Accélérer la transformation économique de l`Afrique, Jim Yong Kim

Accélérer la transformation économique de l’Afrique, Jim Yong Kim, président de la
Banque mondiale Les Échos
Malgré la baisse récente des cours des matières premières, près de la moitié des pays d’Afrique
connaissent encore une croissance supérieure à 5%. Il faut consolider ces progrès en multipliant
les investissements dans les infrastructures.
Les ministres des Finances du G20 se sont réunis en Allemagne voici quelques jours pour trouver
ensemble des solutions aux principaux défis auxquels l'économie mondiale est confrontée. Ils ont
en particulier évoqué le changement climatique, les flux migratoires et les situations d'urgence
humanitaire, notamment la famine qui frappe ou menace des pays d'Afrique subsaharienne et du
Moyen-Orient.
Je suis sorti de cette réunion conforté par la volonté commune de s'attaquer à des problèmes
cruciaux. J'ai pour ma part indiqué les efforts menés par le Groupe de la Banque mondiale pour
mobiliser une enveloppe d'au moins 1,6 milliard de dollars au profit des pays touchés par la famine,
avec l'objectif d'orienter les fonds vers les populations les plus vulnérables. Cette réunion du G20,
présidée par l'Allemagne, a surtout donné la priorité à la croissance et au développement de
l'Afrique subsaharienne. Outre la famine qui sévit sur une partie du continent, l'Afrique doit être
notre principale préoccupation pour de nombreuses raisons.
Résilience économique
La fin du supercycle des matières premières a frappé de plein fouet la région. En 2016, les pays
exportateurs ont dû ajuster leur politique économique pour faire face à la faiblesse des cours
mondiaux. Le PIB régional par habitant s'est donc contracté de 1,1 % en 2016 et la croissance de
l'Afrique subsaharienne a ralenti à 1,5 %, son plus bas niveau depuis plus de deux décennies. Les
flux de capitaux en direction de l'Afrique, notamment les investissements directs étrangers, ont
aussi diminué tandis que la croissance globale des investissements était quasiment nulle en 2015,
contre une moyenne de 5 % sur la période 2010-2015.
Mais l'Afrique affiche une résilience économique remarquable : 41 % de sa population vit dans des
pays qui enregistrent des taux de croissance supérieurs à 5,5 %. Même si la région continuera de
s'adapter à la baisse des prix des matières premières en 2017, elle devrait connaître une légère
reprise, avec une croissance projetée à 2,9 % et qui se consoliderait à 3,5 % en 2018. La
communauté internationale doit contribuer à créer les conditions propices à une croissance plus
soutenue et à un développement plus durable.
Au mois de décembre dernier, une soixantaine de pays développés et en développement se sont
engagés à verser un montant record de 75 milliards de dollars à l'Association internationale de
développement (IDA), notre fonds pour les pays les plus pauvres. Près de 60 % de ces ressources
seront consacrées à l'Afrique subsaharienne au cours des trois prochaines années, afin de pouvoir
doubler le soutien apporté par l'IDA à cette région.
La priorité : investir dans les infrastructures
Cette aide de l'IDA permettra aux pays africains d'avoir accès à des ressources importantes par le
biais de mécanismes de financement spéciaux, pour appuyer des programmes régionaux et d'aide
aux réfugiés. Le continent devrait notamment bénéficier d'une initiative pour atténuer les risques
et mobiliser les investissements privés, en particulier dans les pays politiquement et
économiquement fragiles.
L'une des priorités consiste en effet à aider les pays africains à investir, en partenariat avec le
secteur privé, dans des infrastructures qui font aujourd'hui cruellement défaut. Les besoins du
continent en la matière sont estimés à 93 milliards de dollars par an, soit environ 15 % de son PIB.
L'Afrique investit à l'heure actuelle 45 milliards de dollars dans les infrastructures, dont plus de la
moitié sont financées par le secteur public. On voit donc que le manque de financements est
immense, alors que l'on sait que les investissements dans l'infrastructure ont un impact
considérable sur la croissance à long terme.
Par ailleurs, le monde développé dispose de milliers de milliards de dollars de capitaux qu'il
cherche à faire fructifier. Les pays en développement offrent d'immenses opportunités
d'investissement pour le secteur privé, notamment dans le secteur des infrastructures, qui joue un
rôle capital pour l'emploi et la croissance. Nous nous efforcerons de combler le grave déficit de
financements dans ce secteur en travaillant main dans la main avec les pouvoirs publics et en
utilisant nos ressources pour atténuer les risques et attirer plus d'investissements privés.
En ces temps incertains, la Banque mondiale va intensifier son appui aux pays d'Afrique
subsaharienne afin de les aider à réformer et à diversifier leur économie pour renouer avec la
croissance. Les dirigeants vont lancer des réformes de troisième et de quatrième génération qui
conduiront à une transformation structurelle de l'Afrique.
Ce sentiment d'urgence animera l'ensemble des activités du Groupe de la Banque mondiale en
Afrique au cours des trois prochaines années. Ensemble, nous pouvons aider les pays africains à
accélérer leur transformation économique et à répondre aux attentes des populations au service
desquelles nous travaillons.
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