DOCUMENT DE DISCUSSION SUR LA VIOLENCE DANS LE SPORT CENTRE CANADIEN POUR L’ÉTHIQUE DANS LE SPORT FÉVRIER 1999 Création d’un nouveau genre de sport© — Et la violence? Pouvons-nous, comme société, affirmer que la violence dans le sport va à l’encontre de la morale et qu’elle devrait être punie et même interdite? La réponse évidente est «oui». Par contre, comme c’est le cas dans la plupart des dilemmes d’ordre moral, un examen plus approfondi de la question révèle un problème beaucoup plus complexe. À titre d’exemple, certains sports, de par leur nature, exigent un contact physique intense qui peut causer de la douleur, des blessures ou plus. Ces sports sont-ils moralement inacceptables pour autant? Le point de départ de toute discussion pertinente sur la question consiste à utiliser une définition commune de la violence dans le sport : LA VIOLENCE DANS LE SPORT est une agression physique ou tout autre geste physique nuisible commis par un joueur dans un contexte sportif et qui a pour but de blesser ou de faire mal à un autre joueur (ou partisan, entraîneur, officiel, etc.) dans une situation où le geste blessant n’a aucun lien avec les règlements et les objectifs de compétition du sport. Notez bien que cette définition exclut les comportements agressifs des athlètes qui ne visent aucunement à blesser l’adversaire et les moyens permis par le règlement pour atteindre les objectifs du sport. En supposant que cette définition est universelle et qu’il existe un consensus à l’effet que la violence dans le sport ainsi définie va à l’encontre de la morale, quelles seraient les prochaines étapes dans l’élaboration d’énoncés de politique ou de normes d’éthique connexes? En appliquant cette définition de la violence dans le sport aux politiques ou aux normes, on constate rapidement qu’il existe beaucoup de questions auxquelles il faut répondre. Intention : Comment détermine-t-on l’intention? Les douleurs, les blessures physiques et même l’incapacité peuvent être causées involontairement, en respectant les règlements du jeu. L’intention peut être très difficile à établir. Les politiques et les normes fondées sur la détermination de l’intention pourraient ne pas s’appliquer de façon juste et équitable à toutes les situations. Violence à l’intérieur du règlement : Les règlements de plusieurs sports acceptent des comportements qui peuvent causer de la douleur, des blessures ou l’incapacité de l’adversaire. Certains sports, tels que la boxe, permettent les gestes qui ont pour but de causer de la douleur. D’autres sports, tels que le hockey sur glace, le football et le rugby, permettent l’intimidation physique au moyen de contacts physiques agressifs qui blessent et causent de la douleur. Avant de déterminer le caractère moral des comportements qui causent du mal, il faut établir si le geste a été commis à l’intérieur ou à l’extérieur du règlement. 1 DOCUMENT DE DISCUSSION SUR LA VIOLENCE DANS LE SPORT CENTRE CANADIEN POUR L’ÉTHIQUE DANS LE SPORT FÉVRIER 1999 La violence acceptée ou prévue à l’extérieur du règlement : Les joueurs peuvent poser des gestes très violents à l’extérieur du règlement, comme les bagarres, qui sont prévus et même encouragés. Ainsi, même les actes violents commis à l’extérieur du règlement peuvent représenter un aspect prévu ou attendu du jeu. L’intensité acceptable de ces actes violents peut être déterminée par des critères culturels ou fondée sur le sexe, ou même liée à l’histoire d’un sport. Ampleur : Les discussions sur la violence dans le sport doivent également porter sur les gestes commis par les amateurs, les partisans et les membres des familles des participants. Consentement informé : La détermination du caractère moral d’un geste doit tenir compte du consentement de la personne contre qui le geste est commis. La plupart des sports comportent un risque de blessure car ils exigent un effort physique. Les blessures subies dans le sport peuvent être causées par un geste légitime et accepté de la part d’un adversaire. En général, les gestes commis à l’intérieur des règlements sont considérés comme moralement acceptables en raison du consentement implicite des joueurs, même si ces gestes causent du mal. Par contre, le consentement ne peut être considéré comme valable que si le participant est informé de ce à quoi il consent. Les individus qui pratiquent un sport où il y a consentement implicite savent-ils exactement à quoi ils consentent? De plus, le principe du consentement informé convient bien aux adultes compétents mais convient moins aux mineurs et aux personnes incapables. Nos lois ne permettent pas aux mineurs de donner un consentement valable à toutes sortes de gestes. Doit-on permettre aux mineurs de consentir au risque inhérent à la participation à divers sports de contact? Comment peut-on appliquer le principe du consentement informé à un sport qui accepte une certaine quantité de violence à l’extérieur du règlement? À titre d’exemple, plusieurs joueurs et ligues acceptent les bagarres au hockey comme si elles faisaient partie du jeu. Les louanges et les félicitations faites aux joueurs ainsi que les pénalités insuffisantes qui leur sont imposées le démontrent. Elles ne découragent pas les joueurs et ne font pas de mal à l’équipe. Il existe plusieurs théories sur les causes de la violence dans le sport et dans la société qui pourraient entrer en ligne de compte dans l’élaboration d’énoncés de politique ou de normes d’éthique. Biologie : Cette théorie suppose que l’être humain est violent de nature et fait du sport un moyen relativement sûr et contrôlé de laisser aller son agressivité. Psychologie : La violence est causée par la frustration ressentie lorsque les efforts faits pour atteindre un objectif échouent. Dans le sport, cette frustration peut être causée par les officiels, les adversaires et autres facteurs. Apprentissage social : C’est la théorie la plus convaincante à l’heure actuelle. La violence dans le sport est acquise et apprise comme méthode acceptée de «jouer le jeu». La violence ou les bagarres peuvent être dénoncées et pénalisées officiellement, mais louées dans les coulisses par les entraîneurs, les coéquipiers, les amateurs, les médias, etc. Les pénalités officielles peuvent être insuffisantes pour décourager ces comportements. 2 DOCUMENT DE DISCUSSION SUR LA VIOLENCE DANS LE SPORT CENTRE CANADIEN POUR L’ÉTHIQUE DANS LE SPORT FÉVRIER 1999 Création d’un nouveau genre de sport qui favorise les valeurs fondamentales positives telles que le respect, l’esprit sportif, la discipline et l’intégrité exige une réponse à ces questions et le respect d’une promesse de changer les choses. Et la violence dans le sport? Il faut commencer en déterminant pour chacun des sports ce qui constitue un règlement de jeu et un comportement violent inacceptable. Il faut ensuite : Éliminer toute récompense pour les comportements violents inacceptables des joueurs. Pénaliser la violence inacceptable afin que les inconvénients éliminent tous les avantages qui peuvent être obtenus dans un match. Encourager les joueurs et les entraîneurs à mettre l’accent sur les aptitudes et le plaisir de viser l’excellence au lieu de la victoire. Les joueurs qui perdent un match bien joué et juste doivent être plus valorisés que les gagnants d’un match mal joué, injuste ou chanceux. Organiser des ateliers, des séances éducatives, des réunions d’équipe, de parents et communautaires ainsi que des campagnes de sensibilisation du public sur les valeurs positives du sport, de l’esprit sportif et sur la façon de créer ensemble un nouveau genre de sport. Encourager les participants à voir les adversaires comme des collaborateurs nécessaires à la poursuite d’un match bien joué et d’un sport valable et non comme des ennemis à conquérir ou à vaincre. Encourager la poursuite de l’excellence sportive pour le plaisir en faisant de son mieux dans une compétition juste et honnête qui met les habiletés à l’épreuve. Lectures supplémentaires : Smith, M.D., Violence and Sport, Toronto, Ontario: Butterworths, 1983 Smith, M.D., La Violence in et le sport amateur : Recension de la documentation, Ottawa, Ontario: Commission pour l’esprit sportif, gouvernement du Canada, 1987 Le Centre canadien pour l’éthique dans le sport accueille tous vos commentaires et suggestions sur ce document de discussion. Communiquez avec nous à l’adresse suivante : 202-2197 promenade Riverside Drive, Ottawa, Ontario K1H 7X3 Canada Tel./Tél. 613.521.3340 Fax/Téléc. 613.521-3134 InfoLine 1.800.672.7775 [email protected] www.cces.ca 3