minute psychologique, n° 43 La dépression Déprime ou dépression Souvent qualifiée de « mal du siècle », la dépression représente aujourd’hui un enjeu majeur en santé publique. Certains chercheurs estiment que l’individualisme et le culte de la performance prônés par nos sociétés contemporaines expliquent la fréquence des troubles dépressifs : dépourvue du soutien apporté autrefois par des cadres sociaux plus structurés (famille, communauté, église…), la personne est exhortée de s’accomplir seule, sans ce soutien. Selon l’Organisation mondiale de la santé, en 2020, la dépression pourrait devenir, à l’échelle planétaire, la première cause de maladie chez les femmes et la deuxième chez les hommes. Mais la dépression, qu’est-ce que c’est au juste? Alors que la déprime désigne, en langage courant, une baisse de moral passagère, la dépression constitue un trouble psychologique à part entière. Elle se caractérise par une multitude de symptômes possibles contrastant avec les façons d’être habituelles de la personne. Les principaux indicateurs comportementaux de la dépression sont : tristesse, perte d’intérêt et de plaisir, pessimisme, troubles de mémoire et de concentration, perte d’énergie, changement de l’appétit, perte ou gain de poids, agitation ou sensation de lenteur, trouble du sommeil et retrait social. En toile de fond, des sentiments aigus d’autodépréciation, de culpabilité et d’absence de sens qui peuvent mener à la planification d’un suicide. Cette nuée de symptômes, plus ou moins prégnants, ne rend pas seulement la vie quotidienne éprouvante pour la personne dépressive mais aussi pour son entourage. Ses proches ou ses collègues ne la reconnaissent littéralement plus et peuvent même la soupçonner de faire semblant de « trop s’écouter » ou de chercher de l’attention. Les publicités récentes sur la dépression visent d’ailleurs à démystifier tous ces préjugés. À l’occasion, la personne dépressive ne soupçonne pas toujours la problématique dans laquelle elle s’enlise, ce qui peut retarder sa recherche d’aide. Or, selon les professionnels de la santé, plus le traitement psychologique et/ou médical tarde, plus l’épisode dépressif risque d’être sévère et long, voire même de nécessiter une intervention longue et en profondeur. Pourquoi devient-on dépressif? Nombreux sont les événements pénibles qui peuvent favoriser l’émergence d’un trouble dépressif : deuil, divorce, agression, perte d’emploi, traumatisme, etc. Certaines études suggèrent d’ailleurs que les risques dépressifs sont multipliés par six après un événement grave. L’accumulation de stress peut aussi, tôt ou tard, dépasser les facultés d’adaptation de la personne et faire en sorte qu’elle s’épuise, ce qui instaure un cercle vicieux favorisant la venue de nouvelles situations stressantes : isolement social, trouble de la mémoire, chute de l’efficacité professionnelle, etc., jusqu’au jour où la personne craque littéralement. Bien que tout le monde soit susceptible de vivre des événements stressants et de se sentir victime des vicissitudes de la vie, nous ne devenons pas tous dépressifs. Des facteurs biologiques semblent être étroitement liés au trouble de la dépression. Entre autres, nous savons que certaines substances chimiques dans le cerveau, dites neurotransmetteurs, sont impliquées dans la gestion des émotions. De plus, certaines hormones sont aussi libérées ponctuellement pour favoriser l’adaptation de l’organisme aux situations stressantes. Par ailleurs, des facteurs héréditaires sont également impliqués dans l’apparition de la dépression. De fait, nous pouvons dire que la dépression rend compte d’une tentative de notre organisme pour retrouver son équilibre, tentative qui est toutefois mise en échec. La dépression devient alors un moment d’arrêt imposé et incontournable, même s’il est déchirant et exigeant, pour faire le point sur soi-même à la suite d’événements difficiles et pour retrouver bien souvent ses forces comme pour développer de nouvelles façons d’être en rapport avec soi et avec les autres. Tout ce travail d’introspection et de mise en question de soi nécessite néanmoins une aide appropriée et des soins adaptés. Qui est plus vulnérable à la dépression? La dépression frappe toutes les tranches d’âge et tous les groupes sociaux. Elle ne doit jamais être considérée comme « normale », comme un passage obligé dans des périodes réputées difficiles de la vie telles que l’adolescence, la retraite, le deuil, etc. Toutefois, les études épidémiologiques montrent une prévalence de dépression deux fois plus élevée chez les femmes que chez les hommes. Les chiffres élevés chez les femmes peuvent s’expliquer par des facteurs biologiques, en particulier le rôle vraisemblable des hormones sexuelles sur la régulation de la sérotonine (neurotransmetteur). Les facteurs psychosociaux occupent aussi un rôle non négligeable dans la vulnérabilité des femmes, puisqu’elles sont, par exemple, plus sujettes à des agressions (violence physique, violence sexuelle, etc.) que les hommes. Ils s’expliquent aussi par leur plus grande facilité à évoquer leurs problèmes et à chercher de l’aide, d’où des diagnostics plus fréquents et plus rapides. Autrement dit, les troubles dépressifs chez les hommes passeraient plus souvent sous silence. Certaines personnes sont plus ou moins à l’aise avec la prise de médicaments. Il importe alors de bien prendre connaissance des choix qui s’offrent à nous en s’informant et en questionnant au besoin les professionnels (psychologue, médecin, pharmacien, etc.). Il peut arriver que des gens soient réticents à consulter un psychologue. C’est d’autant plus vrai lorsque la dépression est vue comme une maladie honteuse dont il ne faut pas parler. De fait, c’est exigeant la psychothérapie – on doit se dévoiler –, mais c’est aussi nourrissant et rassurant puisqu’on n’est plus seul pour s’en sortir. Dans l’absolu, il n’existe pas une approche psychothérapeutique plus efficace qu’une autre. Si une personne souhaite se débarrasser de ses symptômes, sans trop d’introspection, une démarche par résolution de problèmes est peut-être la solution. Toutefois, la souffrance dépressive peut s’enraciner dans des difficultés de personnalité et dans des conflits psychiques anciens et nécessiter une démarche en profondeur. Les experts de la santé sont en mesure de proposer la démarche répondant le mieux aux besoins de la personne dépressive. Si vous constatez être aux prises avec certains ou plusieurs symptômes identifiés dans cet article, si vous souffrez de la dépression ou si l’un de vos proches en souffre, n’hésitez plus et faites appel à votre programme d’aide. Quels sont les meilleurs traitements de la dépression? Face à la dépression, les traitements pharmacologiques et psychothérapeutiques sont tous deux préconisés. Les études montrent que, pour les dépressions sévères, l’association d’une psychothérapie et d’un antidépresseur est supérieure à l’utilisation isolée de l’un ou l’autre de ces traitements. Peu importe le traitement choisi, il est nécessaire de se rappeler que la rémission des symptômes prend du temps. La minute psychologique est consacrée à des articles traitant de psychologie. Elle est publiée tous les trimestres par le Groupe Renaud et Associés inc. Tous droits réservés. © Pour contacter votre programme d’aide en tout temps : 1 888 687 - 9197