycinate se lie par l’atome d’azote et par un atome d’oxygène de la fonction
carboxylate.
III.B.1.c. Ligands multidentes
• NH(CH2CH2NH2)2 (dien). Exemple : [Co(dien)2]3+
• H2NCH2CH2NHCH2CH2NHCH2CH2NH2 (trien)
• Porphyrines (Por).
• (O2CCH2)2NCH2CH2N(CH2CO2)24- (éthylèdiaminetétra-acétate : edta).
Exemples : [CrIII(edta)(H2O)]–, [CoIII(edta)]–, [FeIII(edta)(H2O)]–. Le ligand edta est
pentadente dans le complexe [CrIII(edta)(H2O)]– (un groupe carboxylate est pendant) et
hexadente dans les complexes [CoIII(edta)]– (coordinence 6) [FeIII(edta)(H2O)]– (coordinence 7).
III.B.1.d. Ligands pontants
•
: [(CN)5Co-NC-Fe(CN)5]6• N2 : [(NH3)5RuIINNRuII(NH3)5]4+
• O22– : [(NH3)5CoIII(O2)CoIII(NH3)5]4+
• O2– : [(NH3)5CoIII(O2)CoIII(NH3)5]5+
• NO2- : [(NH3)4CoIII(µ-NH2)(µ-ONO)CoIII(NH3)4]4+
CN-
III.B.2. Acides de Lewis
La stabilisation des complexes des bas degrés d’oxydation des métaux de transition
exige des ligands qui soient non seulement des bases de Lewis mais de plus des acides de
Lewis afin de limiter la densité électronique sur le métal. Ces ligands disposent d’orbitales
vacantes accessibles (énergie suffisamment basse) et de symétrie adaptée. Le ligand
carbonyle, CO en est le prototype.
Exemples : [Cr0(CO)6], [Fe-II(CO)4]2-...
Remarque : NO+, CO, N2 et CN– sont isoélectroniques. La basicité de Lewis augmente dans
l’ordre : NO+ < CO < N2 < CN– tandis que l’acidité de Lewis diminue dans l’ordre : NO+ >
CO > N2 > CN–.
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
97
III.C. Théorie de Werner – Stéréochimie des complexes
III.C.1. Théorie de Werner
III.C.1.a. Concept de coordinence
• Données expérimentales concernant les complexes de cobalt(III) :
composition couleur
série
nombre d’ions Cl–
formulation actuelle
immédiatement
précipités par Ag+
[Co(NH3)6]3+, 3Cl2
CoCl3.6NH3 orange lutéo
3
.
CoCl3 5NH3 pourpre
purpuréo
2+
[CoCl(NH3)5] , 2Cl
CoCl3.4NH3 vert
praséo 1
trans+
[CoCl2(NH3)4] , Cl
CoCl3.4NH3 violet
violéo 1
cis-[CoCl2(NH3)4]+,
ClCoCl3.3NH3 bleu-vert
0
[CoCl3(NH3)3]
III.C.1.b. Concept de stéréochimie
• [CoCl2(NH3)4]2+ ne présente que deux isomères géométriques ;
• [Co(en)3]3+ et [Co(NO2)2(en)2]+ peuvent être dédoublés en inverses optiques.
Ces complexes ont une géométrie octaédrique.
• [PtCl2(NH3)2] présente deux isomères géométriques.
Ce complexe est plan-carré.
III.C.2. Stéréochimie des complexes de coordination
III.C.2.a. Coordinences et géométries courantes
Coordinence Polyèdre de coordination
Exemples
]-,
2
linéaire
[CuCl2]-, [Ag(NH3)2]+
4
[Ni(CO)4]
4
5
tétraèdre
[CrO4]2-, [MnO4]-, [FeCl4]-
plan-carré
bipyramide trigonale
5
pyramide à base carrée
6
octaèdre
3+
3[Cr(NH3)6] , [Cr(ox)3]
III.C.2.b. Stéréoisoméries
[Ni(CN)4]2-, [PtCl4]2[CuCl5]3-, [Ni(CN)5]3[Ni(CN)5]3-, [Co(CN)5]3[Cr(H2O)6]3+,
III.C.2.b.α. Définitions
• Stéréoisomères : molécules possédant les mêmes atomes, les mêmes séquences de liaisons
mais différant par leur arrangement dans l'espace.
• Enantiomères : un énantiomère est un stéréoisomère qui n'est pas superposable à son image
dans un miroir. Les énantiomères sont encore parfois appelés antipodes optiques, en raison de
leur action sur le plan de polarisation d'une onde plane polarisée rectilignement : l'un des
isomères fait tourner le plan dans un sens (+α) le second, dans l'autre (-α).
• Diastéréoisomères : ce sont des stéréoisomères qui ne sont pas des énantiomères.
• Asymétrique : qualifie une molécule dépourvue de tout élément de symétrie.
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
98
• Dissymétrique : qualifie une molécule dépourvue d'axe impropre Sn.
• Chiralité : un composé asymétrique ou dissymétrique est chiral (il ne peut pas être superposé
à son image dans un miroir). Une molécule est chirale lorsqu’elle ne possède ni plan de
symétrie ni centre d’inversion. Plus précisément une molécule est chirale à condition qu’elle
ne possède pas d’axe impropre d’ordre n (un axe impropre d'ordre n correspond à une ou
plusieurs répétitions de la séquence suivante : rotation de 2π/n suivie d'une réflexion par
rapport à un plan perpendiculaire à l'axe de rotation). Les complexes [Co(en)3]3+, cis-cis-cis[Co(CN)2(NH3)2(H2O)2]+ et [PtClBrI(py)(NO2)(NH3)] sont chiraux.
III.C.2.b.β. Complexes de coordinence 4 ou 6
• Complexes octaédriques
Type
stéréo
[Mabcdef]
30
[Ma2b2c2]
6
[Ma4b2]
3
[Ma3b3]
3
• Complexes plans-carrés
Type
stéréo
[Mabcd]
3
Isomères
diastéréo
15
5
2
cis, trans
2
mer, fac
Isomères
diastéréo
3
[Ma2b2]
Exemples
énantio
30
2
2
[Pt(Br)(Cl)(I)(NO2)(NH3)(py)]
[Co(CN)2(NH3)2(H2O)2]+
[PtCl2(NH3)2(py)2]2+
[CoCl2(NH3)4]+
2
[IrCl3(PPh3)3]
Exemples
énantio
0
2
2
0
cis, trans
NB : a, b, c, d, e, f désignent des ligands monodentes.
[Pt(NH3)(NH2OH)(py)(NO2)]+
[PtCl2(NH3)2]
III.D. Nomenclature des complexes de coordination
III.D.1. Formules
Dans les formules, la règle veut que l'on place d'abord le symbole du métal ; les
ligands ioniques suivent, puis les neutres, et la formule du complexe est enfermée entre
crochets.
Ex : [CoCl(NH3)5]2+, [Fe(CN)6]3III.D.2. Noms des ligands
III.D.2.a. Les noms des ligands anioniques, qu'ils soient minéraux ou
organiques, finissent en -o : -ure devient uro ; -ate devient -ato.
Ex : nitrure → nitruro, acétate → acétato
L'usage courant comporte toutefois de nombreuses exceptions :
Ex : chlorure → chloro, cyanure → cyano, oxyde → oxo
III.D.2.b. Les noms des ligands neutres sont conservés :
Ex : 1,10-phénanthroline, éthylènediamine, pyridine
Il y a toutefois 4 exceptions importantes :
H2O → aqua, NH3 → ammine, CO → carbonyle, NO → nitrosyle
III.D.2.c. Les noms des ligands cationiques sont conservés.
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
99
III.D.3. Préfixes
III.D.3.a. Préfixes multiplicateurs
mono, di, tri, tétra, penta, hexa, hepta, octa, nona,...
III.D.3.b. Préfixes structuraux
Ils donnent des informations structurales et sont écrits en italique avant le nom
dont on les sépare par un tiret.
Ex : caténa, cyclo, octaédro, cis, trans, mer, fac
III.D.4. Noms des complexes
Les noms des ligands apparaissent avant ceux du métal, et dans l'ordre alphabétique,
sans tenir compte de la charge et sans tenir compte du préfixe multiplicateur indiquant le
nombre de ligands. L'état d'oxydation du métal est indiqué en chiffre romain entre parenthèses
après le nom. La terminaison -ate est utilisée lorsque le complexe est anionique. Le nom du
métal est inchangé lorsque le complexe est neutre ou cationique.
Ex :
[CoCl(NH3)5]Cl2
[RuCl3(py)3]
K4[Fe(CN)6]
[(NH3)5Co-O-O-Co(NH3)5]4+
chlorure de pentamminechlorocobalt(III)
fac-trichlorotris(pyridine)ruthénium(III)
hexacyanoferrate(III) de potassium
µ-peroxobis[pentamminecobalt(III)]
III.E. Théorie du champ cristallin
III.E.1. Levée de dégénérescence des orbitales d
La théorie du champ cristallin est un modèle purement électrostatique qui prend en
compte la répulsion entre les électrons d du centre métallique et les électrons des ligands. Au
départ, les ligands sont éloignés à l’infini de l’ion métallique ; lorsqu’on les rapproche,
l’attraction électrostatique assure la stabilité du complexe. Toutefois, les orbitales d du métal
sont déstabilisées par la répulsion exercée par les électrons des ligands. Mais elles ne le sont
pas toutes de la même manière : alors que dans l'ion libre (symétrie sphérique) les 5 orbitales
d sont dégénérées, il n'en est donc plus de même dans un complexe.
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
100
Représentation des orbitales d (cf. chapitre I, p. 5) et de leur interaction avec des ligands
disposés aux sommets d’un octaèdre dont le centre est occupé par l’ion métallique. Les
ligands sont représentés par des charges partielles négatives ; les axes Ox, Oy, Oz sont choisis
selon les diagonales de l’octaèdre
III.E.1.a. Complexes octaédriques [ML6]
Les ligands sont placés sur les axes x, y et z. L'examen des orbitales d (cf.
chapitre I, p. 5) révèle que l'orbitale dx2-y2 dont les lobes pointent vers les ligands, est
davantage déstabilisée que l'orbitale dxy, dont les lobes pointent entre les ligands. Il est facile
de voir que les 3 orbitales dxy, dxz et dyz ont la même orientation relative par rapport aux
ligands et qu'elles subissent donc le même effet. Si l'on se souvient que l'orbitale dz2 est une
combinaison linéaire des orbitales dz2-x2 et dz2-y2, il devient clair que l'orbitale dz2 est
déstabilisée de la même façon que l'orbitale dx2-y2. Le champ exercé par les ligands (champ
cristallin) lève donc la dégénérescence des orbitales d. Dans un complexe octaédrique, les 5
orbitales d se séparent en deux groupes, les orbitales dxy, dyz et dxz (t2g) d'une part, les
orbitales dx2-y2 et dz2 (eg) d'autre part. Si l’on représente par Δo la différence d’énergie entre
les deux groupes d’orbitales (paramètre du champ des ligands) et si l’on choisit le barycentre
des orbitales d dans le complexe (il s’agit du niveau des orbitales d dans un complexe
hypothétique de symétrie sphérique) les énergies des orbitales t2g et eg sont respectivement
égales à –0,4Δo et +0,6Δo.
III.E.1.b. Complexes tétraédriques [ML4]
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
101
Dans un complexe tétraédrique, les orbitales d se séparent en deux groupes,
comme dans les complexes octaédriques, mais les orbitales dxy, dyz et dxz (t2) sont cette fois
davantage déstabilisées que les orbitales dx2-y2 et dz2 (e). Si l’on représente par Δt la
différence d’énergie entre les deux groupes d’orbitales (paramètre du champ des ligands) et si
l’on choisit le barycentre des orbitales d dans le complexe (il s’agit du niveau des orbitales d
dans un complexe hypothétique [ML4] de symétrie sphérique) les énergies des orbitales e et t2
sont respectivement égales à –0,6Δt et +0,4Δt.
Remarque : pour un même métal, M, un même ligand, L et une même distance métal-ligand,
on peut établir la relation : Δt = (4/9)Δo.
III.E.1.c. Abaissement de symétrie : passage de l'octaèdre au plan-carré
Si partant d’un complexe octaédrique [ML6] l'on éloigne progressivement les deux
ligands situés sur l’axe z, la répulsion des électrons des ligands s’exerce moins sur les
orbitales dxz et dyz que sur l’orbitale dxy et sur l’orbitale dz2 que sur l’orbitale dx2-y2. Il s’ensuit
une levée de dégénérescence supplémentaire. Lorsque les ligands sont éloignés à l’infini
(passage au plan carré), l’orbitale dz2 passe au-dessous de dxy.
Ces résultats se traduisent par les diagrammes suivants :
ion dans un champ
de symétrie
octaédrique
dz 2
ion dans un champ
de symétrie D 4h
eg
dx 2 -y 2
dxz dxy dyz
t2g
dx 2 -y 2
dz 2
dxy
dyz dxz
δ2/2
−δ 2/2
−2δ 1/3
−δ 1/3
III.E.1.d. Série spectrochimique
Pour un métal donné, on peut classer les ligands par valeur croissante de Δ et pour un
ligand donné on peut classer les métaux.
• Influence du ligand :
I- < Br- < S2- < SCN- < Cl- < F- < OH- < C2O42- < H2O < NCS- < NH3 < py ~ en ~ bipy ~
phen < NO2- < CH3- < CN- < CO
Cette série porte le nom de série spectrochimique car le paramètre ∆ est le plus souvent
extrait des spectres UV-visible. Une telle série ne peut s’expliquer dans le cadre d’un modèle
électrostatique. En revanche elle s’explique à l’aide de la théorie des orbitales moléculaires
(cf. LC 304). On se bornera ici à remarquer que Δ est faible pour les ligands donneurs π (F–,
O2–...), élevé pour les ligands accepteurs π (CO, CN-).
• Influence du métal :
état d'oxydation : M(II) < M(III) < M(IV)
série : 1 < 2 < 3 (ex : Ni < Pd < Pt)
III.E.2. Energie de stabilisation due au champ cristallin
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
102
III.E.2.a. Définition
L'énergie de stabilisation d’un complexe [MLn] est la différence entre l'énergie
du complexe réel et celle d’un complexe hypothétique de même composition mais de
symétrie sphérique. Elle est donnée par l'expression :
ESCC = ΣiniEi + δP
où ni est le nombre d'électrons dans l'orbitale d d'énergie Ei ; δ est la différence entre les
nombres de paires d’électrons d dans le complexe réel et dans le complexe hypothétique ; P
est l'énergie d'appariement des électrons.
Oh
Td
dn
n
champ faible
champ fort
tjrs champ faible
0,10
0
0
0
-0,4∆o
-0,4∆o
-0,267∆o
1
-0,8∆o
-0,8∆o
-0,534∆o
2
-1,2∆o
-1,2∆o
-0,356∆o
3
-1,6∆o + P
-0,178∆o
4
-0,6∆o
-2,0∆o + 2P
5
0
0
-0,4∆o
-2,4∆o + 2P
-0,267∆o
6
-0,8∆o
-1,8∆o + P
-0,534∆o
7
-1,2∆
-1,2∆
-0,356∆o
8
o
o
9
-0,6∆o
-0,6∆o
-0,178∆o
Variation de l'énergie de stabilisation due au champ cristallin (ESCC, en unités de Δo) en
fonction du nombre d'électrons d pour les complexes octaédriques et tétraédriques à champ
faible
Δο
Variation de l’ESCC pour les complexes octaédriques à champ faible – Représentation
graphique
III.E.3. Propriétés optiques
La couleur de nombreux complexes de coordination trouve son origine dans des
transitions électroniques entre niveaux d’énergie associés à la configuration dn du complexe
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
103
(transitions d-d). Ainsi, le spectre d’absorption UV-visible du complexe [Ti(H2O)6]3+ en
solution aqueuse présente une bande large centrée à 493 nm (soit 20300 cm-1) que l’on
attribue à la transition de l’électron d du niveau t2g au niveau eg. L’intensité de la transition
(exprimée par la valeur du coefficient d’absorption) est faible car la transition ne satisfait pas
à certaines règles de sélection (cf. LC 312). Dans le cas présent, l’énergie de la transition
fournit directement la valeur de ∆O. La détermination de ∆ à partir du spectre d’absorption
n’est pas toujours immédiate lorsque le cation métallique possède plusieurs électrons d, mais
elle reste toujours possible.
Remarque : la couleur de certains complexes trouve son origine dans des transitions
différentes des transitions d-d, par exemple des transitions de transfert de charge
ligand→métal (Exemples : [Fe(NCS)(H2O)5]2+, [MnO4]–…) ou des transitions internes aux
ligands lorsque ceci sont eux-mêmes colorés (cf. LC 312).
III.E.4. Propriétés magnétiques
• Complexes octaédriques : deux distributions électroniques sont possibles pour les
configurations d4, d5, d6 et d7.
Δo < P complexes haut-spin (champ faible)
Δo > P complexes bas-spin (champ fort)
• Complexes tétraédriques : deux distributions électroniques sont en principe possibles pour
les configurations d3, d4, d5 et d6, mais la condition Δt > P n’est jamais vérifiée de sorte que
tous les complexes tétraédriques connus sont haut-spin.
III.E.5. Enthalpies d’hydratation
L’enthalpie d’hydratation correspond à la réaction :
M2+(g) + 6 H2O(l) → [M(H2O)6]2+(aq)
M2+
Z
N (nbre d’électrons d)
-∆H, kJ mol-1
Ca2+
20
0
2466
Ti2+
22
2
2732
V2+
23
3
2778
Cr2+
24
4
2795
Mn2+
25
5
2736
Fe2+
26
6
2845
Co2+
27
7
2916
Ni2+
28
8
2996
Cu2+
29
9
3000
Zn2+
30
10
2933
Si l’on se limite aux ions Ca2+, Mn2+ et Zn2+, on constate que l’enthalpie d’hydratation
augmente (en valeur absolue) régulièrement de Ca2+ à Zn2, en accord avec l’augmentation de
la charge nucléaire effective. Pour les autres ions, elle est (en valeur absolue) plus élevée
qu’on ne l’attend. Si l’on corrige des effets du champ cristallin en soustrayant la contribution
de l’ESCC, on obtient une courbe à peu près régulière.
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
104
Variation de l'enthalpie d'hydratation (kJ mol-1) des cations M2+ de la 1ère série de transition
(courbe pointillée : valeurs corrigées de l'ESCC) ; d'après K.F. Purcell et J.C. Kotz,
Inorganic Chemistry, Saunders, 1977, p. 554.
III.E.6. Stabilité des complexes
III.E.6.a. Définitions
Mz+ + nL → [MLn]z+
βn =
[MLn z+]
= K1 K2 ... Kn
[Mz+][L]n
ΔG0 = ΔH0 - TΔS0 = -RT ln(βn)
Les deux facteurs, enthalpique et entropique doivent être pris en compte.
L'effet chélate est avant tout un effet entropique : la chélation entraîne une augmentation du
nombre de particules indépendantes en solution, alors que les réactions de substitution par des
ligands monodentes ne s'accompagnent d'aucun changement du nombre des particules.
L'importance pratique de cet effet est considérable : la majorité des réactifs utilisés en analyse
complexométrique sont des ligands multidentes (ex : edta) ; dans les biomolécules, la plupart
des sites de fixation des cations métalliques sont des ligands chélatants ou macrocycliques.
III.E.6.b. Tendances générales
Le comportement des cations métalliques du bloc s (groupes 1 et 2) et des cations de
transition pauvres en électrons, peut être rationalisé à l'aide d'un modèle électrostatique simple
: les complexes formés sont d'autant plus stables que l'état d'oxydation du métal est plus élevé
et que le rayon du cation est plus petit.
• Li+ > Na+ > K+
• Mg2+ > Ca2+ > Sr2+
• Al3+ > Sc3+ > Y3+
4+
3+
2+
+
• Ti > Sc > Ca > K
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
105
Les exceptions apparentes peuvent s'expliquer par le rôle de l'ESCC et par celui de la
covalence dont l'importance augmente lorsque le nombre d'électrons d augmente.
En l'absence de toute levée de dégénérescence des orbitales d, les constantes de
formation des complexes formés par les ions Mz+ appartenant à une même série de transition
devraient augmenter régulièrement en fonction de Z puisque la charge nucléaire effective Zeff
augmente et que le rayon de l’ion diminue. Expérimentalement, on observe les mêmes
irrégularités que pour les enthalpies d’hydratation et l’interprétation est la même : après
correction des effets du champ des ligands, on constate que logKn augmente régulièrement en
fonction de Z.
La tendance est illustrée en page suivante par l’évolution des constantes de formation
des complexes [M(en)(H2O)]2+.
Variation de l’enthalpie standard de formation pour les complexes des cations M2+ avec
l'éthylènediamine. Comparaison des valeurs expérimentales et prévues par la théorie du
champ cristallin.
Remarque : les complexes de Cu(II) présentent une anomalie ; en effet les complexes avec 1
et 2 ligands (en) sont plus stables, alors que le complexe (en)3 est moins stable, que ne le
prévoit l’extrapolation entre Ni(II) et Zn(II). Ces anomalies s'expliquent par la déformation de
l'octaèdre de coordination (effet Jahn-Teller). L'effet Jahn-Teller affecte principalement les
complexes octaédriques de configuration d4 (haut-spin) ou d9 (cf. LC 304).
III.E.7. Réactivité des complexes de coordination
Il est essentiel de faire la distinction entre les aspects cinétiques et les aspects thermodynamiques. Selon
la valeur de sa constante de formation (thermodynamique), un complexe est stable ou instable. Selon la constante
de vitesse de ses réactions de substitution, un complexe est labile (réactions rapides) ou inerte (réactions lentes,
nécessitant au moins une minute, parfois beaucoup plus).
L’on se bornera ici à considérer le cas des réactions de type dissociatif (deux autres
mécanismes, respectivement de type interchange et de type associatif, ont été identifiés, cf. LC
312). C’est le cas de la majorité des réactions de substitution des complexes (octaédriques) de
cobalt(III). Selon que l’intermédiaire de type pyramide à base carrée formé par détachement
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
106
du groupe partant, se réarrange ou non en bipyramide trigonale, il y a rétention ou non de la
configuration.
Les différences de réactivité selon le métal peuvent s’expliquer à l'aide de la théorie du
champ cristallin : le complexe initial (i) et l'intermédiaire (int) sont l'un et l'autre stabilisés par
le champ cristallin. Lorsque l'intermédiaire est moins stabilisé que ne l'est l'état initial, le
complexe est peu réactif. La différence ESCC(int) - ESCC(i) est appelée énergie d'activation
due au champ cristallin (EACC).
Calcul de l'EACC dans le cas où l'intermédiaire est une pyramide à base carrée (on suppose
que le complexe initial et le complexes intermédiaire ont le même état de spin).
n
0, 5, 10
1, 6
2, 7
3, 8
4, 9
4
5
6
7
ESCC(i) en unité Δo
haut-spin
bas-spin
0
0
- 0,400
- 0,800
- 1,200
- 0,600
- 1,600
- 2,000
- 2,400
- 1,800
ESCC(int) en unité Δo
haut-spin
bas-spin
0
0
- 0,457
- 0,914
- 1,000
- 0,914
- 1,457
- 1,914
- 2,000
- 1,914
EACC en unité Δo
haut-spin
bas-spin
0
0
- 0,057
- 0,114
+ 0,200
- 0,314
+ 0,143
+ 0,086
+ 0,400
- 0,114
On explique ainsi que la réactivité décroît dans l'ordre :
d5 (bas-spin) > d4 (bas-spin) > d8, d3 > d6 (bas-spin)
inertes.
Les complexes de chrome(III), de cobalt(III) et de platine(IV) sont particulièrement
LC 205 – Année 2013-14 – Chapitre III
107
Téléchargement