La Bohème - Opéra Orchestre National Montpellier

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La Bohème
Giacomo Puccini
Opéra en quatre tableaux
Livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica
D’après les Scènes de la vie de bohème de Henry Murger
Créé le 1er février 1896 au Teatro Regio à Turin
Vendredi 21 décembre 20h
Dimanche 23 décembre 15h
Mercredi 26 décembre 20h
Vendredi 28 décembre 20h
Dimanche 30 décembre 15h
Mardi 1er janvier à 15h
Opéra Comédie
Durée : 2h30
Cahier pédagogique
Saison 2012-2013
Service Jeune Public et Actions Culturelles - 04 67 600 281 - www.opera-orchestre-montpellier.fr
La Bohème
Giacomo Puccini
Opéra en quatre tableaux
Livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica
D’après les Scènes de la vie de bohème d’Henry Murger
Créé le 1er février 1896 au Teatro Regio à Turin
Roberto Rizzi-Brignoli direction musicale
Jean-Paul Scarpitta mise en scène et décors
Erika Grimaldi Mimi
Rame Lahaj Rodolfo
Eleonora Buratto Musetta
Alik Abdukayumov Marcello
Evgueniy Alexiev Schaunard
Jean Teitgen Colline
Frédéric Goncalves Benoît / Alcindoro
Nikola Todorovitch Parpignol
Laurent Serou Le Sergent
Hervé Martin Le Douanier
Urs Schönebaum lumières
Chœurs de l’Opéra national Montpellier Languedoc-Roussillon
Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon
Nouvelle production
En partenariat avec France Inter
Argument
Acte I
Dans une mansarde au-dessus des toits enneigés de Paris, Marcello essaie de peindre Le passage de la mer
Rouge, tandis que Rodolfo fait semblant de réfléchir sur sa tragédie en vers, alors qu’en réalité il rêvasse en
regardant par la fenêtre (« Questo Mar Rosso »). L’art ne vaut rien lorsqu’il fait froid. Plutôt que de sacrifier
la chaise, objet irremplaçable, Rodolfo allume le feu avec son manuscrit. Leur ami Colline, le philosophe,
revient avec une mauvaise nouvelle : il n’a pas réussi à fourguer ses livres au mont-de-piété. Colline
s’installe à son tour près de la cheminée, mais la poésie s’étiole vite. A cet instant, la porte s’ouvre, laissant
entrer deux garçons de course avec de la nourriture, du vin, des cigarettes et un fagot de bois. C’est le
quatrième compère, le musicien Schaunard qui a décroché un contrat en or chez un Lord anglais : jouer
pour son perroquet, jusqu’à ce que la bête en crève. Après trois jours de vains efforts, il a empoisonné le
pauvre volatile, et raflé ses gages. Mais Schaunard freine la gourmandise de ses amis : la veille de Noël, on
boit chez soi mais on dîne dehors ! Au moment où ils s’apprêtent à sortir, on entend frapper. Désastre !
C’est M. Benoît, le propriétaire, venu réclamer son loyer. On le fait boire, on l’embobine (« Dica,
quant’anni ha »), et lorsqu’il est assez éméché pour injurier sa femme, on feint l’indignation morale en le
jetant dehors. Marcello, Colline et Schaunard filent chez Momus, seul Rodolfo reste encore un peu, pour
terminer son article. Soudain, il entend à nouveau frapper. Cette fois la visite est plus agréable : c’est la
voisine, une jolie grisette. Sa chandelle est morte, elle n’a plus de feu ; de surcroît, elle semble plutôt mal
en point. Rodolfo lui tend la chaise, puis un verre de vin. La crise passée et la bougie allumée, elle est prête
à sortir, lorsqu’elle découvre avoir perdu sa clé, sans doute tombée par terre (« Oh ! Sventata ! Sventata »).
Un soudain courant d’air éteint les deux bougies, laissant les jeunes gens dans l’obscurité. Rodolfo retrouve
tout de suite la clé qu’il n’a pas l’intention de rendre sans gage ; dans le noir, il effleure la main de sa
voisine (« Che gellida manina »). Voilà l’occasion de se présenter : poète, rêveur, millionnaire dans l’âme.
Elle lui répond tout aussi tendrement (« Mi chiamano Mimi »). Elle s’appelle Mimi, elle vit seule dans sa
chambre, et fabrique des fleurs en papier. Nul besoin d’en savoir davantage. Lorsque, dans l’escalier, on
entend les voix des amis qui s’impatientent, Mimi et Rodolfo décident de sortir ensemble, avec un mot à la
bouche : amour.
Acte II
Au quartier Latin, près du café Momus, c’est la cohue des jours de fête (« Arranci, datteri ! »). Marcel,
Schaunard et Colline s’installent à la terrasse d’un café, alors que Rodolfo achète pour Mimi un joli
béguin, avant de la présenter à ses amis : puisqu’il est, lui, poète, et elle la poésie, ils forment un couple
parfait. Passe Parpignol, vendeur de jouets, provoquant l’enthousiasme des enfants et la panique des
parents (« Parpignol ! »). L’idylle de Mimi avec Rodolfo a gâché l’humeur de Marcello qui ne s’est toujours
pas remis d’une histoire ancienne. Et voilà que surgit justement devant le café celle qui en fût l’héroïne, au
bras d’un géronte chargé de paquets. Elle s’appelle Musetta, et traine son Alcindoro comme un chien en
laisse. Apercevant Marcello, elle s’installe à une table voisine et, faisant mine de ne pas le voir, déploie
toute une panoplie de poses provocantes (« Quando me’n vo »), tandis que Marcello résiste, en grinçant des
dents. Mimi n’a pas tardé à s’apercevoir que ces deux-là s’adorent. Ne sachant plus quoi inventer, Musetta
fait semblant d’avoir mal au pied, afin d’envoyer Alcindoro lui chercher une nouvelle paire de bottes. Le
barbon parti, elle se jette dans les bras de Marcello. Profitant du passage d’une retraite militaire, les amis
s’éclipsent, laissant l’addition à Alcindoro.
Acte III
Au petit matin, près de la barrière d’Enfer. Tandis que d’un cabaret tout proche nous provient la voix de
Musetta, les douaniers laissent entrer les balayeurs, les laitières, les paysans. Mimi s’approche, à la
recherche de Marcello qui l’accueille avec surprise. Apprenant que Rodolfo est là, elle refuse d’entrer et
éclate en sanglot : la jalousie de son amant le pousse à la brutaliser, et cette nuit, il s’est enfui de leur
domicile. A l’arrivée de Rodolfo, Mimi se cache. Devant Marcello, le jeune poète accuse Mimi d’être
volage (« Mimi e une civetta »), mais la mine dubitative de son ami le force à tout avouer : l’état de santé de
Mimi s’aggrave chaque jour, et l’idée de la perdre lui est insupportable. Il s’en croit responsable, n’étant
pas en mesure de lui assurer une vie décente. Les sanglots et la toux trahissent la présence de Mimi. Au son
du rire joyeux de Musetta, Marcello, saisi de fureur jalouse, se précipite à l’intérieur du cabaret, laissant
seuls les deux malheureux. Mimi a décidé de partir retrouver sa petite chambre où elle vivait toute seule
(« D’onde lieta usci »), mais Rodolfo parvient à la retenir ; ils décident de rester ensembles jusqu’au
printemps. Pendant qu’ils échangent ces mots tendres, Musetta et Marcello se chamaillent à l’intérieur
(quatuor : « Dunque è proprio finita »).
Acte IV
Nous retrouvons la mansarde du premier acte. Marcello a fini par rompre à nouveau avec Musetta ;
Rodolfo vient de la voir, richement vêtue, dans un coupé, alors que Marcello prétend avoir vu Mimi. Ils ne
peuvent travailler, toujours préoccupés par leurs amours perdues (« O Mimi, tu più non torni »). Entrent
Schaunard et Colline avec un souper royal : du pain et un hareng salé. Pour tromper la fin et le chagrin, ils
font les fous, dansent et jouent, mais rien n’y fait, la réalité refuse de s’en aller. Pire encore, elle frappe à la
porte : c’est Musetta qui a laissé Mimi en bas de l’escalier, la pauvre étant trop faible pour monter toute
seule. Musetta l’a trouvée dans la rue, hagarde : n’y pouvant plus, elle a quitté le petit vicomte qui
l’entretenait, et ne désire plus qu’une chose : mourir auprès de Rodolfo. Ses mains sont si froides qu’elle
rêve d’un manchon. Musetta tend à Marcello ses boucles d’oreilles, pour qu’il fasse venir un docteur,
tandis que Colline est frappé d’une idée : il laissera son vieux manteau au mont-de-piété afin d’offrir à
Mimi le cadeau qu’elle désire (« Vecchia Zimarra »). Mimi et Rodolfo restent seuls (« Son andati ? »). Pour
la dernière fois, ils échangent quelques mots, quelques souvenirs. Schaunard revient au moment où Mimi,
prise d’une toux violente, s’effondre sur l’oreiller. Marcello apporte le médicament ; le docteur ne saurait
tarder. Musetta vient avec le manchon ; Mimi y cache ses mains gelées, et s’endort, tranquille. Musetta
tombe à genoux et prie (« Madame benedetta »). Pris d’un doute, Schaunard regarde Mimi de près ; il ne
lui en faut pas davantage. Il avertit Marcello. Revient Colline, avec l’argent de son manteau qu’il tend à
Musetta. C’est alors que Rodolfo, croisant le regard fuyant de Marcello, finit par comprendre. Avec un cri
déchirant, il se jette sur le corps de Mimi.
Extrait de Mille et un opéras, de Piotr Kaminski, éd. Fayard – Les indispensables de la musique
Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique
Genèse de l’œuvre
Puccini/Leoncavallo
Puccini venait de faire représenter Manon Lescaut, avec un grand succès, au Teatro Regio de Turin, et
travaillait avec Giacosa et Illica à une adaptation des Scènes de la vie de bohème de Murger. Illica en avait
terminé la première ébauche, Giacosa en avait commencé la versification.
Le 19 mars 1893, Puccini rencontra dans un café milanais son ami Leoncavallo qui, lui aussi, avait
collaboré au livret de Manon Lescaut. Il mentionne qu’il travaille à un nouvel opéra qui s’appellera La
Bohème ; Leoncavallo, furieux, rappelle à Puccini qu’il lui avait déjà proposé ce sujet et qu’après son refus,
il avait lui-même entrepris d’en écrire la musique. Il s’ensuivit alors une querelle qui s’étendit jusqu’aux
journaux. Dès le lendemain, Il Secolo, qui appartenait à Sonzogno, l’éditeur de Leoncavallo, annonça les
intentions de celui-ci. De son côté, le Corriere della sera fit part des projets de Puccini.
Aucun des deux compositeurs ne renonça. Alors Puccini déclara en substance : « Que Leoncavallo écrive son
opéra, j’écrirai le mien, et le public alors décidera ». Ce qu’il fit. L’opéra de Leoncavallo créé à la Fenice, le 6
mai 1897, ne vit pas se renouveler le triomphe de Paillasse, représenté l’année précédente. Il tomba dans
un oubli quasi-total.
Pendant un temps, peut-être stimulé par sa rivalité avec Leoncavallo, d’autant plus qu’elle était publique,
Puccini travaille avec fièvre et acharnement. Mais bientôt son intérêt et son ardeur se relâchent.
En fait, son choix n’était pas encore vraiment fixé. « Il me faut mettre en musique des passions véritables, des
passions humaines, l’amour et la douleur, le sourire et les larmes et que je les sente, qu’elles m’empoignent,
qu’elles me secouent. C’est alors seulement que je peux écrire de la musique et c’est pourquoi je suis si exigeant et
circonspect sur le choix d’un sujet. Me mettre à travailler sur ce que je n’aime pas, c’est une misère ». Il envisagea
alors de mettre en musique La Louve, une pièce du romancier Giovanni Verga dont la nouvelle Cavalleria
Rusticana avait déjà inspiré Mascagni. Au printemps 1894, il se rendit même à Catane pour étudier de près
le folklore sicilien et s’entretenir longuement avec Verga.
Au retour, peut-être après une conversation avec Blandine Gravina (fille de Hans de Bülow et de Cosima
Liszt), qui le dissuade de s’attaquer à un sujet où la sensualité se mêle à la religion, il écrit à Ricordi qu’il
abandonne La Louve car il n’y voyait pas « un seul personnage lumineux ». En fait, ce drame trop noir et
trop tragique, cette passion sans mesure, implacable ne l’inspirait pas : « Si je ne suis pas ému, si le livret ne
me touche pas le cœur, s’il ne me fait ni rire ni pleurer, s’il ne m’exalte, ni me secoue, il n’y a rien à faire, ce n’est
pas une chose pour moi ».
Puccini/Giacosa, Illica
Illica
Puccini revint alors définitivement à La Bohème. On a dit que La Bohème était un opéra pour les gens qui
se souviennent d’avoir été amoureux. Puccini retrouva chez Murger sa propre jeunesse. Quand il faisait ses
études au conservatoire de Milan, il avait vécu avec Mascagni, dans la gaieté et l’insouciance, sa propre
« vie de bohème ».
Tous deux connaissaient toutes les ruses pour éviter les créanciers et Puccini avait même vendu son
manteau au cours d’un hiver très rude, mais dans des circonstances moins dramatiques que Colline,
puisque c’était, dit-on, pour inviter une danseuse à dîner.
S’il était touché par le désarroi de ces jeunes gens qui ne savent ni s’aimer ni se quitter, il était
particulièrement ému par Mimi. Il réclamait sans cesse à ses librettistes de nouvelles scènes « avec plus de
sentiments pour Mimi ».
« Je ne suis pas fait pour les actions héroïques. J’aime les êtres qui ont un cœur comme le nôtre, qui sont fait
d’espérances et d’illusions, qui ont des éclairs de joie et des heures de mélancolie, qui pleurent sans hurler et
souffrent avec une amertume toute intérieure… » Grâce aux nombreux remaniements de Giacosa et Illica et
au génie dramatique de Puccini, tous les personnages de La Bohème finiront par correspondre à cette
définition.
« Je suis un homme de théâtre, je fais du théâtre, et je suis un visuel. Je vois les personnages, les couleurs et les
gestes des personnages. Si, enfermé chez moi, je ne réussis pas à voir une scène, plantée là devant moi, je n’écris
pas, je ne peux pas écrire une seule note. » C’est pourquoi la mise en place du livret fut si tumultueuse.
Puccini avait une intuition théâtrale si juste, une vision si exacte de ce qu’il désirait, qu’il était
obligatoirement exigeant, jusqu’à la tyrannie avec ses librettistes et qu’il ne pouvait, comme il le dit un
jour : « accepter de dictature de personne ». « Quand j’écris un opéra, je cherche avant tout à être sincère, à être
vrai, et à donner de toutes mes forces et par tous les moyens, le sens de la vie. »
Mais Giuseppe Giacosa (1847-1906) et Luigi Illica (1857-1919) étaient, à cette époque, deux auteurs
dramatiques en vogue – leurs pièces se jouent d’ailleurs encore maintenant en Italie. Illica avait écrit, entre
autres, l’Ereditae del Felis qui fut reprise il y a quelques années par Giorgio Strehler au Piccolo Teatro de
Milan, et était aussi l’auteur de plusieurs livrets dont la Wally de Catalani. Exaspérés par les exigences de
Puccini, ils menaçaient sans cesse de rompre leur contrat et Ricordi avait la plus grande peine du monde à
les retenir. Le troisième acte fut en particulier un sujet de désaccord. Puccini ne l’aimait pas, il aurait
souhaité un canevas lui « permettant de s’exprimer d’une manière un peu plus lyrique ». De plus, il
s’opposait à ce que la séparation de Rodolphe et Mimi soit représentée sur la scène.
De janvier à juin 1895, Puccini orchestre le premier acte. Les deux actes suivants furent écrits très
rapidement et achevés six semaines seulement avant la première.
Toute l’élaboration de La Bohème se fit, sur les conseils de Ricordi, dans le plus grand secret : « Si avoir
confiance est bien, ne pas avoir confiance est mieux. Un mot échappé par inadvertance peut servir de guide à ton
rival en Bohème et lui donner des idées pour son livret. Ce serait une réelle malchance. »
Durant toute cette période, Puccini s’était retiré à Torre del Lago, près de Viareggio, où il partageait son
temps entre la composition et la chasse. Ses amis et lui avaient fondé un club qu’ils avaient appelé « La
Bohème » et dans lequel ils avaient instauré des règles dans le genre de celles qu’on trouve chez Murger :
« le silence est interdit », « le trésorier est autorisé à s’enfuir avec la caisse » et encore « il est interdit de
jouer aux cartes honnêtement ». C’est dans ce club qu’il écrivit tout son opéra, près de ses amis qui
discutaient et jouaient aux cartes dans la pièce voisine. Il avait besoin de sentir l’animation autour de lui
pour travailler. La seule scène qu’il écrivit dans le recueillement fut la mort de Mimi : « Je dus me lever et
me tenant debout au milieu de la pièce, seul dans le silence de la nuit, je me mis à pleurer comme un enfant. »
Il aura fallu près de trois ans de collaboration orageuse – il avait maintenant 38 ans – pour que Giacosa,
Illica et Puccini parviennent à cet équilibre dramatique, à cette spontanéité et à cette « simplicité qui est la
chose la plus compliquée » que Puccini désirait tant.
Puccini/Toscanini
Le choix du théâtre où devait avoir lieu la première pose de nouveaux problèmes. Ricordi envisageait le
Teatro Regio de Turin, où venaient de s’achever, avec un immense succès, les représentations de Manon
Lescaut, mais Puccini reprochait à ce théâtre son acoustique « morte ». Il aurait préféré le Costanzi de
Rome ou le San Carlo de Naples, le plus loin possible des cabales et des critiques milanais ; il désirait aussi
que la direction d’orchestre soit assurée par le célèbre Leopoldo Mugnone. Ricordi eut gain de cause. La
Bohème fut représentée pour la première fois le 1er février 1896 au Teatro Regio, et sous la direction de son
jeune chef, Arturo Toscanini, alors âgé de 29 ans et récemment attaché à ce théâtre. Cesira Ferrani, qui
avait déjà créé le rôle de Manon, fût Mimi, tandis qu’Evan Gorgo devint Rodolphe.
Les répétitions s’étaient déroulées dans l’enthousiasme, Puccini ne tarissait pas d’éloges sur Toscanini ; il le
trouvait « extraordinaire », il admirait sa gentillesse et, même s’il devait écrire « nous travaillons comme ses
chiens », sa force de travail. Puccini écrivait : « l’orchestration est vraiment prodigieuse. Je prévois un grand et
sensationnel succès si les artistes sont à la hauteur. »
Page de couverture de la première édition de la partition de La Bohème, aux éditions Ricordi
Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique
Mais, malgré Toscanini et la qualité de l’interprétation, l’accueil fut très réservé. Quelques années plus
tard, Puccini résuma ainsi cette soirée : « Le public a bien accueilli La Bohème. Les critiques, le lendemain en
parlaient en mal. Mais, ce même soir, dans les couloirs et les coulisses, j’ai entendu chuchoter autour de moi :
Pauvre Puccini !, cette fois-ci, il s’est fourvoyé, cet opéra ne durera pas longtemps ! ». Et il confiera aussi que « le
cœur complètement brisé », il avait ressenti de la tristesse, de la mélancolie et une envie de pleurer ».
Seulement dix semaines après la création, le 13 avril 1897 à Palerme où l’enthousiasme fut si grand que le
public refusa de quitter la salle, La Bohème commençait sa triomphale carrière.
Par Janine Bensaïd, Avant-scène Opéra La Bohème (mars-avril 1979), éd. Butterfly Lavelli.
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Que de misère !
Le premier tableau de La Bohème décrit un monde de grande pauvreté. Les héros, artistes désargentés ou
ouvrière, vivent apparemment dans la faim et le froid.
Il est vrai que le XIXe siècle n’a pas été une période faste pour tout le monde. La Révolution industrielle
qui permet une énorme croissance de la production et demande une main d’œuvre nombreuse a enrichi les
patrons d’industrie, mais pas les ouvriers. Le préfet du Nord déclarait en 1834 : « Plus un pays possède
d’entrepreneurs riches, plus il renferme d’ouvriers pauvres ».
En effet, beaucoup de personnes sont parties des campagnes pour répondre aux besoins d’embauche. Le
salaire dépend de l’offre et de la demande, or il y a pléthore d’ouvriers, donc on peut les payer moins cher ;
c’est même un élément essentiel du bon fonctionnement du capitalisme.
Des économistes, des médecins, des ingénieurs se sont inquiétés de la misère qui en résultait et de
nombreuses enquêtes décrivent les conditions de vie et de travail dans le peuple des villes.
L’industrie emploie des hommes mais aussi des femmes et des enfants qui représentent 75 % de la main
d’œuvre de l’industrie textile et sont beaucoup moins payés que la gent masculine : « Il y a parmi eux (les
ouvriers) une multitude de femmes pâles, maigres, marchant pieds nus au milieu de la boue…et un nombre
encore plus considérable d’enfants » (enquête du docteur Louis René Villermé dans les années 1830).
Beaucoup d’ouvriers travaillent « en chambre » dans le textile, c'est-à-dire chez eux.
Mimi, l’héroïne de l’opéra partage son temps de travail entre divers lieux :
Sur de la toile, sur de la soie,
Je brode chez moi ou dehors.
(Traduction d’un extrait de l’air « Mi chiamano Mimi » au Ier acte)
Les enquêteurs constatent tous les mêmes maux : les faibles salaires (qui baissent beaucoup entre 1826 et
1846) ont comme conséquence une nourriture insuffisante et un logement insalubre. L’ingénieur Frédéric
Le Play (un des premiers sociologues du monde ouvrier) a longuement étudié les conditions de vie
d’une lingère de Lille, en 1858. Son logis est constitué d’une pièce de 10m2, peu meublée, avec un poêle,
souvent éteint faute de combustible ; une couverture de coton est censée la protéger du froid la nuit, ses
meilleurs vêtements sont au mont-de-piété. Elle a du mal à joindre les deux bouts, contracte de petites
dettes pour acheter son matériel (aiguilles, ciseaux, coton). Comme Mimi, elle travaille chez elle à la pièce :
elle monte des chemises d’hommes et tire des fils (réservé aux meilleures ouvrières). Affaiblie par excès de
travail, les souffrances physiques, elle reste malgré tout gaie.
On croirait lire une description de la vie de Mimi :
Depuis une petite chambre blanche,
Je regarde les toits et le ciel.
Mais lorqu' arrive le dégel,
Le premier soleil est à moi
(Autre extrait de « Mi chiamano Mimi »).
Mimi vit donc sous les toits, dans ce que l’on appelait une chambre de bonne. Ces minuscules
appartements se situaient au dernier étage des immeubles parisiens, sans aucune isolation, donc glacés en
hiver et suffocants l’été.
Quand Mimi vient chercher du feu chez ses voisins, elle retrouve une situation qui lui est familière : pas
d’argent pour acheter de quoi se chauffer.
Pour subvenir, certaines filles ont recours à la prostitution. Rappelons-nous le poème des Châtiments de V.
Hugo :
Et (le père…) n'ose, l'œil fixé sur le pain qu'elle apporte,
Lui dire : D'où viens-tu ?
La recherche d’un protecteur peut être une solution pour vivre mieux : c’est ce que tente Mimi après avoir
quitté Rodolfo. Musetta est également coutumière du fait.
Dans plusieurs romans du XIXe siècle, des étudiants, relativement aisés, vivent avec des jeunes femmes
pauvres : ainsi dans Les Misérables, Fantine. Le malheur les accable le jour où elles sont abandonnées avec
un enfant (Cosette, dans ce roman) ; la société les rejette : ce sont des « filles perdues ». Fantine succombe
dans la misère.
Mimi meurt de la tuberculose. Cette maladie, connue depuis l’Antiquité, a eu une très forte expansion du
milieu du XVIIIe siècle jusqu’au début du XXe siècle. On peut comprendre que notre héroïne, vivant dans
le froid, mal nourrie, épuisée par le labeur ait été plus fragile.
Mais il n’est pas prouvé que les milieux pauvres soient plus affectés que les autres par cette affection. Une
autre héroïne d’opéra y succombait, Violetta dans La Traviata. Pourtant, sa situation matérielle était
nettement plus confortable que celle de Mimi.
Parmi les victimes de cette maladie, on trouve d’ailleurs des hommes illustres, au niveau de vie aisé, par
exemple : le violoniste Niccolo Paganini (1782-1840), le compositeur Frédéric Chopin (1810-1841),
l’écrivain Alfred de Musset (1810-1847).
De nombreuses œuvres, romans, poèmes, pièces de théâtre s’inspirent de la condition ouvrière et tracent
un tableau misérabiliste de ce milieu. Ces œuvres ont tendance à en donner une vision très sombre qui ne
séduit pas toujours les lecteurs. Les Misérables sont, par exemple, très critiqués par l’intelligentsia qui
reproche à V. Hugo sa démesure, son goût de la prédication, la description doloriste des misères du
peuple.
Les peintres ne sont pas en reste. Nous en avons quelques illustrations au musée Fabre. La peinture
s’intéresse, elle aussi, à ce qu’on appelle la question sociale. Elle en fait souvent une description
misérabiliste et moralisatrice.
Ainsi Nicolas Tassaert (1800-1874) dans deux tableaux de 1852 évoque des situations que nous avons
décrites plus haut.
Dans le premier, c’est le rejet par la bonne société d’une jeune femme enceinte : L’Abandonnée. La
malheureuse reste à la porte d’une église où se déroule le mariage, que l’on suppose être celui de son
séducteur.
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Dans le second, intitulé Le retour au village, une personne élégante, sans doute entretenue par un riche
protecteur, rend visite à sa mère malade. L’intérieur du logis illustre la pauvreté de ses origines.
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Les artistes qui choisissent ce type de sujets le font parfois pour attirer l’attention de la bourgeoisie sur les
misères du peuple. Ils peuvent avoir, eux-mêmes, connu des périodes difficiles, comme l’évoque l’opéra.
Le XIXe siècle n’a pas été tendre avec les artistes qui innovaient. Pensons aux Impressionnistes, longtemps
tenus à l’écart, considérés comme des peintres maudits. Leur talent n’a été reconnu que tardivement. Ceux
qui étaient issus de familles aisées, comme Manet, Bazille, Cézanne, s’en sortaient. Mais Monet a
commencé sa carrière dans la misère. Renoir a du économiser pendant des années sur son salaire d’artisan
(peintre sur porcelaine) avant d’entrer dans un atelier de peinture.
La Bohème évoque la difficile condition de ces peintres (Marcello) et écrivains (Rodolfo) dont le talent
n’est pas reconnu. Il est vrai que dans les années 1830, il y a eu une vague de suicides de littérateurs criblés
de dettes, accusant par leur geste, la société d’être indifférente à leur sort. Les années passant, le malaise
qu’expriment Charles Baudelaire ou Gérard de Nerval ressemble plus à une posture d’artiste qui
revendique sa souffrance avec une distance de dérision.
Notons que lorsque La Bohème est écrite, la période la plus sombre du XIXe siècle est achevée.
La condition ouvrière s’est améliorée, déjà parce que les salaires ont beaucoup augmenté. Les pouvoirs
publics ont peu à peu mis en place une législation pour atténuer les problèmes sociaux. Et les artistes
novateurs ont vu leur talent récompensé par le succès.
Mais c’est tellement plus émouvant de montrer les malheurs de ces charmants jeunes gens, surtout quand
la musique exalte encore plus leurs souffrances et le courage qu’ils mettent à affronter ces épreuves !
Monique Morestin
La vie de bohème
En 1851, Henry Murger publie Scènes de la vie de bohème. Cette œuvre donnera lieu à de nombreuses
adaptations tant musicales que théâtrales et cinématographiques.
La bohème tient son origine de l’antiquité et se déploie au fil des siècles.
« Aujourd’hui comme autrefois, tout homme qui entre dans les arts, sans autre moyen d’existence que l’art luimême, sera forcé de passer par les sentiers de la Bohème. [ …]La Bohème, c’est le stage de la vie artistique ; c’est
la préface de l’Académie, de l’Hôtel-Dieu ou de la Morgue. […]Nous ajouterons que la Bohème n’existe et n’est
possible qu’à Paris. »
Murger décrit trois sortes de bohèmes : la bohème ignorée, les amateurs et la vraie bohème.
« Au reste, ils sont logiques dans leur héroïsme insensé ; ils ne poussent ni cris ni plaintes, et subissent passivement
la destinée obscure et rigoureuse qu’ils se font eux-mêmes. Ils meurent pour la plupart, décimés par cette maladie
à qui la science n’ose pas donner son véritable nom, la misère. S’ils le voulaient cependant, beaucoup pourraient
échapper à ce dénouement fatal qui vient brusquement clore leur vie à un âge où d’ordinaire la vie ne fait que
commencer. Il leur suffirait pour cela de quelques concessions faites aux dures lois de la nécessité, c’est-à-dire de
savoir dédoubler leur nature, d’avoir en eux deux êtres : le poète, rêvant toujours sur les hautes cimes où chante le
chœur des voix inspirées ; et l’homme, ouvrier de sa vie sachant se pétrir le pain quotidien. Mais cette dualité,
qui existe presque toujours chez les natures bien trempées dont elle est un des caractères distinctifs, ne se rencontre
pas chez la plupart de ces jeunes gens que l’orgueil, un orgueil bâtard, a rendus invulnérables à tous les conseils
de la raison. Aussi meurent-ils jeunes, laissant quelquefois après eux une œuvre que le monde admire plus tard,
et qu’il eût sans doute applaudie plus tôt si elle n’était pas restée invisible. »
Les personnages du livre
Ils sont inspirés de personnages réels et ont tous entre 20 et 30 ans.
Rodolphe, Murger lui-même, est un poète. Son ami Alexandre Schanne devient Schaunard, musicien.
Marcel (François Tabar) est peintre. Un sculpteur, Jacques (Joseph Desbrosses) ; le journaliste Carolus
Barbemuche (Charles Barbara) et le philosophe Colline (Jean Wallon).
Les scènes racontées peuvent être vues comme une autobiographie de l’auteur.
L’œuvre retrace la vie et les amours de ces jeunes artistes, en plusieurs chapitres, publiés dans une revue
littéraire de l’époque : Le Corsaire.
Ce n’est que plus tard que Murger en fera un roman, regroupant les scènes les plus emblématiques.
Le personnage principal, Rodolphe, tombe amoureux de Mimi :
« Mimi était une charmante femme et d’une nature qui convenait particulièrement aux sympathies plastiques et
poétiques de Rodolphe. Elle avait vingt-deux ans ; elle était petite, délicate, mièvre. Son visage semblait l’ébauche
d’une figure aristocratique ; mais ses traits, d’une certaine finesse et comme doucement éclairés par les lueurs de
ses yeux bleus et limpides, prenaient en de certains moments d’ennui ou d’humeur un caractère de brutalité
presque fauve, où un physiologiste aurait peut-être reconnu l’indice d’un profond égoïsme ou d’une grande
insensibilité. Mais c’était le plus souvent une charmante tête au sourire jeune et frais, aux regards tendres ou
pleins d’impérieuse coquetterie. Le sang de la jeunesse courait chaud et rapide dans ses veines, et colorait de
teintes rosées sa peau transparente aux blancheurs de camélia. Cette beauté maladive séduisait Rodolphe, et il
passait souvent, la nuit, bien des heures à couronner de baisers le front pâle de sa maîtresse endormie, dont les
yeux humides et lassés brillaient à demi clos sous le rideau de ses magnifiques cheveux bruns. Mais ce qui
contribua surtout à rendre Rodolphe amoureux fou de Mademoiselle Mimi, ce furent ses mains que, malgré les
soins du ménage, elle savait conserver plus blanches que les mains de la déesse de l’oisiveté. Cependant, ces mains
si frêles, si mignonnes, si douces aux caresses de la lèvre, ces mains d’enfant entre lesquelles Rodolphe avait déposé
son cœur de nouveau en floraison, ces mains blanches de Mademoiselle Mimi devaient bientôt mutiler le cœur
du poète avec leurs ongles roses. »
Les amoureux décident de se séparer, ce qui rend Rodolphe très malheureux :
« Rodolphe restait alors pendant des heures entières comme pétrifié dans une immobilité hébétée. […] Mais voici
qu’au milieu de cette existence régulière et tranquille apparaissait brusquement la figure d’une femme. »
Dans l’œuvre de Murger, Mimi meurt à l’hôpital de la Piété. C’est un ami de Rodolphe qui lui annonce la
mort de sa bien-aimée par une lettre. Mais il y a erreur. Mimi est vivante et le poète s’apprête à aller la
voir. Arrivé devant l’hôpital :
« Rodolphe attendit un quart d’heure sous le vestibule. Quand l’interne revint vers lui, il lui prit la main et ne
lui dit que ces mots :
- Mon ami, supposez que la lettre que je vous ai écrite il y a huit jours était vraie.
- Quoi ! dit Rodolphe, en s’appuyant sur une borne. Mimi…
- Ce matin, à quatre heures.
- Menez-moi à l’amphithéâtre, dit Rodolphe, que je la voie.
- Elle n’y est plus, dit l’interne. Et, montrant au poète un grand fourgon qui se trouvait dans la cour, arrêté
devant un pavillon au-dessus duquel on lisait : Amphithéâtre, il ajouta : Elle est là.
C’était, en effet, la voiture dans laquelle on transporte dans la fosse commune les cadavres qui n’ont pas été
réclamés.
- Adieu, dit Rodolphe à l’interne.
- Voulez-vous que je vous accompagne ? proposa celui-ci.
- Non, fit Rodolphe en s’en allant. J’ai besoin d’être seul. »
Dans l’œuvre de Puccini, nous retrouverons tous les protagonistes de Murger ; et même si quelques
épisodes seront écourtés et la fin quelque peu modifiée, l’histoire de Mimi, Rodolphe, Marcello, Musette,
Colline et Schaunard sera respectée et illustrée du vérisme magnifique du compositeur.
Les personnages et leurs voix
Mimi – Soprano
Musetta – Soprano
Rodolfo,
Rodolfo poète – Ténor
Marcello,
Marcello peintre – Baryton
Schaunard,
Schaunard musicien – Baryton
Colline,
Colline philosophe – Basse
Benoît,
Benoît propriétaire – Basse
Alcindoro,
Alcindoro conseiller d’état – Basse
Parpignol,
Parpignol marchand ambulant – Ténor
Clés d’écoute
Début de l’opéra : présentation des personnages et de leurs leitmotive
Les garçons :
L’opéra ne possède ni ouverture, ni introduction. L’action démarre tout de suite, sur un premier motif qui
est celui des quatre amis réunis. Son caractère farceur et amusé, à l’allure de scherzo, est le thème de la
« bohème ». Nous le retrouverons quasiment chaque fois que les garçons seront dans la mansarde, sans les
femmes. Il se déclinera aussi suivant qu’il soit chanté ou joué par l’orchestre.
Certaines phrases sont plus chantées, plus « lyriques » car les personnages jouent des rôles pour oublier la
misère. Contraste avec des moments plus intimes de l’opéra où les protagonistes sont mis à nus.
Le thème de Colline, le philosophe, reflète bien son emploi. Il est exposé, imposant et sévère grâce aux
cors, altos et violoncelles dès son arrivée à la mansarde.
A celui-ci se mêle celui de Schaunard, le musicien. Son thème est beaucoup plus chantant, sautillant et
enjoué, à l’image du personnage mais aussi parce que c’est le seul à apporter une bonne nouvelle et des
victuailles dans la bande.
Lorsque Schaunard annonce le programme de la veille de Noël, on entend déjà, à l’orchestre, les chants
qui seront chantés par le chœur au deuxième acte.
A cette présentation des personnages masculins succède l’arrivée du propriétaire Benoît, véritable réussite
humoristique pour Puccini. La caricature est à son comble. Le scherzo prend fin avec son départ. Les
jeunes gens sont parvenus à ruser pour ne pas payer leur loyer et se préparent pour aller au quartier Latin.
L’atmosphère change du tout au tout, au moment où Rodolfo prétend devoir rester pour son article. C’est
le thème du Rodolfo « réaliste » qui apparait joué par les violons.
La transition avec la scène suivante est habilement menée par une musique humoristique de coulisse.
Colline tombe dans les escaliers, ce qui laisse place à une dernière pique amicale de la part de Rodolfo.
Mimi :
L’entrée de Mimi se fait dans l’intimité la plus totale. Précédée d’une phrase a capella du poète, la première
« intervention » de Mimi n’est pas dans sa voix, mais dans son timide frappement à la porte. Elle ne
répondra pas à la première question qui lui est posée « Chi è là ? », mais s’excusera, comme en avance, des
tords qu’elle pourra causer.
Les premières phrases de leur rencontre sont chantées sur une seule note, laissant l’orchestre présenter
Mimi dans un crescendo émouvant, synonyme du trouble des deux futurs amants.
Le premier malaise de Mimi arrive vite, illustré par le thème suivant, expression du destin tragique de
l’héroïne.
Les personnages sont alors présentés. Le décor est planté.
Deux grands airs pour faire connaissance,
connaissance, un duo pour s’aimer
Alors que Mimi prétend vouloir partir, elle réalise qu’elle a perdu sa clé. Ce délicieux moment, durant
lequel Rodolfo feint de ne rien trouver et éteint sa bougie délibérément, sert d’introduction à deux grandes
pages de l’art lyrique. Deux airs, dans lesquels les jeunes gens se présentent dans la plus grande simplicité.
Rodolfo :
Che gelida manina !
Se la lasci riscaldar.
Cercar che giova ? Al buio non si trova.
Ma per fortuna è una notte di luna,
E qui la luna l’abbiamo vicina.
Aspetti, signorina,
Le dirò con due parole
Chi son, che faccio e come vivo. Vuole ?
Chi son ? Sono un poeta.
Che cosa faccio ? Scrivo.
E come vivo ? Vivo.
In povertà mia lieta
Scialo da gran signore
Rime ed inni d’amore.
Per sogni, per chimere
E per castelli in aria
L’anima ho milionaria.
Talor dal mio forziere
Ruban tutti I gioielli
Due ladri : gli occhi belli.
V’entrar con voi pur ora,
Ed i miei sogni usati
E i bei sogni miei
Tosto son dilegualti.
Ma il furto non m’accora,
Poiché vi ha preso stanza
La dolce speranza !
Or che mi conoscete,
Parlate void deh! Parlate. Chi siete ?
Via piaccia dir !
Rodolphe :
Quelle petite main gelée,
Laissez-moi vous la réchauffer.
Chercher, à quoi bon ? Dans le noir, on ne peut
trouver.
Mais par bonheur c’est une nuit de clair de lune,
Et, ici, la lune, nous l’avons tout près de nous.
Attendez, mademoiselle,
Et je vous dirai en deux mots
Qui je suis, ce que je fais, comment je vis. Vous
voulez bien ?
Qui je suis ? je suis poète.
Ce que je fais ? j’écris.
Et comment je vis ? je vis.
Dans ma joyeuse pauvreté,
Je prodigue en grand seigneur
Rimes et hymnes d’amour.
De par mes rêves et mes chimères
Et mes châteaux bâtis en l’air,
Mon âme à moi est millionnaire.
Mais voilà que de mon coffre
Tous les joyaux me sont venus dérober
Deux voleurs : ces beaux yeux là,
Qui, en entrant à l’instant avec vous,
Ont eu tôt fait de dissiper
Et mes songes familiers
Et mes songes les plus doux !
Mais ce larcin ne saurait m’affliger,
Puisque l’espérance
Y a pris place !
A présent que vous me connaissez,
Parlez à votre tour, de grâce, parlez. Qui êtes-vous ?
Dites, s’il vous plaît
Rodolfo commence. Ce « Che gelida manina » a contribué au succès de nombreux ténors tels que
Pavarotti, Alagna, Domingo. Il requiert une grande générosité vocale, une ligne de chant parfaite et une
sensibilité hors du commun. En trois minutes, Mimi tombe amoureuse… l’auditeur aussi.
Pour le décrire, reprenons les mots d’André Gauthier, dans l’Avant-scène Opéra :
« … on peut distinguer trois sections :
I.
Un andante affettuoso dont il faut remarquer le début (presque en récitatif et dont la ligne vocale
est soutenue par les cordes en sourdine)
II.
III.
et isoler les mesures citées à la fin de l’acte et, à plusieurs reprises, à la fin du quatrième. La
simplicité de sa ligne, infléchie de ré bémol à si bémol mineur, en fait un exemple caractéristique
du mélisme d’émotion cher à Puccini et qui semble appeler les raffinements d’instrumentation. Il
ne s’en privera pas dès les premières expositions et notamment dans la reprise textuelle qu’en propose
la harpe avec des notes d’agréments à l’octave ;
Un andante sostenuto, puis lento, sur le thème du poète et plein de cette exubérance lyrique qu’il
apporte à l’évocation de son état et de ses rêves ;
Un thème également large et diatonique, très italien, symbolisant par son ardeur passionnée
l’amour qui va unir les deux protagonistes :
On y retrouvera les changements de figures rythmiques et les triolets capiteux qui se retrouvent, du
reste, plus ou moins, dans toutes les interventions de Rodolphe. »
Mimi se présente à son tour :
Mimi :
Mimi :
Si.
Mi chiamano Mimi,
Ma il moi nomme è Lucia.
La storia mia
E breve. A tela o a seta
Ricamo in casa e fuori…
Son tranquilla e lieta
Ed è mio svago
Far gigli e rose.
Mi piaccion quelle cose
Che han si dolce malia,
Che parlano d’amor, di primavere,
Che parlano di dogni e di chimere,
Quelle cose che han nome poesia…
Lei m’intende ?
Mi chiamano Mimi,
Il perché non so.
Sola, mi fo
Il pranzo da me stessa.
Non vado sempre a messa,
Ma prego assai il Signore.
Vivo sola, soletta
Là in una bianca camaretta :
Guardo sui tetti e in cielo ;
Ma quando vien lo sgelo
Il primo sole è mio
Il primo bacio dell’aprile è mio !
Il primo sole è mio !
Germoglia in un vaso una rosa…
Foglia a foglia la spio !
Cosi gentile
Il profumo d’un fiore !
Ma i fior ch’io faccio, ahimè ! non hanno odore.
Altro di me non le saprei narrare.
Sono la sua vicina
Che la vien fuori d’ora a importunare.
Oui.
On m’appelle Mimi,
Mais mon nom est Lucie.
Mon histoire
Est brève : sur toile ou sur soie
Je brode chez moi et au dehors.
Je vis tranquille et heureuse,
Et mon plaisir
Est de faire des lys et des roses.
J’aime ces choses-là
Dont le charme est si doux,
Qui vous parlent d’amour, de printemps ;
Qui vous parlent de rêves, de chimères,
Ces choses qui ont nom poésie.
Vous me comprenez ?
On m’appelle Mimi,
Pourquoi, je ne sais.
Seule je dîne
De ce que j’ai, de mes mains, préparé.
Je ne vais pas toujours à la messe,
Mais je prie bien des fois le Seigneur.
Je vis seule, seulette,
Là, dans une blanche chambrette ;
Ma fenêtre ouvre sur les toits et en plein ciel,
Mais quand vient le dégel,
Le premier soleil est à moi ;
Le premier baiser d’avril est à moi !
Le premier soleil est à moi !
Dans un vase éclot une rose ;
Feuille après feuille je la guette !
C’est si doux
Le parfum d’une fleur.
Mais les fleurs que je fais, hélas ! n’ont pas d’odeur.
De moi, je ne saurais vous conter rien de plus :
Je suis votre voisine
Qui, à une heure indue, vient vous importuner.
Son air est introduit par un simple mi bécarre et débute avec le thème que nous avons déjà entendu dès
son arrivée dans la mansarde, joué à l’orchestre.
Un second épisode dans cet air débute lorsqu’elle évoque ce qu’elle aime « Mi piaccion quelle cose », sur un
phrasé lyrique, accompagné par l’orchestre en syncope. Nous remarquerons la discrétion de l’orchestre sur
tout le début de l’air de Mimi.
Lorsque Mimi évoque le printemps, la flûte esquisse le chant des oiseaux.
Avant de reprendre sa présentation, bref retour sur le premier thème de l’air.
S’en suit un passage quasi scherzando dans lequel elle évoque sa vie tranquille et solitaire.
Un grand élan lyrique est alors engagé, dans lequel elle va s’approprier avec beaucoup de poésie, la beauté
des premières fleurs du printemps. Nous entendons alors l’orchestre, beaucoup plus soutenu, mais en
decrescendo dès qu’elle annonce avec regret que ces fleurs n’ont pas d’odeur. Rapide retour à l’intimité,
avec un quasi parlando pour conclure ce portrait fragile et ravissant de Mimi, encore toute gênée d’avoir
importuné son voisin.
Les trois amis de Rodolfo se font entendre, impatients, en coulisse. Le premier thème de l’opéra (celui de
la bohème) vient perturber le doux entretien des deux amoureux. Mais pris d’une passion évidente et
soudaine, ils chanteront leur grand duo amoureux.
Le duo commence par un grand élan lyrique, engagé par Rodolfo. Mimi se joint à cette envolée,
s’abandonnant au destin amoureux, sur le thème que nous avons entendu dans l’air de Rodolfo (« Talor
dal moi forziere »), et qui symbolisera l’amour.
L’intimité revient très vite, puisque Mimi proposera timidement à Rodolfo de l’accompagner dehors. Elle
ose à peine parler et l’orchestre se tait alors pour la laisser murmurer.
Le mouvement calmo qui suit introduit leur départ au quartier latin. Nous entendons encore le thème de
Mimi, furtivement joué par le hautbois.
Le duo se termine avec la reprise du premier thème de l’air de Rodolfo (« Che gelida manina ! »).
Les deux amoureux d’éloignent et chantent les derniers mots de leur duo en coulisse : Amour !
L’euphorie de Noël dans le deuxième acte
L’acte II s’ouvre sur le thème que nous avions entendu dans le récit de Schaunard au premier acte. Mais
cette fois, il est vaillamment exposé par trois trompettes, puis par le chœur, représentant les marchands et
la foule du quartier Latin.
On retrouve les protagonistes en quête de marchandises diverses, dans des apartés habilement liés au thème
de la promenade. Les caractères (musicalement évoqués dans l’acte I) se superposent à cette nouvelle
atmosphère.
La promenade est ornée d’un petit menuet grisant, joué par la flûte, les clarinettes et les violons en
pizzicati.
Cette scène est particulièrement riche et montre le génie de Puccini pour les tableaux grandioses. Voici ce
qu’en dit André Gauthier, dans l’Avant-scène opéra :
« Au milieu de sa diversité, l’ensemble conserve une transparence qui en dit long sur la maîtrise du compositeur
jouant non plus dans le registre d’intimité mélancolique auquel on a trop souvent limité son génie, mais au cœur
des éléments du grand opéra traditionnel. Cette habileté à mettre en scène une foule bigarrée et joyeuse qui
annonce déjà les vastes tableaux de Turandot éclatera dans les ensembles mouvants de La Fille du Far-West et
de Gianni Schicchi. »
Café de Montmartre, S. Rusiñol, 1890
Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique
Les amis se regroupent au café Momus et Rodolfo présente Mimi. C’est le moment de laisser la place au
lyrisme, avec une mélodie composée d’un élan ascendant et d’une conclusion plus calme et descendante,
qui fait référence à la poésie qu’inspire Mimi à Rodolfo.
Leur dialogue est interrompu par l’entrée remarquée du sixième protagoniste de l’opéra : Musetta.
Ancienne petite amie de Marcello, elle vit à présent au crochet d’un riche et vieux monsieur. De nature
peu discrète, elle aime qu’on la voie et qu’on lui fasse la cour, sous le regard outré de son Alcindoro.
Sa première intervention est un grand éclat de rire depuis les coulisses, que Marcello reconnait illico !
S’en suit un allegro moderato brillant, enjoué, piquant, à l’image de cette grisette qui fait son irruption
dans le café Momus.
Elle sera observée par tous les clients du café, excepté celui dont elle espère le plus : Marcello. Plein de
rancœur, il lui tourne le dos. Elle entame alors un numéro clownesque pour attirer son attention et son
Alcindoro tente de la faire taire.
A bout de nerfs, elle fera une ultime tentative pour croiser le regard de Marcello : un air dans lequel elle
affiche ses coutumes mais dévoile à demi-mots son amour pour le peintre.
Musetta :
Quando me’n vo’ soletta per la via,
La gente sosta e mira
E la bellezza mia tutta ricerca in me
Da capo a pie’…
… ed assaporo allor la bramosia
Sottil, che dal gl’occhi traspira
E dai palesi vezzi intender sa
Alle occulte beltà.
Cosi l’effluvio del desio tutta m’aggira,
Felice mi ma !
E tu che sai, che memori e ti struggi
Da me tanto rifuggi ?
So ben : le angoscie tue non le vuoi dir,
Ma ti senti morir !
Musette :
Quand je m’en vais seulette par les rues,
Les gens s’arrêtent, de leurs regards je suis la cible,
Et toute ma beauté en moi est convoitée
De la tête jusqu’aux pieds.
Et je savoure alors la convoitise
Subtile que trahissent leur yeux
Et qui, d’après les charmes dévoilés, sait deviner
Les beautés cachées.
Ainsi l’effluve du désir toute entière m’étreint
Et me rend heureuse !
Et toi qui sait, te souviens et te consumes,
Veux-tu donc tant me fuir ?
Je sais bien : tes angoisses tu ne veux pas les dire
Mais tu te sens mourir !
Selon André Gauthier :
« Huit mesures de transition (rythme syncopé et glissement de si bémol à si majeur) avec de piquants effets d’écho
(harpe et célesta) aux inutiles injonctions du vieux galant, et c’est la célèbre valse lente dont la tournure languide
peut passer pour un bel hommage à la valse française du temps de Murger, alors qu’elle était, à l’origine, une
pièce pour piano esquissée par Puccini, dans son bateau, sur le lac de Massaciucoli ! Elle avait été ensuite
orchestrée et jouée à Gênes, à l’occasion du lancement d’un navire et c’est sur la mélodie originale que Giacomo
dut écrire les paroles « Quando me’n vo’ soletta » qui correspondent si bien au caractère de Musette !
Parenthèse dans la marche de l’action qui peut être considérée comme un tribut à la tradition du vieil opéracomique, cette valse n’en est pas moins prétexte à une variété de combinaisons vocales où s’affirme, une fois
encore, la maîtrise contrapuntique de Puccini.
On remarquera tour à tour le dessin élégant, la transparence harmonique, la légèreté rythmique (les trois temps
sont très rarement marqués ensemble : tantôt 1 et 2, tantôt 1 et 3), l’orchestration raffinée.
Le couplet, un peu plus lent, met en œuvre d’autres éléments de séduction : le rythme en est encore plus discret et
l’instrumentation plus capiteuse (une flûte, deux clarinettes et basson soutenant le chant, puis violons et
violoncelles le reprenant avec une générosité toujours plus intense). La mélodie elle-même, comme égarée dans un
dédale chromatique, bute sur les silences expressifs du premier temps auxquels répond la marche harmonique
précédant la reprise (affirmée sur le troisième temps) : mi mineur, si mineur, mi septième et la.
Si l’on excepte les brefs reproches d’Alcindor, la seconde exposition de la valse n’est qu’un duo des deux voix
féminines où les interventions, en croches, de Mimi s’inscrivent sur les seules valeurs longues du thème et dans la
même nuance d’expression.
Une fois que Musetta a simulé sa blessure au pied, l’ensemble des solistes reprend le thème de la valse
chantée précédemment, introduit par une montée chromatique de l’orchestre.
L’acte II se termine avec le départ des six amis, laissant l’addition à Alcindoro, préoccupé à chercher une
nouvelle bottine pour Musetta.
La séparation de Mimi et Rodolfo
Le troisième acte, particulièrement riche en intensité émotionnelle, révèle la maladie de Mimi dans un
grand duo entre Marcello et Rodolfo, puis la séparation des jeunes amants.
Sur le plan musical, nous retrouverons encore les leitmotive de chaque personnage. Musetta, au début de
l’acte, divertit les clients de la porte d’Enfer, avec un rappel de sa valse du deuxième acte. Mimi, quant à
elle, entre en scène sur une reprise, aux violons, de son air du premier acte « Mi chiamano Mimi », dans
une atmosphère tragique et nostalgique, en réel contraste avec l’acte précédent.
Mimi se confiera d’abord à Marcello (qui est amené par le thème de la mansarde, découvert au début de
l’opéra) au sujet des tensions dans son couple. Puis, arrive Rodolfo, ignorant que Mimi se cache non loin
de là. Il va à son tour confier à Marcello sa peur de voir souffrir Mimi et son désespoir de pouvoir lui
apporter une aide, tant leur vie est miséreuse.
Le thème de la maladie apparait alors, sur un mouvement lento, composé d’accords de noires à l’orchestre,
puis d’une mélodie à la fois simple et pleine de vérisme. Puccini use là de son ingrédient favori : le rythme
des triolets, freinés par une sorte de « hoquet », symbole du sanglot et de la toux de Mimi, à l’apogée du
tragique.
Mimi va s’associer au chant désespéré de Rodolfo, avant que sa présence ne soit trahie par sa toux, créant
ainsi un des trios les plus poignants de l’opéra italien. Rodolfo reprendra le thème de la maladie, agrémenté
des soupirs de Mimi et de la compassion de Marcello.
Le trio est interrompu par les rires de Musetta qui éloignent Marcello. Arrive alors le second duo de Mimi
et Rodolfo, composé d’un air pour Mimi et d’un duo plein de poésie, avant de terminer l’acte en quatuor,
avec les querelles de Marcello et Musetta.
L’air de Mimi rappelle très vite le thème utilisé dans sa première apparition (Acte 1). Il est ici joué par le
violon.
Nous retrouvons aussi l’intervention de la flûte, lorsqu’elle évoque son livre de prière.
Comme un refrain plein de menaces, chaque partie de l’air est ponctuée de la phrase quasi à nue : « Addio
senza rancor » (« Adieu sans rancœur »).
Le seul élan lyrique de l’air, l’évocation du béguin rose que Rodolfo lui avait acheté avant d’aller chez
Momus, se fait sur un changement de tonalité, de ré bémol à la majeur. Et par un retour à ré bémol,
l’envolée amoureuse est à nouveau freinée par un « Addio senza rancor ».
André Gauthier dira de cet air :
« Loin d’être une simple anthologie des thèmes connus, fussent-ils présentés sous un jour nouveau, cet air s’impose
par une rythmique originale et d’une grande puissance expressive.
Du lento molto à 2/4 à l’andantino mosso qui s’enchainera sur le duo proprement dit, on notera les
alternances de 3/3, 2/4, 4/4, 3/4, 4/4, 5/4 et 4/4, les fluctuations de la ligne vocale entrecoupée de silences, le
soutien orchestral d’une parfaite régularité et dont la coquetterie ne joue que dans la couleur instrumentale.
Résignée apparemment à son destin, Mimi n’est plus caractérisée par les syncopes haletantes d’une partie de
l’orchestre. Les temps sont strictement marqués et l’ensemble n’en a que plus de dignité. »
Le duo qui suit est une reprise d’un hommage à Paganini que Puccini avait écrit durant ses années au
conservatoire : Sole e amore (1888). Dans La Bohème, cette mélodie qui se prêterait plutôt à une fantaisie
musicale, est traitée comme une scène d’adieux. C’est aussi cette mélodie qui constituera le quatuor final,
ornée, encore, des leitmotive des protagonistes. Nous noterons les parlando de Musetta, qui permettent de
différencier les deux scènes parallèles.
Ci-dessous, la version originale de la mélodie de Puccini, Sole e amore.
Mimi et Rodolfo décideront finalement d’attendre la saison des fleurs pour se séparer.
La mort de Mimi
Le quatrième et dernier acte de La Bohème se déroule dans le même décor qu’au premier acte. On retrouve
les quatre amis et leurs plaisanteries autour d’un festin imaginaire. Nous entendrons à nouveau les thèmes
de la mansarde, de Colline, de l’inspiration artistique… mais aussi celui de l’amour, dans un duo entre
Rodolfo et Marcello, durant lequel les deux hommes se souviennent de leurs amours respectifs.
Musetta interrompt les farces des garçons, en arrivant par surprise : pour la première fois, son entrée n’est
pas annoncée par l’un de ses thèmes déjà entendus. Elle a accompagné Mimi jusqu’ici car elle voulait
mourir auprès de Rodolfo.
Toujours en s’appuyant sur ses leitmotive, Puccini met en scène Mimi, avec une orchestration plus sombre
(utilisation des cuivres, du basson et de tonalités mineures) pour signifier la maladie, la douleur et le
désespoir.
Mimi est épuisée et doit se reposer. Colline, pris de pitié, décide de vendre son manteau. Puccini a
composé un air à cette occasion, qui n’était pas prévu dans l’opéra à l’origine. Colline devait chanter un air
dans le deuxième acte mais celui-ci avait été supprimé. Puccini estima donc qu’il fallait donner plus
d’ampleur à ce personnage.
Un fois seuls, Mimi et Rodolfo vont se remémorer les doux moments qu’ils ont passé ensemble. Mimi
commence par une déclaration d’amour, sur une mélodie calme et descendante, accompagnée de façon
funèbre par des accords aux violons et altos.
Ce dernier thème, qui a été furtivement évoqué dans le deuxième acte, sera l’ultime leitmotiv de cet opéra.
Il constituera la dernière phrase de l’opéra, après la mort de Mimi. Nous l’associerons à la mort et au
déchirement.
La déclaration de Mimi se fait sur une envolée lyrique, reprise note à note par Rodolfo.
L’épisode musical qui suit constitue une série de souvenirs des jeunes amoureux. Puccini reprend alors tous
les thèmes (et même les textes) des amoureux évoqués durant l’opéra, à commencer par celui du premier
air de Mimi :
Lorsque Rodolfo montre à Mimi le béguin qu’il a gardé en souvenir, le thème de leur premier duo
(lorsqu’ils cherchaient la clé) réapparait.
C’est Mimi qui citera les premières paroles de Rodolfo dans son air du premier acte, mais de façon plus
discrète et beaucoup moins soutenue par l’orchestre.
Elle est interrompue par la toux et son malaise est illustré par un mouvement descendant aux cordes, ce
qui provoque le retour de Schaunard (gamme ascendante en pizzicato).
Lorsque Musetta revient avec un manchon (dernière volonté de Mimi), on entend à nouveau des échos du
deuxième acte (au café Momus) joués au hautbois.
Les dernières phrases de Mimi sont murmurées sur le thème amoureux du premier acte, joué timidement
par les violons. Mimi n’est pas encore morte ; juste endormie.
Musetta priera pour que Mimi guérisse vite, en vain. C’est Schaunard qui la découvre morte et l’annonce
tout d’abord à Marcello, alors que l’orchestre est quasiment imperceptible. L’annonce de la mort de Mimi
provoque un discret rebond des violoncelles et contrebasses, à l’effet tragique. Rodolfo ne sait pas encore.
Le drame n’est pas encore à son apogée.
Le thème du premier air de Mimi revient encore, celui sur lequel elle évoque ce qu’elle aime : les choses
que l’on nomme poésie.
Les dernières répliques se font sur un long unisson des contrebasses et la clarinette basse. L’intimité est à
son comble. Les chanteurs ne chantent plus. Quelques phrases pour faire deviner à Rodolfo que sa bienaimée est morte. Celui-ci se jettera sur le corps de Mimi, alors que l’orchestre réexpose le thème découvert
au quatrième acte (« Son andati »).
Toute la puissance dramatique de cette œuvre sera à son comble lorsque Rodolfo poussera son cri
déchirant : « Mimi ! », avant de laisser l’orchestre conclure sur une cadence diminuendo, jusqu’à la dernière
note.
« … peut-être que la clef de ce drame était la pauvreté. » (André Gauthier, L’avant-scène opéra)
Octave Tassaert, Intérieur d’atelier, 1845 musée du Louvre
© RMN-Grand Palais (Musée du Louvre) / Jean-Gilles Berizzi
Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique
Pour aller plus loin
A écouter :
-
La Bohème, G. Puccini, dirigée par H. von Karajan (Berliner Philarmoniker). Avec Freni,
Pavarotti, Harwood, Panerai, Maffeo, Ghiaurov – DECCA, 1972
La Bohème, G. Puccini, dirigée par Georg Solti (London Philharmonic Orchestra). Avec Caballé,
Blegen, Domingo, Bayers, Castel, Milnes – RCA Victor, 1973
A voir :
-
-
La Bohème, G. Puccini, Le film. Dirigé par Bertrand de Billy (Bavarian Radio Symphony
Orchestra). Avec Anna Netrebko, Rolando Villazon, Nicole Cabell, Boaz Daniel, Stéphane
Degout, Vitalij Kowaljow - Kultur International Films réalisé par Robert Dornheim, 2008
La Bohème, G. Puccini, dirigée par H. von Karajan (Orchestra del Teatro alla Scala). Avec Freni,
Martino, Raimondi, Panerai. Mise en scène de Franco Zeffirelli. Deutsche Grammophon, 1981
Moulin Rouge, film musical réalisé par Baz Luhrmann, avec Nicole Kidman, Ewan Mc Gregor et
Jim Broadbent – 20th Century Fox, 2001
Affiche du film Moulin Rouge de Baz Luhrmann, 2001
Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique
-
-
La Bohème en banlieue, réalisé en direct par Felix Breisach, avec Maya Moog (Mimì), Saimir Pirgu
(Rodolfo), Robin Adams (Marcello) et Eva Liebau (Musetta) - Co-production SF Schweizer
Fernsehen, TSR Télévision suisse romande, RSI Radiotelevisione svizzera di lingua italiana et
Arte, 2009
La vie de bohème, film de Aki Kaurismäki, d’après les Scènes de la vie de bohème de Murger, 1992
A lire :
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Scènes de la vie de bohème, H. Murger, éd. Flamarion, 2012
Mimi Pinson, profil de grisette (1845), A. de Musset, éd. Nabu Press, 2011
Un prince de la Bohème (1844), H. de Balzac, Folio Classiques, éd. Gallimard, 2007
Catalogue d'exposition Bohèmes, éd. RNM, paru en septembre 2012 suite à l’ouverture de
l’exposition Bohèmes au Grand Palais à Paris
Exposition :
-
Bohèmes du 26 septembre 2012 - 14 janvier 2013
Les Galeries nationales du Grand Palais
Une présentation de la vie de bohème au travers de différents arts, sur le site de la Réunion des
Musée de Nationaux - Grand Palais : http://rmn.fr/francais/jeune-public-6/actualites/expositionset-evenements-547/exposition-bohemes/
Charles Amable Renoir, Rêverie, collection particulière, 1893 © Mille
Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique
Biographies des artistes
Simone Luti, direction musicale
Simone Luti a étudié le piano et la composition musicale au conservatoire Boccherini de Lucca. Ensuite il
prend des cours de direction d’orchestre avec Gianluigi Gelmetti à l’Académie Chigiana de Sienne et
termine diplômé en direction d’orchestre au conservatoire Verdi de Milan.
En 2006- 2007, il a dirigé La finta giardiniera, L’apothicaire et La Cantatrice de Haydn.
Plus tard, il dirige dans de nombreux théâtres : en Roumanie (10ème Symphonie de Chostakovitch, L’Oiseau
de feu de Stravinsky), en Albanie (Il Barbiere di Siviglia), au Maggio Musicale Fiorentino (La Bohème), à
Iglesias (La tragédie de Carmen, Stabat Mater, Dido and Aeneas et Madama Butterfly).
Simone Luti est également coach pour de nombreux opéras tels que Aida au Quatar, La Voix humaine et
Pagliacci à Crémone, Norma au Théâtre du Châtelet, La Parisina et Ugo conte di Parigi à Bergame.
Il est actuellement directeur musical du Summer Opera Workshop à l’Université d’Indiana, à la Canadian
Operatic Arts Academy et de l’ Accademia Europea dell’Opera.
En 2013, il dirigera La Bohème, Alcina, Don Giovanni et des concerts avec l’Orchestre de Londres.
JeanJean-Paul Scarpitta, mise en scène
La carrière de Jean-Paul Scarpitta débute précocement. Poursuivant ses études d’histoire de l’art et d’art
dramatique, il organise dès l’âge de dix-neuf ans un festival de musique et de danse dans la cour du palais
synodal de Sens. Il mène dès lors une carrière qui le conduit à collaborer avec de nombreuses personnalités
du monde artistique.
Pour la télévision, il réalise notamment une série de trente-sept portraits d’artistes (Liv Ullman, Charlotte
Rampling, Rudolf Noureev, Dominique Sanda…). Son vif attachement pour l’étoile du Ballet de l’Opéra
de Paris, Ghislaine Thesmar, le conduit à la suivre et à la filmer pendant des années. Durant la même
période, il se passionne d’abord pour le travail de Giorgio Strehler, puis pour celui de Piero Faggioni, et,
se mêlant à leurs équipes respectives, il s’imprègne de leur art. Il acquiert ainsi une expérience de réalisateur
qui l’amène à concevoir deux longs-métrages : Désir (1985) avec Marisa Berenson et Ghislaine Thesmar, et
La Malaimée (1995), écrit en collaboration avec Jean Aurel, scénariste de François Truffaut. Par ailleurs, il
est responsable pendant quinze ans de la Fondation Armand Hammer à Paris et à Londres. C’est pour lui
l’occasion de révéler ses talents de commissaire général et de concepteur à travers de nombreuses
expositions internationales.
D’autre part, Jean-Paul Scarpitta défend la place de la photographie dans l’art en organisant de grandes
expositions dès le début des années quatre-vingt comme, par exemple, celle des soixante ans de Vogue, qui
voyagera pendant dix ans, ou encore l’hommage à André Kertész (1988). Il se lie ainsi avec des
photographes tels que Jean-Philippe Charbonnier et Richard Avedon.
Son rôle de metteur en scène se confirme dans la conception de spectacles, notamment L’Histoire du soldat
de Stravinsky au Théâtre des Champs-Élysées, avec Shlomo Mintz, Carole Bouquet, Gérard et Guillaume
Depardieu ou encore La clemenza di Tito.
En 2001, il ouvre la saison du Teatro San Carlo de Naples avec Perséphone et Œdipus Rex de Stravinsky.
Dans le cadre du Festival de Radio France et Montpellier Languedoc-Roussillon, Jean-Paul Scarpitta met
en scène successivement Le Carnaval des animaux, Háry János de Kodaly (spectacle repris au Châtelet),
Jeanne d’Arc au Bûcher de Honegger avec Sylvie Testud, sous la direction de Emmanuel Krivine, puis sous
celle d’Alain Altinoglu en 2006 (le DVD a obtenu une victoire de la Musique en 2008 et à cette occasion
Jean-Paul Scarpitta a obtenu un Orphée d’Or) et la création de Salustia de Pergolèse. A l’Opéra Berlioz, il
signe une nouvelle production de Sancta Susanna de Hindemith, couplée avec Œdipus Rex de Stravinsky,
puis Carmen, Die Zauberflöte et un Don Giovanni unanimement acclamé par le public et la critique. En
2009, il conçoit et met en scène Didon et Enée de Henry Purcell pour Opera Junior, Sancta Susanna de
Hindemith et Le Château de Barbe-Bleue de Bartók.
Il a aussi mis en scène La clemenza di Tito, ainsi que Medea de Cherubini avec Fanny Ardant.
Pour le Festival de Radio France et Montpellier Languedoc-Roussillon, en juillet 2009, il conçoit et met
en scène le spectacle C’était Marie-Antoinette. Il ouvre la saison 2009-2010 avec Die Zauberflöte et, il met
en scène La Traviata.
En mars 2011, Jean-Paul Scarpitta met en scène Nabucco à l’Opéra de Rome, sous la direction de Riccardo
Muti, à l’occasion des 150 ans de la République Italienne. L’œuvre, saluée par la critique et le public, fait
l’objet d’une diffusion en direct sur ARTE et Rai 3. En juin, il met en scène Manon Lescaut de Puccini.
Artiste en résidence à l’Opéra national Montpellier Languedoc-Roussillon, depuis la saison 2006-2007,
Jean-Paul Scarpitta est, depuis le 1er Janvier 2011, Directeur de l’Opéra Orchestre national Montpellier
Languedoc-Roussillon.
Erika Grimaldi, Mimi
Née à Asti en 1980, Erika Grimaldi est diplômée en chant et piano au Conservatoire Giuseppe Verdi de
Turin. Elle connait divers succès : au Concours International de Crescentino (VC) en 1998 et au
Concours International Giacomo Lauri Volpi de Latina.
En 2002, elle participe au Festival de Zurich.
Durant l'été 2005, elle gagne le 1er prix au Concours Lyrique International de Orvieto chantant par la
suite dans Il matrimonio segreto (Carolina), dans une mise en scène de Paolo Miccichè. En 2008, elle
s'affirme au Concours « Comunità Europea » de Spoleto, et cette même année est applaudie au Teatro
Regio à Turin, où elle interprète le rôle de Mimi dans La Bohème. Elle participe ensuite, toujours au
Teatro Regio de Turin, aux productions de La Dame de Pique de Tchaikovsky et de Medea de Cherubini,
elle se produira dans ce même ouvrage au Massimo Bellini de Catania, sous la direction de Evelino Pidò.
En 2009, elle fait ses débuts dans les rôles de Adina / L'Elisir d'amore au Teatro Filarmonico de Vérone,
Pamina dans La Flûte enchantée au Teatro Massimo de Palerme et Donna Anna dans Don Giovanni au
festival d'Avenches. En 2010, elle est encore Mimì dans La Bohème au Teatro Regio à Turin (production
dans laquelle elle a aussi chanté en tournée en Chine durant le mois d'août), au Teatro Petruzzelli de Bari
et à l'Opéra de Hong Kong.
Ses débuts dans le rôle de Anaï dans Moïse et Pharaon - opéra inaugural de la saison 2010-2011 du Teatro
dell’Opera de Rome – mise en scène de Pier’Alli et dirigé par Riccardo Muti - ont été d'une importance
fondamentale. Elle a été dirigée par ce dernier également dans Nabucco, toujours à l’Opéra de Rome.
Parmi ses récents engagements : Micaela dans Carmen au Teatro Lirico de Cagliari, Fiordiligi dans Così fan
tutte au Teatro Regio à Turin, la Comtesse dans Le nozze di Figaro.
Rame Lahaj,
Lahaj Rodolfo
Né en 1983 au Kosovo, Rame Lahaj a étudié à l’Académie des Arts de Tirana en Albanie. Encore étudiant,
il a fait partie des chœurs et s’est produit comme soliste à l’Opéra Théâtre de Tirana. Il a donné de
nombreux concerts au Kosovo, en Albanie, au Montenegro, mais aussi en Italie, en Allemagne, en
Australie et à New York, notamment avec l’Orchestre de l’Académie de Tirana, l’Orchestre de la RadioTélévision albanaise, l’orchestre Philharmonique du Kosovo. Il s’est aussi produit sur les ondes de la
télévision albanaise.
Lauréat de plusieurs prix en Albanie et au Kosovo, en 2010 il obtient deux premiers prix au Festival
International Ritorna Vincitor de Naples (chanson napolitaine et opéra), ainsi que le 2ème prix du Festival
International Riccardo Zandonai de Riva del Garda (Italie).
Cette même année, il débute en Allemagne dans le rôle d’Alfredo de La Traviata.
En mars 2011, il fait des débuts remarqués à Budapest en Macduff (Macbeth).Plus tard, c’est au côté de
Ermonela Jaho qu’il se produit en concert à Munich.
Au cours de la saison 2011-2012, il a chanté Edgardo (Lucia di Lammermoor) et Alfredo (La Traviata) au
Théâtre de Lübeck et Rodolfo à Dortmund.
Parmi ses projets : Roberton dans I Puritani à l’Opéra de Lyon, et le rôle-titre de Werther au
Landestheater de Salzbourg.
Anna Gorbachyova,
Gorbachyova Musetta
Anna Gorbachyova est née dans la ville sibérienne de Shushenskoye en 1985. Depuis septembre 2010, elle
étudie le chant avec Lillian Watson et Audrey Hyland à la Royal Academy Opera de Londres, qui lui
attribue une bourse.
A son répertoire, les rôles de Musetta dans La Bohème de Puccini à l’Opéra National de Hongrie en
décembre 2010, Zhou dans la création mondiale Kommilitonen! de P.M. Davies à la Royal Academy
Opera en mars 2011, elle interprète le rôle titre dans La Calisto de Cavalli au Festival de musique ancienne
d’Innsbruck en août 2011, le rôle de Nymphe dans la création mondiale de l’opéra Gogol de L. Auerbach
au Theater an der Wien en novembre 2011. Récemment, elle est la Reine de la Nuit dans La flûte
enchantée de Mozart à la Royal Academy Opera en mars 2012 et interprète le rôle titre dans Le Rossignol de
Stravinsky à l’Opéra national de Lyon en avril 2012.
Elle a été lauréate de nombreux concours. Elle obtient le premier prix et le prix du public au premier
concours international d’opéra baroque Pietro Antonio Cesti à Innsbruck, en Autriche (août 2010). Elle
remporte aussi le premier prix au 42ème Concours international de chant Antonín Dvořák en République
tchèque (novembre 2007).
Anna Gorbachyova a chanté Rachmaninov et Tchaikovsky au 9ème festival international de musique de
chambre à Nuremberg en septembre 2010, ainsi que des airs de Rameau au festival franco-russe, « Quatre
siècles de musique française », dirigé par Christophe Rousset au Kremlin en octobre 2010. En mai 2011,
elle a chanté dans Stabat Mater de Boccherini au Palais de la Musique Catalane de Barcelone avec
l’Orchestre de chambre de Berlin.
Elle a aussi participé à des concerts : Requiem allemand de Brahms, des cantates de Bach, Theresienmesse de
Haydn, Petite Messe Solennelle de Rossini, A Sea Symphony de Vaughan Williams.
Alik Abdukayumov, Marcello
Alik Abdukayumov fait ses études à l’académie musicale d’Ouzbékistan où il est membre de l’Académie
Nationale du Théâtre et du Ballet. Après avoir obtenu son diplôme, il étudie au Conservatoire
d’Ouzbékistan auprès d’Olga Alexandrova. Le jeune chanteur remporte plus de dix compétitions, ainsi que
plusieurs prix spéciaux pour le chant, parmi lesquels : le premier prix « Jeune chanteur
d’opéra » (Krushelnytska), le grand prix « Nazira Akhmedova », le Prix Nikhol (Ouzbékistan).. En 2005, à
Saint-Pétersbourg, lors de la compétition Elena Obraztsova, il remporte un prix spécial pour la meilleure
interprétation romantique de Tchaïkovski. Premier prix de la 2ème Compétition Pavel Lisitsian en 2006, il
est, l’année suivante, demi-finaliste au Concours International de Chant Operalia à Paris.
Depuis 2007, Alik Abdukayumov chante régulièrement à l’Opéra de Linz en Autriche, où il incarne des
rôles tels que Lescaut, Giorgio Germont, Eugène Oneguine Eduard, le Commissaire (Lady Macbeth de
Mzensk), Renato... Lors de la saison 2009-2010, à Linz, il est aussi Sharpless, Lindorf/Coppelius/Dr.
Miracle/Dapertutto. Durant la saison 2009-2010, à l’Opéra de Graz, il interprète Fritz Kothner dans Die
Meistersinger von Nürnberg, par la suite il y incarne Figaro, Leporello et Le Messager. Il est encore Figaro
pour l’Opéra de Stuttgart.
En Allemagne, à l’été 2010, à Düsseldorf il chante dans Les Contes d’Hoffmann, puis à Düsseldorf, puis au
Festival d’Eutin dans La Traviata (Giorgio Germont).
Depuis la saison 2010-2011, invité régulier à l’Opéra de Vienne, on a pu l’entendre dans les rôles de Peter
(Hänsel und Gretel), Escamillo, Michele (Il Tabarro), Tonio (I Pagliacci) et Giorgio Germont.
Durant la saison 2011-2012, il fait un début remarqué à l’Opéra de Hambourg en Leporello dans Don
Giovanni, rôle qu’il reprend à Budapest, où il se produit également dans Simon Boccanegra.
Il se produit régulièrement comme concertiste. Son répertoire comprend des compositions de Bach,
Händel, Orff, Stravinsky et Saint-Saëns. Ses engagements l’ont déjà mené en France, en Russie, ainsi qu’à
Tokyo en 2007 aux côtés d’Elena Obraszowa. Avec l’Orchestre de Bruckner, il a chanté la 9ième symphonie
de Beethoven. Il incarne les rôles de Posa et de Don Carlo au Festival International du Chiemgau.
Alik Abdukayumov travaille avec des metteurs en scène comme Alexander Schulin, Johannes Erath,
Olivier Tambosi, Marco Arturo Marelli, Uwe Laufenberg …et des chefs d’orchestre comme Ivan
Anguelov, Dennis Russel Davies, Johannes Fritzsch, Keri-Lynn Wilson…
Tout récemment, à l’été 2012 il fait son début avec l’Orchestre Philharmonique de Dresde où se produit
en concert dans Viva La Mamma (Mamma Agata). Il chante Shaklowity dans Chowanschtschina dans une
mise en scène d’Andrea Moses au Théâtre National de Weimar. A l’automne 2012, il fait ses débuts en
Ford dans Falstaff.
Evgueniy Alexiev,
Alexiev, Schaunard
Evgueniy Alexiev, est né en Bulgarie et réside à Bordeaux.
Il fait ses études au lycée Français puis au Conservatoire Supérieur National de Musique de Sofia pour le
chant lyrique. Il est invité à l’Opéra de Marseille pour un concert avec l’association Del Monaco, puis à
l’Opéra d’Avignon par Raymond Duffaut pour le « Tremplin des Jeunes Chanteurs ».
Il remporte le premier prix d’Opéra au concours d’Alès. Finaliste du Concours de la Chambre Syndicale
des Directeurs de Théâtres Lyriques Français, il est remarqué par Antoine Bourseiller, qui l’engage dans la
production de Don Giovanni. Il interprète avec Jean-Claude Malgoire le rôle de Don Basilio, dans Le
barbier de Séville de Paisiello.
Il intègre le Centre de formation lyrique de l’Opéra National de Paris. Finaliste du Concours International
de Chant Luciano Pavarotti à Philadelphie, il participe alors à différentes productions en France : Eugène
Onéguine à l’Opéra de Lille, La Didone de Cavalli à l’Opéra Comique, sous la direction de Christophe
Rousset, Pelléas et Mélisande à l’Opéra de Nantes et L’appel de la mer de Rabaud à l’Opéra de Nancy sous
la direction de Mark Foster. Il est invité à l’Opéra de Prague pour le rôle de Ping dans Turandot, en
Allemagne, au Chiemgauer Festival, où il interprète Figaro dans Il barbiere di Siviglia.
En troupe en Allemagne, Evgueniy Alexiev aborde des rôles dans un répertoire très varié : Eugène
Onéguine, Don Giovanni, Marcello, Le Comte et Figaro dans Le nozze di Figaro de Mozart, Sharpless,
Escamillo, Eneas, Peter dans Haensel und Gretel…
Suivent des engagements à l’Opéra de Nuremberg comme Germont, Figaro dans Le nozze di Figaro à
l’Opéra de Gratz, Alberti dans Robert le Diable au Staatsoper de Berlin sous la direction de Marc
Minkowski, le Concert de Gala à l’Opéra de la Monnaie avec Gwyneth Jones, Paata Burchuladze, Figaro
dans Il barbiere di Siviglia à l’Opéra de Thessalonique.
A l’occasion de l’Année Verdi, il interprète des rôles comme Rigoletto, Iago, Don Carlo di Vargas, Ford,
Amonasro, Rodrigue dans une série de concerts à Munich et Berlin. Il chante Papageno dans la production
de Claude Santelli à Paris, Don Giovanni à Nice, Mercurio dans L’incoronazione di Poppea à New-York,
production de l’Opéra d’Amsterdam avec Pierre Audi, Shaunard à l’Opéra de Lausanne et au
Luxembourg, Escamillo au Stade de France et à l’Opéra de Toulon, Ziliante dans Roland de Lully, sous la
direction de Christophe Rousset.
Au Grand Théâtre de Tours, Evgueniy Alexiev fait ses débuts dans le répertoire verdien (Renato, Rodrigue
et Ford), sous la direction de Jean-Yves Ossonce. Il chante ensuite le rôle-titre d’Eugène Onéguine à l’Opéra
du Rhin, Sévère dans Polyeucte de Gounod à l’Esplanade Opéra Théâtre de Saint-Étienne.
Au Festival de Drottningholm en Suède, il travaille sous la direction de Christophe Rousset et Pierre Audi,
dans le rôle d’Abramane dans Zoroastre de Rameau, puis interprète Escamillo dans Carmen à Dijon. Plus
récemment, il chante dans La Vedova scaltra à Nice, Carmen (Escamillo) à Saint-Etienne et à Tours, Le
pays de Ropartz au Grand Théâtre de Tours, Il barbiere di Siviglia au Festival de Chartres et à Nice, Thaïs
(Athanaël) à l’Esplanade de Saint-Etienne, Zoroastre (Abramane) à l’Opéra-Comique, Il barbiere di Siviglia
au Festival de Lacoste. Il interprète Momus (Platée) à l’Opéra National du Rhin.
À l’Opéra national Montpellier, il était Arlecchino dans la Vedova scaltra et Ford dans Falstaff. On a pu
l’entendre également dans Le Jongleur de Notre-Dame et Scènes de chasse. Il est invité au Festival de Radio
France et Montpellier pour Rita de Donizetti et L’Empio punito d’Alessandro Melani.
Jean Teitgen, Colline
Après des études de Sciences Economiques à Rouen, Jean Teitgen entre au CNSM de Paris où il obtient
un Prix de chant et un Diplôme de Formation Supérieure.
Il interprète Le Superintendant Budd dans Albert Herring de Britten à l'Opéra de Rennes, Faisons un Opéra
de Britten à l'Opéra Comique, Bartolo et Antonio dans Le Nozze di Figaro..
En tournée il chante, et notamment au Capitole de Toulouse et à l’Opéra de Versailles, le rôle de Draco le
Géant dans Cadmus et Hermione de Lully, œuvre dirigée par Christophe Rousset.
Il chante ensuite Basilio du Barbier de Séville, le Père de Berlioz dans Les Orages Désirés de Gérard Condé
avec l’Orchestre Philharmonique de Radio France,le Sprecher dans Die Zauberflöte, Colline dans La
Bohème, Mark dans Un renard à l’Opéra, une création d'Isabelle Alboulker…
Plus récemment, il a chanté La Clémence de Titus au Théâtre de Metz, La Flûte enchantée et Lucia di
Lammermoor (Raimondo) à Dijon, I Puritani (Sir Lord Walton) à Avignon aux cotés de Inva Mula et
Joseph Calleja, Tosca à l’Opéra de Rouen et au Luxembourg, Rigoletto (Sparafucile) à l’opéra de Lausanne,
Massy, Avignon, Caen, Nancy et Saint-Etienne, Vénus et Adonis de Desmarest, Wozzeck (Un apprenti),
Noces de Stravinsky et Trouble in Tahiti de Bernstein à Nancy, Le Roi Kandaules de Zemlinsky à l’Opéra
Royal de Wallonie et à Nancy, Le Viol de Lucrèce (Collatinus) à Tours et Nantes, Fidelio (Don Fernando),
Aïda et Tosca à Avignon, Nabucco (le Grand Prêtre) à Toulon, Pirame et Thisbe de Rebel et Francœur à
l’Opéra de Nantes, Jules César (Curio) et Un Ballo in Maschera (Sam) à Marseille, Midsummer night’s
dream (Quince) à Nancy, Caen et Toulon ainsi qu’à Dublin, Pelléas et Mélisande, The Rake’s progress et
Œdipe d’Enesco à la Monnaie de Bruxelles, Thaïs (Palemon) et Cosi fan tutte (Alfonso) à Saint-Etienne,
Aïda (Ramphis) à Nice, Simon Boccanegra (Pietro) et L’Amour des trois oranges (Le Roi) à l’Opéra de
Genève, Fortunio et La Muette de Portici à l’Opéra Comique, Rheingold (Fasolt) à Dublin, Falstaff à Nantes
et Rennes, L’Etoile de Chabrier à Bergen, Macbeth (Banquo) à Tours. Il a récemment interprété son
premier Arkel (Pelléas et Mélisande) à Nancy.
En concert, il a chanté le Requiem de Mozart à Paris, la 14ème Symphonie de Chostakovitch avec l’Orchestre
de Poitou-Charente, le Stabat Mater de Dvorak à Tours, Le Carnaval de Venise de Campra avec le Concert
Spirituel et Bellérophon de Lully à Beaune, Versailles, Paris et Vienne avec les Talens Lyriques.
Parmi ses futurs engagements : Samson et Dalila (Abimelech) à Genève, Lucrezia Borgia à la Monnaie de
Bruxelles, Le Barbier de Séville à Tours, Les Vêpres Siciliennes à Covent Garden, Les Pêcheurs de perles à
Strasbourg, Un Ballo in Maschera à Orange, L’Enfance du Christ à Utrecht, Castor et Pollux au Théâtre des
Champs-Elysées
Frédéric Goncalves,
Goncalves Alcindoro
Frédéric Goncalves est né à Paris. Il travaille avec Roger Soyer et entre au Conservatoire National
Supérieur de Musique de Paris (classe de Jane Berbié). Après avoir obtenu un Premier Prix de Chant, il est
admis à l’Ecole d’Art Lyrique de l’Opéra de Paris où il se perfectionne avec Anna-Maria Bondi.
Frédéric Goncalves a suivi les masterclasses de José Van Dam, Sena Jurinac, Vera Rozsa, Régine Crespin,
Michel Sénéchal et Kurt Moll.
Parallèlement à ses études, il remporte le concours de la Chambre Syndicale des Directeurs de Théâtre et
commence à se produire sur les scènes françaises. Il est ainsi présenté au Théâtre du Châtelet lors d’un
concert où il chante des extraits des Noces de Figaro aux côtés de Jane Berbié et José Van Dam.
On a pu l’entendre dans les principales salles parisiennes (Châtelet, Gaveau, Pleyel, Garnier, Bastille,
Opéra-Comique) ainsi que sur les scènes des Opéras de Marseille, Avignon, Vichy, Rouen, Saint Etienne,
Tours. Il a notamment chanté le rôle du Comte dans Les Noces de Figaro, Enrico dans Il Campanello de
Donizetti, Johan dans Werther et le Marquis d’Obigny dans La Traviata à l’Opéra d’Avignon, Jahel dans
Le Roi d’Ys à l’Opéra de Marseille aux côtés d’Alain Fondary et Nadine Denize, s’est produit dans Der
Rosenkavalier sous la direction d’Armin Jordan. On l’entend sur la scène du Palais Garnier à Paris dans
Dialogues des Carmélites (Le Marquis de la Force), à l’Opéra de Marseille dans Madama Butterfly avec
Raina Kabaivanska, ou encore dans Faust (Wagner) à Rouen.
Il a participé en 1995 à un hommage rendu à Marcel Landowski à l’Opéra Bastille en chantant plusieurs
de ses œuvres préparées avec le compositeur.
En 1996, il rejoint la troupe de l’Opéra-Comique où il interprète différents rôles, parmi lesquels on peut
citer Le Comte Robinson, Monsieur Choufleuri, Simone, Don Inigo Gomez, Le Dancaïre, Le Sacristain…
Il renouvelle son expérience de la musique contemporaine en créant En attendant Richelieu de Rémi
Gousseau, La Cantatrice Chauve de Luciano Chailly, Le dernier jour de Socrate de Graciane Finzi, Angels in
America de Peter Eötvös aux côtés de Barbara Hendricks et Julia Migenes au Châtelet et récemment Anne
de Bretagne de Pierik Houdy.
Il a chanté sous la direction de Semyon Bychkov dans Parsifal et Elektra aux côtés de Hildegard Behrens
ou Waltraud Meier et a fait ses débuts à Cagliari dans Dialogues des Carmélites.
Frédéric Goncalves s’illustre également dans l’oratorio, Noces de Stravinsky à la Cité de la musique, Un
Requiem allemand de Brahms sous la direction de Michel Piquemal à la Salle Pleyel, la Petite Messe
solennelle de Rossini sous la direction de Stéphane Caillat. On a pu l’entendre sous la direction de Jacques
Mercier dans Zaïde de Mozart, en tournée en Ile-de-France et à Paris, dans Monsieur Choufleuri à
Montpellier, Le Voyage dans la Lune à Lyon (mise en scène de Laurent Pelly), La Traviata à Antibes et
Lacoste, Le Pays du Sourire et Elektra à Nice, Madama Butterfly à Marseille, La Belle Hélène, Manon et La
Bohème à Saint-Etienne, Padmavâtî, The Fly et Cyrano d’Alfano au Théâtre du Châtelet, Abu Hassan de
Weber à Besançon, Juliette ou la clé des Songes de Martinu avec l’Orchestre Philharmonique Tchèque sous
la direction de Sir Mackerras, avec l’Orchestre de la BBC dirigé par Jiri Belohlavek et dernièrement avec
l’Orchestre Philharmonique de Berlin, Mignon (Jarno) à l’Opéra-Comique et à Genève, L’Heure Espagnole
à l’Opéra de Palma, La Veuve Joyeuse à Montpellier.
Il donne également des récitals de mélodies et des lieders et on a pu l’entendre en direct sur France
Musique interpréter l’intégrale des mélodies pour voix d’homme d’Henri Duparc.
Parmi ses projets, Le Roi malgré lui au Bard Festival et à Wexford, Marouf à l’Opéra-Comique, Dialogues
des Carmélites à Bordeaux…
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