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l’évolution de la symptomatologie dépressive et la concor-
dance de la prise en charge avec les recommandations profes-
sionnelles. Les auteurs démontrent que plus les patients sont
impliqués dans les décisions médicales les concernant,
meilleure est l’évolution clinique mais aussi la concordance
des soins reçus avec les recommandations professionnelles.
Dans cette étude, une relation soignant-soigné qui intè-
gre ce partage d’information, y compris dans le domaine du
choix thérapeutique, améliore tant l’évolution clinique du
patient déprimé que la qualité du soin prodigué par le
médecin (mesuré par la correspondance aux recommanda-
tions professionnelles). Ceci souligne une fois de plus l’im-
portance de l’interaction.
Schwenk et al. [8], dans l’étude évoquée précédem-
ment, soulignent que dans leur échantillon, 75 % des
patients préfèrent une approche de décision partagée pour
le choix du traitement. Les patients qui estiment avoir été
insufsamment informés, sont ceux qui présentent le plus
d’effets indésirables précoces mais aussi la moins bonne
observance au traitement.
Toutefois, a contrario, il faut souligner que 25 % des
patients semblent préférer une relation plus hiérarchisée
avec leur médecin, peut être plus rassurante.
Donc si la modalité
partenariale
semble plébiscitée et
présenter le plus d’intérêt pour la
qualité et l’efcacité des
soins
, il ne faut pas perdre de vue que, comme toute inte-
raction, la relation soignant-soigné reste idiosyncrasique.
Aspects spéciques dans la relation
médecin-malade
Dans cette relation, de nombreuses composantes ont un
rôle. Leur identication améliore l’analyse de la relation et
son utilisation pertinente dans la prise en charge.
Croyances du patient
Aikens et al. [1] ont exploré les divers aspects de la dépres-
sion chez 81 patients déprimés suivis en médecine géné-
rale. Ils montrent que l’observance au traitement est
fortement corrélée aux croyances (« beliefs ») du patient
concernant sa maladie et les thérapeutiques. Ces croyan-
ces sont basées sur l’équilibre perçu par le sujet déprimé
entre la nécessité du traitement et les soucis provoqués par
celui-là. Les auteurs proposent une typologie de 4 attitudes
différentes vis-à-vis du traitement :
scepticisme• indifférence• ambivalence• acceptation•
La recherche des
croyances du sujet en ce qui concerne
la maladie et le traitement
, en se basant éventuellement
sur une typologie de ce genre, est un des éléments qui doit
être pris en compte par le clinicien et contribuer à la qua-
lité de la relation soignant-soigné En effet les croyances ne
peuvent être modiées par la simple injonction, elles doi-
vent être évaluées de façon soigneuse pour être éventuel-
lement modiées.
Personnalité du médecin
Peu d’auteurs se sont penchés de façon systématique sur l’im-
portance de la personnalité du médecin dans les modalités de
relation avec les patients dans le cadre de la dépression.
Chapman et al. [2] ont mis en évidence le rôle de per-
sonnalité du médecin dans le type d’interaction observable
entre soignant et sujet déprimé. Quarante-six soignants
ont ainsi complété un questionnaire de personnalité, alors
que les caractéristiques de leur interaction, avec des
patients présentant soit une dépression soit un trouble de
l’adaptation, étaient évaluées.
Les praticiens présentant une personnalité « ouverte »
sont à la fois plus « performants » en terme d’exploration
clinique, mais aussi plus directifs pour l’utilisation des
recommandations professionnelles de prise en charge.
Les médecins les plus anxieux eux-mêmes, ont plus de
difculté à aborder les différentes facettes cliniques de la
maladie.
Il faut également noter que la durée d’exercice est un
facteur de pondération : en effet plus elle est longue
meilleure sera la capacité d’exploration clinique. Ce qui
souligne l’importance de l’expérience.
Comme on le voit, si en tant que soignant on semble se
bonier avec le temps,
l’identication de ses propres dif-
cultés
est un élément à prendre en compte car celles-ci
inuencent les capacités d’exploration clinique et de déci-
sion thérapeutique.
Intensité de la dépression
La sévérité de la dépression a un rôle sur la nature et la
qualité de la relation soignant-soigné.
Katon et al. [6] ont mené une étude chez 215 patients
déprimés traités soit de façon habituelle, soit dans le cadre
d’interventions pluridisciplinaires structurées. L’intervention
structurée pluridisciplinaire (associant médecin généraliste
et psychiatre) est supérieure en terme d’observance, d’ef-
cacité sur la symptomatologie dépressive mais aussi d’attitu-
des vis-à-vis des thérapeutiques antidépressives.
Chez les sujets présentant les formes les moins sévères
de dépression dans cet échantillon, cette intervention pluri-
disciplinaire n’est pas supérieure ni en terme de satisfaction
envers les soins ni en terme d’amélioration des symptômes.
Compte tenu de la nature de l’intervention pluridisci-
plinaire basée notamment sur le partage d’information
entre médecin et patient, on peut inférer de ces données
que les formes les plus sévères (en terme d’intensité symp-
tomatique) sont les plus sensibles à une relation soignant-
soigné partenariale. L’effet porte sur la symptomatologie,
mais aussi sur les attitudes envers les thérapeutiques et la
qualité perçue des soins.
Comme on le voit, les formes les plus sévères de dépres-
sion en termes d’intensité symptomatique,
justient d’autant
plus la mise en place d’une relation partenariale
qui favo-
rise la qualité de la prise en charge.
En conclusion, la relation soignant-soigné est, bien plus
que la connaissance technique, au cœur de la pratique
médicale. Chez les patients déprimés, une relation parte-
nariale basée sur l’échange ouvert d’informations, la prise