Ethnologie Emmanuelle Lallement
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INTRODUCTION
Recherche plutôt propre à l’exotique, imagerie de l’aventurier qui rapporte sur
des sociétés lointaines. Attrait ethnologique de la télévision, avec des émissions tels que
« rendez vous en terre inconnue » (célébrité emmené au bout du monde, F2). Pas
tellement un genre nouveau : documentaires, notamment le dimanche après midi après
le document animalier. Imaginaire peut être plus repris actuellement. Forme
d’émerveillement pour l’autre, pour l’altérité. Pour RDV, souvent un ethnologue est
présent pour faire le lien entre nous et la tribu, légitimation, authentification de la
rencontre avec l’autre.
En fait ces inconnus ne le sont pas tant que ça, mythe de la tribu isolée, chez qui
on va débarquer spontanément (alors que négociation de l’accès, en termes monétaires
aussi, installation de l’équipe de tournage). Vrai mise en scène. De même cet été une
émission a poussé cette logique : « Bienvenue dans ma tribu » (TF1), une famille un peu
bourgeoise par exemple qui se retrouve au milieu d’une tribu. Très stéréotypique :
l’européen occidental performe son rôle, surjoue, tandis que la tribu accentue aussi de
son côté les comportements stéréotypés.
Imagerie ethnologique pas sans lien avec la médiatisation d’un certain nombre
d’anthropologues comme Claude Lévi Strauss décédé en 2009. Il a crée l’école
d’anthropologie française. Sorte d’explorateur qui part à la rencontre de populations
lointaines : image diffusée par les médias. Pour CLS au contraire, combat contre cette
image, pour lui ce n’est justement pas de l’exploration et du voyage. Disciplines
médiagéniques.
En quoi anthropologie est un savoir avec des concepts (culture, ethnie, tribu,
identité culturelle…) ? Manière d’aborder et d’analyser la diversité humaine. Discours
sur la diversité.
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1. LANTHROPOLOGIE CLASSIQUE : DEFINITION, HISTOIRE, CONCEPTS ET
APPROCHE CRITIQUE
A. ANTHROPOLOGIE ET SOCIETES EXOTIQUES : LES FONDEMENTS DE
LA DISCIPLINE
1. Anthropologie et pensée de la diversité culturelle
Archétype de l’homme au milieu de la forêt dans une tribu, milieu étranger voire
hostile : il est sur son terrain (fieldwork). Voyage long dans la durée, retour parfois
plusieurs années après, avec récits, textes (contes fondateurs…), sculptures, peintures
(expression culturelle), objets du quotidien, de type religieux… tout cela constitue les
réserves des musées d’anthropologie. Premier changement: on considère que ces objets
sont des objets d’arts (musée des arts primitifs, musée d’arts premiers).
Cependant, sont ils des objets d’art comme les autres ? On leur a accolé le terme
primitif, puis premier. Donc pas d’équivalence avec les œuvres d’art exposés au Louvre.
Mise en exposition des objets a des effets sur les rapports que l’on peut avoir avec les
populations concernés, avec les lieux. Polémique au sujet du Quai Branly : pourquoi
créer un musée spécifique et ne pas les exposer au même titre que la Joconde ?
Problème aussi au niveau de l’auteur : art considéré comme premier est collectif, du
coup nom de l’auteur n’apparaît pas. Occultation aussi de l’histoire des objets, de la
façon dont ils ont été prélevés (vols parfois), s’ils viennent de collection, s’ils ont été
échangés (objet marchant). On ne sait rien de ces objets art premier art primitif.
L’ethnologie c’est un objet d’étude privilégié, sur ces sociétés de l’ailleurs.
Méthode aussi, avec l’enquête de terrain. Enfin c’est aussi une série de problématiques,
assez classiques : étude des rituels funéraires par exemple, des rituels de naissance,
d’alliances, de croyances, étude du rapport au corps et des pratiques corporelles,
question de la parure et de la beauté, pratiques de la magie. Tout cela constitue un
réservoir de savoirs, anthropologiques.
Les Dogons du Mali, écumés par les anthropologues français ; les indiens
Guayaki : peuples stars, cela en rajoute dans son rapport avec l’altérité. Mais en fait, loin
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de décrire des choses bizarres, les anthropologues montrent que les autres font
différemment, mais pas si différemment. C’est différent c’est autre (pas de lien ici, si
ce n’est un lien de curiosité). Signification subtile, c’est tout le paradoxe du discours
anthropologue. Discipline qui maintient la tension qui peut exister entre ce qui est
universel et ce qui est différent. Inventaire de toutes les cultures humaines = les
différentes façons qui existe dans le monde d’appartenir au genre humain = ce qui nous
distingue dans le monde. Pour autant, pensée de l’universalité = il y a un seul genre
humain. La diversité s’exprime culturellement, et non pas biologiquement.
Invention dès lors du mot « culture », notion qui permet de penser la différence
entre els êtres mais pas de manière raciale. Axiologie évolue dès lors. Une seule race
humaine selon le discours anthropologique, on ne peut catégoriser les hommes comme
les animaux, il est impropre de considérer qu’il existe plusieurs races humaines. Pour en
revenir aux combats de CLS, ce dernier a demandé que le mot « race » soit enlevé du
dictionnaire lorsqu’il est entré à l’Académie, échec. Il pensait également que la race
humaine n’était démographiquement pas viable : plus assez de viande pour tous, faudra
t-il manger de l’humain ? En faire des élevages ?
On peut aussi analyser les manières de faire la fête dans le monde, manifestation
pacifique. Elles indiquent beaucoup de choses sur la culture d’un peuple. Universalité de
la fête. Démesure et désordre, chaos, mais mis en scène, régulé, institutionnalisé.
Soupape pour mieux revenir à l’ordre social le lendemain. Les fêtes servent à ne pas se
faire la guerre. Même dans les rituels d’inversion, ou encore d’imitation des pouvoirs,
c’est justement cette représentation du roi.
Analyser une unité de population restreinte mais observer un fait social total,
toutes les dimensions de la société (religieuses, politiques, sociales) puis extrapolation.
2. Analyse des termes ethnographie, ethnologie, anthropologie : du particulier
vers l’universel
Ethnographie, anthropologie, ethnologie : trois étapes dans la recherche selon
CLS. Edifice à trois étages : description, interprétation, comparatisme
- RDC = ethnographie. Ethno : le peuple, Graphie : écriture. Forme d’écriture de la
singularité d’un peuple. Mais on s’arrêterait trop tôt, à de la description.
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- 1e étage = ethnologie. Logie, plus Graphie : on donne du sens. Par exemple : dans
ce village, la case du forgeron n’est pas loin de celle du sorcier, pour un certain nombre
de rituels ils bossent ensemble. Réduction de l’altérité par l’explication elle même.
- 2e étage = anthropologie. Spécialiste de l’être humain. On quitte les approches
micro locales pour arriver à l’universel. Après la description, puis l’explication, on arrive
à une démarche comparatiste.
Le tabou de l’inceste, dans toutes les sociétés, mais on n’interdit pas les mêmes
personnes. Pas d’explication biologique mais culturelle. En fait, pas d’interdit
biologique : la proximité est une construction culturelle, c’est relatif. En Europe on
fonctionne sur le triangle père-mère-enfant, on s’interdit donc des alliances au sein de ce
cadre. Dans d’autres sociétés, les alliances peuvent être interdites avec des catégories de
population qui chez nous ne font même pas parties de notre famille.
Variétés de forme d’interdiction de l’inceste, ce qui permet de penser qu’il est
construit culturellement. Exemple dans les sociétés trobriandaises : tabou de l’oncle
maternel. Dans cette société les enfants savent qui sont leur géniteur mais celui qui est
chargé de leur éducation est leur oncle. Le père n’est pas ici le principal élément de
filiation, c’est pourquoi l’interdit porte sur l’oncle. En France, il était coutume avant
qu’un mari veuf prenne pour seconde épouse la sœur de sa défunte femme. Certains
anthropologues, comme Françoise Héritier, ont alors estimé qu’il s’agissait d’une forme
d’inceste entre sœurs. L’étude de l’inceste permet de penser l’universel (toute société a
besoin d’interdire une catégorie de population) tout comme le particulier (le tabou de
l’inceste diffère selon les sociétés).
Levi Strauss a rassemblé les observations faites sur l’inceste par ses
prédécesseurs : pour lui, interdire certaines relations, c’est en prescrire d’autres, c’est
orienter les relations. Il rend au tabou de l’inceste une dimension positive, puisque les
règles d’interdiction sont en fait des règles d’échange. Coup de force théorique. Pour
résumer, si je donne ma sœur à un homme, il y a un homme quelque part qui pourrait
me donner sa sœur : ce qui prime est donc l’échange, la réciprocité. Toutes les règles
d’échange sont en fait des règles de circulation de femmes à travers le monde et à
travers les sociétés.
Toute société humaine ne peut s’organiser qu’avec des lois d’échanges, même si
l’échange est défini différemment selon les sociétés. Les nécessaires échanges entre els
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sociétés expliquent la raison pour laquelle on a besoin de s’interdire certaines catégories
de la population.
Lévi Strauss était connu pour être l’anthropologue de la parenté. Par on
considère qu’il n’existe pas de société humaine qui soit organisée autour de quelque
chose de structuré qu’on appelle la famille. Mais cela ne veut pas dire que le même
modèle est appliqué partout. Diversité des manières de faire la famille dans le monde.
Idem, logique de l’universel et du particulier.
On étudie en fait les formes d’alliance, comment on fait alliance. Exemple de la
monogamie, de la polygamie, de la polyandrie, de la sororat (le veuf épouse la sœur de la
défunte) ou encore du lévirat (épouser le frère cadet de son mari, raisons économiques).
Les transactions à l’œuvre pendant l’alliance, les échanges pendant l’échange : biens…
moment de transaction, donc il est rare pour les époux de choisir son union, mariages
arrangés (les plus durables car alliances entre les familles, et il n’y a rien de plus
durable). Aujourd’hui avec reproduction sociale on retrouve quelque peu ce phénomène.
On a d’autres formes d’alliances comme les unions préférentielles (union entre cousins
peuvent être souhaitées par exemple). Dans cette logique de l’échange toujours :
plaisanteries… échange de mots entre les deux familles, indispensable pour sceller
échange de femme et échange de biens.
L’autre aspect de l’étude de la parenté se rapporte à la filiation : manière dont on
acquiert un nom, un héritage… on est inscrit dans une filiation, culturelle. Certaines
sociétés admettent que l’enfant prenne uniquement le nom du père (chez nous il y a
encore peu de temps c’était le cas), l’enfant est le fils de son père : sociétés patrilinéaires.
D’autres sociétés fonctionnement de façon matrilinéaire. Attention : ce n’est pas pour
autant une société matriarcale, dans ce cas le pouvoir serait entre les mains des
femmes. Notre société témoigne d’une équivalence entre la lignée du père et la lignée de
la mère : troisième direction des études de parenté, soit de comparer ce qui existe afin
de définir des systèmes de parenté. Ici on est dans un système esquimau : on
appelle « tonton » aussi bien l’oncle maternel que paternel. Equivalence donc. Système
assez simple voire simpliste de relation de parenté.
Les relations de parenté et les systèmes dans lesquels elles s’insèrent forme une
grammaire de relations. « Les relations de parenté forment un langage » (CLS). C’est un
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