Deuxième conférence nationale médicale inter-fédérale CNOSF
Paris, les 25 et 26 novembre 2005 41
3ème Table ronde
Intervenants
Mr François CARRE : Professeur des Universités, praticien hospitalier, Service exploration
fonctionnelle-cardiologie et médecine du sport-CHU Pontchaillou de Rennes
« Pourquoi un bilan cardiovasculaire chez le sportif ? »
Mr Richard BRION : Médecin Général-Hôpital d’instruction des armées Desgenettes de Lyon
« Les pièges de l’électrocardiogramme chez le sportif »
Mr Dany-Michel MARCADET : Docteur en cardiologie du sport-Hôpital Américain-Clinique
Bizet de Paris
« L’apport de l’épreuve d’effort cardiologique chez le sportif »
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Le suivi cardiovasculaire
1ère intervention
François CARRE : Pourquoi un bilan cardiovasculaire chez le sportif ?
Après avoir rappelé l’importance du bilan cardiovasculaire chez le sportif, il conviendra de
s’interroger sur le contenu du bilan en lui-même.
Les raisons du bilan cardiovasculaire
Trois raisons justifient le bilan cardiovasculaire chez le sportif.
Premièrement, l’exercice physique est une contrainte majeure pour le système cardiovasculaire : la
fréquence cardiaque est multipliée par trois, le débit cardiaque par cinq et la pression artérielle
systolique par deux. Autrement dit, la quantité d’oxygène demandée par le myocarde est multipliée
par dix pendant l’effort. En outre, l’exercice physique entraîne une augmentation du tonus
sympathique, des catécholamines et du potassium ainsi qu’une acidose et une déshydratation.
Ainsi, le risque de l’exercice est confirmé par le fait que le risque d’infarctus du myocarde lors d’un
exercice physique intense est multiplié par 107 chez le sédentaire. Il est cependant très nettement
diminué chez le sujet entraîné ce qui confirme les effets bénéfiques de la pratique d’une activité
physique modérée et régulière.
Deuxièmement, la pathologie cardiovasculaire est la première cause de contre-indication à la
pratique sportive. Une étude italienne de Corrado en 1998 a montré qu’elle intervient dans 58,7 %
des cas.
Troisièmement, 90 % des morts subites ont une cause cardiovasculaire, généralement une arythmie
cardiaque. Il faut noter que toute mort subite révèle une pathologie cardiaque ignorée. Le rôle du
médecin est donc de détecter le foyer arythmogène qui conduit à la mort en cas de modification de
l’environnement.
Le bilan cardiovasculaire
Cinq types d’examens peuvent être mis en œuvre : l’interrogatoire, l’examen physique,
l’électrocardiogramme 12 dérivations, l’échocardiogramme et l’épreuve d‘effort. Le choix doit se
faire en fonction de leur intérêt, de la faisabilité, du nombre de faux positifs, du rapport
coût/efficacité, des implications légales et de la taille de la population.
Aux États-Unis, les autorités recommandent un examen tous les deux ans par un praticien formé.
L’examen consiste en un interrogatoire aidé d’un questionnaire et un examen physique. L’épreuve
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d’effort est ciblée et concerne les hommes de plus de quarante ans et les femmes de plus de
cinquante ans.
En Italie, la loi impose que toute personne demandant une licence doit subir un examen annuel par
un médecin du sport. L’examen consiste en un interrogatoire, un examen physique, un
électrocardiogramme de repos et une épreuve d’effort sous maximale (Montoye test sur tabouret).
Sur 33 735 sujets, 33 114 ont été déclarés aptes, soit 98 %.
Ces études ont montré que la cardiomyopathie hypertrophique intervenait dans 26 % des cas de
mort subite aux États-Unis et dans 2 % des cas en Italie. Cette situation montre que le protocole
italien permet de détecter la cardiomyopathie hypertrophique en amont.
En France, la loi distingue les sportifs de haut niveau de performance, les sportifs de haut niveau
d’entraînement et les sportifs de loisir. Les premiers doivent bénéficier d’un suivi médical défini
par arrêté ministériel ou par un règlement spécifique à la ligue professionnelle concernée. Les
autres ne doivent faire qu’une visite annuelle de non-contre-indication, dont le contenu est libre.
Les recommandations européennes
En mars 2005, le groupe européen a proposé un bilan de non-contre-indication à la compétition
sportive pour les compétiteurs de 12 à 35 ans. Il comprend un bilan médical, une étude des
antécédents familiaux et personnels, une étude des signes fonctionnels, un examen physique
(notamment l’examen de la symétrie entre les pouls radiaux et fémoraux) et un
électrocardiogramme de repos 12 dérivations à répéter tous les deux ans. En cas d’anomalie, des
examens complémentaires sont prescrits.
Compétiteurs
entre 12 et 35 ans
Bilan médical
Antécédents familiaux et personnels (tableau 1)
Signes fonctionnels (tableau 2)
Examen physique (tableau 3)
ECG de repos 12 dérivations à répéter tous les 2 ans
Normal
Pas de contre-indication
à la compétition
Anormal
Examens complémentaires ciblés
Cœur « sain »
Pathologie cardiovasculaire
Attitude adaptée
aux recommandations
Corrado D. et al Eur Heart J 2005; 26 : 426-430
Bilan de non contre-indication à la compétition sportive
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L’électrocardiogramme est important, car il permet de détecter de nombreuses anomalies pour un
coût relativement faible. Il faut cependant prendre en compte la particularité du cœur d’athlète. En
outre, le médecin doit être suffisamment formé à la lecture de l’ECG.
Concernant l’épreuve d’effort, une étude a montré qu’il fallait explorer 200 000 jeunes pour
détecter 1 000 pathologies et sauver une vie. En revanche, explorer 1 000 sujets de plus de 35 ans
suffit pour repérer 100 pathologies et sauver une vie. Il faut donc cibler les épreuves d’effort. Il faut
noter que ces épreuves qui doivent être réellement maximales permettent de détecter d’autres
risques (capacité physique, arythmie), mais que les faux positifs sont nombreux chez le sportif
(10 %) et que ces épreuves peuvent être faussement rassurantes. En effet, une épreuve d‘effort n’est
jamais une « assurance tout risque ». Cet examen détecte mal le risque d’accident coronaire aigu.
Le praticien doit donc toujours insister pour que le sportif soit à l’écoute des ses symptômes.
Enfin, l’échocardiogramme de repos est nécessaire uniquement à visée diagnostic et non pour
suivre l’entraînement. Il peut être fait en cours d’effort lorsque l’indication est posée. Cet examen
est très fiable, cependant chez le sportif le diagnostic différentiel entre « cœur d’athlète » et
pathologie n’est pas toujours simple ; Une bonne expérience de l’échographiste dans ce domaine
est donc nécessaire.
En conclusion, la survenue d’un accident cardiovasculaire sur le terrain renvoie à une prévention
insuffisante, puisqu’elle n’a pas permis de repérer le problème cardiaque. Le bilan cardiovasculaire
est donc important dans le bilan du sportif. Il repose surtout sur l’interrogatoire, sur l’examen
physique et sur l’ECG de repos. Les autres examens doivent être ciblés. Il faut parfois prendre des
avis collégiaux. Le doute est inacceptable, mais le risque zéro est impossible
2ème intervention
Richard BRION : Les pièges de l’électrocardiogramme chez le sportif
Trois éléments essentiels doivent être retenus :
- l’ECG des sportifs est le plus souvent normal (5 à 15 % de tracés avec atypies),
- l’entraînement intense peut modifier l’ECG et parfois simuler des aspects pathologiques,
- l’ECG est un excellent moyen de dépistage des cardiopathies de l’adulte jeune (60 % des
pathologies entraînant une mort subite chez l’adulte jeune peuvent modifier l’ECG).
Les limites du « normal »
La détection d’une atypie de l’ECG chez un sportif doit conduire à se poser cette question : l’atypie
peut-elle être attribuée d’emblée à l’entraînement ? Si c’est le cas, il n’y a pas d’obligation de
contrôles complémentaires. Sinon, l’atypie doit être considérée comme pathologique jusqu’à la
preuve du contraire.
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En effet l’ECG normal d’un sportif peut comporter des particularités pouvant d’emblée être
attribuées à l’entraînement : une fréquence cardiaque basse (parfois inférieure à 50 battements par
minute) mais qui s’adapte à l’effort, un aspect de bloc de branche droit incomplet et un aspect dit
de « repolarisation précoce » (sus-décalage du point J avec ST ascendant), qui s’atténue à l’effort.
La repolarisation précoce des sportifs peut parfois prendre des aspects préoccupants, en particulier
chez les sujets d’origine africaine.
R. Brion / Hôpital Desgenettes Lyon
1) Quel ECG considérer comme normal chez un sportif ?
FC = 50 bpm
BAV 1 ou 2 (LW)
repolarisation précoce
BBDI en V1
Sadapte
àleffort
Disparaît
àleffort
Satténue
àleffort
Aspects suspects
La repolarisation
Les ondes T négatives en dehors de D3, VR et V1 et les sous-décalages de ST supérieurs à un
millimètre sont suspects. Les anomalies de repolarisation précordiales droites feront suspecter
l’existence d’une dysplasie arythmogène du VD. Les anomalies diffuses de la repolarisation ou
localisées en zone précordiale gauche feront évoquer une cardiomyopathie et en particulier une
cardiomyopathie hypertrophique (CMH).
R. Brion / Hôpital Desgenettes Lyon
Anomalies de repolarisation en précordiales droites
Cycliste de haut niveau (tour de France)
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