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1. INTRODUCTION
1.1 Historique de la substitution (1,2)
La méthadone a été synthétisée à partir de la péthidine par des chercheurs du laboratoire Hoechst
en 1941. Elle était initialement utilisée comme antalgique par les américains à la fin de la deuxième
guerre mondiale. Son usage a été rapidement abandonné dans cette indication, les dosages utilisés
(200 mg, 3 à 4 fois par jour) étaient à l’origine de nombreux effets indésirables. Son utilisation
réapparait dans les années 1960 où Dole et Nyswander imaginent une nouvelle indication : la
substitution des patients consommateurs d’héroine. Ils utilisent le potentiel de dépendance de la
méthadone de façon délibérée afin de la substituer à l’usage d’héroine. Son utilisation se développe
peu à peu en Europe, notamment en France qui connait au début des années 1970 une vague de
toxicomanie aux opiacés. Devant les résultats positifs des essais développés dans certains pays
européens et aux états unis depuis quelques années, L’INSERM propose en 1973 un cadre
expérimental d’utilisation de la méthadone. Cependant seuls deux centres seront crées en région
parisienne. Bien que les premiers résultats montrent qu’il faut étendre l’expérimentation, les
administrations et responsables politiques s’opposent à cette époque à la généralisation de cette
pratique. La représentation négative des morphiniques considéré comme des stupéfiants est une
des causes, d’autant plus qu’il s’agissait de traiter la dépendance à une drogue par une autre drogue,
de rendre le « patient dépendant » dépendant d’une autre drogue (2). De plus les centres de
traitements spécialisés sont à cette époque faiblement médicalisés, il s’agit plus d’une prise en
charge sociale et psychologique. La dispensation de la méthadone est marginalisée. Un long
« consensus anti constitution »(2) va perdurer durant une vingtaine années, les pouvoirs publics
estimant que le système de soin français n’a pas à recourir à l’usage à la méthadone pour traiter les
patients dépendants à l’héroine. Parallèlement, on note depuis la fin des années 70 une
consommation croissante de produits codeinés dont 80% étaient utilisés en substitution par les
personnes dépendantes à héroine.
Il faudra attendre l’émergence de l’épidémie du SIDA et les ravages causés auprès des injecteurs de
drogues pour que la substitution devienne un enjeu de santé publique. Il apparait alors que la
majorité des toxicomanes est en marge du système de soin et que leur situation sanitaire et médicale
est préoccupante. En 1990 l’état français lance un appel d’offre pour offrir d’autres possibilités de
traitement par la méthadone. Un troisième centre ouvrira en région parisienne. A l’initiative d’une
mission dans les Hauts-de-Seine deux nouveaux programmes verront le jour en 1993. Parallèlement
d’autres centres obtiennent l’agrément et s’ouvrent (Lille, Toulouse, Grenoble, Nancy…). L’année
1994 verra la création des « Centre Méthadone » qui s’ouvrent dans la France entière.
S’agissant de l’aide pharmacologique, depuis la fin des années 80, des médecins généralistes,
quelques hospitaliers et des pharmaciens ont expérimenté d’autres voies dans la prise en charge
substitutive en utilisant principalement la buprénorphine et les sulfates de morphines, ceci en dehors
de tout cadre légal. Les médecins et pharmaciens s’organiseront peu à peu en réseaux de soins. Ces
pratiques démontrent leur efficience et faisabilité en médecine de ville et seront à l’origine de la
demande de l’état au laboratoire Shering-Plough de mettre sur le marché une buprénorphine à haut
dosage (BHD). La BHD est mise sur le marché en Février 1996. Considérée comme plus sûre que la
méthadone, elle sera mise à la disposition de tous mes médecins alors que la méthadone sera
réservée à la phase initiale du traitement aux centres spécialisés.