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Journées nationales des groupements techniques vétérinaires 2016 - Nantes
QUALITE NUTRITIONNELLE DES VIANDES :
SYNTHESE DE TRAVAUX RECENTS SUR LE BŒUF, LE
VEAU, LAGNEAU ET LA VIANDE CHEVALINE
C. DUCHENE1 , G. GANDEMER2
1. CIV- Viande, Sciences et Société, 207 rue de Bercy 75587 Paris cedex12
2. INRA, 2 chaussée Burnehaut, Estrées-Mons, 80203 Péronne Cedex
Résumé
Il est aujourd’hui nécessaire de disposer de données de composition nutritionnelle
précises et actualisées sur les viandes, crues et cuites, pour répondre aux questions
sociétales, aux besoins scientifiques, réglementaires, cliniques ou de santé
publique.
Les viandes crues présentent une richesse constante en protéines de
grande qualité et en micronutriments essentiels. Leurs teneurs en lipides sont très
variables d’un morceau à un autre, et ce, quelle que soit l’espèce, avec néanmoins
une majorité à moins
de 8 % de lipides. La cuisson impacte les teneurs en
nutriments. Du fait des pertes en eau, elle concentre les nutriments non solubles et
thermorésistants comme les protéines, les lipides intramusculaires, le zinc ou le
sélénium. En revanche, pour les nutr
iments thermosensibles, comme le fer
héminique et la vitamine B6, les cuissons longues et à forte température (bouillies et
braisées) provoquent une diminution de leur teneur. Il apparait ainsi essentiel de
prendre en considération les différences d’apport entre 100 g de viande crue et 100 g
de viande cuite, afin d’évaluer correctement les apports nutritionnels. Au final, du
fait de teneurs qui restent globalement élevées et d’une bonne biodisponibilité des
micronutriments, les viandes cuites peuvent jouer
un rôle important dans la
couverture des besoins en acides aminés indispensables, en fer, en sélénium, en
zinc et en vitamines du groupe B.
Mots-clés
Viande, Bœuf, Veau, Agneau, Cheval, Abats, Cuisson, Rendement, Valeur
nutritionnelle, Protéines, Acides aminés indispensables, Lipides, Acides gras, Fer,
Fer héminique, Zinc, Sélénium, Vitamines B, Apports nutritionnels conseillés.
Cet article a fait l’objet d’une présentation aux Journées nationales des groupements techniques
vétérinaires (JNGTV), Nantes, 18-20 mai 2016.
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INTRODUCTION
La viande a longtemps véhiculé une image symbolique positive de force et de vie, tout en faisant
l’objet de certains tabous. Depuis plusieurs décennies, les préoccupations en matière de
prévention des maladies chroniques, aujourd’hui associées à des questions sur l’environnement
ou la place des animaux dans notre société, concourent à remettre en cause la place de la
viande dans notre alimentation et à mettre parfois en doute son intérêt nutritionnel. L’objectif est
ici de faire le point sur les principales caractéristiques nutritionnelles des viandes à partir des
résultats de deux programmes scientifiques conduits ces dernières années par le CIV en
collaboration avec l’INRA.
Un premier programme d’analyses sur les viandes crues
Il est aujourd’hui nécessaire de disposer de données de composition nutritionnelle de référence
pour répondre aux besoins scientifiques, réglementaires, cliniques ou de santé publique. Au
niveau des viandes de bœuf, de veau, d’agneau et de cheval, les données étaient souvent
anciennes et partielles. Pour pallier ce déficit, le CIV a engagé dès 2006 une étude permettant
d’évaluer la variabilité de composition des viandes crues (1, 5). Le protocole mis en place par
l’INRA a été construit avec des échantillons d’animaux représentatifs des principaux systèmes de
production en France ; tous élevés en station INRA avec une alimentation conforme aux
pratiques courantes. Les analyses ont porté sur trente morceaux différents de viande et produits
tripiers (abats, etc.) provenant de bovins, d’agneaux, de veaux et de chevaux et choisis pour
couvrir au mieux la diversité des compositions et des habitudes de consommation.
Un second programme sur les effets de la cuisson
La diversité des pratiques culinaires rend impossible l’exhaustivité et la représentativité des
analyses de composition réalisées sur des viandes cuites, morceau par morceau et recette par
recette car la reproductibilité des résultats est trop aléatoire. Cette seconde étude a donc reposé
sur une démarche novatrice de modélisation des pertes en eau et en nutriments lors de la
cuisson dans une large gamme de couples temps-température (7, 8, 14). Pour réaliser ce travail,
les chercheurs de l’INRA ont d’abord modélisé les pertes de la viande de bœuf dans des
conditions expérimentales puis ils ont validé le modèle pour les viandes des quatre espèces,
dans des conditions proches des pratiques culinaires classiques.
Les modèles ont ensuite été déclinés en abaques fournissant les rendements en poids et les
coefficients de rétention en nutriments pour les principaux modes de cuisson (grillé, poêle, rôti,
braisé, bouilli) et degrés de cuisson (bleu, saignant et à point) (Tableau n°1). La composition des
viandes cuites a ainsi pu être calculée à partir des valeurs nutritionnelles des viandes crues.
L’étude sur la cuisson a porté sur seize morceaux homogènes, c’est-à-dire essentiellement
composés de muscle, sans gras périphérique ou intermusculaire ce qui facilitait la modélisation
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des pertes à la cuisson. Les morceaux hétérogènes (entrecôte, côtes d’agneau, etc.), constitués
en proportion variable de muscle(s) et de gras périphérique, n’ont pas été considérés car ces
deux compartiments ont des comportements différents à la cuisson.
Tableau 1: Rendements des viandes de bœuf selon les modes et degrés de cuisson (5)
Exemples
de
morceaux
Mode de
cuisson
Niveau de
cuisson
poids (%)
en jus)
Coefficient de rétention en nutriments (%)
Protéines,
lipides, zinc,
lénium
Vit. B3
et B12 Vit. B6 Fer-Fer
Heminique
Macreuse à
bifteck
Paleron
Tende de
Tranche
Faux-filet
Bavette
Grillé ou poêlé
Bleu 90-95
Pertes trop
faibles pour
être
quantifiées :
rendement
estimé à 100
%
90-95 90-95 90-95
Saignant 80-85 80-85 80-85 80-85
A point 70-75 70-75 70-75 70-75
Faux-filet
Tende de
tranche
Macreuse à
bifteck
Rôti
Saignant 80-85 80-85 80-85 80-85
A point servi
chaud 70-75 70-75 70-75 70-75
A point servi
froid 65-70 65-70 60-65 60-65
Joue
Paleron
Braisé ou
bouilli Bien cuit 50-65 50-65 25-50 25-50
1. PRINCIPALES CARACTERISTIQUES NUTRITIONNELLES DES
VIANDES CRUES
a. Une teneur élevée et quasi-constante en protéines de grande qualité
Toutes les viandes crues présentent une teneur protéique élevée, de l’ordre de 20 % (17 à 23
g/100 g) quels que soient l’espèce animale et le morceau (1, 5).
La composition en acides aminés indispensables (AAI) des protéines de la viande correspond
bien au profil de référence établi par rapport aux besoins de l’Homme (Tableau n° 2) (15). Ce
n’est pas le cas de la plupart des aliments d’origine végétale dont la composition en AAI est
moins équilibrée, ce qui nécessite, pour couvrir les besoins, de rechercher une complémentarité
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entre les sources protéiques ou d’en augmenter considérablement les quantités. L’utilisation
digestive des protéines carnées est élevée : plus de 92 % pour la digestibilité réelle, c’est-à-dire
au niveau de l’intestin grêle, d’après des mesures réalisées suite à l’ingestion de viande cuite (2,
13). La digestibilité réelle des protéines végétales est globalement plus faible : de 84 % pour le
Colza (3) à 92 % pour le soja (9), d’après des mesures réalisées à partir d’isolats mais pas
directement à partir des aliments végétaux dont l’effet matrice peut diminuer la digestibilité des
protéines.
Enfin les protéines de la viande font partie des protéines dites « rapides » car elles présentent
une très bonne vitesse de digestion (15).
Pour ces différentes raisons, les protéines carnées sont utilisées avec une grande efficacité pour
accroître ou renouveler les protéines corporelles. Cela s’avère tout particulièrement intéressant
pour des personnes dont les apports peuvent être quantitativement insuffisants alors que leurs
besoins sont plus importants. C’est par exemple le cas, en France, des adolescentes
(croissance), des personnes âgées (moindre efficacité protéique), etc.
Tableau 2 : Composition en acides aminés de différentes sources de protéines (g/100
g de protéines) (13)
Acides aminés
Protéine de
référencea [2]
Bœufb [1]
Lait [3]
Blé [3]
Pois
[3]
Soja
[3]
Histidine
1,7
3,1
2,7
2,4
2,5
2,2
Isoleucine
2,7
4,7
6,4
4,6
4,5
4,7
Leucine
5,9
8,1
10,7
7,9
8,4
7,5
Lysine
4,5
8,9
7,9
3,2
7,2
5,0
Méthionine
(+ cystéine)
2,3
5,8
3,4
4,4
2,1
3,1
Phénylalanine
(+ tyrosine)
4,1
7,7
10,4
9,0
9,1
8,6
Thréonine
2,5
5,3
4,6
3,7
3,9
4,0
Tryptophane
0,6
1,5
1,4
1,3
1,0
1,2
Valine
2,7
4,9
7,0
5,3
5,0
5,9
a Profil établi sur la base des besoins moyens de l’organisme (AFSSA. Apports en protéines :
consommation, qualité, besoins et recommandations. Synthèse du rapport de l’AFSSA. Maisons-Alfort.
AFSSA. 2007:64 pages).
b Composition en AAI du faux-filet (1, 4).
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b. Des teneurs en lipides très variables selon les morceaux
Il faut tout d’abord souligner que globalement les animaux (porcins et bovins notamment) produits
en France aujourd’hui sont moins gras qu’il y a cinquante ans en raison de la sélection des
espèces et de l’évolution des pratiques d’élevage. Cela se traduit par une diminution du gras de
couverture (non consommé) et intermusculaire mais aussi du gras intramusculaire (12).
Néanmoins, pour chacune des espèces animales, la teneur en lipide est très variable d’un
morceau à un autre. Chaque espèce présente des morceaux maigres et des morceaux plus gras.
Sur les trente morceaux crus analysés (Figure n° 1), certains n’apportent que 2 à 3 % de lipides
(tende de tranche, noix de veau, etc.) ; la majorité est à moins de 8 % et certains, les morceaux
hétérogènes, comportent entre 13 et 23 % de lipides (1, 5). Toutefois, pour ceux-ci, le gras
intermusculaire ou périphérique peut aisément être enlevé par le consommateur avec son
couteau : cela suffit à diviser par deux ou par trois la quantité de lipides ingérés (Figure n°1) (5).
Figure n°1 : Teneur en lipides de 30 morceaux différents de viande crue (4)
c. Proportions des acides gras
Les lipides des viandes contiennent quasiment autant d’acides gras mono-insaturés (AGMI cis :
34 à 48 % des acides gras totaux de la viande) que d’acides gras saturés (AGS : 38 à 52 % des
acides gras totaux). Les acides gras poly-insaturés sont en proportion plus faible et plus variable
d’une espèce à l’autre (AGPI cis : 3 à 27 %) : les proportions les plus élevées sont trouvées dans
la viande chevaline et les plus basses, dans le bœuf (1, 5). Les abats ont une proportion d’acides
gras polyinsaturés très importante (32 à 44 % des AG totaux). Les foies constituent même des
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