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PHARMACEUTIQUES - SEPTEMBRE 2009
En 2009, le marché mondial du
médicament enregistrera une
croissance relativement dyna-
mique de son chiffre d’affaires,
mais loin, bien loin des taux à deux
chiffres affichés entre 1999 et 2003.
A l’origine de ces prévisions d’IMS
Health, on retrouve une industrie en
profonde mutation, confrontée à des
enjeux de taille : conditions d’accès aux
marchés renforcées, perte de brevets,
maladies complexes à traiter, augmen-
tation des coûts de R&D, nouveau
paradigme scientifique induit par la
connaissance du génome… L’industrie
pharmaceutique se réorganise et les be-
soins en compétences évoluent.
Nouveau modèle
de management
L’innovation – dans la recherche, dans
son ciblage, dans son mode d’organi-
sation est plus que jamais le facteur
clé de succès des entreprises pharma-
ceutiques. Avec plus de 50 % des -
dicaments en développement issus des
biotechnologies, les laboratoires sont
conduits à assimiler progressivement
les modes opératoires induits par les
biotech. Le développement de la re-
cherche sur des zones thérapeutiques
plus ciblées et spécialisées incite les big
pharma à s’adapter à la pluridisciplina-
rité du processus d’innovation.
Les stratégies organisationnelles qui en
découlent sont multiples. Certaines
sont déjà très mobilisées par les entre-
prises comme la participation plus ac-
tive à des pôles de compétitivité santé
pour faciliter la synergie entre univer-
sités, laboratoires publics, CHU, start-
up… ou encore les rachats, coopéra-
tions et investissements dans les
sociétés de biotechnologie.
Une autre, en revanche,
traduit un fait nou-
veau. La mutation
du secteur est dé-
sormais en marche
à l’intérieur même
des frontières de
lentreprise. Ainsi,
nous assistons à une
réorganisation interne
progressive des laboratoires,
avec l’abandon des structures de
décisions verticales au profit de struc-
tures dites matricielles ou transversa-
les : le modèle des business units (BU)
tend à disparaître.
Modèle de « parties
prenantes »
Les nouvelles matrices mises en pla-
ce permettent de valoriser l’expertise
scientifique du laboratoire en coordon-
nant des fonctions multiples autour
d’un domaine thérapeutique précis :
R&D, marketing, ventes, produc-
tion, affaires règlementaires gravitent
conjointement autour d’un projet. Ce
modèle de « parties prenantes » permet
d’être au plus près des besoins du sys-
tème de soins et des acteurs spécifique-
ment identifiés sur une aire thérapeu-
tique donnée, l’enjeu étant d’accéder
le plus rapidement possible au marché
(proposer un produit nouveau,
obtenir le remboursement,
l’assessment (évaluation)
des autorités sanitaires,
l’adhésion des leaders
d’opinion comme les
médecins, les phar-
maciens et les associa-
tions de patients… ).
Nouveau type de
manager
La complexité croissante des
disciplines scientifiques, l’environ-
nement règlementaire et concurren-
tiel, la réorganisation matricielle des
entreprises impliquent la recherche
d’un nouveau type de manager : créa-
tif, audacieux, éthique, le nouveau
manager doit être performant sur les
aspects techniques de ses fonctions
(outils marketing par exemple) ; il
doit désormais être capable d’avoir
une vision globale de la stratégie de
l’entreprise et de son environnement.
Ainsi, le marketing stratégique évolue
pour intervenir de plus en plus tôt
dans le développement d’un produit
Nouveau business model
Quel impact
sur les métiers ?
Le secteur de la pharma change de modèle. La mutation du secteur est
désormais également en marche à l’intérieur même des frontières de
l’entreprise. Les nouvelles structures de décision induisent de nouveaux
métiers et modes opératoires.
PROSPECTIVE
Dans la
pharma,
les besoins
en compétences
évoluent
fortement
Spécial Métiers
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SEPTEMBRE 2009 - PHARMACEUTIQUES
et pour agir conjointement avec la
R&D sur son positionnement : études
de marché, rencontres avec les leaders
d’opinion (professionnels de santé, in-
dustriels, patients, payeurs…). Le but
est d’identifier les besoins médicaux
restés encore sans réponse, les perspec-
tives du marché, l’accès au marché, et
d’appréhender la concurrence. Ici, on
peut percevoir le développement très
important de métiers liés aux études
de marchés et aux études économi-
ques.
Communication indirecte
Pour ce qui est du marketing opé-
rationnel, les nouvelles technologies
(Internet, e-learning, e-detailling, etc.)
multiplient les services à proposer aux
médecins et pharmaciens. La commu-
nication indirecte vers le patient, deve-
nu acteur de sa santé, devient un atout
pour la commercialisation d’un pro-
duit. Internet y joue un rôle prépon-
dérant. Pour sa part, la force de vente
est repensée au travers de la Charte de
la visite médicale, visant un quadrilla-
ge terrain plus cibet parfois très en
amont du lancement du produit.
En termes de métiers, cela se traduit par
une montée en puissance des postes de
chargé de communication médicale,
médecin produit, médecingional ou
encore chef de projet en santé publi-
que. Les services d’études Sales Forces
Effectivness (SFE) sont mis au cœur de
la stratégie terrain. Enfin, le métier de
chef de produit sort de son isolement
pour assurer pleinement l’interface de
ces différentes fonctions. Son rôle de-
vient davantage celui d’un chef de pro-
jet. C’est d’ailleurs cette fonction, si
plébiscitée par les étudiants, qui carac-
térise le mieux la mutation des modes
de management.
Formations :
ne pas rater le virage !
Les formations doivent impérative-
ment anticiper et participer à l’évo-
lution en cours. Les organisations
matricielles impactent directement
les compétences attendues des jeunes
diplômés. Les entreprises recherchent
une nouvelle forme de performan-
ce dans leur organisation : celle-ci
se mesure certes aux compétences
techniques, mais aussi aux capacités
relationnelles et à l’aptitude à s’ins-
crire dans des projets transversaux.
On assiste ainsi à un recentrage des
entreprises sur les individus et plus
seulement les produits.
L’enseignement classique doit ainsi
muter vers des méthodes pédagogiques
plus opérationnelles et transversales,
initiant les futurs cadres au manage-
ment de projet et les familiarisant aux
différents enjeux du secteur : enjeux
scientifiques, d’éthique, de santé publi-
que, de maîtrise des dépenses et enjeux
de management stratégique. Il s’agit de
donner aux étudiants les clés de com-
préhension de la mutation du secteur
pharmaceutique, pour ne pas la subir
et pour y participer pleinement.
Par ailleurs, le parcours professionnel
des futurs cadres va évoluer et se struc-
turer autour de trois axes forts : l’inter-
nationalisation, la maîtrise de plusieurs
segments de marché (biotech/produits
éthiques/OTC, génériques/biosimilai-
res, ville/hôpital), et le management de
projet. Les formations doivent donner
cette vision à 360° de l’industrie de
la santé : les étudiants doivent impri-
mer les tendances de l’environnement
avant de les exprimer dans leurs futures
fonctions. Les professionnels doivent
retrouver ici leur place dans l’enseigne-
ment et la transmission des expérien-
ces et des connaissances. C’est en tout
cas avec du recul et une réelle prise de
conscience vis-à-vis des échéances stra-
tégiques à venir que nos étudiants se-
ront en mesure d’être performants. n
Céline Soulas
Docteur en Economie
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