http://portaildoc.univ-lyon1.fr Creative commons : Paternité - Pas d’Utilisation Commerciale Pas de Modification 2.0 France (CC BY-NC-ND 2.0) http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) UNIVERSITE CLAUDE BERNARD - LYON 1 FACULTE DE PHARMACIE INSTITUT DES SCIENCES PHARMACEUTIQUES ET BIOLOGIQUES 2016 THESE n°36 THESE pour le DIPLOME D'ETAT DE DOCTEUR EN PHARMACIE présentée et soutenue publiquement le 30 mai 2016 par Mlle RIOU Anaëlle Née le 09 Septembre 1990 A Guilherand-Granges (07) ***** Les perturbateurs endocriniens dans les produits cosmétiques ***** JURY M. LOMBERGET Thierry, Maître de Conférences, Habilité à Diriger des Recherches Mme BOLZINGER Marie-Alexandrine, Professeur M. LEBLANC Michel, Docteur en Pharmacie RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) RIOU Anaëlle Les perturbateurs endocriniens dans les produits cosmétiques Th. D. Pharm., Lyon 1, 2016, 193 p. RÉSUMÉ Les perturbateurs endocriniens sont, à l’heure actuelle, accusés d’être nocifs pour la santé humaine. En effet, ils sont suspectés d’induire des cancers hormono-dépendants, des problèmes de fertilité ou encore des malformations génitales. Après quelques rappels sur le système endocrinien et les molécules susceptibles d’interagir avec celui-ci, ce travail recense différentes études et travaux les concernant afin de comprendre comment ils peuvent agir et quelles sont les conséquences sur la santé de l’homme. Dans un deuxième temps, une attention particulière a été portée aux perturbateurs endocriniens retrouvés dans les produits cosmétiques. Enfin, ce travail a voulu faire le lien entre pharmacie officinale et perturbateurs endocriniens via un questionnaire destiné aux pharmaciens officinaux : comment ceux-ci se positionnent-ils dans leur exercice par rapport à ce sujet d’actualité ? Quelles sont leurs connaissances dans ce domaine ? Quelles sont leurs attentes et celles de leurs patients ? A l’issu de cette enquête, et à la demande des professionnels de santé interrogés, une brochure d’information sur le sujet est proposée. MOTS CLÉS Perturbateurs endocriniens Produits cosmétiques Parabènes JURY M. LOMBERGET Thierry, Maître de Conférences, Habilité à Diriger des Recherches Mme BOLZINGER Marie-Alexandrine, Professeur M. LEBLANC Michel, Docteur en Pharmacie DATE DE SOUTENANCE Lundi 30 mai 2016 ADRESSE DE L’AUTEUR 12 rue de la solidarité – 69008 LYON RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) UNIVERSITE CLAUDE BERNARD LYON 1 • Président de l’Université • Présidence du Conseil Académique • Vice-Président du Conseil d’Administration • Vice-Président de la Commission Recherche • Vice-Président de la Formation et de la Vie Universitaire M. Frédéric FLEURY M. Hamda BEN HADID M. Didier REVEL M. Fabrice VALLEE M. Philippe CHEVALIER Composantes de l’Université Claude Bernard Lyon 1 SANTE • UFR de Médecine Lyon Est Directeur : M. Jérôme ETIENNE • UFR de Médecine Lyon Sud Charles Mérieux Directeur : Mme Carole BURILLON • Institut des Sciences Pharmaceutiques et Biologiques VINCIGUERRA Directrice : Mme Christine • UFR d'Odontologie Directeur : M. Denis BOURGEOIS • Institut des Techniques de Réadaptation Directeur : M. Yves MATILLON • Département de formation et centre de recherche en Biologie Humaine Directeur : Anne-Marie SCHOTT SCIENCES ET TECHNOLOGIES • Faculté des Sciences et Technologies Directeur : M. Fabien DE MARCHI • UFR de Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives (STAPS) Directeur : M. Yannick VANPOULLE • Ecole Polytechnique Universitaire de Lyon (ex ISTIL) Directeur : M. Pascal FOURNIER • I.U.T. LYON 1 Directeur : M. Christophe VITON • Institut des Sciences Financières et d'Assurance (ISFA) Directeur : M. Nicolas LEBOISNE • ESPE Directeur : M. Alain MOUGNIOTTE 3 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) ISPB – Faculté de Pharmacie Lyon LISTE DES DEPARTEMENTS PEDAGOGIQUES DEPARTEMENT PEDAGOGIQUE DE SCIENCES PHYSICO-CHIMIQUE ET PHARMACIE GALENIQUE • CHIMIE ANALYTIQUE, GENERALE, PHYSIQUE ET MINERALE Monsieur Raphaël TERREUX (Pr) Monsieur Pierre TOULHOAT (Pr - PAST) Madame Julie-Anne CHEMELLE (MCU) Monsieur Lars-Petter JORDHEIM (MCU-HDR) Madame Christelle MACHON (AHU) • PHARMACIE GALENIQUE -COSMETOLOGIE Madame Marie-Alexandrine BOLZINGER (Pr) Madame Stéphanie BRIANCON (Pr) Madame Françoise FALSON (Pr) Monsieur Hatem FESSI (Pr) Monsieur Fabrice PIROT (PU - PH) Monsieur Eyad AL MOUAZEN (MCU) Madame Sandrine BOURGEOIS (MCU) Madame Ghania HAMDI-DEGOBERT (MCU-HDR) Monsieur Plamen KIRILOV (MCU) Monsieur Damien SALMON (AHU) • BIOPHYSIQUE Monsieur Richard COHEN (PU –PH) Madame Laurence HEINRICH (MCU) Monsieur David KRYZA (MCU –PH - HDR) Madame Sophie LANCELOT (MCU - PH) Monsieur Cyril PAILLER-MATTEI (MCU-HDR) Madame Elise LEVIGOUREUX (AHU) DEPARTEMENT PEDAGOGIQUE PHARMACEUTIQUE DE SANTE PUBLIQUE • DROIT DE LA SANTE Monsieur François LOCHER (PU –PH) Madame Valérie SIRANYAN (MCU - HDR) • ECONOMIE DE LA SANTE Madame Nora FERDJAOUI MOUMJID (MCU - HDR) Madame Carole SIANI (MCU – HDR) Monsieur Hans-Martin SPÄTH (MCU) 4 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) • INFORMATION ET DOCUMENTATION Monsieur Pascal BADOR (MCU - HDR) • HYGIENE, NUTRITION, HYDROLOGIE ET ENVIRONNEMENT Madame Joëlle GOUDABLE (PU –PH) • INGENIERIE APPLIQUEE A LA SANTE ET DISPOSITIFS MEDICAUX Monsieur Gilles AULAGNER (PU –PH) Monsieur Daniel HARTMANN (Pr) • QUALITOLOGIE – MANAGEMENT DE LA QUALITE Madame Alexandra CLAYER-MONTEMBAULT (MCU) Monsieur Vincent GROS (MCU-PAST) Madame Audrey JANOLY-DUMENIL (MCU-PH) Madame Pascale PREYNAT (MCU PAST) • MATHEMATIQUES – STATISTIQUES Madame Claire BARDEL-DANJEAN (MCU-PH) Madame Marie-Aimée DRONNE (MCU) Madame Marie-Paule PAULTRE (MCU - HDR) DEPARTEMENT PEDAGOGIQUE SCIENCES DU MEDICAMENT • CHIMIE ORGANIQUE Monsieur Pascal NEBOIS (Pr) Madame Nadia WALCHSHOFER (Pr) Monsieur Zouhair BOUAZIZ (MCU - HDR) Madame Christelle MARMINON (MCU) Madame Sylvie RADIX (MCU -HDR) Monsieur Luc ROCHEBLAVE (MCU - HDR) • CHIMIE THERAPEUTIQUE Monsieur Roland BARRET (Pr) Monsieur Marc LEBORGNE (Pr) Monsieur Laurent ETTOUATI (MCU - HDR) Monsieur Thierry LOMBERGET (MCU - HDR) Madame Marie-Emmanuelle MILLION (MCU) • BOTANIQUE ET PHARMACOGNOSIE Madame Marie-Geneviève DIJOUX-FRANCA (Pr) Madame Marie-Emmanuelle HAY DE BETTIGNIES (MCU) Madame Isabelle KERZAON (MCU) 5 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Monsieur Serge MICHALET (MCU) • PHARMACIE CLINIQUE, PHARMACOCINETIQUE ET EVALUATION DU MEDICAMENT Madame Roselyne BOULIEU (PU –PH) Madame Magali BOLON-LARGER (MCU - PH) Madame Christelle CHAUDRAY-MOUCHOUX (MCU-PH) Madame Céline PRUNET-SPANO (MCU) Madame Catherine RIOUFOL (MCU- PH-HDR) DEPARTEMENT PEDAGOGIQUE DE PHARMACOLOGIE, PHYSIOLOGIE ET TOXICOLOGIE • TOXICOLOGIE Monsieur Jérôme GUITTON (PU –PH) Madame Léa PAYEN (PU-PH) Monsieur Bruno FOUILLET (MCU) Monsieur Sylvain GOUTELLE (MCU-PH) • PHYSIOLOGIE Monsieur Christian BARRES (Pr) Monsieur Daniel BENZONI (Pr) Madame Kiao Ling LIU (MCU) Monsieur Ming LO (MCU - HDR) • PHARMACOLOGIE Monsieur Michel TOD (PU –PH) Monsieur Luc ZIMMER (PU –PH) Monsieur Roger BESANCON (MCU) Monsieur Laurent BOURGUIGNON (MCU-PH) Madame Evelyne CHANUT (MCU) Monsieur Nicola KUCZEWSKI (MCU) Madame Dominique MARCEL CHATELAIN (MCU-HDR) • COMMUNICATION Monsieur Ronald GUILLOUX (MCU) • ENSEIGNANTS ASSOCIES TEMPORAIRES Monsieur Olivier CATALA (Pr-PAST) Madame Corinne FEUTRIER (MCU-PAST) Madame Mélanie THUDEROZ (MCU-PAST) DEPARTEMENT PEDAGOGIQUE DES SCIENCES BIOMEDICALES A • IMMUNOLOGIE 6 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Monsieur Jacques BIENVENU (PU –PH) Monsieur Guillaume MONNERET (PU-PH) Madame Cécile BALTER-VEYSSEYRE (MCU - HDR) Monsieur Sébastien VIEL (AHU) • HEMATOLOGIE ET CYTOLOGIE Madame Christine VINCIGUERRA (PU - PH) Madame Brigitte DURAND (MCU - PH) Monsieur Yohann JOURDY (AHU) • MICROBIOLOGIE ET MYCOLOGIE FONDAMENTALE ET APPLIQUEE AUX BIOTECHNOLOGIE INDUSTRIELLES Monsieur Patrick BOIRON (Pr) Monsieur Jean FRENEY (PU –PH) Monsieur Frédéric LAURENT (PU-PH-HDR) Madame Florence MORFIN (PU –PH) Monsieur Didier BLAHA (MCU) Madame Ghislaine DESCOURS (MCU-PH) Madame Anne DOLEANS JORDHEIM (MCU-PH) Madame Emilie FROBERT (MCU - PH) Madame Véronica RODRIGUEZ-NAVA (MCU-HDR) • PARASITOLOGIE, MYCOLOGIE MEDICALE Monsieur Philippe LAWTON (Pr) Madame Nathalie ALLIOLI (MCU) Madame Samira AZZOUZ-MAACHE (MCU - HDR) DEPARTEMENT PEDAGOGIQUE DES SCIENCES BIOMEDICALES B • BIOCHIMIE – BIOLOGIE MOLECULAIRE – BIOTECHNOLOGIE Madame Pascale COHEN (Pr) Monsieur Alain PUISIEUX (PU - PH) Madame Emilie BLOND (MCU-PH) Monsieur Karim CHIKH (MCU - PH) Madame Carole FERRARO-PEYRET (MCU - PH-HDR) Monsieur Boyan GRIGOROV (MCU) Monsieur Hubert LINCET (MCU-HDR) Monsieur Olivier MEURETTE (MCU) Madame Caroline MOYRET-LALLE (MCU –HDR) Madame Angélique MULARONI (MCU) Madame Stéphanie SENTIS (MCU) Monsieur Anthony FOURIER (AHU) 7 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) • BIOLOGIE CELLULAIRE Madame Bénédicte COUPAT-GOUTALAND (MCU) Monsieur Michel PELANDAKIS (MCU - HDR) • INSTITUT DE PHARMACIE INDUSTRIELLE DE LYON Madame Marie-Alexandrine BOLZINGER (Pr) Monsieur Daniel HARTMANN (Pr) Monsieur Philippe LAWTON (Pr) Madame Sandrine BOURGEOIS (MCU) Madame Marie-Emmanuelle MILLION (MCU) Madame Alexandra MONTEMBAULT (MCU) Madame Angélique MULARONI (MCU) Madame Valérie VOIRON (MCU - PAST) • Assistants hospitalo-universitaires sur plusieurs départements pédagogiques Madame Florence RANCHON • Attachés Temporaires d’Enseignement et de Recherche (ATER) Madame Charlotte BOUARD (86ème section) Madame Laure-Estelle CASSAGNES (85ème section) Monsieur Karim MILADI (85ème section) Madame Laurence PAGES (87 ème section) Pr : Professeur PU-PH : Professeur des Universités, Praticien Hospitalier MCU : Maître de Conférences des Universités MCU-PH : Maître de Conférences des Universités, Praticien Hospitalier HDR : Habilitation à Diriger des Recherches AHU : Assistant Hospitalier Universitaire PAST : Personnel Associé Temps Partiel 8 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Remerciements Merci à Monsieur Thierry Lomberget, pour son accompagnement dans la réalisation et l’aboutissement de ce travail de thèse. Merci à Madame Marie-Alexandrine Bolzinger, pour m’avoir fait l’honneur d’accepter la présidence de mon jury. Merci à Monsieur Michel Leblanc, pour son soutien en tant que membre de jury. Merci à Madame Valérie Ducharne et à son groupement Giphar, pour leur participation dans la réalisation de mon questionnaire. Merci à mes parents et ma sœur, pour leur éternel soutien. Merci à Gaspard, Maryne, Charleyne, Camille et à Alixia pour leur soutien chacun à leur manière. 9 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Table des matières LISTE DES ABREVIATIONS ..................................................................................................... 15 LISTE DES FIGURES .................................................................................................................. 19 LISTE DES TABLEAUX .............................................................................................................. 22 INTRODUCTION GENERALE .................................................................................................. 23 CHAPITRE 1 : LE SYSTEME ENDOCRINIEN ....................................................................... 24 I. Définitions ..................................................................................................................... 24 II. Les glandes endocrines ................................................................................................... 26 1. L’hypothalamus.................................................................................................................... 26 2. L’hypophyse ......................................................................................................................... 28 3. L’épiphyse ............................................................................................................................ 30 4. La thyroïde ........................................................................................................................... 31 5. Les glandes parathyroïdiennes ............................................................................................. 33 6. Le thymus ............................................................................................................................. 34 7. Les glandes surrénales .......................................................................................................... 35 7.1. Les hormones et leurs différents rôles .......................................................................... 35 7.1.1. Les hormones corticosurrénales ........................................................................... 35 7.1.2. Les hormones médullosurrénales ......................................................................... 37 8. Le pancréas........................................................................................................................... 37 9. Les ovaires ........................................................................................................................... 38 10. Les testicules .................................................................................................................... 40 III. La chimie des hormones ................................................................................................. 41 1. Les mécanismes d’action des hormones .............................................................................. 43 1.1. Comment agissent les hormones hydrophiles ?............................................................ 43 1.2. Comment agissent les hormones lipophiles ?............................................................... 44 CHAPITRE 2 : LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS OU PE ..................................... 46 I. Définition ....................................................................................................................... 47 II. La naissance du concept de PE : la déclaration de Wingspread ......................................... 48 1. Quels ont été les objectifs de cette conférence ? .................................................................. 48 2. Quelles en ont été les conclusions ? ..................................................................................... 49 III. Les différentes classes de PE ........................................................................................... 49 IV. Multipotents et omniprésents ........................................................................................ 51 10 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 1. 2. 3. 4. V. Utilisation des perturbateurs endocriniens ........................................................................... 51 Dans l’environnement .......................................................................................................... 51 Dans le corps humain ........................................................................................................... 53 Les polluants organiques persistants .................................................................................... 54 Leurs actions .................................................................................................................. 56 VI. Des effets suspectés mais non avérés ............................................................................. 58 1. Qu’observe-t-on ? ................................................................................................................. 58 1.1. Chez les animaux ......................................................................................................... 58 1.2. Chez l’homme/la femme .............................................................................................. 62 1.3. Chez les travailleurs exposés aux PE ........................................................................... 65 1.3.1. Les salariés du secteur de l’industrie pharmaceutique ......................................... 65 1.3.1.1. Production d’hormones stéroïdiennes.............................................................. 65 1.3.1.2. Fabrication de corticostéroïdes .......................................................................... 66 1.3.2. Les agriculteurs manipulant les pesticides ........................................................... 67 1.3.3. Les applicateurs de pesticides .............................................................................. 68 VII. Leurs particularités ......................................................................................................... 69 1. Absence de consensus sur la définition ................................................................................ 69 2. Effet faible dose / Effet non monotone – courbe en U ......................................................... 70 3. Effet cocktail ........................................................................................................................ 71 4. Fenêtre d’exposition / délai de latence ................................................................................. 72 5. Effets transgénérationnels .................................................................................................... 75 5.1. La première preuve de cet effet transgénérationnel : le DES ....................................... 76 5.2. Le Vinclozoline ............................................................................................................ 76 6. La bioaccumulation .............................................................................................................. 77 7. La complexité des mécanismes et récepteurs impliqués ...................................................... 78 VIII. Les cas avérés ou qui font réfléchir ................................................................................. 79 1. Le diéthylstilbestrol ou DES ................................................................................................ 79 2. Le Chlordécone aux Antilles ................................................................................................ 79 IX. Méthodes d’évaluation des PE ........................................................................................ 80 1. Tests in vitro ......................................................................................................................... 82 1.1. Test de liaison au récepteur .......................................................................................... 82 1.2. Croissance des cellules MCF-7 ou ZR-75 .................................................................... 83 1.3. La transfection de cellules humaines............................................................................ 83 1.4. Test sur des levures recombinantes .............................................................................. 83 1.5. Test de stéroïdogénèse sur des cellules H295R............................................................ 83 1.6. Test de l’activité de l’aromatase ................................................................................... 84 2. Tests in vivo.......................................................................................................................... 84 2.1. Test utérotrophique ...................................................................................................... 84 2.2. Test Hershberger .......................................................................................................... 84 2.3. Test OCDE 407 ............................................................................................................ 84 11 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 2.4. Synthèse de la vitellogénine ......................................................................................... 85 2.5. Le sexe des tortues ....................................................................................................... 85 2.6. Test pubertaire .............................................................................................................. 85 2.7. Etudes de toxicité subchroniques ................................................................................. 85 2.8. Etudes de toxicité à long terme (OCDE 414, 415, 416…) sur 12 ou 24 mois ............. 85 2.9. Etudes de toxicité de la reproduction ........................................................................... 85 3. Les tests in silico .................................................................................................................. 86 CHAPITRE 3 : LES COSMETIQUES ........................................................................................ 87 I. Définition ....................................................................................................................... 87 II. Règlementation ............................................................................................................. 87 1. Etiquetage ............................................................................................................................. 87 2. Ingrédients ............................................................................................................................ 88 3. Conditions de mise sur le marché ........................................................................................ 90 4. La surveillance du marché cosmétique ................................................................................ 90 5. Publicité, allégations et labels .............................................................................................. 91 5.1. La publicité et les allégations ....................................................................................... 91 5.2. Les labels ...................................................................................................................... 92 CHAPITRE 4 : LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS DANS LES PRODUITS COSMETIQUES ....................................................................................................................................................... 94 I. Les phtalates .................................................................................................................. 94 II. Les parabènes ................................................................................................................ 97 III. Les filtres et absorbeurs UV ...........................................................................................104 1. Les cinnamates avec le méthoxycinnamate d’éthylhexyle ou OMC.................................. 104 2. Les benzophénones ............................................................................................................ 105 2.1. Benzophénone-1 ......................................................................................................... 105 2.2. Benzophénone-2 ......................................................................................................... 105 2.3. Benzophénone-3 ou BP-3 ........................................................................................... 106 2.4. 4,4’-dihydroxybenzophénone ..................................................................................... 107 2.5. Camphre de 3-benzylidène ou 3-BC .......................................................................... 108 2.6. Camphre de 4-méthylbenzylidène ou 4-MBC............................................................ 108 IV. Les siloxanes .................................................................................................................109 1. L’octaméthylcyclotétrasiloxane ......................................................................................... 109 2. Le décaméthylcyclopentasiloxane ...................................................................................... 110 V. Les alkylphénols ............................................................................................................111 VI. Le triclosan ...................................................................................................................113 12 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) VII. Les phénols ...................................................................................................................114 1. Le résorcinol....................................................................................................................... 114 2. Le BHA .............................................................................................................................. 115 VIII. Le bisphénol A...............................................................................................................116 IX. Le phénoxyéthanol ........................................................................................................117 CHAPITRE 5 : LES GRANDS AXES DE LA REGLEMENTATION CONCERNANT LES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS ........................................................................................................ 119 I. 2001 : la classification CMR............................................................................................119 II. 2005 : Création du PNRPE par le MEDDE ........................................................................120 III. 2007 : Mise en place de REACh ......................................................................................120 1. Qu’est-ce que REACh ? ..................................................................................................... 120 2. Les objectifs de ce règlement ............................................................................................. 121 3. La mise en œuvre ............................................................................................................... 121 3.1. L’enregistrement ........................................................................................................ 122 3.2. L’évaluation ............................................................................................................... 123 3.3. L’autorisation ............................................................................................................. 123 3.4. La restriction .............................................................................................................. 124 4. Mise en application concrète de la directive REACh ......................................................... 124 IV. 2008 : 1ère version de la liste SIN ....................................................................................124 V. 2009 : l’ANSES aussi concernée par les PE ......................................................................126 VI. 2009-2013 : Mise en place du PNSE 2 .............................................................................128 VII. 2010-2015 : PNRM.........................................................................................................128 VIII. 2011 : Etude Elfe ...........................................................................................................128 IX. Septembre 2012 : élaboration de la stratégie nationale sur les PE...................................129 X. Décembre 2012 : La loi interdisant le BPA dans les contenus alimentaires est adoptée par le parlement français................................................................................................................129 XI. Avril 2014 : Enquête ESTEBAN........................................................................................129 XII. Avril 2014 : Lancement de la stratégie nationale contre les PE élaborée en septembre 2012 130 XIII. 29 avril 2014 : Trois décisions concrètes contre les perturbateurs endocriniens ont été annoncées par Ségolène Royal, à l’issue du Conseil national de la transition écologique .........130 13 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) XIV. Novembre 2014 : l’ANSES doit expertiser 5 nouvelles substances en 2015 ......................131 XV. Janvier 2015 : Entrée en vigueur de l’interdiction du BPA dans tous les contenants alimentaires suite à la loi de décembre 2012. (182, 198) ........................................................132 CHAPITRE 6 : COMMENT SE POSITIONNENT LES PHARMACIENS OFFICINAUX PAR RAPPORT AUX PERTURBATEURS ENDOCRINIENS ? ..................................................... 133 CONCLUSION ............................................................................................................................. 142 BIBLIOGRAPHIE ....................................................................................................................... 144 ANNEXES ..................................................................................................................................... 159 14 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Liste des abréviations 3-BC : camphre de 3-benzylidène 4-MBC : camphre de 4-méthylbenzylidène AC : autorités compétentes ACTH : hormone corticotrope ou adrénocroticotrophine ADH : hormone antidiurétique ADN : acide désoxyribonucléique AFSSET : agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail AhR : récepteur aux hydrocarbures aromatiques ANSES : agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail ANSM : agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé AR : récepteur aux androgènes ARN : acide ribonucléique ATBC : acétyl citrate de tributyle BBP : phtalate de benzyle et de butyle BHA : hydroxyanisole butylé BHT : hydroxytoluène butylé BP-3 : 3-benzophénone BPA : bisphénol A CE : commission européenne CIRC : centre international de recherche sur le cancer CLP : classification, labelling, packaging CMR : cancérogène, mutagène et reprotoxique CPNP : la notification électronique des cosmétiques CRF : corticotropin releasing factor ou corticolibérine (ancienne appellation) CRH : corticotropin releasing hormone ou corticolibérine CSP : code de la santé publique CSSC : comité scientifique européen pour la sécurité des consommateurs DAS : acide diaminostilbène disulfonique DBCP : dibromochloropropane 15 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) DBP : phtalate de dibutyle DDE : dichlorodiphényltrichloroéthylène DDT : dichlorodiphényltrichloroéthane DEHP : phtalate de diéthylhexyle DEHTP : di-2-éthylhexyl téréphtalate DES : diéthylstilbestrol DGCCRF : direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes DHEA : déhydroépiandrostérone DiDP : phtalate de di-isodécyle DINCH : di-isononyl cyclohexane-1,2-dicarboxylate DMEP : phtalate de bis(2-méthoxyéthyle) DNIP : phtalate de diisononyle DPS : décisions de police sanitaire DRASS : directions générales des affaires sanitaires et sociales ECHA : agence européenne des produits chimiques EFSA : autorité européenne de sécurité des aliments EHMC : 2-éthylhexyl-4-méthoxycinnamate EI : effet indésirable EPA : agence de protection de l’environnement ER ou ERE : récepteur aux œstrogènes ERI : excès de risque individuel FSH : hormone folliculo-stimulante GH : hormone de croissance GHIH : growth hormone inhibiting hormone ou hormone inhibitrice de l’hormone de croissance GHRH : growth hormone releasing hormone ou hormone de libération de l’hormone de croissance GnRH : hormone de libération des gonadotrophines hypophysaires GPR30 : G-protein coupled estrogen receptor HAP : hydrocarbure aromatique polycyclique INCI : nomenclature internationale des ingrédients cosmétiques INRS : institut national de recherche et de sécurité 16 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) INSERM : institut national de la santé et de la recherche médicale LH : hormone lutéinisante MCI : méthylchloroisothiazolinone MEDDE : ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie MIT : méthylisothiazolinone MSH : melanocyte stimulating hormone ou hormone mélanotrope NoAEL: dose sans effet toxique observé NP : nonylphénol NPE : dérivés éthoxylés des nonylphénols OCDE : organisation de coopération et de développement économiques OMC : octyl-p-méthoxycinnamate OMS : organisation mondiale de la santé ONG : organisation non gouvernementale OP : octylphénol OSPAR : convention pour la protection du milieu marin de l’atlantique du nord-est PBT : (substance) persistante, bio-accumulative et toxique PCB : polychlorobiphényle PE : perturbateur(s) endocrinien(s) PET : polyéthylène téréphtalate PIH : prolactin inhibiting hormone ou hormone inhibitrice de la prolactine PNR EST : programme national de recherche environnement santé travail PNRM : plan national de résidus des médicaments dans les eaux PNRPE : programme national de recherche sur les perturbateurs endocriniens PNSE : plan national santé environnement POPs : polluants organiques persistants ppm : parties par million PRF : prolactin releasing factor ou facteur stimulant la prolactine PTH : hormone parathyroïdienne QSAR : quantitative structure activity relationship REACh : registration, evaluation, authorisation of chemicals SCCS : scientific commitee on consumer safety SIN : substitution immédiate nécessaire T3 : tri-iodo-thyronine 17 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) T3R : récepteur à la T3 T4 : thyroxine TBG : thyroxine binding globulin ou globuline liant la thyroxine TBT : tributylétain TRH : thyrotropin releasing hormone ou thyréolibérine TSH : thyroïd stimulating hormone ou thyréostimuline UE : union européenne UHT : upérisation à haute température ou ultra-high temperature UVA : rayons ultra-violets de type A vPvB : very persistent and very bioaccumulative 18 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Liste des figures Figure 1 : Les glandes endocrines chez l'homme (3) .......................................................... 25 Figure 2 : Emplacement de l'hypothalamus (4) ................................................................... 27 Figure 3 : Structure chimique de l'ADH (5) ........................................................................ 27 Figure 4 : Structure chimique de l'ocytocine (6) ................................................................. 28 Figure 5 : Emplacement de l’hypophyse (4) ....................................................................... 29 Figure 6 : Localisation de l’épiphyse parmi les ventricules du cerveau (8) ........................ 30 Figure 7 : Structure chimique de la mélatonine (9) ............................................................. 31 Figure 8 : Emplacement de la thyroïde (10) ........................................................................ 31 Figure 9 : Structure chimique de la T3 (11) ........................................................................ 31 Figure 10 : Structure chimique de la T4 (11) ...................................................................... 32 Figure 11 : Emplacement des glandes parathyroïdiennes (12) ............................................ 33 Figure 12 : Structure chimique de la PTH (13) ................................................................... 33 Figure 13 : Emplacement du thymus (14) ........................................................................... 34 Figure 14 : Emplacement des glandes surrénales (15) ........................................................ 35 Figure 15 : Structures chimiques du cortisol, de la cortisone et de la corticostérone (16) .. 36 Figure 16 : Structure chimique de l’aldostérone (17) .......................................................... 36 Figure 17 : Structures chimiques de la noradrénaline (1) et de l’adrénaline (2) (18).......... 37 Figure 18 : Emplacement du pancréas parmi l’appareil digestif (19) ................................. 38 Figure 19 : Emplacement des ovaires (20) .......................................................................... 39 Figure 20 : Structures chimiques des hormones ovariennes : estradiol (1), estrone (2), estriol (3) et progestérone (4) (21) ...................................................................................... 39 Figure 21 : Emplacement des testicules dans l’appareil reproducteur masculin (22) ......... 40 Figure 22 : Structure chimique de la testostérone (23) ........................................................ 41 Figure 23 : Structures chimiques de la DHEA (à gauche) et de l'andostènedione (à droite) (23) ...................................................................................................................................... 41 Figure 24 : Mode d’action des hormones hydrophiles ........................................................ 44 Figure 25 : Mode d’action des hormones lipophiles ........................................................... 45 Figure 26 : Schéma de propagation d'un pesticide dans l’environnement après le traitement d’une plante (39).................................................................................................................. 52 Figure 27 : Structures chimiques du DDT (1), du lindane (2), du toxaphène (3) et de l'aldrine (4) (48,49,50,51) .................................................................................................... 55 19 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 28 : Structures chimiques du chlordane (1), du dieldrine (2), de l'endrine (3), de l'heptachlore (4), de l'hexachlorobenzène (5) et structures générales des dioxines (6), des furanes (7) et des PCB (8) (54,55,56,57,58,59,60,61)......................................................... 56 Figure 29 : Mécanismes d'action des PE (28) ..................................................................... 57 Figure 30 : Les différentes cibles des PE (71) ..................................................................... 62 Figure 31 : La courbe en U des PE (28) .............................................................................. 70 Figure 32 : Les périodes critiques pour l'exposition aux PE (86)........................................ 74 Figure 33 : L'effet transgénérationnel (33) .......................................................................... 75 Figure 34 : Structure chimique du DES (90) ....................................................................... 76 Figure 35 : Structure chimique du vinclozoline (92)........................................................... 76 Figure 36 : La bioaccumulation (43) ................................................................................... 77 Figure 37 : La chaîne alimentaire (43) ................................................................................ 78 Figure 38 : Structure chimique du chlordécone (98) ........................................................... 80 Figure 39 : La durée de durabilité minimale d'un cosmétique (104) ................................... 88 Figure 40 : La durée d'utilisation après ouverture (104) ..................................................... 88 Figure 41 : Exemple d'une étiquette d'un produit cosmétique (104) ................................... 89 Figure 42 : Le label "BIO" (110) ......................................................................................... 92 Figure 43 : Le label "ECO" (110) ........................................................................................ 93 Figure 44 : Structure chimique du BBP (118) ..................................................................... 96 Figure 45 : Structure chimique du DnPP (118) ................................................................... 96 Figure 46 : Structure chimique du phtalate de diisopentyle (118) ...................................... 96 Figure 47 : Structure chimique du DiDP (118) ................................................................... 96 Figure 48 : Structure chimique du DEHP (118) .................................................................. 97 Figure 49 : Structure chimique du DMEP (118) ................................................................. 97 Figure 50 : Structure chimique du DBP (118)..................................................................... 97 Figure 51 : Structure chimique générale d'un parabène (120) ............................................. 98 Figure 52 : Structure chimique du méthylparabène (121) ................................................... 98 Figure 53 : Struture chimique de l'éthylparabène (122) ...................................................... 98 Figure 54 : Structure chimique du propylparabène (123) ................................................... 99 Figure 55 : Structure chimique de l'isopropylparabène (124) ............................................. 99 Figure 56 : Structure chimique du butylparabène (125) ...................................................... 99 Figure 57 : Structure chimique de l'isobutylparabène (126) ............................................... 99 Figure 58 : Structure chimique du benzylparabène (127) ................................................... 99 20 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 59 : Structure chimique du méthylisothiazolinone (143) ....................................... 103 Figure 60 : Structure chimique du méthylchlorothiazolinone (144) ................................. 103 Figure 61 : Structure chimique de l'OMC (113) ................................................................ 105 Figure 62 : Structure chimique du benzophénone-1 (118) ................................................ 105 Figure 63 : Struture chimique du benzophénone-2 (118) .................................................. 106 Figure 64 : Structure chimique du benzophénone-3 (118) ................................................ 106 Figure 65 : Structure chimique du 4,4'-dihydroxybenzophénone (118) ............................ 108 Figure 66 : Structure chimique du 3-BC (118) .................................................................. 108 Figure 67 : Structure chimique du 4-MBC (118) .............................................................. 109 Figure 68 : Structure chimique de l’octaméthylcyclotétrasiloxane (118) ......................... 110 Figure 69 : Structure chimique du décaméthylcyclopentasiloxane (118) ......................... 110 Figure 70 : Structure chimique du nonylphénol (160) ...................................................... 112 Figure 71 : Structure chimique de l'octylphénol (118) ...................................................... 112 Figure 72 : Structure chimique du triclosan (118) ............................................................. 113 Figure 73 : Structure chimique du résorcinol (118) .......................................................... 114 Figure 74 : Structure chimique du BHA (118) .................................................................. 115 Figure 75 : Structure chimique du BPA (118)................................................................... 116 Figure 77 : Structure chimique du phénoxyéthanol (182) ................................................. 117 Figure 78 : Dates limites d'enregistrement en lien avec REACh (188) ............................. 122 Figure 79 : Un aperçu de la base de données concernant la liste SIN (118) ..................... 125 21 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Liste des tableaux Tableau 1 : Quelques exemples de quelques PE (28) .......................................................... 51 Tableau 2 : Les effets retrouvés chez les animaux (33) ...................................................... 59 Tableau 3 : Exemples d'effets de certains PE sur la faune (74)........................................... 61 Tableau 4 : Les effets potentiels en fonction de la fenêtre d'exposition (34) ...................... 73 Tableau 5 : Comment évaluer un PE d'après l'OCDE ? (101)............................................. 81 Tableau 6 : Principes des tests utilisés (100) ....................................................................... 82 Tableau 7 : Les effets de 6 phtalates sur la fertilité et le développement (111) .................. 95 Tableau 8 : Classification des substances CMR (185) ...................................................... 127 22 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Introduction générale Les perturbateurs endocriniens sont, à l’heure d’aujourd’hui, au centre de nombreuses préoccupations. Il y a quelques années encore ce concept était totalement inconnu du grand public. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas : on compte plusieurs milliers d’articles sur le sujet. A la télévision, dans les magazines destinés aux professionnels de santé comme au grand public et bien sûr, sur internet. Les articles sont partout. Et les inquiétudes autour du sujet aussi. On les associe aux mots « cancers », « maladies », « infertilité », « puberté précoce », « diabète », « disparition d’espèces animales » et bien d’autres encore. Mais qui sont-ils vraiment ? Que se cache derrière ce concept ? Quelles sont leurs conséquences directes sur l’homme ? C’est pour répondre à toutes ces questions et parce que le domaine dans lequel j’exerce y est directement impliqué que j’ai décidé de mener ce travail afin de rassembler au mieux des connaissances sur le sujet. Et comme, après plusieurs heures de recherches, je me suis rendue compte que le sujet était vaste, j’ai décidé de me centrer sur les perturbateurs endocriniens rencontrés dans les produis cosmétiques. Pour conclure ce travail, j’ai interrogé mes confrères officinaux afin de savoir comment ils se positionnaient par rapport à ce concept. Quelles étaient réellement leurs connaissances sur le sujet ? Leurs attentes ? La position de leur patientèle etc. J’ai donc construit un questionnaire que j’ai soumis à mes confrères et j’ai intégré leurs réponses à la fin de ce travail. 23 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Chapitre 1 : Le système endocrinien Ce premier chapitre est important pour appréhender les suivants. En effet, comment peuton évoquer une perturbation endocrinienne si l’on ne sait pas comment fonctionne le système endocrinien physiologiquement parlant ? C’est ce que ce premier chapitre va mettre en lumière. Comment fonctionne t-il ? Quels sont les différents rôles des hormones ? Et enfin, par quels mécanismes d’action agissent-elles ? I. Définitions Le système endocrinien est l’un des deux réseaux de communication de l’organisme. L’autre étant le système nerveux. Ces deux systèmes travaillent en synergie afin d’assurer la bonne activité cellulaire (1,2). Le système nerveux s’adapte aux situations qui nécessitent des réponses rapides tandis que le système endocrinien est, lui, adapté aux situations nécessitant des réponses plus durables (2). Le système endocrinien est essentiel car il permet une parfaite coordination et régulation des fonctions primordiales à l’homme telles que la croissance, le développement, le comportement, la reproduction, la production, l’utilisation et le stockage de l’énergie, l’homéostasie ou encore la réponse aux différents stimuli. Pour coordonner et réguler tous ces processus physiologiques, ce système est constitué d’un ensemble d’organes appelés « glandes endocrines ». Ces glandes ont la particularité de libérer dans la circulation sanguine des hormones ou « messagers chimiques ». Une fois larguées, ces hormones ont une action sur des cellules et/ou organes cibles de l’organisme via des récepteurs spécifiques. C’est alors cette action qui entraine la réponse biologique. Ces différentes glandes endocrines sont sous contrôle de l’hypothalamus qui sécrète des substances régulatrices et de l’hypophyse qui elle, sécrète des stimulines. Les différentes particularités de ces hormones sont (1) : - D’être actives à de faibles concentrations, - D’avoir une efficacité proportionnelle à la quantité sécrétée, 24 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - D’être sécrétée par des cellules endocrines, regroupées en glandes endocrines richement vascularisées, - De comporter une sécrétion de base associée à des pics selon le rythme de sécrétion - D’être libérée dans le sang, - D’avoir une action à distance sur des tissus ou organes cibles plus ou moins proches au niveau de leur anatomie. Le schéma suivant permet de visualiser les différentes glandes endocrines impliquées dans le système endocrinien (figure 1). Ces glandes endocrines sont : l’hypothalamus, la glande pinéale ou épiphyse, la glande pituitaire ou hypophyse, la parathyroïde, la thyroïde, le thymus, les glandes surrénales, le pancréas, les ovaires et les testicules (2). Figure 1 : Les glandes endocrines chez l'homme (3) 25 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Attention, il est important de différencier ces glandes endocrines des glandes exocrines qui elles, sécrètent des substances en dehors de la circulation sanguine. Ces glandes sont, par exemple les glandes salivaires avec la salive, les glandes sudoripares avec la sueur, les glandes lacrymales avec les larmes, les glandes mammaires avec le lait, les glandes sébacées avec le sébum, le foie avec la bile, l’estomac avec le suc gastrique, le pancréas avec le suc pancréatique etc. Toutes ces substances sont libérés via un canal excréteur vers le milieu extérieur comme la peau, le tube digestif ou encore l’appareil respiratoire (1,2,3). Cependant, une glande peut être à la fois exocrine et endocrine. Elle est alors qualifiée de « glande mixte ». C’est le cas par exemple des testicules qui ont une fonction endocrine avec la synthèse d’androgènes et une fonction exocrine avec la production de gamètes mâles. En résumé, pour être optimal, le système endocrinien doit remplir certaines conditions. A savoir : - délivrer la bonne quantité d’hormones - avoir un nombre de récepteurs suffisants au niveau de la cellule ou organe cible - avoir un approvisionnement en sang suffisant pour permettre le transport optimal des hormones vers la cellule ou organe cible Si ces conditions ne sont pas remplies, cela entraîne un déséquilibre endocrinien avec des conséquences pathologiques possibles. C’est le cas du diabète par exemple. Détaillons à présent ces différentes glandes endocrines ainsi que les hormones qu’elles sécrètent afin de mieux comprendre dans le chapitre 2 comment vont agir les perturbateurs endocriniens. II. Les glandes endocrines 1. L’hypothalamus L’hypothalamus est situé sous le thalamus, au-dessus de la tige de l’hypophyse et du cerveau (figure 2). Il est formé par les parois du troisième ventricule. On dit de l’hypothalamus qu’il est le « cerveau endocrinien » de l’organisme puisque sa fonction est de réguler les sécrétions des différentes glandes endocrines de l’organisme soit en les stimulant, soit en les inhibant. 26 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Lorsque l’hypothalamus reçoit un signal provenant du système nerveux, il sécrète des substances connues sous le nom de neuro-hormones qui stimulent ou inhibent la production des hormones hypophysaires. Il fait donc le lien entre les systèmes nerveux et endocrinien (1,2). Figure 2 : Emplacement de l'hypothalamus (4) Les hormones primaires sécrétées par l’hypothalamus sont : - L'hormone antidiurétique (ADH) ou vasopressine (figure 3). Cette hormone permet la réabsorption rénale de l’eau comme son nom l’indique mais elle a aussi une action de vasoconstriction et entraîne donc une hypertension artérielle. Figure 3 : Structure chimique de l'ADH (5) - L'ocytocine (figure 4). Cette hormone est impliquée dans divers processus, tels que la contraction de l'utérus pendant l'accouchement et la stimulation de la production de lait maternel. 27 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 4 : Structure chimique de l'ocytocine (6) Ces deux hormones sont stockées au niveau du lobe postérieur de l’hypophyse (1,2,7). - La corticolibérine (CRH), encore appelée Corticotropin Releasing Factor (CRF). Cette hormone stimule l’ACTH au niveau de l’antéhypophyse. - La gonadolibérine (GnRH) qui stimule l'antéhypophyse afin de libérer les gonadotrophines, la FSH et la LH. - L'hormone de libération de l'hormone de croissance ou somatocrinine (GHRH) et l'hormone inhibant l’hormone de croissance (GHIH). La GHRH stimule l'antéhypophyse pour libérer l'hormone de croissance (GH), la GHIH l’inhibe. - L’hormone de libération de la prolactine (PRF) et l'hormone inhibant la prolactine (PIH). La PRH active l'antéhypophyse qui stimule la production de lait via l’action de la prolactine. Inversement, la PIH inhibe la prolactine, et par conséquent, la production de lait. - L’hormone de libération de la thyréostimuline ou thyréolibérine (TRH) qui stimule l'hormone stimulant la thyroïde (TSH) au niveau de l’antéhypophyse. La sécrétion des hormones hypothalamiques est soumise au phénomène de rétrocontrôle exercé par les hormones hypophysaires correspondantes. 2. L’hypophyse L’hypophyse, encore appelée glande pituitaire est localisée à la base du crâne (figure 5). Elle est composée de deux lobes : un lobe antérieur et un lobe postérieur. Le lobe antérieur ou antéhypophyse produit et libère des hormones. Le lobe postérieur ou posthypophyse, lui, ne produit pas d’hormones par lui-même. Il s’agit en fait d’une excroissance du tissu hypothalamique. Il contient donc les extrémités des cellules nerveuses de l’hypothalamus. 28 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) L’hypothalamus envoie donc directement des hormones via ces nerfs, puis c’est le lobe postérieur de l’hypophyse qui les libère dans la circulation. Il se comporte donc plus comme un « lieu de stockage » plutôt que comme une glande endocrine (1,2). Figure 5 : Emplacement de l’hypophyse (4) Nous allons donc nous intéresser au lobe antérieur qui lui, produit et libère six hormones. Ces hormones sont (1,2) : - La corticotrophine ou hormone corticotrope (ACTH). L’ACTH a pour rôle de stimuler les glandes surrénales afin de produire les corticostéroïdes et plus particulièrement les glucocorticoïdes, - La thyréotrophine ou hormone thyréotrope (TSH) qui permet la stimulation des hormones thyroïdiennes, - Les gonadotrophines avec l’hormone folliculo-stimulante (FSH) d’une part et l’hormone lutéinisante (LH) d’autre part. La FSH et la LH fonctionnent en synergie afin d’assurer le fonctionnement normal des ovaires et des testicules. La FSH permet la stimulation de la production de gamètes tandis que la LH favorise la production d’hormones gonadiques. Ces quatre hormones régissent le fonctionnement hormonal de glandes endocrines alors que les deux suivantes ont des cibles non endocriniennes : - L'hormone de croissance (GH) aussi appelée somatotrophine. La GH est essentielle dans les premières années de vie dans la croissance et la division de la plupart des cellules de l’organisme notamment au niveau des os et des muscles squelettiques, - La prolactine (PRL) qui permet la stimulation et le maintien de la lactation. 29 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Les hormones « stockées » au niveau du lobe postérieur sont l'hormone antidiurétique (ADH) ou vasopressine ainsi que l'ocytocine. Une troisième structure a été identifiée entre les lobes antérieur et postérieur, il s’agit de l’hypophyse intermédiaire qui sécrète la mélano-stimuline (MSH) qui agit principalement sur les mélanocytes de la peau en assurant la synthèse de mélanine à partir des UVA. Le rôle principal de l’hypophyse est de réguler les fonctions des autres glandes endocrines en synergie avec l’hypothalamus. En effet, l’hypothalamus envoie des signaux à l’hypophyse, qui elle-même envoie des signaux aux autres glandes endocrines afin de stimuler ou d’inhiber leur production d’hormones. 3. L’épiphyse L’épiphyse ou glande pinéale, en forme de « pomme de pin » est située en arrière du troisième ventricule (figure 6). Figure 6 : Localisation de l’épiphyse parmi les ventricules du cerveau (8) L’épiphyse est constituée de cellules gliales et de cellules sécrétrices appelées pinéalocytes qui sécrètent une hormone : la mélatonine. Cette hormone est sécrétée la nuit et contribue au maintien du rythme circadien. (Le rythme circadien correspond au cycle biologique de 24 heures caractérisé par l’alternance veille-sommeil). La mélatonine (figure 7) interviendrait également dans d’autres processus biologiques comme la reproduction, la croissance des cellules ou le contrôle du poids corporel. 30 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 7 : Structure chimique de la mélatonine (9) 4. La thyroïde La thyroïde est une glande en forme de papillon localisée à la base du cou, contre la trachée (figure 8). Elle est composée de deux lobes attachées par une bande de tissu thyroïdien appelé isthme. Figure 8 : Emplacement de la thyroïde (10) La thyroïde produit deux hormones thyroïdiennes principales : - la T3 ou tri-iodo-thyronine (figure 9) Figure 9 : Structure chimique de la T3 (11) - et la T4 ou tétra-iodo-thyronine (figure 10), encore appelée thyroxine 31 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 10 : Structure chimique de la T4 (11) Précisons que la T3 n’est que très faiblement sécrétée par la thyroïde. En effet, elle est principalement obtenue par la conversion de la T4 au niveau du foie. A noter également que, dans une moindre mesure, elle sécrète la calcitonine ou thyrocalcitonine dont le rôle est détaillé dans le paragraphe ci-dessous. Les hormones thyroïdiennes, de structure chimique similaire sont riches en iode et ont un rôle multiple au niveau de l’organisme. En effet, elles (10,11) : - Augmentent le métabolisme de base, - Augmentent la consommation d’oxygène et la production de chaleur, - Sont essentielles au développement du système nerveux central et au développement du squelette avec notamment la maturation et l’ossification des cartilages de conjugaison, - Agissent sur la croissance et le développement de différents tissus comme par exemple les phanères (ongles, cheveux, poils), - Permettent le développement de l’appareil génital lors de la puberté. La calcitonine, elle, a pour effet principal de diminuer le taux de calcium circulant via l’inhibition de la résorption osseuse. Elle a également un rôle sur la diminution du phosphore, en effet, c’est un antagoniste direct de la parathormone libérée par les glandes parathyroïdes (1,2,10,12). La quantité d’hormones thyroïdiennes est maintenue constante dans le sang grâce à la régulation hypothalamo-hypophysaire. 32 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Lorsque les taux d’hormones thyroïdiennes diminuent, l’hypothalamus stimule la TRH (thyrotropin-releasing hormone) ou protiréline qui va elle-même stimuler l’antéhypophyse afin de produire plus de TSH (thyroid-stimulating hormone) ou thyréostimuline qui, à son tour, va stimuler la thyroïde pour qu’elle sécrète davantage de T3 et T4. Par ailleurs, lorsque les taux de T3 et T4 sont supérieurs à la normale, un rétrocontrôle négatif a lieu et permet d’inhiber les sécrétions de TRH et de TSH dans le but de retrouver un taux d’hormones thyroïdiennes normal. 5. Les glandes parathyroïdiennes Il s’agit de quatre petites glandes situées en arrière de la thyroïde (figure 11). Figure 11 : Emplacement des glandes parathyroïdiennes (12) Les glandes parathyroïdiennes sécrètent l’hormone parathyroïdienne (PTH) ou parathormone. Figure 12 : Structure chimique de la PTH (13) La PTH a un rôle dans la régulation des taux de calcium et de phosphore de l’organisme. Pour cela, elle agit à 3 niveaux. 33 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Au niveau des reins, la PTH favorise la réabsorption du calcium (donc la diminution de la calciurie), la réabsorption du phosphore (donc la diminution de la phosphaturie) et participe à la transformation de la vitamine D dans sa forme active (12). Au niveau de l’intestin grêle, la PTH augmente l’absorption du calcium et du phosphore par l’intermédiaire de la vitamine D transformée au niveau rénal. Enfin, au niveau des os, la PTH participe à l’ostéolyse ce qui entraîne la libération de calcium et de phosphate. La régulation se fait via le taux de calcémie circulant et irrigant les parathyroïdes. Donc, si la calcémie diminue, la sécrétion de PTH augmente et inversement. Cette régulation est donc indépendante de l’hypophyse. 6. Le thymus Le thymus se trouve derrière le sternum, entre les poumons (figure 13) Figure 13 : Emplacement du thymus (14) Il faut savoir que le thymus est actif jusqu’à la puberté. Après, il se rétrécit pour laisser place à de la graisse. Cette glande sécrète la thymosine et la thymopoïétine, qui ont toutes deux un rôle dans l’immunité. En effet, ces hormones sont nécessaires au développement et à la production des cellules T ou lymphocytes T. Les lymphocytes immatures produits par la moelle osseuse se 34 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) divisent et se transforment en lymphocytes T matures lors de leur passage dans le thymus et sous l'influence de ces hormones. Ensuite, ils migrent vers les ganglions lymphatiques à travers le corps et aident ainsi le système immunitaire dans la lutte contre les maladies (14). 7. Les glandes surrénales Il s’agit de deux glandes situées au-dessus des reins (figure 14) et composées de deux parties distinctes : la corticosurrénale ou cortex qui est la partie externe de la glande et la médullosurrénale ou moelle qui est la partie interne de la glande. Figure 14 : Emplacement des glandes surrénales (15) 7.1. Les hormones et leurs différents rôles 7.1.1. Les hormones corticosurrénales Le cortex surrénalien est composé de trois zones distinctes : une couche externe ou zone glomérulée, une couche intermédiaire ou zone fasciculée et enfin une couche externe ou zone réticulée. Ces différentes zones sécrètent deux groupes d’hormones majeurs et un groupe d’hormones mineur. La zone fasciculée libère les glucocorticoïdes qui comprennent (3,7,15) : - L’hydrocortisone (figure 15), communément appelé le cortisol. Les principaux rôles du cortisol sont de réguler le métabolisme des glucides, des protides et des lipides en favorisant la néo-glycogénèse, via son action hyperglycémiante et en inhibant la lipogenèse, de contribuer à réguler la pression artérielle de part son action anti 35 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) hypertensive, d’être actif sur le métabolisme osseux et la croissance et enfin d’avoir une action immunologique et anti-inflammatoire. - La cortisone (figure 15) - La corticostérone (figure 15) qui agit en synergie avec l’hydrocortisone afin de réguler la réponse immunitaire et de supprimer les réactions inflammatoires. Figure 15 : Structures chimiques du cortisol, de la cortisone et de la corticostérone (16) Les glucocorticoïdes sont régulés par l’axe hypothalamo-hypophysaire. En effet, si le taux de cortisol diminue, un signal est envoyé à l’hypothalamus qui stimule la CRH ou corticoréline, encore appelée CRF (corticotropin releasing factor) qui à son tour stimule l’antéhypophyse qui va alors libérer l’ACTH, l’hormone corticotrope ou adrénocorticotrophine et qui, à son tour va stimuler les glandes surrénales afin de produire d’augmenter le taux de cortisol. Lorsque le taux de cortisol est trop important, l’axe hypothalamo-hypophysaire est inhibé par un rétrocontrôle négatif du cortisol lui-même. La zone glomérulée libère les minéralocorticoïdes avec principalement l’aldostérone (figure 16) (3,7,15). Figure 16 : Structure chimique de l’aldostérone (17) L’aldostérone provoque la réabsorption des ions sodium et de l’eau et provoque l’élimination du potassium au niveau rénal. Il permet donc de maintenir le bon équilibre entre les ions sodium et les ions potassium tout en aidant au contrôle de la pression artérielle. La libération 36 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) d’aldostérone a peu de rapport avec l’axe hypothalamo-hypophysaire : sa libération est fonction de la concentration des ions dans le sang, de l’osmolarité sanguine ainsi que de la pression artérielle. Enfin, la zone réticulée libère la 3ème catégorie d’hormones appelées gonadocorticoïdes ou hormones sexuelles stéroïdes avec notamment l’androstènedione et la déhydroépiandrostérone ou DHEA. Ces hormones sexuelles sont surtout produites avant la naissance et au moment de la puberté (3,7,15). 7.1.2. Les hormones médullosurrénales La médullosurrénale, elle, produit les catécholamines : l’adrénaline et la noradrénaline (figure 17). Ces deux hormones sont impliquées dans la réponse au stress de l’organisme. Leurs sécrétions sont induites par le système nerveux sympathique et ont pour effets, entre autre, de provoquer une augmentation de la fréquence cardiaque, une vasoconstriction, une augmentation de la pression artérielle, une augmentation de la glycémie et une bronchodilation (3,7,15). (1) (2) Figure 17 : Structures chimiques de la noradrénaline (1) et de l’adrénaline (2) (18) 8. Le pancréas Il s’agit d’une glande située à l’arrière de l’estomac, entre celui-ci et la colonne vertébrale (figure 18). Le pancréas est qualifié de « glande mixte » car il a une double fonction : endocrine et exocrine avec la sécrétion d’enzymes pancréatiques (amylase, lipase) et d’électrolytes (bicarbonate) qui contribuent à la digestion. Cependant, seule sa fonction endocrine nous intéresse pour ce travail (1,2, 19). 37 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 18 : Emplacement du pancréas parmi l’appareil digestif (19) Le pancréas, dans sa fonction endocrine, sécrète deux hormones principales qui sont l’insuline et le glucagon. Plus particulièrement, l’insuline est sécrétée par les cellules bêta des îlots de Langerhans et le glucagon par les cellules alpha des îlots de Langerhans. L’insuline est une hormone hypoglycémiante qui permet de diminuer le taux du glucose dans le sang en permettant le stockage du glucose en glycogène au niveau du foie. Le glucagon lui, est une hormone hyperglycémiante qui permet d’augmenter le taux de glucose dans le sang en activant la destruction du glycogène en glucose au niveau du foie. Tous deux contribuent donc à la régulation de la glycémie. 9. Les ovaires Ils sont au nombre de deux et situés de chaque côté de l’utérus (figure 19). On les appelle gonades. Il faut savoir qu’ils ont une double fonction : une fonction exocrine avec la production de gamètes, ici les ovocytes et une fonction endocrine avec la sécrétion d’hormones sexuelles. Ce sont donc des glandes mixtes. Cependant, seule la fonction endocrine nous intéresse pour ce travail (1,2,20). 38 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 19 : Emplacement des ovaires (20) Les ovaires produisent les œstrogènes et la progestérone (figure 20). (1) (2) (3) (4) Figure 20 : Structures chimiques des hormones ovariennes : estradiol (1), estrone (2), estriol (3) et progestérone (4) (21) Parmi les œstrogènes, on distingue l’œstradiol qui est le principal œstrogène mais aussi dans une action moindre l’œstrone et l’œstriol. Cette production est cyclique. En effet, l’œstradiol est sécrété par les follicules ovariens pendant tout le cycle (phase folliculaire et phase lutéale) et par le placenta s’il y a grossesse. Alors que la progestérone, elle, est principalement sécrétée pendant la phase lutéale par le corps jaune ovarien, c’est-à-dire lors de la deuxième partie du cycle. Elle sera aussi sécrétée par le placenta lors de la grossesse (1,2). 39 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Ces hormones ont pour rôles principaux de développer et de maintenir les caractères sexuels secondaires féminins ainsi que de réguler le cycle menstruel. L’hypothalamus sécrète la GnRH (gonadotropin-releasing hormone) qui à son tour agit sur l’antéhypophyse afin de sécréter les deux hormones hypophysaire gonadotrophines à savoir la FSH (hormone folliculo-stimulante) et la LH (hormone lutéinisante). Ces deux hormones agissent ensuite sur les ovaires. Une diminution des taux d’hormones ovariennes entraîne une augmentation de la sécrétion de GnRH qui elle-même entraîne une augmentation des sécrétions de FSH et de LH afin d’augmenter les taux d’hormones ovariennes. En revanche, s’il y a une augmentation des taux d’hormones ovariennes, l’axe hypothalamo-hypophysaire sera inhibé afin de permettre un retour à la normale (3,15,20). 10. Les testicules Il s’agit d’une paire d’organes producteurs de sperme, situés à l’intérieur du scrotum (figure 21). Ce sont des gonades. Et il faut savoir qu’ils ont une double fonction : une fonction exocrine avec la production de gamètes, ici les spermatozoïdes et une fonction endocrine avec la sécrétion d’hormones sexuelles. Ce sont donc des glandes mixtes. Cependant, seule la fonction endocrine nous intéresse pour ce travail (1,2,22). Figure 21 : Emplacement des testicules dans l’appareil reproducteur masculin (22) Ces glandes sécrètent principalement la testostérone (figure 22) qui est le principal androgène retrouvé dans les testicules et produit au niveau des cellules de Leydig. 40 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 22 : Structure chimique de la testostérone (23) Figure 23 : Structures chimiques de la DHEA (à gauche) et de l'andostènedione (à droite) (23) Il existe d’autres androgènes moins actifs comme la déhydroépiandrostérone (DHEA) et l’androstènedione (figure 23). Pendant la puberté, la testostérone assure principalement le développement des organes sexuels masculins et tout au long de la vie, elle assure le maintien de la libido, la production de spermatozoïdes, le maintien de la force et de la masse musculaire ainsi qu’une densité osseuse suffisante (3,22). La régulation est faite par l’hypothalamus et l’hypophyse. En effet, une diminution du taux de testostérone entraîne une augmentation de la sécrétion de GnRH qui elle-même entraîne une augmentation des sécrétions de FSH et de LH afin d’augmenter le taux de testostérone. En revanche, s’il y a une augmentation du taux de testostérone, l’axe hypothalamo-hypophysaire sera inhibé afin de retrouver un taux normal de testostérone (3,22). III. La chimie des hormones Pour rappel, les hormones du système endocrinien : 41 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - sont sécrétées en faibles quantités par des tissus spécialisés, appelés glandes endocrines - sont déversées directement dans la circulation sanguine - agissent sur des cellules spécifiques, via des récepteurs spécifiques, en produisant des effets, eux-aussi spécifiques - agissent conjointement avec le système nerveux Les hormones peuvent être classées en trois groupes selon leur nature biochimique (24,25) : - Les hormones peptidiques. Ce sont des polymères d’acides aminés. Elles sont de tailles et de structures variables. Ces hormones agissent par l’intermédiaire de récepteurs protéiques membranaires qui servent de relais pour transmettre les signaux à l’intérieur de la cellule. Parmi ces hormones peptidiques, on peut citer la TRH, la vasopressine ou encore l’insuline, le glucagon ou encore l’hormone de croissance. - Les hormones monoaminées. Elles dérivent des acides aminés et plus spécifiquement de la tyrosine et du tryptophane. Ces molécules sont de petites tailles et sont constituées des catécholamines (adrénaline, noradrénaline), de la mélatonine ainsi que des hormones thyroïdiennes. Les catécholamines et la mélatonine circulent librement dans le sang et agissent sur les cellules cibles via des récepteurs transmembranaires spécifiques alors que les hormones thyroïdiennes, elles, sont liées à des protéines plasmatiques et principalement à l’albumine et la TBG (thyroxine binding globulin) lors de leur transport sanguin et elles agissent par liaison avec des récepteurs intracellulaires. - Les hormones stéroïdes. Elles sont synthétisées à partir du cholestérol et sont des molécules hydrophobes. Ces hormones traversent les membranes plasmiques et doivent se lier avec des protéines plasmatiques pour circuler dans le sang. Une fois au niveau de l’organe cible, les hormones pénètrent dans le cytoplasme où elles se couplent à des récepteurs intracellulaires qui font partie de la famille des récepteurs nucléaires. Ces hormones sont sécrétées par les gonades, les corticosurrénales et le placenta. Parmi ces trois classes d’hormones, certaines sont hydrophiles et d’autres lipophiles (24,25) : 42 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - Les hormones hydrophiles. Elle sont solubles dans l’eau, transportées en solution dans le plasma, ne pénètrent pas dans le cytoplasme, agissent sur des récepteurs membranaires via l’activation d’enzymes et correspondent aux hormones peptidiques ainsi qu’aux catécholamines et à la mélanine, - Les hormones lipophiles. Elles sont insolubles dans l’eau, sont liées à une protéine de transport dans le sang. Elles pénètrent dans le cytoplasme par diffusion à travers la membrane plasmique, agissent sur des récepteurs intracellulaires (cytosolique ou nucléaire) ce qui induit l’activation du récepteur par un ligand et aboutit à l’expression ou la répression de gènes. Ces hormones correspondent aux hormones thyroïdiennes ainsi qu’aux hormones stéroïdes. 1. Les mécanismes d’action des hormones Pour qu’il y ait action, la cellule cible doit posséder des récepteurs auxquels l’hormone peut se lier. Et c’est donc la présence de ces récepteurs hormonaux qui assurent à la cellule cible sa sensibilité vis-à-vis de l’hormone. Ces récepteurs sont retrouvés soit au niveau de la membrane plasmique pour les hormones hydrophiles, soit directement dans la cellule pour les hormones lipophiles (24,25). 1.1. Comment agissent les hormones hydrophiles ? Les récepteurs membranaires sont des protéines qui permettent le passage de l’information de l’hormone vers le cytoplasme sans que celle-ci ne pénètre à l’intérieur de la cellule. Schématiquement, les hormones hydrophiles agissent en 5 étapes (25) : 1. Liaison de l’hormone hydrophile au récepteur membranaire 2. Stimulation des protéines effectrices qui sont des enzymes et qui sont couplées au récepteur membranaire 3. Synthèse de vecteurs intracellulaires, appelés messagers secondaires et qui sont porteurs de l’information 4. Cascade enzymatique 5. Effet biologique 43 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 24 : Mode d’action des hormones hydrophiles 1.2. Comment agissent les hormones lipophiles ? Schématiquement, les hormones lipophiles agissent selon 9 étapes (25) : 1. Sécrétion de l’hormone par la cellule endocrine 2. Transport par le sang sous forme liée à une protéine de transport spécifique (comme par exemple la transcortine) ou ubiquitaire (comme par exemple l’albumine) 3. Libération de l’hormone au niveau de la cellule cible 4. Passage de la membrane plasmique par diffusion 5. Liaison au récepteur spécifique cytoplasmique et passage à travers la membrane nucléaire puis liaison à l’ADN ou liaison au récepteur spécifique nucléaire puis liaison aux parties spécifique de l’ADN 6. Activation de la transcription et de la traduction du gène grâce à l’activation de l’ARN polymérase 44 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 7. Passage de l’ARN mature à travers la membrane cellulaire 8. Production et libération de protéines au niveau cytosolique 9. Réponse cellulaire Figure 25 : Mode d’action des hormones lipophiles 45 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Chapitre 2 : Les perturbateurs endocriniens ou PE D’où vient cet engouement pour les perturbateurs endocriniens (PE) ? Au cours des dernières décennies, les études épidémiologistes ont mis en avant des phénomènes qui pourraient être liés à des substances ayant des propriétés endocriniennes comme l’augmentation des malformations de l’appareil uro-génital masculin à la naissance, l’augmentation de l’incidence du cancer du testicule ou encore la baisse de la qualité du sperme (26,27,28). Cependant, les mécanismes d’interaction avec le système endocrinien sont complexes et encore insuffisamment décrits ce qui pose problème pour affirmer ou infirmer leurs relations directes avec l’augmentation et/ou l’apparition de certains troubles et pathologies. En effet, ils sont caractérisés par de nombreuses particularités comme un effet à faible dose et non monotone (plus les doses sont faibles, plus les effets sont importants), une chronicité (une exposition quasi quotidienne et ce, sur plusieurs années) et multiplicité des expositions, des périodes critiques d’exposition, un délai de latence etc… ; particularités que nous détaillerons au cours du chapitre. Mais cet engouement vient également du fait que ces substances sont de plus en plus présentes dans l’environnement général. On en retrouve dans de très nombreux produits du quotidien et elles se comptent par centaines. On peut par exemple citer les parabènes dans les produits cosmétiques, le bisphénol A et les phtalates dans les plastiques, le chlordécone utilisé comme pesticide, les retardateurs de flamme présents dans les tapis de sol et bien sûr les médicaments. Mais la liste est encore longue… Au total, ce sont plus de 800 substances qui sont suspectées d’être des perturbateurs endocriniens (26,27,28). Ils sont donc sujets à de nombreuses interrogations au sein de la société mais aussi dans le domaine de la recherche. C’est pourquoi, le gouvernement français a créé en 2005 le Programme National de Recherche sur les Perturbateurs Endocriniens (PNRPE) afin d’essayer de remédier au mieux à ces interrogations. Nous détaillerons ce point dans le chapitre 5. 46 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) I. Définition Les PE ont récemment fait l’objet d’attentions particulières. Le concept est apparu aux EtatsUnis au début des années 1990 et est sujet à de nombreuses polémiques et interrogations. C’est pourquoi, il n’y a pas, à l’heure actuelle, de consensus absolu concernant leurs définitions (27,28,29). Pour ce travail, nous reprendrons la définition de l’OMS datant de 2000 qui est la plus communément admise grâce à son caractère international et qui dit qu’un perturbateur endocrinien est « une substance exogène ou un mélange de substances qui altère la(les) fonction(s) du système endocrinien et qui induit des effets nocifs sur la santé d’un organisme intact, de sa descendance ou de ses (sous) populations ». Un perturbateur endocrinien potentiel est définit quant à lui comme « une substance ou un mélange exogène possédant des propriétés susceptibles d’induire une perturbation endocrinienne chez un organisme intact, chez ses descendants ou (sous) populations » (30). Cependant, d’autres agences semblent apporter plus de précisions dans leur définition. L’agence américaine de protection de l’environnement (US EPA), par exemple, dit qu’un PE est « un agent exogène qui interfère avec la synthèse, la sécrétion, le transport, la liaison, l’action ou l’élimination des hormones naturelles responsables de l’homéostasie, la reproduction, le développement et le comportement » (31). En résumé, deux éléments semblent nécessaires pour qualifier une substance de perturbatrice endocrinienne : une modification de l’homéostasie endocrinienne et l’induction d’un effet nocif sur la santé. De plus, si nous nous penchons sur la définition de la santé selon l’OMS, celle-ci insiste sur le fait que la santé dépend du bon fonctionnement du système endocrinien, système responsable de la sécrétion d’hormones essentielles à de nombreuses fonctions de l’organisme, détaillées dans le chapitre précédent. On comprend donc bien, qu’une substance qualifiée de perturbatrice endocrinienne peut entraîner une altération de la santé chez l’homme (30,32). 47 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Cependant, à l’heure actuelle, si les différentes définitions s’entendent sur le mécanisme d’action des perturbateurs endocriniens, toutes, ne mentionnent pas les effets potentiellement néfastes associés à ces perturbations. Et c’est pourquoi, comme nous le verrons plus loin, cela entraîne des problématiques au niveau de la réglementation de ces substances (27,28,29,30,31,32). II. La naissance du concept de PE : la déclaration de Wingspread Le terme de « perturbateur endocrinien » est apparu aux Etats-Unis il y a une trentaine d’années. En effet, Theo Colborn, professeur de zoologie et experte en santé environnementale, a conduit en 1988, des recherches environnementales dans les Grands Lacs aux Etats-Unis. Ses recherches ont mis en évidence que des produits chimiques pouvaient être transmis par des prédateurs tout au long de la chaîne alimentaire, altérant le développement de leurs descendants. C’est pourquoi, elle a, au vu de ces preuves, rassemblé en 1991 21 scientifiques issus de 15 disciplines différentes au cours de la conférence de Wingspread (annexe n°1). Cette conférence scientifique pluridisciplinaire a rapporté, à la suite d’observations faites dans le monde animal « qu’un grand nombre de substances produites par l’homme et émises dans l’environnement, ainsi que quelques substances naturelles, ont le potentiel de perturber le système endocrinien de tous les animaux, y compris celui de l’homme ». Il s’agit du premier avertissement international (28,33,34,35). 1. Quels ont été les objectifs de cette conférence ? Les objectifs de cette rencontre étaient (33) : - De mettre en commun les découvertes de chacun et d’évaluer l’ampleur du problème - De tirer des conclusions fiables des données existantes - De proposer des programmes de recherches afin de dissiper les incertitudes qui subsistent 48 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 2. Quelles en ont été les conclusions ? Les 21 spécialistes indiquent notamment que, de manière certaine (33) : - de nombreux composés libérés dans la nature sont capables de dérégler le système hormonal des animaux - ces composés ont, à l’heure d’aujourd’hui, affecté de nombreuses populations d’animaux sauvages - les effets varient selon les espèces et les composés mais 4 règles semblent s’appliquer : o les substances incriminées peuvent agir différemment sur l’embryon et sur l’adulte o les effets se retrouvent principalement sur la génération suivante, ces effets sont le plus souvent absents chez les parents exposés o la période d’exposition est cruciale, c’est elle qui détermine l’ampleur et la nature des effets o la période d’exposition la plus critique correspond à la vie embryonnaire, mais les effets peuvent survenir au long terme pour ne se manifester qu’à l’âge adulte - les études faites en laboratoire confirment les anomalies sexuelles observées dans la nature et permettent d’appréhender les mécanismes biologiques mis en jeu - ces composés affectent également l’être humain Suite à cette déclaration, l’idée selon laquelle des polluants seraient capables de mimer l’action des hormones naturelles et d’en modifier le rôle naît alors progressivement. D’autres déclarations internationales suivront comme celle de Prague en 2005 (annexe n°2) qui confirmera les constats faits en 1991. III. Les différentes classes de PE On distingue quatre classes différentes d’hormones (31,32,35,36) : - Les hormones naturelles produites par l’organisme comme la testostérone, l’œstrogène etc… 49 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - Les hormones naturelles fabriquées par les plantes comme par exemple les phytoœstrogènes ou par les champignons et moisissures nommés myco-œstrogènes. Ces substances ont des structures qui imitent ou interagissent avec les œstrogènes et peuvent donc provoquer des effets de type œstrogéniques ou anti-œstrogéniques. Concernant les phyto-œstrogènes, les plus étudiés sont les lignanes présents dans les lentilles, les pois chiches ou encore le soja. Quels seraient donc les risques associés à une forte consommation de ces produits ? Et concernant les myco-œstrogènes, on peut citer par exemple le zéaralénone. On le retrouve dans le maïs utilisé dans l’élevage porcin par exemple. NB : Certains lignanes présentent la particularité d'avoir des caractéristiques structurales (cycle et groupements hydroxyle en particulier) communes avec les hormones sexuelles, leur permettant de se lier aux récepteurs des œstrogènes. On les qualifie alors de SERM (specific estrogen receptor modulators) ou, plus couramment, de phytœstrogènes. - Les substances chimiques produites par l’industrie pharmaceutique pour leur effet hormonal comme les contraceptifs ou les molécules utilisées dans le traitement de la stérilité. Leur structure est similaire voire identique aux hormones naturelles. Si l’on prend l’exemple de la pilule de contraception, celle-ci, une fois ingérée et excrétée par la femme, se retrouve dans les eaux usées des stations d’épuration. Or, les stations d’épuration éliminent très mal ces composés organiques qui sont alors susceptibles de se retrouver dans le milieu naturel… (37) - Les substances chimiques employées dans l’industrie, l’agriculture ou dans les biens de consommation mais dont l’effet hormonal est non intentionnel. L’effet hormonal peut être dû à la similarité de structure par exemple. C’est ce groupe qui est sujet à controverse et qui contient la plupart des substances à évaluer pour affirmer ou infirmier leur rôle dans la perturbation endocrinienne. 50 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) IV. Multipotents et omniprésents 1. Utilisation des perturbateurs endocriniens Le schéma suivant permet d’illustrer quelques PE selon leurs familles chimiques. Et, d’après les sources potentielles, on comprend bien leur caractère omniprésent (28,35,38). Familles chimiques Sources potentielles Exemples de substances Phtalates Plastiques, cosmétiques Détergents, plastiques, pesticides Mousses pour mobiliers, tapis, équipements électroniques Plastiques, cosmétiques Produits de combustion : fumée de cigarette, émissions de moteurs diesels, incendies Dibutyl phtalate Alkylphénols Retardateurs de flamme Phénoliques Hydrocarbures aromatiques polycycliques Composés organochlorés Pesticides anciennement utilisés Triazines, dérivés nitrés Œstrogènes stéroïdiens Pesticides actuels Médicaments contraceptifs Nonylphénol Polybromodiphényles Bisphénol A, parabènes Benzo[a]pyrène DDT (dichlorodiphényltrichloroéthane), Lindane, pentachlorophénol, alachlore Atrazine Ethinylestradiol, 17-β-estradiol Tableau 1 : Quelques exemples de quelques PE (28) 2. Dans l’environnement Les sources exposant aux PE sont diverses de par leurs natures très variées d’où la difficulté de définir quelles sont les populations exposées. On les retrouve dans l’eau, l’air, les poussières, l’alimentation, les produits industriels comme par exemple les médicaments, les cosmétiques, ou encore les produits phytosanitaires ainsi que dans les sols. Ils peuvent provenir d’effluents industriels ou urbains, de ruissellement des terres agricoles (contenant des pesticides par exemple) ou encore d’incinération et de rejet des déchets (28,30). Ci-dessous l’exemple de la dispersion dans l’environnement d’un pesticide utilisé pour le traitement d’une plante (figure 26) : 51 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 26 : Schéma de propagation d'un pesticide dans l’environnement après le traitement d’une plante (39) On remarque que le pesticide se propage dans le sol, dans les eaux par ruissellement, dans les nappes phréatiques par infiltration lors de précipitations ainsi que dans l’air par volatilisation où il peut être redéposé à un autre endroit (39). Le sol et les sédiments constituent donc un réservoir, susceptible de contaminer d’autres compartiments de l’environnement comme l’eau et l’air (39). Une fois dans l’environnement, le polluant peut être rapidement dégradé, persister de manière inchangée, se transformer en produits de dégradation parfois plus toxiques que le composé de départ, se combiner à d’autres composés ou encore être « piégés ». Par exemple, un sol contaminé en métaux lourds peut ne pas être toxique pour les organismes vivants s’ils sont non assimilables (c’est le cas par exemple lorsque les polluants sont adsorbés très fortement à la surface des particules du sol) (30). En dehors de quelques cas d’accidents industriels comme par exemple la catastrophe de Seveso en 1976 en Italie (40) (il s’agit d’une explosion d’une usine de pesticides qui propagea un nuage de dioxine), c’est donc l’ensemble de la population qui est potentiellement exposée aux PE, de manière chronique, à de faibles doses et à tous les stades de la vie y compris pendant la vie fœtale. Cette exposition peut se faire par ingestion, inhalation, absorption ou encore par passage trans-placentaire (30). 52 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Le milieu professionnel, lui, est exposé à des doses plus importantes de PE notamment les agriculteurs ainsi les industries pharmaceutiques et chimiques (fabrication de pesticides) comme le soulève l’INRS en 2002 (30). NB : Suite à la catastrophe de Seveso, deux études de cohortes ont été réalisées afin de surveiller la population exposée. Les résultats ont été : - Des modifications du sex ratio en faveur des filles, (35,40) - Des risques plus élevés de certaines pathologies comme les cancers ou le diabète, (40,41) - Un lien entre l’exposition aux dioxines et le risque de cancer du sein (40,42). 3. Dans le corps humain Certains PE sont des substances hydrophiles et ont une élimination rapide mais la plupart sont des substances lipophiles, c’est-à-dire qu’elles présentent une affinité pour le tissu adipeux et ont la capacité de contaminer toute la chaîne alimentaire pour ensuite s’accumuler dans l’organisme. Une fois dans l’organisme, ces substances sont susceptibles d’être transmises au fœtus via le sang ou le liquide amniotique ou encore au nourrisson via le lait maternel (34). Ainsi on peut donc les doser dans le sang, le tissu adipeux, le lait maternel, le liquide amniotique, le sang du cordon, ou encore les urines. Il est rappelé que 80 à 90% de ces substances toxiques passent dans le lait maternel et l’absorption chez le nourrisson est 10 fois plus élevée que chez l’adulte. Par ailleurs, les concentrations augmentent à chaque maillon de la chaîne alimentaire réalisant ainsi un phénomène d’accumulation. On parle de « bioaccumulation » ou « bioamplification ». (34,38) (cf partie VII, sous partie 6). Il faut savoir également, que les PE peuvent migrer des contenants alimentaires (conserves métalliques, cannettes, bouteilles plastiques etc...) vers les denrées qu’ils renferment. Et ceci 53 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) est d’autant plus important que le contenu est gras, qu’il séjourne longtemps dans l’emballage ou qu’il est directement chauffé dans son contenant… (39). Donc, une fois le polluant absorbé par l’organisme, il peut subir des transformations biologiques appelées « biotransformations » qui ont pour but de détoxifier le polluant en métabolites ou produits de biotransformation moins toxique. Cependant, il peut arriver que ces métabolites soient plus toxiques que le composé initial. C’est le cas, par exemple, des métabolites des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). 4. Les polluants organiques persistants Les chercheurs ont mis en évidence que certains polluants et contaminants résistent à la dégradation et à la détoxification mis en œuvre par l’organisme pour se protéger. On les désigne par le terme de polluants organiques persistants ou POPs. Ce sont des molécules lipophiles, qui ont donc tendance à s’accumuler dans le tissu adipeux de l’organisme ainsi que dans le lait maternel chez la femme allaitante. Ainsi, le tissu adipeux peut être particulièrement riche en POPs. Une étude de Hue en 2007 montre que la concentration de ces POPs augmente en fonction de l’âge. Ils s’accumulent donc dans l’organisme tout au long de la vie (62). Les polluants organiques persistants ou POPs sont caractérisés par 4 propriétés (43,44,45,46,47) : - Leur toxicité - Leur persistance dans l’environnement ; c’est-à-dire la résistance aux dégradations biologiques et naturelles entraînant une dégradation très lente - Leur bioaccumulation : ils s’accumulent dans les tissus et leurs concentrations augmentent le long de la chaîne alimentaire - Leur capacité à contaminer des zones loin de la source primaire d’exposition via les courants aquatiques et aériens ou via des animaux migrateurs contaminés dans un environnement et introduits dans la chaîne alimentaire dans un autre environnement. On peut donc retrouver certaines de ces substances en Arctique ! Parmi ces POP, on retrouve les produits industriels comme les PCB, les insecticides organochlorés comme le DDT, le lindane, l’aldrine ou encore le toxaphène (figure 27), ainsi que des organohalogénés comme les dioxines. 54 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 27 : Structures chimiques du DDT (1), du lindane (2), du toxaphène (3) et de l'aldrine (4) (48,49,50,51) Il faut savoir que la fabrication ou l’utilisation de ces substances toxiques est aujourd’hui interdite ou très règlementée dans le monde occidental. Cependant, à cause de leur grande résistance dans l’environnement et leur utilisation toujours présente dans certains pays tropicaux et subtropicaux, ces substances sont toujours détectées dans certaines denrées bien que leur concentration soit globalement en diminution depuis 20 ans. Cependant, dans le cadre de la Convention de Stockholm adoptée en 2001 (52,53) et entrée en vigueur le 17 mai 2004, 150 pays dont la France se sont engagés à interdire ou à limiter 12 de ces POPs. Il s’agit de 8 insecticides : l’aldrine (figure 27), le chlordane (figure 28), le DDT (figure 27), la dieldrine (figure 28), l’endrine (figure 28), l’heptachlore (figure 28), le mirex et le toxaphène (figure 27) ; d’un fongicide : l’hexachlorobenzène (figure 28) ainsi que des dioxines, des furanes et des PCB (figure 28). 55 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 28 : Structures chimiques du chlordane (1), du dieldrine (2), de l'endrine (3), de l'heptachlore (4), de l'hexachlorobenzène (5) et structures générales des dioxines (6), des furanes (7) et des PCB (8) (54,55,56,57,58,59,60,61) V. Leurs actions Si tous les scientifiques n’arrivent pas à établir une seule et même définition des PE, concernant leurs interactions avec le système endocrinien, ils en arrivent au même constat : celui qu’ils agissent selon trois mécanismes distincts (2,28,29,47) : - Par effets similaires à ceux des hormones ; c’est-à-dire en mimant l’action de l’hormone naturelle. On parle alors d’effet agoniste. En effet, la substance se fixe sur le récepteur hormonal et l’active de la même façon que l’hormone naturelle. On obtient donc une réponse similaire à celle de l’hormone naturelle (figure 29 : 1) 56 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - Par blocage de l’effet hormonal c’est-à-dire en empêchant la transmission du signal hormonal. On parle alors d’effet antagoniste. En effet, la substance se fixe sur le récepteur hormonal mais cette fois-ci celle-ci bloque l’émission de la réponse hormonale (figure 29 : 2) - Par influence sur la disponibilité des hormones c’est-à-dire en interférant avec les processus physiologiques de production, de régulation, de transport ou encore de dégradation des hormones ou de leurs récepteurs ce qui entraîne des modifications des taux de concentrations des hormones de l’organisme (figure 29 : 3) - Il peut aussi y avoir un effet indirect lorsque la substance perturbe un mécanisme en lien avec le système hormonal. Par conséquence, la molécule agit indirectement sur les différents processus du système hormonal. Figure 29 : Mécanismes d'action des PE (28) En conséquence, la perturbation endocrinienne se caractérise par une modification du système hormonal susceptible d’entraîner un effet délétère et non par un effet toxique direct. 57 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) VI. Des effets suspectés mais non avérés Les épidémiologistes observent depuis plusieurs années une augmentation de pathologies diverses touchant les organes de la reproduction ou altérant la fertilité. Si l’on rapproche ces constats avec la présence de plus en plus marquée des PE dans notre environnement, une relation tend à s’établir. Cependant, les chercheurs ont besoin de preuves scientifiques, et c’est pourquoi de nombreux travaux de recherche sont conduits pour définir l’impact sanitaire de ces substances. Comme nous allons le voir dans cette partie, si les relations de cause à effet sont clairement établies dans le monde animal, ce n’est pas toujours le cas pour l’homme. En effet, le problème est de prouver un lien entre un composé ou un groupe de composés et une conséquence médicale donnée. De même, cette conséquence médicale peut être elle-même la conséquence de plusieurs facteurs et il est alors difficile d’établir quelle part revient au PE. De plus, il existe une susceptibilité génétique pour un toxique donné qui peut varier d’un individu à l’autre. Et l’on comprend bien que des études cas-témoins sont impossibles à réaliser dès lors que l’on considère la substance comme potentiellement toxique. Tous ces facteurs amènent dont à des suspicions d’effets chez l’homme plus qu’à des effets avérés scientifiquement. 1. 1.1. Qu’observe-t-on ? Chez les animaux Le tableau 3 ci-dessous permet de présenter de manière simplifiée les différents effets des perturbateurs endocriniens retrouvés chez les animaux (33). 58 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Tableau 2 : Les effets retrouvés chez les animaux (33) NB : L'imposex se produit quand -généralement suite à l'exposition à un PE- des caractéristiques mâles, comme le développement d'organes génitaux mâles (pénis et canal déférent par exemple), se développent chez un gastéropode femelle normal. - Vers la fin des années 50, on observe la disparition des loutres en Angleterre avec une mise en cause d’un insecticide : le Dieldrine. Le lien a été établi en 1980. (63) - Au milieu des années 60, on observe une diminution de la fertilité des visons du lac Michigan en lien avec des poissons contaminés par les polychlorobiphényles (PCB) (64) - Dans les années 80, on observe des malformations chez les bébés alligators du lac Apopka après un accident d’usine proche du lac et produisant du Dicofol, un insecticide de la famille des DDT. Cela aurait induit une démasculinisation ainsi qu’une stérilité chez les alligators (65). - En Floride, des malformations chez les bébés panthères seraient corrélées à l’utilisation exagérée de DDE et PCB (66). - Des poissons exposés aux effluents d’une usine de papier présenteraient une intersexualité (67). - En Europe de l’Ouest, on observe une altération de la reproduction des phoques en lien avec l’exposition au PCB (68). - Enfin, un déclin des populations est observé chez les oiseaux marins, les poissons de mers ou encore les ours polaires. En effet, ceux-ci présenteraient des troubles de la 59 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) reproduction ainsi qu’une diminution de la taille des organes génitaux ce qui altèrerait directement leur reproduction (69). Ces observations ont un point commun : des anomalies de la reproduction, du comportement sexuel ou encore de la fertilité. Et l’on comprend bien évidemment que sans reproduction, nous allons vers la disparition de populations entières. Ces différents effets jusqu’alors seulement observés, seront confirmés expérimentalement. En effet, si l’on prend l’exemple des souris et des rats exposés en période prénatale et néo-natale au bisphénol A (BPA), considéré comme un PE, il est mis en évidence par de nombreuses études des malformations des organes génitaux, une augmentation de la taille de la prostate, une diminution du nombre de spermatozoïdes, une puberté précoce retrouvée chez les femelles ou encore une hyperactivité (70,71,72). Ces expériences en laboratoire ont ainsi permis de mettre en évidence un lien entre l’exposition à certains PE et des conséquences sur le système reproducteur, sur l’émergence de cancers dits hormono-dépendants tels que les cancers du sein, des testicules, de la prostate, ou encore de la thyroïde, des effets néfastes sur le développement neurologique ainsi que divers troubles métaboliques comme le diabète ou encore l’obésité (33). Mais, il faut rester prudent quant à l’extrapolation des effets observés chez l’animal à l’homme de par la grande variabilité entre les différentes espèces. En effet, pour des raisons pratiques évidentes, les études réalisées en laboratoire ont généralement lieu sur des rongeurs. Et les variations avec le métabolisme de l’homme sont nombreuses. Pour illustrer ce propos, gardons l’exemple du BPA : celui-ci subit très rapidement une modification inhibant son effet œstrogénique et donc, par conséquent sa toxicité dans l’organisme humain après ingestion alors que les rongeurs sont beaucoup plus sensibles au BPA après ingestion. Il paraît donc hasardeux d’extrapoler les observations animales à l’homme sans tenir compte des variabilités existantes entre les différentes espèces (73). De plus, concernant une étude menée sur des animaux de laboratoire, il est nécessaire de pouvoir répondre à certaines questions afin de pouvoir apprécier objectivement les résultats et la fiabilité de l’étude (33) : - Sur quelles normes se base l’étude ? Des normes nationales ou internationales ? - Est-ce que la méthode utilisée est validée et peut être répétée à l’identique ? 60 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - Les expériences-contrôles ont-elles été correctement effectuées ? - Quelle était l’espèce choisie pour l’étude ? Comment s’est fait l’exposition ? Tous ces différents facteurs sont à prendre en compte. Enfin, pour résumé cette partie, voici quelques exemples d’effets des PE sur la reproduction observés dans la faune sauvage au niveau mondial (tableau 3) (74). Espèces Pays Panthère de Floride USA Béluga Canada Ours polaire Russie Goéland USA Tortue serpentine Canada Mammifères Oiseaux Polluant(s) identifié(s) Mercure p,p’-DDE PCB PCB Organochlorés PCB DDT Méthoxychlore Organochlorés Reptiles Amphibiens Alligator USA p,p’-DDE Grenouille léopard USA Atrazine Gardon Grande Bretagne Perturbateurs endrocriniens Non renseigné spécifiquement Carpe Canada Composés œstrogéniques Poisson chat Afrique du sud p-nonylphénol Poissons Effet(s) observé(s) Cryptorchidie Diminution du nombre et de la mobilité des spermatozoïdes Hermaphrodisme Diminution de la testostérone sérique Féminisation Féminisation Développement anormal des gonades Diminuyion de la taille du pénis Dysgénésie des gonades Hermaphrodisme Intersexualité Diminution du nombre et de la mobilité des spermatozoïdes Intersexualité Anomalies de la spermatogénèse Diminution du nombre et de la mobilité des spermatozoïdes Intersexualité Tableau 3 : Exemples d'effets de certains PE sur la faune (74) 61 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Chez l’homme/la femme 1.2. En 2002, l’OMS attire l’attention sur certains changements observés chez l’homme qui pourraient résulter d’une perturbation endocrinienne mais elle reste prudente en mentionnant que ces perturbations pourraient également avoir d’autres origines. En effet, les progrès concernant les diagnostics, les grossesses plus tardives, le meilleur dépistage prénatal peuvent également entrer en jeu et expliquer ces anomalies tout comme les facteurs génétiques et les habitudes de vie (30,31,75). Figure 30 : Les différentes cibles des PE (71) Cependant, les effets suivants, en consensus avec les observations animales et épidémiologiques pourraient en être la conséquence : - Augmentation des cancers hormono-dépendants tels que : sein, testicules, prostate : o Cancer des testicules : en 2008, l’incidence était de 6,7 ; en augmentation de 2,5% par an depuis 1998, (76) o Cancer de la prostate : en France, son taux a augmenté de près de 5,3% par an entre 1975 et 2000. Son nombre a donc été multiplié par quatre, (33) 62 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) o Cancer du sein : en France, le nombre de cancers du sein est passé de 21 000 à près de 50 0000 depuis 1980. En éliminant l’effet de l’âge, son incidence a doublé ce qui correspond à une hausse de 2,4% par an, (33) o Cancer de la thyroïde : en France, entre 1978 et 2000, son incidence a augmenté de 2,89 % par an chez les hommes et de 4,80 % par an chez les femmes. Cependant, l’INSERM estime que ce phénomène n’est pas lié aux retombées du nuage radioactif Tchernobyl. (33) - Modification du rapport de garçons / filles à la naissance : o On observe dans plusieurs pays d’Europe, une diminution de la naissance de garçons depuis les années 1950, (36) - Diminution de la qualité du sperme : o Depuis 50 ans, on observe une diminution de la qualité du sperme ainsi que de sa qualité. Ce taux est de 3% par an en Europe. Se pose alors la question des facteurs environnementaux car il est possible de mettre en évidence de telles anomalies chez le rat en lui administrant certains PE aux doses retrouvées dans l’environnement, (36) o Une étude de Carlsen et al. en 1992 met en évidence une diminution de 50% de la qualité du sperme et une diminution du volume séminal de 25% en un demi-siècle et ceci au niveau mondial, (77) o Une autre étude de Le Moal et al. en 2012 met en évidence chez les hommes de 35 ans en France, une diminution du nombre de spermatozoïdes entre 1989 et 2005 ainsi qu’une augmentation du nombre d’anomalies au niveau de ceuxci, (78) o Une étude de Slama et al. en 2012 portant sur la fertilité des couples met en évidence que le taux de couples n’ayant pu concevoir après 1 an sans contraception passe de 14% en 1991 à 24% en 2012. (79) - Augmentation de la cryptorchidie et des malformations de l’urètre : o Hypospadias (anomalie de position du méat urétral) : le taux d’intervention chirurgicale est de 1,1 pour 1000 garçons de moins de 7 ans par an avec une augmentation annuelle de 1,2%, (80) o Cryptorchidie : les interventions chirurgicales augmentent de 1,8% par an (80). La cryptorchidie est définie comme l’arrêt de migration testiculaire et entre donc dans les facteurs de risque associé à l’apparition du cancer du testicule. - Modifications de comportement chez les nourrissons et les jeunes enfants : 63 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) o Maturation sexuelle retardée chez les adolescents vivants dans les zones contaminées par les PCB et la dioxine. (81) - Puberté précoce : o Diminution de l’âge de la puberté chez les filles en France : 18 ans au 19ème siècle contre 12 ans aujourd’hui, (82) o Dans les pays occidentaux, l’âge de la puberté diminue de 0,18 an par décennies en France et de 0,3 an en Norvège, Finlande ou encore aux EtatsUnis.) (33) Cependant, et en consensus avec les observations animales et épidémiologiques, les effets cités ci-dessous pourraient en être la conséquence (2,28,36,47) : - troubles de la reproduction chez les hommes avec diminution de la qualité et de la quantité du sperme, - troubles de la fonction reproductrice féminine avec des anomalies de la différenciation sexuelle, de la fonction ovarienne, de la fertilité, de l’implantation de l’embryon ou encore du développement du fœtus, - inversement du « sex-ratio » : ce qui correspond à un plus grand nombre de naissance filles, - malformations de l’appareil reproducteur masculin : cryptorchidie, hypospadias, hypoplasie testiculaire ou encore kyste épididymaire, - troubles de la maturation sexuelle comme l’apparition de puberté précoce, - altérations de la fonction thyroïdienne avec développement du cancer de la thyroïde ainsi que de troubles du comportement (déficit de l’attention et hyperactivité chez l’enfant), - altérations du système immunitaire, - augmentation de l’incidence de certains cancers dits hormono-dépendants : cancer des testicules et de la prostate chez l’homme et cancer du sein et de l’ovaire chez la femme. L’OMS nous met en garde. En effet, les connaissances concernant les PE sont encore trop lacunaires pour pouvoir déterminer exactement les causes et les effets. Ces troubles pourraient aussi dépendre de facteurs environnementaux comme l’âge ou la nutrition. 64 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 1.3. Chez les travailleurs exposés aux PE Dans la sphère professionnelle, les expositions aux PE sont multiples. D’où les problèmes pour établir des relations causales entre substance incriminée et anomalie de la santé. Cependant, à la différence de la population générale, ces expositions sont souvent plus fortes. Les mécanismes d’action sont-ils les mêmes que ceux observés à faibles doses ? Et peut-on imputer directement aux PE les anomalies observées chez les travailleurs ? Cependant, l’Institut National de Recherche de la Sécurité (INRS) récence différentes études réalisées dans divers secteurs du monde professionnel (83). 1.3.1. Les salariés du secteur de l’industrie pharmaceutique 1.3.1.1. - Production d’hormones stéroïdiennes Selon une étude sur des travailleurs exposés/non exposés de Suciu et al. en 1973 (83), on observe une augmentation statistiquement significative de la fréquence des douleurs testiculaires et des troubles de la libido chez 22 salariés affectés à la fabrication d’une hormone progestative : l’acétoxyprogestérone. Il a été mis en évidence chez 7 de ces 22 salariés une baisse des 17-cétostéroïdes urinaires. Ceci serait lié au blocage périodique de l’hormone lutéinisante (LH) par les hormones progestatives et ce blocage serait réversible donc les effets disparaîtraient après amélioration des conditions de travail qui se traduit par la non-exposition à la substance impliquée. - Une étude de rapport de cas de Harrington et al. en 1978 (83) a mis en évidence 5 cas de gynécomasties avec ou sans troubles de la libido ainsi qu’1 cas de galactorrhée parmi 25 salariés hommes travaillant à la fabrication des estrogènes de synthèse. Chez les salariés femmes, on récence 12 cas de syndromes intermenstruels parmi 30 femmes exposées. On a aussi observé que le taux d’éthinyl-estradiol sanguins étaient plus élevés chez les personnes les plus exposés, c’est-à-dire celles qui se trouvaient à la production et au contrôle qualité. - Une autre étude exposés/non exposés de Mills et al. en 1984 (83) a mis en évidence une augmentation statistiquement significative de la fréquence de gynécomasties (8 cas), des nodules mammaires (7 cas) et des écoulements mammaires (3 cas) chez 22 hommes exposés aux estrogènes synthétiques et à la progestérone. On note aussi des irrégularités du cycle menstruel chez 5 femmes sur 6 exposés aux mêmes substances. 65 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Au niveau des dosages hormonaux, on note une diminution statistiquement significative du taux d’estrogènes naturels sanguins chez les sujets comparés aux sujets témoins. Cependant, on ne note pas de différence au niveau des taux de LH, FSH, prolactine et testostérone. 1.3.1.2. - Fabrication de corticostéroïdes Dans une étude de rapport de cas de Newton et al. en 1978 (83), on observe une dépression de l’axe corticotrope chez 12 salariés employés dans la fabrication de bétaméthasone. On recense 1 cas de nausées et vomissements ainsi qu’un test anormal au Synactène® chez 8 salariés sur 12. Une amélioration est notée lors de l’amélioration des conditions de travail qui correspond à l’arrêt de l’exposition à la substance. Quelques rappels de terminologie : - Une étude de rapport de cas est une description de cas inhabituel et intéressant. - Une méta-analyse consiste à rassembler les données issues d'études comparables et à les ré-analyser au moyen d'outils statistiques adéquats. Elle regroupe les études pertinentes qui essaient de répondre à une question précise de manière critique et quantitative. - Une étude de cas-témoins observe de manière rétrospective les caractéristiques des malades (les cas) comparées à celles des sujets indemnes de la maladie (les témoins). Elles sont particulièrement adaptées pour les maladies rares ou celles qui présentent une longue période entre l’exposition et l’issue. - Une étude de cohorte ou étude exposés-non exposés est une étude d'observation, le plus souvent prospective, dans laquelle un groupe de sujets exposés (à des facteurs de risque d'une maladie ou à un traitement particulier) est suivi pendant une période déterminée et comparé à un groupe contrôle non exposé - Une étude d’observation rétrospective prend en compte des données recueillies dans le passé à l’aide des dossiers médicaux par exemple : la mesure de l’exposition survient après la survenue de l’événement. - Odd ration = rapport de la cote d'un évènement arrivant à un groupe A d'individus, par exemple une maladie, avec celle du même évènement arrivant à un groupe B d'individus. Si l'odds ratio est : 66 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) o proche de 1, la maladie est indépendante du groupe o supérieur à 1, la maladie est plus fréquente dans le groupe A que dans le groupe B o inférieur à 1, la maladie est moins fréquente dans le groupe A que dans le groupe B o proche de zéro, la maladie est beaucoup moins fréquente dans le groupe A que dans le groupe B - Risque relatif RR = risque de survenue d'un événement dans un groupe par rapport à l’autre 1.3.2. Les agriculteurs manipulant les pesticides Chez les agriculteurs, la plupart des études recensées dans la littérature étudie la relation entre pesticides et cancers hormono-dépendants. - Cancer de la prostate : un excès de risque non significatif est mis en évidence dans 20 études (1 rétrospective, 10 cas-témoins et 9 mortalité proportionnelle) alors que 6 études (1 méta-analyse et 5 rétrospectives) sont négatives (83), - Cancer du testicule : 9 études retrouvent un excès de risque non significatif (2 rétrospectives, 6 cas-témoins et 1 mortalité proportionnelle), 8 études sont négatives (1 méta-analyse, 6 cas-témoins et 1 mortalité proportionnelle) mais 1 étude cas-témoin est positive et statistiquement significative avec 357 cancers retrouvés (83), - Cancer du sein : 3 études sont négatives (1 méta-analyse, 1 rétrospective et 1 mortalité proportionnelle) (83), - Cancer de l’endomètre : 3 études montrent un excès de risque non statistiquement significatif (1 rétrospective, 1 prospective, 1 mortalité proportionnelle) (83), - Cancer de l’ovaire : 2 études sont négatives (1 rétrospective et 1 prospective) alors qu’une étude rétrospective est positive et statistiquement significative (83), - Cancer de la thyroïde : 2 études sont positives mais non statistiquement significatives (1 étude rétrospective et 1 mortalité proportionnelle) (83). NB : Excès de Risque Individuel (ERI) : Probabilité pour un individu exposé de développer la maladie considérée du fait de la source de pollution étudiée. 67 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 1.3.3. - Les applicateurs de pesticides Cancer de la prostate : 1 étude rétrospective est retrouvée positive et statistiquement significative pour l’exposition aux herbicides : 1148 cas de cancers avec une relation dose-effet (Morrison, 1994). 6 études retrouvent un excès de risque non statistiquement significatif (1 étude rétrospective, 4 cas-témoins, 1 mortalité proportionnelle) et 4 études sont négatives (2 rétrospectives, 2 cas-témoins) (83), - Cancer du testicule : 3 études retrouvent un excès de risque non statistiquement significatif (2 rétrospectives et 1 cas-témoins) alors que 2 études cas-témoins sont négatives (83), - Cancer de l’ovaire : une étude cas-témoin retrouve un excès de risque statistiquement significatif avec 60 cas de mésothéliomes primitifs de l’ovaire recensés. (Donna, 1984) (83). NB : attention, certaines études prenaient en considération les herbicides et d’autres les pesticides. Pour conclure, les auteurs constatent que les agriculteurs et les applicateurs de pesticides semblent avoir une plus forte incidence de certains cancers hormonaux, notamment celui de la prostate mais ces études n’ont pas pu permettre ni d’identifier quels étaient les pesticides imputés et ni quels étaient les différents niveaux d’exposition. De plus, si l’on s’attarde à d’autres études ayant pour objet un pesticide donné, on retrouve des anomalies du sperme pour la plupart d’entre elles (83) : - DDT (insecticide) et oligospermie (Kelce, 1995), - Chlordécone (insecticide) et diminution du nombre et de la mobilité des spermatozoïdes (Willems, 1981), - Vinclozoline (fongicide) et oligospermie ainsi qu’une perturbation du taux de FSH (en augmentation) (Zaber, 1995), - DBCP et azoo- ou oligospermie et diminution de la fertilité masculine ainsi qu’augmentation des avortements spontanés et anomalie du sex-ratio. On retrouve aussi une augmentation du taux de FSH, ainsi que du ratio testostérone/gonadotrophine avec une relation dose-effet. (Whorton, 1977), Certaines études s’attardent à leur tour à des xénœstrogènes autres que les pesticides (83) : 68 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - Dans une étude de 1996 conduite par Grajewski et s’intéressant aux fabricants de DAS (acide diaminostilbène-disulfonique) o Observation d’une diminution de la libido par diminution de la testostérone sérique chez 37% des 43 salariés, o Diminution du taux de testostérone totale plasmatique statistiquement significative avec une relation dose-effet et durée d’exposition-effet chez les 36 sujets exposés comparés aux 22 sujets témoins. On note cependant des taux de FSH, LH, estradiol, prolactine sanguine normaux. - Dans une étude cas-témoins conduite en 2000 par Ohlson et s’intéressant au diéthylhexylphtalate(DEHP) dans l’industrie plastique, il est mis en évidence une augmentation du risque de séminome (cancer des cellules du testicule) chez les personnes exposées aux DEHP, soit 148 cas comparés aux 314 témoins. - Concernant l’étude d’exposition aux dioxines conduite par Egeland en 1994, on observe une diminution de la quantité du sperme ainsi que des anomalies du sex-ratio (avec augmentation des filles) chez 248 salariés exposés comparés aux 572 témoins. On note également une diminution du ratio testostérone/gonadotrophine ainsi qu’une augmentation des taux de LS et FSH. - Dans une dernière étude portant sur les PCBs, on note une augmentation du volume de la thyroïde ainsi que du taux d’acide anti-peroxydase et anti-thyroglobuline chez 238 salariés fabricants ces PCBs. Dans une deuxième étude de 35 cas comparés à 89 témoins, on observe une augmentation des thyroïdites auto-immunes chez les personnes exposées. (Bahn 1980 et Langer 1998) VII. Leurs particularités 1. Absence de consensus sur la définition Ils sont bien définis selon leur mode d’action. En effet, ils entraînent une interaction avec le système hormonal mais leur définition n’inclut pas le type d’effets générés. Certaines définitions considèrent que les PE ont des effets délétères sur l’organisme comme l’OMS, alors que d’autres n’incluent pas cette dimension comme l’Agence américaine de protection de l’environnement. On comprend donc la difficulté pour réglementer ces substances. Quelles substances interdire ? A quel titre ? (28,30) 69 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Par ailleurs, certains chercheurs tendent à démontrer que ces substances chimiques peuvent stimuler ou réduire l’activité d’une hormone sans nécessairement perturber le fonctionnement du système endocrinien. De plus, étant donné que l’on connaît encore mal les effets de ces substances sur l’homme, d’autres chercheurs jugent qu’il est encore trop tôt pour qualifier leur action de « perturbatrice » (28,30). 2. Effet faible dose / Effet non monotone – courbe en U Classiquement et intuitivement, « la dose fait le poison » comme dirait le célèbre Paracelse. C’est-à-dire que plus la dose est importante, plus l’effet produit est important ; c’est ce qu’on appelle les substances à effet monotone (28,84). Dans le cas des PE, il se pourrait qu’ils interagissent avec les récepteurs hormonaux en ne suivant pas ce principe, et qu’ils soient plus actifs à des doses faibles qu’à des doses fortes ; ce seraient donc des substances à effet non monotone. La relation effet-dose n’est donc pas linéaire. Et les courbes auraient un aspect inhabituel en « U ». (figure 31) Cependant, cet effet, dénotant avec les principes de la toxicologie classique est difficile à démontrer (32). Figure 31 : La courbe en U des PE (28) 70 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Si cet effet tend à être démontré grâce aux différents programmes de recherche actuels concernant les PE, cela voudrait donc dire que les PE agiraient sans effet de seuil et donc à de très faibles doses, c’est-à-dire à des doses inférieures aux valeurs de référence. Or, il est important de garder à l’esprit que nous sommes tous exposés à de faibles doses de PE environnementaux de manière chronique et ubiquitaire (84). En résumé, l’une des caractéristiques des PE serait qu’il n’existe pas de dose seuil en dessous de laquelle l’exposition est sans effet. C’est ce qu’ont mis en évidence Sheehan et al. dans une étude de 1999. En effet, en étudiant le phénomène d’inversion de sexe induit par l’œstradiol chez les embryons de tortues, ils ont démontré qu’il n’existait pas de dose seuil en dessous de laquelle le phénomène n’était plus du tout observé (85). Ces effets seraient plus importants dès lors que l’exposition aurait lieu pendant le développement ou durant la période de gestation. (cf partie 4 : fenêtre d’exposition / délai de latence). 3. Effet cocktail La toxicologie étudie les substances indépendamment les unes des autres afin d’en caractériser les effets propres. Or, dans l’environnement général, les organismes sont exposés à une multitude de substances se trouvant dans différents milieux (eau, air, alimentation…) et qui sont susceptibles d’agir en synergie. C’est ce que l’on appelle « l’effet cocktail » (28,32,86). C’est ainsi que des substances qui sont considérées comme non toxiques lorsqu’elles sont prises indépendamment peuvent présenter des effets nocifs si elles agissent en synergie. Mais l’on peut aussi voir les effets d’un mélange dépasser la somme des effets de chacune des substances prises séparément. Une étude de Hayes et al. en 2006 (87) a mis en évidence la synergie d’action du Smétolachlore avec l’atrazine. Cette synergie démultiplie les effets nocifs de l’atrazine chez les amphibiens ; alors que le S-métolachlore est un herbicide qui seul n’a aucun effet sur les amphibiens. 71 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) On comprend aisément le travail supplémentaire à fournir pour tester toutes les différentes combinaisons de substances possibles. Hayes et al. (87) proposaient alors de ne plus étudier les substances de façon « pures » mais de partir des combinaisons déjà existantes dans la nature, combinaisons auxquelles chacun d’entre nous est exposé chaque jour. 4. Fenêtre d’exposition / délai de latence Les PE sont également caractérisés d’une part par une fenêtre d’exposition et d’autre part par un délai de latence. La fenêtre d’exposition correspond à la période pendant laquelle une personne se trouve exposée à une substance (ici, perturbatrice endocrinienne). Et le délai de latence correspond à la période entre l’exposition et la survenue d’effets indésirables (32,34). Concernant la fenêtre d’exposition, il a été mis en évidence que les expositions aux PE à l’âge adulte auraient des conséquences très différentes des expositions lors de périodes dites « vulnérables » comme la période intra-utérine, la période post-natale, les premières années de vie ou encore lors de la puberté. Lors de ces périodes, les hormones jouent un rôle essentiel au développement physiologique de l’organisme et les PE sont donc susceptibles de nuire à ces différentes étapes alors qu’à l’âge adulte, ces mêmes étapes sont abouties et qu’une exposition serait compensée par les mécanismes de régulation du système hormonal. Aucun dommage ne serait alors perceptible malgré une perturbation réelle au niveau moléculaire (28,34). Les PE induiraient des modifications épigénétiques. Il ne s’agit pas de mutations génétiques mais de processus (acétylation, méthylation, phosphorylation, ubiquitinylation de la chromatine, modifications post-transcriptionnelles, etc.) qui altèrent l’expression des gènes et qui sont susceptibles de se transmettre aux descendants dès lors qu’elles affectent les gamètes. (cf partie 5 : effets transgénérationnels) (2,32) Pour prendre une métaphore, la génétique renvoie à l’écriture des gènes, l’épigénétique à leur lecture : un même gène pourra être lu différemment selon les circonstances. 72 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) En conclusion, ce ne serait donc pas la dose qui ferait le poison mais la période d’exposition comme l’écrit Théo Colborn dans son livre « Our Stolen Future » en 1996. Il se pourrait donc qu’une maladie apparaissant à l’âge adulte ait pour origine une exposition fœtale. C’est le cas des filles de mères traitées au DES durant leur grossesse et qui a conduit au développement de cancer du vagin à l’âge adulte. Pour illustrer ces propos, prenons l’étude menée par André Cicolella (34) qui met en évidence que le BPA entraînerait des modifications irréversibles selon la période de l’exposition. Chez l’adulte, l’exposition aux polluants aggrave et accélère le développement de pathologies sousjacentes en interagissant avec les gènes (tableau 5). Période fœtale Enfance Baisse de la fertilité Cancers hormonaux (seins, testicules, prostate) Malformations au niveau de l’appareil reproducteur Système reproducteur Système nerveux central Atteinte du système nerveux central Développement Retard de croissance intra utérin Système respiratoire Système cardiovasculaire Age adule Effets neurotoxiques Problèmes d’apprentissage Troubles du comportement Allergies respiratoires Système imunitaire Système métabolique Maladies cardiovasculaires Troubles de l’immunité Perturbations du métabolismes (diabète de type 2, obésité) Tableau 4 : Les effets potentiels en fonction de la fenêtre d'exposition (34) Il a été mis en évidence également, un délai de latence entre l’exposition et l’apparition des effets. Ce délai peut parfois être particulièrement long. En effet, si l’organisme est plus vulnérable à une exposition durant les stades de développement, les effets de cette exposition sont en général différés et touche le plus 73 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) généralement l’individu au stade adulte voire la génération suivante (comme dans le cas du DES par exemple). La prise en compte de cette période de latence est donc indispensable pour la bonne évaluation des effets d’une substance. Cette latence peut résulter du temps nécessaire pour la mise en place des mécanismes physiopathologiques qui entraînent la dysfonction mais aussi du fait que la ou les fonctions concernées, comme la reproduction par exemple, ne s’expriment pleinement qu’après un certain délai de maturation (au cours de la puberté). Cette latence est un inconvénient majeur dans l’identification des PE mis en jeu. En effet, lors de l’apparition des troubles, le PE ou ses métabolites ne sont souvent plus présent dans l’organisme (86). Figure 32 : Les périodes critiques pour l'exposition aux PE (86) Ce schéma met en évidence d’une part, les « périodes critiques » d’exposition à un PE. On considère que si l’exposition a lieu durant ces périodes, les effets seraient maximum. Et 74 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) d’autre part, on voit très bien que la majorité des « périodes critiques » a lieu durant la vie intra-utérine. Ainsi, on comprend aisément qu’une exposition pendant la période fœtale peut avoir des effets irréversibles sur les différentes étapes du développement (86). Une exposition chez l’enfant peut également avoir de graves effets de part le développement incomplet et immature des différentes organes. Chez l’adulte, la période de fécondité est une période vulnérable. En effet, le cycle menstruel chez la femme est rigoureusement réglé par les interactions entre plusieurs hormones et la spermatogénèse chez l’homme fait également intervenir une série de mécanismes régulés par l’axe hypothalamo-hypophysaire-gonadique (86). 5. Effets transgénérationnels Les PE sont non seulement susceptibles d’affecter la génération exposée, mais également les descendants de cette génération par l’altération des mécanismes d’expression des gènes. On parle de processus « épigénétiques » (2,32,86). En effet, comme nous l’avons abordé dans la partie précédente, l’effet transgénérationnel met en lumière l’hypothèse d’une programmation épigénétique : les PE interféreraient avec le processus normal de méthylation de l’ADN ce qui conduiraient à des anomalies d’expression des gènes. Et lorsque ces modifications épigénétiques toucheraient les cellules germinales, les effets seraient alors susceptibles d’être transmis aux descendants (35,36). Figure 33 : L'effet transgénérationnel (33) 75 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 5.1. La première preuve de cet effet transgénérationnel : le DES Chez les descendants masculins de mères exposées au diéthylstilbestrol (DES) (figure 34), il a été rapporté une augmentation du taux d’hypospadias et de cryptorchidies ainsi qu’une diminution de la fertilité alors que chez les descendants féminins. Cette exposition a entraîné des anomalies du développement de l’appareil reproducteur, des cancers et notamment du vagin ainsi que des cas de stérilité (88,89). Figure 34 : Structure chimique du DES (90) De plus, dans une étude menée en 2007 par Cravedi et al. (45), des anomalies de la reproduction en 2ème génération ont également été mises en évidence. On peut donc conclure à une atteinte transgénérationnelle. 5.2. Le Vinclozoline Le vinclozoline (figure 35) est un fongicide utilisé en horticulture. Il a été également retrouvé une atteinte transgénérationnelle pour ce composé. En effet, après injection du fongicide à des souris femelles enceintes, on a observé une intersexualité chez les souriceaux mâles associées à des malformations péniennes et à une hypofertilité. Ces anomalies ont été retrouvées jusqu’à la 3ème génération. Les chercheurs ont conclu en postulant que les PE interfèrent avec les processus normal de la méthylation de l’ADN, ce qui conduit à des anomalies de l’expression des gènes associés aux fonctions de reproductions et donc transmis aux générations futures (91). Figure 35 : Structure chimique du vinclozoline (92) 76 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Cependant, les expériences animales ne peuvent pas être extrapolées si simplement à l’homme. Toutefois, il peut être affirmé que les PE entraîneraient des pathologies sur plusieurs générations. Cet effet transgénérationnel a été observé par Crews et al. dans une étude en 2007 (93) chez des rats exposés à ce fongicide anti-androgène. Ils ont mis en évidence que les descendants (sur trois générations) de mâles exposés à ce composé connaissaient un succès reproducteur moindre que les rats témoins, c’est-à-dire que les femelles préféraient les mâles dont l’ancêtre n’avait pas été exposé au fongicide alors que les mâles n’avaient aucune préférence concernant les femelles issues ou non d’ascendants traités au vinclozoline. On peut donc conclure non seulement à un effet transgénérationnel mais aussi à un effet trans-population. 6. La bioaccumulation Une autre particularité des PE réside en leur bioaccumulation (figure 35). En effet, certains d’entre eux s’accumulent au fil de la chaîne alimentaire pour se concentrer dans les derniers maillons, c’est-à-dire, entre autre, l’homme. Les maillons situés en fin de chaîne peuvent concentrer des doses de pesticides pouvant atteindre 10 000 fois celle des premiers maillons (47). Figure 36 : La bioaccumulation (43) 77 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Ce schéma montre l’exemple de la bioaccumulation des pesticides, ici les PCB au niveau de la chaîne alimentaire aquatique des Grands Lacs aux Etats Unis d’Amérique. Les taux sont donnés en parties par million (ppm). Et l’on voit bien que plus on avance dans la chaîne alimentaire, plus le polluant se concentre. Figure 37 : La chaîne alimentaire (43) La figure 37 rappelle le cycle de la chaîne alimentaire et l’homme est considéré comme un « super-prédateur ». On comprend donc l’ampleur que peut avoir chez lui la bioaccumulation, également appelée bioamplification des PE (88). Il est aussi important de rappeler que les aliments que nous consommons ont pu être transformés en amont, ce qui ajoute en plus de la bioaccumulation déjà existante des produits indésirables qui peuvent être nocifs… 7. La complexité des mécanismes et récepteurs impliqués La multiplicité des récepteurs impliquée dans la perturbation endocrinienne complexifie les connaissances des mécanismes mis en jeu (86). Une illustration est apportée concernant le bisphénol A (BPA) qui interagit avec 3 types de récepteurs aux œstrogènes (ERalpha, ERbêta, ERRgamma), avec le récepteur orphelin des dioxines ou arylhydrocarbone (AhR), avec le récepteur aux hormones thyroïdiennes (T3R) et avec un récepteur couplé aux protéines G (GPR30). Dans le cas du DDT, des travaux ont montré l’implication des récepteurs aux œstrogènes, au glutamate et AhR (94,95). 78 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) VIII. Les cas avérés ou qui font réfléchir 1. Le diéthylstilbestrol ou DES Le DES, un œstrogène de synthèse, commercialisé sous le nom de Distilbène® en 1948 en France, a été prescrit pendant près de 3 décennies afin éviter les avortements spontanés, de diminuer le risque de fausses couches et d’autres complications liées à la grossesse (28,33,96). Pendant cette période, environ 200 000 femmes auraient été traitées par le DES pendant leur grossesse, et 160 000 enfants seraient nés. Il a été interdit en France en 1977 suite au lien établi entre administration de DES à des femmes enceintes et survenue de cancers du vagin et du col de l’utérus chez les filles des mères traitées (33,35). Les principaux troubles observés suite à l’exposition in utero au DES sont nombreux : cancer du vagin, de l’utérus et des trompes, des troubles de la fertilité, des grossesses extra-utérines, un risque accru de fausses couches précoces et tardives, d’hémorragies, etc... A savoir que des anomalies ont aussi été observées chez les garçons telles que des cryptorchidies, des hypospadias, des kystes épididymaires. Aujourd’hui, d’autres anomalies telles que le cancer du sein seraient susceptibles d’être également liées à cette exposition in utero. (28,35,96). C’est pourquoi ces femmes et ces enfants font aujourd’hui l’objet d’un suivi particulier tout comme la troisième génération qui paraît souffrir des mêmes maux du fait de l’effet transgénérationnel (96). 2. Le Chlordécone aux Antilles Cet insecticide organochloré a été utilisé jusqu’en 1993 dans les bananeraies pour lutter contre le charançon (97). 79 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 38 : Structure chimique du chlordécone (98) Il est aujourd’hui interdit et classé cancérogène possible pour l’homme (groupe 2b) par le CIRC. En effet, il possède des propriétés œstrogéniques qui le classe dans le groupe des PE et de récentes études montrent une relation entre l’exposition au chlordécone et la survenue de cancer de la prostate ; cependant, le lien de causalité n’est encore pas établi de manière certaine (33,35,97). L’étude de Multigner conclut au fait que l’exposition à la chlordécone est associée à un risque accru de survenance du cancer de la prostate : le risque est multiplié par 1,8 pour toute personne ayant une concentration en chlordécone dans le sang supérieure à 1µg/l (99). Mais en réalité, en dehors de cas comme le DES ou de situations accidentelles, il n’a pas encore été établi de manière certaine une relation entre exposition à une substance et effets néfastes sur la santé de l’homme via une perturbation endocrinienne (27). IX. Méthodes d’évaluation des PE Pour évaluer un mécanisme de perturbation endocrinienne, les scientifiques disposent d’une part de tests in vitro et d’autre part de tests in vivo. In vivo, ces tests permettent de mettre en évidence - une activité œstrogénique et/ou anti-œstrogénique : il s’agit du test utérotrophique - une activité androgénique ou anti-androgénique : il s’agit du test de Hershberger In vitro, les tests s’appuient principalement sur les mécanismes d’action cellulaires et moléculaires. Les résultats ne peuvent cependant pas être extrapolés car ils ne tiennent pas 80 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) compte des phénomènes d’absorption, de transport, de biotransformation et d’éliminations subis par le xénobiotique en question (1,74,100,101,102). Tableau 5 : Comment évaluer un PE d'après l'OCDE ? (101) Biens qu’ils soient simples et rapides à mettre en œuvre, les tests in vitro présentent l’inconvénient de produire de nombreux faux-négatifs. Certains composés ne présentant pas un effet œstrogénomimétique in vitro peuvent l’être in vivo à la suite de leur métabolisation. Par ailleurs les tests in vitro sont tellement sensibles qu’ils peuvent induire une réponse positive, alors qu’in vivo, le composé testé n’a aucun effet xéno- œstrogénique. 81 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Tableau 6 : Principes des tests utilisés (100) 1. Tests in vitro Ces tests permettent de répondre aux problèmes de coût, d’éthique et de réalisation des tests in vivo. Ils évaluent l’effet d’une substance sur des cellules (100,101,102). 1.1. Test de liaison au récepteur Ce test permet de mesurer l’affinité de liaison au récepteur pour une substance à tester. Pour cela, on incube la molécule à tester avec le récepteur lié à son ligand standard radiomarqué. Le déplacement du ligand radiomarqué par la molécule à tester permet d’évaluer l’affinité de cette molécule pour le récepteur (100,101,102). 82 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 1.2. Croissance des cellules MCF-7 ou ZR-75 La croissance de ces cellules mammaires est stimulée par l’œstradiol. Ces cellules sont donc incubées en présence du produit à tester. On pourra ensuite évaluer l’activité œstrogénique ou anti- œstrogénique du produit par inhibition éventuelle de la croissance de ces cellules (100,101,102). 1.3. La transfection de cellules humaines La transfection de cellules humaines par un plasmide codant pour l’expression d’un récepteur répondant à l’œstradiol pourrait être un bon moyen pour détecter l’effet œstrogénomimétique de certains composés. Massaad et al. ont développé en 1998 une séquence ERE hypersensible à l’œstradiol. Cette séquence, appelée overERE, est formée de deux ERE chevauchants ; elle lie d’une manière coopérative deux dimères de récepteur de l’œstradiol de part et d’autre de la double hélice d’ADN. Ces deux séquences chevauchantes ont un effet synergique sur la transcription ; c’est donc un bon moyen de détecter de nouvelles molécules mimant l’effet de l’œstradiol (100,101,102). 1.4. Test sur des levures recombinantes Le vecteur d’expression du récepteur de l’œstradiol ainsi qu’un gène rapporteur contenant dans son promoteur un élément de réponse à l’œstradiol sont introduits dans les levures. Ces levures sont ensuite incubées en présence de la molécule à tester. Si cette dernière mime l’effet de l’œstradiol, elle activera le gène promoteur. Ce test permet également d’être adapté à la détection de l’activité androgénique (100,101,102). 1.5. Test de stéroïdogénèse sur des cellules H295R Les cellules H295R proviennent d’un carcinome adrénocortical malin, développé chez une patiente. Il s’agit d’une lignée immortalisée qui possède la capacité de synthétiser la plupart des enzymes impliquées dans la stéroïdogénèse ainsi que les hormones sexuelles : testostérone, œstradiol et progestérone. Ce test est donc utiliser pour détecter des modifications dans la synthèse des hormones stéroïdes sous l’influence de la substance à tester (100,101,102). 83 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 1.6. Test de l’activité de l’aromatase Ce test permet, à partir de microsomes issus de placenta humain de détecter les substances qui inhibent l’activité de l’aromatase, enzyme chargée de l’aromatisation du cycle A du motif stéroïde (100,101,102). 2. Tests in vivo Ils évaluent l’effet d’une substance sur un organisme vivant, le plus souvent il s’agit du rat de laboratoire. Les trois premiers essais décrits dans ce paragraphe sont validés par les laboratoires internationaux comme le WHO mais il en existe d’autres cités après (100,101,102). 2.1. Test utérotrophique Il a pour but de détecter les substances à activité œstrogénique ou anti-œstrogénique. Pour cela, on expose des rattes immatures à la substance à tester par voie orale ou cutanée. Trois jours après l’exposition, on évalue les variations du poids de l’utérus (100,101,102). 2.2. Test Hershberger Il permet un dépistage des substances androgéniques ou anti-androgéniques. Pour cela, on évalue les variations pondérales de différents tissus ou organes sexuels mâles induites par les substances à tester. Ces tissus ou organes sont le plus souvent la prostate, la vésicule séminale, le muscle bulbo-caverneux, les glandes de Cowper, le pénis etc. Une augmentation de poids statistiquement significative d’au moins deux tissus cibles indique un résultat positif pour la substance testée. A l’inverse, la substance est dite anti-androgène lorsqu’elle induit une diminution significative de la croissance des tissus (100,101,102) 2.3. Test OCDE 407 Pour ce test, on administre par voie orale ou cutanée d’une substance pendant 28 jours sur des animaux, des souris par exemple, mâles ou femelles sexuellement matures. Cette étude permet de recueillir de nombreuses données comme le poids et l’histologie des tissus et glandes endocrines, les taux sériques des hormones, le déroulement des cycles hormonaux ou encore la qualité et la quantité spermatique (100,101,102). 84 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 2.4. Synthèse de la vitellogénine Chez la truite, le gène de la vitellogénine est réglé par l’œstradiol. C’est pourquoi ce test consiste à placer des truites mâles dans un milieu contenant le produit à tester. Le taux de vitellogénine est ensuite dosé afin de déceler la présence d’un composé mimant ou non l’effet de l’œstradiol (100,101,102). 2.5. Le sexe des tortues Le sexe des tortues est déterminé par la température, les œufs incubés à une température de 26°C donneront des mâles alors que les œufs incubés à 31°C donneront des femelles. Cependant, le déterminisme du sexe peut être inversé à la suite d’ajout d’œstradiol. Ainsi, les œufs de tortue placés à 26°C sont enduits du produit à tester. Le sexe à la naissance permettra de déterminer si cette molécule a une action œstrogénique (100,101,102). 2.6. Test pubertaire Ce test sert à identifier les substances chimiques capables d’interagir avec le système endocrinien, essentiellement les gonades, en identifiant les effets sur le développement pubertaire chez le rat femelle ou mâle juvénile ou péripubertaire (100,101,102). 2.7. Etudes de toxicité subchroniques Il s’agit là, d’administrations de doses répétées pendant 90 jours (100,101,102). 2.8. Etudes de toxicité à long terme (OCDE 414, 415, 416…) sur 12 ou 24 mois Ces études ont pour objectif d’identifier le ou les organes cibles, les effets critiques, les signes de toxicité et de définir une NoAEL (100,101,102). NB : les numéros font références aux lignes directrices de l’OCDE concernant pour les essais de produits chimiques (exemple : OCDE 414) 2.9. Etudes de toxicité de la reproduction Ces études sont de trois types : étude de toxicité pour le développement prénatal, étude de toxicité pour la reproduction sur une génération et étude de toxicité pour la reproduction sur deux générations ultérieures (100,101,102). 85 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 3. Les tests in silico Le but de ces approches in silico est de pouvoir prédire, à l’aide de bases de données informatiques, le caractère PE d’une molécule quelconque. Une telle modélisation repose sur le principe que l’activité d’une molécule peut être prédite grâce à sa structure, par analogie avec des molécules connues. Différents types de modèles peuvent être utilisés, mais nous ne retiendrons que le modèle QSAR ou Quantitative Structure-Activity Relationship qui consiste à prédire l'effet ou le comportement d'une molécule d'après sa structure chimique (100,101,102). D’autres difficultés résident dans l’étude de l’impact des différentes xénohormones : certaines pouvant être sans effet quand elles sont testées à faibles doses individuellement, alors que testées en combinaison, elles seraient toxiques aux mêmes doses. De plus, les phénomènes impliqués sont multifactoriels et les effets observés non spécifiques. En outre, les PE pourraient entraîner des effets néfastes, même lors d’exposition unique et faible mais à une période critique de la grossesse, effets qui ne pourraient être mis en évidence qu’à l’âge adulte. 86 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Chapitre 3 : Les cosmétiques Avant d’étudier spécifiquement les différents PE retrouvés dans les produits cosmétiques, il convient de faire un bref chapitre sur les cosmétiques en général. I. Définition Un produit cosmétique est une « substance ou un mélange destinée à être mis en contact avec les parties superficielles du corps humain (l’épiderme, les systèmes pileux et capillaire, les ongles, les lèvres et les organes génitaux externes) ou avec les dents et muqueuses buccales, en vue, exclusivement ou principalement, de les nettoyer, de les parfumer, d’en modifier l’aspect, de les protéger, de les maintenir en bon état ou d’en corriger les odeurs » (103). On peut classer les produits cosmétiques en trois classes distinctes (104): - Ceux à rincer comme les shampoings, les gels douche ou encore les produits pour le rasage, etc. - Ceux qui restent sur la peau comme les déodorants ou anti-transpirants, les crèmes, gels ou huile pour la peau ou encore les produits antirides ou solaires, etc. - Et le maquillage comme les fonds de teint, les poudres, les rouges à lèvres, les mascaras, etc. Attention, tout produit destiné à être ingéré, inhalé, injecté ou implanté dans l’organisme ; les compléments alimentaires à visée esthétique appelés de manière abusive « cosmétiques par voie orale » ; les solutions de lavage oculaire, auriculaire ou encore nasal ainsi que les produits de tatouage ne sont pas considérés comme étant des produits cosmétiques (104). II. Règlementation 1. Etiquetage D’après le code de la santé publique (CSP), l’emballage du produit cosmétique doit comporter (104) : - Le nom commun du produit - Les nom et adresse du fabriquant 87 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - Le pays d’origine pour les produits importés - Le poids ou le volume du contenu, à l’exception des emballages contenant moins de 5g ou moins de 5mL et pour les échantillons gratuits et les unidoses - La durée d’utilisation annoncée soit par la mention « à utiliser de préférence avant fin », soit par un symbole suivi de la durée d’utilisation après ouverture : Figure 39 : La durée de durabilité minimale d'un cosmétique (104) Figure 40 : La durée d'utilisation après ouverture (104) - Les précautions particulières d’emploi - Le numéro de lot - La fonction du produit (sauf si cela ressort de la présentation du produit) - La liste des ingrédients 2. Ingrédients La liste des ingrédients figure sur l’emballage ou en cas d’impossibilité pratique, sur une notice placée dans l’emballage. Les ingrédients sont mentionnés dans l’ordre décroissant de leur importance pondérale et par leur dénomination commune appelée « noms INCI » ; ou à défaut par une autre dénomination (chimique, numéro EINECS, IUPAC, CAS ou colour index) (104, 105, 106). 88 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Le numéro EINECS permet d'identifier une substance chimique répertoriée dans l'Inventaire Européen des Substances chimiques Commerciales Existantes (EINECS). La nomenclature IUPAC est un ensemble de systèmes permettant de nommer les composés chimiques. Elle est développée et mise à jour par l'Union internationale de chimie pure et appliquée (IUPAC en anglais). Le numéro CAS d'une substance correspond à son numéro d'enregistrement unique auprès de la banque de données de Chemical Abstracts Service (CAS), une division de l'American Chemical Society (ACS). Quelques exceptions (104, 105, 106) : - Les ingrédients en concentration inférieure à 1% peuvent être mentionnés dans le désordre après ceux en concentration supérieure à 1%, Un conservateur dosé à 0,9% pourra donc être inscrit après une huile essentielle dosée à 0,1% ! C'est d'ailleurs parfois le cas, pour nous faire croire que la précieuse plante est en meilleure place dans la liste… - Les colorants peuvent être mentionnés dans le désordre après les autres ingrédients. Ils sont désignés soit par leur numéro (exemple : E106), soit par leur dénomination, - Les termes « parfum » ou « arôme » indiquent la présence d’ingrédients ayant pour rôle de parfumer le produit cosmétique. Cependant, s’il s’agit de substances susceptibles de provoquer des allergies, elles doivent être détaillées dans la liste des ingrédients, - Tout ingrédient présent sous la forme de nanomatériau doit être clairement indiqué dans la liste des ingrédients. Le nom de l’ingrédient est suivi de la mention [nano]. Ci-dessous l’exemple d’une étiquette de produits cosmétiques : Figure 41 : Exemple d'une étiquette d'un produit cosmétique (104) 89 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) La nomenclature INCI (= International Nomenclature of Cosmetic Ingredients) a été conçue en 1973 et rendue obligatoire en 1998 en Europe. Elle permet un langage international. Les deux inconvénients majeurs sont dans un premier temps, l’aspect incompréhensible pour les consommateurs et dans un deuxième temps, la non connaissance des quantités exactes, des origines des matières premières et de leurs modes de fabrication (107). Cependant, c’est aujourd’hui le seul moyen de connaître, même de manière imparfaite, ce que contient un produit cosmétique. Et l’on peut considérer que les 5 premiers ingrédients de la liste représentent en moyenne 70% des ingrédients. Il est donc important pour le consommateur de s’attarder sur ces premiers ingrédients pour faire les meilleurs choix. 3. Conditions de mise sur le marché Dans un premier temps, le fabricant désigne une personne responsable pour le produit cosmétique mis sur le marché. C’est le fabricant lui-même qui garantit la sécurité et constitue le dossier technique ou dossier d’information sur le produit (DIP). Le dossier technique est mis à disposition des autorités de contrôle si nécessaire, conservé pendant 10 ans à partir de la date à laquelle le dernier lot a été mis sur le marché et comprend notamment la formule qualitative et quantitative du produit, la description des conditions de fabrication, une déclaration de conformité aux bonnes pratiques de fabrication, et un rapport de contrôles et d’évaluation de la sécurité pour la santé humaine. Ce rapport d’évaluation est actualisé pendant toute la durée de vie du produit cosmétique (104). 4. La surveillance du marché cosmétique Elle est encadrée par l’ANSM qui évalue, inspecte et contrôle la qualité et la sécurité des produits cosmétiques grâce à des équipes d’experts internes et externes, des équipes d’inspecteurs et des laboratoires d’analyses. Elle vérifie l’application de la réglementation, la conformité de la composition et de la qualité des produits, etc. L’agence possède également un système de gestion des effets indésirables liés à l’utilisation des produits cosmétiques (104). La DGCCRF (direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes) et la DRASS (directions générales des affaires sanitaires et sociales) coordonnent également l’évaluation des produits cosmétiques en partenariat avec l’ANSM. 90 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) La surveillance peut aboutir à des demandes de mise en conformité, des mesures de police sanitaire ou décisions de police sanitaire (DPS), des recommandations ou encore à des modifications de la réglementation (104). La cosmétovigilance est un système de surveillance et d’enregistrement des effets indésirables liés aux produits cosmétiques après leur mise sur le marché. Toute personne, quelle qu’elle soit, peut déclarer un effet indésirable. (Cf déclaration en annexe n°3) Cependant, elle impose aux personnes responsables, aux distributeurs ou encore aux professionnels de santé de déclarer sans délai à l’ANSM tous les effets indésirables graves dont ils ont connaissance. Ils peuvent également déclarer les autres effets indésirables et ceux susceptibles de résulter d’un mésusage. L’ANSM prendra ensuite les décisions qui s’imposent (104). Un effet indésirable grave se définit comme une réaction de l’organisme à l’utilisation normale ou raisonnablement prévisible d’un produit cosmétique, entraînant une incapacité fonctionnelle temporaire ou permanente, un handicap, une hospitalisation, des anomalies congénitales, un risque vital immédiat ou un décès. (article 2, point p du règlement cosmétique) Un mésusage, quant à lui résulte d’une utilisation non conforme du produit cosmétique comme mentionné sur l’emballage. (par exemple, sa zone d’application) 5. Publicité, allégations et labels 5.1. La publicité et les allégations La publicité et les allégations concernant les produits cosmétiques sont régies par l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité ou ARPP. (annexe n°4) L’article 20 du règlement 1223/2009 relatif aux produits cosmétiques stipule que les allégations doivent répondre à 6 critères communs établis par la Commission européenne (108,109) : - Conformité aux lois, - Véracité, - Fondement sur des preuves, - Honnêteté, 91 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - Loyauté, - Permettre un choix avisé aux consommateurs. 5.2. Les labels Les deux principaux labels retrouvés sur l’emballage des produits cosmétiques sont les labels « bio » et « eco » de la charte COSMEBIO® (annexe n°5). Le label « BIO » (figure 42) certifie (110) : - au minimum : 95% d’ingrédients naturels ou d’origine naturelle. - au minimum : 95% des ingrédients végétaux sont issus de l’Agriculture Biologique - au minimum : 10% de l’ensemble des ingrédients sont issus de l’Agriculture Biologique NB : Les produits cosmétiques comportent souvent 50 à 80% d’eau par définition non certifiables. Figure 42 : Le label "BIO" (110) Le label « ECO » (figure 43) certifie (110) : - au minimum : 95% d’ingrédients naturels ou d’origine naturelle - au minimum : 50% des ingrédients végétaux sont issus de l’Agriculture Biologique - au minimum : 5% de l’ensemble des ingrédients sont issus de l’Agriculture Biologique NB : Les produits cosmétiques comportent souvent 50 à 80% d’eau par définition non certifiable. 92 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 43 : Le label "ECO" (110) Ces logos ne sont délivrés que par l’association COSMEBIO® qui est la plus importante association professionnelle française de cosmétique écologique et biologique. Elle fédère l’ensemble des acteurs de la filière cosmétique et représente à ce jour près de 400 adhérents français et étrangers: laboratoires et marques distributrices, fabricants à façon et sous-traitants, fournisseurs d’ingrédients… (110). 93 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Chapitre 4 : Les perturbateurs endocriniens dans les produits cosmétiques I. Les phtalates Les phtalates sont des composés utilisés comme agents fixateurs dans les produits cosmétiques afin d’augmenter le pouvoir pénétrant du produit ou encore d’empêcher le vernis de craqueler (33,111, 112). Les phtalates se cachent dans nos produits cosmétiques sous d’autres noms comme « parfum » (112). Ils sont particulièrement incriminés en raison de la perturbation endocrinienne qu’ils entraîneraient. En effet, plusieurs études les qualifient de PE : ils seraient notamment toxiques pour la reproduction. Une étude de 2012 a montré que l’exposition aux phtalates des testicules de l’homme adulte est responsable d’une diminution de près de 30% de la production de testostérone ainsi que de la réduction de la taille des testicules adultes (113). Une autre étude menée en 2010 chez des jeunes filles a mis en évidence que les phtalates seraient responsables d’une puberté précoce chez celles-ci (114). Une autre étude menée en 2009 auprès d’un échantillon de femmes régulièrement exposées aux phtalates met en évidence un risque 3 fois plus élevé pour celles-ci de donner naissance à un garçon souffrant d’hypospadias (115). Ces exemples d’études ont permis de mettre en évidence un lien entre phtalates et perturbation endocrinienne. L’INRS a dressé, en avril 2004, le tableau suivant qui met en évidence le lien entre les 6 phtalates les plus couramment utilisés et leurs effets potentiels sur la fertilité et le développement chez les rongeurs (111). 94 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Tableau 7 : Les effets de 6 phtalates sur la fertilité et le développement (111) D’autres rapports ont confirmé ultérieurement les données précédentes à savoir que le DBP, le BBP, le DNIP, le DIDP et enfin le DEHP montrent des effets délétères sur la fertilité et le développement (116). C’est pourquoi une réglementation a été mise en place en 2011 et sont désormais interdits dans les produits cosmétiques les phtalates suivants (117) : 95 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - le phtalate de butyle et de benzyle ou BBP (figure 44) : Figure 44 : Structure chimique du BBP (118) - le phtalate de di-n-pentyle ou DnPP (figure 45) : Figure 45 : Structure chimique du DnPP (118) - le phtalate de diisopentyle (figure 46) : Figure 46 : Structure chimique du phtalate de diisopentyle (118) - le phtalate de diisodécyl ou DiDP (figure 47) : Figure 47 : Structure chimique du DiDP (118) 96 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - le phtalate de bis (2-éthylhexyle) ou DEHP (figure 48) : Figure 48 : Structure chimique du DEHP (118) - le phtalate de bis (2-méthoxyéthyle) ou DMEP (figure 49) : Figure 49 : Structure chimique du DMEP (118) - et le phtalate de dibutyle ou DBP (figure 50) : Figure 50 : Structure chimique du DBP (118) II. Les parabènes Le mot « parabène » ou « paraben » provient de la structure chimique de celui-ci. En effet, un paraben résulte d’une réaction d’estérification entre un acide PARA-hydroxyBENzoïque et un alcane dont la longueur de la chaîne carbonée et la conformation sont variables (119). 97 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Voici la structure générale d’un parabène (figure 51) : les différents composés de cette famille diffèrent par la nature du groupe alkyle R. Figure 51 : Structure chimique générale d'un parabène (120) Les principaux composés de la famille des parabènes utilisés sont (119) : - Le méthylparabène (ou 4-hydroxybenzoate de méthyle (E218) et son sel de sodium (E219)) (figure 52) : Figure 52 : Structure chimique du méthylparabène (121) - L’éthylparabène (ou 4-hydroxybenzoate d'éthyle (E214) et son sel de sodium (E215)) (figure 53) : Figure 53 : Struture chimique de l'éthylparabène (122) 98 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - Le propylparabène (ou 4-hydroxybenzoate de propyle (E216) et son sel de sodium (E217)) (figure 54) : Figure 54 : Structure chimique du propylparabène (123) - L’isopropylparabène (figure 55) : Figure 55 : Structure chimique de l'isopropylparabène (124) - Le butylparabène (figure 56) : Figure 56 : Structure chimique du butylparabène (125) - L’isobutylparabène (figure 57) : Figure 57 : Structure chimique de l'isobutylparabène (126) - Le benzylparabène (figure 58) : Figure 58 : Structure chimique du benzylparabène (127) 99 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Bien que ces noms soient les plus régulièrement utilisés, de nombreux synonymes les désignent. On les appelle aussi para-hydroxybenzoates ou 4-hydroxybenzoates (ex : parahydroxybenzoate de méthyle, 4-hydroxybenzoate de méthyle). Enfin, en alimentation, on les désigne par des codes allant de E214 à E219 (128). Les parabens sont naturellement présents en faibles concentrations dans certains aliments comme les produits dérivés des abeilles (propolis, gelée royale…), l’orge, la fraise, le cassis, la pêche, la carotte, l’oignon, la vanille… ainsi que des aliments préparés à base de plantes (jus de raisins et autres jus de fruits) le vinaigre de vin mais également certains fromages (128). Dans le corps humain, on les retrouve comme précurseur du coenzyme Q10. (128) Cependant, ceux qui nous intéressent ici sont issus de l’industrie cosmétique et, même s’ils peuvent être d’origine natuelle (cf les labels de la charte COSMEBIO) sont généralement synthétiques. En cosmétique, les parabènes sont utilisés comme conservateurs de part leurs propriétés antibactérienne et antifongique. Ces mêmes propriétés font qu’ils sont aussi très largement utilisés dans les aliments, les boissons ou encore les produits pharmaceutiques (119,128). Ils sont utilisés depuis les années 1920 et ont été synthétisés afin de remplacer d’autres conservateurs, le formaldéhyde ou d’autres dérivés aldéhydes, jugés trop dangereux pour la santé et dont l’usage dans les cosmétiques est désormais restreint aux vernis à ongle. En 2006, selon l’ANSM, les parabènes étaient présents dans plus de 80% des produits cosmétiques. En effet, leur large spectre d’activité sur les bactéries et sur les moisissures, leur efficacité à de faibles concentrations, leur bonne stabilité vis-à-vis du pH et de la température, leur absence d’interactions avec les autres substances du mélange, leur faible apparente toxicité, leur effet synergique lorsqu’ils sont utilisés en mélange ainsi que leur faible coût en font les conservateurs les plus employés (129). 100 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Les formulateurs les considéraient donc, au début de leur utilisation, comme « pratiques, efficaces, bien tolérés et sans danger ». Cependant, de nombreuses études récentes tendent à montrer que les parabènes auraient une activité œstrogénique et seraient susceptibles d’entraîner des troubles de la fertilité ou encore des tumeurs œstrogèno-dépendante comme le cancer du sein (130,131). Ci-dessous quelques exemples d’études éclairant sur l’activité PE des parabènes. Cette liste est non exhaustive, du fait des très nombreuses études qui paraissent tous les jours dans les journaux scientifiques. Des études indiquent que le méthylparabène, appliqué sur la peau à une concentration telle qu’on le trouve dans les produits cosmétiques, accélère le vieillissement cutané et augmente les dommages subis par l’ADN si la peau (et donc le parabène) est exposée au soleil (132,133). D’autres études mettent en évidence leur capacité à entraîner des troubles de la reproduction en mimant l’activité des œstrogènes (116, 134, 135). Des études contradictoires auraient par ailleurs montré que la liaison des parabènes aux récepteurs œstrogéniques serait beaucoup plus faible (entre 100 000 et 1 000 000 fois) que la réponse physiologique induite par l’œstradiol (136). Ceci démontre bien la polémique de ce sujet. Toutefois, il faut noter que des grands organismes de recherche indépendants des industriels viennent parfois apporter des informations certifiées. Par exemple, l’INSERM a fait un lien significatif entre la présence de butylparabène chez des hommes consultant pour infertilité et l’altération de l’ADN des spermatozoïdes (137). Dans une autre étude, des parabènes ont été détectés dans des tissus de cancer du sein humain, ce qui soulève des questions sur une possible association entre les parabènes présents dans les produits de beauté et le cancer (138). Ces exemples d’études et bien plus encore ont donc conduit à adapter la réglementation concernant ces produits (139,140). 101 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Le propylparabène ainsi que le butylparabène sont inscrit sur la liste de Substitution Immédiate Nécessaire (SIN) et classés PE par la Commission Européenne. Ils ont des propriétés œstrogéniques et anti-androgéniques et ils affecteraient donc les fonctions et organes sexuels. Le butylparabène aurait en plus une action sur les hormones thyroïdiennes (118). Qu’en est-il concernant la réglementation des parabènes ? Jusqu’alors, la CE prévoyait une concentration maximale d’utilisation dans les produits cosmétiques fixée à 0,4% pour un seul parabène et à 0,8% dans le cas d’un mélange de parabènes (141). Le Comité Scientifique Européen pour la Sécurité des Consommateurs (CSSC) a confirmé que, pour les petites molécules de parabène telles que le méthylparabène ou l’éthylparabène, ces limites étaient considérées comme sûres mais qu’il fallait évaluer les risques concernant les molécules plus longues comme le propylparabène ou encore le butylparabène (116, 128,140, 141). C’est pourquoi, en septembre 2014, la CE a annoncé une diminution des concentrations autorisées pour le propylparabène et le butylparabène. A présent, les limites sont fixée à 0,14% qu’ils soient seuls ou mélangés. De plus, elle interdit ces deux mêmes substances dans les produits sans rinçage pour le siège et destinés aux enfants de moins de 3 ans en raison de leur risque de pénétration percutanée élevée en cas de lésions cutanées (141). A partir d’octobre 2014, elle a interdit l’utilisation de cinq autres parabènes dans les produits cosmétiques. A savoir, l’isopropylparabène, l’isobutylparabène, le phénylparabène, le benzylparabène et le pentylparabène (116, 128,140). Extrapolons un peu et intéressons nous quelques instants à un produit de substitution aux parabènes : le méthylisothiazolinone ou MIT (figure 59). En effet, nous avons vu que les parabènes sont qualifiés de PE, c’est pourquoi les industriels cherchent des produits de substitution. Ce produit est donc utilisé pour les mêmes propriétés que les parabènes (142). 102 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 59 : Structure chimique du méthylisothiazolinone (143) Cependant, en 2014, Bruxelles soulève un autre problème puisque le MIT est soupçonné de provoquer des irritations et des eczémas. C’est pourquoi, à partir de juillet 2015, sa concentration maximale a été fixée par le CSSC à 0,0015% dans les produits à rincer (142). De plus, il est interdit d’utiliser les mélanges de méthylchloroisothiazolinone (figure 60) et de MTI afin de réduire le risque d’allergies cutanées. Cet exemple met donc en évidence la difficulté à remplacer ces produits… Figure 60 : Structure chimique du méthylchlorothiazolinone (144) Au vu de ces problèmes de substitution, le nouvel enjeu technique serait donc de formuler sans conservateur ? Pourtant, ils semblent indispensables quant à la protection des cosmétiques vis-à-vis des bactéries et champignons, qui tendent à proliférer dans un environnement aqueux. La société Cosmetolab s’est donc intéressée au principe de stérilisation UHT du lait afin de l’appliquer aux cosmétiques. Ce procédé consiste à chauffer le produit à très haute température puis à le refroidir immédiatement pour éviter l’apparition de bactéries (145). Un autre exemple : le laboratoire Beiersdorf a pu enlever les conservateurs de la crème Nivea bleue en modifiant le procédé de fabrication. Il s’agit d’une émulsion eau dans huile et le procédé consiste à réduire la taille des gouttes d’eau dispersées dans l’huile (146). 103 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) III. Les filtres et absorbeurs UV Les crèmes solaires sont les cosmétiques phares de l’été. Et pourtant, depuis plusieurs années, elles sont remises en cause par certains scientifiques en raison des filtres ultraviolets ou UV qu’elles contiennent (147). Qu’est-ce qu’un filtre UV ? Il s’agit d’une substance capable de filtrer (c’est-à-dire de ne pas laisser passer) certaines radiations contre les effets nocifs de celles-ci. Il existe 2 catégories de filtre : les filtres organiques encore appelés filtres chimiques et les filtres minéraux encore appelés écrans ou filtres physiques (148). Les filtres minéraux correspondent à l’oxyde de zinc et le dioxyde de titane. Il s’agit de pigments blancs qui reflètent et diffusent les radiations UV-A et UV-B. Ils agissent donc comme un « miroir ». Ces filtres ne pénètrent pas dans la peau mais restent en surface. Les filtres organiques absorbent les rayons ultraviolets et ce sont ces composés organiques que les scientifiques pointent du doigt. En effet, ces derniers agiraient comme des PE (116). Chaque filtre chimique protège contre une gamme donnée de longueurs d’onde. Donc, pour une protection contre tous les UV, il faut associer plusieurs filtres différents qui peuvent être, dans ce cas, absorbés par la peau. Intéressons nous à présent plus précisément aux différents filtres suspectés d’agir comme PE. 1. Les cinnamates avec le méthoxycinnamate d’éthylhexyle ou OMC Le méthoxycinnamate d’éthylhexyle (figure 61) est un agent absorbant les UV-B. Il est principalement retrouvé dans les écrans solaires, les crèmes cosmétiques, les lotions, les rouges à lèvres ainsi que les huiles solaires (142). Le méthoxycinnamate d’éthylhexyle aussi appelé 2-ethylhexyl 4-methoxycinnamate, octyl methoxycinnamate, octinoxate, OMC ou encore EHMC possède une activité œstrogénique et une action sur la thyroïde, affectant par conséquent les fonctions physiologiques telles que le développement ou encore la reproduction (149). La Commission Européenne l’a classe comme PE et il est inscrit sur la liste SIN (149). 104 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 61 : Structure chimique de l'OMC (113) Actuellement, les concentrations d’OMC utilisées en France sont les suivantes (149) : - 10% maximum dans les produits de protection solaire, - 7,5% maximum dans les baumes à lèvres, - 0,12% maximum dans les gels douche, - 0,2% maximum dans les huiles corporelles et solaires. 2. Les benzophénones 2.1. Benzophénone-1 La benzophénone-1 (figure 62) encore appelé 2,4-dihydrobenzophenone ou resbenzophenone est qualifié de PE par la Commission Européenne et est retrouvé sur la liste SIN (139). Ce composé agirait comme un œstrogène faible. Son activité anti-androgénique, elle, serait plus importante (139). Figure 62 : Structure chimique du benzophénone-1 (118) 2.2. Benzophénone-2 Le benzophénone-2 (figure 63) est un filtre UV, classé comme PE par la Commission Européenne. En effet, il aurait un effet œstrogénique, un effet anti-androgénique et affecterait également les fonctions thyroïdiennes (139). 105 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Cette substance affecterait également la fonction immunitaire et le métabolisme. Il a été établi une corrélation entre l’exposition au benzophénone-2 et l’hypospadias (139). Les synonymes de cette substance sont le BP-2, le 2,2 ', 4,4'-tétrahydroxybenzophénone. Figure 63 : Struture chimique du benzophénone-2 (118) 2.3. Benzophénone-3 ou BP-3 La benzophénone-3 (figure 64) est un filtre UV couramment utilisé. Appliquée sur la peau, elle est absorbée par l’organisme (139). La benzophénone-3 est classée comme PE par la Commission Européenne en raison de son activité œstrogénique, son activité anti-androgénique ainsi que son action sur la thyroïde (139). Figure 64 : Structure chimique du benzophénone-3 (118) Cette substance est retrouvée dans la liste SIN (118). 106 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Chez l’homme, il a été établi des corrélations entre des concentrations urinaires élevées de benzophénone-3 pendant la grossesse et une diminution du poids de naissance chez les filles ainsi qu’une augmentation du poids de naissance chez les garçons (150,151). Attention aux différents synonymes utilisés tels que BP-3, oxybenzone ou encore 2-hydroxy4-méthoxybenzophénone. La benzophénone-3 a été réévaluée par l’ANSM en 2010 car cette substance est suspectée d’être un PE de catégorie 2 selon le rapport DHI. C’est-à-dire qu’aucune donnée in vivo ne montre d’effet PE mais que certaines études in vitro indiquent un potentiel de PE (150). L’ANSM a demandé, le 21 décembre 2010 à la Commission européenne de (150) : - Restreindre la concentration de benzophénone-3 en tant que filtre UV à 6% chez l’adulte dans les produits cosmétiques de protection solaire et à 0,5% en tant que protecteur des formules, - Interdire son utilisation à la concentration de 6% dans les produits cosmétiques de protection solaire chez les enfants jusqu’à 10 ans car la marge de sécurité relative à la benzophénone-3 calculée pour les enfants jusqu’à l’âge de 10 ans est inférieure à 100. Par conséquent, elle ne permet pas d’assurer la sécurité sanitaire d’utilisation dans les produits cosmétiques en tant que filtre UV à la concentration de 6%. NB : la marge de sécurité d’un ingrédient cosmétique correspond à sa NoAEL (qui est la dose considérée sans effet indésirable observé) sur la SED (qui correspond à la dose d’exposition systémique prévue pour l’ingrédient). Ce rapport doit être supérieur à 100. Ce qui signifie que l’exposition maximale attendue chez l’homme via les produits cosmétiques est 100 fois en dessous de la plus forte dose sans effet chez l’animal. 2.4. 4,4’-dihydroxybenzophénone Le 4,4’-dihydroxybenzophénone (figure 65) est un filtre UV aux propriétés œstrogénique et anti-androgénique. Il provoquerait l’aneuploïdie, une anomalie chromosomique (nombre anormal de chromosomes) qui affecterait la reproduction (139). 107 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 65 : Structure chimique du 4,4'-dihydroxybenzophénone (118) 2.5. Camphre de 3-benzylidène ou 3-BC Le 3-benzylidène-camphre (figure 66) est un filtre UV retrouvé principalement dans les crèmes et laits solaires. Il est qualifié de xénœstrogène puissant avec une action œstrogénique, anti-androgénique et progestative (139). Figure 66 : Structure chimique du 3-BC (118) Le 24 août 2011, l’ANSM a interdit « la fabrication, l’importation, l’exportation, la distribution en gros, la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux, la détention en vue de la vente ou de la distribution à titre gratuit et l’utilisation de produits cosmétiques contenant la substance 3-benzylidene camphor » en raison de récentes études in vivo et in vitro qui mettent en évidence le caractère PE de cette substance (152). 2.6. Camphre de 4-méthylbenzylidène ou 4-MBC Le 4-méthylbenzylidène-camphre (figure 67) est un filtre UV. Il a également une action œstrogénique puissante et un effet anti-androgène. De plus, il interagirait avec la progestérone 108 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) et les hormones thyroïdiennes. C’est pourquoi la Commission Européenne le qualifie de PE (139). Figure 67 : Structure chimique du 4-MBC (118) Les synonymes utilisés pour cette substance sont camphre de 3-(4-méthyl benzylidène), 4MBC. A l’origine, cette substance pouvait être utilisée dans les produits cosmétiques en tant que filtre UV à une concentration maximale de 4% (153). Cependant, la conclusion du CSSC est qu’il n’est pas certain que l’usage d’un produit de protection solaire contenant 4 % de 4-MBC ne présente pas un risque pour la santé des consommateurs (153). Ainsi, quelle que soit la méthodologie retenue, la marge de sécurité est insuffisante pour conclure à l’absence du risque du 4-MBC utilisé en tant que filtre UV chez l’homme. IV. Les siloxanes 1. L’octaméthylcyclotétrasiloxane L’octa-méthyl-cyclo-tétra-siloxane (figure 68) est retrouvé dans de nombreux cosmétiques tels que les anti-transpirants et déodorants, les laques pour cheveux, les crèmes pour le corps, les huiles de bronzage ou encore dans les rouges à lèvres et vernis à ongle, pour ses propriétés émollientes. Il est inscrit dans la liste SIN. En effet, il est classé comme perturbateur endocrinien et reprotoxique de catégorie 3 c’est-à-dire qu’il s’agit d’une substance préoccupante pour la reproduction. Il entrainerait en effet une baisse significative de la fertilité (154). 109 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) De plus, cette substance est enregistrée auprès de REACh. Figure 68 : Structure chimique de l’octaméthylcyclotétrasiloxane (118) 2. Le décaméthylcyclopentasiloxane Le décaméthylcyclopentasiloxane (figure 69), est une silicone utilisé en cosmétique comme agent anti-statique, émollient, conditionneur capillaire, humectant, solvant et agent de contrôle de la viscosité (154). Figure 69 : Structure chimique du décaméthylcyclopentasiloxane (118) Le CSSC est d'avis que le cyclométhicone ne présente pas de risque pour la santé de l'homme lorsqu'il est utilisé dans les produits cosmétiques aux concentrations habituelles (154). 110 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) V. Les alkylphénols Dans cette catégorie figure un grand nombre de molécules : nonylphénol, nonoxynol, octylphénol, O-phénylphénol, propylphénol, amylphénol, heptylphénol, dodécylphénol, méthylphénol (ou crésol), éthylpénol (ou xylénol) et le 4-tert-octylphenol. Ils sont principalement retrouvés dans les shampooings, les colorants capillaires, les crèmes à raser ou encore dans les nettoyants pour visage et corps. Des études ont mis en évidence certains effets toxiques et perturbateurs endocriniens des alkylphénols (116). En effet, chez les animaux, les alkylphénols réduiraient le nombre de spermatozoïdes, altèreraient l’équilibre des hormones de la reproduction et enfin provoqueraient des malformations au niveau des organes reproducteurs (155,156,157). Une étude menée en 2013 par l’équipe du docteur Chen a mis en évidence un lien significatif entre altération de la reproduction et baisse de la fertilité et présence de 4-tert-octylphénol, 4n-octylphénol et 4-n-nonylphénol (158). Ces alkylphénols auraient également une action sur la thyroïde et pourraient entraîner des hypothyroïdes congénitales. C’est ce que met en évidence une étude de 2013 en montrant que les concentractions en alkylphénols dans le groupe des enfants atteints d’hypothyroïdie était significativement plus élevé que chez les enfants non atteints (159). De plus, les études sur les animaux mettent en évidence un lien entre prolifération des cellules cancéreuses et nonylphénol chez la souris, ou encore des altérations de la reproduction chez les poissons avec apparition de malformations urogénitales (156). Le nonylphénol (figure 70) est, quant à lui, considéré comme PE avéré en raison de son caractère persistant. Il est classé dans la catégorie 3 des substances toxiques pour la reproduction : cette catégorie correspond aux substances préoccupantes pour la reproduction (118). Cette substance aurait une activité œstrogénique avérée et est inscrite sur la liste SIN (113). 111 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Figure 70 : Structure chimique du nonylphénol (160) Dans les produits cosmétiques, le nonylphénol (NP) et ses dérivés éthoxylés (NPE) sont interdits d’utilisation par la réglementation cosmétique en raison de leur potentiel de PE. Ils ont été inscrits en novembre 2005 par la directive 2005/80/CE à l’annexe II de la directive cosmétique 76/768/CEE, annexe comportant la liste des substances qui ne peuvent entrer dans la composition des produits cosmétiques (161). Le 4-octylphénol (figure 71) appelé encore 4-tert-octylphenol, para-tert-octylphenol ou octylphenol appartient également au groupe des alkylphénols retrouvés dans les cosmétiques et est lui aussi inscrit dans la liste SIN. Il est considéré comme PE en raison de ses effets néfastes sur la reproduction et de son caractère persistant. Il est également inscrit sur la liste candidate de REACh au classement comme « extrêmement préoccupant » (118). Figure 71 : Structure chimique de l'octylphénol (118) L’union européenne limite les concentrations en alkyphénols à 1% dans les produits cosmétiques (153). On notera qu’une proposition de loi visant à interdire l'utilisation des phtalates, des parabènes et des alkylphénols a été déposée le 13 juillet 2010. Cette proposition de loi a été adoptée par l’assemblée nationale le 3 mai 2011 pour l’article suivant : « La fabrication, l’importation, la vente ou l’offre de produits contenant des phtalates, des parabènes ou des alkylphénols sont interdites. » 112 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Cependant, la Commission des Affaires Sociales n’a pas adopté cette loi et a souhaité remplacé le mot « interdites » par « suspendues jusqu’à l’adoption par les agences de sécurité sanitaire compétentes, d’une évaluation des risques et des bénéfices présentés par ces produits attestant de leur innocuité pour la santé publique » (116,153). VI. Le triclosan Le triclosan (figure 72) est un biocide utilisé comme conservateur dans les produits cosmétiques en raison de ses propriétés antibactériennes (162). Figure 72 : Structure chimique du triclosan (118) On le retrouve entre autre dans les dentifrices, les savons, les lotions hydratantes, les crèmes à raser, les déodorants ou encore dans les cosmétiques anti-acnéiques (162). Or, depuis quelques années ce produit préoccupe les scientifiques car il induirait des perturbations endocriniennes. En effet, il a été inscrit sur la liste SIN (163) et enregistré auprès de REACh en raison de son pouvoir perturbant sur le système endocrinien et de son caractère bioaccumulable. Il aurait des effets œstrogéniques (164,165) et thyroïdiens (166). Il favoriserait entre autre, le développement de certains cancers, de malformations congénitales et altèrerait la fertilité (165,166, 167). D’après l’arrêté du 6 février 2001, le triclosan peut être utilisé comme conservateur antibactérien dans les produits cosmétiques à une concentration maximale de 0,3% (168). Une étude menée sur 2517 participants âgés de plus de 6 ans entre 2003 et 2004 aux EtatsUnis a montré que le triclosan était présent dans l’urine de 74,6% des individus testés. Il a donc la capacité de traverser la barrière cutanée et les muqueuses (169). 113 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) La Commission Européenne vient de juger le triclosan suffisamment dangereux pour l’interdire dans les nouveaux produits de rasage dès octobre 2014 (170, 171). En effet, les micro-coupures induites par le rasage seraient susceptibles de favoriser la pénétration du triclosan dans l’organisme. De plus, selon de récentes études il aurait également un effet néfaste sur la fonction musculaire et en particulier celle du muscle cardiaque (172) et serait susceptible d’entraîner des résistances aux antibiotiques (173). VII. Les phénols 1. Le résorcinol Le résorcinol (figure 73), aussi appelé résorcine ou 1,3-benzènediol est utilisé dans les produits cosmétiques et notamment dans les produits et lotions capillaires (teintures en particulier). Cependant, il affecterait la glande thyroïde. Il aurait également des effets sur le métabolisme des œstrogènes et du glucose (139). Figure 73 : Structure chimique du résorcinol (118) En effet, il a été démontré que le résorcinol agirait comme PE (174) : - Par action anti-thyroïdienne par blocage de la synthèse des hormones thyroïdiennes, - Par effet œstrogénique in vivo En France, le résorcinol est classé dangereux pour l’environnement car très toxique pour les organismes aquatiques. En Europe, la concentration de résorcinol est limitée à 5% dans les colorants capillaires fonctionnant par oxydation. Cependant, en pratique, beaucoup de fabricants limitent les teneurs en résorcinol libre dans les teintures capillaires par oxydation à 1,25% et limitent les teneurs dans les shampooing et lotions capillaires à 0,5%. (175) 114 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Le résorcinol est inscrit sur la liste SIN et enregistré auprès de REACh et la Commission Européenne l’a qualifié de PE (175). 2. Le BHA Le BHA (ou Butylated Hydroxy Anisole) (figure 74) est un antioxydant utilisé comme conservateur dans les produits cosmétiques. Il est également nommé tert-butyl-4methoxyphenol, 2-tert-butylhydroxyanisole, butylated hydroxyanisole est encore connu sous le code E320 (mélange des deux isomères). Il est particulièrement rencontré dans les cosmétiques dits « gras » tels que les baumes à lèvres et rouges à lèvres, les crèmes et produits hydratants, les fonds de teints ou encore les ombres et crayons à paupières (139). Figure 74 : Structure chimique du BHA (118) Or, le BHA aurait des effets œstrogéniques et anti-androgéniques. En effet, il a été observé chez des rats nourris au BHA une diminution du taux de testostérone et d’hormones thyroïdiennes ainsi que des malformations des spermatozoïdes. De plus, leurs descendants étaient de plus petite taille et avaient un retard de maturation sexuelle avec des organes reproducteurs plus petits que la norme. Des effets similaires ont été observés chez le cochon. En 2014, un consensus national de lutte contre l’utilisation des PE a incité l’ANSES à expertiser le BHA. En effet, il serait susceptible de perturber le bon fonctionnement des hormones sexuelles et d’avoir des effets néfastes sur la fertilité au niveau des espèces animales (176). De plus, le BHA fait partie de la section B de la convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est (OSPAR). L’OSPAR (acronyme pour Oslo-Paris car cette 115 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) nouvelle organisation remplace les conventions d’Olso et de Paris) regroupe 15 gouvernements qui coopèrent pour protéger l’environnement marin de l’Atlantique du NordEst. La section B correspond aux substances jugées préoccupantes de part leurs toxicités sur les organismes marins et leurs potentiels de bioaccumulation et qui sont traitées de façon adéquate par des initiatives CE ou par d’autres forums internationaux (176). Le BHA est inclus dans la liste SIN en raison de ses activités œstrogénique, androgénique et sur la thyroïde. Il est donc susceptible d’altérer plusieurs fonctions dont la croissance et la reproduction. C’est pourquoi la commission européenne le classe comme PE. Il a été enregistré auprès de REACh (118). VIII. Le bisphénol A Attardons nous quelques instants sur le cas du bisphénol A ou BPA (figure 75). Il n’est pas directement impliqué dans la composition des produits cosmétiques mais il s’agit d’une substance chimique utilisée dans la fabrication des plastiques. Nous sommes donc susceptibles de le retrouver dans les contenants des produits cosmétiques… Figure 75 : Structure chimique du BPA (118) Le BPA est un œstrogénomimétique, c’est-à-dire une substance apote à mimer l’œstradiol, très proche structuralement (cf chapitre 1, page 41). Cependant, plusieurs travaux suggèrent que le BPA agirait également sur les récepteurs androgéniques ou thyroïdiens (177, 179). L’ANSES a conclu à l’existence d’effets avérés chez l’animal : effets sur la reproduction, sur la glande mammaire, sur le métabolisme, le cerveau, le comportement ou encore des effets cardiovasculaires (179). 116 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Pour autant, les études n’ont pas conclu à un effet cancérogène du BPA chez l’homme car les résultats chez l’animal ne peuvent être extrapolés directement à l’homme en raison des différences entre les espèces. Malgré cela, l’ANSES a proposé en 2012 au niveau européen un classement plus sévère du BPA qualifié comme reprotoxique de catégorie 2. La loi du 24 décembre 2012 a interdit, en France, le BPA dans les conditionnements à usage alimentaire destinés aux enfants âgés de 0 à 3 ans à partir du 1er janvier 2013, et dans l’ensemble des conditionnements à usage alimentaires à partir du 1er janvier 2015. Cependant, aucune réglementation n’impose son absence dans les contenants de nos produits cosmétiques… (180) Par ailleurs, en janvier 2015, l’EFSA (l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments) a réévalué de manière complète le dossier sur le BPA et les experts ont conclu que cette substance ne posait pas de risque pour la santé des consommateurs de tout âge y compris donc pour les nourrissons. Il est donc probable que l’impact du BPA sur la santé de l’homme soit réévalué dans de nouvelles études (181). IX. Le phénoxyéthanol Cette substance (figure 77) est utilisée comme conservateur dans les produits cosmétiques. Sa concentration maximale est fixée à 1% dans les produits cosmétiques (182). Figure 76 : Structure chimique du phénoxyéthanol (182) Cependant, l’ANSM recommande, après un rapport de juin 2012, de ne pas utiliser de produits contenants cette substance dans les spécialités cosmétiques destinés au siège des enfants de moins de 3 ans et de restreindre la concentration maximale autorisée à 0,4% au lieu 117 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) de 1% jusqu’alors. La Commission de Cosmétologie de l’ANSM a approuvé ces recommandations. En effet, le phénoxyéthanol serait responsable d’irritations oculaire ainsi que d’hématotoxicité chez le lapin ou encore d’hépatotoxicité chez le rat (182). Cependant, à l’heure d’aujourd’hui, aucun signalement de cosmétovigilance n’a été recensé, et c’est pourquoi la Commission de Cosmétologie n’a pas jugé nécesaire de modifier la restriction actuelle à 1% du phénoxyéthanol dans tous les types de produits cosmétiques pour l’adulte (182). Ceci est un exemple afin de prendre en compte la difficulté de substituer un produit par un autre dont on ne connaît pas encore les risques potentiels pour l’homme… 118 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Chapitre 5 : Les grands axes de la règlementation concernant les perturbateurs endocriniens Cette partie a pour but de faire le point sur la réglementation en vigueur concernant les perturbateurs endocriniens à l’instant présent. Elle recense donc les grands axes de la règlementation par ordre chronologique. I. 2001 : la classification CMR Le sigle CMR signifie cancérogène, mutagène et toxique pour la reproduction. La directive 67/548/CEE de l'Union Européenne a établi une classification des substances chimiques susceptibles de présenter ce type de dangers pour l’homme (183). Cette classification comporte trois catégories : - Catégorie 1 : substances dont les effets chez l’homme sont avérés. La relation de cause à effet à été établie, - Catégorie 2 : substances dont les effets sont présumés chez l’homme et prouvés chez l'animal. La présomption d’une relation de cause à effet pour l’homme est forte, - Catégorie 3 : substances dont les effets sont suspectés chez l’homme. Cependant les études restent insuffisantes. Cette classification a été remplacée par une nouvelle classification, la réglementation CLP (pour Classification, Labelling, Packaging) qui est entrée en vigueur en janvier 2009 et pour laquelle (33) : - La catégorie 1 devient la catégorie 1A, - La catégorie 2 devient la catégorie 1B, - La catégorie 3 devient la catégorie 2. Seule la codification change. 119 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) II. 2005 : Création du PNRPE par le MEDDE Le Ministère en charge de l’Ecologie et du Développement Durable et de l’Energie (MEDDE) a crée en 2005, le Programme National de Recherche sur les Perturbateurs Endocriniens (PNRPE) qui permet de soutenir les recherches concernant ceux-ci. Le PNRPE s’articule autour de 7 grands thèmes de recherche prioritaires dont par exemple le développement d’outils et de stratégies permettant d’améliorer l’évaluation des dangers et des risques des PE, le phénomène « cocktail » ou encore l’analyse du risque sanitaire et des coûts induits par l’exposition aux PE (184). III. 2007 : Mise en place de REACh 1. Qu’est-ce que REACh ? REACh est un règlement européen entré en vigueur le 1er juin 2007. Son but est de sécuriser la fabrication et l’utilisation de substances chimiques dans l’industrie européenne (185,186,187). REACh est un acronyme anglais signifiant Registration, Evaluation, Autorisation of Chemicals ; autrement dit l’enRegistrement, l’Evaluation et l’Autorisation des substances Chimiques (33). Il s’agit donc de recenser, d’évaluer et de contrôler les substances chimiques fabriquées ou importées sur le marché européen. Pour cela, REACh a créé l’Agence Européenne des Produits Chimiques, l’ECHA. Il faut savoir que toutes les entreprises de l’Espace économique européen qui fabriquent, utilisent ou importent des substances chimiques sont directement impliquées. Quelles substances sont concernées ? Les substances naturelles comme les huiles essentielles, les substances organiques comme les solvants, les métaux ou encore, et celles-là nous intéressent particulièrement les substances susceptibles de provoquer des perturbations 120 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) endocriniennes. Ces substances sont évaluées soit dans leur état brut soit à l’état de mélange dans des préparations et/ou objets. REACh oblige donc les entreprises qui fabriquent ou importent des substances chimiques à évaluer les risques liés à leur utilisation, ainsi qu’à prendre les mesures nécessaires pour gérer tout risque identifié pour la santé et/ou pour l’environnement. On comprend donc bien que la preuve de la sécurité des substances appartient aux industriels eux-mêmes. 2. Les objectifs de ce règlement L’objectif principal est d’évaluer plus de 30 000 substances chimiques d’ici 2018 afin d’établir leurs risques potentiels, dans le but de protéger la santé humaine et l’environnement, d’instaurer une information complète et transparente sur la nature et les risques des substances, de sécuriser les manipulations de ces substances auprès des salariés, de limiter les essais sur les vertébrés en incitant les industriels à partager leurs données ainsi que de renforcer la compétitivité de l’industrie (185,186,187). 3. La mise en œuvre Les industriels doivent dorénavant enregistrer au niveau européen les substances qu’ils fabriquent ou importent en quantité supérieure à 1 tonne par an (185,186,187). Après cet enregistrement, plusieurs hypothèses sont possibles : - La substance est déclarée sans risque et peut être utilisée, - La substance présente des risques qui peuvent être maîtrisés et peut donc être utilisée sous conditions, - La substance présente des risques qui impliquent soit une utilisation encadrée, soit une interdiction : dans ce cas-là, elle devra être remplacée par une substance de substitution. La mise en place de ce règlement se fait selon 4 procédures essentielles : l’enregistrement, l’évaluation, l’autorisation ou la restriction (185,186,187). 121 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 3.1. L’enregistrement Il s’agit d’enregistrer, comme nous l’avons précisé plus haut, les substances produites ou importées en quantité supérieure ou égale à 1 tonne par an dans l’UE. Cet enregistrement est fait par le producteur ou l’importateur auprès de l’ECHA (185,186,187). Pour les nouvelles substances chimiques, l’enregistrement est obligatoire depuis le 1er juin 2008. Pour les substances déjà existantes dites substances « phase-in », elles peuvent bénéficier d’un étalement dans le temps. Cependant, elles doivent avoir fait l’objet d’un pré-enregistrement avant le 1er décembre 2008 auprès de l’Agence européenne des produits chimiques. Ces substances seront ensuite à enregistrer en fonction de leur tonnage et en tenant compte de la date limite du calendrier d’enregistrement. Par exemple, les substances fabriquées ou importées en quantité supérieures ou égales à 100 tonnes par an ont dû être enregistrées avant le 31 mai 2013 (185,186,187). Figure 77 : Dates limites d'enregistrement en lien avec REACh (188) Tous les fabricants et importateur doivent fournir un dossier d’enregistrement qui comprend (185,186,187) : - Un dossier technique recensant o Identité du fabriquant ou importateur o Identité de la substance o Informations sur la fabrication et les utilisations 122 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) o Classification et étiquetage proposé o Conseils d’utilisation o Résumés des études physicochimiques, toxicologiques et écotoxicologiques - Un rapport sur la sécurité chimique si la substance est fabriquée ou importée à plus de 10 tonnes par an : o Evaluation des dangers, évaluation de l’exposition, caractérisation des risques si la substance est classée cancérogène, mutagène ou Persistantes, Bioaccumulables et Toxiques (PBT), ou encore très persistantes et très bioaccumulables (vPvB) o Description des mesures de gestion des risques REACh introduit le principe « Pas de données, pas de marché ». Ceci signifie qu'une substance non enregistrée conformément aux dispositions du règlement REACh ne peut pas être fabriquée, importée ou mise sur le marché dans la communauté européenne. En d'autres mots, la substance ne pourra plus être utilisée dans la CE. 3.2. L’évaluation L’ECHA évalue la conformité des dossiers et les propositions d’essais tandis que l’évaluation des substances se fait par les Autorités Compétentes (AC) des états membres. Les états membres ont à leur charge l’évaluation des substances. Cette tâche est coordonnée par l’ECHA. Pour information, l’évaluation des propositions d’essais s’applique à tous les dossiers dont la substance est produite ou importée à plus de 100 tonnes par an et pour lesquels les demandeurs proposent de réaliser un essai sur un vertébré. L’ECHA doit obligatoirement donner son feu vert à de tels essais (185,186,187). 3.3. L’autorisation La procédure d’autorisation vise à imposer une utilisation encadrée des substances chimiques les plus préoccupantes comme les substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR), les substances persistantes, bioaccumulables et toxiques (PBT), les substances très persistantes et très bioaccumulables (vPvB) ainsi que les substances qui suscitent un niveau de préoccupation équivalent telles que les PE (185,186,187). 123 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Les autorisations d’utilisation sont octroyées par la Commission Européenne après examen de l’intégralité du dossier. Cette procédure vise à garantir que les risques liés à ces substances sont maîtrisés et que ces substances sont progressivement remplacées par d’autres substances ou technologies appropriées (28). Par ailleurs, la Commission Européenne peut aller jusqu’à interdire la production ou l’utilisation de ces substances. 3.4. La restriction Dès lors qu’un état membre ou que la Commission Européenne estime que la mise sur le marché ou l’utilisation d’une substance entraîne un risque qui n’est pas maîtrisé, un dossier sur la substance est préparé afin de l’inclure dans une annexe, l’annexe XVII, du règlement REACh qui précise quelles sont les restrictions concernant la substance. Si par la suite, un industriel veut utiliser une substance incluse à l’annexe XVII, il doit se conformer aux conditions décrites qui peuvent aller jusqu’à l’interdiction totale d’utilisation de la substance en question (185,186,187). 4. Mise en application concrète de la directive REACh En décembre 2011, une première substance, le 4-tert-octyphénol, a été inscrite en tant que PE sur la liste des substances extrêmement préoccupantes. Comme décrit précédemment, il agirait comme un xéno-œstrogène et altèrerait les spermatozoïdes (28,189). IV. 2008 : 1ère version de la liste SIN La liste SIN (Substitution Immédiate Nécessaire) est un projet piloté par 9 ONG d’envergure européenne et/ou internationale dont l’objectif est d’accélérer le remplacement des produits chimiques dits « extrêmement préoccupants » (139). 124 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) La Liste SIN est une liste exhaustive des substances qui répondent aux critères « Substances Extrêmement Préoccupantes » telles que définies par REACh et auxquelles nous sommes exposés quotidiennement par le biais des produits et biens de consommation : détergents, peintures, équipements électroniques, matériaux de construction, mobilier, jouets, cosmétiques, vêtements, etc… Les Substances Extrêmement Préoccupantes correspondent aux critères suivants : - Reconnues pour leurs effets CMR, c’est-à-dire cancérigènes, mutagènes et/ ou reprotoxiques, - Reconnues comme PBT : persistantes, bioaccumulables et toxiques, - Ou celles reconnues pour des effets qui suscitent un niveau de préoccupation équivalent. Parmi ces substances figurent les perturbateurs endocriniens pour lesquels émergent des preuves scientifiques d’atteintes probables à la santé humaine et/ou à l’environnement. La base de données de la Liste SIN contient toutes les substances listées ainsi que leurs impacts sur la santé humaine et l’environnement, leurs caractéristiques techniques et leurs usages potentiels. Ci-dessous, un aperçu de la base de données SIN (disponible sur le site http://sinlist.chemsec.org/) (118) : la raison d’inclusion à la liste et son statut REACh sont en particulier explicités. Figure 78 : Un aperçu de la base de données concernant la liste SIN (118) 125 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) V. 2009 : l’ANSES aussi concernée par les PE L’ANSES agit autour de 2 grands axes : l’évaluation des risques et la production de connaissances. Et l’ensemble de ces travaux s’inscrit dans différents plans nationaux, notamment le Plan Nationel Santé Environnement 2 (PNSE 2), le Plan Nationel de Résidus des Médicaments dans les eaux (PNRM), le plan écophyto (pour réduire l’utilisation des produits phytosanitaires en France) et le PNRPE (184). Les missions de l’ANSES sont de (184) : - Hiérarchiser les substances à étudier en priorité, - Identifier les produits et articles de consommation grand public contenant des substances toxiques pour les fonctions de reproduction et la fertilité ou susceptibles de l’être, - Caractériser les expositions de la population générale et des travailleurs à ces substances, - Procéder à une évaluation des risques prenant en compte les périodes de vulnérabilité particulières de certains groupes de population, - Identifier les substitutions possibles pour certaines de ces substances pour lesquelles un risque sanitaire aurait été mis en évidence. Pour l’heure, les travaux menés par l’agence l’ont poussée à proposer à l’ECHA fin 2012 un classement du BPA en tant que toxique pour la reproduction (passage de la catégorie 2 à la catégorie 1B) au niveau européen. Ce changement de classe aurait pour conséquence directe l’application de mesures réglementaires plus sévères comme l’obligation de mise en place de mesures de prévention voire même de l’interdiction de mise sur le marché de mélanges contenant du BPA à destination des consommateurs. 126 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) NB : Classification des substances CMR depuis 2010 Cancérogènes Toxiques pour la reproduction Mutagènes Catégorie 1A : substances dont le potentiel cancérigène pour l’être humain est avéré Catégorie 1B : substances dont le potentiel cancérogène pour l’être humain est supposé (données animales) Catégorie 2 : substances suspectées d’être cancérogènes pour l’homme Catégorie 1A : substances dont la capacité d’induire des mutations héréditaires dans les cellules germinales des êtres humains est avérée (données épidémiologiques) Catégorie 1B : substances dont la capacité d’induire des mutations héréditaires dans les cellules germinales des êtres humains est supposée (test in vivo sur des cellules de mammifères) Catégorie 2 : substances préoccupantes du fait qu’elles pourraient induire des mutations héréditaires dans les cellules germinales des êtres humains Catégorie 1A : substances dont la toxicité pour la reproduction humaine est avérée Catégorie 1B : substances présumées toxiques pour la reproduction humaine Catégorie 2 : substances suspectées d’être toxiques pour la reproduction humaine Tableau 8 : Classification des substances CMR (185) Et la ministre de l’écologie et du développement durable Ségolène Royal, a interdit le BPA dans tous les contenants alimentaires et les tickets de caisse. Cette interdiction est entrée en vigueur dès le 1er janvier 2015. Le BPA étant déjà interdit dans tous les contenants alimentaires destinés aux nourrissons et aux enfants en bas âge ainsi que dans les biberons (190). L’ANSES exerce également des missions de veille, de recherche et de référence (184). Enfin, l’agence soutient la recherche grâce aux appels à projets qu’elle lance chaque année dans le cadre de son Programme National de Recherche Environnement-Santé-Travail, le PNR EST. Cet outil est essentiel pour développer les connaissances en appui aux politiques et aux travaux d’évaluation des risques sanitaires de l’ANSES. Ainsi, depuis 2006, l’agence a soutenu 28 projets portant sur les PE pour un montant d’aide de 3 millions d’euros. 127 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) VI. 2009-2013 : Mise en place du PNSE 2 Il s’agit du 2ème Plan National Santé-Environnement dont deux des principales actions sont d’une part de « mieux gérer les risques liés aux reprotoxiques et aux PE » et d’autre part de « renforcer les disciplines de recherche majeures et les thématiques prioritaires pour la prédiction et l'évaluation des risques et dangers environnementaux, notamment sur les pathologies en forte augmentation ou ré-émergentes et sur les risques émergents » (28,184,191). VII. 2010-2015 : PNRM Il s’agit du Plan National de Résidus des Médicaments dans les eaux. Il vise à permettre d’améliorer la connaissance et la réduction des risques liés aux rejets de médicaments humains et vétérinaires dans l’environnement. Les médicaments peuvent eux aussi agir comme PE (28, 192). Les 3 grands axes de ce plan sont (192) : - L’évaluation des risques environnementaux et sanitaires - La gestion des risques environnementaux et sanitaires - Le renforcement et la structuration des actions de recherche. VIII. 2011 : Etude Elfe Il s’agit d’une Etude Longitudinale Française depuis l’Enfance (ELFE) qui suit depuis 2011 plus de 18 000 enfants et leur mère de leur période périnatale jusqu’à leur 20 ans (193). Cette étude permettra de répondre entre autre à cette question : « Quel est l'impact des polluants présents dans notre environnement sur la santé et le développement ? » via des analyses réalisées chez les mères et les nouveau-nés. Les substances évaluées sont des polluants retrouvés au niveau environnemental comme les phtalates, le bisphénol A, les retardateurs de flammes, les pesticides etc… (28, 184,193) 128 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) IX. Septembre 2012 : élaboration de la stratégie nationale sur les PE Lors de la conférence environnementale de septembre 2012, le gouvernement s’est engagé à élaborer une stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (194). Les ministères de l’écologie et de la santé ont donc animé un groupe de travail réunissant des élus des parlements français et européens, des organismes publics de recherche, d’expertise et de surveillance, des associations de protection de l’environnement et de défense des consommateurs, des représentants d’entreprises et organisations professionnelles et enfin les ministères concernés. L’objectif principal de cette stratégie est de réduire l’exposition de la population et de l’environnement aux perturbateurs endocriniens. Pour cela, quatre grands axes stratégiques ont ainsi été retenus (194) : - La recherche, la valorisation et la surveillance - L’expertise des substances - La réglementation et la substitution des PE - La formation et l’information X. Décembre 2012 : La loi interdisant le BPA dans les contenus alimentaires est adoptée par le parlement français. Cette loi vise à interdire « la fabrication, l’importation, l’exportation et la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A ». Cette loi est entrée en vigueur dès 2013 pour les contenants destinés aux bébés et a été étendue à tous les contenants dès janvier 2015 (190). XI. Avril 2014 : Enquête ESTEBAN L’enquête ESTEBAN (Environnement, SanTE, Biosurveillance, Activité physique, Nutrition) conduite par l’Institut National de Veille Sanitaire (INVS) a démarré en 2013. Cette étude est 129 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) menée sur un échantillon de 4000 adultes âgés de 18 à 74 ans et de 1000 enfants âgés de 6 à 17 ans. L’étude ESTEBAN permettra, entre autre, de mesurer l’exposition de la population à plus d’une centaine de substances chimiques présentes dans l’environnement via des dosages sanguins, urinaires, capillaires sur les organismes afin de connaître le niveau d’imprégnation de la population aux différents polluants étudiés et de pouvoir mettre en place d’éventuelles réglementations ou mesures de prévention (28,184). XII. Avril 2014 : Lancement de la stratégie nationale contre les PE élaborée en septembre 2012 Les 5 axes de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens de 2014 sont (195) : - Soutenir la recherche pour mieux connaître les perturbateurs endocriniens et leurs effets sur la santé et l’environnement, notamment en finançant des programmes de recherche, - Développer l’innovation dans l’industrie, en stimulant la mise en œuvre de produits de substitution innovants et non toxiques, - Renforcer l’expertise et lancer dès cette année l’analyse d’au moins huit substances chimiques par an suspectées d’être des perturbateurs endocriniens, - Porter ce sujet majeur de santé publique au niveau européen et faire de la France un pays moteur de la protection de la santé et l’environnement en Europe, - Améliorer l’information des citoyens, dans leur vie quotidienne comme sur les lieux de travail. XIII. 29 avril 2014 : Trois décisions concrètes contre les perturbateurs endocriniens ont été annoncées par Ségolène Royal, à l’issue du Conseil national de la transition écologique Ségolène Royal, à l’issue du conseil national de la transition écologique a ordonné (196) : - D’éliminer la présence du bisphénol A dans les tickets de caisse, 130 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - De cibler les contrôles sur les phtalates et accélérer la substitution du BPA dans les jouets pour enfants, - D’expertiser les 5 substances suivantes suspectées d’être PE d’ici fin 2014. Il s’agit : o du méthylparabène présent dans les produits cosmétiques et d’hygiène, o de l’acide orthoborique présent dans les jouets, les adhésifs et lubrifiants, o du BHA présent notamment dans les cosmétiques et les médicaments, o de deux plastifiants, le DINCH et le DEHTP utilisés pour fabriquer des plastiques dans des produits de consommation courante. Ces substances ne sont pas suspectées d’être PE mais il est indispensable de vérifier si ces substituts ne présentent pas de risque. XIV. Novembre 2014 : l’ANSES doit expertiser 5 nouvelles substances en 2015 Les substances devant être expertisées par l’ANSES sont les suivantes (197) : - l’iprodione, un fongicide utilisé en tant que produit phytopharmaceutique et suspecté d’être un perturbateur endocrinien, - le 2,6-di-tert-butyl-p-cresol (BHT), utilisé comme anti-oxydant dans de nombreuses applications industrielles, ainsi que dans les cosmétiques. Cette substance est proche du BHA, substance dont l’expertise a été confiée à l’Anses pour l’année 2014 en raison de préoccupations relatives à son caractère de perturbateur endocrinien, - le salicylate de méthyle, analogue structurellement au méthylparabène, qui est aussi l’une des substances dont l’expertise a été confiée à l’Anses pour l’année 2014 en raison de préoccupations relatives à son caractère de perturbateur endocrinien, - le tributyl O-acetylcitrate (ATBC) utilisé en tant que substitut à des phtalates pour des usages comme plastifiants dans les jouets par exemple ; - l’acide téréphtalique, utilisé en tant que précurseur pour la fabrication du PolyEthylène Téréphtalate (PET), une alternative aux polycarbonates fabriqués à partir de bisphénol A, à la base de nombreux produits industriels destinés aux consommateurs. Pour ces deux dernières substances, les données à ce jour ne permettent pas de conclure sur le caractère perturbateur endocrinien ou non. 131 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) XV. Janvier 2015 : Entrée en vigueur de l’interdiction du BPA dans tous les contenants alimentaires suite à la loi de décembre 2012. (182, 198) 132 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Chapitre 6 : Comment se positionnent les pharmaciens officinaux par rapport aux perturbateurs endocriniens ? Dans cette dernière partie, j’ai voulu faire le lien entre perturbateurs endocriniens et l’officine qui est ma filière de spécialisation. Il nous a paru intéressant de faire un état des lieux des connaissances du pharmacien d’officine autour de cette thématique à l’aide d’une enquête, ayant pour support le questionnaire suivant. Les résultats qui sont présentés ci-après ont été obtenus après avoir réalisé l’enquête sur un échantillon d’une cinquantaine de pharmacies, pour la plupart concentrées dans la région Rhône-Alpes. Je tiens, avant de commencer son exploitation, à remercier particulièrement Mme Valérie DUCHARNE, mon maître de stage de 6ème année qui a diffusé ce questionnaire aux membres de son groupement GIPHAR. Le questionnaire a été envoyé par e-mail aux pharmacies et leur ont permis d’y répondre en ligne. Je remercie donc également toutes les pharmacies qui ont participé à cette enqûete. Le principal biais de ce questionnaire est justement que les pharmacies y ont répondu via email. On peut donc se questionner sur la fiabilité des réponses. Ont-elles fait des recherches en parallèle sur internet ? Ont-elles pris le temps nécessaire de répondre de manière complète aux différentes questions ouvertes ? Cependant, voici les résultats de cette enqûete et une première analyse des réponses aux 11 questions posées. 133 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Question 1 : Vous et votre officine : Votre officine est une pharmacie de : Types de pharmacies Rurale 24% De centre commercial 9% De ville 31% De quartier 36% Ce premier graphique nous montre que le questionnaire a ciblé tous les types de pharmacies. Et par conséquence tous les types de clientèle/patientèle mis en évidence dans le graphique suivant de la question 2. Question 2 : Quel est le type de clientèle/patientèle de votre officine ? 60 50 Aisée 40 Actifs Familles 30 Personnes âgées De passage 20 Fidèle Etudiante 10 0 Type de patientèle en % 134 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Question 3 : Quel est le pourcentage de vente approximatif des produits de parapharmacie au sein de votre officine ? % de vente de produits de parapharmacie > à 20% < à 5% 7% 22% entre 16 et 20% 19% entre 11 et 15% entre 6 et 10% 19% 33% Les pourcentages en italique indiquent le pourcentage de vente de produits parapharmaceutiques et le pourcentage en gras indique le nombre de pharmacie qui sont concernées par la tranche en italique. Ce graphe met en donc évidence que les cosmétiques représentent entre 6% et 20% du CA des différentes pharmacies. C’est donc une part importante de ventes quotidiennes au comptoir. 135 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Question 4 : Vous et les perturbateurs endocriniens en général : Pouvez-vous donner une rapide définition de ce qu'est un perturbateur endocrinien ? Définition d'un PE Aquise Incomplète A améliorer Non acquise 0 10 20 30 40 50 60 en % Pour la majorité d’entre elles, celle-ci est incomplète mais l’idée principale est là. Voici quelques exemples de réponses données : « Substances qui va avoir un effet sur les hormones » « Modificateur des fonctions endocriniennes en agissant soit sur les glandes directement , ou en perturbant les messages délivrés par les hormones » « Molécules qui ressemblent aux hormones tout en entraînant un déséquilibre hormonal » « Molécules qui interfèrent avec le système endocrinien » « Bloqueurs d’hormones avec des conséquences sur l’être humain » ou encore « Substances ayant une incidence sur le système hormonal ». 136 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Question 5 : Pouvez-vous citer des molécules qualifiées de perturbateurs endocriniens ? % d'officines ayant cités des molécules PE 60 50 40 30 20 10 0 Parabènes Phtalates Bisphénol A Triclosan Filtres solaires Silicones Autres N'ont pas su molécules PE hors cosmétiques La majorité des substances citées ont été décrites dans les médias (grand public ou plus spécialisés). Par exemple : Environ 36% des pharmacies sondées ont cité les parabènes et 45% ont cité des molécules suspectées d’être PE mais non retrouvées dans les produits cosmétiques (insecticides, pesticides, médicaments, distilbène…) NB : Cette question était une question ouverte. 137 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Question 6 : Quelles sont, selon vous, les conséquences de ces perturbateurs sur la santé de l'homme ? Quelles sont les conséquences pour l'homme ? Troubles sexuels Cancers Puberté précoce Problèmes thyrodïdiens Problèmes de croissante et développement Malformations fœtales Dysfonctionnements hormonaux MAI, diabète Fonction organe, quantité et PE Aucunes au vu des faibles quantités Ne sait pas 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 Sur ce graphe il me semble important et judicieux de souligner qu’environ 17% des pharmacies sondées ne pouvaient citer aucune conséquence supposée sur la santé de l’être humain, ce qui souligne un manque de connaissance sur ce sujet. NB : cette question ne proposait pas de réponses. Il s’agissait d’une question ouverte. Question 7 : A votre avis, dans quels types de produits vendus à l'officine sont-ils présents ? Où sont présents les PE à l'officine ? Cosmétiques au sens large Crèmes Shampooings Dentifrices Vernis Déodorants Produits solaires Médicaments Biberons Ne sait pas 0 10 20 30 40 50 60 NB : cette question était également une question ouverte, afin de ne pas orienter les réponses. 138 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Question 8 : Avez-vous recherché des informations sur ces perturbateurs endocriniens du fait de l'intérêt médiatique actuel ? Avez-vous fait des recherches d'informations sur les PEs ? Oui 36% Non 64% Question 9 : Comment gérez-vous votre politique d’achat ? Ce graphe a regroupé plusieurs questions du questionnaire. L'officinal et sa politique d'achat Prêtez-vous attention à la liste des ingrédients lors de vos achats ? Les allégations "sans parabènes", "naturel" etc. entrent-elles dans votre politique d'achat ? Oui Non Est-ce un argument de la part des commerciaux ? Pensez-vous qu'il s'agit simplement d'un lobbying de la part des laboratoires ? 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 Les pharmaciens semblent donc sensibles aux allégations mises en avant par les commerciaux. Ils prêtent également attention à la liste des ingrédients des produits proposés. 139 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Question 10 : Vous et votre conseil-patient Ce graphe a également regroupé plusieurs questions du questionnaire. L'officinal et le patient Les patients sont-ils demandeurs d'informations sur les PEs ? Oui Est-ce une demande qui croît ? Non Ne se prononce pas Estimez-vous qu'ils font attention à la liste des ingrédients des produits cosmétiques ? 0 10 20 30 40 50 60 70 La clientèle est, d’après les réponses, demandeuse à plus de 60% d’informations sur les PE et pourtant seulement 36% des pharmacies ont fait des recherches par elles-mêmes sur ce sujet (cf question 8). De plus, les patients sont, d’après les pharmaciens officinaux, sensibles aux ingrédients des produits qu’ils achètent. C’est pour eux, un point qui paraît important. L'officinal et son argumentaire de vente Est-ce pour vous un argument de vente ? Oui Non Mettez-vous ces allégations en avant lors d'un conseil patient ? 0 10 20 30 40 50 60 70 80 140 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Les patients sont de plus en plus sensibles à la liste des ingrédients des produits qu’ils utilisent, c’est pourquoi les pharmaciens utilisent les allégations sans PE comme un argument de vente. Question 11 : Pour terminer, un dépliant concernant les perturbateurs endocriniens à l’officine vous semble-il intéressant ? Un dépliant concernant les PEs est-il intéressant ? 50 45 40 35 30 25 20 15 10 5 0 Oui, pour l'équipe officinal Oui, pour le patient Oui, pour l'équipe Non, cela n'est pas officinal et le patient intéressant . C’est en réponse à cette dernière question, qu’il nous a semblé important de proposer un dépliant d’informations au sujet des perturbateurs endocriniens qui pourrait servir au patient et au pharmacien d’officine. La première version de ce dépliant d’informations figure en annexe n°6. 141 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Conclusion A l’heure actuelle, si la définition des perturbateurs endocriniens est encore délicate à mettre au point, les scientifiques semblent unanimes quant aux mécanismes d’action de ceux-ci. Ils entrainent un dérèglement du système hormonal de 3 manières différentes : soit en bloquant l’action de nos hormones, soit en mimant leur action, soit en interférant avec la disponibilité de celles-ci. Mais l’évaluation de cette perturbation sur l’organisme est-elle facilement quantifiable ? C’est sur ce point qu’apparaît la principale discordance entre scientifiques et organismes officiels devant la définition de perturbateurs endocriniens. Cependant, plusieurs études suspectent fortement un lien entre perturbateurs endocriniens et effets néfastes sur la santé de l’homme : cancers hormono-dépendants, puberté précoce, problèmes de fertilité ou encore anomalies génitales à la naissance. Par ailleurs, ces effets observés pourraient être le résultat d’une exposition plusieurs années auparavant. On parle de « latence ». C’est pourquoi il est donc difficile, encore aujourd’hui, d’établir un lien avéré entre l’exposition à un perturbateur endocrinien (voire à un « cocktail » de ces composés) et de possibles effets sur la santé humaine. Les objectifs de ce travail ont été multiples : faire un état des lieux des composés suspectés d’être des perturbateurs endocriniens, comprendre quelles sont leurs particularités, où se situent les textes règlementaires les concernant et, enfin, faire un lien avec le domaine de la pharmacie officinale. Par ailleurs, les règlements en vigueur imposent aux industriels de substituer ces composés. Mais la question qui se pose alors est de savoir si ces substances de substitution ne sont pas aussi voire plus nocives que les composés que l’on souhaite remplacer. A-t-on le recul nécessaire ? Des études tendent déjà à montrer les problèmes liés à l’utilisation de ces substances qui induiraient majoritairement des irritations cutanées. Ce travail s’est ensuite plus particulièrement centré sur les perturbateurs endocriniens retrouvés dans les produits cosmétiques. En effet, ils font partie des produits principalement incriminés, avec notamment les « parabènes » qui sont les conservateurs de référence de la grande majorité de nos cosmétiques. Enfin, pour faire le lien avec le domaine de la pharmacie officinale, un questionnaire destiné aux pharmaciens d’officine a permis d’appréhender les connaissances et le positionnement de ceux-ci face aux perturbateurs endocriniens. Quelles sont leurs connaissances ? Quelles sont leurs politiques d’achat et de vente par rapport aux perturbateurs endocriniens ? Est-ce un 142 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) sujet d’actualité qui les intéresse ? Comment se positionnent leurs patients face à ces molécules potentiellement dangereuses ? Sont-ils demandeurs d’informations ? Ces questions ont servi de base à la réalisation d’une brochure d’informations sur les perturbateurs endocriniens à destination de ces professionnels de santé et à leurs patients. L’objectif était de présenter de manière simple et compréhensible par tous, ce que sont les perturbateurs endocriniens, comment ils agissent et comment les reconnaître dans la liste parfois longue des ingrédients des produits cosmétiques. Pour finir, ce travail ne s’est pas focalisé sur les possibles conflits d’intérêts qui peuvent exister dans le domaine des produits cosmétiques. On peut toutefois citer la condamnation de la Commission Européenne, en décembre 2015, par le Tribunal de l’Union Européenne pour avoir manqué à ses obligations dans le vaste dossier des perturbateurs endocriniens. L’actualité rattrape donc ce sujet de thèse car, à la suite de cette condamnation, cette commission s’était engagée à donner une définition précise des perturbateurs endocriniens dans le courant de l’été 2016 afin d’éventuellement interdire les plus nocifs. 143 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Bibliographie (1) Ludwing S. Comportement d’un « perturbateur endocrinien » et d’un « non perturbateur endocrinien » vis-à-vis de la toxicité testiculaire chez le rat. Thèse de doctorat : Biologie cellulaire et moléculaire : Université Paris-Sud 11 ; 2011 (2) Desmots S, Brulez C, Lemazurier E. Perturbateurs de la fonction endocrinienne et santé : un point non exhaustif sur les connaissances. Environnement, Risques et Santé. 2005 ; 4 (3) : 195-204 (3) Stéphanie Mas. Cours sur le système endocrinien. http://mas.stephanie.free.fr/cours_le_systeme_endocrinien.htm, consulté le 14 janvier 2014. (4) Société canadienne du cancer. 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Face à la contamination croissante et omniprésente de notre environnement par des composés susceptibles de produire de tels effets, un groupe de spécialistes de toutes disciplines s'est réuni à Wingspread (Wisconsin, États-Unis), du 26 au 28 juillet 1991, afin de faire le point sur les connaissances à ce sujet. Les participants provenaient de diverses disciplines : anthropologie, écologie, endocrinologie comparée, histopathologie, immunologie, mammalogie, médecine, psychiatrie, psychoneuroendocrinologie, physiologie de la reproduction, toxicologie, gestion de la faune, biologie des tumeurs, zoologie et droit. Les objectifs de cette rencontre étaient : 1. De mettre en commun les découvertes de chacun et d'évaluer l'ampleur du problème ; 2. De tirer des conclusions fiables des données existantes ; 3. De proposer un programme de recherches afin de dissiper les incertitudes qui subsistent. Déclaration commune La déclaration suivante est le fruit d'un consensus entre les participants. 1. Nous savons avec certitude que : · Un grand nombre de produits chimiques de synthèse libérés dans la nature, ainsi que quelques composés naturels, sont capables de dérégler le système endocrinien des animaux, y compris l'homme. Il s'agit notamment des composés organochlorés, qui, du fait de leur persistance, s'accumulent dans les chaînes alimentaires. Ceux-ci comprennent certains pesticides (fongicides, herbicides et insecticides) et produits chimiques, ainsi que d'autres produits synthétiques et certains métaux [1]. · De nombreuses populations d'animaux sauvages sont d'ores et déjà affectées par ces composés. Les effets incluent le mauvais fonctionnement de la thyroïde chez les oiseaux et les 159 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) poissons ; une baisse de fertilité chez les oiseaux, les poissons, les coquillages et les mammifères ; une diminution des éclosions chez les oiseaux, les poissons et les tortues ; des malformations grossières à la naissance chez les oiseaux, les poissons et les tortues ; des anomalies du métabolisme chez les oiseaux, les poissons et les mammifères; la féminisation des mâles chez les poissons, les oiseaux et les mammifères ; des anomalies de comportement chez les oiseaux : la masculinisation des femelles chez les poissons et les oiseaux ; des déficits immunitaires chez les oiseaux et les mammifères. · Les effets varient selon les espèces et les composés. Toutefois, on peut faire quatre remarques : a. les composés concernés peuvent avoir des effets très différents sur l'embryon et sur l'adulte; b. les effets se manifestent surtout sur la génération suivante, et non chez les parents exposés ; c. la période d'exposition au cours du développement de l'organisme est cruciale, déterminant l'ampleur et la nature des effets ; d. la période d'exposition la plus critique correspond à la vie embryonnaire, mais les effets peuvent ne pas se manifester avant l'âge adulte. · Les études en laboratoire confirment les développements sexuels anormaux observés dans la nature et permettent de comprendre les mécanismes biologiques mis en jeu. · Les humains sont également affectés par ces composés. Le distilbène, un médicament de synthèse, et beaucoup de composés cités en note ont des effets œstrogéniques. Les femmes dont les mères ont ingéré du distilbène sont particulièrement touchées par le cancer du vagin, par diverses malformations de l'appareil reproducteur, par des grossesses anormales et des modifications de la réponse immunitaire. Les hommes et les femmes exposés pendant leur vie prénatale présentent des anomalies congénitales de l'appareil reproducteur et une baisse de fertilité. Les effets observés chez les victimes du distilbène sont semblables à ce que l'on observe chez les animaux contaminés, dans la nature et en laboratoire. Cela suggère que les humains partagent les mêmes risques. 2. Nous estimons extrêmement probable que : · Certaines anomalies du développement constatées aujourd'hui chez les humains concernent des enfants adultes de personnes ayant été exposées à des perturbateurs hormonaux présents dans notre environnement. Les concentrations de plusieurs perturbateurs des hormones sexuelles mesurées dans la population américaine actuelle correspondent aux doses qui provoquent des effets chez les animaux sauvages. · À moins que la contamination de l'environnement par les perturbateurs hormonaux soit rapidement contrôlée et réduite, des dysfonctionnements généralisés à l'échelle de la population sont possibles. Les dangers potentiels, tant pour les animaux que pour l'homme, sont nombreux, en raison de la probabilité d'une exposition répétée ou constante à de nombreux produits chimiques connus pour dérégler le système endocrinien. · En approfondissant la question, de nombreux parallèles nouveaux devraient surgir entre les 160 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) études portant sur la faune sauvage, celles effectuées en laboratoire et celles concernant l'homme. 3. Les modèles actuels prévoient que : · Les mécanismes d'action de ces composés sont variables, mais d'une manière générale : a. ils imitent les hormones naturelles en se liant à leurs récepteurs ; b. ils inhibent les hormones en les empêchant de se lier à leurs récepteurs ; c. ils réagissent directement ou indirectement avec les hormones elles-mêmes, d. soit en perturbant leur synthèse, e. soit en modifiant le nombre de récepteurs dans les organes. · Les hormones mâles et femelles peuvent altérer le développement cérébral, qu'elles soient exogènes (source externe) ou endogènes (source interne). · Toute perturbation du système endocrinien d'un organisme en formation peut altérer son développement : ces effets sont habituellement irréversibles. Ainsi, de nombreux caractères liés au sexe sont déterminés par les hormones pendant une courte période de temps au début du développement et peuvent alors être influencés par de faibles variations de l'équilibre hormonal. Les faits suggèrent que ces effets sont alors irréversibles. · Les effets constatés sur la reproduction des animaux sauvages devraient préoccuper les humains qui exploitent les mêmes sources de nourriture, le poisson contaminé par exemple. Le poisson est une source majeure de contamination chez les oiseaux. Les mécanismes de dérèglement hormonal par les organochlorés chez les oiseaux sont les mieux connus à ce jour. Ils nous aident à comprendre comment l'homme pourrait partager le sort des animaux, car le développement du système endocrinien des oiseaux est très semblable à celui des mammifères. 4. Nos prévisions comportent de nombreuses incertitudes parce que : · La nature et l'ampleur des effets sur l'homme sont mal connues. Nous possédons peu d'informations sur la contamination des humains, en particulier sur les concentrations de polluants chez l'embryon. Cela est dû au manque d'effets réellement mesurables et d'études portant sur plusieurs générations et simulant la contamination ambiante. · Alors que nous possédons de nombreuses données sur la diminution de l'aptitude des animaux à se reproduire, les données sur les modifications du comportement sont moins étayées. Mais les faits sont suffisamment pressants pour que l'on cherche à combler rapidement ces lacunes. · Le pouvoir de nombreux composés œstrogéniques, comparé à celui des œstrogènes naturels, est inconnu. Ce point est important, car les concentrations sanguines en certains composés dépassent celles des œstrogènes du corps. 161 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 5. Nous estimons que : · Les tests de toxicité devraient être élargis pour prendre en compte une éventuelle activité hormonale. · Il existe déjà des méthodes pour analyser les effets œstrogéniques ou androgéniques des composés à effet hormonal direct. La réglementation devrait étendre ces analyses à tous les nouveaux composés ou produits secondaires. Si les tests sont positifs, des effets fonctionnels devraient être recherchés au moyen d'études sur plusieurs générations, et ne pas porter seulement sur les malformations congénitales. Ces procédures devraient s'appliquer aussi aux produits persistants libérés dans le passé. · Il est urgent de donner la priorité aux effets reproducteurs ou fonctionnels lorsque l'on évalue les risques pour la santé. La recherche d'effets cancérogènes ne suffit pas. · Il est nécessaire de réaliser un inventaire complet des composés chimiques lorsqu'ils sont mis en vente et libérés dans l'environnement. Ces informations doivent être plus facilement accessibles. Elles nous permettront de réduire la contamination. Plutôt qu'établir des normes de pollution séparées pour l'air, l'eau et le sol, il est nécessaire d'envisager les écosystèmes dans leur ensemble. · L'interdiction de la production et de l'emploi des produits chimiques persistants n'a pas résolu le problème de la contamination. De nouvelles approches sont nécessaires pour réduire celle-ci et pour empêcher de nouvelles contaminations par des produits nouveaux aux caractéristiques similaires. · L'impact sur les animaux sauvages et les animaux de laboratoire est si profond et si insidieux qu'il est nécessaire de lancer un vaste programme de recherche sur l'homme. · Il faut remédier au manque d'information des communautés scientifiques et médicales concernant les perturbateurs hormonaux dans l'environnement, leurs effets fonctionnels et la notion d'exposition se transmettant d'une génération à l'autre. Les déficits fonctionnels ne se manifestant pas à la naissance et parfois pas avant l'âge adulte, ils passent souvent inaperçus des médecins, des parents et des organismes de contrôle, et la cause n'est jamais identifiée. 6. Pour améliorer notre aptitude à prévoir : · II faut entreprendre des recherches fondamentales supplémentaires sur le développement des organes sensibles aux hormones. Par exemple, nous devons connaître la quantité d'une hormone donnée requise pour provoquer une réponse normale. Nous avons besoin de marqueurs biologiques du développement normal pour chaque espèce, chaque organe et 162 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) chaque étape du développement. Avec ces renseignements, nous pourrons déterminer les concentrations qui provoquent des altérations pathologiques. · Des collaborations interdisciplinaires sont nécessaires pour établir des modèles animaux, dans la nature ou en laboratoire, afin d'extrapoler les risques encourus par les humains, · Il faut sélectionner une espèce « sentinelle » à chaque niveau de la chaîne alimentaire, espèce qui nous permettra d'étudier les déficits fonctionnels. Cela nous permettra également de mieux comprendre la circulation des contaminants dans les écosystèmes. · Des phénomènes mesurables (marqueurs biologiques) dus à l'exposition à des perturbateurs hormonaux doivent être trouvés, aux niveaux de la molécule, de la cellule, de l'organisme et de la population. Les marqueurs moléculaires et cellulaires sont très importants pour une prise en compte précoce du dérèglement. II est important de déterminer les concentrations normales d'isoenzymes et d'hormones. · Pour évaluer l'exposition des mammifères. il est nécessaire de connaître les concentrations de produits chimiques dans l'organisme et dans l'ovule fécondé, afin d'extrapoler la dose de ces produits chez l'embryon, le foetus, le nouveau-né et l'adulte. Il faut également évaluer le danger en répétant en laboratoire les faits observés dans la nature. À la suite de cela, il faudra déterminer en laboratoire les effets de doses différentes. Ces doses seront ensuite comparées à la contamination mesurée dans les populations sauvages. · Il faut entreprendre de nouvelles études de terrain, afin d'expliquer l'afflux annuel dans des régions polluées d'espèces migratrices dont les populations semblent stables, malgré la vulnérabilité relative de leurs petits. · Pour de nombreuses raisons, il faudrait réétudier les victimes du distilbène. D'abord, l'emploi du distilbène correspond à une époque où l'on relâchait de grandes quantités de produits chimiques, en l'absence de toute norme légale. Les résultats des études sur le distilbène ont donc peut-être été influencés par la contamination générale par d'autres perturbateurs endocriniens. Deuxièmement, l'exposition à une hormone pendant la vie foetale peut augmenter la sensibilité de l'organisme à cette hormone plus tard dans la vie. De ce fait, les premières victimes du distilbène atteignent seulement l'âge où divers cancers pourraient commencer à se manifester, en conséquence d'une exposition ultérieure à des substances œstrogéniques (cancers du vagin, de l'endomètre, du sein et de la prostate). Il est important d'établir un seuil de risque. Même les doses les plus faibles connues ont produit des cancers du vagin. Le distilbène pourrait fournir le modèle le plus extrême pour rechercher les effets de substances œstrogéniques moins puissantes. Ainsi. les marqueurs biologiques déterminés chez les victimes de cet œstrogène synthétique permettront d'étudier les effets résultant de la contamination ambiante. · Les effets des perturbateurs endocriniens sur l'homme, qui vit plus longtemps que la plupart 163 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) des animaux, sont peut-être plus difficiles à percevoir. C'est pourquoi nous avons besoin de méthodes de dépistage précoce, afin de déterminer si l'aptitude reproductrice de l'homme est en train de décliner. Ce dépistage précoce est aussi important pour l'individu que pour la population, car la stérilité est un problème inquiétant qui a des impacts psychologiques et économiques. Il existe maintenant des méthodes de détermination des taux de fertilité chez l'homme. Il faudrait élaborer de nouvelles méthodes impliquant la mesure de l'activité enzymatique du foie, le comptage des spermatozoïdes, l'analyse des anomalies de développement et l'examen des lésions histopathologiques. Ces analyses devraient être complétées par des marqueurs biologiques plus nombreux et plus fiables du développement social et comportemental de l'individu, par les antécédents familiaux des patients et de leurs enfants, et par l'analyse chimique des tissus et produits liés à la reproduction, notamment le lait. Dr Howard A. Bern, Université de Californie. Berkeley Dr Phyllis Blair, Université de Californie, Berkeley Sophie Brasseur, Institut de recherche pour la gestion de la nature, Pays-Bas Dr Theo Colborn, Fonds mondial pour la nature (W WF) et Fondation W. Alton Jones Dr Gerald R. Cunha, Université de Californie. San Francisco, Dr William Davis, Agence américaine de protection de l'environnement Dr Klaus D. Döhler, Développement et production Pharma Bissendorf Peptide SA, Hanovre, Allemagne Glen Fox, Centre national de recherche sur la faune sauvage, Environnement Canada Dr Michael Fry, Université de Californie, Davis Dr Earl Gray [2], Directeur du département de toxicologie du développement et de la reproduction [1] Les produits chimiques connus pour leurs effets sur le système endocrinien comprennent : le DDT et ses produits de dégradation, le DHEP ou di-2-éthyl-hexyl-phtalate, le HCB (hexachlorobenzène), le dicofol, la chlordécone, le lindane et autres hexachlorocyclohexanes, le méthoxychlore, l'octachlorostyrène, les pyréthroïdes de synthèse, des herbicides (triazines), des fongicides (carbamates, triazoles), certains PCB, le 2.3,7,8 TCDD et autres dioxines, le 2,3,7,8 TCDF et autres furanes, le cadmium, le plomb, le mercure, la tributyltine et autres composés de la même famille les alkylphénols (détergents non biodégradables et antioxydants présents dans les polystyrènes modifiés et les PVC), les produits à base de styrène, les aliments à base de soja et des produits pour animaux de laboratoire et animaux domestiques. [2] Bien que les recherches décrites ici aient été financées par l'Agence américaine de protection de l'environnement, elles ne reflètent pas nécessairement ses vues et n'ont pas valeur d'approbation officielle. De même, la mention de certaines entreprises ne signifie pas leur approbation et ne constitue pas une publicité. 164 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Annexe n°2 : L’appel de Prague (version française réalisée par le Réseau Environnement Santé) APPEL DE PRAGUE MAI 2005 Introduction Des experts internationaux et des scientifiques représentant de nombreuses disciplines se sont réunis à Prague, du 10 au 12 mai 2005, pour un séminaire de travail sur les substances chimiques interférant avec le système hormonal appelées perturbateurs endocriniens. L'atelier a été organisé pour discuter des dernières recherches Européennes sur les risques pourla santé associés à ces produits chimiques. Une grande partie de ce travail émane de grands projets de recherche financés par l'Union Européenne, et réunis dans le comité pour la recherche sur les perturbateurs endocriniens, le CREDO. Les résultats présentés au séminaire de Prague ont renforcé les préoccupations concernant les conséquences sur le long terme de l'exposition de l'homme et de la faune sauvage aux perturbateurs endocriniens. Les perturbateurs endocriniens sont un groupe très diversifié de substances chimiques, incluant certains pesticides, des substances chimiques produites en masse, les retardateurs de flamme, les agents utilisés comme plastifiants, des ingrédients utilisés en cosmétique, les produits pharmaceutiques, des produits naturels tels que les œstrogènes d'origine végétale et bien d'autres. Ces substances peuvent altérer le fonctionnement du système hormonal et provoquer des effets nocifs enmimant les effets des hormones naturelles, en bloquant leur action normale, ou eninterférant avec la synthèse et/ou l'excrétion des hormones. La déclaration suivante a été acceptée par les scientifiques soussignés. Ce document est destiné à informer les citoyens européens, les décideurs politiques et les régulateurs sur les progrès de la recherche, mais aussi à mettre en évidence les lacunes et les failles de la réglementation actuelle et faire des suggestions constructives qui pourraient conduire à une meilleure protection de la santé humaine et la faune sauvage en Europe et dans le monde. Actualisation de la recherche : Inquiétudes concernant de santé de l'homme 1. Nous sommes préoccupés par la prévalence élevée des troubles de la reproduction masculine dans certains pays européens. Il y a eu une augmentation du nombre de malformations génitales chez les petits garçons, et les données récentes indiquent que dans certaines parties de l'Europe, la qualité du sperme est proche des niveaux qui pourraient altérer la fertilité. 2. L'incidence des cancers, tel que le cancer du sein, le cancer des testicules et de la prostate, continue à augmenter dans de nombreux pays européens, bien qu'il existe des différences notables entre les pays. Les descendants de personnes qui ont migré d'un pays à un autre adoptent l'incidence du cancer de leur nouveau pays d'accueil. Cela montre que ces cancers sont liés à des facteurs environnementaux, y compris à l'alimentation. 3. Les malformations génitales, le cancer du testicule, et dans certains cas une qualité du sperme altérée surviennent au début de la vie, voire même au cours du développement in 165 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) utero. Ces maladies ont des causes communes qui surviennent au cours du développement des organes reproducteurs chez le fœtus, contrôlé par des hormones. Le problème est que les perturbateurs endocriniens pourraient interférer avec ces processus pour perturber le développement des organes génitaux masculins pendant la grossesse. De même, un dérèglement hormonal pourrait conduire à la formation du cancer du sein chezles femmes et les anomalies du développement pubertaire chez les filles. 4. Le système immunitaire des jeunes enfants peutêtre affecté par l'exposition aux biphényles polychlorés (PCB) et aux dioxines au cours du développement in utero. Ceci a pour conséquence, d’augmenter la probabilité la probabilité de contracter des maladies infectieuses. Les PCB et les dioxines sont des polluants actifs sur le planhormonal présents dans l'alimentation. Ces substances se dégradent très lentement, s'accumulent dans les graisses des tissus et sont capables d'atteindre le fœtus en développement. Après la naissance, ils sont transmis aux bébés via le lait maternel. Nous craignons que ces contaminants, aux niveaux où on les trouve dans les aliments, ne provoquent des effets indésirables chez les jeunes enfants. Les hormones stéroïdiennes et thyroïdiennes sont impliquées dans le développement et le vieillissement du cerveau, ainsi que dans de nombreuses autres fonctions. Les contaminants environnementaux qui affectent ces systèmes peuvent accroître le risquede dysfonctionnement du cerveau. 5. Même si à ce niveau il n'y a pas de lien clair entre l'exposition aux perturbateurs hormonaux thyroïdiens, le cancer, le retard mental, la diminution de la fertilité et la neurodégénérescence chez l'homme, ces questions nécessitent une évaluation d'urgence, car d'après nos connaissances de base de la physiologie des hormones thyroïdiennes, on peut s'attendre au développement de ces problèmes. 6. Peu ou pas d'informations sont actuellement disponibles concernant les effets des perturbateurs endocriniens sur l'état des maladies en dehors du système de reproduction, comme le syndrome métabolique, le développement neuronal, les cancers de l'enfant, le développement cognitif, les problèmes immunitaires, les troubles psychologiques d'apprentissage, le développement de la mémoire, et d'autres. Dans de nombreux cas, il existe des liens de causalité entre les perturbateurs endocriniens et ces maladies. Davantage d'informations scientifiques sont nécessaires. 7. L'utilisation de technologies de recherche novatrices pour comprendre les mécanismes d'action des perturbateurs endocriniens au niveau moléculaire est indispensable. Grâce à la compréhension des mécanismes moléculaires qui sont affectés par les perturbateurs endocriniens, il sera plus facile d'extrapoler les d'informations entre les différents tissus exposés. Actualisation de la recherche : le lien de cause à effet 8. Il n’y a pas de doute sur le fait que les citoyens européens connaissent une augmentation des troubles de la reproduction et des cancers hormono-dépendants. Ce qui n'est pas clair, cependant, c'est de savoir si ces maladies sont liées à l'exposition aux perturbateurs endocriniens. Établir un lien est difficile, car les maladies de l'homme sont le résultat d'influencesinterdépendantes, dont les substances chimiques ne sont qu'un facteur déterminant. Ce n'est que lorsqu'une de ces substances exerce un impact très fort qu'il est possible de découvrir son rôle dans le processus de la maladie, comme c'est le cas avec les 166 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) œstrogènes stéroïdiens et le cancer du sein. Il est beaucoup plus difficile de prouver des influences minimes, quoiqu’existantes, de la part des produits chimiques sur la santé. Ainsi, nous sommes convaincus que l'incapacité à démontrer des liens directs entre les troubles liés aux hormones et l'exposition aux substances chimiques ne devrait pas être retenue pour indiquer une absence de risque. 9. L'identification des produits chimiques en cause est compliquée parce qu'il est possible que les troubles puissent se manifester longtemps après que l'exposition a eu lieu. Les agents pathogènes peuvent alors avoir disparu des tissus, occultant ainsi l'identification des risques. Actualisation de la recherche : Effets sur la faune sauvage 10. Au-delà du fait que la faune représente un objectif de protection qui est aussi un droit, elleagit comme une sentinelle pour les effets produits par les perturbateurs endocriniens qui peuvent encore être inaperçus chez l'homme. Les phoques qui vivent dans la mer Baltique et la mer du Nord ont subi des défaillances au niveau de la reproduction et un déclin dela population qui peut être attribuée à l'impact des PCB et des dioxines. Les mêmes substances chimiques peuvent également affecter le système immunitaire des phoques, les rendant plus vulnérables aux infections virales. 11. Partout en Europe, les poissons mâles exposés aux rejets des stations d'épuration montrent des niveaux anormaux de protéines du jaune d'œuf femelle en raison de la présence de perturbateurs endocriniens, comme les œstrogènes stéroïdiens et les produits de dégradation tensio-actifs dans les effluents des eaux usées. Des anomalies de la reproduction chez les poissons, notamment l'apparition d'œufs dans les testicules des poissons mâles, ont également été observées. Il a été démontré que ces poissons ont une capacité de reproduction réduite et que les mâles produisent des spermatozoïdes de moins bonne qualité. Les conséquences pourraient se traduire par des impacts défavorables sur des populations entièresde poissons, comme cela a été démontré dans des études récentes en laboratoire sur plusieurs espèces de poissons. Les poissons exposés à la pilule contraceptive, à des concentrations retrouvées dans les rivières européennes, ont montré une perturbation du développement sexuel et une détérioration des capacités en matière de reproduction au stade adulte, comprenant la réduction ou l'inhibition de la production d'œufs et de la fertilisation des œufs, ainsi que des difficultés à libérer leur semence et une survie plus faible de leur progéniture. 12. Les invertébrés sont également vulnérables aux effets des perturbateurs endocriniens. Le Tributylétain, un ingrédient utilisé dans les peintures antisalissures appliquées sur les coques des navires a eu pour conséquence la formation d'organes sexuels masculins chez les mollusques femelles, se traduisant par une diminution de leur population. Plus récemment, il a été démontré que le bisphénol A, un produit chimique industriel, et les substances anti-UV utilisées dans les crèmes solaires entraînent une augmentation de la production d'œufs chez les escargots aquatiques. Les conséquences de telles anomalies pour l'équilibre et le bien-être de l'ensemble des écosystèmes ne sont pas encore prévisibles, mais la gravité des effets observés indique un impact potentiel des perturbateurs endocriniens sur la biodiversité de la faune sauvage. Actualisation de la recherche : Exposition 13. Des progrès considérables ont été accomplis dans l'identification de nouvelles substances chimiques ayant des effets actifs sur le système endocrinien. Il s'agit notamment de produits 167 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) chimiques utilisés comme filtres UV, des antioxydants employés dans les cosmétiques et des substances chimiques utilisées comme conservateurs dans les aliments. Il est clair que les citoyens européens sont exposés simultanément à un grand nombre de perturbateurs endocriniens. Cependant, nous ne connaissons pas toute laportée de notre exposition à travers notre alimentation, l'eau potable, l'air et les produitsde consommation. Ce manque de connaissances entrave gravement les efforts visant à explorer un lien entre l'exposition et les effets qui en résultent chez l'homme. 14. Les niveaux de PCB et de dioxines dans les tissus humains se sont stabilisés à environ un tiers du pic de pollution dans les années 1970. Cela indique que l'exposition interne à ces substances se poursuivra, avec des populations européennes qui auront à vivre avec une charge de pollution qui sera présente pour des générations à venir. 15. Nous sommes préoccupés, car l'Europe connaît actuellement une augmentation de la pollution par les produits chimiques bromés très persistants qui sont utilisés comme retardateurs de flammes dans de nombreux articles de consommation, y compris le mobilier et les ordinateurs. Ces substances et leurs produits de dégradation se retrouvent dans le lait maternel, les aliments, la faune sauvage et de nombreux milieux environnementaux. Les connaissances actuelles en ce qui concerne les expositions ainsi que le profil toxicologique de ces substances chimiques sont insuffisants pour une évaluation appropriée des risques humains et écologiques. Actualisation de la recherche : Les contrôles sécuritaires et la réglementation 16. Un élément fondamental dans l'évaluation de la sécurité chimique repose sur l'hypothèse de l'existence d'une dose seuil en dessous de laquelle il n'y a pas d'effets. Il se peut que cela ne soit pas défendable lorsqu'il s'agit des perturbateurs endocriniens, parce que certaines substances chimiques ayant une activité hormonale agissent de concert avec les hormones naturelles déjà présentes dans les organismes exposés. Ainsi, même de petites quantités de produits chimiques peuvent s'ajouter aux effets d'ensemble, indépendamment des seuils qui pourraient exister pour ces substances en l'absence d'hormones naturelles. En outre, en raison de la sensibilité limitée des méthodes de tests établis, il est probable que les effets ne sont pas correctement évalués. 17. Une autre complication est que les effets hormonaux sont souvent masqués par d'autres réponses toxiques. Bien que les essais de routine n'administrent généralement pas de faibles doses, ce n'est pourtant que lorsque des examens sont effectués dans ces conditions que ces effets se manifestent. En outre, une caractéristique des perturbateurs endocriniens est l'apparition tardive des effets néfastes, longtemps après que l'exposition a cessé. Les méthodes actuelles d'analyses ne sont généralement pas conçues pour prendre en compte cette possibilité. 18. Ces difficultés sont exacerbées lorsque les effets d'expositions simultanées à de nombreuses substances chimiques (Effet cocktail) sont étudiées. Des études récentes ont montré que " l'effet cocktail " peut se produire même lorsque chaque composant est présent à une dose qui, individuellement, ne produit pas d'effets. Ces observations affaiblissent encore la conviction que les doses seuil peuvent être appliquées résolument au cours de l'évaluation du risque sanitaire lié substances chimiques. Une dose d'un seul produit chimique jugé sûr isolément après examenpeut donner un faux sentiment de sécurité lorsque l'exposition 168 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) comprend un grand nombre d'autres actifs endocriniens qui peuvent interagir les uns avec les autres. Les lacunes du cadre réglementaire actuel 19. Les méthodes normalisées qui existent pour évaluer la sécurité des produitschimiques ne sont pas conçues pour identifier les perturbateurs endocriniens ou pour anticiper leurs effets probables sur l'homme et la faune sauvage. De nombreux polluants maintenant reconnus comme perturbateurs endocriniens, tel que le tributylétain et certains phtalates (utilisés comme plastifiants dans les biens de consommation), ont uniquement été identifiés par des études scientifiques, et non par des contrôles sécuritaires de routine. A cemoment là, des dommages considérables à l'environnement avaient déjà été causés. Par conséquent, il y a un besoin urgent d'améliorer les méthodes de tests réglementaires et d'en développer de nouvelles. 20. En raison de la faiblesse de la réglementation en vigueur pour identifier les perturbateurs endocriniens, les programmes de surveillance biologique et chimique deviennent de plus en plus importants pour la détection des effets non encore identifiés lors de l'évaluation des risques des substances chimiques. Les programmes de surveillance existants n'ont pas la capacité de traiter adéquatement le problème des perturbateurs endocriniens. La surveillance chimique et biologique doit donc être réalisée de concert. 21. L'exposition environnementale correspond à un mélange de produits chimiques et non pas un seul agent. Toutefois, cet état de fait ne se reflète pas dans les protocoles d'analyses et les dispositions pour prendre en compte les "effets cocktail" sont totalement inexistants. Des recherches récentes indiquent que cela peut conduire à une importante sous-estimation des risques. La question commence à recevoir l'attention des autorités réglementaires, mais il est nécessaire que les régulateurs et les scientifiques coopèrent pour développer des approches réalistes afin de faire face à la question des mélanges chimiques. 22. Les protocoles de tests reposent actuellement sur les effets des PE sur le tractus reproducteur mâle et femelle. Ces protocoles doivent être développés pour évaluer les effets des perturbateurs endocriniens sur d'autres tissus concernés. Les mesures proposées et les dispositions à prendre 23. A l’avenir, la réglementation des perturbateurs endocriniens aura à faire face à la tension entre la plausibilité biologique de dommages graves et peut-être irréversibles, et des retards dans la production de données pertinentes pour l'évaluation globale des risques. Compte tenu de l'ampleur des risques potentiels, nous croyons fermement que l'incertitude scientifique ne doit pas retarder la mise en place de mesures de précaution pour réduire les risques. 24. Il existe différents cadres pour guider les décisions concernant la sélection des perturbateurs endocriniens qui doivent subir des tests supplémentaires. La définition des priorités est habituellement obtenue à l'aide de tests de dépistage pour sélectionner les substances chimiques devant subir des contrôles approfondis, ce qui retarde la prise de mesures réglementaires jusqu'à ce que des données supplémentaires soient disponibles. Bien que des tests de dépistage ne soient pas suffisants comme base pour l'évaluation des risques, ils devraient être utilisés pour déclencher une action réglementaire de précaution sur la base de l'hypothèse réfutable que des résultats positifs pourraient être annonciateurs de risques. 169 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Des mesures de précaution peuvent comprendre l'étiquetage, des dispositions visant à réduire l'exposition, des restrictions dans les modes d'utilisation, voire l'interdiction de certaines substances chimiques. 25. Les substances déjà connues pour avoir des propriétés perturbant le système endocrinien devraient être incluses dans laproposition du règlement européen sur les produits chimiques REACH, et soumises à la procédure d'autorisation. Initialement, les substances devraient être tirées des listes existantes détaillées dans la stratégie de l'UE pour les perturbateurs endocriniens. Par un processus dynamique, il est impératif que de nouvelles substances entrent et sortent de la liste en tenant compte de nouvelles informations, en incluant en particulier les études académiques dès qu'elles sont disponibles. 26. Des mesures devraient être prises pour restreindre l'utilisation des produits chimiques persistants comme, par exemple les retardateurs de flamme bromés, afin de mettre un terme à leur accumulation chez l'homme et dans l'environnement. Nous craignons que l'inaction ne mène à une répétition des événements dangereux qui ont conduit à l'accumulation des dioxines et des PCB chez l'homme et la faune sauvage. 27. La libération des perturbateurs endocriniens depuis les stations d'épuration devrait être réduite de manière significative. Une fraction importante de la pollution provient des hormones stéroïdiennes sécrétées par l'homme, et le contrôle de celles-ci ne peut pas être facilement régulé. Par conséquent, des améliorations technologiques dans le traitement des eaux usées pour éliminer ces hormones ainsi que d'autres perturbateurs endocriniens sont nécessaires. Toutefois, lorsque cela est possible pour les substances artificielles, la priorité devrait être donnée à la prévention de la dissémination plutôt qu'a des solutions de bout de chaîne. 28. Il est regrettable que les pressions commerciales et les droits de propriété gênent l'accessibilité publique aux données recueillies par des entreprises industrielles aux fins de l'identification des dangers. Nous proposons que les données pertinentes obtenues à partir de l'expérimentation animale soient rendues publiques dès que possible. Cela permettrait d'éviter la répétition coûteuse des expériences, et de tenir compte des questions d'éthique en s'assurant que le meilleur usage peut être fait des données sur les animaux pour le développement de tests alternatifs. Les priorités de la recherche 29. Les défis posés par les perturbateurs endocriniens ne peuvent être résolus à court terme, et il y a un besoin urgent de poursuivre les recherches pour soutenir une meilleure protection de la santé des citoyens européens et de l'environnement. Pour faciliter la planification du prochain 7ème programme-cadre de financement de la recherche de l'UE, nous proposons que les activités de recherche dans ce domaine soient faites dans l'ordre de priorité suivant : 30. L'absence d'image globale de la gamme complète des perturbateurs endocriniens entrave les progrès de l'évaluation des risques. D'autres recherches approfondies au cours des cinq à dix prochaines années sont nécessaires pour combler les lacunes. L'accent devrait être mis sur le développement de nouvelles méthodes d'analyses chimiques ainsi que sur le développement et la validation des techniques de dosage biologique dirigé. Des biobanques avec du matériel de référence sur les hommes et la faune, couvrant les pays européens avec des différences 170 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) marquées pour les troubles pertinents et/ou l'exposition aux substances chimiques devraient être créées. 31. Une meilleure compréhension des modes d'action possibles des perturbateurs endocriniens est nécessaire afin de reconnaître les fonctions de l'organisme qui pourraient être à risque. Ce n'est que sur la base de telles recherches qu'il sera possible de développer des biomarqueurs et des biotests appropriés sur les effets des troubles générés chez l'homme et la faune sauvage. Un renforcement considérable des liens avec la recherche fondamentale dans les processus de la maladie est nécessaire. Les effets des perturbateurs endocriniens sur de nouveaux tissus cibles, ainsi qu'un plus large éventail de voies de signalisation cellulaires doivent être élucidés, en particulier celles qui sont étroitement liées aux conditions de la maladie. 32. Les effets des perturbateurs endocriniens sur un éventail plus large de voies de signalisation cellulaires doivent être élucidés, enparticulier ceux qui sont étroitement liés aux conditions de la maladie. L'accent devrait être mis sur les voies de signalisation impliquées dans des pathologies majeures telles que le syndrome métabolique, l'obésité et les maladies du cœur. 33. Le développement de nouveaux tests et de nouvelles méthodes de dépistage pour l'identification des perturbateurs endocriniens pertinents pour les humains et la faune sauvage doit être poursuivi impérativement. Cette évolution devrait tirer parti des technologies modernes telles que la génomique, la protéomique, la bioinformatique et la métabolomique. 34. Davantage d'informations mécanistiques sur la façon dont les perturbateurs endocriniens sont impliqués dans les maladies humaines sont nécessaires. Ces informations doivent tenir compte de la complexité des scénarios concernant les effets et l'exposition, avec des objectifs multiples, une exposition à plusieurs contaminants ainsi que le fait que les niveaux d'exposition sont faibles et que le temps d'exposition est long. 35. D'autres travaux systématiques sur l'effet cocktail seront nécessaires pour soutenir une amélioration des procédures d'évaluation des risques. La recherche devrait être étendue à l'exploration des relations entre le temps d'exposition et la dose, et à des enquêtes sur les effets d'une exposition séquentielle à plusieurs substances chimiques. L'accent devrait être mis sur la compréhension des bases mécanistiques des effets combinés. 36. Les conséquences de la perturbation endocrinienne sur la faune sauvage devraient être examinées en urgence pour l'équilibre et le bien-être des écosystèmes parce que certaines études de cas ont déjà montré que les perturbateurs endocriniens constituent une menace pour la biodiversité. L'accent devrait être mis sur une meilleure articulation entre les études réalisées en laboratoire et les enquêtes de terrain, étant donné la large couverture des groupes de vertébrés et d'invertébrés. 37. Dans la recherche sur la faune, le travail mécanistique reliant les effets constatés sur l'organisme aux effets à l'échelle des populations et des écosystèmes devrait être encouragé. Il est nécessaire d'appliquer la méthodologie rigoureuse de l'épidémiologie chez l'homme audomaine de la faune sauvage. Des liens avec une approche écologique des systèmes devraient être encouragés. 38. Des programmes spéciaux axés sur la détection des effets possibles sur l'enfant nouveauné à l'origine de problèmes dans l'enfance et à l'âge adulte devraient être initiés afin de 171 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) surmonter le défi de la longue brèche temporaire possible entre un épisode d'exposition et des conséquences indésirables déclarées. Ont signé : Dr Ronny van Aerle (University of Exeter, UK) , Dr Radka Alexy (Institute of Environmental Medicine and Hospital Epidemiology, Germany); Dr Axel Alléra (Universität Bonn,Germany); Prof. Felix Althaus (University of Zurich, Switzerland); Dr Anna Maria Andersson (University Department of Growth and Reproduction, Rigshospitalet, Denmark); Christian Annussek (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany); Dr Jean Bachmann (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany); Dr Thomas Backhaus (University of Bremen, Germany); Alice Barbaglio (University of Milan, Italy); Prof. Dominique Belpomme (Association for Research and Treatments Against Cancer, Hospital Georges Pompidou, France); Prof. Vladimir Bencko (Charles University in Prague, CzechRepublic); Patrizia di Benedetto (Johann-Wolfgangg Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany); Dr Emilio Benfenati (University of Milan, Italy); Nicola Beresford (Brunel University, UK); Dr Pia Berntsson (Lund University, Sweden); Dr Linda S. Birnbaum (U.S. Environmental ProtectionAgency); Prof. Bruce Blumberg (University of California, USA); Dr Francesco Bonasoro (University of Milan, Italy); Prof. Eva BonefeldtJorgensen (University of Aarhus, Denmark); Prof. Jean-Pierre Bourguignon (Universite de Liege, Belgium) Cornelius Brandelik (Johann-Wolfgangg Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany); Prof. Maria Luisa Brandi (University of Florence, Italy); Dr Jayne Brian (Brunel University, UK); Dr Cepta Brougham (Athlone Institute Technology, Ireland); Prof. Miren P. Cajaraville (University of the Basque Country, Bilbao, Spain); Prof. Daniela CandiaCarnevali (University of Milan, Italy); Prof. Justo P. Castano (Universidad de Cordoba, Spain); Sofie Christiansen (Danish Institute for Food and Veterinary Research) Dr André Cicolella (INERIS National Institute of Risks and Environment, France); Dr Annamaria Colacci (Environmental Protection and Health Prevention Agency Emilia Romagna Region, Italy); Dr Ana Dulce Correia (CIIMAR - Interdisciplinary Centre for Marineand Environmental Research, Portugal); Prof. Mark Cronin (John Moores University, UK); Dr Maiken Dalgaard (Danish Institute for Food andVeterinary Research); Dr Michele De Rosa (University of Naples, Italy); Prof. Barbara Demeneix (Muséum National D'Histoire Naturelle, France); Dr Diego Di Lorenzo (Ospedale Civile di Brescia, Italy); Angela Dinapoli (Johann-Wolfgangg Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany); Dr Martina Duft (Johann-Wolfgangg Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany); Prof. Rik Eggen (EAWAG - Swiss Federal Institute of Aquatic Science and Technology, Switzerland); Gaby Elter (Johann-Wolfgangg Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany) Maria Jose Lopez Espinosa (San Cecilio University Hospital, Spain); Prof. Jerzy Falandysz (University of Gdansk, Poland); Prof. Carla Falugi (Laboratory of Experimental Embryology and Cytotoxicology, Genova, Italy); Dr Michael Faust (Faust and Backhaus Environmental Consulting, Germany) Prof. Karl Fent (University of Applied Sciences Basel, Switzerland); Denise Fernandes (CSIC University of Barcelona, Spain); Dr Mariana F. Fernandez (Hospital Universitario San Cecilio, Universidad de Granada, Spain); Dr Maria Fickova (Institute of Experimental Endocrinology, Slovakia); Dr Frederic Flamant (Ecole Normale Supérieure de Lyon, France) ; Sandro Freitas (CIIMAR - Interdisciplinary Centre for Marine and Environmental Research, Portugal); Prof. Silvana Galassi (University of Milan, Italy); Alicia Granada Garcia (San Cecilio University Hospital, Spain); Dr Sébastien Garry (Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments, France); Prof. Gunther Gauglitz (Tübingen University, Germany); Dr Andreas Gerecke (EMPA - Swiss Federal Laboratories for Materials Testing and Research); Dr Anton Gerritsen (RIZA - Institute for Inland Water Management and Waste Water Treatment, Netherlands); Dr Madana Ghisari (University of Aarhus, Denmark); Prof. Andreas Gies (Director and Professor at the German Federal 172 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Environmental Agency - UBA); Rachel Gomes (University of London School of Pharmacy, UK); Dr Martin Göttlicher (GSF - National research centre for environment and health, Germany); Dr Konstanze Grote (Charité Universitätsmedizin Berlin, Germany); Prof. JanÅke Gustafsson (Karolinska Institute, Sweden); Dr Arno Gutleb (Norwegian School of Veterinary Science); Prof. LarsHagmar (Lund University Hospital, Sweden) Prof. Helen Håkansson (Karolinska Institute, Sweden); Prof. Peter-Diedrich Hansen (Technische Universität Berlin, Germany); Dr Catherine Harris (Brunel University, UK); Dr Stefan Hartung (University Clinic Hamburg-Eppendorf, Germany); Dr Ulla Hass (Danish Institute for Food and Veterinary Research) Prof. Tyrone B Hayes (University of California Berkeley, USA); Maren Heß (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany); Dr Elizabeth Hill (University of Sussex, UK); Dr Philip S Hjelmborg (University of Aarhus, Denmark); Lut Hoebeke (Flemish Environmental Agency VMM, Belgium) Prof. Ieuan Hughes (University of Cambridge, UK); Prof. Ilpo Huhtaniemi (Imperial College, UK); Dr Philippe Irigaray (Association for Research and Treatments Against Cancer, France); Dr Michael Jakusch (Austrian Research Centers); Gemma Janer (CSIC University of Barcelona, Spain); Prof. Olli Jänne (University of Helsinki, Finland); Prof. Bernard Jegou (University of Rennes, France); Prof. Tina Kold Jensen (University of Southern Denmark); Dr Susan Jobling (Brunel University, UK); Dr Andrew C. Johnson (Centre for Ecology and Hydrology, UK); Dr Niels Jonkers (University of Venice, Italy); Dr Niels Jørgensen (University Department of Growth and Reproduction, Rigshospitalet, Denmark); Prof. Pierre Jouannet (Université René Descartes/Hôpital Cochin, France); Dr Olivier Kah (University of Rennes, France) Dr Ioanna Katsiadaki (Centre for Environment Fisheries and Aquaculture Science, UK); Dominik Kayser (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany); Dr Hannu Kiviranta (National Public Health Institute, Finland);Prof. Werner Kloas (Leibniz-Institute of Freshwater Ecology and Inland Fisheries, Germany);Prof. Annette Klussmann-Kolb (JohannWolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany);Dr Martin Köhler (EMPA - Swiss Federal Laboratories for Materials Testing and Research);Prof. Heinz-R. Köhler (University of Tübingen, Germany);Dr Andreas Kortenkamp (University of London School of Pharmacy, UK);Dr Tanja Krueger (University of Aarhus, Denmark);Dr Cinzia La Rocca (Istituto Superiore di Sanità, Italy);Dr Pavel Langer (Institute of Experimental Endocrinology, Slovakia);Dr Jens-Jørgen Larsen (Danish Institute for Food and Veterinary Research);Dr Giuseppe Latini (Perrino Hospital, Italy);Ramon Lavado (CSIC University of Barcelona, Spain);Prof. Paul Layer (Darmstadt University of Technology, Germany);Dr Carole LeBlanc (University of Massachusetts Lowell, USA);Dr Henrik Leffers (University Department of Growthand Reproduction, Rigshospitalet, Denmark);Prof. Juliette Legler (Free University Amsterdam, TheNetherlands);Prof. Walter Lichtensteiger (University of Zurich, Switzerland);Dr Manhai Long (University of Aarhus, Denmark);Prof. Ulrich Loos (University of Ulm, Germany);Dr Pedro P. Lopez-Casas (Centro de Investigaciones Biologicas, Spain);Prof. Jan Krzysztof Ludwicki (National Institute of Hygiene, Poland);Dr Ilka Lutz (Leibniz-Institute of Freshwater Ecology and Inland Fisheries, Germany);Prof. Adriana Maggi (University of Milan, Italy);Dr Kim Mahood (Medical Research Council Human Reproductive Sciences Unit, UK);Prof. Sari Mäkelä (University of Turku, Finland);Prof. Alberta Mandich (University of Genova, Italy);Prof. Gian Carlo Manicardi (Università di Modena e Reggio Emila, Italy);Dr Alberto Mantovani (Istituto Superiore di Sanità, Italy);Prof. Luigi Manzo (University of Pavia and Maugeri Foundation Medical Centre, Italy);Francesca Maranghi (Istituto Superiore di Sanità, Italy);Prof. Antonio Marcomini (University of Venice, Italy);Prof. Robert Marks (Ben-Gurion University of the Negev, Israel);Dr Francis L Martin (Lancaster University, UK);Rebeca Martin-Skilton (CSIC University of Barcelona, Spain);Dr Alessandra Massari (University of Genoa, Italy);Dr Francesco Massart (University of Pisa, Italy) Prof. Peter Matthiessen (Centre for Ecology and 173 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Hydrology, UK);Prof. Ian Mayer (University of Bergen, Norway);Prof. Jesus del Mazo (CIB, CSIC University of Madrid, Spain) Dr John Meerman (Vrije Universiteit, The Netherlands);Wiebke Meyer (University of Bremen, Germany);Dr Christian Micheletti (University of Venice, Italy);Dr Christophe Minier (Université du Havre, France);Dr Steven Morris (Centre for Environment, Fisheries and Aquaculture Science, UK);Dr Daniela Mozzi (University of Milan, Italy);Dr Serge Nef (University of Geneva, Switzerland);Gerrit Nentwig (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany);Prof. Leif Norrgren (Swedish University of Agricultural Sciences);Prof.Jörg Oehlmann (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany);Prof. Michael Oehme (University of Basel, Switzerland);Dr Matthias Oetken (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany);Prof. Nicolas Olea (University of Granada, Spain);Prof. Stina Oredsson (University of Lund, Sweden);Prof. Farzad Pakdel (University of Rennes, France);Dr Ragnor Pedersen (University of London School of Pharmacy, UK);Dr Giulio Pojana (University of Venice, Italy);Dr Ingemar Pongratz (Karolinska Institute, Sweden);Dr Cinta Porte (CSIC - Chemical and Environmental Research Institute of Barcelona, Spain);Dr Tom Pottinger (Centre for Ecology and Hydrology, UK);Dr Dominik Rachon (Medical Universityof Gdansk, Poland);Prof. Daniela Reali (University of Pisa, Italy);Prof. Maria Armanda Reis-Henriques (CIIMAR - Interdisciplinary Centre for Marine and Environmental Research, Portugal);Maarten Roggeman (Federal Public Service Health, Food Chain Safety and Environment, Belgium);Dr Ed Routlege (Brunel University, UK);Dr Agustin Ruiz (NEOCODEX, Spain);Dr Tamsin Runnalls (Brunel University, UK);Dr Vasilios A. Sakkas (University of Ioannina, Greece);Dr Matthew Sanders (Centre for Environment, Fisheries and Aquaculture Science, UK);Dr Eduarda Santos (University of Exeter, UK);Ursula Sauer (ARC Seibersdorf Research, Austria);Prof. Margret Schlumpf (University of Zurich, Switzerland);Claudia Schmitt (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany) Dr Martin Scholze (University of London School of Pharmacy, UK);Prof. Karl Werner Schramm (GSF - National research centrefor environment and health, Germany);Dr Ulrike Schulte-Oehlmann (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany);Prof. Helmut Segner (University of Bern, Switzerland);Prof. Richard Sharpe (Medical Research Council Human Reproductive Sciences Unit, UK);Dr Elisabete Silva (University of London School of Pharmacy, UK);Prof. Leopoldo Silvestroni (Segreteria Particolare del Sottosegretario di Stato, Ministero della Salute, Italy);Prof. Niels Skakkebaek (University Department of Growth and Reproduction, Rigshospitalet, Denmark);Stefanie Skaliks-Adler (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany);Prof. EdwardSkorkowski (Gdansk University Biological Station, Poland);Prof. Olle Söder (Karolinska Institute, Sweden);Prof. Carlos Sonnenschein (Tufts University School of Medicine, USA);Dr Eugen Gravningen Sørmo (Norwegian University of Science and Technology, Norway);Prof. Ana M. Soto (Tufts University School of Medicine, USA);Dr Marcello Spanò (BIOTEC-MED, ENEA CR Casaccia, Italy);Prof. Polyxeni Nicolopoulou Stamati (Medical School University of Athens, Greece);Sid Staubach (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany);Michela Sugni (University of Milan, Italy);Prof. Charles Sultan (CHU de Montpellier, France);Prof. John Sumpter (Brunel University, UK);Prof. Shanna H.Swan (University of Rochester, USA);Dr Chris E. Talsness (Charité Universitätsmedizin Berlin, Germany);Dr Manuel Tena-Sempere (University of Córdoba, Spain);Dr Remi Thibaut (CSIC University of Barcelona, Spain);Prof.Dagnac Thierry (BRGM - Bureau of Geological and Mining Research, France);Dr Michaela Tillmann (Institute of Hydrobiology, Dresden University of Technology, Germany);Dr Gunnar Toft (Aarhus University Hospital, Denmark);Prof. Jorma Toppari (University of Turku, Finland);Dr Paolo Tremolada (University of Milan, Italy);Dr Rita Triebskorn (SteinbeisTransferzentrum für Ökotoxikologie und Ökophysiologie, Germany);Prof. Tomás Trnovec 174 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) (Slovak Medical University, Slovakia);Prof. Charles Tyler (University of Exeter, UK);Dr Anne Van Cauwenberge (Hygiene Institute, Mons, Belgium);Prof. Terttu Vartiainen (National Public Health Institute, Finland);Dr Leo van der Ven (Netherlands National Institute for Public Health and the Environment);Prof. Nico P.E. Vermeulen (Vrije Universiteit, The Netherlands);Dr Luigi Viganc (IRSA-CNR University of Milan, Italy);Dr Anne Marie Vinggaard (Danish Institute of Food and Veterinary Research);Christian Vogt (Johann-Wolfgang GoetheUniversität Fankfurt am Main, Germany);Martin Wagner (JohannWolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany);Prof. Rosemary Waring (University of Birmingham, UK);Dr Burkard Watermann (LimnoMar Laboratory for Aquatic Research and Comparative Pathology, Germany);Dr Emily Willingham (University of California, USA);Gertraud Wirzinger (Johann-Wolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany);Prof. Alicja Wolk (Karolinska Institute, Sweden);Dr Leah Wollenberger (Technical University of Denmark);Dr Annalisa Zaccaroni (University of Bologna, Italy);Dr Daniel Zalko (Institut National de la Recherche Agronomique, France);Prof. Renato Zenobi (ETH - Swiss Federal Institute of Technology Zürich, Switzerland);Simone Ziebart (JohannWolfgang Goethe Universität Fankfurt am Main, Germany) Les affiliations sont données pour fins d'identification uniquement et tous les signataires ont signé à titre personnel. Signataires à la date du 4 mai 2006 175 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Annexe n°3 : Formulaire de déclaration d’un effet indésirable sur à l’utilisation d’un produit cosmétique 176 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 177 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Annexe n°4 : LA RECOMMANDATION “PRODUITS COSMÉTIQUES” DE L’ARPP PRÉAMBULE Un “produit cosmétique” est défini comme “toute substance ou préparation destinée à être mise en contact avec les diverses parties superficielles du corps humain (épiderme, systèmes pileux et capillaire, ongles, lèvres et organes génitaux externes) ou avec les dents et les muqueuses buccales en vue, exclusivement ou principalement, de les nettoyer, de les parfumer, d’en modifier l’aspect, de les protéger, de les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles” Art. 2 du Réglement CE n° 1223/2009 du Parlement Européen et du Conseil du 30 novembre 2009 relatifs aux produits cosmétiques. On entend par “allégation” toute revendication, indication ou présentation, utilisées pour la publicité d’un produit. Toute allégation doit être véridique, claire, loyale, objective et ne doit pas être de nature à induire en erreur. La publicité doit proscrire toutes les déclarations ou les représentations visuelles susceptibles de générer des craintes irrationnelles ou infondées. Ces dispositions visent la publicité qui s’adresse au consommateur. Elles sont applicables à toute allégation publicitaire pour les produits cosmétiques, quel que soit le support utilisé : télévision, radio, médias électroniques, téléphone, affichage, presse, PLV, conditionnements, notices, etc. Les allégations publicitaires doivent respecter les dispositions de la dernière version du “Manual on the scope of application of the Cosmetics Directive 76/768/EEC” qui est disponible au lien suivant : http://ec.europa.eu/consumers/sectors/cosmetics/cosmetic-products/borderline-products/ Elles doivent également respecter les dispositions des Recommandations de l’ARPP, et en particulier “Mentions et Renvois”, “Vocabulaire publicitaire”, “Développement Durable”. PRINCIPES GÉNÉRAUX CONCURRENCE < La publicité ne doit comporter aucune mention tendant à faire croire que le produit possède des caractéristiques particulières alors que tous les produits similaires possèdent les mêmes caractéristiques, notamment du fait de la catégorie du produit considéré ou de la simple application de la réglementation en vigueur. < Les messages ne doivent pas être construits sur des arguments dénigrants visant un ou des produit(s) concurrent(s). 178 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) PREUVES < Toute allégation doit s’appuyer sur des preuves appropriées. < L’allégation doit être en adéquation avec la nature et l’étendue des dites preuves. PRÉSENTATION DES PERFORMANCES D’UN PRODUIT Nature des tests < Lorsque des études ou des tests sont mentionnés dans une publicité, leur nature doit être explicitement indiquée : tests scientifiques statistiquement valides (évaluation par des experts professionnels sous contrôle médical ou non, tests instrumentaux, études sensorielles sous protocole, tests ex vivo/in vitro) ou tests de satisfaction (tests d’usage par des consommateurs sur un nombre suffisant de sujets). < Afin de ne pas induire en erreur le consommateur, la mesure de l’efficacité d’un produit ne peut être reliée qu’à des tests scientifiques. < Lorsque le message s’appuie sur des tests de satisfaction, il ne peut faire état que du pourcentage d’individus satisfaits ou ayant perçu l’effet revendiqué. < La présentation de tests scientifiques ou de satisfaction doit clairement les distinguer les uns des autres lorsqu’ils sont utilisés dans un même message publicitaire. < Ces tests doivent être réalisés en conformité avec les Lignes Directrices Cosmetics Europe “Evaluation de l’efficacité des produits cosmétiques”. Présentation des résultats Résultats chiffrés < Quand les allégations publicitaires comportent des revendications chiffrées, la publicité doit se référer aux résultats moyens, obtenus sur l’ensemble de la population testée (le nombre total de sujets doit être indiqué), et statistiquement valides. < L’indication d’un résultat quantifié obtenu sur une population inférieure à celle qui fait l’objet du test est possible à l’ensemble des conditions suivantes : - La population partielle ne doit pas être inférieure au tiers de la population totale qui a fait l’objet du test ; - Ce résultat obtenu sur la population partielle doit être un résultat moyen ; - Le résultat moyen de la population partielle ne doit pas être supérieur à trois fois le résultat moyen de la population totale qui a fait l’objet du test ; - Le résultat partiel doit être complété par l’indication écrite du résultat moyen obtenu sur la population totale dans les mêmes conditions de visibilité et lisibilité ; le nombre de 179 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) sujets concernés par le résultat moyen partiel doit être clairement indiqué ainsi que celui de la population totale qui a fait l’objet du test. < Certains termes, comme par exemple “quartile” ou “dernier quartile”, ne revêtent aucune signification précise pour le consommateur, sont de nature à l’induire en erreur et sont donc à proscrire. Représentations visuelles Lorsque la publicité se réfère à des schémas ou à des démonstrations, par exemple de type “avant/après”, les visuels utilisés doivent refléter de façon proportionnée et cohérente les performances du produit et être représentatifs de l’échantillon testé. Résultats in vitro < Lorsque les résultats, présentés dans la publicité, sont issus d’essais in vitro, cette précision doit figurer dans la publicité. < Dans tous les cas, la présentation des résultats issus d’études in vitro ne doivent pas laisser croire à un résultat in vivo. llustrations des performances < Des techniques numériques peuvent être utilisées pour améliorer la beauté des images afin de communiquer sur la personnalité et le positionnement de la marque et/ou tout avantage spécifique du produit. < Cependant l'illustration de la performance d'un produit ne doit pas être trompeuse : - Les techniques numériques ne doivent pas modifier les images des modèles de telle manière que leurs formes ou leurs caractéristiques deviennent trompeuses sur le résultat pouvant être atteint par le produit. - Les techniques de pré et post production sont acceptables tant qu'elles ne donnent pas l'impression que le produit possède des caractéristiques ou fonctions qu'il n'a pas. Par exemple, les cas suivants ne sont pas jugés trompeurs : - l'exagération évidente ou des images de beauté stylisées qui ne sont pas censées être considérées de façon littérale, - les techniques qui améliorent la beauté des images et qui sont indépendantes du produit ou des effets annoncés. CAUTION < Une recommandation, émanant d’un ou des membre(s) d’une profession médicale, paramédicale ou scientifique, peut s’appliquer à un ingrédient, à un produit ou à un message général relatif à l’hygiène ou la beauté, sous réserve qu’elle repose sur des preuves objectives 180 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) et vérifiables et qu’elle ne reflète pas professionnel(s) représenté(s). seulement l’opinion personnelle du ou des < Lorsque la recommandation émane d’un professionnel lié à l’entreprise promouvant le produit, ce lien doit être clairement annoncé dans le message publicitaire. < Le professionnel, s’il est nommé, doit avoir une existence physique réelle ; néanmoins l’appel à un comédien pour le représenter est possible. < Ces messages ne doivent pas donner lieu à une confusion pour le consommateur entre le produit cosmétique et un médicament. RÉFÉRENCE À CHIRURGICAUX DES PROCÉDÉS OU ACTES MÉDICAUX OU La référence à des procédés ou actes médicaux ou chirurgicaux n’est possible que si elle n’induit pas le consommateur en erreur en lui faisant croire implicitement que le produit donnera des résultats équivalentsou comparables à ces procédés ou actes médicaux ou chirurgicaux. RÉFÉRENCE À UN MÉCANISME D’ACTION Il est possible de se référer au mécanisme d’action du produit ou de ses ingrédients si ce mécanisme repose sur des justificatifs objectifs et que la revendication principale du produit porte clairement sur un bénéfice cosmétique visible. ALLÉGATIONS SPÉCIFIQUES ALLÉGATION “NOUVEAU” < Le terme de “nouveau” et ses dérivés ne doivent être utilisés qu’en relation avec une modification réelle - soit de la formule du produit ou de son utilisation, - soit de sa présentation ou de son conditionnement, à condition qu’il soit bien spécifié que la nouveauté est à ce seul niveau. < Il est d’usage de limiter l’utilisation de ce terme à une durée d’un an. ALLÉGATIONS “SANS” < Afin de contribuer à une image valorisante des produits cosmétiques, la publicité doit être essentiellement consacrée aux arguments positifs. 181 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) < A ce titre, l’utilisation d’une allégation indiquant l’absence d’un ou de plusieurs ingrédients ou d’une catégorie d’ingrédients n’est possible que si cette allégation respecte les conditions spécifiques suivantes : - Elle ne constitue pas l’argument principal du produit mais apporte au consommateur une information complémentaire ; - Elle n’est pas dénigrante, notamment elle ne met pas en avant un risque ou un danger pour la santé ou l’environnement. - Elle est loyale et non mensongère, en particulier lorsque l’ingrédient ou la combinaison d’ingrédients peuvent être apportés de manière indirecte, notamment par l’intermédiaire d’une autre matière première. ALLÉGATIONS “ENVIRONNEMENTALES” L’ensemble de la Recommandation “Développement Durable” de l’ARPP a vocation à s’appliquer aux communications du secteur. En particulier : < La publicité doit proscrire toute déclaration de nature à tromper directement ou indirectement le consommateur sur la réalité des avantages ou propriétés écologiques des produits ainsi que sur la réalité des actions que l’annonceur conduit en faveur de l’environnement. < La publicité ne doit pas donner ou paraître donner une garantie totale d’innocuité dans le domaine de l’environnement, lorsque les qualités écologiques du produit ne concernent qu’un seul stade de la vie du produit ou qu’une seule de ses propriétés. < Le choix des signes ou des termes utilisés dans la publicité, ainsi que des couleurs qui pourraient y être associées, ne doit pas suggérer des vertus écologiques que le produit ne posséderait pas. ALLÉGATION “HYPOALLERGÉNIQUE” Le terme “hypoallergénique” est le seul mot dérivé d’allergie qui puisse être utilisé, sans explication particulière, pour qualifier des produits conçus de manière à minimiser le plus possible les risques d’allergie. Tous les autres termes dérivés du mot “allergie” sont interdits. Le terme “allergie” ne peut être utilisé qu’avec une grande prudence. L’utilisation de ce terme doit être conforme aux usages de la profession. ALLÉGATIONS “AMINCISSEMENT/CELLULITE” < L’amaigrissement est la conséquence, soit d’une maladie, soit d’un traitement spécialisé, soit d’une modification de régime. Il ne peut donc être fait aucune référence, dans le cadre d’une allégation cosmétique, à ce terme ou à ses dérivés, ainsi qu’à la perte de poids. 182 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) < L’utilisation du mot “mincir”, ou de ses dérivés, est acceptable pour exprimer une amélioration de l’apparence esthétique sans ambiguïté dans l’expression. < Dans ce cas, étant donnée la variation des résultats selon les individus, les allégations quantifiées d’une diminution de mensuration et/ou toute indication précise du délai d’obtention d’un résultat ne sont permises que sous réserve de preuves scientifiques. < Les produits qui font état d’une action esthétique peuvent se référer nommément à la cellulite, par le terme “anticellulite” par exemple, pour autant que visuel et allégation restent dans le domaine de l’embellissement de la peau, de son apparence, de son maintien en bon état (par exemple : “lissage”, “peau plus ferme”, “peau plus souple”...). < Toute revendication relative à la prévention ou au traitement de la cellulite est proscrite, l’action revendiquéene doit porter que sur les signes, effets ou aspect de la cellulite. ALLÉGATIONS “ANTI-ÂGE / ANTI-RIDES” < Un produit peut revendiquer une action sur les signes ou les effets du vieillissement. En ce sens, les allégations relatives à l’atténuation ou à la diminution des rides ou des ridules sont envisageables. < En ce sens, l’emploi du mot “rajeunir” ou de ses dérivés, doit exprimer une apparence de plus grande jeunesse de la peau, sans ambiguïté dans l’expression publicitaire. ALLÉGATIONS “CHUTE DES CHEVEUX” < Sont admises : - L’utilisation du terme “antichute” pour qualifier un produit ou un traitement destinés à freiner, ralentir, limiter ou prévenir la chute des cheveux. La publicité ne doit pas laisser croire à un résultat définitif. - Les revendications sur la pousse ou la croissance des cheveux existants. < Sont interdits : - Les notions de repousse, pousse ou naissance de nouveaux cheveux, ou toute autre périphrase tendant à faire croire que le produit puisse constituer un remède à la chute des cheveux. - Les termes “calvitie”, “stoppe la chute des cheveux” ou toute autre expression analogue. ALLÉGATIONS “HYDRATATION” On entend par produits hydratants les produits destinés à améliorer ou maintenir l’équilibre en eau de l’épiderme. Un produit cosmétique ne peut pas être présenté comme susceptible d’hydrater ou de réhydrater en profondeur la peau. 183 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) PRODUITS PARTICULIERS PRODUIT COSMÉTIQUE NATUREL Un produit cosmétique ne peut être qualifié de “naturel” que si le produit fini contient un minimum de 95 % (p/p) d’ingrédients définis comme “naturels” ou “d’origine naturelle”, selon les règles en usage (par exemple : réglementation nationale ou communautaire, cahier des charges ou référentiels publiés). PRODUIT COSMÉTIQUE BIOLOGIQUE < Un produit cosmétique ne peut être qualifié de “biologique” que s’il remplit au moins une des conditions suivantes : - il contient 100 % d’ingrédients certifiés issus de l’agriculture biologique ; - il a été certifié “biologique” par un organisme certificateur ; - il peut être justifié qu’il a été élaboré selon un cahier des charges publié, ayant un niveau d’exigence, en termes de composition et de teneur en ingrédients certifiés issus de l’agriculture biologique, équivalent au(x) niveau(x) d’exigence requis par les organismes certificateurs. < L’utilisation d’un signe ou d’un symbole dans la publicité ne doit pas prêter à confusion avec des labels officiels. < La publicité ne doit pas attribuer à ces signes, symboles ou labels une valeur supérieure à leur portée effective. PRODUITS DE PROTECTION SOLAIRE < Les allégations concernant les produits de protection solaire doivent être conformes à la Recommandation de la Commission Européenne du 22 septembre 2006 relative aux produits de protection solaire et aux allégations des fabricants quant à leur efficacité. < En particulier, les messages d’information suivants, sur le bon usage du soleil, doivent être intégrés dans la communication publicitaire, chaque entreprise ayant la liberté de choisir le support le plus approprié et de reprendre les trois notions suivantes sous la forme ou l’expression de son choix : - “Ne restez pas trop longtemps au soleil, même si vous utilisez un produit de protection solaire” - “N’exposez pas les bébés et les jeunes enfants directement au soleil” - “La surexposition au soleil est une menace sérieuse pour la santé” < Aucune allégation suggérant les caractéristiques suivantes ne devrait être faite : - protection à 100 % contre le rayonnement UV (comme “écran total” ou “protection totale”) 184 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) - aucun besoin de renouveler l’application, quelles que soient les circonstances (comme “prévention durant toute la journée”). PRODUITS DE SOIN OU D’HYGIÈNE POUR LES PEAUX À TENDANCE ACNÉIQUE < Sont interdites les allégations relatives au traitement ou à la prévention de l'acné (par exemple : anti acnéique, contre l'acné), au traitement ou à la prévention des papules, pustules, kystes et microkystes ainsi qu’à l’action endocrinienne sur la production de sébum. < Sont possibles les autres allégations sous réserve qu'elles soient justifiées par des preuves scientifiques. PRODUITS DE SOIN ET D'HYGIÈNE BUCCO-DENTAIRE < Sont interdites les allégations relatives au traitement de la carie dentaire ou au traitement de la gingivite (par exemple : réduction de l'inflammation ou des saignements gingivaux). < Sont possibles les allégations relatives à la prévention de la carie dentaire ou à la prévention ou à la réduction des saignements ou de l'inflammation gingivale occasionnelle. 185 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Annexe n°5 : La charte COSMEBIO® La cosmétique écologique et biologique est une démarche éthique et scientifique fondée sur des savoirs traditionnels tout en bénéficiant des progrès des sciences du vivant et de la nature. Son évolution est récente, remarquable et fondée sur une volonté de transparence. Elle entraine dans son mouvement l’ensemble des acteurs de la filière œuvrant dans les matières premières, les ingrédients, la production, l’extraction, la transformation, la formulation et la distribution. Elle concerne également les consommateurs qui manifestent de manière forte et croissante leur intérêt pour une cosmétique écologique et biologique. Ils la perçoivent comme une alternative de confiance. Ce mouvement dynamique et vertueux doit être entretenu dans son devenir par un engagement et un investissement soutenu de la part de l’ensemble des acteurs de la cosmétique écologique et biologique. Les adhérents de l’Association Cosmebio, représentant les acteurs du développement de la filière,ont la conviction qu’une cosmétique écologique et biologique, formulée et préparée à partir de produits naturels, écologiques et biologiques, est une source de bienfaits pour nos consommateurs et de progrès pour la société et l’ensemble de nos métiers. Les acteurs de la filière considèrent que la cosmétique écologique et biologique doit prendre en considération les hommes qui la soutiennent, la démarche scientifique qui l’améliore et enfin la nature en qui elle puise son efficacité et sa légitimité. Ils sont conscients que leur engagement réel et sérieux est une condition nécessaire au développement de l’Association Cosmebio. Le marché de la cosmétique écologique et biologique est en constante mutation. Il y a de plus en plus d’opérateurs, de nouveaux consommateurs, de standards qui se développent et s’harmonisent au niveau européen et international. Les acteurs de la filière ont besoin de repères crédibles et de qualité que seuls des engagements concrets peuvent apporter. Pour y répondre, les industriels de la cosmétique écologique et biologique élaborent des produits sur la base d’un cahier des charges agréé par l’Association Cosmebio, et qui sont certifiés par des organismes accrédités. C’est pourquoi l’action de l’Association est fondée sur 3 thèmes fédérateurs, Les hommes, l’éthique et la responsabilité sociale Une démarche scientifique pour une cosmétique écologique et biologique encadrée et contrôlée Le respect de la nature et le soutien à l’agriculture biologique Par suite, il est demandé à tous les adhérents de contribuer à 8 engagements qui soutiennent les thèmes fondateurs de l’Association. 186 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Ces engagements sont précis et vérifiables. Ils sont de natures différentes. Trois engagements sont des guides de conduite : la communication responsable, les évaluations de commerce équitable et de biodiversité. Quatre engagements représentent des obligations : la formation, une information claire des consommateurs, la part de produits labellisés et le respect de la charte graphique Cosmebio. Un engagement est pris à titre collectif : le Rapport Annuel de Développement durable de l’Association Cosmebio. Les Hommes, l’Ethique et la Responsabilité Sociale La cosmétique écologique et biologique s’inscrit tout d’abord dans une vision harmonieuse et respectueuse de notre société, des hommes et de leur environnement. Cela s’exprime, dans nos métiers, par Des projets d’entreprise qui considèrent les hommes et les femmes qui y travaillent comme des chances et non comme des charges, Des conditions de vie et de travail compatibles avec la dignité et l’épanouissement personnels, Un consommateur informé clairement, de manière transparente et avec honnêteté pour maintenir et développer le lien de confiance entre le producteur et le consommateur, Un commerce plus solidaire et équitable, Une filière qui s’engage et doit être prise en considération dans son ensemble et par tous ses acteurs : matières premières, ingrédients, production, extraction, transformation, formulation, distribution, consommation et recyclage. En particulier, les adhérents de Cosmebio s’engagent à… Engagement n°1 : participer aux journées de formation Cosmebio Toute entreprise qui intègre l’Association s’engage à faire participer un ou plusieurs référents de son choix à une journée de formation par an aux principes directeurs de l’Association Cosmebio, de son référentiel et de ses évolutions. Cette formation est dispensée par l’Association Cosmebio. Engagement n°2 : élaborer une évaluation sur les pratiques du commerce solidaire et équitable Tout adhérent s’engage à effectuer et/ou à faire effectuer auprès de ses fournisseurs concernés une Evaluation sur ses pratiques du Commerce Solidaire et Equitable qui intègre les fondamentaux du Commerce équitable sous un an à compter de la date de son adhésion. Une grille d’évaluation est proposée par l’Association Cosmebio. Elle est auto-administrée et doit être retournée à l’Association Cosmebio qui pourra intégrer ces informations de manière anonyme et statistique dans son Rapport Annuel de Développement Durable. 187 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Une cosmétique écologique et biologique à la pratique encadrée et contrôlée Notre vocation est de développer et de promouvoir une cosmétique véritablement écologique et biologique, qui doit respecter cinq principes depuis l’origine et la transformation des matières premières jusqu’au produit fini et son évolution future. 1er principe – la garantie / la certification Nos produits sont certifiés par des organismes certificateurs indépendants, accrédités et agréés par Cosmebio. Le respect de la conformité des produits se fait selon les cahiers des charges agréés par Cosmebio. 2ème principe – la naturalité des ingrédients Les ingrédients utilisés sont issus de ressources naturelles non animales diverses, renouvelables et préférentiellement issues de l’agriculture biologique certifiée. L’utilisation de ces ressources doit être durable et responsable ; elle doit respecter la biodiversité et exclure la bio piraterie. 3ème principe – la transformation Les procédés de transformation et de fabrication sont encadrés- non polluants, respectueux de la santé humaine et de l’environnement. Ils peuvent être physiques ou chimiques s’ils répondent aux principes de la Chimie Verte. 4ème principe – les emballages Les répercussions environnementales des emballages au cours de leur cycle de vie sont prises en considération et minimisées. La capacité des emballages à être recyclés est impérative. 5ème principe – l’amélioration continue. La filière doit investir dans sa connaissance et sa maîtrise des ingrédients et des procédés. Les formulations doivent viser des niveaux de performances toujours plus ambitieux, et les techniciens et les ingénieurs poursuivre un programme de formation continue pour renforcer en permanence leurs compétences. Engagement n°3 : labelliser tout ou partie des produits d’une marque Toute marque commerciale qui contient le mot BIO dans sa dénomination et qui détient ou va détenir au moins un produit certifié et labellisé Cosmebio devra labelliser Cosmebio 100% des produits de la marque commerciale concernée. Toute entreprise adhérente dont la marque commerciale détient un produit sous le label Cosmebio doit labelliser Cosmebio au moins 20% des produits de la marque commerciale concernée d’ici à 3 ans. Engagement n°4 : informer clairement les consommateurs Pour tout produit labellisé Cosmebio, l’entreprise adhérente devra, sous 6 mois à compter du certificat de conformité au référentiel, communiquer sur le site de l’Association Cosmebio la liste des ingrédients du produit concerné selon la nomenclature internationale des ingrédients cosmétiques (INCI). 188 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Le respect de la nature et le soutien de l’agriculture biologique La cosmétique écologique et biologique vient de la nature. Elle s’attache à utiliser des ingrédients naturels écologiques et biologiques selon des procédés d’extraction et de transformation qui préservent au mieux leurs propriétés naturelles. La cosmétique écologique et biologique respecte le patrimoine universel de la nature, en s’engageant : à utiliser durablement les ressources naturelles, à s’interdire le brevetage du vivant et l’utilisation d’organismes génétiquement modifiés - OGM, à prendre en compte le respect de la vie animale, à se conformer aux accords internation aux concernant la préservation de la biodiversité et la lutte contre la bio piraterie, à limiter la pollution de la biosphèrepar la diminution des emballages et des déchets, réduction des émissions de gaz à effet de serre, ... En particulier, les adhérents de Cosmebio s’engagent à... Engagement n°5 : contribuer à l’évaluation de la biodiversité Tout candidat s’engage à effectuer et à remettre à l’Association une évaluation de la biodiversité sur ses produits labellisés Cosmebio, sous un an à compter de la date de son adhésion. Une grille d’évaluation est proposée par l’Association Cosmebio. Elle est autoadministrée et doit être retournée à l’Association Cosmebioqui intégrera ces informations de manière anonyme et statistique dans son Rapport Annuel de Développement Durable. Engagement n°6 : adopter une communication responsable Tout adhérent s’engage à suivre les préconisations de la charte de communication Cosmebio pour toute communication se référant aux produits portant le label Cosmebio. Cette charte de communication s’appuie sur une grille d’autodiagnostic, développée à partir des textes de référence publiés par les autorités de régulation de la publicité et aussi à partir des meilleures pratiques en France, en Europe et à l’étranger à propos de la communication des produits et des services se réclamant d’une démarche de développement durable. Engagement n°7 : respecter la norme d’utilisation du logo Cosmebio Tout candidat s’engage à respecter strictement la charte graphique qui prescrit la conformité de l’utilisation du logo Cosmebio sur tous supports de communication : emballages, publicité, etc. La charte graphique Cosmebio est remise à chaque adhérent lors de son inscription à l’Association. La Charte Cosmebio réunit les engagements collectifs entre l’Association et ses membres dans le respect de ses thèmes fondateurs. Elle se développe et évolue aujourd’hui vers des valeurs principalement axées sur les hommes, la démarche scientifique et le respect de la nature. Pour le consommateur, la cosmétique écologique et biologique lui assure une alternative de confiance par une parfaite transparence au niveau de l’ensemble de la filière. 189 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Pour confirmer l’engagement collectif qui l’unit à ses membres, l’Association Cosmebio s’engage à : Engagement n°8 : éditer un Rapport Annuel de Développement Durable. Pour confirmer l’engagement de son collectif et assumer sa responsabilité au sein de la filière et vis-à-vis de la Société, l’Association Cosmebio s’engage à éditer chaque année un Rapport de Développement Durable qui indiquera l’état des lieux, les objectifs et les progrès accomplis par ses adhérents sur ses thèmes fondateurs et sur leurs indicateurs clés. Samuel GABORY Président Avec les Membres du Comité d’Administration 190 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) Annexe n°6 : Ebauche de brochure destinée aux professionnels de santé et à leurs patients 191 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) 192 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0) L’ISPB-Faculté de Pharmacie de Lyon et l’Université Claude Bernard Lyon1 n’entendent donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les thèses; ces opinions sont considérées comme propres à leurs auteurs. L’ISPB-Faculté de Pharmacie de Lyon est engagé dans une démarche de lutte contre le plagiat. De ce fait, une sensibilisation des étudiants et encadrants des thèses a été réalisée avec notamment l’incitation à l’utilisation d’une méthode de recherche de similitudes. 193 RIOU (CC BY-NC-ND 2.0)