Connectivité anatomique et fonctionnelle des circuits cortex-ganglions de la base Christine Delmaire (1), Pierre-Jean Lahaye (2), Emmanuel Gerardin (3), Stéphane Lehéricy (1,2), Mathieu Ducros (4), Denis Le Bihan (2), Jacques Chiras (1), Jean-Baptiste Poline (2) (1) Service de Neuroradiologie, CHU Salpétrière, Paris, (2) CEA/SHFJ-IFR 49, Orsay (3) Service de Neuroradiologie CHU C Nicolle, Rouen, (4) Laboratoire de Neurophysiologie et Nouvelles Microscopies, ESPCI-INSERM U603 , Paris-France Introduction Les études réalisées chez l’animal ont établi que les connexions cortico-striatales sont organisées en circuits parallèles distincts. Plusieurs circuits ont été décrits : sensorimoteurs, associatifs et limbiques. Les études électrophysiologiques réalisées chez le singe (Alexander et Crutcher 1990) et les études IRMf chez l’homme (Gerardin et al. 2004) ont montré qu’il existait au sein de ces circuits une organisation fonctionnelle du mouvement, et que des territoires spécifiques du striatum étaient impliqués dans les différentes étapes de l’élaboration d’un mouvement (sélection, préparation et exécution). Lors de la réalisation d’un mouvement en IRMf, l’activation est retrouvée (Gerardin et al. Neuroreport 2004) • Sélection du mouvement : cortex préfrontal, preSMA et noyau caudé • Préparation du mouvement : preSMA, cortex sensorimoteur primaire prémoteur latéral adjacent, putamen antérieur. • Exécution du mouvement : cortex sensorimoteur primaire, prémoteur, pariétal inférieur, putamen postérieur et thalamus. Main droite Main gauche SélectionPréparation PréparationRepos ExécutionRepos Objectifs de l’étude L’objectif de cette étude était de déterminer quels étaient les liens anatomiques et fonctionnels entre les ganglions de la base et le cortex au cours des différentes étapes de l’élaboration et de l’exécution du mouvement. Pour cela, les liens anatomiques ont été déterminés à l’aide des séquences de tenseur de diffusion (DTI) et les liens fonctionnels fonctionnelle. à l’aide des méthodes de connectivité Matériel et Méthode Acquisitions fonctionnelles - Neuf volontaires droitiers ont été étudiés à IRM 3T avec le contraste BOLD (séquences fonctionnelles EPI, SHFJ Orsay) -TR : 2000, TE : 40 ms, angle : 90, matrice : 0,64x0,64, FOV : 220x220, épaisseur de coupes : 1mm Paradigme expérimental Le protocole est celui de l’étude Gérardin et al. Neuroreport 2004 - Durant les acquisitions fonctionnelles, les sujets devaient, en réponse à une instruction, soit Sélectionner la main puis préparer un mouvement de cette main (SELECTION) soit Préparer un mouvement dont le côté était indiqué par l’examinateur (PREPARATION). - Après un délai, les sujets devaient Exécuter (Go) ou inhiber le mouvement préparé (NoGo). Matériel et Méthode Les séquences de tenseur de diffusion ont été réalisées sur 6 des 9 volontaires sains : Images DTI - EPI 1,5 Tesla (General Electric) antenne tête standard TR 10 s, TE 88 ms, angle 90° 3x3x3 mm3, coupes axiales jointives 4 excitations, temps d’acquisition 5:20 min 6 directions indépendantes b-value of 900 s/mm2 1 image de référence sans gradient de diffusion Corrections des distorsions géométriques Matériel et méthode Analyse de la connectivite fonctionnelle • L’analyse de la connectivité a été réalisée sur le signal au niveau de 6 régions d’intérêt dessinées sur les coupes anatomiques. • L’amplitude des réponses a été calculée pour tous les événements simples dans chaque condition à l’aide du modèle général linéaire • La connectivité entre les régions a été définie comme la corrélation entre l’amplitude du signal pour chaque condition et sujet. Analyse de la connectivité anatomique • Reconstructions des fibres basée sur la méthode de Basser (Basser, P. J., et al. MRM 2000;44:625-632.) • Seuils de FA = 0,1 Angle = 60° • Une matrice de connectivité a été calculée entre chaque région corticale et sous corticale (Conturo et al, 1999). Elle comptabilise le nombre de fibres liant chacune des régions corticales aux régions sous corticales. Matériel et méthode Les régions d’intérêt Les régions d’intérêt ont été dessinées dans les deux hémisphères selon des repères anatomiques. – Quatre régions corticales • le cortex moteur primaire incluant le gyrus précentral • la SMA : limitée en bas par le sillon cingulaire, en arrière par le sillon précentral, et en avant par VCA • la préSMA : en avant de la SMA, la limite antérieure a été définie par une ligne virtuelle passant par le milieu du genou du corps calleux et parallèle à VCA • le cortex préfrontal : correspond à la partie latérale du lobe frontal, en avant du cortex prémoteur – Quatre régions d’intérêt sous corticales • Le putamen antérieur : en avant de VCA • Le putamen rétrocommissural : en arrière de la ligne VCA a été subdivisé en deux parties : – une partie postérieure correspondant à la moitie postérieure – et une partie moyenne correspondant à la moitie antérieure • La tête du noyau caudé Résultats Les connexions des régions corticales en DTI • Cortex moteur primaire, SMA et cortex prémoteur latéral: putamen postérieur et moyen (p<0,03) • preAMS : putamen moyen (p<0,03) • Cortex préfrontal putamen moyen, antérieur et noyau caudé (p<0,03) Nombre de fibres PF Putamen posterieur M1 SMA preSMA Putamen moyen Putamen antérieur Noyau caude Etude de la connectivité fonctionnelle (Tableaux 1 et 2) Les connexions fonctionnelles directes (au sein des circuits anatomiques) - Cortex Dorsolatéral Préfrontal Gauche – Noyau Caudé Gauche - Putamen Postérieur Droit – SMA Droite sont significativement plus fortes que les connexions croisées correspondantes au seuil de significativité de 1% (indiquées en rouge). Corrélation Cortex Dorsolatéral Préfrontal (DLPFC) Cortex prémoteur Aire Motrice Supplémentaire ( SMA) Noyau caudé (NC) 0,53 (G) – 0,43 (D) 0,42 (G) – 0,43 (D) 0,.33 (G) – 0,42 (D) Putamen Antérieur 0,42 (G) – 0,35 (D) 0,36 (G) – 0,39 (D) 0,33 (G) – 0,41 (D) Putamen Postérieur 0,49 (G) – 0,40 (D) 0,47 (G) – 0,49 (D) 0,41 (G) – 0,53 (D) Tableau 1 : amplitude des corrélations indépendamment des conditions (mouvement de la main droite (D) ou de la main gauche (G) Corrélations entre les régions activées en fonction de la condition, correspondant aux connexions testées ( Tableau 2) . - La connexion fonctionnelle entre le noyau caudé-cortex dorsolateral préfrontal droit augmentait fortement au cours de la sélection - La connexion fonctionnelle entre le putamen postérieur-SMA gauche augmentait au cours de l’exécution Corrélation CDLPF – NC preSMA Putamen ant M1- Putamen post SMA Putamen Post Sélection 0,55 (G) – 0,70 (D) 0,62 (G)- 0,35 (D) 0,69 (G) – 0,62 (D) 0,53 (G) – 0,40 (D) Préparation 0,56 (G) – 0,60 (D) 0,59 (G) - 0,6 (D) 0,48 (G) – 0,46 (D) 0,58 (G) – 0,54 (D) Go 0,56 (G) – 0,46 (D) 0,46 (G) - 0,56 (D) 0,68 (G) – 0,38 (D) 0,68 (G) – 0,43 (D) Tableau 2 : corrélations obtenues lors des réponses des différents types d’événements (mouvement de la main droite (D) ou de la main gauche (G) ) Conclusion • Il existe des territoires fonctionnels distincts du striatum, intégrés au seins de circuits cortex-ganglions de la base, impliqués dans les processus mentaux associés à la sélection (circuit associatif), la préparation (circuit prémoteur) et l’exécution du mouvement (circuit moteur). • Ces circuits fonctionnels associatifs, prémoteurs et moteurs se superposent aux circuits anatomiques striato-corticaux définis en DTI. • Les relations fonctionnelles directes entre les régions corticales et sous corticales associées à la sélection, la préparation et l’exécution du mouvement sont augmentées lorsque ces aires sont recrutées pour réaliser la tache motrice. Références. (1) Alexander GE et al. Parallel organization of functionnally aggreagted circuits linking basal ganglia and cortex. Annu Rev Neurosci. 1986 (2) Flaherty and Graybiel. Two input systems for body representations in the primate striatal matrix: experimental evidence in the squirrel monkey. J Neurosci 1993 (3) Inase et al. Overlapping corticostriatal projections from the supplementary motor area and the primary motor cortex in the macaque monkey: an anterograde double labeling study. J Comput Neurol 1996 (4) Selemon and Goldman-Rakic. Longitudinal topography and interdigitation of corticostriatal projections in the rhesus monkey. J Neurosci 1985 (5) Lehéricy et al. Diffusion tensor fiber tracking shows distinct cortico striatal circuits in humans. Ann Neurol, 2004 (6) Gérardin et al. Distinct striatal regions support movement selection, preparation and execution. Neuroreport 2004