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Willem Buiter (2009) note que l’influence de ces
économistes « hétérodoxes » a été très limitée, la théorie
monétaire préférant s’appuyer sur l’hypothèse des marchés
efficients (Fama, 1965), à savoir que les prix des actifs
financiers reflètent toute l’information disponible et que
chaque agent peut utiliser ces signaux pour estimer son degré
d’exposition au risque. Ainsi, lorsque le risque s’élève, les
investisseurs demanderaient une augmentation des taux
d’intérêt (hausse de la prime de risque) ou arrêteraient tout
simplement d’acheter des actifs financiers. Les hausses de
prix seraient ainsi maintenues dans des limites raisonnables
grâce à l’efficience des marchés. Malgré les échecs
manifestes de cette hypothèse au cours des années 70, 80, 90
et 2000 (Aglietta, 1994 ; Broussard, 1998), la plupart des
travaux macroéconomiques continuent « to swallow the
Efficient Market Hypothesis (EMH) hook, line and sinker »
(2009, p. 3). Pour Paul Krugman (2010), l’Ecole de Chicago,
en la personne d’Eugene Fama (et sa conviction qu’il n’y a
pas eu de crise financière, mais juste une réaction des
marches financiers à une crise économique), “just turned
inward on itself circa 1982, and stopped paying attention
either to the world or to anyone not of its tribe”.
L’efficience des marchés financiers constituerait ainsi le
cœur du problème. La crise des subprimes ne serait pas liée à
de prétendus comportements cupides ou irrationnels mais
bien au strict respect des règles du jeu financier (Orléan,
2008, 2009) et à la confiance aveugle dans les modèles
macroéconomiques de la théorie dominante. Ainsi, comme le
souligne Dani Rodrick (2009, p. 2), la faute n’incombe pas à
la science économique, mais bien aux économistes, « the
problem is that economists (and those who listen them)