La construction psychologique peut être aussi une variable «intermédiaire» théorique au
sens de Tolman (1938), les déterminants environnementaux, biologiques déterminant les
constructions psychologiques (lois de type F-2), les constructions psychologiques influençant les
comportements (lois de type F-3). MacCorquodale & Meehl (1948), Cronbach & Meehl (1955)
font de cette construction psychologique une alternative à la variable intermédiaire des empiristes
logiques en rendant la conceptualisation prioritaire. Ne pouvant être définies sans invoquer une
théorie, les constructions théoriques font bien sûr référence à des variables empiriques mais
contrairement à ces dernières, elles peuvent être incomplètement explicitées. Cette conception
apparait ainsi plus libérale que celle de l'empiriste logique qui distinguerait - mais ne s'agit-il pas
d'une pseudo-distinction? - la construction théorique de la construction dite hypothétique parce que
renvoyant à des phénomènes non totalement réductibles aux phénomènes observés (Roskam,
1991). Pour reprendre l'exemple précédent, lorsqu'il est interprèté comme un score d'impulsivité
dans le cadre de la théorie neuropsychologique de Barratt, le score à un test comme le BIS-10
devient une construction théorique définie implicitement par le réseau nomologique l'incluant.
L'interprètation de ce score permet de générer de nouvelles prédictions qui donnent à la
construction théorique un certain «contenu additionnel» (Reuchlin, 1969, 1990).
L'opérationnalisme multiple - La construction théorique ne peut être seulement définie par
l'opération. Des arguments à la fois théoriques (l'opération de mesure met en jeu des processus qui
doivent être spécifiés par rapport à de nombreux paramètres théoriques) et pratiques (on valide nos
mesures à l'aide d'autres mesures invalides) s'y opposent. Pour éviter l'assimilation de la notion
opérationnalisée à la construction théorique, Campbell (1960) a recommandé il y a déjà longtemps
d'opter pour une stratégie d'opérationnisme multiple dans laquelle la construction théorique est le
résumé inductif des relations entre variables observées (le facteur commun). «La force de la
construction théorique, écrit ainsi Campbell, repose sur la convergence des faiblesses de chacun
des dispositifs de mesure». Utilisable dans la recherche de validation nomologique cette stratégie
constructiviste (Messick, 1981) permet d'étudier la validité d'une variable observée en tant que
mesure de la construction théorique. Rappelons que Campbell & Fiske (1959) ont proposé une
technique utilisable dans la recherche de validation nomologique, l'analyse des matrices multitraits-
multiméthodes, qui consiste à étudier simultanément - principalement à l'aide d'analyses factorielles
confirmatoires - la convergence de dispositifs différents supposés mesurer une même construction
théorique (la validité de trait) par rapport à la divergence entre contenus empiriques sous hypothèse
de constructions théoriques distinctes (Bacher, 1986; Schmitt & Stults, 1986). Sous certaines
conditions autorisant ces comparaisons, il est ainsi possible de déterminer par exemple si un
dispositif est mieux adapté qu'un autre pour mesurer une construction théorique donnée.
Existence (et réalité) de la construction théorique - Le statut «existentiel» de ces
constructions théoriques varie selon que le psychologue considère que le monde existe