nature Un phénomène pour le moins impressionnant: l’ouragan Jeanne, vu de l’espace. Des tyrans sans ­pitié sur les mers Difficile, sur notre planète, de trouver un phénomène qui puisse tenir tête à la puissance dévastatrice d’un ouragan. Ces tempêtes à la puissance inimaginable transforment les mers calmes en paysages déchaînés, redéfinissent des tracés entiers de côtes et détruisent même les villes en ne laissant derrière eux que des ruines. devenir de plus en plus puissants jusqu’à atteindre finalement l’intensité d’un ouragan. d’un mouvement d’aspiration qui fera monter toujours plus d’air chaud et humide depuis la surface de la mer. L’échange de chaleur engendre en parallèle une circulation d’air qui commence à tourner autour du centre de la zone de basse pression, à la manière d’un lavabo qui se vide de son eau, mais dans le sens contraire. Ce processus marque le début du fameux et dangereux œil du cyclone. S’il règne un calme plat dans l’œil lui-même, les parois qui l’entourent sont balayées par les vents les plus puissants de la dépression. Dans un ouragan faible de catégorie 1, les vents soufflent tout de même à 120 km/h, alors qu’un ouragan de catégorie 5 nourrit des vents à plus de 250 km/h. Dans des cas extrêmes, la vitesse des vents peut même dépasser les 300 km/h. L’énorme puissance d’un ouragan est due aux très grandes différences de pression qui se stabilisent à l’intérieur de ce système. Dans la zone de convergence intertropicale (ZCIT), les alizés soufflant tout près de la surface se bousculent et poussent des masses d’air supplémentaires à prendre de l’altitude. Cette ascension d’air accélère l’effet d’aspiration du système et renforce aussi bien les vitesses des vents que leur circulation au sein de cet ouragan en pleine croissance. A environ dix kilomètres au-dessus de la surface de l’eau, de puissants vents d’altitude s’assurent que l’air ascendant se disperse parfaitement. Ils complètent l’effet d’aspiration et font ainsi en sorte que le canal d’air reste toujours en mouvement. L’ouragan se balade donc sur la surface de l’eau et ne cesse de gagner en puissance: il aspire continuellement de nouvelles masses d’air à la surface de l’eau et les libère en altitude. La tempête respire… . marina.ch Une force de destruction massive Ralligweg 10 L’ouragan respire Text : Stefanie Pfändler Nous y revoilà: c’est la haute saison des cyclones. En réalité, les ouragans ne sont rien de plus que des zones de basse pression particulièrement prononcée. Mais si l’on prend en compte leur énorme puissance destructrice, on les apparentera plus facilement à de véritables monstres gris. Bien qu’un ouragan ne soit pas un être vivant à proprement parler, il a également besoin d’un apport constant en nourriture et en air pour rester en vie. S’il 66 reçoit ce dont il a besoin, il grandit très rapidement pour devenir un immense monstre sans pitié qui écrase tout ce qui se trouve sur son chemin. Sa puissance est indescriptible, il détruit des bâtiments de plusieurs tonnes comme s’il s’agissait de châteaux de cartes, fait pénétrer les mers loin dans les terres et laisse derrière lui des paysages désolés dont les activités et les reliefs d’autrefois ne sont plus que des souvenirs. Les ouragans sont des cyclones tropicaux qui apparaissent à la fin de l’été et en automne dans l’Atlantique Nord, les Caraïbes et le Pacifique Nord. Au début de chaque année, ils retournent «chez eux» dans le Pacifique Sud. Leurs cousins asiatiques sont appelés «typhons» et leurs pendants de l’Océan Indien et du Pacifique Sud sont les cyclones. Des centaines de systèmes cycloniques naissent chaque année dans les régions tropicales de nos mers. Alors que la majorité d’entre eux disparaissent très rapidement, près de 40% à 50% de ces irrégularités atmosphériques réussissent chaque année à se stabiliser pour marina.ch septembre 11 La naissance d’un ouragan suit toujours le même modèle: l’air marin humide situé audessus de l’équateur se dilate à cause de la chaleur et commence à monter. Dès qu’il atteint une masse d’air plus froide, les grandes quantités de vapeur d’eau qu’il contient se condensent et des nuages se forment. Ce processus libère la chaleur emmagasinée sous forme d’énergie latente dans la vapeur d’eau. Cette chaleur réchauffe encore plus l’air ambiant qui continue à monter. Une zone de basse pression se forme alors sur le lieu d’origine de ce phénomène: celle-ci sera à l’origine septembre 11 marina.ch Si tous les systèmes cycloniques ne se transforment pas en ouragans, c’est tout simplement parce que les conditions d’une telle stabilisation doivent être parfaites: les vents doivent souffler à la bonne vitesse à la surface et en altitude, l’eau doit être suffisamment chaude pour réchauffer à la bonne température l’air qui se trouve à sa surface (on n’a jamais entendu parler d’un ouragan en Alaska ou au Canada) et le gradient de pression de la zone de basse pression doit être suffisamment élevé. Si l’un de ces éléments manque, 3012 Berne Tél. 031 301 00 31 [email protected] www.marina-online.ch Service des abonnements: Tél. 031 300 62 56 nature Les yeux dans les yeux avec l’ouragan Katrina Centre de contrôle de la PHOTO: US NOAA NOAA: des météorologues observent en permanence les irrégularités atmosphériques, et donnent l’alerte en cas de tempêtes. le système se désagrège très rapidement. C’est d’ailleurs ce qui se passe dans la plupart des cas… Mais lorsque le hasard veut que toutes les conditions soient réunies pendant un bref laps de temps, le système se transforme soudain en un ouragan à la dynamique autonome. Là où les ouragans passent, seules quelques ruines subsistent. Autrefois, le grand danger qu’ils représentaient pour les êtres humains était que ces derniers confondaient son œil avec la fin de la tempête. Ainsi, ils quittaient leurs abris pendant le calme plat qui règne dans l’œil et se faisaient surprendre par la deuxième paroi de l’ouragan. Aujourd’hui, les avis de tempête sont fiables et la population est bien informée. Les météorologues surveillent attentivement les systèmes cycloniques potentiels et les satellites météorologiques ne cessent de récolter des informations sur les anomalies atmosphériques et l’activité des vents et des nuages. Malgré cela et à l’instar de Katrina, certains ouragans nous rappellent régulièrement qu’en dépit de ces précautions, nous ne pouvons pas vraiment lutter contre eux. Les destructions provoquées par ces phénomènes ont plusieurs facettes. En règle générale, tout commence par de violentes précipitations balayant la surface de la terre ou de la mer. Il arrive souvent que l’on doive déjà faire face à des inondations à ce stade. Depuis, des vents puissants viennent s’ajouter aux importantes masses d’eau. Ceux-ci peuvent très facilement renverser des voitures ou des bus, faire tomber des murs et voir déraciner des arbres. Ces vents sont souvent précédés d’un véritable mur d’eau qui, en particulier lorsqu’il est accompagné de marées, peut éroder les côtes et causer d’importants dégâts aux zones côtières. La force destructrice d’un ouragan ne dépend pas seulement de la puissance de la tempête, mais aussi de la manière dont il arrive sur la terre ferme. Dans l’hémisphère nord, les zones de basse pression circulent dans le sens contraire des aiguilles d’une montre: ainsi, si l’ouragan touche terre avec son côté gauche, la vitesse des vents vient réduire son propre mouvement et il faiblit. Mais s’il touche les côtes avec son côté droit, ses vents sont renforcés par son propre mouvement. Mais certains ouragans grondent parfois seulement non loin des plages et ne causent que des inondations. Il n’en va de même lorsqu’ils foncent à l’intérieur des terres. Cela étant, il y a tout de même deux bonnes nouvelles. La première: l’ouragan est un «monstre aquatique». Il ne pourra en aucun cas vivre très longtemps sur la terre ferme. Une fois sur le continent, il est en effet privé de l’air humide de la mer et le terrain accidenté ralentit les vents qui le maintiennent en vie. La deuxième bonne nouvelle: aucun ouragan n’est éternel, même sur l’eau. Son cycle de vie est limité et il perd très rapidement de la puissance, par exemple lorsque la tempête atteint des latitudes froides, lorsque les vents ralentissent ou encore lorsque le gradient de pression diminue. L’ouragan faiblit alors rapidement et se transforme en un petit cyclone extratropical sans danger qui disparaît généralement après quelques jours. Mais même lorsqu’il n’y a plus de danger immédiat, les destructions provoquées par un Flash-Info: L’Ouragan Irene Situation le 28 août, à 17 heures. Neuf personnes ont déjà trouvé la mort et quatre millions de ménages sont privés d’électricité sur la côte est des Etats-Unis. Avec ses 1000 kilo­ mètres de diamètre, Irène concerne un tiers de cette côte, où vivent 60 millions d’âmes. A New York, les premières rues sont inondées. Le Centre national des ouragans (NHC) Des villes entières rasées, comme si elles étaient en carton: les traces de ouragan restent souvent perceptibles pendant des années. Des cas comme l’ouragan Katrina qui avait atteint la côte sud des EtatsUnis et qui est considéré comme l’une des pires catastrophes naturelles de l’histoire du pays, montrent combien de temps les conséquences peuvent persister. Des villes et des paysages entiers sont détruits sur le long terme, l’approvisionnement en énergie n’est plus assuré, sans parler des problèmes environnementaux. Aujourd’hui, une grande partie des habitants de la ville n’ont toujours pas pu retourner dans leurs maisons. Si Katarina a disparu après une semaine, son passage est encore bien visible même cinq ans après. avait rétrogradé Irène de la catégorie 2 à la catégorie 1, mais ce sont surtout la taille et la durée qui sont importantes, et pas seulement la vitesse du vent, qui est encore de 100 km/h actuellement. L’ouragan progresse en direction du nord car un front situé à l’ouest le dévie, alors que les eaux de l’Atlantique sont toujours à 27 degrés jusqu’à New York. Suffisamment d’énergie pour un ouragan. l’ouragan Katrina. 68 marina.ch septembre 11 septembre 11 marina.ch 69