Jusqu’à l’époque contemporaine, des dynasties sunnites (arabes puis turques),
ont le plus souvent dominé la majeure partie de l’Asie et de l’Afrique islamiques. Les
dernières furent celles des Ottomans qui dominèrent un vaste empire à partir
d’Istamboul du XIVème au XXème siècle. En 1923, Atatürk, fondateur de la Turquie
moderne, abolit le califat. Cette décision ouvrit la voie aux Etats arabes indépendants.
Du IXème au XIème siècles, une dynastie chiite occupa cependant le califat. Il
s’agit des Fatimides (de Fatima, fille de Mahomet), qui gouvernèrent l’Oumma à partir du
Maghreb puis de l’Egypte. En outre, depuis le XVIème siècle, le chiisme, dans sa version
duodécimaine (cf. infra), est la religion officielle de la Perse (devenue l’Iran).
Repères identitaires
Le sunnisme tire son nom de sunna (tradition ou coutume), mot désignant la
conduite de Mahomet telle qu’elle est consignée dans le Hadîth (recueil des actes et
paroles du prophète de l’Islam). Très légaliste, le sunnisme rassemble les musulmans
qui se prétendent les plus fidèles à cette tradition, considérée par eux comme la seule
orthodoxe. Le sunnisme n’est pas organisé selon une structure hiérarchique unique
dotée de pouvoirs magistériels et donc apte à délivrer une interprétation revêtue du
sceau de l’authenticité.
Le chiisme doit son nom à chiat (parti). Il englobe les musulmans qui se réfèrent à
la lignée généalogique d’Ali auquel ils donnent le titre d’imam (et non de calife). Pour les
uns, cette lignée comporte douze imams (chiites duodécimains, les plus nombreux),
pour les autres, elle en comporte sept (septimaniens ou ismaéliens). Un chiisme néo-
ismaélien est aujourd’hui sous l’autorité de l’Aga Khan.
Les chiites croient à l’occultation mystérieuse du dernier imam de l’une ou l’autre
de ces lignées (événement qui se serait produit en Irak en 874, selon la croyance des
duodécimains) et à son retour futur comme Mahdi (le « bien guidé ») pour initier les
musulmans au Coran intégral (censuré, selon eux, des passages sur l’élection d’Ali par
Dieu), venger Ali et gouverner l’Oumma. Contrairement au sunnisme, le chiisme s’est
doté d’un clergé hiérarchisé aux pouvoirs très étendus.
Il y a dans le chiisme une propension à la révolution. A cause des circonstances
douloureuses de ses origines, la souffrance y tient une sorte de rôle sacrificiel. Chaque
année, pour l’Achoura, les chiites commémorent le « martyre » de Hussein par une
célébration publique au cours de laquelle les hommes s’auto-flagellent tandis que les
femmes versent d’abondantes larmes. En outre, afin de préserver leur identité et leur
survie communautaire, souvent niée ou menacée par les pouvoirs sunnites auxquels ils
ont été soumis, les chiites ont développé la pratique de la taqiya (dissimulation).
Annie Laurent
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