Perspectives économiques régionales en Afrique subsaharienne FMI – octobre 2014 Maintenir le cap Les perspectives pour l’Afrique subsaharienne demeurent favorables. Selon les projections, la croissance économique devrait s’accélérer et passer d’environ 5 % en 2013–14 à 5,75 % en 2015. Dans nombre de pays, l’activité continuera à bénéficier de l’impulsion soutenue donnée à la demande par les projets d’infrastructure, de l’expansion des capacités de production (en particulier dans les domaines des activités minières et de la production d’électricité), du dynamisme du secteur des services et/ou d’un rebond de la production agricole. Tous ces facteurs auront un effet positif quand bien même les activités liées au pétrole contribueront moins à la croissance compte tenu du niveau modéré de la demande mondiale. L’Afrique subsaharienne devrait ainsi rester la deuxième région du monde par son dynamisme économique, juste derrière l’Asie émergente et en développement. Traduire ce dynamisme en croissance solidaire demeure le principal enjeu du continent tant les taux de pauvreté et d’inégalités n’ont cessé de croitre dans toute la région. Aléas négatifs Cette croissance vigoureuse reste cependant exposée à trois principaux aléas négatifs. Épidémie de fièvre Ébola et conflictualité Au-delà de ses terribles conséquences sur le plan humain, l’épidémie de fièvre Ébola devrait avoir un effet prononcé sur les économies de la Guinée, du Libéria et de la Sierra Leone. L’épidémie pourrait également avoir des retombées régionales plus marquées qu’on ne le prévoit, en particulier si elle se révèle plus difficile à contenir. La perte de confiance qui en résulterait pourrait avoir de graves conséquences pour l’activité en Afrique subsaharienne, avec un arrêt des échanges commerciaux, une réduction encore plus prononcée des activités de transport, une forte diminution des recettes du tourisme et une révision à la baisse des programmes d’investissement. Dans plusieurs régions de l’Afrique subsaharienne, les conditions de sécurité restent difficiles, notamment en République centrafricaine et au Soudan du Sud, et demeurent précaires dans le Nord du Mali, le Nord du Nigéria et sur le littoral kényan. Si la situation devait encore se dégrader, les retombées régionales pourraient être considérables (par exemple au Cameroun et en Ouganda) et peser sur les échanges commerciaux et les décisions d’investissement, voire conduire à une réorientation des ressources publiques au profit d’une augmentation des dépenses de sécurité. Dynamique de la dette et vulnérabilités budgétaires au niveau domestique La croissance économique masque un affaiblissement des situations budgétaires Les ratios dette du secteur public/PIB sont restés globalement stables (au-dessous de 40 %) au niveau régional depuis la fin de la première décennie 2000, notamment grâce à la vigueur de l’activité économique. Cependant, cette croissance économique masque un affaiblissement des situations budgétaires et une augmentation des ratios d’endettement dans certains pays. Après s’être légèrement améliorée en 2010–12, la situation budgétaire de nombreux pays de la région s’est en effet dégradée en 2013, les déficits atteignant une ampleur qu’on n’avait plus connue depuis 2009. La détérioration des finances publiques a été plus prononcée dans les pays ayant accès aux marchés financiers internationaux et a été visible dès 2012, le ratio médian dette/PIB est passé de 27 % en 2008 à 41 % en 2013. Parmi ces pays, c’est le Ghana qui a enregistré le déficit budgétaire le plus élevé en 2013 (10 % du PIB). Graphique 2 – Dette du secteur publique en Afrique subsaharienne, 2004-2013 Les conditions d’emprunt sont de moins en moins favorables Depuis 2009, dans une conjoncture marquée par l’abondance de la liquidité et la faiblesse des rendements au niveau mondial, l’Afrique subsaharienne a pu avoir accès à davantage de financements extérieurs, en se finançant directement sur les marchés internationaux. Si le passage progressif à des sources de financement davantage intermédiées par les marchés n’est pas problématique en soi, cette tendance comporte des risques. En effet, si les rendements globaux des obligations internationales sont souvent bien inférieurs à ceux des obligations nationales, le coût final dépend de l’évolution du taux de change; et si la stabilité macroéconomique est menacée, la dépréciation monétaire qui s’ensuit peut grandement alourdir le coût ex post de l’emprunt pour le contribuable. Dans un contexte de resserrement de la politique monétaire américaine et d’incertitude sur les dynamiques de croissance dans les pays émergents, ce mode de financement apparait donc plus risqué et couteux. En effet, une hausse soudaine des primes de risque et un regain de volatilité sur les marchés financiers mondiaux — alors que ces deux éléments sont à des niveaux très bas actuellement — pourraient durement affecter les pays tributaires des marchés financiers extérieurs pour leur financement1. Une reprise lente au niveau mondial et des perspectives moins bien orientées pour les pays émergents Le ralentissement de la croissance dans les pays émergents présente aussi un risque durable pour la région. Les prévisions de croissance pour ces pays ont été révisées à la baisse de manière répétée depuis 2010 et il existe un risque que l’accélération attendue pour ces pays ne se concrétise pas. Les pays d’Afrique subsaharienne participant de plus en plus au commerce mondial, ils pâtiraient significativement du fléchissement de la demande d’exportations de produits de base, l’activité dans les secteurs autres n’ayant pas atteint un rythme suffisant pour entretenir la dynamique de croissance actuelle. L’Angola, la République du Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale, le Nigéria et le Tchad seraient particulièrement touchés, dans la mesure où les exportations de pétrole y constituent entre 20 % du PIB et 90 % du PIB. Un nouveau ralentissement des prix des autres produits de base, en particulier le charbon, le cuivre, l’or, le minerai de fer et le platine, toucherait un large éventail de pays de la région (les cours du cuivre, de l’or et du platine devraient reculer d’environ 5 % à 10 %, tandis que ceux du charbon et du fer accuseraient un reflux plus marqué, de 15 % pour le premier et de 35 % pour le second). 1 Afrique du Sud, Angola, Côte d’Ivoire, Ghana, Kenya, Maurice, Nigéria, Ouganda, Rwanda, Sénégal, Tanzanie et Zambie.