Questions pour un champion en réanimation 365
2. CHOIX DU CURARE EN REANIMATION
Le choix du curare doit être envisagé non seulement en fonction des propriétés des
curares, mais également en fonction des pathologies propres à chaque patient de
réanimation.
Pendant de nombreuses années, le Bromure de Pancuronium (Pavulon®) a été le curare
le plus largement employé en réanimation. Il s’agit du seul curare non dépolarisant
disponible dont la durée d’action est supérieure à une heure, ce qui permettait son
administration sous forme de bolus répétés. Outre sa durée d’action, l’existence de ses
propriétés discrètement vagolytiques et sympathomimétiques à l’origine d’une
augmentation modérée de la pression artérielle et de la tachycardie était parfois recherchée
chez un patient en état de choc. L’utilisation de Pancuronium est fortement contre-indiquée
en cas d’insuffisance rénale, car son élimination est fortement corrélée à la clairance de
la créatinine. La demi-vie d’élimination du Pancuronium est multipliée par 5 en cas
d’insuffisance rénale par rapport au sujet sain.
Le Vécuronium (Norcuron®), autre curare non dépolarisant stéroïdien, reste un des
curares non dépolarisant les plus employés chez le patient de réanimation. Il présente
pour avantage une durée d’action clinique de durée intermédiaire aux environs de 30
minutes et l’absence d’effets secondaires cardiovasculaires et/ou d’histaminolibération.
Le Vécuronium est métabolisé par le foie en 3 hydroxy-vécuronium dont la puissance est
d’environ 50 % de celle du Vécuronium. Bien que le 3 hydroxy-vécuronium soit éliminé
de façon prédominante par le foie, Ségredo et coll. ont rapporté une accumulation de ce
métabolite chez le patient de réanimation porteur d’une insuffisance rénale. L’accumulation
de ce métabolite pourrait être à l’origine de certains cas de curarisation prolongée après
administration du Vécuronium. Le Pancuronium [4], comme le Vécuronium, ont été rendus
responsables de curarisations prolongées chez des patients ayant reçu simultanément de
fortes doses de corticostéroïdes (patients transplantés, asthme aigu sévère) [5]. Le
mécanisme exact de cette atteinte musculaire reste hypothétique, impliquant une éventuelle
atteinte musculaire directe.
Le rocuronium (Esméron®) est un curare non stéroïdien de durée d’action
intermédiaire. Contrairement au vécuronium, il n’est que très peu métabolisé, de plus ces
métabolites n’ont qu’une très faible activité pharmacologique. Il n’existe pas de
modification de la clairance d’élimination du rocuronium en cas d’insuffisance hépatique.
Une première étude en réanimation n’a retrouvé qu’un allongement modéré de la vitesse
de décurarisation par rapport au sujet sain en cas d’administration de plus de 24 heures
en réanimation. Il existerait un allongement modéré de la demi-vie d’élimination lié
essentiellement à une augmentation du volume apparent de distribution.
L’Atracurium (Tracrium®), fait partie de la famille des benzylisoquinolines. heures
en réanimation? C’est un curare de durée d’action intermédiaire dont l’originalité réside
en un métabolisme par une hydrolyse ester et par la voie de Hofmann, qui a lieu à pH de
7,4 et une température de 37°C. Cette voie d’élimination est indépendante de la fonction
rénale ou hépatique, ce qui rend ce curare particulièrement maniable en cas de défaillance
multiviscérale. Le principale métabolite de l’Atracurium, la laudanosine, éliminée par le
rein, présente des propriétés convulsivantes à fortes doses chez l’animal. Ainsi, le seuil
plasmatique de survenue de convulsions est de 8 mcg.mL-1 chez le chat et de 14 mcg.mL-
1 chez le chien. Les différentes études réalisées chez le patient de réanimation porteur
d’une insuffisance rénale sévère ont retrouvé des concentrations de laudanosine maximales