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La cognition revisitée
ses : la réalité réside dans les essences, dont les phénomènes
sont comme de simples ombres portées, cf. le mythe de la
caverne), et dont Kant est une figure majeure qui a mar-
qué la philosophie de son empreinte idéaliste, et réagissant
aussi à la pensée de Hegel chez qui le sujet se réduit à une
formation cognitive, Husserl et après lui Merleau-Ponty dé-
veloppèrent ce qu’ils nommèrent la méthode phénoméno-
logique, à savoir une observation des phénomènes tels qu’ils
apparaissent dans la conscience, dans le but de redonner une
consistance légitime au sujet. Husserl développa le concept
d’intentionnalité, selon lequel les contenus de conscience,
orientés, présentent un sens existentiel. Pour Husserl, le réel
se constitue en fonction de l’intentionnalité, conception qui
sera développée dans la philosophie existentialiste.
La pensée de Merleau-Ponty explore les rapports de l’es-
prit et du corps, qu’il veut réhabiliter, et auquel il veut ac-
corder une place médiatrice dans l’expérience d’un « être au
monde » fait aussi de la rencontre de l’autre. Dans sa Phé-
noménologie de la perception, le philosophe montre le rôle
que joue notre corps dans notre appréhension du monde et
la formation de nos pensées1.
La phénoménologie existentielle se présente comme la
pensée de la « présence au monde » du sujet philosophe,
par le biais de son corps. L’œuvre de Merleau-Ponty veut
intégrer les données d’une science qui prend de plus en
plus de place à la pensée philosophique classique. Ce fai-
1 « Le sentir est cette communication vitale avec le monde qui nous le rend
présent comme lieu familier de notre vie. C’est à lui que l’objet perçu et le
sujet percevant doivent leur épaisseur. Il est le tissu intentionnel que l’effort de
connaissance cherchera à décomposer. […] Comprendre, c’est éprouver l’ac-
cord entre ce que nous visons et ce qui est donné, entre l’intention et l’effec-
tuation – et le corps est notre ancrage dans un monde. »
Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception, voir les références bibliogra-
phiques en fin d’ouvrage.