T-ES-WG(2016)02_fr
Document de travail
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13 juin 2016
COMITÉ DE LANZAROTE
Groupe de travail sur les tendances en matière
d’exploitation et d’abus sexuels à l’encontre des enfants
..................................
Document de réflexion
Prépapar le Groupe de travail sur les tendances en matre d’exploitation et d’abus sexuels
à l’encontre des enfants du Comité de Lanzarote et le Secrétariat du Comité de Lanzarote
2
DOCUMENT DE RÉFLEXION établi par le
GROUPE DE TRAVAIL SUR LES TENDANCES en matière d’exploitation et d’abus
sexuels à l’encontre des enfants du Comité de Lanzarote
Sommaire
INTRODUCTION ........................................................................................................................................... 3
Mission du groupe de travail .............................................................................................................. 3
Méthodologie ....................................................................................................................................... 3
Définitions ............................................................................................................................................ 3
L’intérêt supérieur de l’enfant ............................................................................................................ 3
Structure du document ....................................................................................................................... 4
I. LES TENDANCES IDENTIFIEES ............................................................................................................... 4
A. Les tendances en matière d’infractions ............................................................................................. 4
1. Contrainte et extorsion sexuelles ..................................................................................................... 4
2. Exploitation sexuelle d’enfants à des fins commerciales ................................................................ 5
3. Violence sexuelle entre pairs ............................................................................................................ 8
B. Les tendances favorisant la commission d’infractions..................................................................... 8
1. Images et contenus sexuels autoproduits par des enfants de leur propre initiative ..................... 8
2. Exploitation et abus sexuels en ligne distance) et en direct concernant des enfants .............. 10
3. Echange de propos sexuels en ligne / « sexting » .......................................................................... 12
4. « Bad hosting » (mauvaises pratiques des services d’hébergement) ............................................ 13
5. Anonymat et cryptage des données / Utilisation du darknet ....................................................... 14
6. Réalité virtuelle .............................................................................................................................. 15
II ACTIONS POUR ASSURER ET RENFORCER LA PROTECTION ............................................................ 17
1. Types de contenus couverts ............................................................................................................ 17
2. Indemnisation des victimes ............................................................................................................ 18
3. Conservation des données .............................................................................................................. 18
4. Extraterritorialité et âge légal pour entretenir des activités sexuelles (âge du consentement
sexuel) ................................................................................................................................................. 18
ANNEXE 1 : RÉSUMÉ SOUS FORME DE TABLEAU............................................................................... 19
ANNEXE 2 : COMPILATION DES PROPOSITIONS D’ACTION .............................................................. 22
3
INTRODUCTION
Mission du groupe de travail
1 Le groupe de travail a été mis en place à la suite de la 11e réunion du Comité de Lanzarote, au cours
de laquelle avait été évoquée la nécessité pour le Comité d’orienter davantage son action
stratégique sur les questions liées à l’utilisation des nouvelles technologies à des fins d’exploitation
et d’abus sexuels (« sexting », « sextorsion », diffusion en direct d’abus sexuels et autres
phénomènes analogues). Le groupe de travail a été chargé d’élaborer un document de réflexion sur
ces tendances, de recenser les failles des systèmes actuels de protection et de dégager les solutions
envisageables.
Méthodologie
2 Le groupe de travail s’est réuni trois fois pour mener à bien ses travaux. Il a dressé la liste des
tendances actuelles et étudié les systèmes de protection qui s’y rapportent. Il a notamment analysé
le cadre juridique concernant chaque tendance, au regard, en particulier, de la Convention de
Lanzarote et de la directive 2011/93/EU de l’UE. Pour chaque tendance, le groupe de travail s’est
demandé si les dispositions législatives et les pratiques en vigueur pouvaient être appliquées,
étendues ou adaptées de manière à couvrir toutes les questions, et si d’autres mécanismes étaient
nécessaires. Il a dégagé en conséquence des propositions d’action à l’adresse du Comité de
Lanzarote. Il peut s’agir de poursuivre des travaux de recherche et de mettre en évidence des
bonnes pratiques, d’introduire des modifications de la législation ou d’adopter des avis, des
observations interprétatives ou un protocole additionnel à la Convention de Lanzarote.
Définitions
3 Ce document présente la définition des diverses tendances observées. La plupart de ces définitions
sont tirées, ou s’inspirent, des Terminology Guidelines for the Protection of Children from Sexual
Exploitation and Sexual Abuse préparées par un groupe de travail interinstitutionnel sur
l’exploitation sexuelle des enfants
1
. Elles figurent ici à des fins d’illustration et pour permettre au
lecteur de se faire une meilleure idée des tendances observées. Leur inclusion ne préjuge pas de la
décision du Comité de Lanzarote de les reprendre ou non à son compte.
L’intérêt supérieur de l’enfant
4 Le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant a guidé les travaux du groupe de travail. Le groupe
préconise une approche axée sur la protection de l’enfant, qui place l’intérêt supérieur de l’enfant
au cœur de toute chose. Il est à cet égard particulièrement conscient du fait que, derrière bon
nombre d’images sexualisées d’enfants qui semblent produites de manière consentie, il y a souvent
un adulte ou un tiers « caché » qui exerce une manipulation. C’est la raison pour laquelle on ne peut
pas systématiquement considérer que le phénomène des matériels autoproduits relève de la liberté
d’expression de l’enfant, en particulier si le matériel est illégal.
1
La rédaction du guide de terminologie a été menée à bien par un groupe interinstitutionnel de travail (GIT) sous la direction de
l’ECPAT. Le Secrétariat du Conseil de l’Europe était représenté au sein de ce groupe de travail, constitué également de
représentants des organes suivants : Child Rights Connect, l’ECPAT (Réseau contre la prostitution enfantine, la pornographie
enfantine et le trafic d’enfants à des fins sexuelles), Europol, INHOPE (Association internationale des services d’assistance par
Internet), l’Institut interaméricain de l’enfant, l’ICMEC (Centre international pour enfants disparus et sexuellement exploités),
l’OIT (Organisation internationale du travail), l’UIT (Union internationale des télécommunications), Interpol, le Haut-
Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, Plan International, Save the Children International, le représentant
spécial du Secrétaire général des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants, le Comité des droits de l’enfant des
Nations Unies, le rapporteur spécial des Nations Unies sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie
mettant en scène des enfants et l’UNICEF. La version en anglais du guide de terminologie sera officiellement lancée le 14 juin
2016 à Genève. La version en français paraîtra quelques semaines plus tard sous le titre Guide de terminologie pour la
protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels. Les passages du guide de terminologie cités dans le présent
document sont ceux de la version anglaise finale non publiée, traduits en français par le Conseil de l’Europe sur la base des
travaux en cours du GIT.
4
Structure du document
5 Le groupe de travail a recensé plusieurs tendances concernant non seulement des actes pénalement
répréhensibles, mais aussi des technologies et des pratiques qui favorisent les activités criminelles.
Ces deux aspects sont exposés dans la première partie.
6 Au vu de ces tendances, le groupe de travail examine dans la deuxième partie les failles importantes
existant dans les cadres juridiques, et propose des mécanismes généraux en vue de renforcer la
protection dans le domaine concerné.
7 Des renvois entre parties qui se recoupent sont effectués chaque fois que nécessaire.
I. LES TENDANCES IDENTIFIEES
8 Dans le contexte de l’exploitation et des abus sexuels concernant des enfants, une tendance peut
être définie comme un processus dynamique conduisant à une évolution d’ordre général ou un
changement d’une pratique donnée.
A. Les tendances en matière d’infractions
1. Contrainte et extorsion sexuelles
2
9 Définition : L’expression « contrainte et extorsion sexuelles », ou « sextorsion », est le fait d’exercer
un chantage sur une personne à partir d’images autoproduites de cette personne dans le but de lui
extorquer des faveurs sexuelles, de l’argent ou d’autres avantages, en la menaçant de partager ce
matériel sans le consentement de la personne qui y est représentée (par exemple, en postant ces
images sur les réseaux sociaux). « Le terme recommandé est extorsion sexuelle sur des enfants. Le
terme familier et fréquemment utilisé de sextorsion demeure l’objet d’un débat dans le domaine
de la protection de l’enfance, dans la mesure il ne montre pas clairement qu’il s’agit d’une
problématique d’exploitation sexuelle à l’encontre d’un enfant et risque donc de banaliser une
pratique pouvant entraîner des conséquences extrêmement graves
3
. »
10 Tendance : Observé de plus en plus fréquemment, le phénomène est celui d’agresseurs prenant
pour cible des jeunes, en particulier via les plateformes de réseaux sociaux ou les sites de rencontre
en ligne, afin d’obtenir le matériel avec lequel ils exerceront une contrainte ou une extorsion.
Lorsque des photos et/ou des vidéos ou tout autre type de matériel sexuellement explicite de la
jeune personne ont é obtenus, la contrainte ou l’extorsion commence. Contrairement à la
pratique de la sollicitation à des fins sexuelles (ou « grooming »), qui peut durer plusieurs mois,
l’exercice d’une emprise et de manipulations se transforme rapidement en un engrenage de
menaces, actes d’intimidation et contraintes lorsque la personne a accepté d’envoyer les premières
images à caractère sexuel sur laquelle elle figure. L’ensemble du processus peut être très rapide une
fois que le contact en ligne a été établi. Dans de nombreux cas l’auteur ne se fonde pas sur une
relation établie par la confiance mais fait des tentatives au hasard jusqu’à ce qu’il trouve un enfant
qui accepte immédiatement. Dans certains cas, la contrainte et l’extorsion sexuelles ne sont pas
motivées par des raisons sexuelles et sont pratiqués à des fins uniquement commerciales. La
contrainte et l’extorsion sexuelles s’accompagnent souvent d’abus sexuels à distance et en direct.
2
Voir également la partie I.A.2 sur l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales.
3
Groupe interinstitutionnel de travail sur l’exploitation sexuelle des enfants (GIT), Terminology Guidelines for the Protection of
Children from Sexual Exploitation and Sexual Abuse (version finale non corrigée, 2016), p. 71.
5
11 Situation juridique (définition) : Bien que le terme « sextorsion » soit couramment utilisé, le groupe
de travail pense que l’expression « extorsion sexuelle » est préférable, en particulier parce que dans
la plupart des Etats l’extorsion est déjà définie comme une infraction pénale.
12 Toutefois, le fait que certaines législations associent obligatoirement la notion d’« extorsion » à
l’appropriation d’argent ou de biens par l’usage de la violence ou de menaces, alors que l’objectif de
l’extorsion sexuelle peut être d’obtenir de nouveaux contenus à caractère sexuel, ou des faveurs
sexuelles, peut laisser subsister une confusion. Le groupe de travail considère par conséquent que
l’expression « contrainte et extorsion sexuelles » exprime clairement le fait que le phénomène
comprend l’extorsion d’argent et de biens, mais aussi l’obtention d’autres avantages.
13 Lacune 1 : La Convention de Lanzarote utilise le terme de « contrainte » (article 18(1)(b)) mais pas
celui d« extorsion».
14 Proposition d’action : Promouvoir les définitions préconisées par les experts ainsi que l’utilisation
d’expressions telles que « contrainte et extorsion sexuelles », au lieu de « sextorsion ». Le groupe de
travail considère qu’il pourrait être pertinent de compléter la Convention de Lanzarote et
recommande au Comité de Lanzarote d’adopter un avis sur cette question.
15 Lacune 2 : Il existe un certain nombre de points flous dans ce domaine, qu’il conviendrait de
dissiper :
Seul un petit nombre de dispositions de la Convention de Lanzarote et de la directive
2011/93/EU de l’UE font référence explicitement aux technologies de l’information et de la
communication (TIC). On pourrait en déduire que les dispositions ne mentionnant pas
spécifiquement les TIC ne s’appliquent pas dans les cas celles-ci sont utilisées.
Il pourrait être utile, par exemple, d’établir clairement si « le fait de se livrer à des activités
sexuelles avec un enfant » (article 18 de la Convention de Lanzarote) peut être interprété
comme s’appliquant également aux cas d’abus sexuels qui interviennent en totalité dans un
environnement en ligne.
L’article 20(1)(f) de la Convention de Lanzarote, qui porte sur le fait d’accéder, en connaissance
de cause et par le biais des technologies de communication et d’information, à de la
pornographie enfantine, couvre l’action de « regarder à distance ».
16 Proposition d’action : Le Comité aurait à décider si une interprétation restrictive de la Convention
de Lanzarote doit prévaloir en ce qui concerne son application aux TIC, ou si la Convention peut être
interprétée de manière à inclure l’usage de ces technologies. La mise en œuvre de la deuxième
solution pourrait se faire par le biais de l’adoption d’un avis préconisant que les abus sexuels sur des
enfants commis à distance et en direct entrent dans le cadre de l’article 18 (abus sexuels).
2. Exploitation sexuelle d’enfants à des fins commerciales
17 Définition : « [F]orme d’exploitation sexuelle se focalisant en particulier sur l’avantage pécuniaire
qu’elle génère et serait souvent liée à la criminalité organisée, le gain économique est le principal
moteur
4
. » La diffusion en direct sur internet d’abus sexuels est souvent pratiquée à des fins
commerciales et implique l’utilisation de services de transfert d’argent en ligne.
4
Ibid. p. 42.
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