Vaisseaux, Coeur, Poumons n Numéro spécial n 2009
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Identification et évaluation de
l’insuffisance cardiaque aiguë
L’établissement rapide d’un diagnostic correct
revêt de toute évidence une importance capi-
tale. L’algorithme de diagnostic de l’insuffisance
cardiaque aiguë est identique à celui de l’insuf-
fisance cardiaque chronique.
Algorithme de diagnostic
• Cliniquetypique=insufsancecardiaque=
traitement et tri
• Cliniqueatypique=>exclusionautres
• Cliniqueincertain=>ECG/RXTX/BNP
- Normal:ICimprobable=>exclusion
autres
- Anormal=>échocardiographie-doppler
cardiaque/cardiologue
=> Pas d’insufsance cardiaque =>
exclusion autres
=>Insufsancecardiaque=>traiterettri
En cas de clinique typique, telle l’orthopnée
paroxystique nocturne, le diagnostic doit être
posé sans examen ultérieur. Il est alors essentiel
de ne pas perdre de temps. Si la clinique met
en évidence un risque mortel, comme en cas
d’insuffisance cardiaque globale avec oedème
pulmonaire et choc, une aide spécialisée est
requise sur-le-champ.
Si la clinique suggère une autre pathologie, il
convient de suivre dans un premier temps cette
orientation.
Lorsqu’un généraliste, un urgentiste ou un spé-
cialiste se trouve face à une clinique incertaine,
une surveillance limitée sera mise en oeuvre
dans un premier temps:
- antécédents de cardiopathie ou de patho-
logie pulmonaire ou risque élevé;
- examen clinique;
- ensemble complet de paramètres vitaux:
tension artérielle, fréquence cardiaque, tem-
pérature, fréquence respiratoire et, le cas
échéant, saturation;
- ECG: toujours: pour exclure une ischémie
aiguë et une arythmie;
- RXthorax:toujours,sipossible;
- laboratoire: BNP (NT-pro-BNP):
- toujours: cyto/creat et iono/CRP/
Troponine/D-dimères/GAZ SANGUINS
si possible/glucose;
- sur indication: INR (antico/insuffisance
cardiaque sévère)/ensemble hépatique/
urine.
Si l’ECG est tout à fait normal, une insuffisance
cardiaque s’avère peu probable. Dans la pratique,
l’ECG diverge souvent légèrement. Si la radiologie
thoracique est tout à fait normale, une insuffi-
sance cardiaque s’avère peu probable. La radiologie
du thorax est essentiellement utile pour mettre
d’autres pathologies en évidence ou pour confir-
mer un tableau typique d’oedème pulmonaire.
L’un des tests essentiels dont dispose le
généraliste est le Brain Natriuretic Peptide (BNP)
ou son produit de clivage, le N-terminal-pro-BNP
(NT-pro-BNP).
BNP et NT-pro-BNP
La signification diagnostique du BNP et du NT-
pro-BNP est notamment examinée dans le cadre
de l’étude Breathing Not Properly.
Si le titre est normal, un diagnostic d’insuffisance
cardiaque s’avère hautement improbable étant
donné la sensibilité élevée de ce test (90%).
Si un diagnostic d’insuffisance cardiaque s’avère
probable en cas d’augmentation de la valeur,
d’autres tableaux cliniques peuvent cependant
être associés à une hausse du BNP ou du NT-
pro-BNP, telle une embolie pulmonaire. Le test
présente une spécificité de 76%. Plus le titre est
élevé, plus la probabilité augmente et plus le
pronostic est défavorable. Un titre BNP < 200pg/
ml est l’indice d’un pronostic favorable.
Le BNP et le NT-pro-BNP ont une fonction d’ex-
clusion en cas d’incertitude en raison d’une haute
prédictivité négative.
En ce qui concerne le BNP, le généraliste peut
appliquer la règle pratique selon laquelle un dia-
gnostic d’insuffisance cardiaque est improbable
en présence d’un niveau < 100pg/ml. Le patient
se trouve dans la zone grise en cas de niveau
situé entre 100 et 500pg/ml. Enfin, le diagnos-
tic est probable lorsque les valeurs sont égales
ou supérieures à 500pg/ml. Cette règle admet
quelques exceptions, dont la plus importante est
celle de l’oedème pulmonaire hyperaigu, qui peut
se caractériser par un niveau restant normal au
cours des premières heures. Dans ce cas, il ne faut
pas attendre les résultats de laboratoire. En pré-
sence d’une insuffisance rénale, le seuil peut être
doublé – jusqu’à 200pg/ml –, la clairance étant
alors ralentie. Le seuil sera diminué – jusqu’à
50pg/ml – en cas d’obésité morbide à partir d’un
IMC de 40. D’autres valeurs s’appliquent en ce
qui concerne le NT-pro-BNP.
En cas d’incertitude persistante après l’ECG, la
radiologie thoracique et le BNP, une orientation
en vue d’une échographie-doppler cardiaque
s’avère indiquée afin de confirmer ou d’infirmer
le diagnostic d’insuffisance cardiaque.
L’échographie-doppler cardiaque est indiquée
chez tous les patients en cas de diagnostic d’in-
suffisance cardiaque, que le diagnostic soit
clairement établi ou non sur le plan clinique.
L’examen permet de déterminer s’il s’agit d’une
insuffisance cardiaque à fraction d’éjection
diminuée ou préservée et fournit des indica-
tions sur les causes de l’insuffisance cardia-
que. L’échographie-doppler cardiaque sera de
préférence effectuée au début de la mise au
point, à un moment dépendant de la gravité
du tableau clinique.
Traitement initial de
l’insuffisance cardiaque aiguë
Le traitement initial d’une insuffisance cardia-
que aiguë vise à améliorer immédiatement les
symptômes, à stabiliser le patient et à prendre
une décision fondée en vue de l’orientation vers
un service d’urgence, un service de «medium
care», une unité de soins coronariens ou intensifs
ou un cath-lab.
- Amélioration immédiate des symptômes
- Stabilisation
- Tri
A cet effet, la trousse du généraliste doit en
permanence comporter les produits suivants:
comprimés et ampoules de furosémide (Lasix®)
et bumétamide (Burinex®), comprimés de cap-
topril capoten
®
25mg, ampoules de chlorhydrate
de morphine 10mg et comprimés de Cedocard®
5mg. En cas de prédominance de la dyspnée, le
patient doit en premier lieu être installé en posi-
tion assise les jambes tombantes. Du furosémide
ou du bumétamide lui sera alors administré par
voie intraveineuse. Si la tension artérielle est
suffisante et que le patient n’est pas en état
de choc, du cédocard sera administré par voie
sublinguale. De la morphine sera administrée par
voie sous-cutanée en cas d’anhélation impor-
tante. Lorsque la tension artérielle a fortement
augmenté et que l’administration de nitrates
par voie sublinguale produit un effet insuffisant,
un demi-comprimé de captopril sera administré
par voie sublinguale. En cas de tableau clinique
dominé par une hypoperfusion organique, le pa-
tient doit être placé en position de Trendelenburg
afin de maintenir la perfusion cérébrale et de
favoriser le retour veineux. Une fois stabilisé,