1 Transformation de Fourier

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Université d’Orléans
Département de Mathématiques
Master 1 – Semestre 1
Automne 2011
SMO1MA1 – Méthodes hilbertiennes et analyse de Fourier
(www.univ–orleans.fr/mapmo/membres/anker/enseignement/MHAF.html)
1
Transformation de Fourier
La transformation de Fourier sur R est l’analogue des séries de Fourier sur T.
R
transformation de Fourier
T
séries de Fourier
←→
Définition 1.1. La transformée de Fourier Ff = fb d’une fonction f ∈ L1 (R) est définie par
Z
b
Ff (ξ) = f (ξ) = f (x) e−ixξ dx
∀ ξ ∈ R.
(1)
R
Remarque 1.2. La transformation de Fourier est parfois définie différemment, par exemple
Z
Z
1
−ixξ
b
b
f (ξ) = √
f (x) e
dx
ou
f (ξ) = f (x) e−2π ixξ dx .
(2)
2π R
R
Quelle que soit la définition choisie, des facteurs π apparaissent à un moment ou à un autre
dans la théorie.
Exemple 1.3. Transformée de Fourier de la fonction caractéristique f = 1I I d’un intervalle
borné I d’extrêmités a < b :
(
a+b
sin b−a
ξ
2
si ξ 6= 0,
2 ei 2 ξ
ξ
b
f (ξ) =
b−a
si ξ = 0.
1
b
à l’infini.
Observons que f est une fonction continue, avec une décroissance fb(ξ) = O |ξ|
x2
Exemple 1.4. La gaussienne f (x) = e− 2 est, à une constante multiplicative près, sa propre
transformée de Fourier :
√
ξ2
fb(ξ) = 2π e− 2 .
Lemme 1.5. (a) (Riemann–Lebesgue) Soit f ∈ L1 (R). Alors fb∈ C0 (R) avec kfbk∞ ≤ kf k1 .
(b) Pour tout f, g ∈ L1 (R), onZa
Z
R
fb(ξ) g(ξ) dξ =
R
f (x) b
g (x) dx .
Proposition 1.6. Le tableau suivant rassemble quelques propriétés de base de la transformation
de Fourier :
fb(ξ)
f (x)
fb(−ξ)
f (−x)
1 b ξ
f(a)
|a|
f (ax)
e ibξ fb(ξ)
f (x+b)
fb(ξ −b)
e ibx f (x)
i ξ fb(ξ)
d
f (x)
dx
d b
i dξ
f (ξ)
x f (x)
fb(ξ) b
g(ξ)
(f ∗ g)(x)
1 b
(f ∗ b
g )(ξ)
2π
f (x) g(x)
2
Exemple 1.7. La transformée de Fourier d’une
gaussienne f (x) = e−a(x−b) est
q
ξ2
fb(ξ) = πa e −i b ξ e − 4 a .
Les deux dernières points font intervenir le produit de convolution, dont nous rappelons maintenant la définition et les propriétés principales.
Définition 1.8. Le produit de convolution sur R est défini par
Z +∞
Z +∞
(f ∗ g)(x) =
f (x−y) g(y) dy =
f (z) g(x−z) dy .
−∞
−∞
Proposition 1.9. (a) Le produit de convolution est commutatif (lorsqu’il est bien défini) :
f ∗ g = g ∗f
(b) Soit 1 ≤ p ≤ ∞. Si f ∈ L1 (R) et g ∈ L p (R), alors f ∗ g ∈ L p (R) avec kf ∗ g kp ≤ kf k1 kgkp .
(c) Si de plus g ∈ C N (R) et que ses dérivées appartiennent à L p (R), alors f ∗ g ∈ C N (R) avec
(f ∗ g)(k) = f ∗ g (k) ∈ L p (R)
∀ 1 ≤ k ≤ N.
(d) Soit (uj ) une unité approchée (généralisée). Alors (f ∗ uj ) converge vers f
• dans L p si f ∈ L p (R) avec 1 ≤ p < ∞,
• uniformément si f ∈ C0 (R).
Remarque 1.10.
• On s’intéresse principalement aux cas p = 1, p = 2, p = ∞.
• Le point (b) de la proposition peut être généralisé comme suit (théorème de Young) :
Soient 1 ≤ p, q, r ≤ ∞ tels que p1 + 1q − 1r = 1. Si f ∈ L p (R) et g ∈ Lq (R), alors f ∗ g ∈ Lr (R)
avec kf ∗ g kr ≤ kf kp kgkq .
• Rappelons qu’une unité approchée est une suite (uj ) dans L1 (R) telle que
◦ uj ≥ 0,
R +∞
◦ −∞ uj = 1,
◦ supp uj ⊂ [−Rj , +Rj ] avec Rj → 0,
et qu’on parle d’unité
condition est remplacée par
R +εapprochée généralisée si la troisième
R
◦ ∀ ε > 0, lim j→+∞ −ε uj (x) dx = 1 ⇐⇒ lim j→+∞ |x|>ε uj (x) dx = 0.
2
Introduisons l’espace de Schwartz, qui fournit un cadre idéal pour l’analyse de Fourier sur R.
Définition 1.11. L’espace de Schwartz S(R) est constitué des fonctions f ∈ C ∞ (R) vérifiant
les conditions équivalentes suivantes :
(a) ∀ k, m ∈ N, ∃ C ≥ 0, |f (k) (x)| ≤ C (1+|x|)−m ,
(b) ∀ k, m ∈ N, sup x∈R |x m f (k) (x)| < +∞,
d k m
(c) ∀ k, m ∈ N, sup x∈R dx
x f (x) < +∞.
2
2
Exemple 1.12. Les produits f (x) = p(x)e−a(x−b) de polynômes p(x) et de gaussiennes e−a(x−b) ,
où a > 0 et b ∈ R, sont des fonctions de Schwartz.
Proposition 1.13.
L’espace de Schwartz S(R) est dense dans L p (R), pour tout 1 ≤ p < ∞, ainsi que dans C0 (R).
Proposition 1.14. L’espace de Schwartz est préservé par les opérations suivantes :
d k
• dérivation : f ∈ S(R) =⇒ dx
f ∈ S(R) ∀ k ∈ N,
• multiplication par les polynômes : f ∈ S(R) =⇒ x m f ∈ S(R) ∀ m ∈ N,
• multiplication ponctuelle : f, g ∈ S(R) =⇒ f g ∈ S(R),
• produit de convolution : f, g ∈ S(R) =⇒ f ∗ g ∈ S(R),
• transformation de Fourier : f ∈ S(R) =⇒ fb∈ S(R).
Théorème 1.15. (a) La transformation de Fourier
Z
b
Ff (ξ) = f (ξ) = f (x) e−ixξ dx
(2)
R
est un isomorphisme de l’espace de Schwartz sur lui-même.
(b) Pour tout f ∈ S(R), on a
F 2f = 2πf ∨ .
En d’autres termes, la transformation de Fourier inverse est donnée par
Z
−1
1
1
F g(x) = 2π b
g (−x) = 2π g(ξ) eixξ dξ .
(3)
R
Corollaire 1.16. La transformation de Fourier est injective sur L1 (R).
Théorème 1.17 (Plancherel). (a) Pour tout f ∈ S(R), on a
√
k fbk2 = 2π kf k2 .
(b) L’application f 7−→ √12π fb se prolonge en une isométrie de l’espace L2 (R) sur lui–même.
3
L’analyse de Fourier est un outil important en mathématiques. Elle permet notamment de résoudre des équations différentielles, par exemple l’équation de la chaleur
(
∂
∂2
u(x, t) = ∂x
∀ x ∈ R, ∀ t > 0,
2 u(x, t)
∂t
(4)
u(x, 0) = f (x)
∀ x ∈ R.
Par transformation de Fourier spatiale, l’équation (4) devient en effet
(
∂
u
b(ξ, t) = − ξ 2 u
b (ξ, t) ∀ ξ ∈ R, ∀ t > 0,
∂t
u
b(ξ, 0) = fb(ξ)
∀ ξ ∈ R.
Pour ξ fixé, il s’agit d’une équation différentielle en t, qui est élémentaire à résoudre :
2
u
b (ξ, t) = f (x) e−t ξ .
Par transformation de Fourier inverse, on obtient la solution suivante de (4) :
u(x, t) = (f ∗ gt )(x),
où
2
1
gt (x) = √4π
e−x /4t
t
est le noyau de la chaleur sur R.
En physique, le principe d’incertitude de Heisenberg stipule qu’on ne peut préciser simultanément la position et la vitesse d’une particule. Mathématiquement, ce principe se traduit par
l’impossibilité de cerner simultanément une fonction et sa transformée de Fourier. En voici deux
formulations quantitatives.
Théorème 1.18 (principe d’incertitude 1).
Soit f ∈ L1 (R) telle que supp f et supp fb sont compacts. Alors f = 0.
Théorème 1.19 (principe d’incertitude 2). Pour tout f ∈ S(R) et pour tout x0 , ξ0 ∈ R, on a
Z +∞
Z +∞
Z +∞
Z +∞
2
2
2
2
b
|f (x)| dx
|f (ξ)| dξ ≤ 4
(x−x0 ) |f (x)| dx
(ξ −ξ0 )2 |fb(ξ)|2 dξ .
−∞
−∞
−∞
−∞
− 2t x2
De plus, si x0 = ξ0 = 0, on a égalité pour les gaussiennes f (x) = e
4
i.e. fb(ξ) =
q
2π
t
1
2
e− 2 t ξ .
Passons à la formule sommatoire de Poisson (Siméon Denis Poisson, né le 21 juin 1781 à Pithiviers), qui est un outil important en théorie analytique des nombres.
Théorème 1.20 (Formule sommatoire de Poisson). Pour tout f ∈ S(R), on a
P
b
n∈Z f (n)
= 2π
P
f (2πn) .
n∈Z
Exemple 1.21 (Fonctions thêta et zêta). En appliquant la formule sommatoire de Poisson aux
gaussiennes, on obtient la relation fonctionnelle
1
θ(t) = t− 2 θ(t−1 )
pour la fonction thêta
θ(t) =
P
∀ t>0
2
n∈Z
e −n t .
On en déduit le prolongement analytique de la fonction zêta
P
−s
∀ Re s > 1
ζ(s) = +∞
n=1 n
à Cr{1} et la relation fonctionnelle
Γ( s )
1
2
ζ(1−s) = π 2 −s Γ( 1−s
ζ(s) .
)
2
Plus précisément, la fonction
s
π2
Γ( 2s )
ξ(s) =
sécrit
ξ(s) =
Z
+∞
dt
t
1
s
t2+t
1−s
2
et vérifie l’équation fonctionnelle ξ(1−s) = ξ(s).
ζ(s)
θ(t)−1
2
−
1
s
−
1
1−s
Terminons avec le théorème d’echantillonnage de Shannon, qui est un outil fondamental en
traitement du signal.
Théorème 1.22 (Shannon). Soit f ∈ L2 (R) telle que supp fb ⊂ [−π, +π]. Alors
f (x) =
P
n∈Z
π (x−n)
.
f (n) sinπ (x−n)
Remarque finale : La plupart des définitions et résultats de ce chapitre se généralisent à Rn .
5
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