INTRODUCTION
L
a notion de représentation constitue sans
doute une des notions les plus polysémiques
en Sciences Humaines et sociales et donc
une des plus polémiques. Mais elle est surtout une des
plus riche, complexe et donc souvent risquée à exposer
de manière générale dans un seul article. Il n’y a qu’à
recenser le nombre de volumineux ouvrages sous le
titre des représentations, qu’elles soient sociales, cogni-
tives ou encore spatiales.
En psychologie, l’intérêt épistémologique pour les
représentations, volontairement privée de tout qualifi-
catif ici, apparaît face aux limites explicatives des
recherches uniquement axées sur les comportements.
Néanmoins, selon les champs où elle est étudiée, on
peut compter de nombreuses acceptions: représenta-
tions cognitives, collectives, sociales, spatiales. Cha-
cune renvoie à des courants théoriques différents, à l’é-
tude de processus psychologiques spécifiques et donc
à des paradigmes méthodologiques distincts. Sans
entrer dans le détail de ces systèmes, cet article se
situe modestement dans l’exposé synthétique des
acceptions les plus pertinentes quant aux questionne-
ments souvent posés par la psychologie environne-
mentale.
Cet exposé sera donc aussi l’occasion de manipuler
la notion de représentation avec prudence en confron-
tant des systèmes théoriques différents et qui ne ren-
voient pas au même niveau de questions. Ce qui ne
signifie pas que la notion de représentation ne s’intègre
pas dans un système à plusieurs dimensions. Où les
dimensions individuelles tout comme les dimensions
sociales peuvent être étudiées aussi bien conjointe-
ment que séparément, tout dépend le type de question-
nement que nous posons.
Cette présentation sera construite sur la base de
deux acceptions phares en Psychologie environnemen-
tale, pour l’une issue des théories de la psychologie
sociale et pour l’autre issue en partie de la psychologie
cognitive et d’autres disciplines comme la géographie,
l’urbanisme et répondant aux questions des rapports
individus-environnement, physique et social. Seront
donc exposées les notions de représentation sociale et
de cognition spatiale élargie à celle de cognition envi-
ronnementale qui permet de dépasser les dimensions
uniquement individuelles. L’exposé de ces notions sup-
pose alors l’introduction d’approches privilégiant à
chaque fois une des dimensions du système individu-
environnement.
La notion de représentation sociale sera rapportée
à partir d’une approche éclairant prioritairement le
monde social, où le rapport à l’environnement peut être
entendu principalement à partir de l’espace social.
Ensuite, la notion de cognition spatiale sera abordée à
partir d’approches principalement axées sur le monde
individuel. L’environnement est ici l’espace physique et
d’action. Enfin, la notion de cognition environnementale
que l’on pourrait situer entre ces deux premières, sup-
pose des approches réunissant monde social et monde
individuel.
Originellement, la notion de représentation trouve
ses sources à la fois dans la transdisciplinarité (notam-
ment les travaux de Durkheim, 1898; Halbwachs,
1925, etc.) et dans la recherche de dépassement du
réductionnisme de l’activité mentale provoquée par les
premières recherches behavioristes. Elles n’impli-
quaient au départ que la recherche des facteurs (sti-
mulus) déterminant des comportements sans compré-
hension de l’activité mentale des individus. Activité, qui
comme nous le verrons, joue un rôle fondamental dans
les conduites sociales et comportements individuels.
La première notion engageant les travaux behavio-
ristes (donnant naissance au courant néo-behavioriste)
dans la compréhension de l’activité mentale et la
recherche de facteurs intermédiaires entre le stimulus
et le comportement est l’attitude. Comprise comme une
prédisposition à l’action, cette notion a donné lieu aux
premières constructions d’outils d’évaluation (échelles
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1- Texte issu d’un séminaire organisé le 13 mars 2006 à
Rennes par l’UMR ESO sur « la notion de représentation »
De la représentation sociale à la cognition spatiale et environnementale:
La notion de « représentation » en psychologie sociale
et environnementale1
Sandrine Depeau
RÉSO - UNIVERSITÉ RENNES II
ESO - UMR 6590 CNRS
d’attitudes permettant de prédire des niveaux de com-
portements). C’est par ailleurs une notion à partir de
laquelle vont se développer de nombreux travaux sur
les représentations sociales. Notamment en ce qui
concerne les travaux sur la structure de la pensée
sociale, comme nous le montrerons au cours de notre
développement. En outre, le développement des
sciences cognitives à partir des années soixante-dix, et
surtout quatre-vingt, va permettre de donner une cer-
taine importance aux représentations (entendu dans
toutes les acceptions) et notamment aux traitements de
l’information qui permettent de parler de reconstruction
de la réalité. Cependant, parce que très influencée par
le développement de l’intelligence artificielle, certains
psychologues sociaux jugent ces théories cognitivistes
trop réductionnistes, au point de ne concevoir celles-ci
que comme des théories du cerveau. C’est le cas de
Beauvois (1997) qui considère le cognitivisme comme
«un paradigme asocial » faisant peu cas de l’influence
des rapports sociaux. Cette critique nous permet d’in-
troduire la représentation sociale dans son champ théo-
rique le plus fécond, à savoir la cognition sociale ou l’é-
tude, entre autres, des processus de construction et
communication de la pensée sociale.
1. LA NOTION DE REPRÉSENTATION SOCIALE
En Psychologie sociale, les développements théo-
riques et méthodologiques sur la représentation partent
des travaux de Moscovici (1961; 1976) sur l’image de la
psychanalyse. C’est en effet à partir de cette étude que
Moscovici énonce les processus en jeu non seulement
dans la formation (objectivation et ancrage) de représen-
tation mais aussi dans son fonctionnement et ses condi-
tions de production.
Pour définir les représentations sociales, de nomb-
reux auteurs-clé pourraient être cités comme Jodelet,
Abric, Rouquette, Doise, Flament, etc. Restons-en,
pour commencer à son fondateur, en citant Moscovici.
Il définit la notion de représentation sociale comme
«des ensembles dynamiques, des théories ou de
sciences collectives destinées à l’interprétation et au
façonnement du réel. Elles déterminent des champs de
communications possibles, des valeurs, des idées pré-
sentes dans les visions partagées par les groupes et
règlent par la suite des conduites désirables ou
admises ». (1976, p. 48) Cette définition permet de
8De la représentation sociale à la cognition spatiale et environnementale
La notion de « représentation » en psychologie sociale
Travaux et documents
concentrer l’ensemble des aspects et des processus en
jeu. Les représentations sociales s’apparentent donc à
des formes de théories « naïves » socialement cons-
truites et partagées en vue de reconstruire, simplifier ou
expliquer une réalité et se l’approprier (Jodelet, 1995),
ou encore de rationaliser des pratiques. Pour Jodelet
(1989) « il s’agit d’une forme de connaissance sociale-
ment élaborée et partagée, ayant une visée pratique et
concourant à la construction d’une réalité commune à
un ensemble social ». (pp. 36-37). Pour résumer, nous
pourrions dire alors que les représentations sociales
sont des grilles de lecture de la réalité socialement
construites. Par conséquent, elles supposent:
• la présence de groupes différents qui élaborent
cette grille à leur manière en fonction de leurs intérêts et
positions dans un groupe donné.
• l’organisation d’opinions socialement construites
relativement à un objet qui résulte d’un ensemble de
communications sociales qui permettent de maîtriser
l’environnement et de se l’approprier en fonction d’élé-
ments symboliques propres à son ou ses groupes d’ap-
partenance.
• la « production originale, un remodelage complet de
la réalité, une réorganisation de type cognitif ou les
connotations idéologiques personnelles (attitudes, opi-
nions) et collectives (valeurs, normes) prennent une
place essentielle aussi bien dans le produit que dans les
mécanismes même de sa constitution » (Abric, p. 67- 68,
1987).
On l’aura remarqué, les représentations constituent
le point central des rapports entre groupes sociaux. L’é-
tude des représentations sociales s’attache donc plus à
comprendre ce qui distingue ces groupes que ce qui les
réunit sans pour autant laisser de côté ce qui fait
consensus au sein d’un groupe. Comme le remarquent
Rouquette et Rateau (1998), c’est sur cet aspect de dif-
férenciation des groupes sociaux que nous pouvons dis-
tinguer alors les représentations collectives des repré-
sentations sociales. Une représentation collective est
commune à tout le genre humain tandis que la repré-
sentation sociale est commune à un groupe social.
La plupart du temps, la représentation est donc com-
prise et travaillée sur la base de comparaisons (objet de
représentation, groupes sociaux, contextes…). Flament
et Rouquette (2003) précisent d’ailleurs la nécessité des
comparaisons dans le cadre de recherches sur le terrain.
«Seule en effet cette comparaison est à même de mettre
en évidence les spécificités sociales relatives, soit qu’il
s’agisse d’une même population prise à deux moments
de son évolution, soit qu’il s’agisse de deux populations
distinctes considérées à un même moment » (Flament &
Rouquette, 2003, p. 13). C’est le cas par exemple dans
l’étude de Moscovici sur la Psychanalyse, où l’auteur dis-
tingue des groupes aux idéologies différentes (les com-
munistes versus les catholiques). Idéologies qui ne sont
donc pas sans influences sur la représentation de la psy-
chanalyse et les conduites qu’elles engendrent: les com-
munistes concevant la psychanalyse comme un outil
d’impérialisme tandis que les catholiques l’interprètent
comme une justification de la débauche.
Un autre exemple connu porte sur la représentation
de la chasse et l’influence de nouvelles pratiques de
chasse sur cette représentation (Guimelli, 1989). La pré-
sence de groupes idéologiques différenciés (non-chas-
seurs et écologistes versus chasseurs) face à la question
des pratiques de chasse reste un éclairage intéressant.
La comparaison est pertinente pour comprendre les
transformations de la représentation de la chasse. Elle
l’est notamment pour décrire une ressemblance de
schèmes (le schème écologique) entre des groupes dits
opposés, simplement par l’activation rendue possible par
des pratiques nouvelles de chasse provoquées par l’ir-
ruption du virus de la myxomatose. Autrement dit « l’in-
tensification de pratiques nouvelles est venue activer des
schèmes écologiques dormants () les schèmes relatifs
aux techniques de chasse et les schèmes écologiques
fusionner en un seul, celui de la gestion du territoire de
chasse » (Guimelli, 1989, p. 136).
Reconnaître comme objet d’étude une représenta-
tion sociale signifie donc de comprendre comment les
sujets et groupes sociaux se positionnent dans le milieu
et le contexte social, comment les informations extraites
des expériences subjectives des individus dépendent de
leur système idéologique, en résumé de leur position
sociale et de leur appartenance culturelle. La représen-
tation sociale permet alors de comprendre des pratiques
et leurs enjeux sociaux.
1-1. La question de l’objet de représentation
sociale
L’étude des représentations sociales suppose un
regard ternaire impliquant la trilogie Ego/Alter/objet.
Dans ce cadre, la question la plus souvent posée
consiste à savoir si tel objet est objet de représentation
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De la représentation sociale à la cognition spatiale et environnementale
La notion de « représentation » en psychologie sociale
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sociale. Question qui est loin de paraître mineure. Ainsi
Flament et Rouquette (2003) posent les pré-requis de
l’existence d’une représentation sociale en rappelant
que son « lien avec la société est fondamental ».
Le premier principe consiste en « la saillance socio-
cognitive » de l’objet de représentation. Ainsi, l’objet de
représentation doit s’apparenter à un concept, être suf-
fisamment abstrait et générique. Rapportons, pour
mieux comprendre, les exemples caricaturaux mais
explicites des auteurs (p. 32) « Il n’y a pas représenta-
tion sociale du dentifrice mais une représentation de
l’hygiène, pas de représentation sociale de la licence
mais une représentation sociale des études supé-
rieures », etc. L’objet de la représentation sociale doit
alors concerner la classe d’objets et non un objet parti-
culier de cette classe. Ce principe n’est pas toujours évi-
dent à observer dès lors qu’on s’intéresse à un pro-
blème spécifique semblant concentrer à lui seul un
ensemble de spécificités et d’enjeux sociaux.
Cette saillance socio-cognitive renvoie aussi à
l’aspect social de l’objet et à sa circulation dans les
communications inter-personnelles et inter-groupes et à
son exposition médiatique qui implique alors des prises
de positions et l’installation de polémiques. Lesquelles
amènent logiquement au second principe qui concerne
l’élaboration des pratiques.
Pour assurer l’existence d’une représentation
sociale, doit se développer un certain nombre de « pra-
tiques communes » que Flament et Rouquette (2003)
définissent à partir de quatre orientations. Les pratiques
peuvent s’apparenter à:
- des « passages à l’acte » comme simple exposi-
tion à un événement ou encore comme simple utilisa-
tion;
- des « pratiques récurrentes » supposant un niveau
d’expérience par rapport à l’objet en question, ce qui
implique alors un niveau de connaissances par rapport
à l’objet et une durée de vécu;
- « des façons de faire » en lien avec des positions
sociales et des rapports entre les groupes impliqués;
- des stratégies ou « calculs » qui supposent de
comprendre les buts et intentions des individus par rap-
port à la mise en place de ces pratiques.
Pour savoir si un objet peut être socialement valide
en tant qu’objet de représentation, il doit donc être
source de divergences et de questionnements quant à
l’idée du groupe social; l’identité du groupe dépend en
effet de l’objet de représentation sociale (Moliner,
2001). Il peut aussi donner naissance à un nouveau
groupe social selon les implications qu’il suppose. Il est
donc source de cohésion sociale et en même temps
possède de forts enjeux identitaires.
1-2. La place des représentations sociales dans la
pensée sociale
Pour mieux comprendre les fonctions de la repré-
sentation sociale et son inscription dans la pensée
sociale, il semble intéressant et nécessaire pour clarifier
le concept de rappeler à partir des réflexions de Rou-
quette (1998; 2003) l’articulation de la représentation
sociale avec les autres instances fondamentales de la
pensée sociale. Ce qui permettra par ailleurs de clarifier
ces autres concepts.
Les représentations sociales s’inscrivent donc dans
la pensée sociale structurée en différents niveaux d’in-
tégration allant du stade le plus sociétal (idéologie) au
stade le plus individuel (pratiques): niveau 1: Idéologie;
niveau 2: Représentation sociale; niveau 3: Attitudes, il
s’agit d’une prise de position sur un ensemble théma-
tique. L’attitude correspond à la partie la plus primitive
des représentations; niveau 4: Opinions (il s’agit d’un
point de vue porté sur une partie d’un ensemble théma-
tique à un moment donné); niveau 5: Pratiques et
comportements.
Cette organisation de la pensée sociale permet de
comprendre à la fois les sources d’influence de la repré-
sentation sociale et comment elles peuvent évoluer et
se transformer dans des contextes de changements de
comportements et de pratiques. En admettant les rela-
tions entre pratiques et représentations sociales, cette
structuration permet de comprendre à la fois la variabi-
lité des niveaux et les conditions requises pour qu’une
représentation sociale soit affectée par des transforma-
tions de pratiques. Ainsi, Rouquette précise que les opi-
nions sont très contingentes du contexte spatial et tem-
porel de l’individu. Les opinions changent beaucoup.
(Ce qui justifie sans doute les nombreux sondages d’o-
pinions en politique! sondages qui ne présagent en
rien, bien au contraire, le résultat des élections). Quant
aux attitudes, elles conservent une certaine stabilité
permettant d’assurer un socle aux représentations
sociales. Prenons, un exemple pour être plus clair. On
peut s’intéresser à la représentation sociale de l’éduca-
tion. Cette dernière va dépendre des systèmes idéolo-
10 De la représentation sociale à la cognition spatiale et environnementale
La notion de « représentation » en psychologie sociale
Travaux et documents
giques en amont. Dans ce cas, imaginons que l’on com-
pare la représentation sociale de l’éducation dans des
groupes localisés dans différents pays de l’Europe. Il
est fort à parier que la représentation sociale variera
selon que l’idéologie est plutôt à tendance individualiste
ou à tendance plus sociale. Ensuite, cette représenta-
tion de l’éducation orientera toute une série d’attitudes
différentes à l’égard du rôle de l’école, du rôle de la
famille, du rôle de la société. De là, si nous prenons les
attitudes à l’égard de l’école, on pourra sans doute
constater que les opinions à l’égard de l’autorité des
enseignants, ou encore les opinions concernant l’intérêt
des sanctions physiques (être pour ou contre la fessée
par exemple), l’opinion au sujet du renforcement des
structures d’accueil en collectivité divergeront selon les
cultures et idéologies politiques et sans doute reli-
gieuses. Nous pourrions aussi prendre pour exemple, la
représentation de la ville sous différents modèles d’ur-
banisme du passé (modèles utopistes) fortement
influencés par les idéologies socialistes (Fourrier,
Godin, etc.) et décliner ce modèle hiérarchique en fonc-
tion des mesures et choix pris dans différents domaines
de la vie publique, qu’il s’agisse du travail des enfants,
des mesures de sécurité et d’hygiène…
Quels que soient les exemples cités, ce qu’il est
important de comprendre c’est qu’un changement d’o-
pinions (qui constitue le niveau le plus variable du sys-
tème) ne modifie pas forcément les attitudes qui lui sont
afférentes et par conséquent ont peu de raisons de
modifier une représentation sociale. En résumé, ces dif-
férents niveaux possèdent des degrés de résistance
aux changements fort différents, le niveau idéologique
étant le plus robuste et le plus constant, au point que
comme le soulignent Flament et Rouquette (2003)
« seuls les historiens, sans doute, peuvent en déceler
les inflexions et les éventuelles mutations () Il n’est pas
question de voir (et sans doute encore moins de provo-
quer) un changement d’idéologie en l’espace de
quelques mois ou quelques années. Il faut pour le
moins des générations, et un long travail de modifica-
tion de l’environnement, des rapports sociaux et pra-
tiques de toute nature » (Flament et Rouquette, 2003,
p. 18).
On comprend d’emblée que la transformation pro-
fonde de représentation sociale fait partie d’un pro-
cessus long. Néanmoins, comme le souligne Guimelli
(1989) en travaillant sur l’effet de pratiques nouvelles de
chasse sur la représentation de la chasse et de la
nature, certaines situations le plus souvent acciden-
telles ou menaçantes pour la survie de l’homme ou
d’une espèce (comme la prolifération de la myxoma-
tose dans le cadre de la recherche sur la chasse) peu-
vent provoquer des changements drastiques de com-
portements et de pratiques, comme la question de la
gestion du territoire qui devient un thème central dans
la représentation de la chasse et de la nature par les
chasseurs.
Si la représentation se transforme difficilement, cela
ne signifie pas en revanche qu’elle ne varie pas et ne
subit aucune modification. C’est bien ce que permet de
comprendre l’approche structurale des représentations
sociales.
1-3. La structure des représentations sociales
Dans le cadre des recherches sur la représentation
sociale, l’approche structurale est une approche très
courante qui consiste à décrire et comprendre l’organi-
sation des éléments contenus dans la représentation.
Cette approche s’avère très utile dès lors que l’on s’in-
téresse à l’évolution des représentations et que l’on
cherche à comprendre par exemple la résistance de
certaines pratiques aux changements. Dès lors aussi
que l’on cherche à repérer quels sont les éléments qui
contribuent à l’interprétation de l’environnement, à la
cohésion d’un groupe et à son identité.
Pouvoir affirmer à la fois la forte inertie de la repré-
sentation et en même temps sa flexibilité, n’est possible
qu’en repérant deux zones fondamentales de sa struc-
ture qui sont le noyau central et les éléments périphé-
riques. C’est Abric qui propose l’hypothèse de noyau
central (1976, 1989) et l’idée d’une organisation ou
plutôt d’une hiérarchisation des éléments.
Le système central est associé à la part la plus
ancienne, la plus ancrée et « apparaît liée aux condi-
tions historiques, sociologiques et idéologiques. Direc-
tement associé aux valeurs et aux normes () » (Rou-
quette et Rateau, 1998, p. 35). On touche là au rapport
de l’objet de représentation avec tout le système socio-
culturel sur lequel il repose. Il est composé des élé-
ments fondamentaux comme les valeurs et croyances
autour desquelles le groupe trouve son identité, l’entre-
tient et la rend pérenne. C’est pourquoi, il constitue le
niveau le plus stable de la structure de la représentation
face aux changements de la société. Néanmoins, la
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De la représentation sociale à la cognition spatiale et environnementale
La notion de « représentation » en psychologie sociale
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garantie de cette stabilité n’est assurée que parce qu’il
existe le système des éléments périphériques qui sont
une sorte de protection du noyau central. Les éléments
périphériques constituent la part la plus variable de la
représentation, la plus contingente parce que plus
proche de la réalité extérieure et plus soumise aux
situations (Abric, 1994). C’est « la face la plus visible ()
celle qui est accessible par l’observation et l’entretien »
(Moliner, 2001, p. 29). Les éléments périphériques sont
plus proches de l’expérience des individus et de leur
réalité quotidienne. C’est donc à ce niveau structural de
la représentation que l’on peut observer une forte varia-
bilité des éléments de la représentation d’un groupe. Ils
auraient la fonction d’aider à l’adaptation dans le cas de
changements de comportements. Pour résumer donc:
Le noyau central (NC): C’est le système structu-
rant. Il est lié aux normes, aux valeurs, aux attentes, à
l’implication personnelle, aux finalités fonctionnelles
d’une pratique, à la mémoire, à l’histoire collective. Il
favorise le consensus, l’homogénéité culturelle et
psychologique d’un groupe. Il a aussi une utilité pra-
tique et une dimension prescriptive. Il est en lien avec
l’affectivité, l’idéologie, les stéréotypes et croyances du
groupe.
Le système périphérique (SP) : il est constitué
d’une diversité d’éléments et est très flexible. Les élé-
ments sont contingents de la vie quotidienne des indi-
vidus, de leur vécu…Ces éléments sont donc sans
cesse soumis à une réinterprétation, à des filtrages
afin de garantir une adaptation de la représentation
face à l’évolution du contexte sans la faire changer.
Ce système périphérique permet donc l’adaptation
à la réalité concrète, la diversification du contenu de la
représentation sociale et la protection du noyau cen-
tral.
Sans développer davantage le rôle fonctionnel et
organisationnel de ces deux niveaux de la structure
d’une représentation, tant les travaux sont importants
dans ce domaine, arrêtons-nous simplement sur un
point méthodologique d’élucidation de la structure des
représentations sociales.
La détermination de ces éléments peut se faire de
différentes manières, la plus courante étant la tech-
nique associative à partir du mot inducteur reprenant
l’objet de représentation (pour la représentation de la
santé par exemple, on pose la question suivante en
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