SPEED CONFERENCES
Linvestissement de défense
comme levier de croissance
Restitution
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Synthèse
Combien 1 e d’investissement de défense
rapporte-t-il à l’économie globale ?
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Ouverture
Vice-amiral d’escadre
Richard LABORDE
Directeur de l’Institut des hautes études
de défense nationale et de l’Enseignement
militaire supérieur
9
Modérateur : Christian MENANTEAU
Éditorialiste économique à RTL, vice-président
de l’Association des journalistes économiques
et financiers (Ajef)
11
Keith HARTLEY
Professeur d’économie, université d’York
(Royaume-Uni)
15
Fanny COULOMB
Maître de conférences, Institut d’études poli-
tiques de Grenoble (IEP)
19
Jacques ABEN
Professeur d’économie, université Montpellier 1
et École de l’air
21
Julien MALIZARD
Chercheur et lauréat du prix de thèse de
l’IHEDN, université Montpellier 1
24
Frédéric GONAND
Professeur associé Paris-Dauphine, auditeur de
la 64e session nationale "Politique de défense"
27
Olivier MARTIN
Secrétaire général MBDA
29
Wally STRUYS
Professeur d’économie émérite de l’École
royale militaire de Bruxelles (Belgique)
33
Marc-Antoine KLEINPETER
Administrateur civil hors classe, directeur de
l’Observatoire économique de la défense (OED)
Sommaire
2
L'investissement de défense comme levier de croissance
SPEED CON FERENCE
Combien, 1 1 d’investissement de défense
rapporte-t-il à l’économie globale ?
Synthèse
Est-il économiquement utile d’investir dans
la défense ? Ces investissements servent-
ils à développer des politiques scientifiques,
technologiques et industrielles avisées ? La
défense a-t-elle quelque chose à voir avec
la croissance ? Des questions simples dans
leur libellé, des réponses sans doute plus
complexes, voire risquées et, en tout état
de cause, diversifiées. Une question est
toutefois demeurée sans réponse au cours
des débats. Si le coût de l’investissement
de défense est mesurable, quel est le
prix de ce bien collectif que constituent la
sécurité et l’indépendance ?
Dans le contexte budgétaire et financier
actuel, les dépenses de défense dans
la plupart des pays européens vont être
réduites, tandis que le coût des équipements
augmente. Dorénavant, aucune Nation
européenne ne semble pouvoir se permettre
financièrement une gamme complète de
capacités militaires. Comment résoudre
ce problème ? Accroître les ressources
consenties ? C’est peu probable. Une
option serait d’accepter une réduction
graduelle des capacités dont disposent les
armées, avec la redéfinition à terme de nos
ambitions nationales, forcément moindres.
Une autre solution est d’opérer une rupture,
de supprimer des capacités majeures et de
rechercher une autre cohérence, s’agissant
notamment d’autonomie stratégique, à
défaut de renoncer à être un sujet de
l’histoire. Cette cohérence qui semble
désormais difficilement accessible dans
un cadre national le serait-elle au niveau
européen, en développant par exemple un
marché unique de matériels de défense
européen ou en créant une base industrielle
de défense européenne ? Les industries de
défense nationale coûtent cher ; il y a une
duplication des programmes de recherche
et de développement ainsi que des séries
d’équipements beaucoup trop réduites,
ce qui signifie que nous ne réalisons pas
d’économies d’échelle en Europe. Une
voie serait celle du partage des capacités.
Mais, le problème du partage c’est celui
de la confiance entre les partenaires.
Lancée dans les années 2010, force est
de constater que les perspectives de
l’initiative "mutualisation-partage" restent
aujourd’hui limitées.
Pour aborder la question d’un point de vue
théorique, les modélisations généralement
keynésiennes tendent à montrer un effet
négatif des investissements de défense
par des effets d’évictions notamment
d’autres investissements publics. Si
l’on prend, maintenant, la question de
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L'investissement de défense comme levier de croissance
SPEED CON FERENCE
l’investissement de défense, plutôt comme
facteur de croissance d’un point de vue
macro-économique, John Maynard Keynes
a reconnu que l’investissement de défense
était de la dépense publique, dont l’intérêt
surtout en période de crise économique,
est de permettre des investissements qui,
sinon, ne seraient pas entrepris, parce
que considérés comme non suffisamment
rentables du fait que l’efficacité marginale
du capital est inférieure au rendement d’un
placement, par exemple sur les marchés
financiers ou à la banque. Les théories
plus libérales, néoclassiques, tendent à
montrer des effets, de plus long terme,
plutôt positifs. On constate que les grandes
innovations majeures mises au point par
le secteur militaire l’ont été en période de
guerre (aéronautique, nucléaire, électricité,
Internet…).
S’agissant des États-Unis, pour certains
experts les dépenses militaires et les
crédits colossaux accordés à la recherche
et développement (R&D) militaire, sont l’une
des clefs de la croissance économique
américaine et de son positionnement
actuellement sur les technologies les plus
en pointe, la supériorité américaine dans
un très grand nombre de technologies
qui sont les technologies clefs de
l’économie contemporaine. Pour sa part,
le Prix Nobel d’économie Joseph Eugène
Stiglitz considère aujourd’hui que l’effet
de relance est très limité aux États-Unis,
étant donné que les dépenses des guerres
d’Irak et d’Afghanistan sont faites en
grande partie hors du territoire américain
et font, finalement, peu travailler les firmes
américaines.
En France, le ministère de la Défense
constitue le premier investisseur public.
Les dépenses publiques de l’État sont à
80 % liées au ministère de la Défense. Sur
le court terme, joue un effet antikeynésien,
avec l’idée que le supplément de dépenses
d’équipement est néfaste pour la crois-
sance, alors que sur le long terme, il va
améliorer la productivité du secteur privé.
A priori, l’investissement de défense – les
dépenses de R&D – va plutôt améliorer la
productivité du secteur privé. En France, il y
a un effet légèrement positif des dépenses
de défense sur la croissance. Les dé-
penses d’équipement n’ont pas d’influence
néfaste, n’évincent pas l’investissement
privé. S’il y a un effet positif des dépenses
militaires, il se cale sur l’effet des dépenses
d’équipement. A contrario, les dépenses
hors équipement, relevant du titre III, n’ont
pas d’influence sur la croissance et ont
un effet négatif d’éviction sur l’investisse-
ment privé. Pourtant, a priori, les gains de
croissance à attendre du titre V sont plutôt
faibles.
Selon l’Institut national de la statistique
et des études économiques (Insee), l’effet
multiplicateur sur le PIB d’un investissement
public générique est légèrement supérieur
à l’unité, compris entre 1,1 et 1,3, sans
fuite par l’épargne contrairement à une
mesure de baisse d’impôts. Aujourd’hui,
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L'investissement de défense comme levier de croissance
SPEED CON FERENCE
on parle beaucoup de réduire les dépenses
avec l’idée du rabot. Ce n’est pas une
bonne façon de procéder. Il est plus positif
et économiquement plus pertinent de se
demander comment relever l’efficacité de
la dépense publique.
Pour acquérir des capacités militaires,
un État a le choix entre deux options :
l’achat sur étagère de produits développés
à l’extérieur, ou l’achat auprès de son
industrie nationale. Qu’est-ce que, l’État
obtient en retour d’un investissement en
R&D, sur le plan économique, par rapport
à une situation où il achèterait ses produits
sur étagère ? Il obtient des emplois. Ces
emplois font des salaires, qui paient
des charges sociales et des impôts. Les
sociétés font des résultats, paient des
impôts, des taxes, exportent. L’exportation
génère également salaires, impôts, charges
sociales, etc.
Existe-t-il un keynésianisme militaire ?
L’économiste Ron Smith estime qu’"avec
un effort de défense de moins de 5 % du
PIB, les effets macro-économiques des
dépenses militaires sont probablement
faibles. Les décisions concernant le budget
de défense doivent être prises en termes
de menaces et de coûts d’opportunité,
et non pas en fonction des effets macro-
économiques."
Finalement, la défense est-elle un
investissement rentable ? Outre le choix du
modèle économétrique utilisé, la réponse
à toute question de ce type dépend,
selon les économistes, de l’évaluation
des bénéfices et des coûts. Mais en cette
matière, la défense, les bénéfices sont
difficiles à évaluer et à mesurer. Bien sûr,
il serait possible de chiffrer le coût de la
fermeture du détroit d’Ormuz au travers de
l’augmentation du prix du baril de pétrole.
Mais plus généralement, la légitimité
des ressources consenties à la défense
dépend finalement de nous, citoyens
et contribuables. La défense n’est pas
qu’une affaire d’avantages économiques,
d’emplois, d’avancées technologiques,
d’exportation, de croissance. Elle garantit la
sécurité et assure l’indépendance. Quelles
ressources sommes-nous prêts à consentir
pour garantir notre sécurité collective
et assurer notre indépendance dans ce
monde en peine restructuration ?
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