Coqueluche

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Item n° 78 : Coqueluche
OBJECTIFS TERMINAUX
I. Diagnostiquer une coqueluche
II. Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient
Introduction
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Maladie bactérienne aiguë à Bordetella pertussis (bacille de Bordet et Gengou), bacille à Gram négatif, et B. parapertussis, cause plus rare (5 %) de
coqueluches plus bénignes.
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Réservoir humain (enfants en cas de faible couverture vaccinale, jeunes enfants, adultes et sujets âgés dans les pays avec vaccination obligatoire).
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Transmission interhumaine aérienne
-- contagiosité importante par la toux, essentiellement lors de la phase catarrhale (taux d'attaque 70-80 % si contact proche)
-- mais pouvant se prolonger pendant 3 semaines.
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Maladie = toxi-infection
-- multiplication bactérienne sur l'épithélium cilié respiratoire trachéo-bronchique
-- sécrétion de plusieurs toxines spécifiques entrainant la nécrose de la muqueuse respiratoire
• toxine pertussique (PT ou HSF, LPF, IAP)
.. augmentant la concentration intracellulaire d'AMP cyclique
.. provoquant l'hyperlymphocytose (lymphocytes T)
• adénylcyclase exocellulaire
.. activité hémolytique
.. diminue les fonctions phagocytaires
• hémagglutinines dont l'hémagglutinine filamenteuse (FHA)
.. impliquées dans l'attachement à l'épithélium.
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Immunité naturelle non définitive (même si supérieure à 10 ans).
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Pas de protection immunitaire materno-fœtale.
I
Diagnostiquer une coqueluche
1. Clinique
1-1. Forme classique de l’enfant
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Incubation : 7-10 jours.
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Période d’invasion ou catarrhale non spécifique (7-15 j) :
-- rhinite, éternuements, fébricule
-- toux devenant progressivement spasmodique, émétisante, à prédominance nocturne, rebelle aux antitussifs.
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Période paroxystique des quintes (4-6 semaines) :
-- organisation de la toux sur un mode de quintes paroxystiques :
• série de secousses (paroxysmes) de toux, produites au cours d'une même expiration, interdisant l’inspiration jusqu'à la survenue d'une
reprise inspiratoire longue, bruyante : le «chant du coq»
• quinte composée de 3 à 5 (voire 10 à 15) paroxysmes, jusqu'à apparition de l'expectoration terminale : mucosités adhérentes, transparentes
et blanchâtres, souvent remplacée par un vomissement (toux émétisante)
• fréquence des quintes augmentant progressivement jusqu'à 10 ou 20 par jour mais pouvant atteindre 60 ou 80 par jour dans les formes
sévères.
-- volontiers nocturnes, déclenchées par des stimuli, et suivies de vomissements
-- signes d’accompagnement des quintes : visage de l'enfant cyanosé, bouffi, avec une dilatation des veines de la face et du cou, voire un purpura
pétéchial dans les régions orbitaires
-- examen normal en dehors des quintes – pas de fièvre.
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Période de déclin et convalescence (plusieurs semaines) :
-- réduction de fréquence et d'intensité des quintes, et reprise de poids
-- toux quinteuse résiduelle possible (tic coqueluchoïde) pouvant durer plusieurs mois après la période paroxystique.
1-2. Forme du nourrisson ƒƒ
50 % des coqueluches avant l’âge d’un an (pas d’immunité maternofœtale passive).
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Nouveau-né et nourrisson non ou incomplètement vaccinés : très réceptifs à une contamination.
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Item 78
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Gravité (létalité : 2 à 3 %) en raison des complications (vers la 3e semaine) :
-- quintes asphyxiantes : apnées prolongées avec cyanose, convulsions anoxiques et risque de mort en l'absence de stimulation respiratoire immédiate et énergique
-- apnées syncopales
-- complications respiratoires : encombrement, atélectasie, surinfection, hypoventilation d’origine centrale
-- complications nutritionnelles : vomissements et refus alimentaire, avec dénutrition, risque d’hypoglycémie et d’hypocalcémie.
1-3. Forme de l’adulte et du vieillard
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Forme atypique sans reprise inspiratoire : banale bronchite traînante ou toux spasmodique.
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Toute toux prolongée de l’adulte doit faire rechercher une coqueluche.
1-4. Complications
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Mécaniques :
-- ulcération du frein de la langue, hémorragies sous-conjonctivales
-- rarement : hernies, emphysème médiastinal et cervical, pneumothorax ou prolapsus rectal.
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Infectieuses :
-- otite suppurée, surinfection bronchopulmonaire, pneumonie de déglutition, atélectasie avec surinfection, bronchopneumonie, pleurésie.
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Neurologiques :
-- surtout chez les jeunes enfants : convulsions (2,7 %), séquelles neurologiques secondaires à l’anoxie cérébrale (0,7 %).
2. Examens complémentaires
2-1. Non spécifiques
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Hyperleucocytose entre 15 000 et 20 000/mm3 (jusqu’à 50 000/mm3) avec forte lymphocytose (60-90 %).
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Pas de syndrome inflammatoire (maladie toxinique).
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Thrombocytose fréquente chez le nourrisson.
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Radiographie thoracique : opacités péribronchiques périhilaires, parfois atélectasie ou emphysème.
2-2. Spécifiques
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Identification de B. pertussis :
-- recueil de mucus au cours d’une quinte ou idéalement des sécrétions nasopharyngées par aspiration nasale
-- surtout à la phase catarrhale et dans les formes atténuées de la coqueluche
-- identification par culture sur milieu spécifique de Bordet-Gengou
• délai de réponse : 4 jours
• le plus spécifique
• sensibilité :
.. 60 % à la période catarrhale
.. 30 % à la période des quintes
.. < 10 % après 15 jours d’évolution
-- ou par PCR (résultat plus rapide et plus sensible que la culture, avec une très bonne spécificité).
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Sérologie (immuno-empreinte, ELISA) :
-- dosage séparé des anticorps sériques anti-toxine pertussique (anti-PT)
-- diagnostic retenu si séroconversion ou ascension significative des anticorps
-- non interprétable en cas de vaccination récente (< 1an)
-- peu performante chez le nourrisson
-- intérêt dans les formes atypiques et d’évolution prolongée.
3. Diagnostic différentiel
3-1. Syndrome coquelucheux
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Infections à Bordetella bronchiseptica ou à adénovirus.
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Pneumopathies à C. trachomatis (nouveau-né),
3-2. Toux persistante
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Chez le jeune enfant : corps étranger trachéobronchique, allergie respiratoire, laryngotrachéite infectieuse, tuberculose, mucoviscidose.
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Chez l’adulte : cause infectieuse, tumorale, allergique, médicamenteuse (IEC…), reflux gastro-œsophagien, toux psychogène.
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II
Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient
1. Attitude thérapeutique et suivi du patient
1-1. Hospitalisation
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Systématique en milieu spécialisé pour les nourrissons de moins de 3 mois ; à discuter au-delà en fonction de la tolérance clinique.
1-2. Isolement
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Nécessaire (à l’hôpital/à domicile), en chambre individuelle, avec absence de contact avec les nourrissons non ou insuffisamment protégés.
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Pendant la phase de contagion (3 semaines sans traitement, 5 jours si traitement antibiotique adapté).
1-3. Antibiothérapie
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Réduit le portage et la période de contagiosité
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Permet d’écourter la symptomatologie si administré précocement, inefficace sur l’évolution des symptômes après le début des quintes.
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Recommandé = érythromycine 50 mg/kg/j (enfant) ou 2-3 g/j (adulte) pendant 14 jours.
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Alternative = josamycine, voire clarithromycine ou azithromycine, ou cotrimoxazole en cas de contre-indication aux macrolides.
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En cas de surinfection respiratoire : antibiothérapie adaptée.
1-4. Mesures associées
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Assurer la liberté des voies aériennes par une kinésithérapie de drainage avec aspiration des sécrétions.
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Oxygénothérapie si besoin.
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Veiller au bon état d’hydratation et de nutrition par un apport alimentaire suffisant, fractionné avec, si besoin, une alimentation entérale continue par
sonde nasogastrique chez le petit nourrisson.
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Corticothérapie uniquement dans les formes graves.
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Inefficacité (voire contre-indication) des antitussifs.
1-5. Mesures pour l’entourage/la collectivité
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Éviction des cas confirmés ou suspects, ou des membres symptomatiques de la famille d’un cas confirmé, pendant 5 jours si prise d’une antibiothérapie efficace sur B. pertussis.
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Pas d’éviction pour les sujets contacts asymptomatiques.
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Notification des cas groupés (plus de 2) survenant dans les collectivités (écoles, internats, crèches) au médecin inspecteur de santé publique du
département.
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Antibioprophylaxie :
-- à prescrire au plus tard avant le 14e jour à partir du premier contact, voire jusqu’au 21e jour en milieu familial
-- au sein de la famille, systématique pour tous les membres de la famille, quels que soient leur âge et leur statut vaccinal
-- dans les crèches, internats et collectivités d’enfants handicapés, systématique pour les enfants n'ayant pas reçu les 4 injections de vaccin et pour
le personnel en contact avec les cas, quel que soit leur statut vaccinal
-- traitement identique au traitement curatif mais durée raccourcie (10 jours).
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Mise à jour du calendrier vaccinal chez les sujets contacts, en particulier dans la famille et dans les collectivités.
2. Vaccination
2-1. Vaccins acellulaires
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Antigènes immunisants (toxine pertussique, hémagglutinine filamenteuse). ƒƒ
Éventuellement agglutinogènes et antigène protéique de la membrane externe.
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Commercialisés sous forme tétravalente (DTPCa), pentavalente (DTPCaHib) ou hexavalente (DTCaPHibHVB).
2-2. Indications de la vaccination
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Première injection du calendrier vaccinal à 2 mois (habituellement associée aux vaccins DTpolio inactivé; Haemophilus, hépatite B (vaccin hexavalent).
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3 injections IM à 4 semaines d’intervalle.
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Rappel à 16-18 mois, rappel recommandé entre l’âge de 11 et 13 ans en même temps que le troisième rappel diphtérie, tétanos et polio (Tétravac® ou
Infanrix Polio®).
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Rappel tardif de l’adulte, associé avec diphtérie, tétanos, poliomyélite.
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Vaccin contre-indiqué en présence d’une encéphalopathie évolutive mais pas en présence d’une maladie neurologique «stable».
2-3. Tolérance de la vaccination
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Chez le nourrisson, prescription d’antipyrétique systématique dans les 24 à 48 heures qui suivent l’injection de vaccin.
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