5
uni à chacun, pour toujours, à travers ce mystère". Et d'enfoncer le clou plus encore
quelques lignes plus loin : "L'homme, tel qu'il est «voulu» par Dieu, «choisi» par Lui de toute
éternité, appelé, destiné à la grâce et à la gloire : voilà ce qu'est «tout» homme, l'homme «le
plus concret», «le plus réel» ; c'est cela, l'homme dans toute la plénitude du mystère dont il
est devenu participant en Jésus-Christ et dont devient participant chacun des quatre milliards
d'hommes vivant sur notre planète, dès l'instant de sa conception près du cœur de sa mère".
Et de poursuivre avec passion : "Il s'agit de tout homme, dans toute la réalité absolument
unique de son être et de son action, de son intelligence et de sa volonté, de sa conscience et
de son cœur. L'homme, dans sa réalité singulière (parce qu'il est une «personne»), a une
histoire personnelle de sa vie, et surtout une histoire personnelle de son âme. (...) L'homme,
dans la pleine vérité de son existence, de son être personnel et en même temps de son être
communautaire et social, cet homme est la première route que l'Église doit parcourir en
accomplissant sa mission : il est la première route et la route fondamentale de l'Église, route
tracée par le Christ lui-même, route qui, de façon immuable, passe par le mystère de
l'Incarnation et de la Rédemption. (...) C'est cet homme-là, dans toute la vérité de sa vie, dans
sa conscience, dans sa continuelle inclination au péché et en même temps dans sa continuelle
aspiration à la vérité, au bien, au beau, à la justice, à l'amour, c'est bien cet homme-là que le
Concile Vatican II avait devant les yeux lorsque, décrivant sa situation dans le monde
contemporain, il allait toujours des éléments extérieurs de cette situation à la vérité
immanente de l'humanité. (...) Cet homme est la route de l'Église, route qui se déploie, d'une
certaine façon, à la base de toutes les routes que l'Église doit emprunter, parce que l'homme
(tout homme sans aucune exception) a été racheté par le Christ, parce que le Christ est en
quelque sorte uni à l'homme, à chaque homme sans aucune exception, même si ce dernier
n'en est pas conscient. (...) Cet homme étant donc la route de l'Église, route de sa vie et de
son expérience quotidiennes, de sa mission et de son labeur, l'Église de notre temps doit être,
de façon toujours universelle, consciente de la situation de l'homme".
Une formidable et prodigieuse équivoque éclate dans l'affirmation conciliaire, et plus
encore dans le prolongement "routier" qu'en fait Jean-Paul II (... carrément une autoroute à
grande vitesse). Ainsi donc, nous dit-il, et avec quel enthousiasme délirant notons-le, tout
homme est uni au Christ depuis l'Incarnation, affirmation parfois, pas tout le temps dans le
texte pontifical remarquons-le soigneusement, amendée par la formule atténuatrice : "en
quelque sorte". Premièrement, il faut tout-de-même bien comprendre une chose : si tout
homme était uni au Christ depuis et par l'Incarnation en toute rigueur théologique des
termes, sans atténuation, ce qui hélas se trouve dans le texte pontifical lui-même à plusieurs
reprises (= "sur cette route où le Christ s'unit à chaque homme", ou encore : "Jésus-Christ
s'est uni à chacun, pour toujours, à travers ce mystère [de l'Incarnation-Rédemption]"), alors,
c'est que tout homme serait lui aussi... le Christ, par communication immédiate et non
médiate des idiomes entre son être individuel et celui du Christ, depuis l'Incarnation ! Ce
n'est vraiment que par la formule atténuatrice "Tout homme est en quelque sorte uni au
Christ depuis l'Incarnation", que celle-ci pourrait, je dis bien et seulement : pourrait, recevoir
un sens orthodoxe.
Éh bien, retenons seulement la formule atténuatrice qui pourrait recevoir un sens
orthodoxe, disais-je. Quel serait-il, ce sens orthodoxe ? Il serait que le Christ, dans l'Acte
même de l'Incarnation, s'est uni mystiquement à chaque et tous les hommes. C'est-à-dire
que, par la grâce du Christ-Dieu et Homme parfait à la fois, tout homme est, depuis et par
l'Incarnation-Rédemption, devenu un christ formel qui a la possibilité, en répondant "oui" au
Don du Christ, par la Foi et par une vie sainte ordonnée au Christ et à son Évangile, d'être un