L`angle mort de la république, c`est que le régime

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Vie politique française
But de ce cours : avoir une idée de comment fonctionne la vie politique, comprendre les phénomènes. Pas
de retenir tous les événements qui ont eu lieu durant cette période (pas d’histoire pour l’histoire, mais il faut
bien des bases).
Exam de janvier : on a accès à nos notes de cours. On ne nous demandera donc jamais une simple
présentation des faits.
18 séances, 1 chapitre par séance.
À propos des livres de la biblio : elle comporte des romans, utiles pour s’immerger dans la manière de
penser des gens durant les périodes que nous étudions.
Séquence 1 : La structuration de l’activité politique jusqu’en 1914
Chapitre 1 : Repères
Partie 1 : l’Ancien Régime
Ancien Régime : de la Renaissance (XV-XVIe siècles) à la Révolution française (1789).
1. Régime politique : la monarchie absolue.
De droit divin : la légitimité de la monarchie absolue ne vient pas d’elle-même. Elle vient d’en haut, d’une
force divine absolue, et est donc indiscutable. L’Église joue de fait un rôle essentiel en politique.
L’opposition structurante de l’époque est le conflit entre le roi et la noblesse. Les autres catégories sociales
sont en-dehors de la politique.
2. Régime social : de statut
Remarque préliminaire : après la Révolution, les idées sociales de l’Ancien Régime ne sont plus considérées
comme légitimes mais restent toujours dans les esprits.
Chacun a un statut : une place définie que l’on garde toute sa vie. Par exemple : « pauvre » (statut vertueux
aux yeux de l’Église, d’ailleurs). Une politique pour les pauvres consiste donc à l’époque à faire en sorte que
l’on soit bien étant pauvre, pas que l’on devienne plus riche.
Ces statuts sont héréditaires, séparés, ont chacun une fonction et une valeur différentes. En théorie on se
respecte, en pratique il y a du mépris entre les statuts.
Société tripartite divisée en trois ordres : clergé (ceux qui prient), noblesse (ceux qui font la guerre), TiersÉtat (ceux qui travaillent).
C’est une société fondée sur la hiérarchie, par opposition à l’égalité (opposition à distinguer de égalité /
inégalité).
Cela correspond à une conception plus générale du monde : la physique d’Aristote, qui affirme par
exemple que la matière est faite de 4 éléments (air, feu, terre, eau). Tous les objets sont dans cette
conception d’une qualité différente, incomparable (deux chaises apparemment identiques ne sont pas les
mêmes, elles n’ont en effet pas la même qualité). Le monde social est ainsi pensé de la même façon. Cela
se retrouve dans le vocabulaire : on parle de « personne de qualité » pour quelqu’un qui a un haut statut
social.
C’est donc une pensée très différente de celle d’aujourd’hui : la notion d’égalité n’est pas dans les esprits
à l’époque.
3. Un régime de vérité
Société réglée par la croyance chrétienne : il y a une seule vérité, la vérité révélée, qui vient d’en haut et
est révélée par le prêtre. La raison est toujours de ce côté-là. On considère que la perception des sens, ce qui
vient de l’expérimentation, est illusoire et trompeur. Seuls les livres sacrés délivrent la vérité.
Il y a donc une hiérarchie des savoirs : la science suprême est la théologie (enseignée en latin), puis vient la
philosophie, puis tout en bas les mathématiques qui servent alors surtout à faire des fortifications et de
l’astrologie (cette dernière discipline étant alors utile aux médecins).
Transition : la Révolution française (1789-1799)
1789 : ouverture des États généraux, 1799 : coup d’état de Bonaparte.
Elle se pense universelle ( ?).
Révolution scientifique : réhabilite la physique de Newton, dans laquelle la connaissance vient de
l’observation. Ce sont les philosophes de Lumières qui s’y intéressent.
Exemple : opposition médecins / chirurgiens. Les médecins enseignaient le fonctionnement du corps humain
en latin (métier de haute valeur). Les chirurgiens avaient eux un métier d’artisan : ils coupaient, s’occupaient
des plaies etc.
Notion nouvelle d’unité de la matière : tous les êtres sont faits de la même matière (deux chaises sont faites
de la même matière, on ne considère plus qu’elles sont d’une qualité différente). Ce qui est un début de
naissance de la notion d’égalité.
On se met progressivement à penser plus quantitativement que qualitativement.
1789-1795 : grande incertitude sur la forme que doit prendre le gouvernement. Mais ce n’est pas la question
centrale. D’ailleurs, la monarchie n’est pas d’emblée exclue des formes de gouvernement possibles.
Ce qui intéresse les révolutionnaires est la liberté, l’égalité, et la propriété.
Le régime change de nom : « République ». Il ne s’agit pas aux yeux des révolutionnaires d’un régime
politique à proprement parler, d’une forme particulière de gouvernement (cf. citation de Robespierre : « Le
mot république ne signifie aucune forme particulière de gouvernement, il appartient à tout gouvernement
d’hommes libres, qui ont une patrie. »).
Naissance de l’idée du gouvernement représentatif. Répond à un problème nouveau : d’où vient la
légitimité du pouvoir si elle ne vient plus de Dieu ? De la Nation, sorte d’entité servant à remplacer l’idée de
Dieu par son équivalent laïc ? Du peuple ? Le gouvernement représentatif est une sorte de compromis, une
alternative à la démocratie, et non l’expression même de la démocratie.
Partie 2 : la succession des régimes politiques au XIXe siècle.
1. Le Premier Empire (Napoléon Ier)
Régime socialement individualiste, politiquement autoritaire, et militarisé.
Gouvernement d’un seul homme : l’Empereur, qui prend sa légitimité de l’adhésion du peuple contre les
notables ( ?).
Nouvelle définition de la noblesse : la noblesse d’Empire est un titre donné par l’Empereur à quelqu’un.
Tout le monde a donc la même qualité puisqu’on peut tous être choisis.
Création du Code Civil : individualiste, considère un individu quelconque, et donc présuppose que tous les
individus sont de même qualité, sont comparables.
2. 1814-1830 : la Restauration
Charte de 1814 qui se réfère au Droit divin : la religion catholique est la religion d’État (mais liberté de
culte, tout de même).
Tentative de retour à l’Ancien Régime avec Louis XVIII (1814-1824) et Charles X (1824-1830). Ce dernier
tente de réinstaurer la notion de sacrilège et de revenir à un régime de vérité.
Remarque historique : le règne de Louis XVIII est brièvement interrompu durant les Cent-Jours (marsjuillet 1815) où Napoléon Ier revient brièvement au pouvoir.
3. Du suffrage censitaire au suffrage (partiellement) capacitaire
1830-1848 : monarchie de juillet. Toujours une monarchie constitutionnelle et un suffrage censitaire aux
élections.
Louis-Philippe Ier (Louis-Philippe d’Orléans : autre famille) a une conception de la société différente de
celle de l’Ancien Régime et soutenue par Guizot (député et plusieurs fois ministre sous la monarchie de
juillet) : une conception capacitaire du vote, qu’il fait passer dans la loi électorale de 1831. Elle ouvre la
possibilité de voter aux citoyens âgés de 25 ans, qui payent 200 francs (cher) de cens. On peut aussi voter
sans payer si l’on est officier à l’armée, si l’on est à l’Académie des sciences, si l’on est médecin,
enseignant…
Guizot : « Je ne crois ni au Droit divin, ni à la souveraineté du peuple […]. Je ne puis voir là que des
usurpations de la force. Je crois à la souveraineté de la raison, de la Justice, du Droit : c’est là le souverain
légitime que cherche le monde et qu’il cherchera toujours ; car la raison, la vérité, la Justice ne résident
nulle part complètes et infaillibles. Nul homme, nulle réunion d’hommes ne les possède et ne peut les
posséder sans lacune et sans limites. ».
Ainsi le vote n’est pas un droit : c’est une fonction, que l’on peut remplir quand on respecte certaines
conditions qui permettent de s’assurer que celui qui vote le fait avec raison.
Dans les faits, c’est la bourgeoisie et l’aristocratie qui votent. 2,4 % des français majeurs sont électeurs en
1848.
La légitimité du vote ne vient donc pas de l’électorat mais de la « raison ».
Pour Guizot comme pour Tocqueville, la démocratie ne correspond pas à une forme précise de
gouvernement, c’est un état de la société. Le gouvernement peut lui être soit monarchique soit républicain.
4. 1848-1852 : deuxième république
Démarre avec la révolution de 1848.
Conservatrice.
Se termine en 1852 suite au coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte du 2 décembre 1851.
5. 1852-1870 : le Second Empire
Régime autocratique (un seul individu détient le pouvoir : abaisse les assemblées), administration
centralisée. L’Empereur, Napoléon III (Louis-Napoléon Bonaparte, neveu de napoléon Ier), se pense
« socialiste » : il accorde d’ailleurs le suffrage universel masculin au peuple. Ce n’est toujours pas la source
de la légitimité du pouvoir mais un moyen de confirmer l’affection du peuple envers l’Empereur
(césarisme) : le vote de confiance, ou plébiscite.
Chapitre 2 : la longue naissance de la IIIe République
Naît d’une guerre perdue : la guerre de 1870 contre la Prusse.
Dure de 1870 jusqu’en 1940 (le maréchal Pétain prend les pleins pouvoirs).
Il y a en 1870 de plus en plus de députés républicains, essentiellement à Paris. Il y a alors unanimité sur le
modèle de gouvernement représentatif (mais pas sur le sens à lui donner, sa nature : république ou non ?).
Les monarchistes sont toujours là : ils freinent l’installation de ce nouveau régime qui met ainsi longtemps à
s’installer.
Partie 1 : 1870-1879, la stabilisation du régime
1. 1870-1871 : la fin de la guerre
Guerre France-Prusse, l’armée impériale n’est pas préparée et perd (en particulier, bataille de Sedan en
septembre 1870, suite à quoi Napoléon III est fait prisonnier). La République est alors proclamée le 4
septembre à Paris. Gouvernement « de défense nationale » servant à continuer la guerre, constitué
notamment de Jules Ferry, Jules Favre, Jules Simon, Léon Gambetta, et le général Trochu à sa tête.
Jules Simon : républicain, prof de philo, député en 1848, conservateur mais à l’époque figure de la
république.
En septembre Paris est encerclée. Gambetta quitte Paris en ballon et installe une délégation à Tours où il
fonde une seconde armée qui échoue aussi à chasser les prussiens.
Armistice fin janvier 1871 : la trêve est destinée à organiser l’élection d’une assemblée nationale qui devra
décider de la suite ou de la fin définitive des combats.
8 février : élection d’une Assemblée Nationale. 400 députés royalistes, 30 bonapartistes, 250 républicains.
13 février : elle se réunit à Bordeaux. Jules Grévy est élu pour la présider. Le 17, Adolphe Thiers
(conservateur) est alors nommé « Chef du pouvoir Exécutif de la République française ».
10 mai 1871 (2 semaines avant la fin de la Commune qui a lieu de mars à mai) : signature du traité de
Francfort qui met fin à la guerre, avec annexion de l’Alsace et de la Moselle par la Prusse (en train de
devenir l’Empire allemand) ainsi qu’une indemnité de guerre de 5 milliards de francs.
8 juin : déclaration de Thiers devant l’Assemblée. Il y annonce que l’organisation du gouvernement pourra
être à l’avenir une monarchie mais qu’il faut d’abord faire un « essai loyal de République ».
Loi Rivet : Thiers est renommé en « président » avec des pouvoirs faibles, contrôlé par l’assemblée alors
monarchiste…
2. 1872-1875 (ou 71-76) : l’acceptation d’une constitution républicaine par une assemblée
monarchiste
Gambetta annonce en septembre 1872 une « couche politique nouvelle » (l’arrivée des classes moyennes en
politique jusque là bridées par la monarchie censitaire puis le gouvernement impérial).
L’assemblée reste monarchique mais à chaque élection, les républicains gagnent.
Les monarchistes constituent malgré tout un gouvernement de restauration à partir de 1873. En mai, Thiers
est mis en minorité, démissionne et est remplacé par Patrice de Mac Mahon (anobli par Napoléon, antirépublicain). Il nomme le duc de Broglie (« breuil ») qui constitue un gouvernement de « restauration
morale » et épure l’administration républicaine.
Octobre 1873 : le comte de Chambord (Henri d’Artois, appelé aussi Henri V, considéré légitime par les
monarchistes, même les orléanistes) annonce qu’il ne sera jamais le « roi légitime de la révolution » et ne
gouvernera que sous le drapeau blanc. En attendant qu’il meure, le pouvoir de Mac Mahon est prolongé de
sept ans par l’assemblée… (« Puisque Dieu n’a pas voulu ouvrir les yeux au comte de Chambord, on va
attendre qu’il les lui ferme » déclara alors le Comte de Mérode)
Début 1875, amendement Wallon (« valon ») : « le président de la République est élu à la majorité absolue
des suffrages par le Sénat et la chambre des députés réunis en Assemblée Nationale. Il est nommé pour sept
ans ; il est rééligible. ». Il est question du président de la République : le centre-droit concède donc ce terme
pour assurer un régime dans les faits conservateur.
3. 1876-1879 : la chute de Mac Mahon et l’évolution vers un régime républicain
1876 : création du sénat et de la chambre des députés.
Au sénat : autant de républicains que de conservateurs.
Députés : majoritairement républicains. Chambre présidée par Jules Grévy.
Début 1879, le maréchal de Mac Mahon démissionne (succès des républicains à l’assemblée) et est remplacé
par Jules Grévy qui est élu Président de la République. Ce dernier promet de ne « jamais rentrer en lutte
contre la représentation nationale ». Il nomme Waddington plutôt que Gambetta comme président du conseil
des ministres.
Partie 2 : 1880-1890, la stabilisation du fonctionnement du régime
1. Le boulangisme des années 1887-1888
1880-1885 : mise en place de la République, mais de nombreuses questions restent ouvertes sur le plan
social (les républicains sont divisés sur ces problématiques).
1885 : mécontentement populaire lié à une crise économique et au blocage de nombreuses lois au niveau du
sénat.
En 1886 le général Boulanger devient ministre de la guerre. Il exclut les descendants des familles de
monarques des hauts postes pour éviter toute restauration et il engage une révision de la constitution.
En 1887 Grévy démissionne suite au scandale des décorations (son gendre, Daniel Wilson, député, procède à
un trafic des décorations). Crise antiparlementariste.
1889 : Boulanger est élu député, ses partisans veulent l’emmener à l’Élysée pour faire un coup d’État, ce
qu’il refuse. Il s’enfuit à Bruxelles et meurt en 1991.
2. 1890 : le ralliement officiel du Vatican à la forme républicaine du gouvernement
Problème de base : être monarchiste à l’époque excluait d’emblée de la vie politique.
Le pape publie en février 1892 une encyclique intitulée « au milieu des sollicitudes », pour marquer le
ralliement du Vatican à la République et inciter tous les catholiques de France à en faire de même.
3. 1898 : l’affaire Dreyfus
Moment de la recomposition de la droite. Celle-ci cesse de se définir comme monarchiste et se dit alors
nationaliste.
Chapitre 3 : L’installation d’un nouveau régime
Le changement de régime va avec un bouleversement d’idées et de nombreuses interrogations.
Pour beaucoup d’observateurs à l’époque, instituer une république est une idée très bizarre : il y en a alors
en Suisse (plus de vaches que d’hommes), aux États-Unis (loin de l’autre côté), mais pas en Europe. L’idée
est que ce n’est pas un régime valable pour un pays rural.
En 1868 : tous les invités sont présents à l’expo universelle. En 1889 : beaucoup la boudent…
Cette république est un régime politique et un régime de société.
Partie 1 : un régime politique
-
1. Les institutions
Le suffrage universel : préexistant.
Les 3 lois constitutionnelles de février 1875 : arrivent dans un ordre qui interpelle. Elles sont
promulguées durant 3 jours consécutifs, la première à être votée est celle relative à l’organisation du
Sénat. Ensuite est votée celle sur l’organisation des pouvoirs publics, puis celle sur les rapports entre ces
pouvoirs publics.
La loi sur le Sénat votée par les monarchistes « n’est pas une victoire de la République, au contraire » :
traditionnellement, la République, c’est une assemblée, pas deux. L’idée est que le contrôle du Sénat et du
président permettent de dissoudre la chambre et de revenir à une monarchie si nécessaire.
Tentative de faire en sorte que les sénateurs soit nommés. Puis Wallon parvient à un compromis : ils seront
225 élus pour 9 ans, mais par suffrage indirect. Mais aussi 75 membres nommés à vie par l’assemblée. Ils
doivent avoir plus de 40 ans.
 Conception purement capacitaire du vote.
Le Sénat a l’initiative des lois, tout comme la chambre des députés.
Loi sur l’organisation des pouvoirs publics : c’est là qu’est inséré l’amendement Wallon comportant le mot
« République ». Volonté de prééminence du parlement (dans l’idée des républicains, parlement = chambre
des députés, ils oublient un peu le Sénat qui les rattrapera). Président : élu par le parlement.
L’initiative des lois est accordée aux deux chambres ET au président.
Il est prévu explicitement que le siège du pouvoir exécutif est à Versailles : peur de Paris.
Loi sur les rapports entre les pouvoirs : essentiellement une disposition symboliquement importante, qui est
l’obligation de faire chaque année des prières publiques pour que Dieu garantisse le fonctionnement de la
chambre des députés…
Ces institutions sont donc pensées pour revenir à la monarchie dès que cela sera possible.
Problème que posent ces institutions : le poids du Sénat, qui doit voter les textes validés par la chambre
exactement dans les mêmes termes, et le contrôle de la chambre par les députés qui sont en même temps de
grands élus locaux (maires de grandes villes).
Deux révisions de la Constitution en 1879 (Mac Mahon battu, Grévy élu : résolution symbolique qui ramène
les institutions à Paris) et en 1884 (réforme plus profonde : suppression des prières publiques, « la forme
républicaine du gouvernement ne peut pas faire l’objet d’une révision », les membres des familles qui ont
gouverné sur la France ne peuvent pas être élus président de la république).
2. La doctrine : affirmation des principes de la Révolution française
Longtemps, « principes » = idéaux de gauche, « valeurs » = idéaux de droite.
Cette Constitution n’a pas de préambule, elle ne dit pas ce qu’elle veut être, il n’y a que l’organisation des
pouvoirs. Aucun principe n’y est affirmé… Mais on parle de plus en plus des « principes de la Révolution
française » : le rejet du Droit divin et la DDHC ce qui implique : la liberté, l’égalité en droits, la propriété,
l’adaptation du salaire aux compétences, pas d’arbitraire en justice.
1875-11880 : idée dans les villes que l’amélioration du pouvoir du parlement va tout résoudre.
3. Une conception abstraite du peuple
Conception des notables selon laquelle le peuple est une idée théorique faite d’individus égaux : non, ils ne
votent pas toujours pour les républicains. France pays rural : « république de paysans ». Certains
républicains, les agrariens (Jules ferry par exemple), ont une conscience de ce « problème » avec les
paysans, jugés comme des êtres inférieurs. Puis universalisation de la figure de l’ouvrier (on en reparlera).
Partie 2 : un régime de société
1. La question de la vérité
La République est un régime de vérité (comme sous l’Ancien Régime !) qui concerne l’explication du
monde en général. Il s’oppose ainsi frontalement à l’Église dès qu’elle veut imposer sa vérité.
Exemples : 1884, rétablissement du divorce ; 1880 : suppression du repos obligatoire du dimanche, car il
est dédié à la messe. On le rétablit ensuite en 1906, mais dans le cadre d’une politique sociale, pas
religieuse.
Source de la vérité : la raison, la science. « Être républicain, c’est exercer sa raison ». Appui sur
l’observation, raisonnement : la transcendance ne nous intéresse pas en politique. Perfectibilité de
l’Homme : la gauche pense qu’il peut évoluer, la droite qu’il est ce qu’il est et qu’il faut faire avec. Ces
conceptions ont des influences directes sur les politiques d’éducation, par exemple.
Apogée de la doctrine positiviste (choses positives = choses que l’on peut observer et étudier concrètement,
par opposition aux choses métaphysiques ; dans cette acception, la république est positive, elle est une
réalité concrète) d’Auguste Comte, mathématicien, sociologue (l’un des premiers). L’un de ses disciples,
Littré, fut sénateur : il se disait positiviste et rédigeait des définitions politiques très orientées dans son
dictionnaire de langue. Ses amis : Gambetta et Ferry, au cœur du positivisme républicain. Ils sont tous les
trois dans cette perspective selon laquelle la religion catholique est en déclin et est vouée à disparaître face
au progrès qui vient de la République.
En 1873, à la publication du dictionnaire, Ferry prévoit l’avènement de la politique comme science morale :
elle deviendrait une science positive, dont on va pouvoir déterminer les lois. Ils pensent que c’est cela qui
stabilisera enfin le régime politique français. En 1875, Ferry et Littré deviennent le même jour francsmaçons au cours d’une cérémonie. Ferry se réfère alors clairement à Auguste Comte. Clémenceau (médecin)
rejoint aussi le positivisme.
2. Le principe de primauté de la loi, de la compétence et de la patrimonialité
Dans la conception capacitaire du vote, la capacité est quelque chose de définitif : on l’a ou on ne l’a pas, on
est destiné à être gouvernant ou à être gouverné. Les républicains parlent quant à eux de compétences que
l’on peut acquérir (idée de perfectibilité de l’Homme propre à la gauche).
Exemple : le recrutement de la fonction publique. Il y a d’une part les offices (fonctions données en fonction
d’une compétence), que l’on achète et qui sont transmis héréditairement et font de quelqu’un un officier ;
d’autre part il y a les commissions (missions bien précises) qui font les commissaires. Jusqu’en 1880, le
recrutement des fonctionnaires se fait essentiellement sur la base de recommandations.
La République substitue aux recrutements par la recommandation le recrutement par le concours ;
l’assistance en fonction de critères objectifs au lieu de l’aumône faite à une personne particulière.
Cette transition se fait lentement : les recommandations ne sont pas supprimées, mais elles ne suffisent plus.
Dans les années 1880, on observe que la question de la compétence et des critères objectifs dans tous les
domaines tend à prendre plus d’importance que les relations personnelles. Ainsi, ceux qui ont des
compétences mais pas de relations peuvent obtenir un poste. Même des pauvres peuvent avoir des
allocations…
3. La question du régime économique et social (qui reste ouverte)
« L’angle mort de la république, c’est que le régime économique et social reste indéterminé et ce sera l’objet
du débat avec les socialistes durant les années 1890 ».
Chapitre 4 : Les lois fondatrices
4 ensembles de textes :
- Les lois mettant en place les libertés publiques
- Les lois scolaires
- Les lois d’organisation des pouvoirs locaux (grande loi communale de 1884)
- Lois sur la nationalité et sur la conscription (recrutement de l’armée) : 1889.
I.
Les lois de libertés
Lois symboliques : 1879 dès que Grévy est président, restauration de La Marseillaise comme hymne
national, instauration de la fête nationale du 14 juillet, amnistie des communards.
Lois de libertés : 29 juillet 1881, loi sur la liberté de la presse voté par 444/448 députés (donc même les
monarchistes ne se sentent plus légitimes pour contrôler la presse) ; 1884, loi sur les syndicats.
La liberté de la presse va avec la liberté de réunion le 30 juin 1881 et l’ouverture des débits de boissons
(1880) : favorise le débat politique. La presse est un élément nouveau de l’expression politique. Sous
l’Empire, jusqu’en 1868, il fallait une autorisation pour publier des articles. Dès 1870, on discute de la loi
sur la presse à l’assemblée. En 1877, on institue une commission extraparlementaire dans laquelle il y a des
parlementaires et des professionnels de la presse.
Cette loi indique que la presse est libre. D’un côté, elle perd la dépendance vis-à-vis du pouvoir, mais elle
devient potentiellement dépendante vis-à-vis des intérêts industriels.
Loi de 1864 sur les coalitions : la coalition n’est plus un délit.
Loi Waldeck-Rousseau (disputée dès 1882) : débat sur l’autorisation des fédérations de syndicats,
finalement autorisés.
Pas de liberté pour les associations : problèmes des associations religieuses qui font de l’enseignement
(congrégations). Donc, tant que l’Église et l’État ne sont pas séparés, pas de liberté d’association. En 1883,
Jules Ferry bloque le projet de loi sur la liberté d’association après les lois sur l’éducation pour s’assurer que
l’Église ne puisse pas rompre la laïcité scolaire. Mais donc… Le régime de libertés n’est pas complet.
De même, sur la presse : régime de diffamation. La diffamation reste interdite, et elle est définie comme le
fait de dire quelque chose qui porte atteinte à l’honneur et à la considération d’une personne (quand bien
même ce fait serait avéré). C’est néanmoins possible si on a des preuves ou si on est de bonne foi.
Conception de l’honneur à l’époque : duels fréquents à l’époque. La liberté d’expression du jeune freluquet
était donc atteinte.
Depuis 1864, droit de grève toléré dans les faits mais pas inscrit dans les textes. En revanche, délit d’atteinte
à la liberté du travail…
1897 : réforme du Code d’instruction criminelle permettant la présence d’un avocat et la communication du
dossier à l’accusé. Mais pas pour tout (les perquisitions notamment).
Cela montre que jusqu’en 1900 on est dans une « république de combat » qui a des ennemis : l’Église, les
monarchistes. Et c’est cela qui touche tous les domaines.
II.
Les lois scolaires (enseignement primaire seulement)
Votées rapidement y compris par le Sénat dès le début des années 1880.
Depuis 1833, loi Guizot : toutes les communes sont censées entretenir une école primaire de garçons, chaque
département doit entretenir une école normal formant des enseignants. Mais ces écoles peuvent être privées,
et en pratique elles le sont majoritairement (congrégations catholiques).
1879-80 : première salve de textes sur l’école. Loi Paul Bert obligeant les départements à ajouter à leur école
normale de garçons une école normale de filles.
1881-82 : seconde salve. Deux lois sur l’enseignement, au sens propre les « lois Ferry ». 16 juin 1881 :
gratuité complète de l’enseignement élémentaire (par opposition à la gratuité sélective défendue par la
droite). Mise en place par Ferry et Buisson. Loi sur les titres de capacité qui oblige à un minimum de
formation que n’avaient pas certains religieux.
Loi du 28 mars 1882 : enseignement obligatoire 6-13 ans et laïc (Ferry parlait de neutralité religieuse).
C’est une laïcisation du contenu essentiellement : l’enseignement moral et religieux est remplacé par une
instruction morale et civique (déclenche un tollé).
Loi du 30 octobre 1886 : loi Goblet poursuivant la laïcisation (des personnels, et plus seulement des
contenus) et réformant l’école maternelle.
Lois de 1901 (Waldeck-Rousseau) : ont soumis les congrégations religieuses au contrôle de l’État.
Loi de juillet 1904 : toutes les congrégations enseignantes doivent disparaître.
Loi du 9 décembre 1905 : séparation totale.
III.
L’organisation des pouvoirs locaux
Grande loi républicaine : la loi municipale de 1884 qui organise les communes, détermine les pouvoirs du
maire et des conseillers municipaux. Le pouvoir local se met en place avec des administrations municipales
en très forte croissance dans les années 1880 : le pouvoir des villes se développe. Même la police, fonction
régalienne, est essentiellement municipale jusqu’au régime de Vichy…
En France, première loi sur la nationalité : 1851. Préoccupation : ne pas la définir dans une logique
d’exclusion mais au contraire d’inclusion. Elle vise en particulier la question du recrutement militaire : faire
en sorte que les frontaliers n’échappent pas au service militaire. Il suffit d’être né en France d’un parent
français.
Loi Cissey : service militaire de 5 ans sauf si le tirage au sort accorde moins. Ne concerne pas les
enseignants et les ecclésiastiques.
1889 : loi préparée sous Boulanger instituant une durée maximale de 3 ans et étend le service militaire à
tous.
Chapitre 5 : Les forces électorales et leur organisation (1880-1914) ( ?)
Période d’organisation de la vie politique. Du parlement avant tout (création de groupes parlementaires).
1880 : pas de partis. Les candidats se disent républicains ou monarchistes. On peut même appartenir à
plusieurs groupes.
Classification droite / gauche : renvoie aux États-généraux de 1789 (nobles / tiers état). Mais on se présente
bonapartiste, légitimiste, conservateur plutôt que « de droite ». En revanche à gauche les républicains se
disent « de gauche ». En revanche, dès 1885, les socialistes ne se disent pas « de gauche ».
1. Les droites
Début de la troisième République : la droite = tous ceux qui ne sont pas républicains. N’ont pas de projet
commun si ce n’est le rejet de la République.
1892 (ralliement du Vatican à la République) : première recomposition de la droite
1898 (affaire Dreyfus) : seconde recomposition de la droite, début du nationalisme de droite (le patriotisme
était plutôt de gauche avant).
Courants :
- Légitimistes : veulent revenir à l’Ancien Régime, reprendre la même dynastie et continuer ainsi.
- Orléanistes (Louis-Philippe) : eux aussi monarchistes, compatibles avec le parlementarisme.
- Bonapartistes : veulent un régime autoritaire avec un descendant de l’Empereur.
Point commun : défense de l’Église catholique. Certains veulent fonder un parti catholique (Albert de Mun
ou Jacques Piou par exemple). Ça ne marche pas vraiment, le pape refusant cela.
1892 : le Vatican reconnaît la légitimité de la République. L’épiscopat n’adhère pas pour autant, tout comme
les députés monarchistes. 1893 : les électeurs suivent le pape et la République en votant pour des
républicains modérés (conservateurs, qui seraient appelés « divers droite » aujourd’hui).
Ferry : « la république est ouverte à tous y compris à ceux qui ne l’ont pas fondée ». On parle l’époque
d’esprit nouveau : il existe des républicains, de droite, qui ne sont pas anticléricaux.
Jules Méline (né en 1838) : républicain très modéré, élu à la commune de Paris en 1871. Il est agrarien : du
côté des républicains sensibles à la question paysanne. Économiquement protectionniste. Représente cet
esprit nouveau, est président du conseil entre 1897 et 1898.
1897-1899 : affaire Dreyfus. Pour Dreyfus, commence en 1894 : est déporté en Guyane pour espionnage en
faveur de l’Allemagne ou de la Russie. Fin 1897 début 1898 : devient une affaire d’État source de clivage
car on commence à avoir des preuves. Il aurait été accusé parce qu’il était très antipathique et juif (il y a en a
peu dans l’armée, faite de catholiques).
Début 1898 : Zola publie « J’accuse ! » dans l’Aurore, le journal dirigé par Clémenceau. Il accuse l’armée,
le président du conseil, …
Contre Dreyfus : les anti-dreyfusards. Parmi eux, des antisémites, des gens qui sont pour l’armée et ne
veulent pas remettre en cause le procès militaire (et ils constituent la majorité). On ne met pas en cause une
décision de l’armée même si elle condamne un innocent.
Pour Dreyfus : les dreyfusards. Sont pour une justice véritable, ils défendent à travers cette affaire les
principes républicains.
Second procès à Rennes qui confirme la condamnation, mais il est gracié ensuite.
À propos de l’antisémitisme à l’époque :
- concerne avant tout les catholiques. Pas par racisme, mais parce que les juifs ont tué le christ.
- Beaucoup de socialistes le sont aussi, par anticapitalisme car les juifs étaient statistiquement davantage
banquiers que les protestants (les catholiques n’ayant pas le droit d’y toucher et les juifs n’ayant pas
l’autorisation de pratiquer un bon nombre d’autres professions !). C’est un antisémitisme plus poli mais
violent aussi.
- Ces deux antisémitismes ne sont pas associés à du racisme jusqu’en 1898. Cela arrive à partir de la
recomposition de la droite suite à l’affaire Dreyfus.
Le mouvement nationaliste. Barrès (fin XIXe) : député boulangiste élu à l’extrême gauche (radicaux).
Éduqué par Jules Soury, qui a des théories « racialistes » : vision du monde structurée sur les différences de
races. Lors de l’affaire Dreyfus, il déclare être sûr de la culpabilité de Dreyfus, il le savait par sa race.
Coupable par nature !
Politiquement, ce mouvement nationaliste est opposé à la république au moins autant que l’est la monarchie.
Il s’oppose aux institutions de la République et donc au parlement. À partir de 1898, la droite est donc
surtout défavorable au parlement. Création des ligues : ligue des patriotes, ligue de la patrie français, ligue
antisémitique, comité d’action française (1898) pendant que côté dreyfusard on crée le ligue des droits de
l’Homme (qui elle se veut apolitique) ! Les ligues de droite, en revanche, veulent renverser les institutions.
À partir de 1898, la droite se fédère par soutien à l’armée, volonté de revanche (Alsace-Lorraine ou Moselle)
à l’égard de l’Allemagne.
La droite parlementaire. Après 1898, les monarchistes affichés deviennent très minoritaires et la définition
de l’homme vraiment de droite est qu’il est nationaliste. Mais dans les années 1901-1905, la droite
parlementaire reprend le dessus sur la droite antiparlementaire. À nouveau le clivage est religieux et la droite
se définit davantage comme catholique que comme nationaliste.
2. Les gauches
a. Les Républicains
Dans les années 1880, trois catégories de républicains :
- Ceux qui considèrent que puisque les institutions sont devenues républicaines, la république est faite.
Jules Simon par exemple. Parmi eux, des républicains modérés.
- Ceux qui estiment qu’il y a encore un programme de réformes à entreprendre, qui dépend de
l’opportunité du moment. Leur programme est limité à certaines choses précises, telles que la lutte
contre l’Église : lutte philosophique. Ferry, 1885, s’adressant à Jaurès : « Mon but c’est d’organiser
l’humanité sans dieu et sans roi. ». C’est une bonne définition du programme des opportunistes. Les
questions économiques et sociales ne sont pas dans le programme.
- Les radicaux, gens d’extrême gauche (Clémenceau par exemple) : pour eux la République ne se limite
pas à cela, elle doit être sociale, il faut faire des réformes économiques et sociales pour atteindre l’idéal
de justice de la Révolution française. Ce qui signifie : des lois sur les retraites, sur l’impôt sur le
revenu…
La chambre des députés entre 1876 et 1885 est constituée de groupes parlementaires assez stables. Du plus
modéré au plus radical :
- Le centre gauche (gens qui suivaient Thiers) : approuvent la république par raison. Se distinguent assez
peu du centre droit (monarchistes, orléanistes) par la religion. Le centre droit est essentiellement
catholique, le centre gauche est fortement constitué de protestants.
-
La gauche républicaine (qu’a posteriori on classerait plutôt à droite !) : Ferry (famille d’industriels dans
les Vosges), Grévy. Pas mal de bourgeoisie, ce sont des gens qui ont de l’argent.
L’union républicaine (Gambetta) : employés, fils de commerçants, d’artisans… Plus facilement
corruptibles.
Les radicaux (extrême gauche boulangiste) : les vrais anticléricaux, ceux qui « bouffent du curé » et ne
veulent pas seulement la séparation de l’Église et de l’État. Ce sont les plus favorables à des réformes
sociales. Mais leur marque de fabrique reste l’anticléricalisme. Se divisent en 1885 en deux groupes :
 L’extrême gauche (pas de trait d’union, extrême en tant qu’adjectif à l’époque).
 Les radicaux de gouvernement : Charles Floquet (président du conseil en 1887), Eugène
Lockroy.
Les deux branches de radicaux se rassemblent dans un même parti : Parti républicain radical et radicalsocialiste. Se pense comme « les seuls vrais républicains ». Le premier congrès du parti radical est effectué
en 1901. Il est bien implanté en province. L’un de ses grands théoriciens : Ferdinand Buisson, protestant,
directeur des enseignements élémentaires.
1901 : se crée aussi l’Alliance républicaine et démocratique : unit la gauche républicaine et l’union
républicaine. Elle rassemble les opportunistes (appellation de 1880), les progressistes (appellation de 1890,
éventuellement les mêmes), Waldeck-Rousseau par exemple.
Ensuite, l’arrivée des socialistes…
b. Les socialistes
Il existe dès le milieu du XIXe de nombreux courants qui ne se disent pas encore socialistes mais que nous
appelons rétrospectivement socialistes pour l’idée qu’ils ont de la société : il faudrait, pour qu’elle
fonctionne, que la propriété individuelle soit remplacée par la propriété collective.
À l’époque, le terme en vogue est « communiste », utilisé par Marx et les marxistes à partir de 1860.
1871 : Commune de Paris. Les communards sont exilés. Ils reviennent à partir de l’amnistie de 1880
(négociée par Clémenceau).
À gauche des républicains, les collectivistes initient un véritable mouvement socialiste lié au retour des
militants et des cadres. Développement du syndicalisme dans les années 1880/1890, plus ou moins
indépendants des partis politiques.
Parlementaires : pas tellement issus du milieu ouvrier.
Socialisme :
- Pour les intellectuels : démarche intellectuelle, raisonnement
- Pour les ouvriers : réaction à des conditions de vie
Découpage chronologique
Première partie : le socialisme jusqu’au retour des exilés (1880)
À partir de l’établissement de la République, la liberté politique permet la formation d’une multiplicité
d’organisations locales et de congrès ouvriers (1876 notamment).
Personnage phare : Jean Barberet, du côté des Gambettistes avec pour point d’ancrage la mutualité (ce qui
l’oppose aux républicains de gouvernement). Mouvement de lutte ouvrière non socialiste, non collectiviste.
Deuxième partie
Premiers socialistes à la chambre : ne sont pas élus comme des députés socialistes et cette étiquette importe
peu dans leur élection. Les premiers sont élus en 1885.
À partir de 1893 : groupe de socialistes à l’Assemblée.
Mouvement ouvrier qui se développe à Marseille sur une base syndicale autour de Clovis Hugues (1871).
Mairie de Commentry : première à être socialiste en 1882. Les premiers socialistes sont des radicaux, ils
laissent symboliquement quelques places à des ouvriers.
Députés proprement ouvriers : Antide Boyer, Camélinat (ami de Proudhon), Mac-Nab, Basly.
1889 : moins de députés ouvriers car les radicaux ne veulent plus les faire élire.
1893 : les socialistes se font élire sous cette étiquette avec un groupe de 49 députés. Ils deviennent une force
de plus en plus importante au niveau municipal.
1895 : CGT.
Troisième partie : la situation de l’organisation partisane
Début des années 1880, sortent des congrès ouvriers (hors Barberetistes) deux principales organisations :
- Le parti ouvrier créé en 1880 dirigé par Jules Guesde (se pense marxiste).
- La FTSF : fédération des travailleurs socialistes de France, dirigée par Brousse (médecin, adepte du
possibilisme : pessimiste sur la possibilité d’avoir le socialisme en France mais cherche à avoir une
influence municipale).
- Subdivisions : POSR, parti socialiste révolutionnaire (Édouard Vaillant, a participé à la Commune de
Paris).
- Socialistes indépendants : intellectuels, dont Jean Jaurès.
S’unissent en 1905 : SFIO, Section française de l’Internationale ouvrière.
Guesde est le plus intransigeant : refuse les compromis quand il trouve qu’une loi ne va pas assez loin.
Conclusion du chapitre : dans les courants politiques, il y a à partir de 1900 une institutionnalisation des
mouvements politiques dans une forme spécifique qu’est le parti, clairement orienté vers les élections.
Chapitre 6 : L’exercice de la politique
Cœur institutionnel en 1875 : le parlement. Influence la vie politique qui se structure autour de celui-ci. Mais
il y a aussi une activité extra parlementaire.
Partie 1 : l’activité parlementaire
Période où se structure le parlement, où se mettent en place les procédures.
1. Le travail parlementaire, la carrière parlementaire
Passage d’un système politique à base notabiliaire (propriétaires vivant de la rente) à un système de politique
professionnelle (vivent de leur travail).
Sous la République, on considère que les représentants n’ont plus à être des rentiers. Comment dès lors sontils rémunérés ? L’idée de donner un salaire fait apparaître la professionnalisation : député est un métier.
1849 : l’indemnité parlementaire était de 9000 F par an (salaire d’un chef de bureau dans l’administration).
Pensée comme un moyen de couvrir ses frais, pas comme un salaire.
1880 : 15000 F, on se met à penser cette fonction comme métier, et la notion de carrière apparaît.
En début de carrière, on vote. Puis travail dans et en-dehors de l’hémicycle. Deux commissions permanentes
par coutume : celle du budget et celle de l’armée.
2. L’organisation de l’assemblée en groupes parlementaires
1880-1914 : institutionnalisation progressive, pratiques qui se mettent en place et tout particulièrement au
parlement (formation de groupes à l’Assemblée formalisée vers 1900, ainsi que création de commission
permanentes en 1902).
Rapidement, cumul des mandats locaux et nationaux. Lié à la théorie du vote fonction de 1830 : les notables
locaux qui ont les capacités d’exercer à l’échelon local sont logiquement ceux qui peuvent travailler au
niveau national.
Règle courante : aucun texte ne peut être voté si les maires des grandes villes ne sont pas d’accord.
Les puissances locales peuvent aussi déterminer à la chambre des députés et au sénat le financement des
chemins de fer.
Les députés sont encore essentiellement élus dans le département où ils sont nés : ancrage local.
Partie 2 : l’activité politique extra-parlementaire
1. Les élections, le parlement
Le processus national, unifié et contrôle des élections que nous connaissons aujourd’hui est récent.
Loi de 1913 : secret et liberté du vote. Premières élections où l’isoloir et l’enveloppe standardisée est mis
en place : 1914. Avant, on votait sur papier libre en inscrivant le nom du candidat et en rangeant le papier
dans n’importe quelle enveloppe.
L’idée que l’on peut voter sans en parler va avec la montée de l’individualisme.
C’est dans les pays anglo-saxons (Australie 1854, GB 1862) qu’apparaît en premier l’isoloir.
Le vote demeure une affaire locale.
Chez les conservateurs, on détermine les candidats dans des réunions privées. Chez les républicains, mise en
place de « comités » : groupe de gens (pas des notables mais ils ont fait des études) qui se réunissent autour
d’un « journal ». Fleurissent à partir de 1881 avec la loi sur la presse. Ces comités se réunissent dans les
cafés et dans les salles de rédaction des journaux. Deux méthodes de collecte de fonds : le banquet
républicain (grandes tables) et la souscription. Les conservateurs financent leur campagne personnellement.
C’est dans les syndicats que se développent les candidatures des socialistes.
Nouveauté début 1900 : le meeting où les candidats viennent présenter leur programme à des gens entraînés
par leurs collègues et voisins.
2. La politique extra-parlementaire (protestations, manifestations)
Années 1880-1914.
L’événement politique majeur en France traditionnel est le mouvement de rue qui renverse le pouvoir établi.
1830, 1848, 1870 : tous les 20 ans !
La république ôte la légitimité à ces mouvements : on ne doit plus avoir besoin de renverser gouvernement
et institutions.
La répression est violente : c’est l’armée qui s’en occupe et tire à balles réelles…
Que devient la rue à partir de 1880 ?
- Usage officiel : la rue utilisée par la République elle-même, comme lieu de manifestation officielle, au
même titre que les défilés religieux. Exemple : le défilé du 14 juillet. Voyages officiels du président :
fabriquent de la foule. Défilés militaires. Très nombreux défilés des enfants des écoles. 1880-1890 :
pratiquement pas de manifestations portant des revendications politiques.
- Usage contre le gouvernement, oppositionnel, à partir de 1890 :
 Manifestation pacifique et symbolique : par exemple, la manifestation à date fixe (1er mai) pour
réclamer la journée de 8 heures. Ça peut être des défilés mais avant tout il s’agit de porter une
pétition aux autorités pour demander la journée. Les gens marchent pour porter la pétition à
l’hôtel de ville, non pour se montrer avec des pancartes. Ce sont des marches processionnelles
dans les rues (cortèges) plutôt que des manifestations. 8 mai : célébration de la fête de Jeanne
d’Arc (époque où le Vatican étudie sa béatification) sous forme de réunion publique dès 1894.
Activisme politique, ayant pour visée la célébration.
 Manifestations insurrectionnelles dès 1889 : ligues boulangistes. Cela inclut les grèves :
situations de conflit potentiellement violentes. Sont souvent suivies de défilés. 1906 : la marche
processionnelle devient une forme d’expression politique. Clemenceau était répressif à l’égard
des processions de rue (exemple de la fusillade de Fourmies du 1er mai 1981 : 9 grévistes tués
mais Clemenceau dénonce la fusillade et amnistie les rescapés).
Qu’est-ce que le maintien de l’ordre en république ?
- Ne pas tuer des gens
- Doctrine de la conciliation de la possibilité d’exprimer son opinion de la rue avec le maintien de l’ordre
ne débouchant pas sur l’insurrection…
3. La revendication politique féministe
Débute aussi vers 1880.
- Courant philanthropique (s’appelle lui-même ainsi) : le plus modéré. Des femmes notables le plus
souvent protestantes ou catholiques. Revendiquent la reconnaissance de la valeur de l’activité des
femmes dans la société. Ne remettent pas en cause la distinction des rôles : l’homme gagne de l’argent,
la femme le dépense pour la gestion domestique et la charité (donc, elle a un rôle). Continue même après
1914. Figure : Sarah Monod. Cf. Clémence Broyer.
- Courant revendicatif (dès 1868) incarné par Maria Deraismes, républicaine égalitariste. « L’infériorité
des femmes n’est pas un fait de la nature, nous le répétons, c’est une invention humaine, c’est une fiction
sociale ».
- Courant axé sur le travail, par exemple la Première Internationale demandant l’interdiction du travail
des femmes (obtenu en 1892 pour le travail de nuit) ou encore André Léo et Paula Minck, socialistes, qui
dénoncent l’oppression du patron sur l’ouvrier.
Deux congrès avant 1900 mêlant courant philanthropique et revendicatif : « congrès international des
œuvres et institutions féminines » et « congrès français et international du droit des femmes ».
1900 : congrès unique qui rassemble tous les mouvements. Marguerite Durand y dirige la section des
questions législatives. Elle fonde le journal La Fronde.
René Viviani : rapport sur la « puissance paternelle ».
Jusqu’en 1920 la femme a peu d’autonomie sans l’accord de son mari.
Socialistes : féministes. Radicaux et Républicains modérés : plutôt hésitants sur ce point (craignent le vote à
droite, et de fait c’est ce qu’il se passe). C’est pourquoi le suffrage universel masculin et féminin arrive
seulement en 1944.
Ferdinand Buisson en particulier est actif dans ce domaine.
Chapitre 7 : La presse, les intérêts économiques et les scandales
Différentes conceptions de la République :
- Pour certains, la société est constituée d’individus. Une personne = une voix.
- Pour d’autres (monarchistes), elle est constituée de communautés et donc le suffrage universel est
artificiel.
Fin du XIXe siècle : on commence à considérer qu’il n’y a pas dans le monde social que des personnes
physiques. Ces intérêts ont-ils vocation à être représentés ?
- Sous le Second Empire, sociétés très représentées, plus que les citoyens.
- Sous la IIIe République, seuls les citoyens individuels sont comptés.
Les députés sont élus par des citoyens, mais aussi de façon occulte par les sociétés qui financent leur
campagne : elles sont donc bien représentée, mais de façon officieuse. Et c’est de là que naissent des
scandales.
I.
La presse, force politique nouvelle
1. Le développement de la presse
Ne s’était jamais autant développée que sous la IIIe République. Pourquoi un tel progrès ? De moins en
moins d’illettrés, développement des chemins de fer en 1870.
1868 : invention de la presse rotative qui augmente énormément la vitesse de production et baisse les coûts.
Presse de Paris en 1870 : 1 million d’exemplaires chaque jour ; 1880 : 2 millions.
1910 : 9 à 10 millions d’exemplaires de quotidiens circulent chaque jour (pour un faible coût) pour une
population adulte d’un peu plus de 20 millions de personnes.
Diffusé de plus en plus, de moins en moins cher, de plus en plus de contenu : essor.
Nouvelle profession, quasiment groupe social : les journalistes.
Second Empire : 500 journalistes à Paris.
1885 : 1000 journalistes (figure dans les annuaires de journalistes) à Paris et 1000 en province.
1900-1910 : 1500 journalistes à Paris, 3000 en province.
Augmentation également du nombre de publicistes : 4000 en 1870, 7000 en 1885, 10 000 environ en 19001910.
Groupements de journalistes selon des idées politiques : les journaux sont marqués politiquement.
- en 1879, association de la presse républicaine départementale.
- Après 1881 et la loi sur la liberté de la presse : 1881, association syndicale, professionnelle, des
journalistes républicains français.
- 1882 : association professionnelle de la presse monarchique et catholique, association professionnelle
de la presse plébiscitaire départementale (bonapartiste, donc).
- 1884 : association professionnelle des journalistes parisiens (on y adhère en plus des autres, n’a pas
spécialement d’orientation politique)
- 1893 : association professionnelle des nouvellistes parisiens (il y a donc une hiérarchie de la profession,
les journalistes sont au-dessus des simples nouvellistes qui rapportent les faits divers).
Multiplication des associations de journalistes qui défendent leurs intérêts professionnels (pas seulement des
intérêts matériels mais des conditions d’exercice de leur profession).
1890-1900 : 4 grands quotidiens populaires (presse à 5 centimes). Le Petit journal, Le Petit parisien, Le
Journal, Le Matin. Font à eux seuls 75-80 % du tirage global.
À côté : faibles tirages, 10 000 – 80 000. Le journal des débats, le figaro, le temps, le gaulois. Ce sont des
restes des anciennes feuilles.
Nouveauté : les journaux du soir. Intérêt : avoir les cours de la bourse.
Gros journaux idéologiques : l’écho de Paris (droite nationaliste, 100 000 exemplaires en 1900), La Croix
(catholique antisémite — se qualifie comme tel, 140 000 exemplaires en 1900).
Journaux radicaux très marqués politiquement (25-50 000 ex) : La Justice (Clemenceau), L’intransigeant
(Rochefort), La libre parole (fin 1890, Drumont, antisémite et anti dreyfus, 50000), L’autorité (bonapartiste,
50000 exemplaires, Paul de Cassagnac), L’Humanité (socialiste puis journal de la SFIO, 75000 exemplaires
fin XIXe).
En province, les journaux structurent la vie politique.
Toulouse : La Dépêche. Journal qui se développe avec la république : 20000 en 1880, 120000 en 1910.
Journal des frères Sarraut (radicaux).
Lyon :
- Le progrès, républicain, devient de gauche avec l’affaire Dreyfus, vers 1900 200 000 exemplaires.
- Le nouvelliste, catholique, 80 000 exemplaires.
- Lyon républicain, proche de la municipalité républicaine. Après 1905, journal contrôlé par Herriot.
80000 ex -> 200000.
Journaux = sociétés de presse, cotées en bourse. Développement de presse économique contrôlée par les
banques (contrôle par exemple aussi la rubrique économique du figaro… Mais cette pratique est dissimulée
et fait scandale quand on la découvre).
2. Lien entre presse, politique et finance
Le Petit journal : dirigé par Charles Prévet, sénateur républicain modéré conservateur. En 1900,
administrateur de banque. A fait fortune dans les pâtes et les conserves qu’il a vendues à l’armée grâce à des
connexions politiques. Est passé à la construction industrielle et est devenu secrétaire de la chambre
syndicale maritime française.
Le Petit parisien : dirigé par Jean Dupuis, sénateur.
Le Journal : fondé en 1892, dirigé par Henri Letellier. Belge, s’est enrichi dans le BTP. Auteur de la phrase
« mon journal, c’est un pistolet dans ma poche ».
Le Matin : fondé par Alfred Édouard. Racheté en 1897 par ?.
II.
Les intérêts économiques, forces politiques
1) Représentation de ces intérêts par la presse, contrôlée, qui fabrique l’opinion
2) Existence de grandes organisations patronales qui interviennent dans le débat public et
auprès des hommes politiques
Comité des forges de France (1864) : organisation patronale de l’industrie de la métallurgie. Se pense
politique mais non partisane. Sont représentés dans ce comité aussi bien les bonapartistes (famille Schneider
dans le Creusot), les légitimistes, les orléanistes.
Devient un syndicat suite à la loi.
Divers organisations se réunissent en 1901 dans l’UIMM (union des industries métallurgiques et minières)
qui se présente comme la représentation du patronat.
Dans le gouvernement Waldeck-Rousseau, Millerand est chargé des questions sociales au gouvernement.
1907, il devient l’avocat de l’UIMM…
3) Groupes parlementaires à l’Assemblée apolitiques : amicales
Se réunissent pour discuter des problèmes, souvent liés à des intérêts économiques.
Ex : partisans de la liberté du commerce autour de Léon Say ; groupe colonial fondé en 1892 et présidé
jusqu’en 1894 par Eugène Étienne, député d’Alger, et vice-présidé par Jules Charles-Roux, armateur
marseillais. Ce groupe a en 1893 plus de 120 membres : de nombreux députés (à droite, beaucoup de
républicains modérés, quelques radicaux et 2 socialistes : Antide Boyer, député de Marseille, et Antoine
Jourde, député de Bordeaux…) soutiennent donc l’entreprise coloniale.
Maurice Rouvier : 1871-1911 : député puis sénateur de Paris. Auparavant, négociateur à la bourse des
céréales, a 6 voitures à chevaux, des villas, une fortune notable. 1901 : fonde la banque française de
commerce industriel (grande banque d’affaires). Financier de l’alliance républicaine démocratique
(républicains modérés, parti fondé en 1901, serait à droite aujourd’hui), manifestement financé par des
compagnies privées…
Alfred Mascuraud : 1899, fonde le comité républicain du commerce et de l’industrie (organisation de liaison
entre députés républicains et milieux du commerce et de l’industrie). C’est aussi le trésorier du parti radical.
4) Le financement direct
Argent de main à main et chèques. Grand exemple : le scandale du Panama en 1892 dans lequel on a vu un
représentant de la compagnie du Panama dans la salle des pas perdus du Palais Bourbon avec un carnet de
chèques en blanc de la compagnie qu’il distribuait aux députés pour faire passer une loi !
III.
Mécanique et signification des scandales
Il y en a beaucoup sous la IIIe République, et tout particulièrement le scandale du canal de Panama (puis
au XXe siècle l’affaire Stavisky).
Le percement du canal de Panama est organisé à partir de 1869 par l’ingénieur Lesseps. 1879 : fondation
d’une compagnie qui cherche des fonds pour construire ce canal. Difficile d’en récolter. 1888 : loi autorisant
la compagnie de Panama à émettre des emprunts. 1889 : faillite. Dans le cadre de cette liquidation, des gens
ont perdu de l’argent : il y a enquête. En 1892, le journal La libre parole d’Édouard Drumont (antirépublicain sans être monarchiste) révèle une liste de « chéquards » : des députés et sénateurs qui ont reçu
directement des chèques d’intermédiaires de la compagnie de Panama pour voter la loi autorisant l’émission
de l’emprunt.
Seul le ministre des travaux publics a été condamné (car il est le seul à avoir avoué).
Pourquoi il y a scandale ? Parce que les représentants des électeurs ne doivent représenter qu’eux, et non les
intérêts économiques.
Pourquoi certaines affaires font-elles l’objet de révélations fracassantes et pas d’autres ? (Panama vs
construction des chemins de fer)
- aspects circonstanciels
- les informations viennent de personnes impliquées qui à un moment donné ont intérêt à faire éclater le
scandale
Remarque : les révélations qui font éclater le scandale ne le révèlent pas nécessairement dans son entièreté.
Intérêt des scandales et des poursuites en diffamation pour l’historien : comprendre ce qui est considéré
légitime ou non à l’époque.
Chapitre 8 : La question religieuse
La question religieuse est chronologiquement la première qui se pose parmi les trois principales questions :
religieuse, sociale, coloniale. Qui dit la vérité ?
Enjeu : substitution du pouvoir divin, religieux, à un pouvoir terrestre. Substitution au magistère de l’Église
le magistère de l’État, sa légitimité à dire le vrai.
Religion, pratique privée ? Cela signifie donc : pratique facultative.
Cette question religieuse unit assez facilement les républicains, celle-là et la question des institutions. Ce
peut même être un outil de cohésion entre les républicains. Elle les rassemble même avec les socialistes.
Idée nouvelle de laïcité qui apparaît lors de deux moments forts :
-
le tout début de la IIIe République avec la lutte contre les monarchistes (passe par la laïcisation de
l’enseignement) ;
- le début du XXe siècle qui mène à la séparation des Églises et de l’État.
Il aura ainsi fallu environ deux décennies pour engager cette séparation des Églises et de l’État.
I. La lutte contre l’influence de l’Église catholique dans l’enseignement
Au début de la IIIe République, l’Église est du côté des monarchistes, ce qui explique l’anticléricalisme des
républicains.
Avant les lois Ferry des années 1880, la question du rapport entre religion et enseignement se pose déjà dans
l’enseignement supérieur. Loi Guizot depuis 1833 qui instaure la liberté de l’enseignant en primaire, loi
Falloux depuis 1850 qui instaure la liberté de l’enseignant dans le secondaire, et loi du 12 juillet 1875 qui
met en place cette liberté dans le supérieur. C’est là une victoire des catholiques. Des universités catholiques
se créent, mais « pas tant que ça » : Paris, Lyon, Angers, Toulouse.
1876 : la majorité républicaine veut revenir là-dessus, et c’est ce qui est fait en 1879 (après Mac Mahon)
avec une loi votée lorsque Ferry est président du conseil, la loi du 18 mars 1880 toujours en vigueur
aujourd’hui (bien que modifiée depuis) qui réforme la loi de 1875. Les établissements privés ne peuvent se
nommer « universités » et les examens doivent continuer à être passés dans les universités publiques. Article
7 refusé par le sénat : « nul ne peut participer à l’enseignement s’il fait partie d’une congrégation non
autorisée. » (enseignement primaire, secondaire ou supérieur). En effet, les congrégations sont autorisées et
listées depuis 1817.
Le 9 mars 1880, Jules Ferry prend deux décrets : l’un pour expulser sous six mois les jésuites tenant un
établissement d’enseignement (congrégation non autorisée), l’autre pour imposer à toutes les congrégations
de refaire leur demande d’autorisation. Pour la première fois, expulsion violente de catholiques et fermetures
d’écoles (fermeture de 5000 écoles, 261 couvents).
Loi Camille Sée de 1880 dont l’objectif direct est de soustraire les jeunes femmes à l’influence des prêtres.
Il y a en effet peu de filles scolarisées, et quand elles le sont c’est dans des établissements privés puisqu’il
n’y a que des lycées publics de garçons.
Puis lois 1880, 1882 et 1886 sur la gratuité, l’obligation et la laïcité des écoles publiques (locaux et
programmes), et la laïcisation du personnel.
En réalité, en 1882, Jules Simon introduit un amendement disant que l’instituteur doit enseigner les devoirs
envers Dieu et la patrie. Cette mention sort finalement de la loi mais ce précepte reste dans les programmes
(si ce n’est que ce dieu n’est pas identifié, et de toute façon le programme est construit comme si ce dieu
n’était pas nécessaire).
Plus d’enseignement de la religion dans les écoles publiques, le jeudi en milieu de semaine, et le cours
d’instruction civique et de morale la remplace.
Circulaire de 1883 : enseignez le règles de « morale usuelle », celle que « n’importe quel père de famille
enseignerait à ses enfants ». Il s’agit d’une morale empirique, qui s’enseigne comme les sciences naturelles,
appelées leçon de choses.
Conflit sur l’enseignement de l’Histoire entre religieux et laïcs : pas les mêmes héros. Nos ancêtres sontils les gaulois, les païens donc ? Ou Clovis, le premier roi chrétien, ainsi que Jeanne d’Arc (envoyée au
bûcher par les anglais d’après les catholiques, et par un évêque d’après les républicains).
1878 : 5 millions d’écoliers du primaire, dont 2 millions dans l’enseignement congréganiste.
1906 : 5,6 millions d’écoliers dont 1 million dans les écoles catholiques.
II.
Des combats symboliques
1) Dans les hôpitaux et les organisations charitables
1880-1906 : pas que l’enseignement, de très nombreux domaines de la vie sociale sont touchés.
1878-1888 : Bourneville (médecin français) enclenche la laïcisation. Les religieux qui soignent les âmes
sont replacés par du personnel compétent qui soigne les corps.
2) Dans l’administration
Drumont rappelle à longueur de pages qu’il y a beaucoup (trop) de juifs dans la fonction publique. Il est vrai
que les israélites et les protestants sont surreprésentés car les catholiques en sont plutôt exclus. Ces gens ne
se pensent pas forcément juifs, ils sont républicains et la dimension religieuse n’est pas primordiale pour
eux, mais ils sont désignés comme tels car nés dans des familles juives.
Donc, décatholicisation de la haute fonction publique. 1892 : article paru dans la Revue hebdomadaire de
Charcot, qui fait scandale, intitulé La foi qui guérit. Accepte l’idée de guérison miraculeuse (Lourdes) mais
il dit que le miracle est un phénomène qui n’échappe pas à l’ordre naturel des choses.
III. La séparation des Églises et de l’État
Climat de violence entre 1901 et 1906. Gouvernement de Waldeck-Rousseau en 1906. Procès de janvier
1900 contre les ascensionnistes, poursuivis en tant que congrégation et qui fait de la propagande dans un
journal.
Au départ, but du projet de loi : loi de lutte religieuse portant sur les associations, liquidation des
congrégations non autorisées sous trois mois…
1902 : Émile Combes, anticlérical, prépare la loi de séparation des Églises et de l’État.
Série de mesures préparatoires :
- application de la loi de 1901 : en 1902 et 1903, liquidation des congrégations non autorisées et fermeture
des établissements scolaires. Bagarres physiques. Avril 1903 : expulsion des moines de la grande
chartreuse. 1902-1903 : 10000 écoles congréganistes fermées ! Et c’est ce gouvernement qui prépare la
loi de séparation…
-
Loi de 1905 adoptée non sous le ministère de Combes mais de Rouvier : plus modéré que le premier.
Contenu de la loi de 1905 :
- Article 1 : garantie de la liberté de conscience et de la liberté du culte. Donc, émancipation par rapport
à l’Église catholique, qui bien sûr n’en voulait pas.
- Article 2 : la République ne reconnaît ni ne subventionne aucun culte. Jusque là il y avait un budget
des cultes (ministère de l’instruction publique ou de l’intérieur selon le moment).
- Article 28 : plus d’emblèmes religieux dans les lieux publics (hôpitaux par exemple).
- Article 30 : à l’école l’enseignement religieux ne peut être donné qu’en-dehors des heures de classe
(simple rappel).
Pour le prof ce n’est pas une loi de laïcité à proprement parler : toutes les questions sur les processions
publiques, les sonneries de cloches etc. sont renvoyées au Droit commun, il n’y a pas de législation
spécifique là-dessus.
La séparation matérielle doit se faire concrètement ainsi : des associations cultuelles formées selon la loi de
1901 se mettent à gérer les églises. Pour leur donner les biens, on doit en faire l’inventaire, et ce sont ces
inventaires qui engendrent des révoltes violentes. Les policiers ouvrent les tabernacles : horrifie les croyants
pour qui c’est une armoire sacrée.
Chapitre 9 : La question sociale
N’est pas une question sur laquelle les clivages fondamentaux se sont construits. Mais devient de plus en
plus importante du fait du développement industriel.
Paternalisme.
I.
Les programmes
1. Les programmes politiques
- Opportunistes.
- Radicaux : attachés à la propriété privée, mais la petite : il devrait y avoir plein de petits propriétaires.
Toutes leurs politiques sociales tendent vers cet idéal.
- Socialistes.
- Droite : les monarchistes pensent au modèle maîtres-serviteurs (au mieux : paternalisme).
Assistance médicale gratuite en 1893.
Assistance aux vieillards infirmes et ingrats en 1905.
Loi de 1894 : première intervention de l’État.
Loi de 1910 : débats depuis 1887, loi sur les retraites par capitalisation des ouvriers.
2. Les programmes des organisations patronales et syndicales
II.
Les politiques conduites
Chapitre 10 : La question coloniale
IIIe République : correspond à la colonisation, en gros ; IVe et Ve : décolonisation.
I.
Les étapes de la colonisation
1. L'empire colonial avant la III° République
Situation de l’empire en 1870-1880 : suite à la vague du XVI-XVIIe siècle (Canada, Louisiane, reperdus
ensuite) on a les Antilles, le Sénégal, La Réunion, l’île Maurice, quelques comptoirs en Inde. On y établit
des accords commerciaux.
Vague du XIXe siècle : commence en 1830.
- Sous la monarchie libérale, conquête de l’Algérie (conquête de peuplement, pour évacuer en gros les
mauvais sujets). Abd-el-Kader (1807-1883) : fait prisonnier en 1847, opposant algérien.
- Conquête de Nouvelle Calédonie, du sud du Vietnam (Cochinchine, Cambodge). Colonisation
commerciale : on vise les ports.
2. Le développement de l'Empire après 1875
Mouvement qui commence pour des raisons économiques et est piloté par des entrepreneurs avant tout, non
par les pouvoirs politiques qui interviennent ensuite à leur demande pour les protéger. Ministère de la
marine particulièrement impliqué.
1875 : création de la banque de l’Indochine. Elle obtient du gouvernement français le privilège d’émettre
de la monnaie dans tout l’espace asiatique et pacifique pour le compte des français. C’est donc une banque
centrale, une banque d’émission. La colonisation s’est poursuivie sous la République, sous l’impulsion de
Jules Ferry en particulier. On passe des accords avec les régions du centre du Vietnam (Annam, protectorat)
jusqu’au nord (Tonkin, Hanoï, porte vers la Chine) formant ainsi l’Union indochinoise.
Cas de l’Afrique : 1881-1883, on rejoint le Niger depuis le Sénégal et commence la colonisation dans le
bassin du Niger. Puis Côte d’Ivoire, Tchad. 1884 : Afrique occidentale française. Affrontements au Congo :
1881 Savorgnan de Brazza signe un traite de protectorat avec Makoko. Mines que veulent se procurer des
anglais, des allemands, des français armés envoyés dans le cadre d’expéditions privées.
Conférence de Berlin fin 1884 début 1885 : organisée par Bismarck. But : arriver à un accord entre
colonisateurs français, allemands et anglais sur la question du Congo. La société du Congo, propriété
personnelle de Léopold II roi des Belges (compagnie minière) qui a fondé le « Congo libre » y est présente
aussi.
- liberté du commerce (essentiel)
- prohibition de l’esclavage (alibi)
- règlement des frontières (Italie, France, Allemagne, Portugal…).
Cf. bouquin Au cœur des ténèbres.
II.
Les politiques coloniales
1) Motivations, développement et bilan économiques de la colonisation
Ferry : « L’Europe peut être considérée comme une maison de commerce qui voit depuis quelques
années baisser son chiffre d’affaires. il faut faire surgir d’autres parties du globe, de nouvelles couches de
consommateurs sous peine de mettre la société en faillite » (vers1884 – 1885). Conception ancienne de
l’économie : on cherche à commercer plutôt qu’à produire.
Consiste en la recherche de matières premières à moindre coût.
Bilan que l’on en fait aujourd’hui : il est possible que les investissements dans les infrastructures aient coûté
plus que ce que ça a pu rapporter…
Début du XXe siècle : 200 sociétés très rentables côtées à la bourse de Paris dont l’activité coloniale est le
point névralgique.
Économiquement, donc : profit global indécis, mais pour certains secteurs il y a apparition de grandes
fortunes coloniales (famille Ferry mais d’autres aussi autour de la banque d’Indochine ou de la colonisation
africaine).
2) Motivations et politiques civilisatrices (sic)
1859 : fondation de la société d’anthropologie de Paris qui mesure les tailles des crânes, des squelettes etc.
(pour prouver la supériorité des blancs ?).
1859 : L’origine des espèces, Darwin. Se diffusent très vite (mal interprétées). L’idée d’une lutte pour la vie
au début du siècle n’existait pas, mais est omniprésente à la fin (jusqu’au darwinisme social). Idée de
hiérarchie des races nouvelle et polymorphe : est-elle définitive, circonstancielle, naturelle mais pouvant
évoluer ?
Idée perso du prof du droit à la bêtise : justifie d’étendre les droits de l’homme à tous.
Pour les républicains : idée majeure de perfectibilité de l’Homme. D’où l’idée de la mission civilisatrice,
cohérente avec cet idéal républicain.
Radicaux : globalement favorables
Socialistes : contre, mais c’est une question annexe, ce qui compte étant la lutte des classes.
III.
La colonisation sur le terrain
Décalage entre discours et réalité pratique.
Pas d’égalité des droits car faite comme une conquête (vainqueurs et vaincus).
Pas d’égalité en économie, sauvage quand dérégulée.
Algérie : code de l’indigénat définissant un statut de l’indigène.
« L’indigène musulman est français, néanmoins il continuera à être régi par la loi musulmane », ce que
souhaitent généralement les populations locales.
Pour les droits politiques, seule voie, la naturalisation (très peu nombreuses).
1887-1889 : ce système de code de l’indigénat s’étend à d’autres colonies. Après quoi est établie une loi sur
la nationalité qui confirme que les populations régies par un code sont mises à part.
1) L’administration coloniale
1894 : ministère des colonies.
Administration de mauvaise qualité. Personne ne veut y aller, en particulier en Afrique (climat et conditions
d’hygiène difficiles, on meurt facilement de maladies).
Peu de diplômes. « Rois de la brousse » comme on les appelait en Afrique : incompétents, jouent les rois.
Qui se retrouvait là : des fonctionnaires blâmés (dettes, alcoolisme) en métropole à qui l’on propose d’être
mutés en guise de punition.
Circulaire envoyée par le gouverneur de la Guinée en 1906 à l’ensemble de ses administrations : on
comprend que les administrateurs pillent.
2) Pouvoirs locaux et sociétés indigènes
Réalité locale : une colonisation à visée essentiellement économique. Choix concrets faits dans l’optique de
servir les intérêts coloniaux.
Ceux qui n’ont pas d’intérêt dans les questions coloniales se posent des questions sur la légitimité de la
colonisation (critique d’intellectuels).
Partie 2 : Mise en cause et déclin de la république parlementaire au XXe siècle.
1.
autre IIIe République : 1919-1939
Le monde de 1919 n’a plus rien à voir avec le monde de 1914… Plus possible d’appliquer les mêmes
politiques qu’avant. Vu d’aujourd’hui, le gouvernement de l’entre-deux-guerres a été « bête ».
Chapitre 11 – L’irruption des questions économiques dans la politique
1919 : l’ordre du monde est international. Il n’y a plus de « politique intérieure », elle est toujours liée à ce
qui se passe à l’extérieur des frontières.
1918 : proclamation de la République en Allemagne suite à l’armistice de novembre. C’est le bazar !
Plusieurs proclamations simultanées…
Décembre : retour de l’Alsace-Moselle.
Mars 1919 : Alexandre Millerand à Strasbourg. Début des mouvements de population : les allemands
d’Alsace-Moselle partent, les familles y reviennent.
Novembre 1919 : législatives, victoire du « bloc national » (droite républicaine). Clemenceau se retire de la
politique en 1920 après avoir été battu.
1920-21 : beaucoup de grèves.
Fin 1920 : congrès de Tours
Traité de Versailles : traité de vengeance.
1924 : victoire de la gauche aux législatives.
1928 : victoire de la droite (union nationale).
1936 : victoire de la gauche avec le soutien du PC.
1. Les effets de la guerre et la reconstruction
Effets : destructions massives, pertes démographiques, apparition du régime monétaire d’inflation.
a) Situation démographique
Avant la guerre, il y avait une faible croissance démographique.
Et là, beaucoup de morts : 1 400 000 en France, pour une population de 38 millions.
Épidémie de grippe espagnole : a fait 500 000 morts en France.
Conséquences :
- moins de bébés, donc pénurie démographique durable ;
- vieillissement de la population ;
- déséquilibre homme / femme.
- 100 000 mutilés à 100 %, plein d’invalides, 750 000 orphelins, 700 000 veuves de guerre.
Donc, série de lois à partir de 1917 sur les orphelins, les veuves, les invalides… Elles créent un droit à
réparation : ces gens bénéficient de l’assistance publique.
1920 : politiques natalistes. Allocations pour les familles nombreuses, allocations familiales (ces dernières
étant au départ patronales, organisées de façon totalement privées).
b) La reconstruction
Cette question est localisée : départements du nord et de l’est dévastés. 600 villages entièrement détruits, 9
« villages martyrs » près de Verdun où il ne reste rien. 60 000 km de routes à refaire, 5 000 km de voies
ferrées, 800 000 bâtiments à refaire et 2,5 millions d’animaux d’élevage perdus…
Terrains agricoles dévastés, usines détruites dans les Ardennes…
Problème : c’est long. Il faut commencer par retirer les obus.
Déblaiement terminé en 1923, beaucoup de maisons provisoires à l’époque. Opération gigantesque pilotée
par l’État. Services d’urgence organisés dès 1918.
La reconstruction peut prendre une dizaine d’années, pour quatre ans de guerre…
Slogan des années 1920 : « l’Allemagne paiera ». Mais elle est réduite à néant.
1919 : on fait travailler des prisonniers allemands sur les chantiers de déblaiement (au mépris des
conventions internationales). Immigration de chinois pour travailler au désobusage.
Réintégration de l’Alsace-Moselle : pas évident, car il n’y a pas d’administration française là-bas mais une
administration impériale allemande. Et il faut adapter la législation. Au départ, l’idée est d’appliquer la loi
française, mais les habitants ne sont pas d’accord. Donc, législation spécifique…
« Le quart nord-est de la France est devenu un immense chantier, et le reste un immense bazar. Et on ne sait
pas comment on va financer ça. »
Certaines entreprises font des fortunes sur la reconstruction… Enjeu économique. Il n’y a pas d’appareil
administratif pour vérifier les transactions : on en profite !
c) L’inflation et les questions monétaires
1915 : on finance de la guerre avec de l’argent que l’on n’a pas (emprunts de guerre tous les six mois en
émettant des « bons de la défense nationale »). On emprunte aux États-Unis.
Plus de billets (on en imprime), moins de pièces (argent dette, fin de l’étalon or), les prix augmentent. 1921 :
les prix ont quadruplé par rapport à 1913.
Crises monétaires à répétition (1921, 1926…).
Peu de chômage grâce à la reconstruction. Croissance économique. Succès de l’automobile. Gain des
matières premières de l’Alsace Moselle.
Interventionnisme : création d’une compagnie française du pétrole, entre autres.
2. La grande dépression de 1931
Apparition du chômage, inconnu jusqu’alors. Pas d’assurance chômage.
Donc, soupes populaires dans la rue. On ne cherche pas à dissimuler les queues à l’intérieur comme on le
fait aujourd’hui.
1930-1935 : les entreprises de BTP voient leur activité diminuer de moitié.
Groupe majoritaire : droite et radicaux, soutenus par les milieux d’affaires. Veulent la rigueur budgétaire, la
protection de la monnaie.
Socialistes : veulent dévaluation ?
3. La consécration de l’idée que la droite est seule apte à gouverner
Années 1920 : idée que les gouvernements de gauche sont incapables de gérer l’économie.
a) L’incapacité économique des radicaux dans les années 1920
- Radical : Édouard Herriot (politique éco de gauche). Représente parfaitement « l’incompréhension des
radicaux face à la nouvelle donne de 1920 ». Agrégé de philo. Entre en politique en soutenant Dreyfus.
Maire de Lyon. Sénateur, brièvement ministre. Pas économiste. N’en fait qu’à sa tête à la présidence du
conseil.
- Républicain modéré : Raymond Poincaré (politique éco de droite)
Ont tous deux été présidents du conseil.
Rôle des Wendel…
Cours mal suivi…
Chapitre 12 – L’évolution des équilibres politiques
I.
Une première internationalisation de la vie politique française
1. Le poids direct des questions internationales : les traités et leurs suites
De l’armistice à 1923, la France ne cesse de signer des traités.
Il y a bien sûr le traité de Versailles en juin 1919 entre les alliés et l’Allemagne.
Question des réparations : prend fin en 1933 avec l’arrivée d’Hitler à la chancellerie.
1920 : traité de Sèvres.
1923 : traité de Lausanne entre alliés et Turquie.
2. L'importation de nouveaux modèles d'organisation politique
Chose nouvelle : jusqu’alors, la structuration des mouvements politiques s’était toujours faite sur des
questions intérieures sans référence particulière à l’étranger.
Seul exemple de modèle pris ailleurs : organiser un parti démocrate chrétien (international ?).
La SFIO bien que « section française » s’intéressait essentiellement aux questions nationales.
Or, changement dans les années 1920-1930 du fait de l’émergence du parti communiste (importé d’un
modèle extérieur) et intérêt pour l’Italie et l’Allemagne.
a) Le modèle communiste
L’URSS à l’issue de la première guerre mondiale a un projet politique international : organiser la révolution
mondiale. Donc, création en 1919 d’une internationale communiste ou komintern (1919-1943) visant
réellement à l’accomplir. Pas d’autonomie des partis nationaux à l’époque : il existe un seul parti
international (régime de vérité universelle) qui a des sections dans différents pays. Comparable à l’Église
(un centre et des sections).
Toutefois, après 1945 le parti communiste reste lié à l’internationale, mais il y a alors une doctrine
d’autonomie des partis nationaux (sur un certain nombre de points).
En mars 1919 à Moscou, l’internationale communiste tient son premier congrès annuel. Elle fixe son
organisation, se donne un comité exécutif et un président : Gregory Zinoviev. En 1923, elle est fixée. Il est
possible au congrès annuel d’exclure des membres qui ne respecteraient pas la doctrine de Moscou. Une
décision prise à Moscou doit obligatoirement être mise en œuvre nationalement, dès 1919-1923.
Conséquences en France : à la fin de la guerre, adoration pour Lénine, impression que l’espoir de révolution
existant depuis 1889 peut enfin se concrétiser et qu’elle est pour bientôt (dans les 5-10 ans). La première
guerre mondiale est vue comme la démonstration de la faillite du capitalisme.
Ainsi, un socialiste qui refuse d’adhérer à l’internationale a l’impression de renoncer à la chance de faire la
révolution mondiale. Du coup, les questions d’organisation passent au second plan et peu de socialistes
prennent conscience des conséquences de cette adhésion (on ne sait pas comment ça se passe à Moscou et on
pense qu’on pourra toujours s’arranger). C’est ainsi qu’en 1920, de nombreux socialistes sont partisans du
ralliement au parti communiste.
D’où la scission du congrès du parti socialiste de Tours en décembre 1920 à l’issue duquel sortent le parti
socialiste et la section française de l’internationale communiste.
Lénine ne s’intéressait pas à la France, Trotsky si.
Au sein du PS, délégation officielle (Cachin, Frossard) et délégation Bolchévique.
Léon Blum, lui, a lu les textes de l’internationale dans le détail et prononce un discours dans lequel il
dénonce le fait que le PS serait en adhérant à l’internationale une simple délégation.
Exemple de la doctrine de Moscou : en parallèle de l’organisation officielle du parti, Moscou veut une
organisation clandestine pour prendre le pouvoir par tout moyen (légal ou non)… chose que Cachin et
Frossard considèrent inutile en France.
À partir de 1921 : existence d’un PS et d’une SFIC. Cette dernière s’aperçoit que « les 21 conditions, c’est
pas pour du beurre », que la direction appartient à Moscou (komintern) et non Paris…
Processus de bolchévisation des PC dans les années 1920 : on les organise selon le modèle soviétique. Ça
passe bien en Italie et en Allemagne, mais pas en France.
Bien qu’il y avait eu très tôt des opposants au PC de Moscou, on ne savait pas quel crédit leur accorder.
Concrètement en France : alignement sur la ligne politique de Moscou et soumission organisationnelle.
- alignement sur la ligne politique de l’internationale : les résolutions votées chaque année au congrès
& les décisions du comité exécutif doivent être appliquées en France dans l’instant. Exemples :
 à partir de 1921, tactique du front unique : on s’allie sur le terrain avec toutes les organisations
qui représentent le monde ouvrier. Les communistes français, six mois plus tôt, avaient fait
scission avec le parti socialiste, et maintenant ils doivent travailler avec eux !
 à partir de 1928, tactique classe contre classe : aucune alliance possible (ni même électorale !)
avec les partis bourgeois dont les partis socialistes.
 à partir de 1934, ligne de la lutte antifasciste ce qui passe par la dénonciation de tous les partis
« socio-démocrates » catalogués comme « social-fascistes ». Doriot fin 1934 crée un parti qui
allie des gens de couleurs politiques différentes : est exclu.
 Courant 1935, mot d’ordre de front populaire (ce que défendait Doriot !) : alliance avec les partis
socialistes.
- soumission organisationnelle : choix de nouveaux dirigeants à partir des années 1920, jeunes et
d’origine ouvrière. C’est cela qui permet à Doriot de monter dans les années 1920 : fils de forgeron,
secrétaire général des jeunesses communistes.
 Thorez : permanent communiste dès son retour du service militaire. Dirigeant du PC de 1930 à
1964 (sa mort). Passe au moins trois mois par an à Moscou. Type même de l’homme nouveau,
choisi pour ses qualités de caractère et pour sa bonne volonté pour ce qui est de relayer les
directives.
 Impératif de création d’une section clandestine.
Humbert-Droz : dans les années 1920, responsable des PC français et espagnol. Remplacé en
1929 par Eugène Fried, résidant à Paris, qui joue un rôle de codirection (invisible) avec Maurice
Thorez.
En 1924, 28 députés socialistes.
En 1936 (front populaire), 72 députés.
b) Le modèle fasciste
Il n’existe pas d’organisation internationale fasciste… Peut-on dire qu’il y a vraiment eu un fascisme en
France ? Le modèle fasciste à proprement parler est Italien. Le national-socialisme allemand s’en rapproche.
Mais on ne peut pas vraiment parler de modèle unifié.
Il n’y a pas eu durablement en France de parti durablement fasciste comparable au PC. Et il y a plusieurs
variantes.
Si l’on se réfère au modèle italien, il y a dans les années 1920 une volonté de s’en inspirer pour implanter le
corporatisme (idée d’union du capital et du travail, d’organisation corporative de la société, cf. Valois).
Dans les années 1930, inspiration du modèle allemand manifeste, notamment pour :
- l’aspect personnalisation (cf. figure d’Hitler) ou culte du chef (qui incarne quelque chose, une idée, la
nation, sans pour autant être légitimé par dieu ou le peuple), qui lui sait où il va ;
- le rejet de l’internationalisation ;
- le refus de la primauté de l’individu sur le groupe ;
- la suprématie de l’émotion sur la raison ;
- le côté belliqueux (« la nation en guerre en temps de paix ») ;
- la volonté de trouver une troisième voix entre capitalisme et communisme.
Un seul parti ressemble à cela : le parti fondé par Jacques Doriot en 1936 après son exclusion du PC, intitulé
Parti populaire français. Il n’a pas de doctrine précise mais trouve un certain écho dans le rejet des
communistes (vengeance) et l’idée qu’il n’y a plus de perspectives. Il est demandé de faire un serment de
fidélité au chef, de dire le cri de ralliement En avant, Jacques Doriot ! mais meurt dans un accident.
Sinon, on retrouve quelques éléments fascistes par-ci par-là mais pas d’autre parti qui recouvre toutes les
caractéristiques.
3. Le clivage anticommunisme / antifascisme des années 1930
Dans les années 1930, la vie politique devient structurée par les questions internationales. Tout devient
interprété par des termes de politique internationale, avec deux grandes peurs :
- la peur du communisme ou du bolchévisme (l’homme au couteau entre les dents) qui va nous exproprier
;
- la peur du fascisme (assez récente).
Tous les partis doivent à partir de 1930 se positionner anticommunistes ou antifascistes.
II.
L'évolution des organisations politiques d'avant-guerre
1. À droite : l'émiettement parlementaire
Politique de notables en 1920. Reste orientée sur les groupes parlementaires, plus importants que les
organisations elles-mêmes (on n’aime pas trop le terme de parti à droite). Deux grands groupes :
- le groupe de la fédération républicaine, anciens opportunistes, droite liée aux milieux d’affaires. Nom à
l’assemblée : « entente républicaine et démocratique » ? Groupe modéré, économiquement libéral,
socialement conservateur.
-
L’alliance démocrate (Poincaré, Pierre-Étienne Flandin), parti laïc de classe moyenne, dans lequel on
trouve à partir de 1938 beaucoup de pacifistes (partisans des accords de Munich et d’un accord avec
l’Allemagne pour la paix – il ne s’agit pas pour autant d’approuver le national-socialisme).
2. À gauche : inadaptation croissante des radicaux, reconstruction des socialistes
À part la SFIO, il reste les deux grands partis traditionnels :
- les radicaux : parti qui perd sa raison d’être car il reste le parti de la laïcité et de la lutte contre l’Église
catholique alors que ce n’est plus le problème dans l’entre-deux-guerres. Devient donc un parti de
notables laïcs avec une certaine fibre sociale, mais coincés entre le PS (plus humaniste) et la droite
(volonté de petite propriété). Avant la guerre avait ses députés dans les grandes villes, dans l’entre deux
guerres c’est plus des ancrages régionaux (sud-ouest, grâce au quotidien La dépêche à Toulouse ; le
Rhône – Lyon – et la Bourgogne…). « Politique à l’ancienne ».
- le parti socialiste maintenu : du mal à se positionner dans les années 1920-1930. Il perd les ¾ de ses
adhérents et son journal L’Humanité avec la scission… Se pose aussi la question du partage des biens
dans toutes les fédérations : du mal à récupérer quoi que ce soit. Parti entièrement désorganisé par la
scission, et le groupe parlementaire prend tout d’un coup plus d’importance qu’avant puisque le parti est
en déclin (centaine de députés en 1920 au PS, maximum 150 en 1936). Ils reconstituent un journal : Le
Populaire, qui commence à 50 000 exemplaires (300 000 en 1936). Les adhérents augmentent en
nombre aussi : 30 000 adhérents en 1921, 60 000 en 1924, 140 000 en 1933. Beaucoup d’ouvriers mais
personne qui revient du PC. Pas mal de salariés et des classes moyennes qui n’osent pas aller vers le PC.
Mission du PS pour Blum : l’enseignement, l’éducation intellectuelle pour préparer les esprits à la
révolution. Ce que Blum reproche au PC et aux Bolchévistes soviétiques est de ne plus être marxistes.
III.
Les anciens combattants dans la politique de l'entre-deux-guerres
À partir de 1919, parmi les phénomènes sociaux nouveaux, il y a la présence d’un grand nombre d’anciens
combattants : tous les hommes de 40 ans ou moins sont potentiellement des anciens combattants. Et chez les
femmes, beaucoup de veuves de guerre.
Ceux qui rentrent vivant créent alors des associations d’anciens combattants pour avoir des liens régiment
par régiment et pour pouvoir parler de toutes les choses vécues à la guerre et que personne d’autre ne peut
comprendre.
Au départ, la plupart de ces associations n’a aucune vocation politique. Certaines minoritaires affichent
clairement leur pacifisme. La vocation de ces associations est essentiellement affinitaire. De 1920 à 1924,
c’est associations se regroupent en fédérations nationales : la fédération des mutilés (qui ont des droits
spécifiques à défendre) ou Union fédérale des mutilés (900 000), la fédération nationale des combattants
républicains (proche des radicaux) et l’association républicaine des anciens combattants (communistes,
dizaines de milliers). 1921 : association des gueules cassées ; association des combattants de l’avant et des
décès de guerre cités pour action d’État (combattants décorés de la croix de guerre), ou association des Croix
de feu.
En gros, un combattant sur deux est dans une association : de fait, ces associations sont courtisées par les
partis politiques. Certaines au début des années 1930 ont une activité antiparlementaire (à droite).
Chapitre 13 – La crise du parlementarisme et l’idée d’une réforme d’État
La question centrale de la vie politique française dans les années 1930 est la réforme de l’État.
La critique économique commence après la guerre, comme une critique de l’incapacité du libéralisme à
assurer une reconstruction autrement que dans un gros chaos. Donc on se dit que le libéralisme, c’est fini :
trop de puissance laissée aux grands requins de la finance et de l’industrie.
« Le XIXe a été politique, le XXe a été économique ».
I.
Crise du libéralisme, crise de la République parlementaire
Le sentiment de crise est structuré par les exemples étrangers : ce que l’on voit de la France est la
prolifération en Europe de régimes non libéraux, éventuellement autoritaires, où les institutions politiques
sont réformées pour y introduire à une certaine dose une représentation corporative, c’est-à-dire une
représentation institutionnelle des intérêts économiques. C’est le cas de l’Italie à partir de 1922-1924.
Réforme des institutions au Portugal dans les années 1930 avec une chambre corporative qui représente les
intérêts économiques. Franco en Espagne.
Tous les partis veulent une réforme de l’État sauf les communistes qui veulent la révolution.
1. Qui représenter ? Projets corporatistes et Conseil National Économique
Corporatisme : idée centrale des catholiques sociaux, liée à la critique du suffrage universel « une personne
= une voix » qui prive la société d’une réelle représentation puisque les « forces vives » (au-delà des
individus, ce sont des organes de la société) n’apparaissent pas.
Idée de syndicaliser la République. Durkheim suggère à la fin de sa thèse sur la division du travail que dans
les sociétés modernes, il faudrait recréer des corps intermédiaires car l’État ne peut pas fonctionner en
mettant simplement les individus devant l’État.
Duguit écrit en 1911 : « dans un avenir prochain, les syndicats devront être intégrés dans l’État » (ils devront
être des institutions politiques). Car dans son esprit, un parlement n’est véritablement représentatif du pays
que s’il représente les éléments individuels (les citoyens) et les éléments collectifs (organisations
professionnelles).
[allumage micro]
Deux tentatives de mise en œuvre :
- en 1919, l’institution d’un nouvel échelon de gouvernement qu’est la région doit permettre de
moderniser la décentralisation française. C’est impossible : on superpose donc la région économique aux
départements
- Création en 1925 d’un Conseil national européen. Il produit des études, des débats et des rapports ; il
joue dans les lois sociales du Front populaire. Il est réformé en 1936. Certains veulent en faire un organe
de direction.
2. Comment organiser ? Le planisme
Après la Première guerre : la rationalisation des tâches (taylorisme). Quelques libéraux économiques
demeurent, mais peu nombreux.
Revue « X-crise » : organisme de réflexion sur la rationalisation de l’économie. Cf. Spinasse, Lacoste.
Organisation patronale de Duchemin.
Globalement, ces gens croient à la technique, au progrès…
3. Comment décider ? Le renforcement de l’exécutif
Idée : donner au gouvernement, par le biais d’un premier ministre et du rapport entre chambre et
gouvernement, la possibilité de gouverner (rôle de Blum en 1934, Tardieu qui critique la durée des
gouvernements).
Idée de Tardieu de « libérer les gouvernements des oligarchies mendiantes ».
II.
L’antiparlementarisme politique des années 1930
Leader de l’Action française : « notre unique avenir est dans la monarchie », critique de tout
parlementarisme.
Organisation des jeunesses patriotes de Taittinger (veut un régime fort, donc pas de députés, il est
Bonapartiste et anticommuniste). Organisation dissoute en 1935.
Organisations d’anciens combattants : plusieurs sont financées par François Coty, admirateur de Mussolini.
Mais il meurt en 1934.
Cela leur aura permis de faire de l’activisme politique : Solidarité française, créée en 1933 (réforme de
l’État, corporatisme, mais effectifs légers) ; Parti franciste de Bucard (10000 adhérents), reçoit de l’argent de
l’Italie, lutte contre le parlement.
Seul groupe véritablement important : les Croix de feu (devise « travail, famille, patrie »). À l’origine,
anciens combattants décorés de la croix de guerre, qui deviennent les premiers à lutter contre le
parlementarisme. Présidés par François Rocque qui meurt en 1946.
Rocque est contre la lutte des classes, pour l’association du capital au travail. Il pense porter les valeurs de
la civilisation chrétienne. Cela ressemble beaucoup à ce que pensera plus tard De Gaulle. Il devient
pétainiste en 1940 mais anti-collaboration (anti-Hitlérien et anti-allemand), résistant et déporté en 1943 ou
1946.
1. La crise de 1934
Un scandale : l’affaire Stavisky (escroquerie aux municipales de Bayonne, le député-maire radical de
Bayonne est arrêté en janvier 1934 et Stavisky se « fait suicider »). Donc, ambiance antiparlementaire sur le
thème « tous pourris ». Démission du gouvernement fin janvier. Nouveau président du conseil : Daladier,
qui vire le préfet Chiappe. Cela déclenche le 6 février des émeutes antiparlementaires par les ligues
d’extrême-droite (30 000 manifestants, 16 blessés, plus de 1 500 blessés). Cela ouvre une crise
antiparlementariste de 2 ans (grèves, manifestations pacifiques : cristallisation de l’antifascisme, qui comme
souvent n’aboutit à rien comme bien des manifestations « anti »).
2. La montée des organisations politiques antiparlementaires
3. La défense des classes moyennes, un mouvement politique
Chapitre 14 – Le gouvernement du Front populaire : moment fort et illusion d’optique
C’est une coalition qui arrive au pouvoir fin avril-début mai par les urnes.
I.
Un moment politique exceptionnel
Peu d’exemples dans l’histoire politique française d’un gouvernement de gauche (dirigé par un socialiste et
soutenu par une alliance gouvernementale avec les communistes). Rien que le fait d’avoir des ministres
socialistes est très rare (jusqu’alors, que des socialistes indépendants comme Millerand ou Aristide Briand).
1. Un chef de gouvernement socialiste
Président du conseil : Léon Blum est un vieux socialiste indépendant (a fait des études : droit, normale sup,
Conseil d’État). Est un juriste, non un politicien professionnel, rentre en politique avec l’affaire Dreyfus.
Socialiste de raison : il considère que le contrôle étatique des pouvoirs est un principe fondamental.
Dirigeant politique juif : ça lui vaut beaucoup d’injures à cause de l’antisémitisme de l’époque.
Pas de communistes au gouvernement mais beaucoup de socialistes (qui occupent les principaux postes
ministériels : l’Intérieur), des radicaux et divers gauche. 3 femmes au gouvernement.
Programme le plus à gauche que la France ait connu jusqu’alors.
Programme « de compromis », car les radicaux refusent certaines choses et car le PC a une attitude assez
minimaliste sur le programme (les socialistes voulaient des nationalisations massives : chemins de fer,
assurances, électricité, banques…).
Concrètement : dissolution des ligues paramilitaires, réforme de la presse (obligation d’indiquer les origines
des fonds), liberté syndicale complète, relèvement de l’âge de la scolarité obligatoire, respect de la neutralité
scolaire, fonds national de chômage, réduction de la semaine de travail, plan de travaux publics, réforme de
la banque de France, des impôts, des entrées/sorties de capitaux, lutte contre la spéculation sur les produits
agricoles, réglementation de la profession de banquiers. Seule nationalisation acceptée : celle des industries
de guerre.
2. Le changement de doctrine du Parti communiste
La montée du Front populaire n’était pas prévue par la plupart des partis en 1934. Ce qui a rendu possible
son existence est le changement du PC suite à une décision internationale de Staline : la doctrine « classe
contre classe », la lutte contre les sociaux-démocrates, sociaux-traitres voire sociaux-fascistes.
Mais le PC craint le danger que représente Hitler. Donc en mai 1934, changement de doctrine : union,
officialisée par Thorez le 26 mai qui publie un article dans lequel il accepte les propositions d’union de la
SFIO. 11 juin : communistes et socialistes se rencontrent en France. Le 23 juin 1934, le PC tient sa
conférence annuelle : Thorez ne rejette plus la démocratie bourgeoise et situe le danger fasciste comme plus
important. Mais le 25, Thorez reçoit un télégramme qui lui impose de rajouter un jour à la conférence pour
aller plus loin dans son discours : affirmer la doctrine d’unité avec les socialistes. Exclusion de Jacques
Doriot qui avait accepté de faire union : la veille du second discours de Thorez ! 27 juillet : pacte d’unité
d’action signé avec la SFIO. 29 : manifestation commune PC-SFIO. Et les radicaux ? L’Internationale n’est
pas claire et pas particulièrement favorable. Mais Thorez s’allie à eux. Reste que les communistes ne sont
pas acceptés au gouvernement de Blum (25 mai 1936).
380 députés du Front en 1936 ; au Sénat ce sont toujours les radicaux qui dominent. Essentiellement grâce
aux alliances électorales, car il y a eu assez peu de mouvements de voix.
Juin 1936 : le gouvernement Blum dissout les Croix de Feu (450 000 adhérents), la Solidarité française, les
Jeunesses patriotes et les associations qui tournent autour. Les groupements n’existent plus mais les gens
sont toujours là : ils se réorganisent en partis politiques. Deux deviennent important : le Parti social français
(héritier direct des Croix de Feu, avec le double de monde), Parti populaire français (Doriot) qui annonce
100 000 adhérents en 1936 à son premier congrès.
L’union nationale des combattants abandonne sa neutralité en juillet 1936 pour s’organiser en un
« rassemblement de tous les français soucieux de barrer la route au communiste » (1 million d’adhérents).
II.
Un moment social exceptionnel
C’est surtout cela qui fait que le Front populaire a marqué les esprits.
1. La vigueur du mouvement social
Le mouvement social commence entre les deux tours (et il y a entre eux le premier mai, où les manifs sont
plus importantes que les années passées). À partir du 11 mai, grèves sur le tas, notamment dans les
entreprises d’aéronautique qui veulent absolument être nationalisées comme annoncées.
Les syndicats ne poussent pourtant pas à la grève. À partir du 2 juin, grande vague de grèves au-delà de la
metallurgie : les revendications ne sont rien de plus que les éléemtns du programme du Front populaire
(congés payés, conventions collectives).
Patrons comme gouvernement sont surpris, la SFIO ne comprend pas cette « agitation ». Le 6 juin,
l’assemblée vote l’investiture du gouvernement. Les grèves continuent à croître jusqu’au 11 juin (dans le
nord 90 % des entreprises en grève, même les magasins, coiffeurs…). Dès le 6 est réunie la conférence
tripartite (syndicats, patronat, gouvernement) qui aboutit en moins de 48 heures aux accords Matignon (le
patronat abandonne tout devant la force du mouvement social : congés payés adoptés à l’unanimité). Le soir
du 11, Thorez prononce un discours célèbre suite à la réception d’un télégramme de l’Internationale pour
dire qu’il faut savoir s’en tenir au compromis si toutes les revendications n’ont pas été acceptées et qu’il est
de toute façon de reprendre le travail. En réalité les grèves ne cessent totalement qu’au début du mois de
juillet. La CGT n’était pas organisatrice mais suiviste. Les grèves ont touché même les petites entreprises.
Sur la forme, ce sont des grèves festives, de célébration de l’arrivée du Front populaire au pouvoir et de
réclamation de l’application rapide du pouvoir.
2. Une politique économique et sociale jamais vue
Élection de délégués du personnel, réduction de la semaine de travail à quarante heures, deux semaines de
congés payés pour tous les salariés qui ont un an d’ancienneté. Des billets sont négociés par l’État auprès
des chemins de fer pour être vendus moitié prix lors des départs en vacances (560 000 à l’été 1936, 900000
pour l’été 1937).
Nationalisations (aéronautique et armement) : « ratées », des indemnisations importantes sont versées, les
patrons restent à la tête de leurs boîtes. Dassault est nationalisée.
Certains industriels relancent d’autres entreprises dans le même secteur pour entrer en concurrence à l’aide
des indemnisations (qui leur permettent de construire des industries flambant neuves !).
Stabilisation du cours du blé avec la création d’un « office national interprofessionnel du blé » qui régule les
prix (atténuer l’effet des bonnes et mauvaises récoltes).
Nationalisation des chemins de fer avec la création de la SNCF en 1937.
Mais ensuite, gouvernement « comme les autres ».
III.
Un remake (une redite)
1. La troisième victoire électorale de la gauche en douze ans
Après 1920, l’opposition droite/gauche ressemble à celle que l’on connaît depuis un siècle. Ce qui est
nouveau dans l’entre-guerre (gouvernement Herriot, gouvernements du Front populaire, même
gouvernements de droite comme celui de Tardieu) : c’est le Sénat qui renverse les gouvernements (majorité
Front populaire essentiellement faite de radicaux plutôt à droite, liés aux milieux financiers).
Cet échec est propre aux institutions de la IIIe République, non au Front populaire : il y a blocage entre
Assemblée et Sénat.
2. Un nouvel échec politique rapide
Les problèmes propres au Front populaire :
-
-
l’aggravation de la situation internationale : juillet 1936, soulèvement en Espagne, arrivée au pouvoir de
Franco (faut-il intervenir ? Oui pour les communistes, plutôt non pour les radicaux, non pour certains
socialistes comme Blum qui croit préserver la paix). Août 1936 : augmentation du service militaire en
Allemagne.
Situation financière « compliquée » : dévaluation fin 1936, Blum diffère en février 1937 certaines
réformes importantes prévues comme celle des retraites ou celle des fonds de chômage.
Fusillade de Clichy : le Parti Social Français tenait une réunion à Clichy et arrive une contremanifestation des socialistes et des communistes. Émeutes, 6 morts et 200 blessés car la police a tiré.
Arrivée du gouvernement de « défense nationale » (Daladier) : nouvelle dévaluation, et accords de
Munich fin 1938 qui laissent Hitler mener sa politique européenne. Les questions internationales
deviennent primordiales, tout le monde s’attend à une guerre.
Les coalitions possibles en politique étrangère (s’opposer à l’Allemagne ou pas ?) ne sont pas les mêmes que
celles qui se mettent d’accord sur la politique intérieur. Donc, des désaccords apparaissent sans cesse et les
gouvernements tombent.
Chapitre 15 : La recomposition des forces politiques dans la Seconde guerre mondiale (1938-1944)
Septembre 1939 : entrée en guerre. Pacte germano-soviétique. Défaite en 6 semaines.
Mars 1940 : gouvernement de droite (Paul Reynaud).
17 juin 1940 : Pétain président du conseil. Victoire de ceux qui veulent l’armistice.
Début juillet : le parlement vote les pleins pouvoirs au maréchal Pétain, acte d’acceptation complète de la
défaite et de total désarroi.
10-11 juillet 1940 : actes constitutionnels établis par Pétain à Vichy qui organisent un nouveau
gouvernement sur des bases antiparlementaires. « Vous allez voir l’immense capacité des gens à vivre dans
l’illusion ».
À Vichy ou à Paris, on n’a pas les mêmes opinions politiques puisqu’on ne vit pas les mêmes choses. Le
clivage droite/gauche se perd. Problème des colonies : un enjeu de la guerre.
En plus de De Gaulle, général Giraud à Alger pour ceux qui ne veulent pas rejoindre De gaulle.
Le régime de Vichy fait au début comme si les Allemands n’existent plus.
Fin 1941 : l’Allemagne envahit l’URSS au printemps, les États-Unis rentrent en guerre.
Débarquement des alliés en novembre 1942. Les Allemands occupent alors l’ensemble de la France (même
la zone libre). De juillet 1942 à juillet 1943, bataille de Stalingrad. Juillet 1943 : débarquement d’Alliés en
Sicile. Juin 1944 : débarquement de Normandie. Guerre jusqu’en mai 1945, capitulation.
I.
L’évolution des partis politiques
N’existent plus depuis 1940, sont interdits de toute activité en 1941.
1. La trajectoire changeante du PCF
Août 1939 : pacte germano-soviétique, le parti communiste en devient donc dépendant. Interdiction de la
presse communiste. Dimitrov ordonne à Thorez de rejoindre Moscou pour être en sécurité, il y reste donc
pendant toute la durée de la guerre (on le considère par conséquent en France comme déserteur — mais il est
gracié par De Gaulle en novembre 1944 et reprend ses fonctions).
Au début de la guerre, le PCF ne s’oppose pas aux Allemands. Il fait demander pendant l’été 1940 par un
avocat (car clandestinité) l’autorisation de publier légalement l’Humanité interdite par Daladier (mais le
régime de Vichy s’y oppose).
L’appareil clandestin refuse d’être anti-allemand, et un petit groupe d’anciens du PC réunis dans le parti
ouvrier des paysans français choisissent clairement de collaborer mais ils sont très peu nombreux.
Rupture du pacte germano-soviétique en 1941 : le PCF clandestin rentre dans la résistance. Création d’un
front « national » de libération de la France (rien à voir avec le FN d’aujourd’hui).
2. L'éclatement socialiste
Fin 1941 le PS est reconstitué dans la clandestinité. De nombreux socialistes sont résistants à titre personnel
mais ils ne rentrent pas dans une organisation de résistance propre au PS. De nombreux socialistes
rejoignent le régime de Vichy (les plus âgés).
Création du parti socialiste démocratique : ce sont les exclus collaborationnistes de la SFIO.
3. L’affaissement radical
Pour Pétain, les radicaux c’est la gauche : il y en a peu qui font carrière à l’intérieur du régime de Vichy. Ça
change un peu à partir de 1942 avec Laval, et quelques-uns parviennent néanmoins à faire carrière comme
Bousquet (secrétaire général à la police : responsable de la déportation des Juifs — mais il prend aussi des
contacts dans la résistance).
Héros radical : Jean Moulin.
Décembre 1944 : congrès du parti radical, on nomme une commission d’épuration qui mène une longue
enquête approfondie sur ses membres et débouche sur une liste de 34 noms à condamner. Il n’y a même pas
une trentaine d’exclusions à la libération.
4. Les partis de droite
Disparaissent totalement. Ils se reconstituent complètement à la libération sur des bases nouvelles.
a/ Une droite anti-bolchéviste
b/ Une droite patriote
c/ De l'anti-parlementarisme à la collaboration
II.
Trajectoires de l'engagement personnel (1938-1944)
1. Vers Vichy / la collaboration : quelques exemples
a) Les dérives du pacifisme
Marcel Déat, Doriot, Spinasse.
Déat : ni en 1894, milieu modeste, fait normale sup. Devient simple soldat dans la guerre puis termine
capitaine. Livre de souvenirs sur la Première guerre mondiale : Cadavres et maximes, philosophie d’un
revenant. Intellectuel, socialiste. Député en 1926, battu en 1928. En 1933 il quitte la SFIO pour un petit
parti.
Il est pacifiste, tellement qu’en 1939 il refuse toute intervention de la France pour sauver la Pologne. Il est
donc anticommuniste.
Il déteste Pétain (qui est pour la guerre), va à Paris et se retrouve dans un milieu collaborationniste antivichyste. Le national-socialisme est après tout quand même du socialisme : pour lui, l’essentiel est la paix. Il
pense sincèrement en 1940 que la paix ne peut être qu’allemande car de toute façon l’Allemagne domine
l’Europe. Devient ministre du travail sous Vichy en mars 1944 et il termine
Passe ses dix dernières années dans un couvent près de Turin sous une fausse identité.
Doriot : au départ très engagé au PC avant d’en être exclu, fonde le parti populaire français, « vrai parti
fascisant ». Il est anticommuniste. L’un des fondateurs de la légion des volontaires français contre le
bolchévisme : veulent aller se battre avec les allemands contre les russes. Meurt en Allemagne bombardé par
des Allemands par erreur.
Charles Spinasse : né en 1893, pacifiste, socialiste, corrézien. Maire puis conseiller général de 1919 à la
seconde guerre mondiale puis de 1961 à 1976 « après les amnisties ». Député de la Corrrèze (1924-1940),
maire… C’est un pacifiste comme Déat. Prof d’économie, anticommuniste, antivichyste et
collaborationniste (fonde comme journal Le rouge et le bleu). Finit par être interdit en 1942 car ce journal
est trop à gauche. Exclu de la SFIO, il n’a pas beaucoup collaboré concrètement et il termine sa carrière au
parti socialiste démocratique. Chirac est « l’héritier idéologique » de Spinasse. « C’est Déat moins les
excès ».
b) La collaboration économique
k
c) Les dénonciations
2. Les formes du refus
a/ Un dégradé de comportements
b/ Un exemple de situation ambiguë : le noyautage des administrations publiques (NAP)
c/ Qu'est-ce qu'être résistant ?
Dernier chapitre : la sortie de guerre.
I.
La transition
Situation différente de 1919. Ce n’est pas l’armée française qui gagne la guerre mais les armées alliées. Pays
occupé par les troupes alliées (américaines notamment) : quelle place pour la souveraineté ?
Il y a de plus des destructions sur tout le territoire, notamment faites accidentellement par les américains à
qui on ne peut demander de rembourser.
Trois Frances à réunir :
- France de Vichy
- France de Londres
- France de la résistance intérieure
1. Situation politique et institutions
1944 : année (avant même le débarquement) de l’unification des forces qui combattent contre le régime de
Vichy et les allemands. On sait que la guerre va se terminer. Début février : unification des forces françaises
de résistances en FFI (Forces Françaises de l’Intérieur) avec autonomie des communistes (FFP). 15 mars :
programme du Conseil National de la Résistance, qui marque une volonté de progrès social plus qu’une idée
d’actions précises.
Comité français de libération nationale créé à Alger.
3 juin 1944 : création du GPRF, gouvernement provisoire de la République Française (trois jours avant le
débarquement). Eisenhower, le 4 juin, prévoit que la France soit gouvernée par l’AMGOT (gouvernement
militaire des alliés).
9 juin : décision officielle d’intégrer les FFI dans l’armée française. 14 juin : De Gaulle débarque en France
et prononce son premier discours de Bayeux. Il arrive avec une administration (comme François Coulet,
nommé commissaire de la République dans les territoires libérés). La population sur place suit De Gaulle,
seuls quelques FFP (FTP ?) préfèrent le gouvernement américain.
12 juillet : De Gaulle est allé voir Roosevelt, qui accepte que l’AMGOT ne gouverne pas la France.
9 août : rétablissement de la République. Tout cela n’était pas couru d’avance, la libération est avant
tout une période d’incertitude.
25 août : libération de Paris par une armée française.
Gouvernement d’unanimité nationale. SFIO, radicaux, Mendès France, communistes, tous résistants.
Se pose la question du désarmement de la résistance : il y a encore une guerre, donc besoin de forces
armées ; mais en même temps les armes donnent de la puissance, ce qui présente un danger pour
l’administration en place.
Les communistes envisagent derrière la libération une révolution qui ne leur donne pas envie de laisser les
armes.
Le gouvernement n’est pas invité à la conférence de Yalta ni à celle de Posdam. Mais participe à la
fondation de l’ONU (place au conseil de sécurité).
Mai 1945 : Churchill obtient une zone d’occupation en Allemagne, la reconnaissance de la France comme
« allié vainqueur » plutôt que simple « territoire libéré ».
2. Épuration
Volonté de régler les comptes :
- collaboration avec les allemands ;
- participation au gouvernement de Vichy.
Idée qu’il y a un corps sain, que si on enlève les méchants il ne reste que les bons… Fiction
gouvernementale que « toute la France a été résistante » (avantage : légitimer la France à l’international).
Or on ne peut pas virer les gens, on ne peut que les condamner.
Processus qui dure de 1944 à 1948 parallèlement à tout l’histoire institutionnelle, très violent au début, et
moins à la fin (pas d’égalité des peines dans le temps).
Au début de la libération, les résistants rentrent dans l’administration, virent les gens de Vichy et procèdent
à des « exécutions extra-judiciaires » (10 000, « raisonnables »). Dénonciations, retournements de veste
(collabos qui se font passer pour résistants). 20 000 femmes tondues pour collaboration horizontale avec les
allemands).
Ensuite, plus encadré : épurations judiciaires (350 000 personnes poursuivies entre 1944 et 1948, 127 000
jugées, 767 exécutions, car sursis, grâces et commutations de peines). 50 000 peines d’indignité nationale
(mort civile : perte de tous les droits civils et politiques).
La Haute Cour de justice s’attaque spécifiquement aux hauts responsables politiques et administratifs du
gouvernement de Vichy (cabinets ministériels, toute participation à la décision politique). Examen de 108
dossiers de ministres, hauts fonctionnaires, parlementaires. 55 condamnations dont 18 à mort (comme
Pétain) et 3 effectuées (Pétain prend la perpétuité et meurt en 1951).
De Gaulle a le souci, dès le départ, de ménager la suite, ayant déjà suffisamment de problèmes pour
légitimer la France internationalement. L’unité nationale est nécessaire.
Dans la fonction publique, l’épuration se fait en place par les tribunaux normaux. 50 000 enquêtes. Pas
dépuration dans la magistrature ni dans la police alors qu’ils étaient les plus impliqués dans Vichy (mais on
ne peut pas se passer d’eux…).
Pas d’épuration économique (on ne condamne pas les entreprises, qui n’avaient pas tellement le choix de
s’arrêter). Deal informel : pas de poursuites, mais vous faites profil bas. Quelques nationalisations, de
journaux notamment : Le Monde créé en 1944 en récupérant les locaux du journal Le Temps qui continuait à
paraître sous Vichy.
3. Bilan de la catastrophe et reconstruction
Retours de populations en 1944-45-46 comme le retour des prisonniers en 1919, moins considérable et
symboliquement différent. On observe le retour des prisonniers en Allemagne et des déportés (peu
nombreux, qui arrivent dans une certaine indifférence car on ne réalise pas encore l’horreur des camps).
Globalement beaucoup de morts militaires sur le front de l’est (+ les Juifs), mais peu en France (légère
déportation car il y avait peu de Juifs et une certaine résistance à la déportation, 200 000 soldats tués,
150 000 civils). Pas d’anciens combattants pour quinze jours de guerre, mais beaucoup de résistants
(difficile à définir…) et des pertes matérielles importantes (bombardements américains, 60 000 usines
détruites, 2 000 000 immeubles détruits, 105 importantes gares rasées, baisse de la production de charbon et
d’acier, problème du pillage systématique des allemands).
De Gaulle fait le choix de l’emprunt d’État suivi d’une dévaluation plutôt que de l’austérité.
Franc à la fin de 1945 : 1/3 de sa valeur d’avant-guerre. Reprise en main de l’économie, nationalisations
massives de tous les secteurs considérés comme vitaux pour l’intérêt national (banques, Banque de France,
banques de dépôt, énergie, transports). Cela fait de l’économie française la plus socialisée de l’Europe de
l’ouest.
II.
La nouvelle donne internationale et intérieure
Majorité communistes-SFIO, apparition d’une droite moderniste.
Mise en place d’une organisation économique nationale sur un modèle proposé dans les années 1930 : la
planification avec création d’un commissariat général au plan en janvier 1946 (dure toute la IV e et la
première moitié de la Ve République).
Très vite, début de la guerre froide avec toutes les conséquences sur la vie politique que cela suppose. Peur
des américains que la France et l’Italie basculent du côté communiste (puisque les communistes font 25 %)
donc ils achètent (si l’on peut dire) la France avec le plan Marshall. Développement de l’État-providence.
Développement de partis politiques de droite pas seulement parlementaires. Car clivage droite/gauche,
américains/URSS.
De Gaulle est anti-communiste mais il est nationaliste et donc anti-américain philosophiquement. En 1945 il
cherche surtout à imposer l’indépendance politique de la France aux États-Unis.
III.
Nouvelles directions de la vie politique
Grand enjeu politique de la IVe République : réussir la modernisation des institutions.
1. Sur le plan politique
Après le GPRF, élection en octobre 1945 d’une assemblée constituante pour voter une nouvelle constitution.
4/5 des membres sont des résistants.
Deuxième discours de Bayeux de De Gaulle en 1946 sur sa doctrine institutionnelle : pouvoir exécutif fort
contre le régime d’assemblée.
Tripartisme (SFIO, MRP, PCF) jusqu’à l’adoption de la nouvelle constitution.
Mai 1947, le PCF sort du gouvernement, il n’y revient qu’en mai 1981.
Législatives : le PCF fait 28 % des voix, le MRP 26 %, la SFIO 18 % et les radicaux 11 % (reste : modérés
de droite). Président du conseil SFIO.
Problème du poids des coutumes : on fonctionne comme sous la IIIe (majorité relative pour renverser le
gouvernement, demande de l’investiture deux fois).
2. Sur le plan administratif
Modernisation administrative qui continue après 1958 de façon régulière (alors que la progression politique
est discontinue).
En 1945, l’équipe de De Gaulle met en place une réforme de l’administration. Création d’une école pour
hauts fonctionnaires, l’ENA, qui rassemble le recrutement de tous les grands corps de l’État. Conséquences
à long terme (années 1955-1960), donc effet structurant sur l’organisation de l’État 10 ans après 1945
(auparavant, on a l’impression que l’on bégaye simplement la IIIe République).
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