CAS CLINIQUE Progrès en Urologie (1999), 9, 118-121
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Métastase urétérale isolée d’un adénocarcinome de prostate.
A propos d’un cas
Laurent YONNEAU, Thierry LEBRET, Jean Marie HERVÉ, Philippe BARRÉ,
Pierre Marie LUGAGNE, Henry BOTTO
Service d’Urologie, Hôpital Foch, Suresnes, France
RESUME
A la suite d’un épisode de colique néphrétique, chez un patient prostatectomisé pour
adénocarcinome de prostate, il a été découvert une tumeur urétérale. Une urétérec-
tomie segmentaire a été réalisée. A l’histologie, il s’agissait d’une métastase d’adéno-
carcinome prostatique.
Cette localisation secondaire est rare : moins de 40 cas rapportés dans la littérature ,
p rovenant essentiellement de ries d’autopsies. La diffusion métastatique est décrite
par voie lymphatique ou sanguine, la tumeur secondaire se veloppant a partir de
l’adventice avant dinfiltrer la paroi urétérale. Si la clinique et l’imagerie permettent
d’évoquer ce diagnostic, seule l’histologie peut le confirmer. Après urétérectomie, le
traitement peut associer l’ensemble des moyens thérapeutiques reconnus contre l’adé-
n o c a rcinome prostatique : hormonotrapie et radiotrapie adjuvantes.
Mots clés : Prostate, tumeur, métastases urétérales.
Les métastases urétérales sont rares et essentiellement
décrites dans les séries autopsiques [2, 9].
Nous rapportons ici une observation de métastases uré-
térales d’un adénocarcinome prostatique. Les aspects
diagnostiques, histologiques et évolutifs de ce type de
métastases sont exposés et discutés.
CAS CLINIQUE
Il s’agit d’un homme, chez qui a été découvert en sep-
tembre 1989, à l’âge de 65 ans, un adénocarcinome de
prostate. Le bilan d’extension n’avait pas montré de
métastases (scanner abdomino-pelvien, scintigraphie
osseuse). A cette époque, il avait été réalisé un curage
ganglionnaire avec prostatectomie radicale. Le résultat
anatomo-pathologique définitif avait conclu à un adé-
nocarcinome prostatique pT3 N1 M0, Gleason 5
(3 + 2). Les suites immédiates avaient été simples. A 6
mois il avait été constaté une ascension du taux de PSA
à 13,8 ng/ml. L’examen clinique était normal, il avait
alors été institué un traitement par anti-androgène non
stéroïdien (flutamide). Quinze mois après, soit en
décembre 1990, le PSA était à 0,1 ng/ml sous le traite-
ment hormonal institué. Le patient était continent, le
toucher rectal était normal et la créatininémie était à 92
mmol/l. La situation était restée identique jusqu’en
décembre 1995 où était apparue une réascension du
taux de PSA à 1 ng/ml, cette augmentation avait été
confirmée en juin 1996 : 2,4 ng/ml. Le traitement hor-
monal avait alors été modifié : le flutamide avait été
arrêté et remplacé par du diéthylsilbestrol à la dose de
3 mg par jour.
En juillet 1996, le patient a présenté une colique
néphrétique gauche. L’urographie intraveineuse objec-
tivait un obstacle au niveau de l’uretère iliaque (Figure
1) avec une rupture de la voie excrétrice au niveau des
calices engendrant un urinome périrénal de faible volu-
me. L’urétéropyélographie rétrograde (UPR) pratiquée
juste avant la montée d’une sonde double J mettait en
évidence un rétrécissement de l’uretère à la jonction
lombo-iliaque (Figure 2). A l’ablation de la sonde
double J (6 semaines après) l’urographie intraveineuse
montrait la persistance de l’obstacle. Une urétéroscopie
a alors été réalisée. Elle a permis de visualiser une com-
pression urétérale segmentaire qui semblait être extrin-
sèque avec une muqueuse respectée. A ce niveau, le
scanner abdomino-pelvien retrouvait une paroi urétéra-
Manuscrit reçu : juillet 1998, accepté : septembre 1998.
Adresse pour correspondance : Pr.H.Botto, Service d’Urologie, Hôpital Foch,
40, rue Worth, 92151 Suresnes.
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Figure 1. Urographie intraveineuse : hypotonie des voies
excrétrices gauches avec dilatation de l’uretère lombaire. Figure 2. Urétéro-pyélographie rétrograde : rétrécissement de
l’uretère iliaque gauche sur 4 cm avec aspect irrégulier de la
lumière urétérale.
Figure 3A. Coupe histologique de l’uretère pathologique.
(X10) La muqueuse est respectée, il existe une infiltration
tumorale qui n’atteint pas les fibres musculaires les plus
internes.
Figure 3B. Coupe histologique de l’uretère pathologique.
(X10) La nature histologique de cette tumeur est un adénocar -
cinome.
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le épaissie, sans adénopathie suspecte, sans fibrose
rétropéritonéale et sans obstacle extrinsèque. Une uré-
térectomie sur 5 cm a alors été réalisée en septembre
1996 avec anastomose directe sur sonde double J. Lors
de l’intervention, la portion urétérale tumorale était très
facilement individualisée. L’uretère à ce niveau était
épaissi, cartonné et inflammatoire, l’uretère sous jacent
était sain.
L’examen anatomo-pathologique extemporané et défi-
nitif concluait à une infiltration de l’adventice urétéral
et de l’interstitium des couches externes de la muscu-
leuse urétérale par un adénocarcinome. Celui-ci était
également présent dans la graisse péri-urétérale. La
muqueuse était respectée et un stroma de type réac-
tionnel (fibrose squirrheuse) observé (Figure 3). Le
marquage aux anti-corps anti-PSA était positif. Le dié-
thylsilbestrol a alors été poursuivi et le patient a subi
une irradiation complémentaire sur les voies excré-
trices gauches de 45 grays en 5 séances de 1,8 grays par
semaine avec un complément de 9 grays.
En juin 1998, le patient est toujours sous le même trai-
tement hormonal, son état général est satisfaisant, il ne
présente pas de symptômes fonctionnels urinaires, ni
de douleurs. Le taux de PSA est actuellement de 0,4
ng/ml. L’urographie intraveineuse est normale malgré
une discrète altération de la fonction rénale (130
mmol/l).
DISCUSSION
Latteinte urérale maligne par voie lymphatique ou
hématogène, à partir d’une sion cancéreuse primiti-
ve (en excluant les atteintes par extension directe),
est rare [6, 8]. Les sions primitives les plus souvent
responsables de ces métastases urérales ont é
décrites comme étant des carcinomes du poumon, de
l’estomac, du pancréas, du colon, de la prostate, de la
vessie et du col utérin [7]. Dans une série historique,
P
R E S M A N
a constaté que les métastases urérales ne
provenaient pas plus souvent de tumeur primitive
d ’ o rganes pelviens que d’organes extra-pelviens [9].
La preuve histologique de lorigine du primitif est
parfois difficile. Dans notre cas, le marquage positif
au PSA sur un adénocarcinome histologique a permis
d ’ a ffirmer l’origine prostatique. D’un point de vue
anatomo-pathologique, la métastase urérale se défi-
nit par la présence de cellules malignes dans une por-
tion de la paroi urérale sans aucune sion maligne
dans les tissus adjacents, et/ou par la présence de cel-
lules malignes dans les lymphatiques ou les vais-
seaux uréraux [2, 3, 9]. Le premier cas de méta-
stases urérales a é décrit par S
TO W
en 1909. En
1989, H
U L S E
dans sa revue de littérature en dénom-
brait 341 dont seulement 11% avaient une origine
prostatique [5].
Dans 15 à 50% des cas, il existe des symptômes cli-
niques, essentiellement à type de douleurs lom-
baires. L’hématurie est peu fréquente (16%) en rai-
son de la rareté de latteinte de la muqueuse uréra-
le. Les sions sont le plus souvent localisées (62%),
mais peuvent être également étagées ou diff u s e s ,
pouvant aller jusquà envahir plus de la moit de la
longueur de l’urere [5, 9]. Elles sont bilarales
dans 25 à 60% des cas suivant les séries et peuvent
atteindre l’uretère à tous ses niveaux, sans prédomi-
nance [1, 2, 9]. Dans les séries d’autopsies il a pu
être montré que seulement 10% de ces métastases
urérales étaient le seul site métastatique [5, 9] de la
sion primitive.
Des trois constituants de la paroi urétérale (muqueuse,
musculeuse et adventice), l’adventice est la couche la
plus pourvue en lymphatiques et vaisseaux. C’est pro-
bablement de par cette propriété que les métastases
hématogènes et lymphatiques sont plus fréquentes au
niveau de cette tunique [7]. Quatre types d’atteintes
métastatiques ont été décrites :
- métastases par voie hématogène au niveau de la
muqueuse ou de la sous muqueuse,
- métastases par voie hématogène au niveau de l’ad-
ventice essaimant le long des vaisseaux péri-urétéraux,
- essaimage métastatique sous forme d’un squirrhe le
long des vaisseaux péri-urétéraux,
- essaimage métastatique au niveau de ganglions lym-
phatiques avec réaction péri-ganglionnaire desmoplas-
tique (tissu fibreux réactionnel tout autour des cellules
malignes).
Sur le plan de l’imagerie, il est possible de visualiser
soit une lacune soit une sténose localisée ou étendue
entraînant un hydro-uretère ou une hydro-néphrose [4].
Les diagnostics différentiels en fonction de l’aspect
radiologique et du type d’atteinte métastatique com-
prennent le calcul, le caillot sanguin, la nécrose papil-
laire ou la tumeur primitive de l’uretère en cas de lacu-
ne. En cas de sténose sur les clichés radiologiques, il
faut éliminer une autre étiologie : séquelle d’une lithia-
se, sténose tuberculeuse, amiloïdose, endométriose ou
tumeur urétérale primitive. Enfin une fibrose rétro-
péritonéale maligne post-radique ou idiopathique doit
être discutée en cas de formes métastatiques squir-
rheuses.
Lanamnèse, la tomodensitométrie, lIRM (fibrose
rétro-ritonéale) et luréroscopie permettent
généralement dévoquer le diagnostic de métastases
urérales avant la confirmation histologique. Dans
notre observation le type datteinte était adventiciel-
le avec réaction fibreuse sous forme de squirrhe.
Laspect radiologique (UIV et UPR) était celui dune
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snose localisée avec aspect non spécifique et épais-
sissement de la paroi urérale sur les coupes uré-
rales correspondantes en TDM. Luréroscopie avait
permis d’évoquer le diagnostic de sions malignes,
celui ci a é confirpar l’histologie qui a permis
de préciser sa nature métastatique et son origine
p r o s t a t i q u e .
REFERENCES
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Commentaire de Laurent Guy, Service d’Urologie, CHRU
de Clermont-Ferrand.
Il s’agit d’un nouveau cas de métastase urétérale à partir d’un
adénocarcinome prostatique.Celui-ci est bien documenté sur le
plan imagerie et anatomopathologie, le problème essentiel de
ces lésions étant de distinguer une véritable métastase urétérale
d’une extension par contiguïté de la tumeur.
Réponse des auteurs (Thierry Lebret)
Le problème essentiel est en effet de distinguer la véritable
métastase urétérale d’une extension par contiguïté de la tumeur.
Dans ce cas il existe très peu de doute car en effet la lésion uré-
térale est à distance du méat. Il existe une zone saine en dessous
de la métastase qui témoigne bien d’une «greffe» lymphatique
ou vasculaire et non d’une atteinte par contiguïté.
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SUMMARY
Isolated ureteric metastasis from a prostatic adenocarcino-
ma. A case report.
A ureteric tumour was discovered in a patient presenting with
an episode of renal colic and a history of prostatectomy for
prostatic adenocarcinoma. Segmental ureterectomy was perfor -
med. Histological examination showed a metastasis from pros -
tatic adenocarcinoma. This is a rare site of secondaries : less
than 40 cases have been reported in the literature, essentially
based on autopsy series. Metastatic spread occurs via lympha -
tics or the blood stream, and the secondary tumour develops
from the adventitia before invading the ureteric wall. Although
this diagnosis may be suggested by the clinical features and
imaging, it can only be confirmed by histology.After ureterec -
tomy, treatment can combine all of the recognized treatment
modalities against prostatic adenocarcinoma : endocrine the -
rapy and adjuvant radiotherapy.
Key-words : Prostate, tumor, ureteral metastases.
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