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optimiste. Il ne considère pas le nou-
veau report du DMP comme un cou-
peret. Une nouvelle préoccupante,
certes, mais pas pour autant rédhibi-
toire. « Par mesure de sécurité, les
données récoltées sont stockées pen-
dant un an chez notre hébergeur de
référence (ndlr : Santéos). Simple-
ment, cette opération représente un
coût important qui est à notre
charge. Nous ne pouvons donc pas
attendre indéfiniment… ». Pour
Alain Jayne, le feuilleton du DMP –
et ses reports incessants – s’appa-
rente à « une histoire de gros sous ».
La cause principale : la sécurisation
des données et le choix de l’héber-
geur. Il déplore notamment les pres-
sions gouvernementales qui ont été
exercées durant la campagne prési-
dentielle. Et de critiquer l’attitude du
ministre de la Santé de l’époque, Xa-
vier Bertrand, parti depuis pour d’au-
tres responsabilités. C’est un dossier
à 10 ans, affirme-t-il, il faut donc lui
« laisser le temps de grandir » et « ne
pas précipiter les choses ».
Des applications à venir. D’après
Jean Parrot, cet outil pourrait pro-
bablement permettre, à terme, d’éta-
blir des analyses de santé publique
à grande échelle. Les laboratoires
pharmaceutiques en seront indirec-
tement bénéficiaires. Ils n’auront, en
revanche, aucun espoir de voir ve-
nir « des statistiques de ventes com-
merciales ». C’est un dossier profes-
sionnel destiné à rationaliser la
chaîne de dispensation des médica-
ments avec trois cibles en ligne de
mire : meilleur usage du produit,
meilleure observance du traitement,
meilleur suivi du patient. Les indus-
triels y trouveront donc leur compte.
« A terme, une meilleure traçabilité
des boîtes de médicaments délivrées
pourrait (également) nous permettre
de nous prémunir contre le fléau de
la contrefaçon. Cette possibilité, qui
ne nous est pas encore offerte, reste
un des objectifs du DP. Une fois le
système de codage des médicaments
(numéro de lot, date de péremp-
tion…) en place, donc pas avant
2011, il sera possible de cibler les
pharmacies à informer en cas de re-
trait de lots, sans pour autant aler-
ter l’ensemble du réseau officinal ».
Pour Claude Japhet, le DP est un
moyen supplémentaire pour les la-
boratoires d’informer les patients via
l’officine. Un top alerte devrait no-
tamment retentir à l’ouverture du
DP pour informer le pharmacien sur
les spécialités indiquées dans la thé-
rapeutique de son patient, re-
marque-t-il. A la FSPF, même son de
cloche. « Les laboratoires pharma-
ceutiques et les professionnels de
santé ont le même objectif : soigner
au mieux la population. Le DP et le
DMP servent à améliorer l’efficience
des soins. Nous devons tous ?uvrer
pour la même cause : optimiser la
délivrance des spécialités thérapeu-
tiques, avoir de bons médicaments,
de bonne qualité, dans le bon laps de
temps », résume ainsi Alain Jayne.
Expérimentations. A l’issue de la
phase d’expérimentation, « nous
chercherons à savoir si les outils in-
formatiques mis à disposition du
pharmacien lui ont permis d’appré-
hender tous les cas de figures. Il en va
de même pour les questions de la ra-
pidité d’accès, des transferts de don-
nées et de l’accessibilité permanente
au serveur », relève par ailleurs le pré-
sident de l’UNPF. D’après Jean
Parrot, « la mise en place se fait
actuellement au compte goutte,
pharmacien par pharmacien, en
fonction du degré de technicité infor-
matique de chaque officine. On
assistera donc à une montée en
charge progressive au cours des six
mois ».
A terme, il s’agira donc de savoir si les
pharmaciens sélectionnés ont pu
créer, alimenter et consulter sans dif-
ficulté cet outil informatique qu’est le
DP. Mais pour cela, il faudra patien-
ter… jusqu’à l’automne. ■
JUIN/JUILLET 2007 _ PHARMACEUTIQUES
Jean Parrot
s’attend à une
monté en charge
progressive des
expérimentations
au cours des six
mois à venir.
©SIPA
Initialement prévu pour le 1er juillet
2007, puis repoussé au mois de
novembre suivant, et par la suite au
printemps 2008, le déploiement du DMP
pourrait finalement être remis à plus
tard… Objet de la discorde : la définition
du contenu des informations médicales
ou encore la sécurisation et la
confidentialité des données. Si le GIP
assure avoir soumis un projet de décret
tenant compte de ces questions aux
partenaires du projet, le Conseil de la
Caisse nationale d’assurance-maladie y a
porté un sérieux coup d’arrêt, via son
avis – consultatif – défavorable du 16 avril
dernier. Ce dernier a notamment estimé
que « le report de la date de lancement
devait être l'occasion de traiter, au fond,
un certain nombre de questions
essentielles, comme le rôle du médecin
traitant, l'articulation avec les dossiers
des professionnels, la hiérarchisation des
données… ». Toujours selon l’avis, les
premiers résultats des expérimentations
régionales révèlent quelques
dysfonctionnements quant aux
conditions d'utilisation et à la finalité de
l'outil (faible partage de l'information,
doubles saisies, sécurité des données).
D’après le GIP, le déploiement du DMP
doit coûter 1,2 milliard d'euros sur cinq
ans et générer à terme un milliard
d'euros d'économies directes pour la
Sécu.
Des chiffres qui restent cependant
encore très théoriques !
Le DMP piétine