La démocratisation de l'économie au lieu de la propriété privée! Proposition du Comité Directeur à l'attention de l'Assemblée des Délégué-e-s du 21.06.2014 La démocratie économique comme réponse à la crise L'Europe est plongée dans une crise profonde. Depuis que la Grèce a évité la banqueroute grâce à l'argent de l'UE, elle est obligée d'appliquer les recettes néolibérales de l'UE et de l'FMI. La politique d'austérité qui a suivi n'a pas sauvé la Grèce. Au contraire: la Grèce a cédée face aux pressions politiques de l'UE. Les bilans ont été améliorés à court terme par le biais de la vente de l'argenterie d'Etat. Le revers de la médaille est la perte du contrôle politique des infrastructures et des services publics. Entre 2009 et 2013, la Grèce a réduit ses dépenses du 26%, ce qui a repoussé la fin de cette crise aux calendes grecques. Les conséquences de cette politique est la pauvreté en Europe, juste à notre porte. Les gens sont poussés dans le désespoir, notamment au niveau politique. La conséquence scandalisant: lors des dernières élections européennes les grecques ont donné-e-s le 10% de leurs voix à un parti fasciste. La responsabilité revient principalement à l’absence d’une gauche crédible qui rompt profondément avec cette logique néolibérale et le système capitalisme en soi. Les "paquets d'aide financière", dont les noms sont trompeurs, poursuivent les intérêts des nations européennes dominantes. Leur propagation du néo-libéralisme laisse derrière elle champ de ruines sociétales et économiques. Les forces progressistes européennes aussi n'arrivent pas à donner une réponse crédible à la logique néo-libérale et au système capitaliste. Pour la JS cela n'est pas acceptable. L'économie doit être au service des hommes et non pas au service de l'FMI et de l'UE. Dans son programme de parti élaboré à Lausanne en 2010, la Parti Socialiste a confirmé sa longue lutte qui dure depuis 125 ans pour le dépassement du capitalisme. La voie pour atteindre cet objectif est la démocratisation de l'économie. "Au cœur de la démocratisation de l'économie, on trouve la démocratisation de l'ordre de la propriété. Sans nouvel ordre en la matière, il n'est pas possible d'imposer à l'économie le respect des droits humains et de la durabilité écologique. Le socialisme ne veut pas supprimer la propriété, mais il veut l'encadrer. La propriété ne doit pas consister seulement en un droit, mais aussi en un devoir. Son exercice doit servir le bien public. Le socialisme prône un ordre de la propriété différencié, qui assume des devoirs envers la société, tout en étant écologiquement et économiquement fonctionnel, avec des droits d'utilisation et de disposition personnels, privés, publics et relevant des entreprises ou des coopératives."1 Bien que le PS ait adopté cet objectif et que depuis il a lancé plusieurs projets dans ce cadre, il s'est concentré principalement sur la question de la justice dans la répartition financière. Mais, dans le cadre de l'aspiration à une économie démocratique on ne doit pas avoir comme seul but de changer le régime de la propriété, mais aussi de mettre à disposition des Hommes les mêmes droits à la propriété dont dispose actuellement la classe dirigeante. Etant donné que notre économie actuellement fonctionne uniquement sur la base de la propriété du capital et des terrains, en particulier des matières premières et moyens de production, règne une dangereuse force décisionnelle exercée par quelques riches et fortunés. Pour que la propriété soit effectivement transférée à tout le monde on doit réussir à atteindre une démocratisation de l'économie, pour qu'elle ne soit plus régie que par l'argent. En tant que ressources du capital, le travail et les travailleur-se-s doivent avoir les mêmes droits et sont légitimés à disposer du droit de participation aux prises de décision. 1 Programme du PSS 2010, pp. 17-18 Aujourd'hui existent les bases pour la participation aux décisions de l'économie Les services publics: Le service public, qui est organisé en grande partie par les parlements cantonaux et national, est à considérer comme la plus importante base pour l'économie démocratique.Grâce aux réussites des services publics ils existent aujourd'hui des nombreux domaines économiques qui ont été enlevés à la propriété privée et qui remplissent des tâches pour l'ensemble de la société. Parmi les plus grands et importants domaines nous comptons le bien-être social, la formation, la santé et les transports. Le service public offre à notre société une importante base en assurant le bon fonctionnement des éléments fondamentaux de la vie publique. En assurant l'accès pour tout le monde à certaines prestations il réalise, au moins jusqu'à un certain degré, la cohésion et l'égalité des chances au sein de notre société. Plusieurs prestations du service public sont aujourd'hui attaquées par les néolibéraux qui souhaite privatiser à nouveau ces biens publics afin d'augmenter leurs profits. Nous nous soulevons contre ces attaques et nous nous engageons au contraire pour un renforcement des services publics. Mais cela ne suffit pas: ce n'est pas parce que certains domaines appartiennent à la collectivité qu'ils sont automatiquement démocratiques. Notre objectif sera atteint seulement quand les travailleurs participeront aux prises de décisions qui concernent leur entreprise. Banques cantonales: Les banques cantonales sont en particulier à mettre en évidence dans le cadre du service public. Elles ont été créés durant le XIX siècle sur demande des agriculteurs et des personnes à faible revenu dans le but de leur faciliter l'accès au crédit. Les banques cantonales avaient pour but de soutenir l'économie régionale, de donner des crédits abordables pour les petites entreprises et d'aider une vaste partie de la population à recevoir des crédits hypothécaires. Jusqu'à la création de la Banque Nationale en 1907, une grande partie d'entre elles avaient également la tâche de battre monnaie. Les banques cantonales appartiennent au domaine public et les bénéfices qu'elles réalisent finissent conséquemment dans les caisses publiques. Les banques sont façonnées pour se concentrer sur des activités commerciales régionales et pour les intérêts de la population au lieu de suivre les stratégies commerciales risquées des grosses banques. Par conséquent, durant la récente crise elles ont prouvées d'être supérieures aux grands instituts. Pour les bourgeois, les banques cantonales sont une épine dans le pied et ils essaient régulièrement de les privatiser. La gauche a fait une résistance tenace contre cela. En revanche, il est plus difficile de s'opposer aux directions qui sont prises par les banques cantonales: sous la direction de la bourgeoisie elles s'adressent de plus en plus vers un commerce international et essaient d'émuler une stratégie commerciale à la sauce de la Paradeplatz. Tout cela malgré les signes clairs qui montrent que cette voie est sans issue: le Crédit Suisse a été récemment condamné pour ses machinations criminelles, le secret bancaire est sur son lit de mort, l'UBS a dû être aidée pendant la crise avec 68 milliards payés par les contribuables. Les banques cantonales ne doivent pas suivre ce chemin. Elles doivent se concentrer sur des stratégies d'investissements durables et socialement responsables et remettre au cœur de ses activités l'intérêt public. La garantie fournie par l'Etat, ainsi que le contrôle exercé par les parlements cantonaux doit ainsi maintenu ou réintroduit dans sa forme complète pour toutes les banques cantonales. Les coopératives: Un important exemple du droit de parole organisé démocratiquement se trouve dans la forme des coopératives. Les coopératives ont une longue tradition en Suisse, la plupart ont été créées lors de l'âge d'or de la fin du XIX siècle, et sont actives dans différents domaines économiques: les plus importantes sont les coopératives de production, des consommateurs, d'agriculture, de crédit et d'épargne. Nous citons dans ce sens deux importants exemples: La Coop a été créée il y a une centaine d'année en tant que coopérative, la Migros était à l'origine une société par actions mais seulement quelques années plus tard elle a été transformée en coopérative. La banque Raiffeisen a toujours été une coopérative qui offre avant tout des crédits aux simples citoyens. Dans l'agriculture les coopératives ont une tradition particulièrement forte. Traditionnellement, les coopératives alpestres avaient le but de permettre à tout le monde l'accès aux équipements et aux outils auxiliaires, le traitement et la vente des produits agricoles. Les coopératives d'habitation ont aujourd'hui une très grande importance. Souvent elles sont les seules à offrir une alternative à loyers exorbitants des villes, des agglomérations et des zones touristiques. Tandis que le commerce avec les terrains permet d'atteindre les plus hauts profits, les coopératives louent leurs espaces habitables au prix le plus bas possible. Les coopératives d'habitation sont ainsi restées très fidèles aux fondamentaux coopératifs mais malheureusement on ne peut pas dire de même pour un grand nombre d'autres coopératives. La coopérative est de plus en plus considérée comme une simple forme juridique qui ne garde que son nom, tandis que dans la réalité elle est régie comme une toute autre entreprise capitaliste. Sous le poids de la concurrence capitaliste, elles adoptent progressivement des formes organisationnelles orientées vers la recherche de profit où les salaires des cadres supérieurs augmentent et la participation des coopérateurs est minimisée. Pour contrer ce phénomène, la démocratie des membres doit être placée au centre. Ceci ne peut être possible que si on s'attaque à la concurrence capitaliste en renforçant les liens avec le secteur public et en luttant pour l'extension du système coopératif. Espace public: Dans le passé, plusieurs volets dans le domaine de l'espace public et de la culture ont été organisés de façon sociétale et démocratique. Au début du XX siècle s'est constitué ce qu'on appelle le mouvement des maisons du peuple. Suite au renforcement du mouvement des travailleurs, en particulier dans plusieurs villes suisses, ont été bâtis des espaces ou des maisons qui servaient de point de rencontre ou d'espace social pour les forces travailleuses. Dans ce contexte, une partie des tâches sociales ont également été assumées, comme par exemple des restaurants, bains publics, bibliothèques et salles de lecture. Le mouvement s'est estompé avec le changement de direction du socialisme et des syndicats vers le milieu du siècle, les maisons du peuple ont été vendue ou converties à d'autres usages. Les revendications pour plus d'espaces publics autogérés et pour une culture accessible ont été dorénavant reprises par le mouvement de 68 et par les mouvements juvéniles des années '80. Les centres autonomes et les institutions culturelles correspondantes, souvent gérés démocratiquement par la base composée des personnes actives, ont été créés dans la foulée de ce mouvement. Une grande partie de ces mouvements ont disparu peu après, néanmoins leurs vestiges offrent encore aujourd'hui les rares alternatives à la société de consommation et à la culture élitaire. Les socialistes et les syndicats doivent participer activement au maintien et au développement de ces structures. L'objectif doit être de disposer de maisons du peuple qui puissent servir à d'autres buts, comme des crèches ou garderies. Démocratie économique: les prochaines étapes. Bien évidemment ces prémices ne nous suffisent pas. La gauche s'est toujours battue pour des nouvelles voies. Nous pouvons citer par exemple quelques engagements majeurs de la gauche suisse lors du dernier siècle: la grève générale de 1918, l'initiative sur les banques en 1984 ou l'initiative pour la participation des travailleurs de 1976. Dans la lutte pour plus de démocratie économique nous devons construire sur ce qui existe et, en même temps, s'engager dans des nouvelles voies. 1. Défendre et développer le service public Le service public ne doit pas être soumis à une pure orientation au rendement. Il offre des services socialement nécessaires pour l'ensemble de la population et non pas seulement pour celles et ceux qui peuvent se le permettre financièrement. Les prestations du service public sont accessibles de la même façon pour l'ensemble de la population et sont de bonne qualité. Par le biais des impôts, tout le monde participe au financement selon ses disponibilités financières. Les bourgeois essaient toujours d'enlever de l'argent des mains publiques dans le but de réaliser des cadeaux fiscaux pour les plus fortunés. Les prestations du service public sont menacées d'être privatisées dans le but d'offrir des nouvelles possibilités de profit aux marchés privés. Nous demandons: • Pas de mesures d'épargne sur le service public, pas de cadeaux fiscaux pour les plus riches! • Consolidons le financement solidaire de l'impôt au lieu d'introduire des nouvelles taxes ou émoluments. • Pas de privatisation des prestations publiques! • Davantage de prestations qui sont essentielles pour le fonctionnement de la société doivent être gérées par le secteur public. Nous citons entre autres les systèmes bancaires, les caisses maladies, la prévoyance vieillesse, le système hospitalier, la production d'énergie, les transports, la garde des enfants, les systèmes de communication et la construction de logements. • Pas de vente des immeubles publiques, les terrains sont vendus seulement avec des droits de constructions. L'Etat promue activement les logements sociaux et acquière les terrains chaque fois qu'il en aura l'occasion. • Orientation du service public sur les intérêts de la collectivité et non pas sur des modèles d'entreprise basés sur la maximisation des profits 2. Soutenir les coopératives Les coopératives sont une forme d'organisation économique qui a une longue tradition et qui est largement acceptée. Cette appréciation doit être utilisée dans le but de promouvoir les coopératives. En même temps, la participation des travailleur-se-s à la prise de décision et les obligations envers la société doivent être renforcées. Nous demandons: • Promotion par l'Etat des coopératives, p.ex. une PME qui n'a pas de repreneurs est rachetée par l'Etat et elle est transformée en coopérative. • Les entreprises qui ont une importance pour la société civile et qui sont délocalisées ou fermées sans une nécessité économique, doivent être reprises par l'Etat et transformées en coopératives. • Plus de règles sur la transparence pour les coopératives au lieu de la pseudo démocratie. • Promotion des coopératives d'habitation qui appliquent des quotas pour la construction de logements d'utilité publique. • Les membres des coopératives ont plus de compétences dans la prise de décision sur les activités de la coopérative, la répartition des bénéfices ainsi que les décisions stratégiques. • L'Etat promeut les espaces culturels organisés de façon démocratique, alternatifs, à bon marché et accessibles pour tout le monde. 3. Participation et répartition des bénéfices Même au sein de l'économie basée sur le marché il faut renforcer la participation des travailleurse-s à la prise de décision. Nous devons mettre un terme à la force de décision non partagée des possédant-e-s. Pour la JS il est évident que nous devons nous exprimer pour la participation aux prises des décisions. Nous considérons comme illégitime la privatisation des profits induits par l'économie sociétale et que cela soit la cause des crises récurrentes. Nous demandons: • Participation à la prise de décision sur les lieux de travail • Répartition des bénéfices de l'entreprise entre les salarié-e-s. • • • • Contrôle sociétal et démocratique de l'organisation des entreprises Publication des livres comptables lors de licenciements à caractère économie ou en cas de délocalisation. Participation des travailleur-se-s à la politique opérative et du personnel des entreprises. La socialisation de toutes les industries à relevance sociale sous le contrôle démocratique de l'Etat, syndicats et du personnel, ainsi que par les associations des consommateurtrice-s. La JS s'engage pour la dé émocratie économique. Pour les jeunes socialistes la propriété n'est pas un droit de l'homme. La propriété et une conquête de la bourgeoise et une obligation sociale. Nous devons tendre à la démocratisation et à la socialisation des moyens de productions face à la propriété privée capitaliste. Seulement ainsi nous pouvons garantir que les hommes et les femmes puissent décider de la production et non pas que l'économie décide pour tout le monde. C'est ainsi que la production sociétale profite à l'ensemble de la communauté Notre voie pour le dépassement du capitalisme est la démocratisation de l'économie et de tous les domaines de la société. Pour cela, la JS s'engage pour: • Une stratégie de gauche, à long terme et cohérente pour obtenir la démocratisation de l'économie de la part du parti socialiste suisse. • Un engagement international et un travail de persuasion auprès de nos confrères de la YES et de la IUSY, focalisé sur la démocratie économique globale et tant qu'alternative au capitalisme pour l'ensemble des gauches du monde. • Une vaste mobilisation de toutes les forces de gauche pour une économie démocratique.