La construction europ_enne

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Module 3 La mondialisation économique et financière
Partie 3. L’intégration européenne
Chapitre 1. La dynamique de la construction européenne
1. Du plan Marshall à l’eurosclérose des années 1980
1.1 La période de l’après seconde guerre mondiale
1.1.1 Une Europe fragmentée économiquement et politiquement
Document 1 : trois obstacles économiques
Ensuite, les économies de l’Europe occidentale sont beaucoup plus fermées au commerce international intrarégional européen, suite aux conséquences de la guerre.
A la fin des années 1940, le premier obstacle à l’intégration européenne est constitué par l’état des infrastructures
de transport et de communication en Europe qui ont subi un niveau élevé de destruction à la fin de la Seconde
Guerre mondiale. Il n’y a plus de ligne téléphonique et de système national de chemins de fer en Allemagne, plus
de cent gares et 70% des locomotives sont hors d’usage en France comme un tiers des capacités ferroviaires
italiennes. Leur reconstruction sera rapide, mais la faiblesse des infrastructures européennes de transports constitue
encore un obstacle physique au commerce intra-européen (…).
Le deuxième obstacle est d’ordre commercial. Les tarifs douaniers restent extrêmement élevés et supérieurs à 40%
en moyenne au sein des grandes économies européennes. Il existe de nombreux systèmes de quotas (…). Les
industries nationalisées, plus nombreuses qu’avant-guerre, se retrouvent dans des situations de monopoles ou
d’oligopoles nationaux, complètement protégées de la concurrence étrangère. Dans certains secteurs clefs comme
l’énergie, l’Etat met en place des systèmes de subventions et de contrôle des prix qui rendent impossible la
concurrence étrangère. Derrière ces barrières protectionnistes, on assiste à la recréation des cartels d’avant-guerre
dans une série de secteurs de l’industrie lourde comme l’acier ou la chimie.
Le troisième obstacle est d’ordre monétaire. Les économies européennes ne disposent plus de réserves de devises
étrangères en suffisance et sont obligées de contingenter leurs importations en se concentrant sur les produits
indispensables à leur reconstruction. Les gouvernements adoptent alors ce que Milward nomme des politiques néomercantiliste où l’on encourage la substitution des importations par le recours à la production nationale pour éviter
les sorties de devises étrangères. Ainsi les firmes allemandes situées dans la Ruhr remplacent leurs fournisseurs
néerlandais par des entreprises de Hambourg.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.66
Document 2 : un obstacle politique, le rideau de fer (discours de Churchill, 5 mars 1946)
L’Europe de la fin des années 1940 (…) est divisée en deux zones d’influence selon les découpages négociés à
Yalta entre Churchill, Roosevelt et Staline. Le « bloc soviétique » s’oriente progressivement vers une plus grande
autarcie économique avec des économies étatisées ne participant plus que marginalement au commerce
international avec les économies capitalistes. (…)
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.66
Document 3 : un second obstacle politique, la question de la place de l’Allemagne en Europe
Un obstacle majeur à l’intégration économique en Europe est d’ordre politique. Depuis son intégration et son
industrialisation à la fin du 19ième siècle, l’économie allemande est devenue le pivot de l’économie continentale
européenne. (…) Dès l’après-guerre, les dirigeants politiques et économiques du Bénélux et des pays scandinaves
sont conscients de l’importance de leur partenariat commercial avec l’Allemagne en matière de débouchés
commerciaux et d’importations de certains produits technologiques allemands. (…) Cependant l’occupation
militaire de l’Allemagne (…) remet en question l’insertion de l’économie allemande en Europe occidentale (…).
Au sein de l’administration Roosevelt, certains sont convaincus qu’il faut durablement affaiblir l’Allemagne pour
empêcher définitivement la réémergence d’un projet d’hégémonie allemande sur l’Europe. (…) A l’instar de la
stratégie française établie à Versailles en 1919, le gouvernement français envisage de remplacer l’Allemagne
comme première puissance économique de l’Europe continentale *. (…)
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Aucune avancée significative en matière d’intégration européenne n’émerge dans le chaos économique de
l’immédiat après-guerre, chaos renforcé par les rivalités des politiques économiques nationalistes des grandes
économies européennes et par les intérêts protectionnistes de certaines industries nationales. en 1947, l’Allemagne
continue d’être isolée politiquement et économiquement alors que l’Europe occidentale est encore morcelée par le
protectionnisme et reste très fragile sur le plan économique.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.66
* certains hommes politiques défendent l’idée d’une pastoralisation de l’économie allemande, c’est-à-dire la
suppression de l’industrie et le développement d’une économie agricole.
1.1.2 Le changement de politique des Etats-Unis et la doctrine Truman
Document 5 : la sécurité des Etats-Unis passe par le redressement économique de l’Europe
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les initiatives américaines à l’égard de l’Europe en général et de
l’Allemagne en particulier furent relativement décousues et confuses. Balançant entre la volonté de « punir » la
puissance vaincue tout en souhaitant faciliter le relèvement économique des pays européens pour mieux se dégager,
l’administration américaine manquait d’un « Grand dessein ». C’est seulement au cours de l’hiver 1946-1947,
parallèlement à la victoire électorale de l’opposition républicaine au Congrès, que le président démocrate Harry
Truman précisera ses options. Jugeant avoir sous-estimé l’état de désorganisation économique de l’Europe, les
risques de déstabilisation politique et l’extrême faiblesse de la Grande Bretagne, son administration définira ce qui
est resté sous le nom de « doctrine Truman ». L’essentiel tient dans la (…) priorité accordée à l’Europe
occidentale et à son redressement économique comme condition de la sécurité américaine. L’instrument privilégié
en est un vaste programme d’aide économique annoncé officiellement le 7 juin 1947 par le secrétaire d’Etat
G.Marshall.
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010, p.10
Document 6 : amélioration du niveau de vie et endiguement du communisme
A partir de la fin de 1946, certains officiels américains se rendent compte de la détérioration du niveau de vie en
Allemagne de l’Ouest et de ses effets déstabilisateurs sur le plan social et politique, situation qui pourrait favoriser
le renforcement de l’influence communiste. Le général Clay, le gouverneur militaire qui dirige les troupes
américaines d’occupation résume ce dilemme :
« On ne choisit pas entre devenir communiste à 1500 calories et devenir démocrate convaincu à 1000 calories. Je
crois sincèrement que notre niveau de rationnement en Allemagne anéantira non seulement nos objectifs en Europe
centrale, mais pavera le chemin vers une Europe communiste ». C’est en réponse à ces évènements que la majorité
des cercles dirigeants aux Etats-Unis optent en faveur d’une stratégie pour contrer activement le communisme et
l’influence de l’URSS. (…) Le gouvernement américain adopte au milieu de l’année 1947 la doctrine Truman et la
politique dite « d’endiguement » du communisme. (…) La doctrine Truman considère explicitement la politique
économique comme primordiale dans la stratégie d’endiguement :
« Je crois que notre aide doit être essentiellement économique et financière, essentielle à la stabilité économique et
à l’ordre politique ». Effectivement, l’aide économique constituera l’outil principal des Etats-Unis pour contrer
l’influence de l’URSS en Europe occidentale.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.70
Document 7 : le plan Marshall
Les transferts financiers effectués dans le cadre du plan Marshall sont considérables puisqu’ils s’élèvent à 13
milliards de dollars en cinq ans. A cette somme, il convient d’ajouter 9,5 milliards supplémentaires qui seront
déboursés dans le cadre d’autres programmes de coopération transatlantique entre 1947 et 1952. (…) Cela constitue
sur cinq ans 8,5% du PIB américain et 13,2% du PIB des pays bénéficiaires. (…)
Sur le plan de la conjoncture économique, le plan Marshall constitue une politique de relance keynésienne pour
faciliter la transition d’une croissance de l’économie tirée par la demande de guerre de l’Etat à une croissance
moins soutenue. (…)
Dans la stratégie de Truman, l’aide financière américaine destinée à l’Europe vise trois objectifs.
Il y a tout d’abord un but de propagande idéologique à court terme. (…) Ensuite, le gouvernement américain
considère qu’il est absolument indispensable de renforcer les capacités industrielles des économies de l’Europe
occidentale pour que ces pays soient capables de produire suffisamment de matériels militaires en cas
d’affrontement avec l’URSS. (…) Mais l’aide américaine est également conçue comme un moyen de créer un
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modèle de croissance économique qui constituerait un facteur de stabilisation politique à moyen terme pour toute
l’Europe occidentale et qui garantirait le maintien d’un fort lien transatlantique. Les Etats-Unis sont convaincus de
la nécessité d’éviter le protectionnisme et l’instabilité monétaire de l’entre-deux-guerres qui sont perçus comme des
causes majeures de la Seconde guerre mondiale.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.70
Document 8 : la création de l’OECE pour gérer les fonds du plan Marshall
L’idée du Plan Marshall accélère le rythme de la reprise en Europe de l’Ouest. Pendant sept ans, de 1947 à 1954, le
programme va allouer treize milliards de dollars aux 16 pays qui y participent, soit 29 dollars par habitants en
Allemagne de l’Ouest, 33 en Italie, 72 en France, 77 en Angleterre, 104 en Autriche. Les Américains ont insisté
pour que cette aide soit gérée par une agence internationale, l’Organisation pour la coopération économique
européenne (OECE), qui vise à encourager une planification rationnelle à l’échelle du continent, dans le cadre de ce
marché mondial ouvert que les responsables américains appellent de leurs vœux. Leur objectif immédiat est de
faire redémarrer rapidement la croissance économique, car ils sont convaincus que la pauvreté fait le lit de la
révolution et du communisme. (…) Soucieux d’efficacité et désireux d’empêcher un retour aux frileux
nationalismes économiques des années 1930, les Etats-Unis exigent que les fonds de l’aide Marshall ne soient pas
directement versés aux différents pays bénéficiaires mais soient répartis par une organisation multinationale
intégrée, l’OECE. L’OECE a toutefois un rôle purement consultatif et elle n’est pas habilitée à intervenir dans la
politique des pays membres.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.448
Document 9 : les enjeux de la création de l’OECE (stimuler l’intégration économique européenne)
L'organisation européenne qui a ainsi été créée était une structure permanente de coopération économique qui
devait fonctionner selon les principes suivants :
- promouvoir la coopération entre les pays participants et les programmes nationaux de production pour
hâter la reconstruction de l'Europe ;
- intensifier les échanges intra-européens en abaissant les droits de douane et autres obstacles au
développement des échanges ;
- étudier la possibilité de créer une union douanière ou une zone de libre-échange
- étudier la possibilité d'une multilatéralisation des paiements ;
- instaurer les conditions propres à permettre une meilleure utilisation de la main-d'œuvre ;
Initialement, l'OECE comptait 18 participants : Autriche, Belgique, Danemark, France, Grèce, Irlande, Islande,
Italie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède, Suisse, Turquie, Allemagne occidentale
(initialement représentée par les zones d'occupation anglaise et américaine réunies -- la Bizone -- et la zone
d'occupation française). La zone anglo-américaine du Territoire libre de Trieste a également participé à l'OECE
jusqu'à ce qu'elle passe de nouveau sous la souveraineté de l'Italie.
Source : site de l’OCDE
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En rassemblant initialement les pays démocratiques européens dotés d'une économie de marché, l'OECE constitue
une première étape importante sur la voie de l'unification européenne. Elle demeure toutefois un organe de
coopération intergouvernementale.
Source : http://www.cvce.eu/education/unit-content/
1.1.3 Influence des mouvements politiques pro-européens et premiers échecs
1.1.3.1 L’idée européenne dans l’histoire
Document 11 : l’idée européenne au cours de l’histoire
Le sentiment d’une identité européenne continentale remonte à la chrétienté latine. Après la naissance des Etatsnations européens modernes et les guerres à répétition qui les ont opposés, l’idée d’une entente européenne
commence à voir le jour au 18ième siècle. A la fin du règne de Louis XIV, l’abbé Saint Pierre propose la création
d’une fédération européenne et d’un conseil d’arbitrage ; en 1815, le Tsar Alexandre 1ier plaide pour une alliance
sacrée, et en 1930, les français Herriot et Briand proposent de constituer les Etats-Unis d’Europe. A la fin de la
première guerre mondiale, des hommes d’affaires suggèrent d’organiser l’économie européenne de telle sorte
qu’elle puisse résister à la concurrence américaine. Des utopistes comme Saint Simon, aux internationalistes, la
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gauche européenne compte sur la révolution pour remplacer les dynasties guerrières et les monopoles par un monde
de travailleurs unis. En réalité, l’union se fera plutôt par la conquête militaire. Les guerres révolutionnaires,
prolongées par Napoléon créent un premier ensemble européen sous le contrôle des conquérants. Au siècle suivant,
Hitler reprendra ce thème de l’Europe unie contre le bolchévisme et celui de la sphère économique européenne
pour contrer l’URSS et les anglo-américains.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.509
Document 12 : l’idée européenne après 1945
Le démantèlement des empires européens semble annoncer le déclin des principales puissances d’Europe de
l’Ouest. Pourtant cette impression est contredite au même moment par un mouvement en faveur de l’unité
européenne qui offre aux nations du continent une nouvelle opportunité de puissance indépendante. Ce mouvement
a deux motivations. La première est la hantise de nouvelles rivalités nationales menant droit à la guerre. La
deuxième est la conscience de leur faiblesse relative dans un monde dominé par les deux grands. La solution est la
création d’une entité plus large, l’Europe unie, capable de rivaliser avec les superpuissances. Les deux voies vont
être suivies en parallèle.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.509
Document 13 : les architectes de la nouvelle Europe
En 1945, l’unification européenne est à nouveau d’actualité et paraît soudain réalisable. L’ampleur des destructions
est telle que tout devient possible. Les mouvements de résistance issus de la gauche mettent leur espoir dans une
« fédération européenne, démocratique ouverte à tous les peuples européens, y compris l’Angleterre et l’URSS ».
En Allemagne, les conservateurs antihitlériens (…) préconisent plutôt une « Europe unifiée fondée sur la chrétienté
et la suprématie allemande et qui vise à barrer la route au bolchevisme ». Une troisième voie, que préconisent des
fonctionnaires et des hommes d’affaires éclairés comme Jean Monnet est celle d’un marché européen unifié.
Monnet est convaincu que les pays européens n’ont plus à eux seuls la capacité d’engendrer du progrès
économique, technologique et social. Dès lors, son objectif est de mettre sur pied une économie européenne unifiée
à l’échelle des Etats-Unis.
Parmi les architectes de la nouvelle Europe, beaucoup viennent de la Rhénanie catholique, cette région frontalière
qui a vue les Français et les Allemands s’entretuer pendant des siècles. Du côté français, Robert Schuman ministre
des affaires étrangères de tous les gouvernements entre 1948 et 1953 est précisément issu de l’une de ces familles
frontalières qui n’ont que trop souvent connu les horreurs de la guerre. Pendant la première guerre mondiale, il a
été mobilisé dans l’armée allemande. (…) En 1945, il participe à la création du MRP, le parti chrétien démocrate
français. Du côté allemand, la figure la plus marquante est celle de Konrad Adenauer, le maire catholique de
Cologne dans les années 1920. (…) Sous le régime nazi, il est destitué de ses fonctions et interné à plusieurs
reprises. A la tête du parti social-démocrate, il devient en 1949 le premier chancelier de la République fédérale
d’Allemagne. Il est alors prêt à écouter les propositions de R.Schuman, tout comme son homologue italien,
chrétien-démocrate lui aussi, Alcide De Gasperi.
Ces architectes chrétiens-démocrates de l’unification européenne sont bientôt rejoints par quelques socialistes
anticommunistes baignés de tradition internationaliste et qui redoutent une expansion soviétique, comme le belge
Paul-Henri Spaak, élu premier ministre en 1947. (…) Spaak sera le premier président de l’OECE.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.509
Document 14 : à propos de l’émergence du mouvement pro-européen après guerre
http://www.cvce.eu/education/unit-content/-/unit/7b137b71-6010-4621-83b4-b0ca06a6b2cb
W.Chruchill « Europe can only be united » (attention, Churchill n’est pas un fédéraliste mais un unioniste !)
1.1.3.2 Un Conseil de l’Europe sans pouvoir
Document 15 : le Conseil de l’Europe
Il existe bien des velléités en faveur d’une intégration européenne et même d’une Europe fédérale. Le congrès de
l’Europe à La Haye en 1948 réunit 750 personnalités politiques en faveur d’une plus grande Union européenne,
certains envisagent une solution fédérale, d’autres une intégration européenne ou unioniste (intergouvernementale).
Cela débouche sur la création du Conseil de l’Europe en 1949, mais ce dernier n’est qu’un lieu de discussion sans
décision liante qui ne dispose pas des outils nécessaires pour résoudre le problème de la fragmentation économique
de l’Europe occidentale.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.66
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Document 16 : le fonctionnement du Conseil de l’Europe
Le traité de Strasbourg du 5 mai 1949, définissant le statut du Conseil de l’Europe, a été signé par dix pays :
Belgique, Danemark, France, Irlande, Italie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède. Il précise,
dans son article Ier, que le but du Conseil est de :
« Réaliser une union plus étroite entre ses membres afin de sauvegarder et de promouvoir les idées et les principes
qui sont leur patrimoine commun et de favoriser leur progrès économique et social ».
L’« union plus étroite » n’est donc pas l’objectif final du statut, mais le moyen de préserver et développer un
patrimoine commun au coeur duquel se situent les principes auxquels les Etats membres doivent souscrire : liberté
individuelle, liberté politique et prééminence du droit. (…)
La Convention européenne des droits de l’homme de 1950 est une des clés de voûte du système. Les nombreux
arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme ont permis de faire évoluer les législations nationales. (…) Aux
droits civils et politiques garantis par la Convention, la Charte sociale européenne (1961) apporte un complément
avec la garantie des droits économiques et sociaux.
L’organe exécutif du Conseil, le Comité des ministres, est un organe intergouvernemental de type classique, dans
lequel les décisions sur les questions de fond se prennent à l’unanimité.
L’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe (dont la dénomination actuelle - Assemblée parlementaire du
Conseil de l’Europe - a été adoptée le 3 juillet 1974) fut le premier forum international réunissant des
parlementaires nationaux et non pas des représentants des gouvernements. Elle comprend, pour la France, des
députés et sénateurs. Les membres de l’Assemblée parlementaire peuvent émettre des avis, à la demande du
Comité des ministres, ou des recommandations à son intention qui n’ont pas de valeur contraignante.
Source : https://www.monde-diplomatique.fr/cahier/europe/conseileurope
Document 17 : Un Conseil de l’Europe sans pouvoir
La création du Conseil de l’Europe à Strasbourg en mai 1949 représente la première tentative de mise en place
d’institutions politiques communes. Dans les cercles qui militent pour l’intégration, le Conseil de l’Europe est
considéré comme le futur bras législatif des Etats-Unis d’Europe. Mais tout au long des années 1950 et 1960, les
gouvernements britanniques s’opposeront à ce que les organisations auxquelles ils appartiennent acquièrent des
compétences supranationales indépendantes. Le gouvernement travailliste, qui dirige la Grande-Bretagne de 1945 à
1951, tout comme les gouvernements socialistes scandinaves se méfient d’un mouvement d’intégration dominé par
les catholiques et les technocrates. (…) Contrairement à ce qu’avait espéré le belge Spaak, le Conseil de l’Europe
ne sera pas le fer de lance de l’intégration politique. (…) L’élaboration de la Convention européenne des droits de
l’homme et la mise sur pied de la Cour européenne des droits de l’homme en 1950 constitue sa principale réussite.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.509
Document 18 : deux organismes « européens » de coopération
OECE
Conseil de l’Europe
Intégration intergouvernementale ou
fédérale ?
Domaines concernés
1.1.3.3 L’échec de l’OECE
Document 19 : l’OECE, un outil à visée fédéraliste promu par les américains
L’espoir de l’administration Truman fut en effet d’utiliser le plan Marshall comme moyen de faciliter un processus
d’intégration entre les pays d’Europe occidentale. L’OECE (qui regroupe 16 Etats), chargée de répartir l’aide
américaine, mais installée également comme organisation permanente de coordination des politiques économiques
nationales, devait servir d’embryon.
Or, si cet organisme s’acquitta de sa tâche ponctuelle, il ne fit guère plus : la Grande-Bretagne, hostile à la
libéralisation des échanges parce que soucieuse de défendre « la préférence impériale », refusa de le doter de
pouvoir réel. Contrairement aux souhaits américains, les britanniques bloquèrent donc toute tentative de
transformation du plan Marshall en instrument d’une quelconque « fédéralisation » européenne.
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010, p.10
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Document 20 : le poids des intérêts nationaux empêche le développement de l’OECE
Les Etats-Unis semblent considérer que l’OECE pourrait devenir un véhicule pour lancer la construction d’une
Europe fédérale. Cependant, ni la France, ni la Grande Bretagne ne permettent à l’OECE d’obtenir des décisions
contraignantes pour ses Etats membres. (…)
L’OECE et le Conseil de l’Europe deviennent des organes symboliques sans pouvoir réel et sont délaissés après
quelques mois par les dirigeants politiques, même par les plus fédéralistes. Les pays vaincus respectent leurs avis
économiques, mais la France n’en tient aucun compte. La Grande-Bretagne aidée des pays scandinaves ne cesse de
torpiller cette nouvelle institution. En 1958, le gouvernement de De Gaulle sape le reste de l’influence dont dispose
l’OECE dans les domaines à la fois commercial et monétaire.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.66
1.1.3.4 L’échec de la Communauté européenne de défense
Document 21 : le rejet de la Communauté Européenne de Défense (CED)
Le déclenchement de la guerre de Corée (25 juin 1950) déplaça brusquement les perspectives d’intégration
européenne vers le domaine militaire. L’Europe occidentale apparut vulnérable à une éventuelle offensive
soviétique et les Américains pressèrent leurs alliés d’envisager une contribution allemande à la défense commune.
Inspiré et préparé par Jean Monnet, le plan annoncé par le président du Conseil René Pleven tentait de donner
satisfaction aux Américains tout en évitant la renaissance du militarisme allemand. Il consistait à intégrer les forces
militaires européennes (notamment allemande) sous l’autorité d’une organisation supranationale et il fit l’objet
d’un traité instituant le CED. Un projet de « Communauté politique européenne » vint s’ajouter à la CED, mais l’un
comme l’autre n’eurent pas de suite après le refus français de ratifier le traité CED (30 août 1954).
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010, p.10
1.2
La période des premières réalisations (1950/1970)
1.2.1 L’Union européenne des paiements (1950-1959)
Document 22 : l’Union Européenne des Paiements
La création de l'Union européenne des paiements (UEP), en septembre 1950, sous les auspices de l'OECE, a
représenté un (…) acte remarquable de coopération.
L'Union Européenne des Paiements avait trois objectifs :
- lever l'obstacle de l'inconvertibilité des monnaies européennes ;
- supprimer les restrictions quantitatives ;
- mettre fin aux pratiques commerciales bilatérales.
La mise en place de l'UEP a conduit à la création du fonds de compensation indispensable pour équilibrer les
déficits intra-européens en déterminant un quota pour chaque pays. Le quota servirait de référence pour le
règlement automatique des excédents. Un fonds commun UEP a aussi été mis en place auquel chaque membre
contribuait à hauteur de 60 pour cent de son quota. L'UEP a été dissoute le 27 décembre 1958 lorsque les monnaies
ont été déclarées convertibles vis-à-vis du dollar.
Source : site de l’OCDE
Document 23 : le défi des échanges commerciaux internationaux au début des années 1950
L’aide financière du plan Marshall et l’influence de Washington facilite la création de l’Union Européenne des
Paiements (UEP) en 1950. L’UEP est un système de clearing monétaire entre les Etats membres de l’OECE. Ce
système remplace les règlements bilatéraux qui existaient entre 1945 et 1950 et qui engendraient une concurrence
entre pays européens pour l’acquisition de réserves en dollars, générant ainsi des réactions néomercantilistes.
L’UEP est un système de quote-parts en dollar. Il constitue une réserve qui permet de transférer des dollars des
pays européens dont la balance commerciale est excédentaire vers ceux dont la balance est déficitaire. Ce système
permet donc une plus grande flexibilité car il allonge la durée des ajustements des balances commerciales.
Plusieurs pays tels que l’Allemagne, l’Autriche ou la Grèce sont régulièrement en déficit, menaçant la stabilité du
système, mais l’intervention américaine qui comble les quote-parts de ces pays permet d’assurer la pérennité de
l’UEP. Ce système de clearing facilite ainsi la reprise du commerce intra-européen et réduit de manière
substantielle les obstacles monétaires et le protectionnisme au sein de l’Europe occidentale
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.77
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Document 24 : le fonctionnement de l’UEP
L'UEP se distingue des dispositifs précédents car la compensation se réalise vis-à-vis d'elle seule et non plus au
regard de tel ou tel pays. En outre, elle postule que les monnaies des pays participants sont interchangeables aux
fins des opérations de compensations, quand bien même elles demeurent inconvertibles les unes les autres. Lors de
l'établissement mensuel des soldes de chaque pays participant, la BRI convertit les montants transmis en unité de
compte retenue par l'UEP, à savoir la valeur du dollar en or (un trente-cinquième d'once d'or fin). Le taux de
conversion (ou parité) entre les monnaies nationales et l'unité de compte est défini par les pays respectifs. Les
règlements des excédents ou des déficits se réalisent auprès de l'UEP de façon automatique, en or et sous forme de
crédit. La proportion or/crédit varie selon l'importance des soldes par rapport aux quotas. Plus le solde s'approche
du quota, plus le débiteur devra régler en or et le créancier se fera payer sous forme de crédit. (…)
L'Union favorise la libération des échanges commerciaux entre ses États membres et facilite, ce faisant, la mise en
place et le développement de la Communauté européenne du charbon et de l'acier. L'Union permet l'harmonisation
des politiques monétaires nationales à travers l'examen mensuel des situations économiques et des balances des
paiements auquel se livre le Comité de direction. (…)
L'amélioration constante de la situation économique des pays participants à l'UEM permet une reconstitution des
réserves en devises et en or. L'octroi de crédit autorisé dans le cadre de l'Union se réduit alors progressivement au
profit de paiements au comptant, c'est-à-dire dans des conditions proches de celles prévalant dans un système de
convertibilité mondiale. De fait, dans le courant de l'automne 1958, les monnaies des dix-sept pays européens
membres de l'UEP sont rendues convertibles en dollars ou en d'autres monnaies les unes après les autres, la livre
sterling ouvrant la voie6. Le 27 décembre 1958, toutes sont convertibles. L’UEP n'a plus lieu d'être: elle est
dissoute à cette date. Ses dernières opérations sont liquidées le 14 janvier 1959 au soir.
Source : http://www.cvce.eu/education/
1.2.2 La Communauté européenne du Charbon et de l’Acier (CECA) (1950-2002)
Document 25 : la création de la CECA (Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier)
Sans réduire le mérite de Jean Monnet et de Robert Schuman, il faut admettre que le projet d’un accommodement
avec l’Allemagne fédérale (créée en 1949) dans la perspective d’une intégration européenne devient alors une idée
assez fréquemment évoquée. La méthode préconisée ne consiste pas à bâtir une construction politique d’ensemble
mais à réaliser une intégration sectorielle en plaçant « l’ensemble de la production franco-allemande de charbon et
d’acier sous une Haute autorité commune, dans une organisation ouverte à la participation des autres pays
d’Europe ». …)
Annoncé officiellement par le Ministre des affaires étrangères, Robert Schuman, le projet français se heurta au
refus britannique, mais n’empêcha pas, avec les encouragements des Etats-Unis, la conclusion de négociations
entre la France, l’Allemagne fédérale, l’Italie et les pays du Bénélux (Traité de Paris, 18 avril 1951). La
Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier était née.
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010, p.10
Document 26 : les caractéristiques de la CECA
La communauté européenne du Charbon et de l’Acier est ratifiée en 1952 (pour une durée de 50 ans).
Les éléments importants à retenir :
- suppression des droits de douane pour la charbon et l’acier provenant des Etats-membres ;
- création d’un tarif extérieur commun ;
- création de deux institutions supranationales : la Haute Autorité et la Cour de justice ;
- mécanisme de contrôle des prix, dispositif anti-trust et contrôle des fusions par la Haute autorité ;
- mécanisme de règlement juridique des conflits entre les Etats membres par une Cour de justice
supranationale ;
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.87
Document 27 : la relation Gatt / CECA
Entretien avec E.Wellenstein, haut fonctionnaire à la Haute Autorité de la CECA
http://www.cvce.eu/education/unit-content/-/unit/da53c3f9-6a19-4c52-8802-26206906f253/dd5840a9-c2f14869-a7ee-6314c42c04a0/Resources#3828e401-12d7-4877-8a67-45b2c8c19cf8_fr&overlay
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Document 28 : le rôle de la Haute autorité de la CECA
Le plan Schuman innove radicalement par rapport aux précédentes tentatives d’unité européenne, en proposant une
intégration totale dans un secteur limité, ce qui lui permet de contourner adroitement le débat entre fédéralistes et
unionistes, alors dans l’impasse. Le rôle de planification économique confié à la CECA est nouveau : l’organisation
ne retire aucune prérogative aux Etats membres, elle ne s’aventure pas non plus sur le terrain sensible du
commandement militaire et des choix politiques. (…) En matière économique, elle propose de remplacer les
aciéries et les mines de charbon peu rentables à l’échelle nationale par l’exploitation efficace du charbon et de
l’acier ouest-européen, en dehors de toute considération de frontières. (…)
La Haute Autorité, l’organe qui dirige la CECA, constitue l’innovation la plus marquante. Ce comité exécutif
composé de 9 experts techniques administre les ressources des six pays membres. Indépendants des
gouvernements, ces experts ne sont pas élus, ils ne peuvent être démis de leurs fonctions pendant leur mandat et ils
disposent d’un réel pouvoir, qui leur permet de fixer et réguler les prix, lever des droits de douane pour couvrir les
coûts de leurs opérations, encourager ou décourager l’investissement.(…) Dans le secteur limité dont elle est
responsable, la Haute Autorité introduit ainsi un pouvoir de décision réellement supranational au sein des
institutions européennes.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.512
Document 29 : union douanière vs zone de libre-échange
Les principales difficultés de l’après-guerre surmontées, s’ouvre un important débat entre, d’une part, les partisans
de la création d’une Union douanière et, d’autre part, les partisans de la formation d’une simple zone de libreéchange en Europe sans protection douanière extérieure commune.
La démarche initiée par la CECA dès 1951, puis par la CEE (1957) est (…) ambitieuse en terme de coopération
économique. Six Etats-nations, la Belgique, la France, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-bas et la République
Fédérale d’Allemagne, acceptent d’adopter certaines politiques communes (…). S’ouvre alors un long processus
graduel d’intégration qui verra s’élargir les champs de compétences communes et s’accroître le nombre de pays
membres. (…)
La constitution en 1960 à Stockholm de l’Association Européenne de Libre Echange (AELE) sur l’initiative du
Royaume-Uni correspond à la seconde démarche vers une Europe économique fondée sur la seule coopération en
matières d’échanges de marchandises et à terme de services et de capitaux. L’AELE regroupe à l’origine outre le
Royaume-Uni, l’Autriche, le Danemark, la Norvège, le Portugal, la Suisse. Ces pays seront rejoints plus tard par
l’Islande, la Finlande et le Lichtenstein.
Source : J.Y.Letessier, J.Silvano et R.Soin « L’Europe économique et son avenir », Cursus A.Colin, 2008, p.58
Document 30 : l’intégration économique et la méthode des petits pas (Robert Schuman)
En 1954, lorsque le parlement français rejette, avec la CED, une nouvelle étape vers la souveraineté nationale, la
CECA semble ouvrir la voie à un mode d’unification nouveau : une intégration économique secteur par secteur.
(…) Puisque l’intégration européenne par la voie parlementaire est désormais bloquée par un Conseil de l’Europe
sans véritable pouvoir, il va falloir trouver d’autres moyens et aller de l’avant sans le Royaume-Uni. Les grands
projets politiques imposés d’en haut semblent désormais utopiques. (…) Les partisans d’une union européenne plus
ambitieuse peuvent toujours se consoler en espérant que les décisions prises au niveau communautaire dans des
secteurs économiques d’abord limités finiront par s’étendre à la sphère politique et provoqueront un développement
naturel des institutions.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.509
Faire de l’Europe économique
Construire un espace :
Document 31
Une zone de libre-échange
Une union douanière
Objectif en termes de souveraineté
nationale :
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Document 32 : en résumé, l’intégration européenne durant les années 1950 (avant Traité de Rome)
La période de la décennie années 1950 avant le Traité de Rome
Echecs des projets
d’intégration politique :
-
Réussite de l’UEP
(OECE) : 1950-1959
Création de la CECA
Projet de création
d’une zone de libreéchange européenne :
-
Stratégie des « petits
pas »
1.3 Le Traité de Rome (1957)
1.3.1 La création de la CEE et de l’Euratom
Document 33
Les perspectives d’intégration étaient comme libérés des questions politiques et militaires les plus sensibles. La
relance européenne de la conférence de Messine (1-3 juin 1955), autour d’un projet d’intégration sectorielle portant
sur l’énergie atomique (Euratom) et d’un projet d’intégration économique plus général (la future CEE), s’en trouva
facilitée.
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010, p.10
Document 34 : les objectifs de la CEE et de l’Euratom
Le 25 mars 1957, l'Allemagne, la Belgique, la France, l'Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas signent à Rome deux
traités : le premier crée la Communauté économique européenne (CEE) ; le second crée la Communauté
européenne de l'énergie atomique (CEEA ou Euratom). Ces deux traités sont entrés en vigueur le 14 janvier 1958.
Les nouvelles Communautés sont alors apparues comme un facteur de renforcement économique pour les Etats
membres.
La CEE a pour mission, par l’établissement d’un marché commun et le rapprochement progressif des politiques
économiques des États membres, de promouvoir un développement harmonieux des activités économiques dans
l’ensemble de la Communauté, une expansion continue et équilibrée, une stabilité accrue, un relèvement accéléré
du niveau de vie, et des relations plus étroites entre les États qu’elle réunit.
Prenant pour base le traité CECA, le traité de Rome élargit le champ de la coopération supranationale et relance
ainsi la construction européenne, ralentie par l'échec, en 1954, du projet politique de Communauté européenne de
défense (CED). Le domaine économique, moins sujet aux résistances nationales, apparaît comme un champ
consensuel de coopération.
La Communauté Euratom est d'une nature différente. Il ne s'agit pas de mettre en commun des activités
économiques déjà existantes, mais de contribuer à la formation et à la croissance d'une industrie nucléaire
européenne. Cette Communauté existe toujours.
Source : http://www.touteleurope.eu/l-union-europeenne/les-traites/synthese/les-traites-de-rome-1957.html
Document 35 : la CEE et la mise en œuvre du « marché commun »
Le marché commun implique une union douanière entre les Etats membres, c'est-à-dire l'élimination des droits de
douane et des contingents pour les marchandises qu'ils échangent, ainsi que l'établissement d'une politique
commerciale et d'un tarif douanier communs à l'égard des Etats tiers. Une période de transition de 12 ans est
prévue.
Le marché étant fondé sur le principe de la libre concurrence, le traité interdit les ententes entre entreprises, ainsi
que les aides d'Etat (à l'exception de celles à caractère social). Outre la libre circulation des marchandises, le
Marché unique prévoit également "l'abolition, entre les Etats membres, des obstacles à la libre circulation des
personnes, des services et des capitaux".
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Son fonctionnement rend nécessaire le rapprochement des législations nationales et l'élaboration de politiques
communes. Le traité prévoit l'instauration de politiques communes non seulement dans le domaine du commerce et
de la concurrence, mais dans ceux du transport et de l'agriculture également. (…) Les effets du démantèlement
douanier et de la suppression des restrictions quantitatives des échanges pendant la période de transition (19581970) sont spectaculaires : le commerce intracommunautaire est multiplié par 6, tandis que les échanges de la CEE
avec les pays tiers sont multipliés par 3. Le PNB moyen progresse de 70%.
Source : http://www.touteleurope.eu/l-union-europeenne/les-traites/synthese/les-traites-de-rome-1957.html
Document 36 : les objectifs de la CEE
L’intégration proposée par la CEE dépasse le seul cadre du libre échange. Aucun Etat membre ne peut en effet y
mener une politique salariale, sociale ou agricole fondamentalement différente de celle de ses partenaires sans créer
de distorsion dans les échanges commerciaux du Marché commun. Progressivement, la CEE en vient à préparer
l’harmonisation de l’ensemble des politiques économiques et sociales des six Etats membres. Tout ceci suppose la
création d’une autorité supranationale bénéficiant de compétences ordinairement réservées aux Etats souverains.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.513
Document 37 : Euratom
L'Euratom (ou CEEA, Communauté européenne de l'énergie atomique) est un organisme public européen chargé
de coordonner les programmes de recherche sur l'énergie nucléaire. Il a été institué par le traité Euratom, signé le
25 mars 1957 par les six pays membres de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA), et est
entré en vigueur le 1er janvier 1958. Il vise notamment la « formation et la croissance rapide des industries
nucléaires » au sein des pays signataires, lesquels cherchaient alors à limiter grâce au nucléaire civil leur
dépendance énergétique – notamment après la crise de Suez en 1956 qui avait posé des problèmes
d'approvisionnement en pétrole au moment où cette énergie remplaçait le charbon dans l'industrie électrique.
Institué pour renforcer la recherche, faciliter les investissements et assurer de larges débouchés à l'industrie
nucléaire, l'Euratom a toutefois dû limiter ses ambitions en raison du caractère sensible du secteur : les réalisations
se limitent à la construction de quatre centres de recherche en Allemagne, en Belgique, aux Pays-Bas et en Italie
ainsi que de cinq centrales nucléaires en France, en Allemagne, et surtout en Italie et au financement de
programmes tels l'organisation de développement énergétique coréenne.
Source : wikipedia
Document 38 : à propos de l’énergie atomique (Reportage télévisé Pathé 1957)
http://www.cvce.eu/obj/euratom_pathe_journal_5_juillet_1957-fr-1cf1969c-4d5c-4296-9ef7-e87cd67dfdec.html
1.3.2 La mise en œuvre du Traité de Rome et ses conséquences
Document 39 : sur les échanges commerciaux et la croissance
Les effets du démantèlement douanier et de la suppression des restrictions quantitatives des échanges pendant la
période de transition (1958-1970) sont spectaculaires : le commerce intracommunautaire est multiplié par 6, tandis
que les échanges de la CEE avec les pays tiers sont multipliés par 3. Le PNB moyen progresse de 70%.
Source : http://www.touteleurope.eu/l-union-europeenne/les-traites/synthese/les-traites-de-rome-1957.html
Document 40 : l’union douanière est réalisée en 1968
La CEE se développe rapidement et contribue à la prospérité sans précédent que connaît l’Europe dans les années
1960. Avant même la date prévue, les objectifs économiques sont atteints. Les derniers droits de douane sont abolis
en 1968 (cela concerne les produits manufacturés), dix ans seulement après la création du Marché commun. Le
commerce entre les Six se développe rapidement : au cours des neuf premières années, les échanges entre la France
et l’Allemagne augmentent d’environ 40%. Des millions de travailleurs quittent les régions défavorisées (sud de
l’Italie) pour aller travailler en France et en Allemagne.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.513
Document 41 : l’échec relatif de l’Euratom
Les conceptions et les intérêts des pays membres de la Communauté européenne de l'énergie atomique (CEEA ou
Euratom) sont très différents, ce qui complique la tâche de la CEEA. Elle doit établir les conditions favorables à la
naissance et au développement des industries nucléaires mais ne parvient pas à imposer une conception
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communautaire de la recherche ni à imposer d'emblée un type unique de réacteur. Il s'avère également très difficile
d'opérer une distinction nette entre les applications civiles et militaires de l'atome. Le traité présuppose surtout une
volonté politique qui, en pratique, va rapidement faire défaut
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 42 : le Traité de Rome, un compromis libre-échange / protectionnisme
Lorsque le Marché Commun se négocie entre 1955 et 1957, on observe deux conceptions différentes en matières
d’ouverture à la concurrence internationale.
Les pays du Bénélux et l’Allemagne sont en faveur d’un Marché commun relativement ouvert au reste du monde,
alors que la France et l’Italie souhaitent une protection plus importante pour leurs industries nationales. (…) Le
résultat sera un compromis entre ces deux positions.
Les autorités allemandes arrivent à imposer un tarif extérieur commun bas pour la CEE, ce qui permet de respecter
l’article 24 du Gatt et d’éviter les représailles de ses partenaires extracommunautaires. La France et l’Italie
réussissent à obtenir des exceptions pour continuer à protéger certains secteurs stratégiques de la concurrence intra
et extra-communautaire.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.98
Document 43: le Traité de Rome et le Gatt
CECA
Euratom
CEE
Libéralisation
marchés :
des
En accords avec les
principes du Gatt
Secteurs
exclus
négociations du Gatt :
Encadrement
« stratégiques »
des
des
secteurs
1.3.3 Le cadre institutionnel européen, la crise de « la chaise vide » et le Cour de Justice
européenne
Document 44 : rôle de la Commission et du Conseil des ministres
La Commission est constituée par des fonctionnaires internationaux indépendants de leur pays d’origine, c’est un
organe supranational. Elle possède un droit d’initiative. Mais les compétences décisionnelles sont détenues par le
Conseil des ministres. Le Conseil des ministres est constitué des représentants des gouvernements, c’est donc un
organe intergouvernemental. En 1967, avec le traité de Fusion, le Conseil des ministres et la Commission
deviennent les institutions communes aux trois communautés : la CEE, la CECA et la CEEA. Créée par la CECA,
la Cour de justice devient la garante du respect du droit communautaire établi dans les différents traités.
Le fonctionnement institutionnel de la CEE est nettement moins supranational que celui de la CECA. La
Commission européenne, qui aurait du être l’équivalent de la Haute Autorité, n’est qu’un organe exécutif sans
pouvoir décisionnel. Les décisions du Conseil des ministres sont ainsi prises à l’unanimité ou à la majorité
qualifiée. Mais même dans ce dernier cas, les Etats peuvent faire jouer un droit de veto , ce qui revient de fait à
préserver la souveraineté de chaque Etat membre. Cette architecture institutionnelle est le résultat du conflit de « la
chaise vide » qui oppose en 1965, le président de la Commission, Walter Hallstein, et le président français, Charles
de Gaulle. C’est la première grande crise de la construction européenne. La Commission souhaite introduire le vote
à la majorité qualifiée au sein du conseil des ministres. De Gaulle, qui craint une remise en cause de la politique
agricole commune, s’y oppose. Le 1er juillet 1965, la France rappelle son représentant à Bruxelles. Le boycotte de
Bruxelles dure 6 mois. La France obtient alors le « compromis de Luxembourg » : un Etat peut utiliser son droit de
veto lors d’un vote à la majorité qualifiée. Le compromis de Luxembourg renforce la conception d’une Europe
intergouvernementale, le pouvoir politique en Europe est aux mains des Etats membres.
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Document 45 : la crise politique de la « chaise vide »
La proposition sur le financement de la Politique agricole commune (PAC), élaborée en 1965 par le président de la
Commission, Walter Hallstein, est le point de départ de la crise politique dite de la "chaise vide". La proposition de
la Commission va dans le sens du développement des ressources propres des Communautés, indépendamment des
États, et attribue des pouvoirs budgétaires supplémentaires au Parlement européen et un rôle accru à la
Commission. D'autre part, le passage, au 1er janvier 1966, à la troisième étape de la période transitoire prévue pour
l'établissement du Marché commun doit s'accompagner de l'application du vote majoritaire au Conseil des
ministres. La France ne peut accepter une telle évolution qu'elle considère comme un abandon inacceptable de
souveraineté. Le général de Gaulle reproche par ailleurs à Walter Hallstein d'avoir préparé sa proposition
budgétaire sans s'être préalablement concerté avec les gouvernements des États membres. De Gaulle reproche en
outre à Walter Hallstein de vouloir se comporter comme un chef d'État. La France craint enfin qu'une coalition
d'États membres ne remette en cause, par le jeu de la décision majoritaire, la politique agricole commune qu'elle a,
en effet, eu beaucoup de mal à faire accepter à ses partenaires.
L'attitude de la France, qui préside le Conseil jusqu'au 30 juin 1965, exacerbe de ce fait les désaccords latents entre
les conceptions de la Commission Hallstein et celles du Conseil des ministres. En refusant toute solution de
compromis, Maurice Couve de Murville, ministre français des Affaires étrangères du second gouvernement
Pompidou, provoque l'échec des négociations en vue du règlement financier de la politique agricole. Le 1er juillet,
le gouvernement français rappelle à Paris son représentant permanent à Bruxelles et fait connaître l'intention de la
France de ne plus siéger au Conseil des ministres jusqu'à ce qu'elle obtienne gain de cause. C'est le début de la très
grave crise de la "chaise vide". C'est en effet la première fois, depuis l'entrée en vigueur en 1958 du traité de Rome,
que la CEE voit son fonctionnement paralysé par un État membre. (…)
Pendant six mois, la France demeure absente de Bruxelles et boycotte la Communauté. Mais, consciente des
risques d'un isolement prolongé et de ses conséquences sur l'économie nationale, elle finit par accepter de nouvelles
négociations. (…) Elle exige le respect de l'unanimité (c'est-à-dire du veto de l'État minoritaire) (…). Depuis cette
date, le "compromis de Luxembourg" est souvent invoqué par les États membres quand ils entendent bloquer des
décisions majoritaires, (…) modifiant fondamentalement l'esprit du traité CEE en permettant un nouveau moyen de
pression des États sur le Conseil, d'autant qu'il ne définit pas l'intérêt national essentiel laissé au seul jugement de
l'État intéressé et ne prévoit pas de procédure d'arbitrage en cas de désaccord.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 46 : le traité de Rome, un compromis entre Europe des nations et Europe fédérale
Au début des années 1960, le Marché commun a brillamment réussi son examen de passage économique et permis
(…) notamment grâce à la Politique Agricole Commune, de semer les germes d’une véritable union politique. Tout
cela correspond exactement aux vœux pionniers de l’intégration européenne, Jean Monnet, mais également à des
fonctionnaires internationaux comme Walter Hallstein, président de la Commission de la CEE de 1958 à 1967.
Hallstein se plaît à qualifier le Traité de Rome de « document constitutionnel », de « premier chapitre d’une
constitution européenne ». De son point de vue, le Marché commun doit assumer de nouvelles fonctions, des
compétences fiscales en particulier, et s’élargir à la Grande-Bretagne et aux autres pays de l’AELE, désireux
désormais de participer à la Communauté européenne.
Il existe toutefois une autre vision de l’Europe, qui préconise une coopération plus limitée entre Etats. De Gaulle,
en toute logique, en est le porte-parole principal. (…) Il plaide pour une Europe des patries, une confédération
d’Etats-nations. Bien entendu, la France lui paraît la mieux placée pour conduire cette nouvelle puissance
européenne. De Gaulle poursuit donc avec le Marché commun, la même politique d’indépendance et d’intérêt
national. (…) La règle de l’unanimité lui facilite la tâche. Il parvient à orienter la construction dans un sens
favorable aux intérêts français, en usant de son droit de veto pour bloquer les décisions jusqu’à obtenir satisfaction,
et en développant une coopération étroite avec le chancelier allemand Adenauer. La France est le premier
producteur agricole de la Communauté et elle insiste ainsi pour que le Marché commun protège les cours agricoles
de la concurrence mondiale et absorbe ses excédents. Elle demande également que l’aide européenne au
développement se concentre essentiellement sur les pays d’Afrique francophone. A deux reprises en 1963 et 1967,
de Gaulle oppose son veto à l’entrée de la Grande Bretagne dans la CEE, prétextant la menace pour les agriculteurs
français que constituent les importations britanniques de produits agricoles du Commonwealth. Sur le fond, de
Gaulle se méfie d’une Grande Bretagne qu’il juge trop dépendante des Etats-Unis. (…) De Gaulle bloque sept mois
durant l’activité de la Commission en pratiquant la politique de la chaise vide, pour manifester son opposition
devant des décisions prises à la majorité simple. Le compromis de Luxembourg, qui donne à chaque Etat membre
un droit de veto lorsque ses intérêts nationaux vitaux sont en jeu permet de faire redémarrer la machine mais
empêche le Marché commun de franchir l’étape suivante, la supranationalité, qui aurait permis au Conseil de
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prendre les décisions à la majorité simple. (…) Au lieu de devenir l’exécutif d’une union politique européenne la
Commission se limite aux seules fonctions de planification et d’administration. Le pouvoir politique est rendu aux
Etats membres (…) qui préparent les Conseils des ministres, qui se rassemblent régulièrement notamment dans le
domaine des affaires étrangères ou la politique agricole. A partir de 1969, des sommets réunissent les Chefs d’Etat
et de gouvernement, ces réunions deviennent formelles en 1974, appelée Conseil européen, sur la proposition de
V.Giscard d’Estaing.
En 1967, les exécutifs des trois communautés européennes (CEE, CECA et Euratom) fusionnent. Les communautés
européennes se dotent de pouvoirs judiciaires et fiscaux et la Cour de justice de Luxembourg élabore une nouvelle
jurisprudence, consacrant le droit communautaire sur le droit national dans des domaines de plus en plus
nombreux.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.513
Document 47 : le poids prépondérant des Etats dans le fonctionnement de la CEE
Fonctions
Décision
Initiative et Exécution
Organe : Commission ou Conseil
des ministres ?
Modalité de décision : majorité ou
unanimité ?
Caractéristiques des décisions prises
Le pouvoir de décision est détenu par les Etats ou la Commission ?
dans le cadre de la CEE
Une Europe intergouvernementale ou fédérale ?
Document 48 : La Cour de Justice européenne, le droit européen s’impose sur les droits nationaux
Pourtant dans le même temps, la Cour de Justice européenne élabore une jurisprudence s’appuyant sur le droit
communautaire qui découle des traités européens. Dans les domaines concernés par ces traités, le droit
communautaire s’impose sur les droits nationaux. En 1966, par exemple, les ouvrières de la Fabrique nationale
d’arme belge d’Herstam obtiennent l’égalité de rémunération avec les hommes au nom de l’application de l’article
119 du traité de Rome. Une Europe supranationale se développe donc aussi.
Document 49 : le rôle de la cour de Justice
Créée en 1951 par le traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA), la Cour de
justice de la CECA est devenue, en 1958 après l'entrée en vigueur des traités de Rome instituant la Communauté
économique européenne (CEE) et la Communauté européenne de l'énergie atomique (CEEA ou Euratom), (…) la
«Cour de justice unique» des trois Communautés européennes. (…) La Cour de justice a été la seule juridiction des
Communautés jusqu’à la fin des années 1980.
La reconnaissance des principes de base tels que l'applicabilité directe du droit communautaire et la primauté du
droit communautaire sur les droits nationaux a été la contribution la plus importante à la construction
communautaire. Sur la base de ces principes, les particuliers peuvent invoquer le droit communautaire devant les
juges nationaux et demander l'inapplication d'une norme nationale contraire au droit communautaire.
À défaut d'un catalogue écrit des droits fondamentaux dans les Traités et aux fins de sauvegarder la primauté et
l'application uniforme du droit communautaire, la Cour a été amenée à construire un système de protection de ces
droits sur la base des principes généraux du droit communautaire. Tout en s'inspirant des traditions
constitutionnelles communes aux États membres et des instruments internationaux concernant la protection des
droits de l'homme, la Cour assure la sauvegarde des droits fondamentaux dans le champ d'application du droit
communautaire.
Source : http://www.cvce.eu/
Document 50 : un exemple de jurisprudence de la Cour de Justice
En ce qui concerne la libre circulation des marchandises, la Cour (…) a considéré comme "mesure d'effet
équivalent" à des restrictions quantitatives à l'importation "toute réglementation commerciale des États membres
susceptible d'entraver, directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce
communautaire". Dans l'affaire Cassis de Dijon (1979) la Cour a établi le principe selon lequel "tout produit
légalement fabriqué et commercialisé dans un État membre, conformément à la réglementation et aux procédés de
fabrication loyaux et traditionnels de ce pays, doit être admis sur le marché de tout autre État membre" (principe
de la reconnaissance mutuelle des réglementations nationales). Source : http://www.cvce.eu/
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1.3.4 La première politique européenne commune : la PAC
Document 51 : une politique commune (deux objectifs)
Avec la construction d’une Union douanière, le traité de la CEE mettait eu premier rang de ses priorités le
rapprochement des économies et des législations nationales des Etats membres. initialement, c’est l’instrument des
« politiques communes » qui devait constituer la pointe avancée de se rapprochement. Il s’agissait alors, à travers la
réalisation de marchés communs sectoriels, de profiter des effets positifs de la libéralisation tout en conservant la
capacité de protéger des intérêts nationaux jugés essentiels. La référence aux « politiques communes » était le reflet
d’une conception plus générale du développement économique qui restait méfiante à l’égard d’un système
généralisé de libre concurrence. Ce n’est donc pas un hasard si, sous la pression française, l’agriculture, dont on
souhaitait mais aussi craignait l’exposition trop brutale à la concurrence étrangère, fut le premier secteur à être
organisé en une « politique commune ». Celle-ci devait être présentée pendant longtemps comme le prototype des
réalisations communautaires.
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010, p.38-39
Document 52 : les objectifs de la PAC
Pour assurer les grands objectifs d’équilibre et de paix que l’Europe s’était fixée, l’agriculture a été considérée
comme un secteur stratégique. Afin d’atteindre l’autonomie alimentaire, elle devait donc se structurer et être plus
efficace. Le traité de Rome va fixer cinq objectifs à la « politique communautaire » :
1) accroître la productivité ; 2) assurer un niveau de vie équitable à la population active agricole ;
3) stabiliser les marchés ; 4) garantir la sécurité des approvisionnements ;
5) garantir des prix raisonnables.
En 1962, la CEE adopte les premiers règlements de la PAC et décide de créer le Fonds européen d’orientation et de
garantie agricole (FEOGA) mis en place en juillet 1964. En 1967, entrée en vigueur du marché unique.
Document 53
Une politique commune (ou « communautaire »)
Grands objectifs à atteindre :
Quel fondement pour la politique
agricole commune : libéraliser le
secteur ou encadrer un secteur
essentiel ?
Conséquence
sur
la
politique
commune :
Une politique d’encadrement et de gestion des marchés
agricoles = unicité du marché et prix garantis
Document 54 : la PAC
On retiendra tout d’abord de la PAC une volonté de créer « une organisation commune des marchés agricoles »,
c’est-à-dire propre à chaque produit : production, prix communs et soutiens financiers sont négocier
périodiquement entre les Etats membres et les décisions sont applicables à tous. Il s’agit donc d’une politique
d’encadrement et de gestion des marchés qui implique des discussions techniques (produit par produit) et des
négociations ardues (ce que l’on a appelé les « marathons agricoles »).
Comme réalisation tendue vers certains objectifs (accroître la productivité agricole, assurer un niveau de vie
équitable à la population agricole, stabiliser les marchés, garantir la sécurité des approvisionnements, assurer des
prix raisonnables), la PAC a connu plusieurs orientations différentes sur le même label. Véritablement lancée en
1962, elle a privilégié, dans un premier temps, une politique de prix relativement élevés et d’incitation à la
production, puis dans les années 1980, une limitation de la production et, depuis, la réforme de 1991-1992, une
réduction progressive des subventions, confirmée par la réforme de 2003 et, augmentée d’un encouragement à
produire « mieux » (environnement, sécurité alimentaire) après plusieurs alertes imputées au productivisme
agricole (« vache folle », ….)
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010, p.38-39
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Document 55
Le marché commun au début des années
1970 : deux réalisations
Libéralisation des échanges de produits
manufacturés : réalisation de l’union
douanière
Politique agricole commune : unicité du
marché et prix agricoles garantis
1.4 Les premiers élargissements (avant le Marché unique)
Document 56 : les élargissements successifs des années 1970-1980
1973 : premier élargissement de la CEE avec l’entrée du Royaume-Uni, de l’Irlande et du Danemark
1981 : entrée de la Grèce dans la CEE
1986 : entrée de l’Espagne et du Portugal dans la CEE
Document 57 : l’entrée du Royaume-Uni
Le premier élargissement de l’UE a inclus une des trois plus grandes économies européennes : le Royaume-Uni.
(…) A la fin des années 1960, la PAC est consolidé et le projet américain en faveur d’un accord de libre-échange
transatlantique est abandonné. La France du président Pompidou lève son veto et la Grande-Bretagne peut adhérer
à la CEE. Elle arrive à négocier la mise en place d’un Fonds Européen de Développement Régional (FEDER) en
faveur des régions les moins riches de la CEE. Les transferts qu’elle peut espérer de la politique régionale de la
CEE lui permettent de compenser en partie ses contributions financières nette à la PAC. (…)
L’Irlande et le Danemark ont opté pour rejoindre la CEE du fait de leurs forts liens économiques avec la Grande
Bretagne. A son entrée en 1973, l’Irlande est le pays le plus pauvre avec un PIB par habitant se situant à 60% de la
moyenne des 15 autres Etats européens en parité de pouvoir d’achat, alors que l’Italie jusque-là, en dernière
position se situe à 93% de celle-ci. Dans le cadre de la politique régionale et de la politique agricole l’Irlande
bénéficie de transferts financiers substantiels qui facilitent un léger rattrapage. Cela constitue en moyenne 4% du
PIB irlandais entre 1973 et 1999.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.400-465
Document 58 : l’entrée de la Grèce, l’Espagne et le Portugal
Les gouvernements de la CEE, notamment celui de Giscard d’Estaing et de Schmidt soutiennent l’entrée de la
Grèce pour des raisons politiques. En ce qui concerne, les critères économiques, la Commission rend un avis
négatif à la fin des années 1970. Le dossier agricole est le moins facile à négocier, mais les Etats membres ne sont
pas regardants vu le faible poids du PIB grec, inférieur à 2% du PIB de la CEE des neufs. (…)
Avec l’entrée de l’Espagne, il s’agit d’un élargissement plus important sur le plan économique. (…) En 1986, le
PIB ibérique représente 11,5% du PIB de la CEE des 10 états membres. L’élargissement ne se fait pas sans
résistance et dure sept ans. Premièrement, les pêcheurs et les producteurs de textile de certains Etats membres
(France, Italie) craignent la concurrence des espagnols. Deuxièmement, on craint d’importants flux migratoires
après l’adhésion. Troisièmement, la plupart des régions de la péninsule remplissent les conditions pour bénéficier
des fonds structurels destinés aux régions les plus pauvres (…). Une fois entrée dans la CEE, l’économie espagnole
connaît une forte croissance, tout en ayant une faiblesse industrielle structurelle.
Le Portugal, lui, n’arrive pas à construire de noyau dur, (…). Il connaît une croissance plus faible que son voisin
espagnol et une convergence beaucoup plus lente vers la moyenne de l’UE.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.400-465
Document 59 : l’essor de la politique régionale et sociale
Dès les années 1960, la Commission déclare qu’elle souhaite « promouvoir un acheminement progressif vers une
politique régionale susceptible de réduire les écarts entre les niveaux de développement des diverses régions de la
Communauté ».
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Certes, il est déjà possible à cette époque d’effectuer des transferts vers les régions les plus pauvres de manière
indirecte par le biais de projets spécifiques de certaines institutions européennes qui sont créées en même temps
que le Marché commun. Ainsi la Banque européenne d’investissement (BEI) offre des prêts pour réaliser des
projets d’infrastructures qui peuvent bénéficier aux régions les plus défavorisées. Le Fonds social européen (FSE),
octroie des fonds pour lutter contre le chômage. Le Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA)
qui vise à financer des projets d’adaptation des structures agricoles et de développement rural cible généralement
les régions les plus pauvres comme le sud italien. Toutefois, l’ensemble de ces fonds qui sont transférés vers les
régions les plus pauvres ne s’élève qu’à 3% du budget européen en 1970.
La donne change avec l’entrée de la Grande Bretagne en 1973. Elle ne possède qu’un très petit secteur agricole et
est donc contributrice nette de la PAC qui consomme plus de 90% du budget européen en 1970, soit environ 0,72%
du PIB de la CEE. En soutenant la création d’une politique régionale de cohésion dont ses régions pauvres sont
bénéficiaires (Pays de Galles, Irlande du Nord), elle obtiendra 28% du budget de la politique régionale en 1974. Le
gouvernement britannique réduit ainsi sa contribution nette au budget de la CEE. Le Fonds Européen de
développement régional (FEDER) est accepté en 1974. La politique régionale prend progressivement une part aussi
importante que la PAC dans le budget européen, les sommes allouées aux deux politiques grevant 75% du budget
européen. Avec les élargissements de 1981 et 1986, les nouveaux Etats membres en deviennent les principaux
bénéficiaires.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.400-465
Document 60 : l’hétérogénéité des pays membres s’accroît
Nouveaux membres de la CEE
Pays développés
Pays en retard
Elargissements 1970/1980
Document 61: le développement d’une politique régionale et sociale
« Une politique régionale susceptible de réduire les
Objectif de la Commission
écarts entre les niveaux de développement des diverses
régions de la Communauté »
Instruments du Traité de Rome
Nouveaux instruments créés dans les années 1970
Nouveaux pays bénéficiaires
Document 62 : l’action de la CEE, quelles actions ? quelles dépenses ?
CEE
Mettre en œuvre le marché
commun (réalisation UD)
Financer la PAC
Financer le fonctionnement des
institutions européennes
Financer les politiques
régionales et sociales
Document 63 : les recettes de la CEE
La CEE ne prélève aucun impôt (comme l’UE aujourd’hui d’ailleurs). Elle doit ses recettes :
- aux contributions des Etats membres calculées sur le RNB ; A l’issu du troisième élargissement, la part de
la contribution au budget communautaire de l’Allemagne (RFA) est de 27%, la France de 19%, Le
Royaume-Uni de 15%, l’Italie de 14% … le Portugal de 1% et le Luxembourg de 0,2% ; En 1958, les
contributions de la RFA, de la France et de l’Italie étaient de 28% chacune.
- des prélèvements sur la TVA ;
- les droits de douanes perçues aux frontières de la CEE sur les importations ;
- les droits agricoles perçues sur les importations de produits agricoles ;
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1.5 L’évolution des institutions européennes durant les années 1970
Document 64 : l’évolution du rôle du Parlement européen, le rapport Vedel (1972)
De l'avis du général de Gaulle, le Parlement européen, qui à l'origine ne dispose pas de pouvoir budgétaire et
législatif à proprement parler, ne doit pas être élu au suffrage universel. A ses yeux, le Conseil des ministres est le
seul législateur autorisé de la Communauté économique européenne (CEE). (…)
En mars 1971, la Commission européenne met sur pied un groupe de travail présidé par Georges Vedel, doyen
honoraire de la Faculté de droit et des sciences économiques de Paris, afin d'examiner toutes les implications d'un
renforcement des compétences institutionnelles et budgétaires du Parlement. Le 25 mars 1972, le groupe ad hoc de
personnalités indépendantes publie son rapport détaillé. Le document préconise notamment l'extension graduelle
des pouvoirs législatifs du Parlement européen dans le sens d'une véritable co-décision. Le rapport propose aussi
que le président de la Commission, nommé par le Conseil, soit ensuite investi par le Parlement avant que soient
désignés les autres commissaires. (…) Le Rapport Vedel se prononce en faveur de l'élection au suffrage universel
direct du Parlement sans définir pour autant de procédure électorale uniforme.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 65 : élection du Parlement européen (1979) et création du Conseil européen (1974)
Ce n'est qu'en 1974 que le président français Giscard d'Estaing accepte l'idée de l'élection directe du Parlement qu'il
lie toutefois à la création du Conseil européen censé créer un véritable gouvernement européen.
Aux sommets de Bruxelles des 12-13 juillet et du 20 septembre 1976, une série de décisions sont prises pour
finaliser l'élection au suffrage universel. Ce choix est ratifié par tous les membres de la Communauté à une très
forte majorité même si, en France, les gaullistes et les communistes s'y opposent radicalement. (…)
Le Parlement européen, même élu au suffrage universel, n'a toujours pas de compétence législative, contrairement
à un parlement national. (…) Fort de sa nouvelle légitimité démocratique, le Parlement européen aspire à étendre
son rôle en matière législative, voire constitutionnelle. Ces revendications sont renouvelées à chaque occasion qui
se présente : les députés multiplient les questions parlementaires écrites et orales pour attirer l'attention. En fin de
compte, le Parlement européen développe son action de contrôle. Dans ce domaine, il dispose d’un réel pouvoir à
l’encontre de la Commission qu’il peut censurer mais il n'utilise cependant pas cette arme lourde de conséquences.
En revanche, il s’octroie en tant que corollaire à son pouvoir de censure, un droit d’investiture. Ainsi dans la
pratique, la Commission nouvellement nommée se présente devant lui pour lui exposer son programme.(…) Le
Parlement européen peut rejeter le budget annuel et les budgets supplémentaires et se prononcer sur la gestion du
budget par la Commission à l'occasion d'un vote de décharge.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 66 : le Conseil européen (1974)
Le conseil est une formation solennelle et confidentielle des chefs d’Etat et de gouvernement dont le président de la
Commission fait partie. Il découle de la consécration en 1974 de la pratique des réunions au sommet des chefs
d’Etat et de gouvernement des pays membres. Il a été officialisé par la Déclaration solennelle de Stuttgart en 1983
puis défini par les traités qui ont suivi. Il se réunit au moins quatre fois par an. Il est devenu le véritable moteur de
l’intégration européenne. Les thèmes abordés dans ces sommets scandent les avancées européennes.
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010, p.38-39
Document 67 : en résumé, le partage des tâches entre les institutions européenne avant l’Acte Unique
Les institutions politiques européennes au début des années 1980
Le Conseil européen Le Conseil des
La Commission
Le Parlement
ministres
européen
Qui siège ?
Fonction / rôle
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1.6 Malgré le Traité de Rome, l’économie européenne reste fragmentée : l’eurosclérose (19741984)
Document 68 : des marchés segmentés, des politiques protectionnistes, des désaccords sur les missions de la
CEE
La décennie 1970 s’ouvre sur un ralentissement de la croissance, pour la première fois depuis le Traité de Rome,
l’intégration européenne ne semble pas se traduire par un gain de croissance. Pour les pro-européens, cela n’est que
la conséquence d’un marché commun non abouti : sa non-réalisation a un coût, que le rapport Checcini évalue de
4% à 6% du PIB de la CEE (« le coût de la non-Europe », 1985). Le marché commun reste bloqué à la simple
circulation des biens manufacturés. Circulation des biens, elle-même freinée par la présence de pratiques
protectionnistes toujours vivaces qui s’appuient sur des barrières non-tarifaires comme les réglementations
techniques et commerciales. En outre, au sein même des partenaires européens, les discussions sont vives sur ce
que doit faire la CEE : le poids de la PAC dans le budget de la Communauté fait débat (90% des dépenses). Le
nouveau Premier Ministre britannique, Margaret Thatcher, réclame « I want my money back » (1979) et obtient
1984 un statut dérogatoire au financement de la CEE (également appelé le « rabais » ou le « chèque » britannique).
Le projet européen se cherche un second souffle et les tensions entre Etats membres sont vives, c’est la seconde
grande crise de la construction européenne.
1.6.1 Le marché unique inachevé
Document 69 : les limites de l’intégration économique, sources de faiblesse de la croissance
Une fois achevée la reconstruction et la généralisation de techniques de production américaines, les économies
européennes connaissent un ralentissement de la croissance et une saturation des marchés qui affaiblissent
progressivement le taux de profit du secteur privé en Europe et aux Etats-Unis et entraînent un fléchissement des
investissements productifs. (…) C’est dans ce contexte que la hausse brutale des produits pétroliers en 1973 rend
encore plus problématique le partage de la valeur ajoutée entre les entreprises privées, les salariés et l’Etat. (…) Au
début de la crise, de nombreux analystes et dirigeants politiques (…) pensent faire face à une récession
conjoncturelle du cycles d’affaires court qu’il suffit de contrer par des simples politiques budgétaires
contracycliques de relance. Mais ces politiques ne suffisent pas à relancer les investissements productifs vu le
faible degré de profitabilité des entreprises. Après plusieurs années de crise, on parle d’eurosclérose pour souligner
les facteurs structurels qui empêchent les économies européennes de renouer avec la forte croissance et le quasiplein emploi. La crise met en évidence les imperfections du Marché Commun et le coût de la non-complétude de
son intégration économique pour les firmes européennes face à la concurrence internationale.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.107
Document 70 : l’incomplétude du marché commun
Des distorsions de concurrence étaient introduites par les disparités de législation fiscale entre les États membres.
Un progrès avait été réalisé avec la généralisation, à partir de 1967, du système français de taxe à la valeur ajoutée
(TVA) pour remplacer les divers impôts indirects existants, mais les taux resteront différents d’un pays à l’autre.
Aucune harmonisation n’était intervenue en matière d’impôts directs sur les sociétés.
Des règles de concurrence avaient été adoptées (contrôle des ententes et des positions dominantes, contrôle des
aides publiques aux entreprises) et appliquées, mais les entreprises publiques y échappaient.
La libération des mouvements de capitaux n’avait été que partiellement réalisée, les États tenant à conserver le
contrôle de leur marché financier pour défendre leur monnaie et préserver les possibilités d’emprunts publics et
privés.
Pour les personnes, la libre circulation et d’établissement était complète pour les travailleurs salariés et non salariés
(artisans, commerçants, industriels) mais très incomplète pour les professions libérales. Quant à la libre prestation
des services (banques, assurances, transports) qui aurait dû être assurée progressivement, elle ne l’avait pas été.
L’inachèvement du marché commun était un obstacle certain pour l'intégration et l’expansion économiques de la
Communauté.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
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1.6.2 Le recours au protectionnisme
Document 71 : l’utilisation des normes et les barrières non tarifaires
Les engagements multilatéraux pris dans le cadre du Gatt et les engagements communautaires du Traité de Rome
limitent la capacité des Etats de jouer sur les barrières tarifaires. Au sein du Marché Commun, les tarifs douaniers
baissent de manière progressive dans une période transitoire, jusqu’en 1968 où ils sont entièrement éliminés. Les
engagements de libéralisation commerciale pris dans le cadre du Gatt imposent également une réduction du tarif
extérieur commun de la CEE vis-à-vis du reste du monde.
Les Etats vont donc plutôt jouer sur des barrières non-tarifaires et particulièrement des barrières techniques au
commerce. Un Etat membre met en avant des spécifications techniques ou des normes de sécurité officiellement
destinées à protéger la santé du consommateur national, mais il s’agit en fait de protectionnisme déguisé. Ainsi par
exemple au cours des années 1960, devant la concurrence des producteurs d’électroménager italiens, le
gouvernement français réagit en imposant des règles de sécurité supplémentaires qui permettent de restreindre
l’accès des producteurs au marché français. (…)
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.98
Document 72 : l’accès aux marchés publics
L’attribution des marchés publics peut être un autre outil visant à garantir aux champions nationaux d’un Etat
membre un accès exclusif ou privilégié à une partie du marché national. Ils constituent une partie substantielle du
PIB de la CEE qui dépasse les 15% de PIB au milieu des années 1980. (…) Ces marchés publics sont déterminants
dans plusieurs secteurs stratégiques où l’Etat est en situation de monopsone (matériel militaire, infrastructure de
transport, énergie …) ou reste un des principaux demandeurs (aérien, médicaments des hôpitaux publics, gros
ordinateurs …).
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.98
Document 73 : les aides aux entreprises
Les Etats subventionnent généreusement leurs champions nationaux à travers des déductions fiscales, du soutien à
la recherche, des crédits aux exportations etc… (…) Ces subventions empêchent la concurrence dite « pure » de
s’exercer pleinement sur les marchés. (…) Les articles 90, 92 et 93 du Traité de Rome interdisent en théorie ces
aides d’Etats si elles génèrent des distorsions au niveau de la concurrence communautaire. Toutefois, force est de
constater que la Commission n’arrive presque jamais à faire appliquer ces dispositions du Traité au cours des trente
premières années du Traité de Rome. En effet, les Etats membres peuvent recourir à de nombreuses exceptions
prévues dans le Traité au nom de la souveraineté et de la sécurité nationale et poursuivent ainsi une stratégie de
défense passive et de contournement très efficace face aux requêtes de la Commission. (…)
Source :
J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.98
Document 74 : le soutien aux champions nationaux dans un contexte de rattrapage
Les politiques de champions nationaux empêchent donc la rationalisation des capacités de production au sein de la
CEE au cours des années 1960-1970.
L’élargissement de 1973 qui fait rejoindre le Royaume-Uni, l’Irlande et le Danemark ne modifie pas la donne, la
Grande-Bretagne ayant des préoccupations similaires à la France ou l’Italie du fait du déclin relatif de l’industrie
britannique. Cependant, au sein de chacun des Etats membres, la politique des champions nationaux (…) réussit à
accroître la concentration industrielle dans de nombreux secteurs et la taille des grandes entreprises. Elle réduit
ainsi l’écart avec les firmes américaines au cours des années 1970. Cette croissance exceptionnelle combinée à
l’accélération de la concentration industrielle mène à une forte progression de la production des entreprises qui leur
permet d’atteindre des économies d’échelle. (…) On assiste au début des années 1970, à des vagues d’IDE
européens à destination des Etats-Unis (chimie, machines électriques, métallurgie, médicaments). (…) Ces succès
de certains champions nationaux européens peuvent donner l’impression de la « soutenabilité » à moyen terme du
statu quo en matière d’intégration économique européenne.
Au début des années 1970, le Marché Commun est loin d’atteindre un degré d’intégration économique similaire à
celui des Etats-Unis du fait des politiques industrielles nationales. Cependant, cela n’empêche pas les grandes
firmes européennes et les économies de la CEE de connaître une croissance sans précédent.
Malgré ces progrès, dans les secteurs stratégiques des nouvelles technologies pour lesquels les coûts fixes et les
coûts de recherche sont particulièrement élevés, on constate un écart technologique substantiel entre les grandes
firmes américaines et leurs concurrentes européennes. Le secteur de l’informatique est significatif à cet égard.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.98
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Document 75 : la récession et les stratégies non coopératives des Etats-membres
Au sein de la Communauté européenne, certaines voix s’élèvent pour réclamer une restructuration commune de la
production et suggèrent de privilégier l’innovation technologique et de délaisser les secteurs en crise. D’autres
préfèrent soutenir les industries nationales pour lutter contre le chômage. Choisir la première solution supposerait
d’élargir les fonctions communautaires et d’autoriser la Communauté à intervenir dans la planification industrielle
et le redéploiement de l’investissement, ainsi qu’à engager des changements structurels de premier ordre sans tenir
compte des préférences nationales. Cela signifierait accroître encore davantage le chômage dans certaines régions
pour favoriser les régions déjà les plus avancées du point de vue technologique. Dans ce contexte, on comprend
que la majorité des Etats membres optent pour la seconde solution et tentent de préserver l’emploi chez eux. Ce
sont la sidérurgie et l’agriculture qui posent les problèmes les épineux. Au début des années 1980, les usines
sidérurgiques tournent à 55% de leur capacité.
Personne pourtant ne propose alors de dissoudre le Marché commun. (…) Il semble que la Communauté
européenne soit devenue un forum de résolution des désaccords entre Etats membres plutôt qu’une institution
commune qui permettent de s’attaquer à la récession.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.513
Document 76 : récession économique et pratiques protectionnistes
Avec la crise pétrolière de 1973 et la crise économique qui s’ensuivit, les réflexes protectionnistes nationaux
réapparaissaient. Ne pouvant rétablir les contingents et les droits de douane, les gouvernements multipliaient les
obstacles non tarifaires aux échanges, avec les réglementations techniques et commerciales.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
1.6.3 Des conflits autour des objectifs de la CEE
Document 77 : le développement de la PAC créé une crise politique au sein des Etats membres
Dans le domaine agricole, (…) la Communauté européenne n’est pas loin de se retrouver dans l’impasse. Alors que
ce sont les grands pays agricoles comme la France qui bénéficient le plus des subventions agricoles
communautaires, le Royaume-Uni et l’Allemagne voient les prix des produits alimentaires augmenter. La question
des différentes contributions nationales au budget communautaire complique encore le climat.
Source : R.Paxton « L’Europe au 20ième siècle », Taillandier, 2011, p.513
Document 78 : à propos de Margaret Thatcher et la de la position britannique (1979)
(un reportage d’euronews) https://www.youtube.com/watch?v=Dn2mKV8yxH4
Document 79 : le développement de la PAC crée une crise budgétaire de la CEE
La forte augmentation de la production de céréales, de viande, de produits laitiers et de sucre est la conséquence
logique de l'organisation commune des marchés agricoles réalisée au cours des années soixante. La Communauté
économique européenne (CEE) est obligée d'intervenir sur le marché pour subventionner la vente des excédents
comme le beurre. Les marchés des autres produits agricoles, tels le tabac, les fruits et légumes, sont organisés entre
1970 et 1972. Les dépenses du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), qui absorbent une
grande partie du budget de la Communauté, n'ont cessé d'augmenter depuis sa mise en place en 1962. (…)
Une véritable crise budgétaire se développe. Les dépenses ne cessent de croître. La politique agricole commune
coûte de plus en plus cher du fait de la surproduction chronique des produits bénéficiant d’une garantie de prix et
représente une part excessive du budget total (70 %). L’élargissement de la Communauté à la Grèce, au Portugal et
à l’Espagne étende à ces pays les subventions agricoles et les aides régionales. Le budget communautaire double en
six ans (18,4 milliards d’écus en 1980, 36,2 en 1987). Or, les recettes s’avèrent insuffisantes. (…) Au début des
années 1980, la réforme du budget de la Communauté européenne devient indispensable.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
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Document 80
Eurosclérose
Ralentissement de la croissance
en Europe
Explications
conjoncturelles :
un problème de
demande
Explications structurelles : un
problème d’offre
Solutions nationales à la
crise
Protectionnisme
(des secteurs en
crise)
Crise de la PAC
Place de la PAC dans le
budget de la CEE
Solution européenne à la crise :
éliminer le coût de la « non-Europe »
Mettre en œuvre une politique
industrielle européenne
Déséquilibre croissant
du budget de la CEE
Supprimer tous les obstacles au marché
commun et renforcer la concurrence
Document 81 : l’évolution des enjeux économiques des années 1950 aux années 1980
Fin 1940/1950
1960/1974
à partir de 1974
Les grands enjeux
économiques de l’intégration
européenne
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De l’UEM au Brexit : la construction européenne à partir du milieu des années 1980
2.1 L’Acte unique européen (1986)
Document 82 : la relance du projet européen
Le début des années 1980 est une période d’intenses négociations intergouvernementales pour relancer l’intégration
européenne. Ces négociations aboutissent à la signature en février 1986 de l’Acte Unique par les ministres des
Affaires étrangères des douze pays membres (il rentre en vigueur en 1987). Ce texte est porté par le président de la
Commission européenne, Jacques Delors. Il est riche d’ambitions puisqu’il vise à finaliser le projet de marché
commun (circulation des biens & services, des capitaux et des personnes), à réformer les institutions
communautaires pour donner plus de poids au Parlement et à la Commission, à élargir les compétences
communautaires et, à mettre en œuvre une coopération en matière de politique étrangère européenne.
Document 83 : la signature de l’Acte unique
Dans son préambule, l'Acte unique européen, qui tire son nom du fait qu'il réunit en un seul texte les dispositions
relatives aux modifications institutionnelles, à l'élargissement des compétences communautaires et à la coopération
politique étrangère européenne, se positionne dans la perspective d'une Union européenne qui apparaît comme un
but à atteindre. Il a pour ambition de finaliser les potentialités du Marché commun mis en œuvre par le traité de
Rome (1957) et d'achever l'édifice communautaire en permettant aux institutions de mieux fonctionner.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
2.1.1 Vers une Europe sans frontières intérieures
Document 84 : l’approfondissement de l’intégration économique (« espace sans frontières intérieures »,
politique européenne de la concurrence)
La réalisation du Marché Unique, prévue pour le 1er janvier 1993, consiste à poursuivre et achever le Marché
Commun décidé lors du Traité de Rome. Cela conduit à décloisonner les systèmes financiers et favoriser la
circulation des personnes. L’espace Schengen est créé en 1993, il permet la suppression des contrôles automatiques
de passeport entre Etats membres ainsi que des restrictions aux permis de résidence. De nombreuses autres mesures
sont prises pour stimuler les échanges : suppression et simplification des formalités douanières, équivalence des
diplômes, uniformisation des taux de TVA par exemple. Devant les difficultés à harmoniser les réglementations
nationales, la Commission s’appuie sur la jurisprudence de la Cour de justice européenne. Celle-ci dans l’arrêt
« Cassis de Dijon » (1979) consacre le principe de reconnaissance mutuelle des normes nationales entre les
différentes Etats membres. Un bien ou produit dont la vente est autorisée sur un territoire de la CEE, peut l’être
obligatoirement dans les autres.
Dès lors que la libre circulation des marchandises progresse se pose la question des conditions d’exercice de la
concurrence dans l’espace européen. Déjà dans le Traité de la CECA, puis le Traité de Rome, le contrôle d’une
concurrence non faussée est posé. C’est notamment une des missions de la Haute Autorité de la CECA. La
politique de la concurrence européenne prend une nouvelle dimension avec le Marché unique. Elle doit lutter
contre les pratiques anticoncurrentielles des entreprises (ententes entre entreprises et abus de position dominante)
mais aussi des Etats (soutien aux entreprises domestiques à travers des normes, des aides publics et l’accès aux
marchés publics).
A la différence des années 1950/1980, l’intégration européenne est de moins en moins sectorielle et de plus en plus
basée sur le marché et la concurrence.
La volonté de mettre en œuvre des politiques communes ne disparaît pas pour autant, mais elle reste très modeste
du point de vue financier. L’Acte Unique fait de la politique de l’environnement une politique communautaire et il
prévoit de créer un « espace scientifique et technique européen » en s’appuyant sur plusieurs programmes
(ESPRIT , RACE, EUREKA).
Document 85 : du marché « commun » au marché « unique »
Le Conseil européen de Fontainebleau en 1984 (…) charge le nouveau président de la Commission, Jacques Delors
et le commissaire européen Lord Cockfield de préparer un livre blanc pour transformer le Marché Commun en
véritable marché unique. (…) Le livre blanc prévoit autour de 300 recommandations pour supprimer les obstacles
aux quatre grandes libertés de circulation : marchandises, services, capital, main d’œuvre. Il est adopté en 1985 au
sommet européen de Milan. Pour renforcer les arguments en faveur du marché unique, Cockfield commande à
Checcini un rapport sur les « coûts de la non-Europe » qui tente de chiffre les pertes liées à la segmentation du
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Marché commun. (…) Ce rapport estime les gains en termes d’efficacité (économies d’échelle et accroissement de
la concurrence) de 4 à 6% du PIB de la CEE.
Ces initiatives en faveur d’un marché européen sans entraves débouchent sur l’Acte unique en 1987 qui comprend
plusieurs volets (…). L’acte unique prévoit la mise en place d’un marché unique européen visant à assurer les
quatre libertés de circulation. (…) Le Marché unique deviendra effectif au 1ier janvier 1993. Avec l’avènement du
Marché unique, les contrôles frontaliers sont considérablement allégés à partir de 1993. (…) Avec la création de
l’espace Schengen en 1993, les contrôles automatiques de passeport sont supprimés au sein des Etats membres
ayant signé la convention et les restrictions aux permis de résidence sont supprimés pour permettre la libre
circulation des travailleurs.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.128
Document 86 : « un espace européen sans frontière »
Destiné à accélérer l'achèvement du marché intérieur, l'Acte unique vise également à instaurer un espace européen
sans frontières intérieures de plus de trois cent millions consommateurs. Présenté comme une condition essentielle
du développement économique, le marché unique vise à la fois à offrir de plus larges débouchés aux produits des
États membres et à accroître la concurrence et ses effets stimulateurs. L'AUE prévoit l'établissement du marché
intérieur et de la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux au cours d'une
période expirant le 31 décembre 1992. (…) Les nombreuses mesures concrètes nécessaires à l'établissement du
marché intérieur concernent notamment la suppression ou la simplification des formalités douanières pour le
passage des personnes et des marchandises, l'harmonisation des règles relatives au statut des personnes étrangères,
au droit d'asile, à l'émission de visas et à l'extradition, l'élimination ou l'équivalence des normes techniques telles
que les normes de standardisation, les labels de qualité, les marques et les procédures de certification,
l'harmonisation des procédures d'avis et de publicité des marchés publics, la libéralisation des services,
l'équivalence des diplômes et l'instauration d'un droit d'établissement unique pour les membres des professions
libérales ou encore l'élimination des frontières fiscales et l'uniformisation des droits d'accises et des taux de TVA.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 87 : la libre circulation des personnes
Avec l’avènement du Marché unique, les contrôles frontaliers sont considérablement allégés à partir de 1993. (…)
avec la création de l’espace Schengen en 1993, les contrôles automatiques de passeport sont supprimés au sein des
Etats membres ayant signé la convention et les restrictions aux permis de résidence sont supprimés pour permettre
la libre circulation des travailleurs.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.128
Document 88 : la politique de la concurrence présente dès le Traité de Rome
La politique de la concurrence européenne est une politique historiquement fondatrice de la construction
européenne. Mise en place dès 1951 dans le cadre de la CECA, elle a été développée comme un instrument de
support à l’intégration du marché européen. Le traité de Rome inscrit au nombre des responsabilités de la
Communauté européenne « l’établissement d’un régime assurant que la concurrence n’est pas faussée dans le
marché commun ». Elle vise à préserver les conditions de libre-échange et de libre concurrence réalisées avec le
marché commun puis unique. (…) Si l’intégration européenne vise à agrandir le marché et permettre aux
entreprises les plus performantes de gagner des parts de marché, de réaliser des économies d’échelle et des gains de
productivité, elle peut donc aussi amener certaines entreprises à acquérir un pouvoir de marché ou une position
dominante capable d’entraver le fonctionnement du marché unique. (…)
Pour assurer la libre circulation du charbon et de l’acier dans la CECA à des prix les plus bas possible, le traité de
1951 prohibe l’ensemble des pratiques d’entreprise et d’Etat anticoncurrentielles, telles que les cartels ou ententes,
les abus de position dominante ou les subventions publiques discriminatoires. L’ensemble de ces règles est repris
dans le Traité de Rome qui inscrit donc la politique de la concurrence dans le fonctionnement du marché commun.
Les principes fondamentaux qui régissent aujourd’hui la politique de la concurrence européenne sont donc en place
dès 1958, à l’exception du contrôle par la Commission européenne des fusions et acquisitions d’entreprises qui
viendra s’ajouter en 1989.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.210-244
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La politique de la concurrence : lutter
contre les pratiques anticoncurrentielles
Des entreprises ;
Quelles pratiques ?
Des Etats membres de la CEE ;
Quelles pratiques ?
Document 89 : la mise en œuvre de la politique de la concurrence à partir des années 1980
Si le cadre juridique est en grande partie posé au lancement du marché commun (1957), il ne sera réellement
appliqué qu’à partir des années 1980. Les premières décennies du marché commun sont marquées par la réticence
des Etats-membres à construire un marché sans entraves : la politique des champions nationaux menée par les
différents gouvernements de la CEE implique le maintien de pratiques discriminatoires, comme les aides d’Etat,
contraires au droit de la concurrence en vigueur. (…) C’est d’ailleurs, parce que la stratégie des champions
nationaux est progressivement abandonnée à la fin des années 1970 et que la réalisation d’un véritable marché
intégré devient un objectif clairement assumé qu’il devient impératif de renforcer la politique européenne de la
concurrence et une application rigoureuse du droit.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.210-244
Document 90 : l’application du principe de reconnaissance mutuelle des normes nationales
Dès la fin des années 1970, les institutions communautaires s’attaquent aux barrières techniques au commerce (…)
En 1979, la Cour européenne de justice rend l’arrêt « Cassis de Dijon ». Cette liqueur française se voyait refuser
l’accès au marché allemand sous prétexte qu’elle ne respecterait pas les normes allemandes relatives à ce type de
produit. La Cour affirme que si la fabrication et la commercialisation d’un produit respectent la législation
nationale du producteur, ce produit doit être admis sur les autres marchés des Etats membres de la CEE. (…) La
Commission s’appuie sur cet arrêt pour consacrer le principe de reconnaissance mutuelle des normes nationales des
différents états membres. (…) Une dernière avancée majeure contre les barrières techniques est réalisée par la
ratification de l’Acte unique en 1987, qui prévoit que l’unanimité ne soit plus requise pour les décisions du Conseil
relatives à l’harmonisation européenne réglementaire et technique. Une simple majorité est désormais suffisante.
(…)
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.128
Document 91 : la chasse aux aides aux entreprises nationales
La Commission européenne impose un contrôle plus rigoureux du respect des articles 90, 92 et 93 du Traité de
Rome relatifs aux aides publiques nationales qui créeraient des distorsions au sein de la concurrence
intracommunautaire sur le Marché commun. (…) Les institutions tentent de limiter la marge des Etats membres
dans l’attribution des aides et des marchés publics. Le libre Blanc de Delors met au point une procédure
harmonisée pour les appels d’offres de commandes publiques afin de les rendre plus transparentes. (…)
Comme la France au début des années 1980, l’Italie restructure ses champions nationaux publics et le
gouvernement les privatise juste avant l’avènement du Marché unique. La privatisation des champions nationaux
publics lève un obstacle à la rationalisation des capacités de production au niveau européen, car elle permet des
fusions transnationales (les entreprises publiques ne peuvent acquérir des entreprises étrangères).
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.128
Document 92 : la politique de la concurrence s’attaque aux distorsions de marché entre pays membres
produites par les Etats membres
Faire disparaître les
distorsions de marché
produites par les Etats
Normes :
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Marchés publics
Aides publics
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Document 93 : la politique de la concurrence sert aussi de politique industrielle européenne
En 1990, sous l’impulsion du Commissaire allemand (…), la Commission a élaboré une communication intitulée
« la politique industrielle dans un environnement ouvert et concurrentiel » qui prône officiellement une politique
industrielle horizontale. Le Commissaire semble rejeter définitivement les politiques industrielles verticales pour
générer des champions européens. On insiste surtout sur le rôle de la concurrence et la nécessité de poursuivre
l’intégration du marché européen pour améliorer la compétitivité des firmes européennes : « l’objectif même de la
politique industrielle est de permettre à la concurrence de jouer. Tout cela est absolument étranger à une politique
industrielle interventionniste. Il ne s’agit en aucun cas de fabriquer des champions européens à qui la politique
industrielle confierait le soin de damer le pion aux japonais ou aux américains. » Cette position (…) soumet la
politique industrielle à la politique de la concurrence.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.246-279
Document 94 : l’interventionnisme européen en faveur des entreprises passe par la création de normes et
l’activation des articles 6 et 19 du Gatt
Si les institutions communautaires ne promeuvent pas ouvertement une politique industrielle « verticale »
européenne, on peut constater une utilisation stratégique de certains outils pour renforcer la position de grandes
firmes européennes face à la concurrence extracommunautaire. Le premier est la création de normes et standards
techniques européens qui constituent des barrières techniques vis-à-vis de la concurrence extracommunautaire. (…)
Par exemple, la création du standard techniques européens pour la télévision HD ou bien la réglementation
européenne des produits chimiques REACH (2000).
Certains outils défensifs de la politique commerciale peuvent être utilisés (…). Les dispositions anti-dumping qui
permettent d’imposer des tarifs douaniers supplémentaires peuvent être utilisées de manière abusive pour protéger
des firmes européennes. L’Europe a eu recours à une politique commerciale de contingentements de voitures
japonaises et de contenu local au cours des années 1980-1990 pour protéger le secteur automobile européen.
Certaines analyses mettent en évidence une utilisation stratégique des outils de la politique commerciale
européenne pour protéger des secteurs en particulier, notamment des secteurs intensifs en R&D.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.246-279
Document 95 : vers une libéralisation progressive du secteur agricole, une première grande réforme de la
PAC en 1992
La réforme de 1992 a visé à davantage axer la PAC sur le marché. Elle a cherché à diminuer son poids budgétaire
en baissant les prix garantis (aides indirectes assurant un prix minimum pour leur production) et en compensant
cela par des paiements directs aux producteurs, proportionnels à la taille des exploitations. Elle a aussi voulu
trouver un accord avec les partenaires commerciaux de l’UE dans le cadre de l’Uruguay round (1987-1994). Une
nouvelle réforme a eu lieu en 1999 dans le cadre de l’Agenda 2000, qui fixait les perspectives budgétaires pour les
années 2000-2006 en tenant compte des conséquences de l’élargissement à l’Est. Cette réforme comprenant
plusieurs volets : baisse des prix garantis pour se rapprocher des prix mondiaux, compensation de cette baisse par
des aides directes ; meilleur respect de l’environnement et de la sécurité alimentaire (en réponse à la crise de la
vache folle et aux accusations de productivisme à outrance) ; incitation à la pluriactivité des agriculteurs (vente de
produits à la ferme, tourisme vert par le développement de chambre d’hôtes). A travers ces deux réformes
majeures, le poids de la PAC dans le budget européen est passé de près de 90% dans les années 1987 à 42% en
2010.
Source : Découverte de la vie publique « L’UE. Institutions et politiques », La documentation française, 2010
Document 96: en résumé
Conséquence de l’Acte unique
sur l’intégration économique
Création du marché unique (réaliser
pleinement le projet de marché commun)
Réformer la PAC : faire baisser son coût et
son poids dans le budget européen
Supprimer les distorsions et les cloisonnements entre Etats ; Mettre en
place une politique de la concurrence ; Création Espace Schengen ;
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2.1.2 De nouveaux domaines d’intervention économique pour la CEE : recherche et
développement durable
Document 97 : Les programmes de recherche scientifique
Afin de mettre en valeur le potentiel d'innovation technologique de la Communauté et de mener une politique
commune de la recherche appliquée, l'Acte unique prévoit l'établissement d'un programme cadre pluriannuel et de
programmes spécifiques.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 98 : des programmes à la taille trop modeste et aux effets dilués
A partir de 1984, un programme cadre de recherche européen est mis en place par la Commission pour favoriser la
coopération entre les unités de recherche des Etats membres et créer « un espace scientifique et technique
européen ». (…) Au sein de ces programmes cadres se développent des programmes de recherche plus spécifiques
comme ESPRIT (dans le domaine des technologies de l’information) lancé en 1983, ou (…) RACE (dans le
domaine des technologies des télécommunications). En plus des programmes-cadres, le programme Eureka voit le
jour en 1985 pour faciliter la coopération en R&D. C’est un programme intergouvernemental qui n’est pas financé
par un budget des institutions européennes, mais bien par chaque Etat membre. De plus de nombreux Etats non
membres de l’UE (le Canada par exemple) rejoignent ce programme qui comprend aujourd’hui 41 membres. Ces
programmes sont principalement destinés au secteur privé. Ainsi 65% des projets d’ESPRIT sont attribués à des
entreprises privées et financent la moitié des frais de recherche engagés par des firmes privées dans le cadre de ces
projets. Un des buts explicites de ces programmes est de favoriser l’émergence de cluster ou d’agglomérations
industrielles en matière de recherche pour créer des districts marshalliens. (…)
Plusieurs faiblesses de ces programmes ont été mises en évidence à la fin des années 1990 (…). Ces programmes
ne sont pas assez concentrés sur des pôles géographiques de recherche précis ce qui dilue leurs effets. (…) Malgré
une croissance continue depuis 25 ans, ces programmes restent peu importants comparés à l’effort de financement
de la R&D réalisé au niveau national par chaque Etat membre. Ces programmes européens n’ont jamais dépassé le
vingtième des dépenses de R&D réalisées par l’ensemble des Etats membres. En fait, ces programmes n’ont pas
réussi à véritablement construire une logique de recherche européenne. (…) Ces programmes s’inscrivent plus dans
des politiques industrielles nationales de soutien à la recherche.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.246-279
Document 99 : la politique de l’environnement
L'AUE innove aussi en élevant la politique de l'environnement au rang de politique communautaire et en associant
explicitement le développement économique à la protection de l'environnement.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
2.1.3 Approfondissement de l’intégration sociale et diplomatique
Document 100 : approfondissement des politiques sociales
L’Acte Unique renforce la dimension sociale de l’intégration européenne. Il s’agit maintenant, pour la première
fois dans un Traité, de promouvoir les conditions de travail (santé et sécurité des travailleurs), le dialogue social
entre partenaires sociaux et donc les syndicats. Cette dimension « sociale » de l’intégration européenne complète
les politiques de lutte contre les inégalités territoriales qui visent une cohésion et une convergence des régions
européennes, politiques déjà mise en place dès les années 1960 et renforcées durant la décennie 1970.
Document 101 : Vers un espace social européen
Sur le plan des innovations sociales, l'Acte unique donne aux États membres l'occasion d'affirmer leur volonté de
promouvoir la sécurité et la santé des travailleurs ainsi que le développement du dialogue social. Il concrétise ainsi,
pour la première fois dans un traité, la volonté, notamment française, d'édifier progressivement un espace social
européen.
Désireux de combler l'écart qui n'a cessé de se creuser au fil des élargissements entre les régions développées et les
régions plus pauvres de la Communauté, les États membres s'engagent à renforcer la cohésion économique et
sociale. Pour faciliter la conduite en commun de politiques sociales, la Commission se voit notamment chargée de
favoriser le dialogue entre partenaires sociaux, aux fins notamment de conventions professionnelles collectives. La
place des syndicats est ainsi reconnue par l'Acte unique.
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La Commission se charge aussi de la réforme de fonds structurels communautaires tels que le Fonds social
européen (FSE), le Fonds européen de garantie et d'orientation agricole (FEOGA) et le Fonds européen de
développement régional (FEDER).
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 102 : émergence d’une « voix » politique européenne
En matière de politique étrangère, l’Acte unique introduit l’obligation de consultation des autres Etats membres
avant l’adoption d’une position définitive. L’objectif est que les décisions entre Etats membres puissent conduire à
une position commune et donc à l’expression d’une « voix européenne » en matière diplomatique.
Document 103 : La coopération politique européenne (CPE)
L'idée d'une coopération politique européenne (CPE), envisagée depuis le début des années soixante, n'avait pu
alors se concrétiser en raison des divergences dans ce domaine entre le général de Gaulle et ses partenaires. Après
lui, face aux événements économiques et politiques internationaux, la nécessité d'un rapprochement des politiques
étrangères entre les États membres s'est progressivement imposée. Au sommet de La Haye, les 1er et 2 décembre
1969, les ministres des Affaires étrangères des Six sont chargés d'élaborer un rapport sur les possibilités de
coopération en matière de politique étrangère. (…) L'Acte unique codifie, pour la première fois, les pratiques et
procédures développées de façon progressive depuis le début des années 1970. (…) Selon l'Acte unique, les
mécanismes de la politique étrangère européenne reposent sur la consultation et sur l'information des États
membres des Communautés. L'obligation de se consulter avant d'adopter une position définitive est d'ailleurs
formalisée. L'Acte unique introduit par ailleurs le concept de "sécurité européenne".
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 104 : affirmer « l’identité » de l’Europe
Les divergences de vues entre les Six (France, RFA, Italie, Bénélux) demeuraient considérables et le « tournant »
de négociations laborieuses fut largement dû aux crises de Suez et de Budapest en 1956. La première, aboutissant
au retrait humiliant du corps expéditionnaire franco-britannique devant les injonctions des deux superpuissances,
poussa le gouvernement Mollet à accorder la priorité aux négociations européennes. La seconde réactivant les
menaces soviétiques favorisa la recherche de compromis. L’une et l’autre renforcèrent la conviction que les Etats
européens ne pourraient conserver leur rang qu’à travers une union plus étroite. A plusieurs reprises, les tensions
internationales jouèrent de la sorte en faveur du rapprochement ; essentiellement contre le bloc soviétique, mais pas
seulement. D’une manière significative, c’est sous la pression de la crise pétrolière de 1973 que la communauté
européenne renforcera les mécanismes de coopération politique et qu’elle adoptera un « document sur l’identité
européenne » afin de mieux définir sa place dans les affaires mondiales. Plus tard, la création de la PESC par le
traité de Maastricht (1992) répondra à un souci identique d’affirmer la voix européenne sur la scène internationale
face aux défis du monde post-bipolaire. Toutes ces manifestations participent à la construction d’une distinction
« européenne », vis-à-vis des ennemis comme des amis.
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010, p.10
2.1.4 L’évolution des institutions : une avancée du fédéralisme
Document 105 : les réformes institutionnelles
L’Acte unique donne une base juridique au Conseil européen créé de façon pragmatique en 1975. Dans le même
temps, le pouvoir législatif du Parlement européen s’accroît : il peut rejeter des décisions du Conseil et amender des
propositions de la Commission. En outre, les domaines de vote à la majorité qualifiée au sein du Conseil des
ministres sont élargis, ce qui fait reculer les prises de décisions à l’unanimité.
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Document 106 : évolution des institutions politiques européennes
Renforcement de la dimension
Décisions prises par l’Acte unique :
Intergouvernementale
Supranationale
- évolution du rôle/place de
certaines institutions
- évolution des modalités de vote au
sein du Conseil
Renforcement du poids des intérêts
de l’Europe ou des nations ?
Document 107 : en résumé (nb : souligné par moi)
Les termes du Préambule du traité CEE (établir et approfondir les « fondements d’une union sans cesse plus étroite
entre les peuples européens ») ont conduit les acteurs à privilégier l’action économique. Le processus d’intégration
s’est ainsi développé de manière inégale de telle sorte que l’édifice européen est quelque peu déséquilibré entre ses
piliers économique et politique.
L’objectif du Marché unique fut essentiellement la poursuite de ce qui n’avait pas été achevé par le Marché
commun : l’échéance 1993 est une nouvelle étape dans la libération des échanges après l’échéance 1968. Celle-ci
réalisée en effet l’Union douanière avec 18 mois d’avance sur l’échéance prévue par le traité de Rome. Le
commerce intracommunautaire s’en trouva stimulé ainsi que la part des échanges de chacun des Etats membres
avec ses partenaires. Néanmoins, la persistance d’entraves non tarifaires a freiné l’extension de la libération des
échanges pendant les années 1970. C’est donc une nouvelle fois dans une perspective de libéralisation économique
que la dynamique communautaire est relancée à partir de 1985. Officiellement, la libre circulation est le principe
constitutif de cet « espace sans frontières intérieures » posé comme objectif à réaliser avant le 31 décembre 1992
(article 13 de l’Acte unique européen de 1986). En pratique ce sont les libertés économiques qui vont être
privilégiées dans un souci d’amélioration des performances économiques et de soutien à la croissance : libre
circulation des marchandises, libre prestations des services et libération des mouvements de capitaux sous la
surveillance de la Commission afin de maintenir, selon les termes du traité de Maastricht « un système de marchés
ouverts et concurrentiels ». A l’examen, la tâche est encore loin d’être achevée. Malgré des avancés notables, le
Marché Unique reste encombré de multiples obstacles (surtout dans le domaine des services) et demeure encore
pour longtemps un objectif en construction (…)
Avec la construction d’une Union douanière, le traité CEE mettait au premier rang des priorités le rapprochement
des économies et des législations nationales des Etats membres. Initialement c’est l’instrument des « politiques
communes » qui devait constituer le point avancé de ce rapprochement. Il s’agissait alors, à travers la réalisation de
marchés communs sectoriels, de profiter des effets positifs de la libéralisation tout en conservant la capacité de
protéger des intérêts nationaux jugés essentiels. La référence aux « politiques communes » était le reflet d’une
conception plus générale du développement économique qui restait méfiante à l’égard d’un système généralisé de
libre concurrence. Ce n’est donc pas un hasard si, sous la pression française, l’agriculture, dont on souhaitait mais
aussi craignait l’exposition trop brutale à la concurrence étrangère, fut le premier secteur à être organisé en une
« politique commune ». (…) Contraignante, lourde et coûteuse, la PAC pouvait difficilement servir de modèle à
l’action communautaire au fur et à mesure de son élargissement. (…) Néanmoins, à l’exception de la politique
monétaire dirigée vers l’établissement d’une « monnaie unique », c’est dans une direction beaucoup plus libérale
que se sont orientées les méthodes communautaires. Pour des raisons tenant à la déréglementation venue des EtatsUnis et aux limites budgétaires imposées par les Etats membres, la conception traditionnelle des « politiques
communes » a été abandonnée au profit de mesures d’accompagnement, de coordination et de soutien destinées à
stimuler plus efficacement et plus souplement la compétitivité économique (tel est l’esprit de la stratégie dite de
Lisbonne lancée en 2000 et de la méthode ouverte de coordination ; instrument destiné à rapprocher de manière
non contraignante les politiques publiques qui restent de la compétence des Etats). L’évolution du système
communautaire semble donc tendue vers l’intégration de l’Europe dans le marché mondial à travers un vaste
exercice de « déréglementation concurrentielle ».
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010
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Document 108 : les objectifs de l’Acte unique
Finaliser le
marché commun
Elargir les politiques
communautaires dans les
domaines éco, social et
environnemental
Développer le vote à la
majorité qualifié et le rôle
du Parlement
Coordonner les
politiques étrangères
avec la CPE
Produire de la
_____________
économique
Donner plus de
_____________ au niveau
européen
Faire apparaître un
« __________ européen »
Faire apparaître une
« _________
européenne »
Aller vers l’Union européenne :
favoriser une logique fédérative
2.2 Le Traité de Maastricht (1992) : le Traité « sur l’Union européenne »
2.2.1 L’UE fondée sur trois piliers
Document 109
Le traité sur l’Union Européenne est signé à Maastricht le 7 février 1992. Il est la conséquence de l’Acte unique et
prépare la réalisation de l’Union Economique et Monétaire (UEM). Il est structuré en trois piliers. Le premier,
qualifié de communautaire, regroupe la CEE, la CECA et la CEEA. Les deux autres traitent respectivement de la
politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et de la coopération dans les domaines de la justice et des
affaires intérieures (JAI).
Le pilier communautaire : la Communauté européenne. Les domaines d’intervention économiques de la
Communauté européenne s’élargissent : aux politiques commerciales et de la concurrence européennes, à la PAC,
aux interventions dans les domaines des infrastructures, de la recherche, de l’environnement, de l’énergie se
rajoutent désormais des interventions dans celui de l’emploi, de l’éducation, de la culture, du tourisme.
La Communauté européenne agit également depuis longtemps dans les domaines de la cohésion sociale et des
inégalités territoriales. La politique régionale s’appuie désormais sur ce que l’on appelle les « fonds structurels »
qui regroupent le FEDER, le FSE et une partie des fonds de la PAC.
Les deux autres piliers intergouvernementaux : PESC et JAI. Dans le prolongement des décisions prises dans
le cadre de l’Acte Unique, le Traité de Maastricht instaure la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) :
il s’agit de la mise en œuvre d’une politique commune élaborée à l’unanimité par le Conseil des ministres des
Affaires étrangères. C’est une politique intergouvernementale. Cette PESC permet le développement d’une activité
diplomatique européenne à l’échelle mondiale. Elle se heurte très rapidement à des difficultés. Lors de la guerre en
ex-Yougoslavie (1991-2001) par exemple, les pays membres n’arrivent pas à adopter une position commune,
chacun continuant de parler par sa propre voix. Avec le marché commun, certaines pratiques illégales peuvent
désormais se constituer sur tout le territoire de la Communauté européenne (immigration illégale, terrorisme, trafic
d’armes et d’œuvre d’art, criminalité organisée). Or, les législations restent encore nationales. Le pilier Justice et
Affaires intérieures a donc pour objectif de faire coopérer les Etats sur des problématiques communes en matière
civile et pénale. La aussi, cette coopération relève du Conseil des ministres qui adopte des décisions à l’unanimité.
Il s’agit d’une politique intergouvernementale.
2.2.2 Le premier pilier de l’UE : la Communauté européenne
Document 110 : l’élargissement des compétences de la Communauté européenne
Concernant les compétences de la Communauté, les plus importantes ne sont pas modifiées : Politique agricole
commune, Union douanière, Politique des transports, Politique de la concurrence, a Politique commerciale
commune (…). En revanche, les politiques instaurées par l’Acte unique sont élargies.
La politique de cohésion économique et sociale doit réduire l’écart entre les niveaux de développement des
différentes régions et les Fonds structurels seront réformés. Un Fonds de cohésion prévu pour aider les pays dont le
ECE 2 Camille Vernet
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PNB par habitant est inférieur à 90 % de la moyenne communautaire (Espagne, Grèce, Irlande, Portugal) est mis en
service dès le 1er avril 1993. La politique de recherche et de développement technologique doit regrouper toutes les
actions dans ces domaines.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 111: de nouvelles compétences pour la Communauté européenne
La Communauté européenne bénéficie en effet de nouvelles compétences, notamment celle de promouvoir la
croissance économique dans le respect de l’environnement, mais aussi dans des domaines tels que l’emploi, la
protection sociale, la qualité de la vie et la cohésion économique et sociale.
Le traité d’Union comporte des chapitres (…) pour répondre à l’ouverture du grand marché. Ainsi, le traité sur
l'Union européenne accorde à la Communauté européenne de nouveaux objectifs en ce qui concerne notamment
l’entrée et la circulation des travailleurs dans le marché intérieur, le renforcement de la compétitivité de l’industrie,
l’éducation, l’énergie, la protection civile et le tourisme.
Il introduit en outre de nouvelles compétences communautaires dans le domaine de l'éducation et de la culture, de
la formation professionnelle, de la santé publique, de la protection des consommateurs, de la politique industrielle
et des réseaux transeuropéens.
L’établissement d’un marché intérieur est d’ailleurs complété par une Union économique et monétaire (UEM) dont
le calendrier, progressif et irréversible, est clairement fixé.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 112 : les compétences de l’UE après Maastricht
La Communauté européenne
Les compétences dans le
domaine « économique » : la
réalisation du marché intérieur
Les compétences déjà
présentes dans l’Acte unique
en dehors de la réalisation du
marché unique
De nouvelles
compétences :
Document 113 : la politique régionale (ou « structurelle ») de l’UE renforcée par l’Agenda 2000 (1997)
Le Conseil européen de Madrid (15-16 décembre 1995) qui avait décidé le passage à l’euro pour le 1er janvier
1999 (…) s’était inquiété des conséquences du prochain élargissement sur les politiques communautaires et avait
demandé à la Commission d’y réfléchir. Celle-ci, présidée par Jacques Santer, (…) a présenté, le 16 juillet 1997, un
document intitulé « Agenda 2000. Pour une Union plus forte et plus large ».
La Commission européenne propose d’améliorer l’efficacité de la politique régionale par la concentration des aides
sur des objectifs prioritaires. Les aides sont fournies par les Fonds structurels : Fonds européen de développement
régional (FEDER), Fonds social européen (FSE), Section orientation du Fonds européen d’orientation et de
garantie agricole (FEOGA), Instrument financier d’orientation de la pêche (IFOP). Ces aides ne devront pas être
réduites à la suite de l’élargissement. La concentration des aides doit se faire sur trois objectifs.
Le premier, et le plus important, est d’aider des régions en retard de développement (dont le produit intérieur brut
(PIB) représente moins de 75 % de la moyenne communautaire). Tous les pays membres en comptent mais les plus
importantes sont des régions situées à la périphérie de l’Union : Grèce, Italie du Sud, Sardaigne, Corse, Portugal,
majeure partie de l’Espagne, Irlande, Pays de Galles, Écosse, régions septentrionales de la Suède et de la Finlande,
Länder de l’ex-Allemagne de l’Est. S’y ajoutent les départements français d’outre-mer, les Açores, Madère et les
îles Canaries.
Le second objectif est d’aider à sortir de la crise les régions des États membres où les mutations économiques ont
provoqué le chômage. L’ensemble de ces régions en difficultés structurelles représente 18 % de la population de
l’Union.
Le troisième objectif vise à aider les populations à se préparer aux changements économiques et à s’y adapter en
finançant des actions nationales contre le chômage, l’accès au marché du travail, en particulier pour les femmes et
la formation professionnelle.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
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2.2.3 Le deuxième pilier : la politique étrangère et de sécurité commune (PESC)
Document 114 : le contexte géopolitique de l’intégration politique des années 1990
La coopération politique européenne, initialement tenue en échec avec le rejet de la CED, n’avait pas trouvé sa
place. Les propositions du Général De Gaulle visant à établir une coopération politique entre les six Etats membres
(plans Fouchet 1961 et 1962) s’étaient heurtées à la résistance des plus petits Etats et avaient dû être abandonnées.
(…) C’est seulement (…) à la fin des années 1960 que de nouveaux projets de coopération politique seront
ébauchés. La guerre du Kippour et le premier choc pétrolier faciliteront une première réalisation tangible : la
création du Conseil européen (1974), chargé de traiter, au niveau des chefs d’Etat et de gouvernement, des
problèmes communautaires et des questions de coopération politique. Simple formalisation des « sommets »
inaugurés dès 1961, la pratique des Conseils européens demeurera inchangée pendant plusieurs années et sera
seulement codifiée par l’Acte unique européen en 1986. (…) Ces rappels soulignent les maigres développements de
la Communauté politique européenne depuis les années 1950 et le fait qu’aucune avancée significative n’était
vraiment prévisible avant 1989. L’objectif des pays de la Communauté était alors tout entier consacré à parfaire
l’Union économique et monétaire (UEM).
C’est la chute du mur de Berlin et l’inquiétude sur l’orientation future de l’Allemagne qui entraînèrent une révision
des positions françaises et qui déclenchèrent une initiative franco-allemande préconisant l’ouverture d’une (…)
conférence intergouvernementale sur l’Union politique.
Les travaux de cette conférence (…) aboutiront au traité de l’Union européenne, signé à Maastricht le 7 février
1992. Les dispositions relatives à la définition et la mise en œuvre d’une « politique étrangère et de sécurité
commune » (PESC) répondent directement au souci de réduire les incertitudes d’une conjoncture internationale.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 115 : la PESC face à la guerre en ex-Yougoslavie
Paradoxalement, cette avancée de la communauté politique européenne, immédiatement confrontée à l’éclatement
de la Yougoslavie, se retournera, pour beaucoup, en constat de faillite : reconnaissance des Etats de l’exYougoslavie en ordre dispersé (l’Allemagne prendra l’initiative), lenteurs des initiatives diplomatiques, manque de
fermeté à l’égard des serbes, attesteraient l’insignifiance de l’Union européenne.
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010, p.16-17
Document 116 : les résultats décevants de la PESC
Les résultats obtenus par la PESC dans les années suivant le traité de Maastricht ont été limités. (…) La déception
la plus vive est celle relative au conflit yougoslave. Les États membres n’ont pas été d’accord pour intervenir dès le
début du conflit. Ensuite ils ont fourni des contingents à l’ONU et à l’OTAN pour intervenir et imposer un
règlement de paix, mais n’ont pas utilisé le « bras armé » de l’Union de l’Europe occidentale. L’Union européenne
a ainsi donné l’impression d’être incapable de prévenir et de régler un conflit survenant à sa porte. (…)
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 117 : des réalisations positives
Sur un plan plus général, la PESC a permis de développer une activité diplomatique à l’échelle mondiale. L’Union
européenne a engagé un dialogue politique avec de nombreux États, en particulier avec les pays candidats à
l’adhésion pour mieux les préparer. (…) L’Union européenne a développé une stratégie globale envers certaines
zones géographiques et établi des contacts avec les organisations régionales d’Asie, d’Afrique, d’Amérique latine.
Elle a engagé une action d’association euro-méditerranéenne (Conférence de Barcelone, 1995). Elle a maintenu la
position commune sur le conflit israélo-arabe (…) reconnaissant les droits du peuple palestinien comme ceux
d’Israël.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 118 : le fonctionnement de la PESC
Le traité sur l’Union européenne comporte donc un « pilier » Politique étrangère et de sécurité commune de nature
strictement intergouvernementale. (…)
Le traité prévoit la « coopération systématique entre États membres sur les questions de politique étrangère et de
sécurité ». Le Conseil des ministres des Affaires étrangères peut définir à l’unanimité une « position commune »
dans les domaines présentant un intérêt commun, position à laquelle les États doivent conformer leur politique
nationale. Lorsque les États membres ont des « intérêts importants en commun » et en fonction des orientations
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données par le Conseil européen, le Conseil peut décider à l’unanimité d’une « action commune », dont il définit
les objectifs et les moyens (…).
Dans le domaine de la PESC, la Commission n’a pas, comme dans les affaires communautaires, le monopole des
propositions sur lesquelles le Conseil doit décider. (…) Les moyens économiques de politique étrangère (aides,
embargos, négociations commerciales) restent de son ressort. Elle est donc forcément impliquée. Le Parlement est
informé, (…) mais son rôle n’est que consultatif. (…)
Pour la mise en œuvre de la PESC, l’Union, qui ne dispose pas d’une représentation diplomatique propre, doit
coordonner les représentations diplomatiques et consulaires des États membres dans les pays tiers et au sein des
différentes organisations internationales, en particulier au Conseil de sécurité de l’ONU et dans les différentes
organisations des Nations unies. L’Etat exerçant la présidence semestrielle du Conseil, représente l’Union pour les
matières relevant de la PESC. (…)
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 119 : le fonctionnement du pilier PESC
PESC
Objectif ?
Conseil
Commission
Parlement
Rôle ?
Un
pilier :
intergouvernemental
ou supranational ?
2.2.4 Le troisième pilier : Justice et Affaires Intérieures
Document 120 : les conséquences de l’ouverture des frontières
La mise en œuvre du marché unique avec la suppression des contrôles aux frontières intérieures posait le problème
des conséquences de la libre circulation des personnes. Il fallait éviter que le grand espace européen ne favorise des
trafics illégaux d’un pays à l’autre ou en provenance de pays tiers. Il fallait que les dispositions législatives et
réglementaires nationales des États membres, souvent très différentes, soient coordonnées dans les domaines de
l’immigration, de la lutte contre le terrorisme, le trafic de drogue, d’armes et d’œuvres d’art, la criminalité
organisée. Certes une certaine coopération intergouvernementale s’était déjà développée dans les domaines policier
et juridique, mais de façon très insuffisante. Lors des négociations du traité de Maastricht, le chancelier Kohl
insista sur la nécessité de mieux contrôler les mouvements de population, l’Allemagne ayant été obligée
d’accueillir de nombreux immigrés d’Europe de l’Est. (…) Le traité sur l’Union européenne répond à ces
préoccupations en instituant un troisième pilier intitulé « Justice et Affaires intérieures » (JAI). (…)
Des domaines d’intérêt commun sont énumérés : politique d’asile, règles régissant le franchissement des frontières
extérieures de l’Union, politique d’immigration et politique à l’égard des ressortissants des pays tiers, lutte contre
la toxicomanie et la fraude de dimension internationale, coopération judiciaire en matière civile et pénale,
coopération douanière et policière. Il est toutefois bien précisé que les États membres conservent les responsabilités
du maintien de l’ordre public et de la sauvegarde de la sécurité intérieure. (…)
S’agissant de matières très sensibles relevant de la souveraineté, c’est la méthode intergouvernementale qui est
employée. (…) Le Conseil des ministres adopte à l’unanimité des positions communes et peut décider des actions
communes.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 121 : le fonctionnement du pilier JAI de l’UE
JAI
Objectifs ?
Rôle
Un
pilier :
intergouvernemental
ou supranational ?
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Conseil
Commission
Parlement
32
Document 122 : les conséquences de la création du marché unique sur la coopération diplomatique et
judiciaire entre les pays membres
Communauté
européenne
Compétences
économiques
Marché unique
Europe sans frontières
intérieures
Europe frontière extérieure
commune
Nécessité coopération :
________
Nécessité coopération :
_________
2.2.5 L’évolution des institutions: un poids plus important du pôle supranational dans la
Communauté économique mais un poids plus important du pôle intergouvernemental
dans l’ensemble des trois piliers
Document 123
Le traité de Maastricht élargit le champ des décisions prises à la majorité qualifiée au sein du Conseil des
ministres : règles du marché commun, éducation, santé, emploi, formation, protection des consommateurs, … Mais
il maintient le vote à l’unanimité dans certains domaines comme les révisions des traités, l’admission des nouveaux
Etats membres, la fiscalité (et donc le budget de l’Etat), la culture, l’environnement, …
Le traité renforce le poids de le Commission puisque le vote à la majorité qualifiée fait automatiquement augmenter
les chances d’adoption par le Conseil des ministres des propositions de la Commission.
Il donne également au Parlement le pouvoir de nommer les membres de la Commission qui sont proposés par le
Conseil européen. Enfin, il crée la procédure de « co-législation » (ou codécision législative). Dorénavant, dès que
le Conseil des ministres prend une décision à la majorité qualifiée, le Parlement vient confirmer par un vote à la
majorité absolue cette décision. Mais le Parlement peut aussi être en désaccord avec le vote du Conseil, ce qui
implique que le texte retourne au Conseil des ministres qui élabore une nouvelle décision de nouveau examinée par
le Parlement.
Document 124 : un Traité sur l’UE qui ne tranche pas entre Europe des Nations et Europe fédérale
Le traité est intitulé « sur l’Union européenne » et non « d’Union européenne ». Ce n’est pas une constitution
définitive, mais une étape dans le processus évolutif d’intégration européenne. (…) L’objectif fixé est « une union
sans cesse plus étroite entre les peuples de l’Europe » (…). La formule « Union à vocation fédérale » demandée
par la majorité des délégations n’a pu être adoptée en raison de l’opposition britannique, alors que plusieurs des
objectifs déclarés de l’Union ont une connotation fédérale (monnaie commune, espace sans frontières intérieures,
citoyenneté, politique étrangère et de défense commune). Il est précisé que « l’Union respecte l’identité nationale
de ses États membres ».
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 144 : l’évolution du rôle des institutions dans le cadre de la politique communautaire
Au Conseil des ministres, qui prend les décisions, l’usage de la majorité qualifiée – déjà étendue par l’Acte unique
à la réalisation du grand marché – a été étendu à de nombreux secteurs des nouvelles politiques de la Communauté
(éducation, santé, formation professionnelle, protection des consommateurs, politique sociale…) (…). L’unanimité
est maintenue pour les dispositions constitutionnelles (révision du traité, admission de nouveaux États membres,
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ressources propres du budget communautaire…), et aussi pour certaines politiques (cohésion économique et
sociale, fiscalité, programme cadre de recherche, industrie, culture, environnement…). .(…)
La Commission voit son rôle renforcé par la pratique même du vote majoritaire au Conseil puisque ses
propositions, dont elle a le monopole ont davantage de chances d’être adoptées. De plus, sa légitimité démocratique
est accrue par le fait que le Parlement européen élu au suffrage universel a désormais un droit de regard sur sa
nomination par les gouvernements et d’approbation du nouveau collège, qui se présentera devant lui avec son
programme.
C’est le Parlement européen qui bénéficie le plus des réformes institutionnelles apportées par le traité d’Union
européenne. Outre l’accroissement de son rôle dans la nomination de la Commission, il bénéficie de l’extension de
la procédure d’ « avis conforme », c’est-à-dire du droit d’approuver ou de refuser les décisions du Conseil dans
certains domaines importants (…). Elle ne s’applique pas aux politiques communes (politique agricole, politique
commerciale).
De plus grande portée est l’instauration, par le traité de Maastricht, d’une procédure supplémentaire, celle de la
« codécision législative ». Ce processus complexe vise à renforcer le droit d’amendement du Parlement. (…) Pour
parvenir à un accord, celui-ci doit être approuvé par la majorité qualifiée du Conseil et la majorité absolue du
Parlement. Sinon, la proposition n’est pas adoptée. Le Parlement se voit donc reconnaître le droit au dernier mot.
Mais le champ de cette procédure est strictement limité à certaines mesures : celles concernant le marché intérieur
(…) qui sont déjà pratiquement entrées en vigueur (liberté de circulation et d’établissement, rapprochement des
législations…), et celles relatives à la recherche, l’environnement, l’éducation, la culture, la santé, qui concerne
directement les citoyens, mais où l’action communautaire se limite le plus souvent à compléter les actions
nationales.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 125 : évolution des institutions dans le Traité de Maastricht
Conseil
Commission
votes à la majorité votes à l’unanimité
qualifiée
Parlement
Evolutions
Renforcement du pôle
intergouvernemental
ou supranational ?
Document 126
La cohésion de ces piliers de nature différente (le premier communautaire, les deux autres intergouvernementaux)
doit être assurée par un cadre institutionnel unique comprenant le Conseil européen des chefs d’État et de
gouvernement dont le rôle est de donner à l’Union les orientations et les impulsions, le Conseil des ministres, la
Commission, le Parlement, la Cour de justice.
En fait, c’est le Conseil qui va jouer le rôle essentiel car il est compétent pour les trois piliers tandis que la
Commission, tout en étant associée à toutes les activités du Conseil, n’a le monopole de proposition que pour les
affaires communautaires. Le Parlement n’a qu’un rôle consultatif pour les deuxième et troisième piliers et la Cour
de justice en est pratiquement exclue.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
ECE 2 Camille Vernet
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Document 127 : les trois piliers de l’UE, quel poids respectif pour le pôle intergouvernemental ou
supranational ?
Pole communautaire
Pole PESC
Pole JAI
Conseil européen : rôle
d’impulsion ?
Commission :
- rôle d’initiative des
textes ?
- rôle d’exécution des
décisions ?
Conseil : rôle législatif
Parlement : rôle législatif ?
Décisions de nature ?
intergouvernementale ou
supranationale ?
2.2.6 De nouvelles vagues d’élargissement : de l’UE 12 à l’UE 15
Document 128 : trois nouveaux pays membres
L’Autriche est la première à se prononcer dès le 12 juin, avant même la signature du traité d'adhésion, avec une très
forte majorité: 66,6 % de «oui» avec une participation de 82,3 % des électeurs inscrits. La Finlande suit le 16
octobre avec 56,9 % de «oui» (74 % de participation) et la Suède le 13 novembre avec 52,2 % de «oui» (82,4 % de
participation).
Les institutions de l’Union européenne sont alors modifiées pour accueillir les trois nouveaux membres. Chacun
d’entre eux aura un commissaire. Au Parlement européen, la Suède aura 22 députés, l’Autriche 21 et la Finlande
16. Au Conseil des ministres, l’Autriche et la Suède auront 4 voix chacune et la Finlande 3. Le 1er janvier 1995,
l’Union européenne passe donc de douze à quinze États membres. Ce sont les Quinze qui vont se charger de la
mise en œuvre du traité sur l'Union européenne entré en vigueur le 1er novembre 1993.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
2.3 Le passage vers l’Union Economique et Monétaire
Document 129: qu’est-ce que l’Union économique ?
S'agissant de l'union économique, le rapport Delors la ramène à la réunion de quatre éléments:
- un marché unique à l’intérieur duquel les personnes, les biens, les services et les capitaux peuvent circuler
librement;
- une politique de concurrence et d’autres mesures visant à renforcer les mécanismes du marché;
- des politiques communes visant à l’ajustement structurel et au développement régional;
- et une coordination de la politique macro-économique, comprenant des règles contraignantes en matière
budgétaire.
Sur le plan institutionnel, le rapport recommande l'attribution de la responsabilité de la politique monétaire unique
à une nouvelle institution, une banque centrale européenne. Celle-ci, ainsi que les banques centrales nationales,
seraient insérées dans un Système européen de banques centrales (SEBC) fonctionnant selon un schéma fédéral.
Source : http://www.cvce.eu/
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Le projet d’UEM
Union « économique »
Union « monétaire »
Marché unique
Monnaie unique
Politiques économiques
Une politique monétaire
européenne
Une Politique de
la concurrence
européenne
Des politiques
communes
(notamment
structurelles)
Coordination des
politiques
macroéconomiques
nationales (budget,
protection sociale,
…)
2.3.1 Les étapes du passage à la monnaie unique
Document 130
Au Conseil européen d’Hanovre (1988), la réalisation d’une Union Economique et Monétaire est confirmée.
Le Conseil de Madrid (1989) définit les moyens d’y parvenir.
La réalisation de l’UEM est l’objectif principal du Traité de Maastricht. Dans l’esprit de ce texte, tous les pays de
la Communauté européenne vont adopter la monnaie unique : la zone euro doit couvrir l’Union tout entière. Les
dérogations accordées à l’époque à l’Angleterre et le Danemark sont, à l’époque, considérées comme temporaires.
Les deux institutions qui jouent un rôle essentiel dans le passage à la monnaie unique sont le Conseil des ministres
des Affaires Economiques et des finances (ECOFIN) et le Conseil européen. L’ECOFIN met en œuvre les grandes
orientations de politiques économiques, surveille leur respect par les Etats et oriente la politique de change. Le
Conseil européen débat quant à lui de ces grandes orientations, nomme le président de l’Institut Monétaire
Européen (création de l’IME en 1994), puis celui de la Banque Centrale Européenne (création de la BCE en 1998)
et les autres membres du directoire. Le passage à la monnaie unique est donc avant tout l’affaire des Etats
membres.
Le passage l’UEM se fait en 3 étapes :
- durant la première la circulation des capitaux est instaurée ;
- durant la seconde les futurs Etats membres suivent les critères de convergence ;
- durant la troisième les monnaies nationales sont remplacées par l’euro.Le 1 ier juillet 2002, les espèces en
monnaies nationales n’ont plus cours légal.
Document 131
Conseil (Ecofin)
Conseil européen
Fonctions dans le passage à la
monnaie unique
Document 132 : les dates de la monnaie unique
1994 Création de l’Institut monétaire européen
1996 Adoption du nom de l’euro et détermination du scénario de passage à la monnaie unique au Conseil
européen de Madrid
1998 Création de la BCE
1998 Détermination du taux de conversion des monnaies devant fusionner
1999 L’euro devient monnaie officielle
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2002
Introduction des pièces et des billets en euro
Source : J.Y.Letessier, J.Silvano et R.Soin « L’Europe économique et son avenir », A.Colin, Cursus, 2008, p.92
Document 133 : les trois étapes du passage à l’UEM et le rôle centrale du pôle intergouvernemental
La première étape du passage à l’UEM, ouverte dès le 1er juillet 1990, avait instauré la libre circulation des
capitaux, le renforcement de la surveillance multilatérale de la conjoncture et la convergence des politiques
macroéconomiques. Mais sa mise en œuvre a été difficile en raison du ralentissement de l’activité de 1991 à 1993,
et de la crise rencontrée par le Système monétaire européen (SME) (spéculation sur la Livre et la Lire, sortie du
SME de la livre …).
Le passage à la seconde étape de l’UEM se fait, selon le traité de Maastricht, le 1er janvier 1994.
C’est une phase de préparation au passage à la monnaie unique par la coordination des politiques monétaires des
États membres et par la surveillance des politiques économiques de ceux-ci afin de favoriser leur convergence. (…)
La coordination des politiques monétaires, elle doit être assurée par le Conseil des ministres de l’Économie et des
Finances qui fixe (…) « les grandes orientations » et veille à leur respect par les États membres de l'Union
européenne. La Commission est chargée de la surveillance (…)
La troisième phase de l’UEM commencera le 1er janvier 1999 avec la fixation irrévocable des rapports de change
entre les monnaies nationales et avec la monnaie unique, celle-ci devenant d’usage pour les opérations
commerciales et bancaires. Billets et pièces seront mis en circulation dans le public au 1er janvier 2002 et
coexisteront avec les espèces de monnaies nationales jusqu’au 1er juillet 2002, date à laquelle ces dernières
n’auront plus cours légal. (…)
Reste à trouver un nom pour la nouvelle monnaie européenne qui va succéder à l’ECU (European Currency Unit)
unité de compte du SME. Les Français préfèrent garder le mot « écu » rappelant l’ancienne pièce française, mais
les Allemands rappellent que, depuis sa création, l’ECU a perdu 40 % de sa valeur et qu’il ne faut pas consacrer
ainsi une monnaie dépréciée alors qu’on va abandonner le mark. D’autres noms sont avancés, présentant tous des
inconvénients. Finalement, sur la suggestion de Felipe González Márquez, Premier ministre espagnol, c’est le mot
« euro », le même dans toutes les langues de l’Union, qui est adopté par les Quinze. Un progrès décisif est ainsi fait
dans la voie conduisant à la monnaie unique. Le calendrier est fixé, le nom est trouvé, la Commission inventant le
logo €, formé d’un E barré de deux traits horizontaux symboles de stabilité,
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
2.3.2 Les critères de convergence et le Pacte de Stabilité et de croissance
Document 134 : les critères de convergence (Traité de Maastricht, article 140)
Les critères de convergence doivent permettre d’atteindre les objectifs suivants :
- la réalisation d’un degré élevé de stabilité des prix : un taux d’inflation moyen qui ne dépasse pas de plus
de 1,5% celui des trois Etats membres présentant les meilleurs résultats en matière de stabilité des prix ;
- le critère de convergence des taux d’intérêt : un Etat a un taux d’intérêt nominal moyen à long terme qui
n’excède pas 2% de celui des trois Etats membres présentant les meilleurs résultats en matière de stabilité
des prix ;
- le respect des marges normales de fluctuations prévues par le mécanisme de taux de change (pendant au
moins deux ans), sans dévaluation de la monnaie par rapport à l’euro ;
- le caractère soutenable de la situation des finances publiques : le déficit public ne dépasse pas (sauf cas
exceptionnel et temporaire) 3% du Pib ; la dette publique ne dépasse pas 60% du Pib.
Les critères de Maastricht sont encore d’application pour les Etats membres désireux de rejoindre la zone euro
puisqu’ils doivent les respecter sous la surveillance de l’eurosystème.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.478-529
Document 135 : la coordination des politiques budgétaires à travers le Pacte de Stabilité et de croissance de
1997
Dans le Traité de Maastricht, l’autre grand outil de politique macroéconomique, la politique budgétaire, reste sous
le contrôle exclusif des Etats membres. Des Etats pourraient donc adopter des comportements de free riders. Ils
pourraient se lancer dans des dépenses publiques inconsidérées, générant ainsi de l’inflation et faisant remonter les
taux d’intérêt de l’ensemble de la zone euro, mais de manière beaucoup plus diluée que s’il s’agissait uniquement
de leur propre monnaie (…). Les autres Etats subiraient les effets dilués de cette inflation et de ces hausses de taux
d’intérêt engendrées par le comportement du seul free rider alors qu’eux auraient correctement maîtrisé leurs
dépenses publiques. Ce risque est clairement identifié par plusieurs membres du Comité Delors. Pour lutter contre
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37
ce risque, le gouvernement allemand (…) impose sans difficulté le Pacte de stabilité et de croissance dans le Traité
d’Amsterdam de 1997. Celui-ci fixe des amendes aux Etats de la zone euro qui auraient un déficit persistant de plus
de 3% du PIB.
Source : J.C.Defraigne « Introduction à l’économie européenne », De Boeck, 2014, p.478-529
Document 136
Surveillance des politiques économiques nationales dans le cadre du passage à la
monnaie unique
Politique monétaire
Politique de change
Politique budgétaire
Objectif
de
coordination
convergence
Compétence
nationale ?
la
/
Document 156 : répartition des compétences dans le cadre de l’UEM
Politique monétaire
Politique budgétaire
européenne
ou
2.3.3 Le traité d’Amsterdam (1997) et l’approfondissement de la citoyenneté européenne
Document 137 : la citoyenneté européenne
Le Traité de Maastricht signé en 1992 prévoit d’être révisé en 1996. Cette révision aboutit au Traité d’Amsterdam
signé en juin 1997. Ce traité fait explicitement référence aux droits de l’homme (principes de liberté, de démocratie
et d’Etat de droit). Le respect de ces principes devient une condition de l’adhésion à l’Union européenne. Il élargit
les droits associés à la citoyenneté européenne. La citoyenneté européenne se superpose à la citoyenneté nationale,
mais qui ne la remplace pas. On parle de citoyenneté de superposition. Les Etats sont toujours souverains dans
l’octroi de la nationalité. Cette citoyenneté européenne s’accompagne de nouveaux droits comme par exemple le
droit de circuler, de séjourner, de travailler et d’étudier sur le territoire des autres pays membres ou le droit de vote
et l’éligibilité aux élections municipales et au Parlement européen dans l’Etat membre de résidence.
Document 138 : la citoyenneté européenne, une citoyenneté de superposition
Est citoyen de l’Union toute personne ayant la nationalité d’un Etat membre. Institué par le traité de Maastricht et
complétée par le traité d’Amsterdam, la citoyenneté de l’Union complète mais ne remplace pas la citoyenneté
nationale. Elle constitue un lien entre les citoyens et l’UE destiné à favoriser l’identification des citoyens à l’UE et
le développement d’une opinion publique et d’une identité européennes. (…) La définition de la nationalité
demeure la prérogative exclusive des Etats membres. l’UE n’a aucune compétence à la matière. (…) La délivrance
du passeport européen, qui permet aux ressortissants de l’UE de se rendre à l’étranger, continue de relever des
autorités nationales. (…)
Les citoyens européens disposent de droits liés à leur citoyenneté et garantis par les traités :
- le droit de circuler et de séjourner, de travailler et d’étudier sur le territoire des autres pays membres ;
- des droits civiques et politiques : droit de vote et d’éligibilité (élu municipal seulement) aux élections
municipales et du Parlement européen dans l’Etat membre où ils résident, droit de pétition devant le p-PE ;
- certaines garanties juridiques : la protection diplomatique et consulaire par un autre Etat membre sur le
territoire d’un pays tiers nombre membre de l’Union européenne, le droit d’adresser au Médiateur européen
une plainte contre acte de mauvaise administration commis par une institution européenne.
source : vie publique
Document 139 : le renforcement du rôle du Parlement
Les innovations les plus marquantes du traité d’Amsterdam se situent dans le domaine des rapports de l’Union
européenne avec ses citoyens. Les droits de l’homme sont explicitement mentionnés ainsi que les principes de
liberté, de démocratie et d’État de droit. Leur respect devient une condition d’adhésion à l’Union. Les
manquements pourront être sanctionnés par le Conseil. (…)
Quant aux institutions de l’Union, des progrès sont réalisés dans la voie de la démocratisation avec l’extension des
pouvoirs du Parlement européen. La codécision législative avec le Conseil est étendue à des domaines nouveaux et
sa procédure est simplifiée. (…) La Commission est renforcée sur le plan politique par le rôle accru du Parlement
dans la désignation de son président et de ses membres. (…)
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
ECE 2 Camille Vernet
N.Danglade 2016-2017
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3. La décennie 2000 et le traité de Lisbonne
3.1 La coordination des politiques économiques : méthode coercitive et méthode ouverte
Document 140
Une fois l’UEM réalisée, se pose la question des politiques nationales qu’il faut coordonner et comment. Dans le
domaine budgétaire, dont les Etats conservent l’entière souveraineté, les Etats membres conviennent dès 1995
(Conseil européen de Madrid) de la mise en œuvre d’un Pacte de Stabilité et de Croissance. Ce PSC reprend les
règles de finances publiques établies avec les critères de convergence. La Commission est chargée de la
surveillance de ce PSC et c’est l’ECOFIN qui prend les décisions de sanctions à la majorité qualifiée en cas de non
respect. Mais comme l’écrit Jean Tirole « Pour ce qui est de la surveillance, les ministres des finances européens
ont échoué à sanctionner les nombreuses violations du Pacte de Stabilité et de Croissance (68 avant même le début
de la crise grecque). Aucune de ces violations n’a donné lieu à la moindre intervention » (Economie du bien
commun, 2016).
A côté de cette forme « coercitive » de coordination par la règle des politiques publiques, les Etats membres
construisent des formes plus ouvertes et incitatives de coordination. Au Conseil européen de Lisbonne (2000), ils
proposent de s’appuyer sur la méthode ouverte de coordination. Cette forme de coordination répond à la question
suivante : comment promouvoir de nouvelles politiques européennes lorsque le nombre d’Etats membres augmente
et rend la rédaction de nouveaux traités plus complexes à réaliser ? La réponse est dans la définition d’objectifs
communs mais des politiques nationales autonomes sans aucune contrainte européenne. L’objectif recherché est la
diffusion des « bonnes pratiques » : les Etats les plus efficaces vont entraîner dans leur sillage les autres (ce que
l’on appelle aussi le benchmarking). Cette méthode ouverte de coordination va tout d’abord être utilisée dans le
cadre de la Stratégie de Lisbonne visant à faire de l’UE en 2010 « l’économie de la connaissance la plus
compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une
amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale ». Cette MOC est
rapidement un échec et les objectifs ne sont pas atteints.
Document 141 : la coordination coercitive des politiques budgétaires par le Pacte de Stabilité et de
croissance (Conseil européen de Madrid, 1995)
Les dispositions du traité de Maastricht sur les conditions à remplir par les États pour accéder à la monnaie unique
vont être complétées par un « Pacte de stabilité et de croissance ». (…) Il ne faut pas que des pays, ayant satisfait
aux critères de Maastricht pour adhérer à l’UEM, laissent ensuite réapparaître des déficits. Le Conseil européen de
Madrid (15-16 décembre 1995) a pris acte de cette nécessité. Il reste à définir le mécanisme d’un pacte de
stabilité.(…)
Le pacte instaure un dispositif de coordination et de surveillance des politiques budgétaires nationales. Les pays
participant à la monnaie unique doivent présenter chaque année des programmes de stabilité. L’ensemble des
déficits publics (budgétaires, sociaux et des collectivités locales) ne doit pas dépasser 3 % du PIB. C’est une marge
relativement large qui doit permettre à un État de moduler sa politique budgétaire en fonction de sa conjoncture
économique (en France, ces 3 % du PIB correspondent à 20 % du budget). La Commission est chargée de la
surveillance : elle demande aux États les informations nécessaires, les analyse et adresse un rapport au Comité
économique et financier qui donne son avis, puis elle adresse une recommandation au Conseil Ecofin qui prend des
décisions à la majorité qualifiée. En cas de dépassement des 3 %, le Conseil adressera des recommandations à
l’État défaillant. Si cela ne suffit pas, celui-ci fera l’objet de sanctions modulées en fonction de la conjoncture
nationale. Une récession de plus de 2 % du PIB sera reconnue comme circonstance exceptionnelle ne permettant
pas de sanctionner. A cette limite de 3% du déficit public s’ajoute une limite de l’endettement public à 60% du
PIB.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 142 : la méthode ouverte de coordination des politiques nationales, l’exemple de la Stratégie de
Lisbonne (Conseil européen de Lisbonne, 2000)
Durant les années 1990, un écart important se creuse entre l’Europe et les États-Unis, alors que les puissances
économiques émergentes progressent et que le Japon demeure très performant en recherche-développement
proportionnellement à sa population. À titre d’exemple, entre 1996 et 2006, le nombre d’articles scientifiques
publiés dans les pays de l’Union européenne représente seulement 88% de ceux publiés aux États-Unis. De même,
le nombre d’articles européens figurant parmi les publications les plus citées au monde ne s’élève qu’à 54% du
total américain.
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Devant ce décrochage, les États européens ont élaboré, lors du Conseil européen de Lisbonne les 23 et 24 mars
2000, une stratégie, dite « stratégie de Lisbonne », visant à faire de l’UE en 2010 « l’économie de la connaissance
la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée
d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale ».
L’objectif était ambitieux et dépassait le simple cadre de la recherche pour s’étendre au taux d’emploi des femmes,
des jeunes et des seniors, ainsi qu’au taux de croissance.Cette stratégie a échoué.
Alors qu’elle prévoyait d’affecter au budget de la recherche 3% de son PIB, l’UE dans son ensemble n’y consacre
que 1,9% (avec des écarts importants entre pays : 3,95% pour la Suède en 2006 contre 2,16% pour la France ou
1,1% pour l’Italie). À titre de comparaison, ce pourcentage est de 2,6% aux États-Unis et 3,15% au Japon. De
même, le taux de croissance visé était de 3% et il n’a atteint que 1,25 % en moyenne.
L’Europe reste également à la traîne pour le PIB/habitant. En matière d’emploi, les objectifs n’ont pas non plus été
atteints : le but fixé était un taux d’emploi global de 70% et il n’était que de 64,3% en 2011.
On peut bien sûr y voir les conséquences de la crise, mais cela serait occulter le retard existant avant la crise et les
carences de la stratégie définie en 2000. En effet, cette dernière souffrait de nombreuses faiblesses.
Tout d’abord, les objectifs étaient sans doute trop nombreux et concernaient trop de domaines afin de contenter le
plus d’acteurs possible : croissance, compétitivité, recherche, protection sociale, environnement.
En outre, cette stratégie n’était portée par aucune personnalité emblématique, contrairement à ce qui s’était passé
pour le marché unique soutenu par Jacques Delors ou la monnaie unique poussée en avant par le chancelier Helmut
Kohl et le président François Mitterrand. Par ailleurs, la faille essentielle de la stratégie de Lisbonne résidait sans
doute dans la méthode employée. Loin de la méthode communautaire utilisée pour la PAC, l’union douanière ou le
marché unique, c’est cette fois la « méthode ouverte de coordination » (MOC) qui a été choisie. Beaucoup plus
souple, elle se contente de fixer des objectifs aux États membres et de favoriser le benchmarking, c’est-à-dire la
comparaison entre les différentes politiques des États et la diffusion des meilleures pratiques. Rien n’est imposé
aux pays qui ne sont pas contraints juridiquement par des directives et un contrôle de la Cour de Justice – comme
cela est le cas pour le marché unique –, ni par des critères fermes – comme ceux de Maastricht pour l’unification
monétaire. Dès lors, comment imposer à un État de consacrer 3% de son PIB à la recherche ? Enfin, la stratégie de
Lisbonne n’était pas dotée de moyens financiers spécifiques : les États-Unis disposent d’un budget fédéral qui leur
permet de consacrer 127 milliards de dollars par an à la recherche, quand l’UE, dont le budget n’est pas de nature
fédérale, n’y consacre que 4 milliards chaque année.
Source : http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/union-europeenne/approfondissements/strategie-lisbonne-strategieeurope-2020.html
3.2 Les élargissements successifs de l’UE aux PECO
Document 143
2004 : Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République Tchèque, Slovaquie, Hongrie, Slovénie, Malte, Chypre
2007 : Roumanie, Bulgarie
2013 : Croatie
Document 144 : une carte en couleurs !
http://www.touteleurope.eu/actualite/carte-des-elargissements-successifs-de-6-a-28-etats-membres.html
Document 145 : les élargissements aux PECO
L’élargissement aux dix pays d’Europe centrale et orientale après l’effondrement des régimes communistes a été
considéré comme un « devoir historique » pour mettre fin à la division de l’Europe. Celui-ci accompli, une autre
préoccupation est apparue, celle d’assurer la sécurité de l’Union élargie par rapport aux pays voisins instables. Le
seul moyen envisagé a été de les inclure eux-mêmes dans l’Union, d’où la mise en route d’un véritable « engrenage
de l’élargissement » (…).
C’est ainsi qu’a été traité le problème des Balkans occidentaux ravagés par les guerres ethniques à la suite de
l’implosion de la Fédération yougoslave qui a provoqué l'intervention des États européens en Bosnie et au Kosovo,
dans le cadre de l’ONU et de l’OTAN.
Dès 1999, le Conseil européen d’Helsinki a adopté un processus de stabilisation et d’association. Ainsi la Croatie a
signé l’accord de stabilisation et d’association (ASA) le 29 octobre 2001, l’ancienne République yougoslave de
Macédoine le 9 avril 2001, l’Albanie le 12 juin 2006 et le Monténégro le 15 mars 2007. De plus, des sommets UEBalkans ont lieu régulièrement depuis la première réunion à Zagreb, le 24 novembre 2000. Un programme
d’« Assistance communautaire pour la restructuration, la démocratie et la stabilité » a également été prévu pour la
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période 2000-2006. Les pays concernés sont la Croatie, la Bosnie-Herzégovine, la Serbie-Monténégro, l’ancienne
République yougoslave de Macédoine, l’Albanie. En décembre 2002, le Conseil européen de Copenhague, en
même temps qu’il décidait l’entrée des Dix, confirmait la vocation des cinq pays balkaniques à faire partie de
l’Union.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 146: de l’UE 15 à l’UE 28
A la fin des années 1990, le processus d’élargissement de l’Union européenne a commencé. Les négociations
d’adhésion avec les douze pays candidats se déroulent depuis 1998 (…). Il reste toutefois à déterminer la place des
nouveaux États membres dans les institutions (nombre de voix au Conseil, nombre de ressortissants à la
Commission, au Parlement et dans les comités consultatifs). Cela avait été fait sans trop de problèmes pour les
élargissements précédents, mais cette fois il s’agit de l’adhésion prévisible de douze pays, portant l’Union de 15 à
28 États. C’est un véritable changement quantitatif et qualitatif qui exige une réforme institutionnelle qui permette
d’échapper au risque de paralysie et de réussir l’élargissement à l’ensemble du continent. L’enjeu est donc
considérable.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 147 : les enjeux de l’intégration des nouveaux pays membres
Problème Institutionnel
Problème Economique
Quel problème pose le passage de
l’UE 15 à l’UE 28 ?
Document 148 : de nouveaux candidats
Le 1ier juillet, l’UE a procédé à son septième élargissement en accueillant la Croatie. L’UE compte désormais 28
pays membres dont 11 sont d’anciennes économies planifiées. D’autres élargissements sont d’ores et déjà à prévoir
puisque l’UE a octroyé le statut de nouveaux candidats à 5 pays : le Monténégro, l’Islande (candidature retirée en
mars 2015), l’Ancienne République yougoslave de Macédoine, la Serbie et la Turquie. Par ailleurs, l’Albanie, la
Bosnie-Herzégovine et le Kosovo sont considérés par l’UE comme des candidats potentiels. (…) Ces pays sont
majoritairement caractérisés par l’absence d’institutions fiables et d’Etat de droit. Dès lors, la dimension
économique est entièrement conditionnée par la dimension politique qui passe par la création d’institutions
permettant à ces pays d’engager un processus de développement économique.
Source : ss la direction de M.Dévoluy et G.Keonig « Les politiques économiques européennes », Points Economie, 2015, p.36
Document 149: les enjeux de l’intégration des nouveaux pays membres
Problème Politique
Problème Economique
Quel problème pose les nouveaux
candidats ?
L’intégration européenne
au début des années 2000
Approfondissement
Elargissement
Développement de la coordination des
politiques nationales :
- méthode coercitive : ________
- méthode ouverte : __________
3.3 De l’échec du traité constitutionnel au traité de Lisbonne
Document 150: l’échec du Traité constitutionnel
Un projet de traité établissant une Constitution pour l’Europe (TECE) est signé en octobre 2004 par le Conseil des
ministres des affaires étrangères. Il présente les valeurs sur lesquelles se fondent l’UE et le préambule de la
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Constitution reconnaît les "héritages culturels, religieux et humanistes de l'Europe", ainsi que la liberté, la
démocratie, l'égalité et l'Etat de droit. Le TECE va donc plus loin que le traité d’Amsterdam. Il doit entrer en
vigueur le 1er janvier 2006 à condition que tous les Etats membres l’aient ratifié. Mais deux pays le rejettent par
referendum: la France et les Pays-bas. L’UE ne se dote donc pas d’une Constitution. Après la crise de la chaise
vide, l’eurosclérose, une nouvelle crise profonde frappe la dynamique de construction européenne.
Document 151: le Traité de Lisbonne (2007)
Sous la présidence allemande, les consultations reprennent et le 13 décembre 2007, les chefs d’Etat et de
gouvernement signe le traité de Lisbonne qui entre en vigueur le 1ier janvier 2009. Le traité de Lisbonne veut
moderniser les institutions européennes.
Il modifie le traité instituant la Communauté européenne : les trois piliers (communautaires et
intergouvernementaux) du Traité de Maastricht sont fusionnés. Ce traité devient le traité sur le fonctionnement de
l’Union européenne (TFUE). Il clarifie les compétences de l’UE en distinguant les compétences exclusives de
l’UE, les compétences partagées entre UE et Etats membres, les compétences d’appui de l’UE qui viennent en
complément des actions des Etats, ainsi que les formes de coordination des politiques nationales.
Le traité sur l’Union européenne est modifié. L’UE est désormais dotée de la personnalité juridique. Ce qui lui
permet de conclure des accords internationaux dans tous ses domaines de compétence. Un haut représentant de la
politique étrangère européenne est nommé, il conduit la PESC de l’Union. Un président du Conseil européen est
nommé à la majorité qualifiée pour une durée de deux ans et demi. La banque centrale européenne devient une
véritable institution européenne, au même titre que la Commission, le Conseil ou le Parlement. L’Eurogroupe
devient également une instance à part entière de l’UEM. Il regroupe les ministres de l’Economie et des Finances de
la zone euro. Une clause de sortie est créée pour les Etats qui souhaiteraient se retirer de l’UE (article 50 du TUE).
La Charte des droits fondamentaux acquiert une force juridique contraignante (mais la Pologne et le Royaume-Uni
bénéficient d’une exemption). Enfin, la lutte contre le changement climatique acquiert un statut prioritaire.
3.3.1 Le fonctionnement des institutions dans le traité de Lisbonne
Document 152
Les institutions européennes sont au nombre de sept : deux institutions intergouvernementales qui sont le Conseil
européen, le Conseil des ministres, et cinq institutions supranationales qui sont le Parlement européen, la
Commission européenne, la Cour de Justice de l’UE, la Cour des comptes, la Banque centrale européenne.
Constituées par :
Missions :
Institutions politiques
Chefs d’Etat et de gouvernement. Ils Il fixe les grandes orientations de
Le conseil européen
représentent donc les Etats membres. l’UE ; il n’a pas de pouvoir
Un président : mandat de 2 ans et législatif ;
demi ; il anime et préside les travaux. Il propose au Parlement européen
les commissaires européens ;
Ministres
par
domaines
de Pouvoir législatif ;
Le conseil des ministres
compétences. Ils expriment toujours Dans certains domaines, vote à la
les intérêts des Etats membres.
majorité qualifiée (cadre de la colégislation), d’en d’autres, vote à
l’unanimité ;
Mandat des députés élus au suffrage Pouvoir législatif dans le cadre de la
Le Parlement européen
universel pour 5 ans ;
co-législation ;
Il agit au nom des citoyens Donne son accord pour la
européens.
nomination des commissaires
Peut conduire la Commission à
démissionner
Elle agit au nom de l’intérêt de Elle a l’initiative des textes
La commission européenne
l’UE ;
présentés au Conseil des ministres.
Elle a un Pouvoir exécutif
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Document 153 : le triangle institutionnel européen
On parle de triangle institutionnel, mais en réalité il s’agit plutôt d’un quadrilatère. La dynamique des décisions
européennes est la suivante. Le Conseil européen donne les grandes orientations européennes qu’il communique à
la Commission européenne. Celle-ci prépare les textes législatifs qui découlent de ces grandes orientations.
Lorsque ces textes concernent les domaines du vote à l’unanimité, le Conseil des ministres est le seul à avoir le
pouvoir législatif. Lorsqu’ils concernent les domaines du vote à la majorité qualifiée, le Conseil des ministres est
co-législateur avec le Parlement européen. Cela signifie que le texte adopté au Conseil des ministres est ensuite
soumis au vote du Parlement. La Commission européenne se charge de l’application des textes législatifs adoptés.
La Politique extérieure et de sécurité commune (PESC) est définie par un vote à l’unanimité des ministres des
affaires étrangères et du Haut représentant de l’UE. C’est ce dernier qui en assure l’exécution.
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Document 154 : le triangle institutionnel européen
Pôle intergouvermental
Conseil européen
Composition : chefs d’Etat et
de gouvernements + président
de la Commission (nommé
par le CE depuis 2009) + un
président élu pour 2 ans et
demi
Mission : impulse les grandes
orientations européennes (pas
de fonctions législative et
exécutive)
intervient en
cas de conflit
Conseil des ministres
(ou conseil de l’UE)
Composition :
ministres par spécialité
Mission : législative
Décision : vote à la
double majorité
Impulse les grandes
orientations
PESC
Décision : unanimité
Ministres +
Haut représentant de
l’UE
Exécutif : assuré par
le Haut représentant
votent les textes
(procédure de législation
ordinaire)
Action des experts
et Lobbies
Commission européenne
Composition : un président et 27
commissaires
Représente l’intérêt général de
l’UE
Mission : proposer des textes
législatifs ;
Pouvoir
exécutif exécuter les politiques
communes
et
vérifier
l’application des traités
Parlement européen
propose des textes
législatifs
Composition : représentants
du peuple élus au suffrage
universel
Mission : législative
Décision : vote
Pôle communautaire
Cour de Justice de l’UE
Pouvoir judiciaire Mission :
vérifie la conformité des
droits européens au droit
communautaire
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BCE
Cour des comptes
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3.3.2 La clarification de la répartition des compétences entre l’UE et les Etat-membres
Document 155 : compétences exclusives, compétences partagées et compétence d’appui
Il existe tout d’abord des compétences exclusives de l’UE. La réalisation de l’Union douanière puis du marché
commun ont nécessité une politique commerciale puis une politique de la concurrence européennes. La politique
monétaire relève également de l’UE ainsi que la protection des ressources biologiques de la mer.
Il existe ensuite des compétences partagées : l’UE peut être compétente pour mener une politique, mais il est
nécessaire pour cela de démontrer que l’action par un Etat-membre sera moins efficace que celle de l’UE. C’est
l’application du principe de subsidiarité. On retrouve ces compétences partagées dans les secteurs de la cohésion
sociale, territoriale et économique, de l’agriculture (la PAC) et la pêche, de l’environnement, de la protection des
consommateurs, des réseaux de transports, de l’énergie, de l’espace liberté, sécurité et justice (qui succède au pilier
JAI du Traité de Maastricht), et de certains aspects de la politique sociale (congés parental, travail à temps partiel et
CDD).
L’UE peut également avoir des compétences d’appui. L’UE vient compléter des actions menées par les Etats
membres dans les secteurs suivants : l’industrie, la culture, le tourisme, l’éducation, la formation professionnelle, la
jeunesse et sport, la protection civile, la protection et amélioration de la santé humaine.
Document 156 : la coordination des politiques nationales
Enfin l’article 120 du TFUE rappelle que « les Etats-membres considèrent leurs politiques économiques comme
une question d’intérêt commun et les coordonnent au sein du Conseil ». Trois types de moyens sont utilisés pour
réaliser cette coordination. Soit la coordination est coercitive, c’est le principe de la règle que tout le monde doit
suivre (les règles de finances publiques du Pacte de stabilité et de croissance). Soit la coordination est incitative et
« ouverte » (c’est-à-dire non coercitive) et basée sur la diffusion des bonnes pratiques et le benchmarking (Stratégie
de Lisbonne et son prolongement la Stratégie Europe 2020). Soit la coordination prend la forme de dialogues entre
les décideurs des politiques économiques des pays membres. C’est le type de coordination utilisée au sein de
l’Eurogroupe (ensemble des ministres de l’Economie et des finances de la zone euro) depuis le Traité de Lisbonne.
Document 157 : la situation des compétences partagées
Selon une lecture extensive des articles 4 à 6, on peut considérer que les « compétences exclusives » sont limitées
et que les Etats conservent la maîtrise essentielle de leurs politiques. A l’inverse, selon une lecture extensive, on
peut estimer que le champ des compétences s’élargit (…) renforçant ainsi l’idée que les politiques nationales ne
sont plus pensables sans l’Union.
Certaines compétences partagées restent pour l’instant limitées. C’est le cas de la politique sociale qui, hormis
quelques textes communs (congé parental, travail à temps partiel, CDD) relève des déclarations de principes. (…)
En revanche, d’autres domaines ont connu des avancées marquantes. On retiendra notamment les initiatives
relatives à la politique de cohésion économique, sociale et territoriale : l’objectif de réduction des disparités
économiques et sociales entre les Etats membres et leurs régions, à travers les interventions du Feder, du FSE et du
Fonds de cohésion est devenu l’un des fleurons de la solidarité communautaire (35% du budget). (…) Au total,
l’action commune désigne donc un ensemble relativement composite : sous le même qualificatif, un dégradé de
nuances et de strates qui s’élargit et se transforme au fil des « relances ».
Source : Guillaume Courty et Guillaume Devin « La construction européenne », La découverte, 2010
Document 158 : les formes de coordination des politiques économiques
L’article 120 du TFUE pose le principe général suivant : « les Etats-membres considèrent leurs politiques
économiques comme une question d’intérêt commun et les coordonnent au sein du Conseil ».
Cela dit, la coordination est une notion à géométrie variable : elle peut être lâche ou, à l’opposée, fortement
coercitive. La théorie des jeux aide à comprendre et à formaliser les problèmes et les enjeux de la coordination.
Lorsque des joueurs décident de s’entendre, il y a coopération. On parle de non-coopération dans le cas contraire.
En général, la solution non coopérative apporte moins de satisfaction collective que la solution coopérative, comme
le démontre le jeu présenté par Nash en 1951 (le célèbre dilemme du prisonnier). Mais, pour se coordonner, c’est-àdire pour coopérer efficacement, il faut que tout le monde joue le jeu. Or, les accords de coordination sont fragiles
car les tentations de s’y soustraire ou de tricher ne sont pas à exclure. Une bonne coordination doit couper court à
deux risques : le comportement de passager clandestin et l’aléa moral. Un Etat se comporte en passager clandestin
lorsqu’il cherche à profiter des efforts de coordination de ses partenaires sans qu’il s’engage lui-même à en
supporter les contraintes. L’aléa moral existe quand un Etat possède les moyens de ne pas tout révéler à ses
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partenaires. Le but est ici d’obtenir des avantages liés à l’asymétrie d’information. Le meilleur moyen de faire
respecter les décisions communes consiste à mettre en place des règles assorties de procédures de surveillance
fortes et crédibles. Suivant cette logique, il devient rationnel d’introduire des mécanismes de sanctions, notamment
financiers. (…)
On distingue trois modes de coordination au sein de l’UEM :
La coordination incitative fixe des lignes directrices à tous les Etats membres. Les Etats sont encouragés à les
suivre mais il n’existe pas de sanctions lourdes. (…) Les stratégies initiées en 2000 afin de fixer des ambitions et
des objectifs de long terme pour l’Europe relèvent de cette démarche. La stratégie Europe 2020 reste dans la même
veine.
La coordination coercitive est plus contraignante et plus lourde que l’indicative. Elle recouvre un ensemble de
règles imposées aux Etats membres. La principale contrainte est représentée par la Pacte de Stabilité et de
croissance. Avec la PSC, la Commission a pour mission de surveiller l’évolution de la situation budgétaire des
Etats membres (déficit budgétaire et dette publique). Elle propose les sanctions en cas de dépassement. On doit
également inclure dans la coordination coercitive deux autres types de règles préventives : celles qui interdisent le
financement monétaire des déficits publics (art. 123 du TFUE) et celles qui imposent l’absence de solidarité
financière entre les Etats membres (art.125 du TFUE).
Les dialogues figurent une autre forme de coordination. Ils sont nés du besoin de mettre en place des rencontres
informelles entre les décideurs des politiques économiques des Etats membres. Ces dialogues concernent
essentiellement l’Eurogroupe, qui rassemble les ministres de l’Economie et des finances de la zone eur. Depuis le
traité de Lisbonne, l’Eurogroupe est devenu une instance à part entière de l’UEM (art.137 du TFUE).
Source : ss la direction de M.Dévoluy et G.Keonig « Les politiques économiques européennes », Points Economie, 2015, p.34
Document 159 : l’espace de liberté, de sécurité et de justice
La mise en place d'un espace européen de liberté, de sécurité et de justice (ESLJ) a été lente et tardive. Celui-ci est
réellement consacré en 2009 avec le traité de Lisbonne, qui en fait une priorité. Désormais intégré au droit de
l'Union, il succède au "troisième pilier" du traité de Nice. (…)
Avant Maastricht, la coopération en matière de justice et d'affaires intérieures est essentiellement une coopération
sectorielle et volontaire qui est renforcée par l'Acte unique européen en 1986. La principale réalisation dans ce
domaine est l'établissement d'un espace Schengen en 1985 qui, en abolissant les frontières intérieures, oblige à la
définition d'une politique commune en matière de frontières extérieures.
Les 15 et 16 octobre 1999 le Conseil européen de Tampere, en Finlande, consacré à la création d'un espace de
liberté, de sécurité et de justice dans l'Union européenne, définit les orientations politiques à donner à ce futur
espace.
Le traité sur l'Union européenne (TUE) prévoit ensuite un chapitre par domaine lié à l'ELSJ :
- les politiques relatives aux contrôles aux frontières, à l'asile et à l'immigration ;
- la coopération judiciaire en matière civile ;
- la coopération judiciaire en matière pénale ;
- la coopération policière.
C'est l'article 67 TFUE qui précise les objectifs assignés à l'Union dans le cadre de l'ELSJ à savoir :
- assurer "l'absence de contrôle des personnes aux frontières intérieures" ;
- développer "une politique commune en matière d'asile, d'immigration, et de contrôle des frontières
extérieures" ;
- "assurer un niveau élevé de sécurité par des mesures de prévention de la criminalité, du racisme et de la
xénophobie, ainsi que la lutte contre ceux-ci" ;
- faciliter "l'accès à la justice, notamment par le principe de reconnaissance mutuelle des décisions
judiciaires et extrajudiciaires en matière civile.
http://www.touteleurope.eu/
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Document 160 : les modalités de l’action de l’UE
(cadre des compétences exclusives, partagées et en appui)
Intervention de l’UE
Instruments juridiques (« droit
européen »)
Politique de la
concurrence ;
politique de
l’environnement
Budget « opérationnel »
Espace « liberté,
sécurité et
justice »
Lutte contre les
discriminations
Exemple :
Frontex
Politiques (régionales)
structurelles
PAC
Développement
rural
Fonds
structurel
Fonds de
cohésion
R&D
Education et
culture
Energie et
transport
Politique
agricole
Modalités d’action
essentiellement
réglementaire
Logique de cofinancement et de partenariat avec les Etats membres
Document 161 : le budget de l’UE
En 2006, le budget général de l’UE a atteint 112 milliards d’euros, soit seulement 1% du revenu national brut
(RNB) de l’UE. La comparaison avec les finances nationales montre la relative modicité des finances de l’UE : à
titre d’exemple, les dépenses du budget général de l’Etat en France, telles que prévues dans la LFI pour 2006,
s’élèvent à 270 milliards d’euros (…) et équivalent à 16,8% du RNB. L’UE est donc très loin de peser d’un poids
financiers comparable à celui d’un Etat. Ses dépenses doivent en outre être relativisées au regard des données
démographiques : en 2006, la dépense communautaire par habitant de l’UE est de 0,70€ par jour. (…) A la
différence de ce qu’il en est pour les Etats, son budget présente la caractéristique fondamentale d’avoir pour finalité
des interventions, donc d’être de nature essentiellement opérationnelle, les dépenses des administrations, destinées
à assurer le fonctionnement courant des institutions européennes, n’y occupant qu’une place des plus réduites. Ces
interventions peuvent produire un « effet de levier » et, à ce titre, susciter des actions nationales qui, sans elles,
n’auraient peut être pas été engagées, ou, tout le moins, contribuer de manière appréciable au cofinancement
d’opérations décidées par les Etats membres.
Source : Les notices de la documentation française « Finances publiques », 2006, p.197
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4. De la menace du Grexit au referendum du Brexit : l’UE (de nouveau) dans la tempête
4.1 L’UE face à la crise depuis 2010
4.1.1 La création du Fonds européen de stabilité financière et du Mécanisme européen de
stabilité : une réponse intergouvernementale à la crise des dettes souveraines
Document 162
En réponse à la crise des dettes souveraines qui frappent la Grèce, l’Espagne, le Portugal et l’Irlande à partir de
2010, les Etats membres interviennent en transférant les créances détenues par les établissements privés à des
institutions publiques et en assurant le financement des déficits publics. Ils utilisent des prêts bilatéraux et créent en
2010 le Fonds européen de stabilité financière (FESF). En 2012, le Mécanisme de stabilité financière (MES)
remplace le FESF. La règle de décision se fait à l’unanimité des 17 pays membres de l’Euro, sauf cas d’urgence où
les décisions se prennent à la majorité qualifiée des 85%. Chaque Etat est responsable à hauteur de sa contribution.
Il ne répond pas du total du risque assumé par le MES. Le budget du MES est « hors budget » européen, et n’est
pas présenté au Parlement européen. Face aux difficultés budgétaires rencontrées par certains pays membres, les
solutions apportées restent des solutions intergouvernementales.
4.1.2 Le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG, 2012) : un
renforcement des règles de finances publiques
Document 163
Il est prévu, qu’à partir du 1er mars 2013, l’octroi d’une assistance financière dans le cadre du MES soit
conditionné à la ratification du « Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de l’Union économique
et monétaire » qui a été adopté par 25 des 28 pays membres de l’Union européenne le 30 janvier 2012 (sauf
Royaume-Uni, République Tchèque et Croatie). Le TSCG consiste à approfondir les règles de finances publiques
en limitant le déficit structurel. En se focalisant sur le déficit structurel, ce traité admet que des variations de la
conjoncture dégradent mécaniquement le déficit budgétaire (déficit conjoncturel), et il cherche à encadrer ce qui est
du ressort des décisions propres au gouvernement (déficit structurel). A côté de l’introduction de cette règle d’or
des finances publiques, le TSCG prévoit également davantage de coordination et de convergence des politiques
économiques. Pour cela, les Etats doivent communiquer leurs plans nationaux d’émissions de dette publique et les
grandes réformes économiques menées dans chaque pays doivent être au préalable débattues et/ou coordonnées.
4.1.3 L’Union bancaire : la réponse communautaire au risque bancaire systémique
Document 164
Après la crise des subprimes, la Commission prend l’initiative de créer une Union bancaire européenne. L’objectif
est de fournir un cadre réglementaire unique aux différents systèmes financiers nationaux qui forment le système
financier européen, en particulier dans les pays de la zone euro.
La crise qui touche l’Europe depuis 2011 conduit à un double constat :
- les régulations bancaires nationales ont été défaillantes pour éviter l’emballement du crédit : des bulles se
sont développées sans entraves dans de nombreux pays comme l’Espagne ou l’Irlande ;
- l’intervention publique nécessaire pour éviter la crise bancaire à dégrader considérablement le déficit et la
dette publique et elle a provoqué une spéculation sur d’éventuels défauts de paiement des Etats. Les primes
de risques sur les émissions de titres publics se sont envolées, renforçant les difficultés budgétaires des
Etats.
Le projet de la commission européenne, rédigé en 2012, est adopté en procédure de co-législation par le Conseil
des ministres et le Parlement européen 2013. La Banque centrale européenne dirige le Mécanisme de surveillance
unique (MSU) bancaire. Le transfert de la supervision des banques nationales à la BCE ne concerne que les plus
grosses banques (environ 130 banques dans la zone euro). Les plus petites restent encore supervisées
nationalement. Nous sommes donc ici dans le domaine des compétences partagées où l’action de l’UE se justifie
selon le principe de subsidiarité. Un Mécanisme de résolution unique (MRU) est adopté en 2014 et il devient
opérationnel en décembre 2015. C’est le Conseil de résolution unique qui le dirige, qui est une agence de l’UE.
Pour compléter cette Union bancaire, la Commission a également proposé en fin d’année 2015, la mise en place
d’un système de garantie de dépôts bancaires à l’échelle de la zone euro.
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4.2 Une Europe à géométrie variable
Document 165
En juin 2016, l’UE compte 28 pays, l’espace Schengen 24, la Zone euro 19, le TSCG a été signé par 25 pays, enfin
le Mécanisme européen de stabilité concerne 19 pays.
Force est de constater que le projet européen est aujourd’hui de plus en plus un projet à géométrie variable. Il existe
notamment un principe d’exemptions (opting-out) qui permet des dérogations. Un pays qui ne souhaite pas
participer à la coopération communautaire dans un domaine peut en être exempté. Si l’on adopte une lecture
optimiste, on peut y voir de la souplesse et du pragmatisme dans une Europe passée de 6 à 28 Etats membres en un
demi-siècle. L’opting-out est un moyen d’empêcher les blocages quand un pays n’est pas d’accord ; les pays qui
veulent davantage d’intégration peuvent alors avancer dans ce sens. Par exemple, le Royaume-Uni n’a pas participé
à la troisième phase de l’UEM (le passage à l’euro) et ne fait pas partie de l’espace Schengen. Le Danemark
bénéficie aussi de ce principe d’exemption en ce qui concerne l’UEM, la défense et la citoyenneté européenne. Si
l’on adopte une lecture pessimiste, on peut y voir les difficultés à faire converger tous les intérêts des pays
membres et à créer des « solidarités de fait » qui entraînent les pays vers davantage d’intégration politique. En
développant une Europe à géométrie variable, la stratégie des petits pas a tendance à s’effacer au profit d’une
Europe à la carte où l’intégration politique n’est qu’une option possible.
Document 166 : les exemptions (opting-out)
Le concept d'opting-out correspond à une dérogation, accordée à un pays ne souhaitant pas se rallier aux autres
Etats membres dans un domaine particulier de la coopération communautaire, afin d'empêcher un blocage général.
C'est ainsi que le Royaume-Uni n'a pas souhaité participer à la troisième phase de l'Union économique et monétaire
(UEM) et que des clauses similaires ont été octroyées au Danemark en ce qui concerne l'UEM, la défense et la
citoyenneté européenne. De même, l'acquis de Schengen a fait l'objet d'une adoption partielle puisque l'Irlande, le
Royaume-Uni et la Danemark peuvent décider au cas par cas de participer à tout ou partie des mesures envisagées.
http://www.touteleurope.eu/
Document 167 : l’espace Schengen
En raison de l’hostilité britannique à la suppression des contrôles aux frontières, les pays du Benelux où la libre
circulation existait déjà, proposent à la France et à l’Allemagne d’agir ensemble pour la suppression graduelle des
contrôles aux frontières. Les cinq pays constituent le « groupe de Schengen », du nom de la petite bourgade
luxembourgeoise à la convergence des frontières du Grand-Duché, de la France et de l’Allemagne, où, le 14 juin
1985, ils signent l'accord relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes. Puisqu’il n’est
pas possible d’aboutir dans le cadre de la Communauté des Douze, le groupe de Schengen constitue une avantgarde dont les réalisations pourront ensuite être étendues à d’autres partenaires.
Effectivement, les autres pays de l’Union rejoignent successivement le groupe fondateur entre 1990 et 1996 :
l’Italie, l’Espagne, le Portugal, la Grèce, l’Autriche, le Danemark, la Finlande et la Suède. La Norvège et l’Islande,
non membres de l’Union, mais qui appartenaient déjà à l’Union nordique des passeports, accèdent à l’espace
Schengen en tant que membres associés. Seules la Grande-Bretagne et l’Irlande restent à l’écart et conservent leurs
contrôles aux frontières. (…) Les acquis de Schengen sont intégrés au pilier communautaire par le traité
d’Amsterdam du 2 octobre 1997, sauf pour la Grande-Bretagne et pour l’Irlande qui obtiennent une dérogation.
Source : http://www.cvce.eu/recherche/
Document 168 : la zone euro ne correspond pas à l’UE (Eurogroupe)
Le traité de Maastricht signé en 1992 avait comme objectif principal la mise en place de l’UEM et le lancement de
la monnaie unique. Dans ce texte, il apparaissait clairement que l’ambition de l’Union était de devenir, dans son
ensemble, un espace monétaire intégré avec à terme, l’adoption de la monnaie unique par tous ses membres. (…)
ainsi la zone euro devait recouvrir à terme l’Union entière. Cet état d’esprit a évolué au cours du temps. tout se
passe comme si l’idée de construire une Europe à deux cercles s’imposait lentement. Les indices de ce glissement
sont perceptibles notamment avec l’importance prise par l’Eurogroupe. De fait, les Etats à statut dérogatoires
mènent désormais leur vie et les deux cercles s’installent. Le traité de Lisbonne ratifié en 2008 par les Etats
membres semble prendre acte de ces changements et en prépare implicitement d’autres. En effet, les articles 136 et
138 du TFUE présentent des dispositions qui sont propres aux Etats membres dont la monnaie est l’euro. Le traité
institutionnalise l’Eurogroupe et prévoit un statut pour son président. Mais surtout, le texte stipule que les membres
de la zone euro peuvent renforcer leur coordination et la surveillance des disciplines budgétaires. De même, ces
Etats sont maintenant habilités à élaborer des orientations de politiques économiques spécifiques à la zone.
Source : ss la direction de M.Dévoluy et G.Keonig « Les politiques économiques européennes », Points Economie, 2015, p.41
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Nombre de pays
Document 169 : une UE à géométrie variable
Espace
UE
Zone Euro
Traité TSCG
Schengen
24
28
19
25
MES
19
Conséquence sur les
politiques
européennes ?
4.3 Un objet politique non identifié
Document 170 : l’UE, « une fédération d’Etats-nation »
+ de fédération …
+ d’Etats nations
- l’UE possède des compétences exclusives dans de
- Le maintien de la souveraineté nationale dans de
nombreux domaines : il y a donc transferts de
nombreux domaines : citoyenneté, armée, police,
souveraineté (ex : monnaie) ;
budget, …
- il existe également des compétences partagées :
- la réponse à la crise de l’euro a été la création
l’Union bancaire a ainsi transférer la supervision des
d’institutions intergouvernementales : le FESF
plus grandes banques européennes à la BCE ;
puis le MES ;
- le rôle du parlement européen dans les décisions
- Le rôle du Conseil européen dans la définition des
relevant de la co-législation ordinaire ;
grandes orientations ;
- le vote à la majorité qualifiée au Conseil peut conduire
- Le champ des décisions prises à l’unanimité au
des Etats à appliquer des décisions auxquelles ils
Conseil des ministres
s’opposent ;
- Les décisions de la PESC sont prises à
- l’application de la Charte des droits fondamentaux et
l’unanimité ;
droits des citoyens européens ;
- dans les domaines qui le concernent, le droit européen
est supérieur aux droits nationaux (ex : Arrêt Cassis de
Dijon) ;
Document 171 : l’ordre politique européen, un « objet politique non identifié » (II)
Si l’Europe peine à trancher pour un modèle plutôt que pour un autre, c’est parce que s’affrontent dans la
construction européenne deux légitimités, celle de Etats et celle de l’Union. Il s’agit de préserver à la fois les
intérêts des Etats qui restent les acteurs principaux de la construction européenne et continuent de veilleur
jalousement sur leur souveraineté, et l’intérêt général de l’Union et de ses peuples.(…) ( le projet européen) restera
longtemps sans doute un système à mi-chemin entre confédération et fédération, ce qui en fait un modèle unique au
monde.
Source : Découverte de la vie publique «L’Union Européenne. Institutions et politiques »
4.4 Une nouvelle crise du projet politique européen
Document 172 : le Brexit, symbole de l’euroscepticisme croissant
Le 23 juin 2016, à l’initiative du Premier Ministre James Cameron, un référendum sur la sortie de l’UE est organisé
au Royaume-Uni. Le « oui » l’emporte avec plus de 51% des voix. En 2015, l’Islande avait choisi de retirer sa
candidature mais, c’est la première fois qu’un Etat décide de sortir de l’UE (encore faut-il qu’il fasse jouer l’article
50 du Traité sur l’UE pour finaliser cette sortie). Même si le Royaume-Uni ne fait pas partie de la zone euro, ni de
l’espace Schengen et qu’il bénéfice depuis 1984 d’un « rabais » sur le financement de l’UE, cette décision marque
une rupture avec cette dynamique de très long terme d’élargissement toujours continu. Dans un contexte
d’euroscepticisme grandissant, l’UE est de plus en plus contestée comme projet porteur de paix, de croissance et de
bien-être. Nous sommes entrés dans une nouvelle grande crise de la construction européenne.
Document 173 : le projet européen, à la croisée des chemins
Comment expliquer cette nouvelle crise du projet européen ? Dans une note de mai 2016, France Stratégie recense
les défis et difficultés de l’intégration européenne contemporaine :
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- La panne de l’intégration économique et sociale : l’Europe est encore économiquement fragmentée. Le marché
commun n’est pas complètement abouti, et l’absence de coordination dans les domaines fiscaux et sociaux
provoque des stratégies non coopératives entre Etats membres ;
- L’avenir incertain de la zone euro : l’euro n’est pas une zone monétaire optimale, mais ne possède pas les outils
nécessaires (fédéralisme budgétaire, mobilité du travail) pour réguler les déséquilibres macroéconomiques. Le
marché unique et la monnaie unique ont réalloué les ressources productives au sein de l’UE. Les pays de l’Europe
du Sud ont vu leurs capacités exportatrices reculer et leur besoin de financement externe. Or, ces financements
externes s’accompagnent de sudden stop, provoquant des ajustements sous la forme de dévaluation interne. En
l’état, le fonctionnement de la zone euro n’est pas viable ;
- L’instabilité géo-politique du voisinage de l’Europe. Les conflits au Moyen-orient et en Afrique ont provoqué des
afflux massifs d’immigrés vers l’UE. Face à cette situation humanitaire dramatique, les européens ont tous, les uns
après les autres, choisi des solutions nationales et protectionnistes. La PESC a été de nouveau un échec (après celui
de la guerre en ex-Yougoslavie), remettant en cause le fonctionnement de l’Espace Schengen ;
- Plus grave, c’est la légitimité même de l’UE qui est en question aujourd’hui. Il paraît loin le temps où l’UE
recevait le Prix Nobel de la Paix (2012). En réalité, la capacité de l’Euro à agir en faveur de la paix entre les nations
n’est pas remise en cause et ce sont les institutions européennes qui vivent une crise de légitimité. Une majorité
d’européens les considèrent comme intrusives, inefficaces et incapables de comprendre les besoins des citoyens. En
raison, même du fonctionnement des institutions politiques : le Parlement européen a été le grand absent de la
gestion de la crise des dettes souveraines et de la crise des migrants, ce qui a renforçé l’impression de déficit
démocratique au sein de l’UE. Mais en réalité, les peuples européens se sont exprimés à travers leurs
gouvernements nationaux et, Bruxelles n’impose rien à personne. Finalement les européens semblent pris entre une
défiance croissante vis-à-vis de l’Europe, qui se traduit par le refus de transférer davantage de compétences et, le
besoin impérieux de sortir de l’impasse dans laquelle se trouve l’UE, qui se manifeste par une recomposition des
champs politiques nationaux. La crise des institutions politiques européennes va de pair avec la crise des partis
traditionnels issus de la seconde guerre mondiale et la montée des partis xénophobes. Les problématiques
auxquelles doivent faire face les citoyens européens sont « européennes » mais les outils politiques nécessaires
pour européaniser les débats ne le sont toujours pas, d’où un sentiment ambiguë : entre impuissance et volonté de
changement.
L’UE est toujours ce que Jacques Delors a appelé en 1985 « un OPNI - une sorte d'objet politique non identifié ».
Comment cette construction originale et unique va-t-elle évoluer demain pour rester, selon les mots de J.Delors
« capable d'apporter à chacun de nos pays l'effet de dimension qui lui permet de prospérer à l'intérieur et de tenir
son rang à l'extérieur » ?
Document 174 : en conclusion
L’UE, des limites sur la portée de l’intégration
Territoriale
Institutionnelle
Economique et monétaire
Domaine des
compétences
Domaine des choix des
politiques économiques
Document : une synthèse
Le projet d’une Europe unie, capable de résister aux tentations belliqueuses est aussi vieille qu’il existe des Etatsnations sur le continent européen. Il faut attendre deux conflits mondiaux et des millions de morts pour que
l’Europe se fasse enfin. La construction européenne est marquée par plusieurs grandes étapes. Ces étapes sont des
réponses aux difficultés et enjeux de chaque époque.
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, la lenteur de la reconstruction et la puissance soviétique poussent les
américains à adopter la doctrine Truman : le développement et la coopération économiques doivent servir à
« endiguer » le communisme. L’économie apparaît comme le domaine qui offre le moins de résistance pour réaliser
des politiques communes entre pays européens. Les succès de l’UEP et de la CECA conduisent au traité de Rome
et à la création de la CEE et de l’Euratom. Une première crise de croissance intervient avec la « crise de la chaise
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vide » (1965) à laquelle l’Europe répond en confirmant le pouvoir des Etats sur les politiques européennes. Les
premières réalisations européennes sont alors un succès : la PAC et l’Union douanière. Mais la construction
européenne marque le pas entre 1974 et 1984. Le projet de marché commun n’avance plus, les dissensions entre
Etats membres s’aggravent, la hausse du chômage conduit à des politiques protectionnistes. Les européens sortent
de cette « eurosclérose » par le haut. L’Acte unique relance la dynamique de marché unique. Tandis que le traité de
Maastricht sur l’Union européenne s’attaque à la réalisation de l’Union économique et monétaire. La construction
européenne avance vers une Europe sans frontières, partageant la même monnaie. Les domaines d’intervention de
l’UE s’étendent dans le champ économique (politique de la concurrence, mise en ouvre marché unique, recherche,
infrastructures …), dans le champ de la cohésion sociale et régionale (fonds structurels), dans le champ monétaire
(euro). La période de transition vers l’euro est celle d’une coordination de certaines politiques nationales
(politiques monétaire, de change et budgétaire). Cette coordination concerne aussi la politique étrangère. Avec le
traité d’Amsterdam, les droits associés à la citoyenneté européenne s’élargissent. Enfin, le fonctionnement des
institutions évolue en donnant plus de poids au vote à la majorité qualifiée au sein du Conseil des ministres, qui
partage pour ce type de vote la co-législation avec le Parlement européen. La réponse à l’eurosclérose est donc
d’envergure.
Mais une troisième crise de la construction européenne va venir freiner cet élan. Le projet de constitution pour
l’Europe accepté par le Conseil des ministres n’est pas ratifié. La France et les Pays-bas le rejettent par referendum
en 2005.
Avec l’augmentation du nombre de pays membres aux intérêts de plus en plus divergents, la question des limites
des compétences de l’UE se pose : jusqu’où va, et doit aller, l’intégration européenne ? Les petits pays ne
souhaitent pas voir les « grands » leur imposer des choix et certains pays souhaitent limiter au maximum les
transferts de souveraineté vers l’UE en faisant appel aux exemptions autorisées. La construction européenne
connaît une nouvelle phase de trouble qui aboutit au traité de Lisbonne (mise en œuvre en 2009). Ce dernier
procède ainsi à une clarification des compétences de l’UE, ainsi que des fonctions des institutions européennes.
Depuis l’intégration européenne progresse, l’UE répond aux soubresauts des crises des dettes souveraines en
s’appuyant sur des instruments intergouvernementaux et elle tire les leçons de la crise des subprimes en créant une
Union Bancaire dont la BCE est l’organe superviseur. Cette capacité de résilience lui vaut d’ailleurs le Prix Nobel
de la Paix en 2012.
Mais dans le même temps, l’UE s’enfonce peu à peu dans une nouvelle crise majeure. L’incapacité à produire de la
croissance, à gérer les déséquilibres structurels des pays du Sud, la mise en place de politiques de dévaluations
internes, les stratégies non coopératives entre pays membres, la grave crise des migrants montrent les limites de la
l’Union économique et monétaire et de la PESC. Elle montre aussi les limites des formes de coordination entre
Etats. La zone euro et l’espace Schengen sont en crise. Plus grave encore, les institutions politiques européennes
semblent avoir perdu de leur légitimité. Si l’Europe apparaît toujours comme un vecteur de paix, elle n’apparaît
plus comme un vecteur de croissance et de prospérité. Le referendum britannique de juin 2016 illustre cette
défiance croissante. L’avenir de l’Union européenne dépendra de sa capacité à sortir de cette nouvelle crise.
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