SORTIRAPARIS
Jusqu’au 18 avril 2015, le Théâtre National de Chaillot présente Sœurs, la nouvelle création de Wajdi
Mouwad, et deuxième partie du cycle appelé Domestique, dont le premier volet, Seuls, a été présenté il y
a deux ans sur cette même scène. Une façon pour le Théâtre de continuer un cycle québécois initié avec
Vanishing Point depuis le mois dernier.
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Une nouvelle fois, une personne se retrouve seule sur une scène. C’est la marque de fabrique du nouveau cycle
initié il y a deux ans par Wajdi Mouawad, en présentant Seuls. Suivront Père, Mère, et Frère. Dans Sœurs, il
s’agit d’une femme, une avocate. Elle s’appelle Geneviève Bergeron, un nom bien français qu’au Canada, à
Ottawa, on cherche sans cesse à américaniser (ce qui ne plaît pas à une francophone du Québec). Interprétée
par l'excellente, et métamorphosée, Anncik Bergeron, le personnage est médiatrice, sa prochaine mission
débute dans quelques jours, elle doit partir au Mali pour tenter d’apaiser un conflit. Pourtant… avant de régler les
conflits mondiaux, ne vaudrait-il pas mieux régler ses conflits intérieurs ?
C’est ce trop-plein que raconte Sœurs, pièce qui se déroule sur deux jours, essentiellement dans une chambre
d’hôtel moderne et digitale, où les boutons n’existent plus mais qui fonctionne à force de reconnaissance vocale.
Le modernisme à son paroxysme qui ne marche pas toujours comme il faut… Dans cette chambre d'hôtel, au
cœur de sa vie traditionnelle, tout va exploser : le moment ne se choisit pas.
Avant cela, Geneviève Bergeron laisse entrapercevoir une histoire de sœur, une grande sœur découverte, puis
perdue à nouveau : c’est là son grand malheur, celui qui l’a bouffe, qui l’a ronge de l’intérieur. C’est souvent
comme ça chez Wajdi Mouawad, c’est aussi pour cela que tout est toujours si prenant, intense : le mal est
souvent ancien, et il faut partir à sa recherche pour essayer de le vaincre. « L’immortalité des moments passés »,
dit-il, c’est celui qui fait mal. Se souvenir, et savoir que ça n’éxiste plus.
Cette pièce Sœurs de Mouawad est peut-être moins violente que les précédentes, elle est très drôle par moment,
assez douce à d’autres, mais toujours très juste. L’entrée de Leïla dans l’histoire, une experte en assurance
venue constater les dégâts provoqués par Geneviève dans sa chambre d’hôtel met en lumière la relation avec la
mère, primordiale.
Le dispositif scénique, fait de planches de bois coulissantes qui servent à la fois de panneau à projection que des
murs de la chambre d’hôtel est sobre mais intelligent. Dans le fond, une projection, quasi permanente, de
Gabrielle d’Estrée et une de ses sœurs, tableau qui peut annoncer, selon comment on l'interprète, aussi bien le
bonheur d'une naissance que le malheur d'une mort. Une nouvelle fois, la musique apporte un petit quelque
chose à l’ensemble, une invitation supplémentaire au voyage, à l’échappée. C'est très beau, une nouvelle fois, ce
qu'a créé Wajdi Mouawad. Pas étonnant que son public réponde toujours présent.
MARINE'S.'