30 Soins Libéraux Dossier médical personnel Pour le service de tous À en croire une enquête d’opinion réalisée entre le 20 avril et le 4 mai 2005 sur un échantillon de 482 “consommateurs de soins” de 18 ans et plus (Enquête SNR-RIPAM), la perception du Dossier Médical Personnel (DMP) par le public reste encore pour le moins contrastée. P lus de la moitié (58 %) n’en ont “même pas entendu parler” ; 19 % “en ont entendu parler, mais ne savent pas ce dont il s’agit” ; seuls 11 % semblent “savoir précisément ce dont il s’agit”. Cependant, lorsque le dossier médical personnel est expliqué aux futurs patients, ils sont alors 73 % à considérer qu’il s’agit là d’un dispositif “utile ou très utile”. Par ailleurs, né en septembre 2004, il doit arriver à maturité vers mi-2007 : un développement à petite vitesse qui laisse le temps de s’y familiariser. Mais, puisqu’il nous est à tous promis, autant s’y atteler dès à présent. Le contenant et le contenu Focus ... Les bénéfices du DMP Pour la collectivité, le DMP permet : – d’optimiser les dépenses de santé des Français ; – de piloter certains aspects de la santé publique en France sous des angles de vigilance, d’amélioration de la prise en charge des patients, de la mise en œuvre d’actions de santé publique ciblées. Il n’existe actuellement aucun dispositif permettant aux professionnels de santé de partager l’information médicale d’un patient. Une des grandes mesures de la réforme pour l’Assurance maladie est de favoriser une coordination des soins effective en créant le dossier médical personnel qui permettra un parcours de soins optimal pour toute personne, dans toute la France, pour n'importe quelle situation et à tout moment. Volonté politique et économique du ministère des Solidarités, de la Santé et de la Famille, le DMP doit réaliser un projet ambitieux à vocation médicosociale, donc par voie de conséquence économique, qui devrait concerner dans les années à venir tous les soignants et tous les soignés. Les avantages espérés abondent : limitation des prescriptions et actes redondants, archivage fonctionnel des résultats d’examens (imagerie et laboratoire), prise en charge coordonnée des soins, disponibilité quasi immédiate des informations… In fine, coûts de Santé abaissés et qualité des soins Professions Santé Infirmier Infirmière N° 65 • août-septembre 2005 optimisée. En quelque sorte, la panacée... Comment en arriver là ? À partir de 16 ans, tout assuré social disposera d’un dossier médical informatisé qui colligera – a priori, si la procédure normale est respectée – tous les éléments diagnostiques et thérapeutiques relatifs à l’assuré. Ces informations essentielles pour le patient devront être incluses par les professionnels de santé (voir encadré) aussi bien lors des consultations de ville qu’au cours des éventuelles hospitalisations. Pour “entrer” dans le DMP, une double sécurité a été instaurée. D’une part, le malade sera l’unique détenteur du code d’accès de son DMP. Il faudra donc qu’il accepte de le communiquer au médecin ce qui se fera grâce à sa nouvelle carte Vitale (Vitale 2) portant sa photographie. D’autre part, la seconde nécessité pour l’accès est la carte professionnelle de santé (CPS) du médecin traitant. Par ailleurs, la puce de la carte vitale ne stockera pas le DMP. Celui-ci sera déposé chez un hébergeur sur un serveur informatique sécurisé et l’assuré pourra choisir l’hébergeur après un appel d’offres. Quelques ratés Mais, tout ne va pas pour le mieux dans le meilleur des mondes pour le DMP. Un retard conséquent, mal chronique français, a été pris dans le calendrier prévisionnel. Le cahier des charges imposé aux hébergeurs n’est pas terminé, donc l’appel d’offres tarde ; les hôpitaux traînent pour la modernisation de leur parc informatique ; le problème du stockage, de la lourdeur, de la rapidité d’accès, des sites retenus pour l’imagerie incluse dans le DMP reste en cours d’étude. Quant au risque – certainement minime – d’une utilisation “déviante” des données personnelles du patient vers les mutuelles, les compagnies d’assurance ou les banques, bien que nié haut et fort par les pouvoirs publics, il n’en demeure pas moins un sujet de préoccupation. Il convient cependant de conserver l’espoir d’un aboutissement dans les temps de cette mini-révolution dans la gestion de la santé tant du patient que de celle de l’assurance maladie. Les multiples défis socio-médicaux à venir – vieillissement de la population, déficit quantitatif en soignants, révision structurelle de la carte hospitalière, pour ne citer que quelques mastodontes, ne peuvent se permettre d’y ajouter les ratés d’un outil de base pour leurs chantiers. Grâce à l’information partagée, le dossier médical personnel devrait faciliter une prise en charge coordonnée des soins dans le respect du secret médical et de la vie privée du patient, et permettre, par exemple, de réduire les interactions médicamenteuses qui, à cause d'un manque d'information et de transparence, occasionnent chaque année plus de 128 000 hospitalisations, et provoquent plus de décès que les accidents de la route. GM Qui entre les données dans le DMP ? Il y a encore quelques incertitudes à ce propos. Pour l’heure, le médecin traitant (le référent), le spécialiste, les services d’urgence et le médecin hospitalier responsable pourront le consulter et inclure des données. Un accès limité serait ensuite accordé à d’autres professionnels tels que les infirmières et les kinésithérapeutes. Reste les pharmaciens qui – à juste titre – souhaitent eux aussi accéder aux informations.