RAPPORT SUR L’ÉTAT DE SITUATION À LA RÉSIDENCE POTVIN Rédigé par Joanne Larose, conseillère à la clientèle autiste en collaboration avec Nicolas Léger-Bourgoin, conseiller en mesure et évaluation Direction des services professionnels Avril 2001 TABLE DES MATIÈRES 1. INTRODUCTION ________________________________________________________ 1 1.1. Mandat d’évaluation donné aux conseillers de la DSP _______________________________ 1 1.2 Étapes de la démarche _________________________________________________________ 1 2. Historique : de la «résidence Potvin» au «projet Potvin» _________________________ 3 2.1 Histoire de bâtiments, migration d’une clientèle____________________________________ 3 2.2 L’évolution du mandat de la résidence Potvin _____________________________________ 4 2.2.1 2.2.2 L’analyse des situations d’agression effectuée par l’Asstsas _______________________________ 5 Des recommandations pour faire suite aux travaux du comité Asstsas ________________________ 6 2.3 L’évaluation de l’implantation de la structure TEACCH à la résidence Potvin par John Dougherty, en 1998____________________________________________________________ 8 2.4 L’impact des transformations organisationnelles sur la résidence potvin ______________ 11 2.5 Recommandations actualisées depuis la visite de John Dougherty ____________________ 13 2.6 Une ambiguïté par rapport au mandat de la résidence Potvin _______________________ 13 3. Critères essentiels à une résidence pour personnes autistes ______________________ 14 3.1. Caractéristiques de la clientèle autiste à prendre en compte _________________________ 15 3.2. Les personnes présentant un trouble grave du comportement _______________________ 17 3.3 Les personnes présentant un double diagnostic ___________________________________ 20 3.4 Double diagnostic, troubles grave du comportement et autisme ______________________ 20 3.5. Qualités et compétences minimales pour l’intervention _____________________________ 21 3.6. Favoriser le développement des compétences de l’intervenant _______________________ 22 3.7. Une intervention qui favorise l’émergence et le développement des comportements adaptatifs des personnes à qui sont offerts les services______________________________ 22 3.8 Intervention auprès des TED présentant des troubles graves du comportement ________ 23 3.8.1 3.8.2 3.8.3 3.8.4 3.8.5 3.8.6 3.8.7 L’évaluation de la santé physique : __________________________________________________ La pharmacologie : ______________________________________________________________ L’analyse et la modification du comportement : ________________________________________ Le support positif du comportement (Positive behavioral support) : ________________________ TEACCH : ____________________________________________________________________ PECS : ________________________________________________________________________ Les histoires sociales :____________________________________________________________ 23 23 24 24 25 26 26 ii 3.9 Modèles de service en autisme et en troubles graves du comportement ________________ 26 3.9.1 3.9.2 3.9.3 3.9.4 Modèle intégré de type ferme : _____________________________________________________ Modèle urbain : Le Community Services for Autistic Adults and Children (CSAAC) __________ Intervention avec les loisirs________________________________________________________ May Institute et autres ____________________________________________________________ 26 27 28 28 3.10 Quelques modèles d’intervention en situation de crise______________________________ 29 3.10.1 3.10.2 3.10.3 3.10.4 3.10.5 Le programme START ___________________________________________________________ 29 Le modèle communautaire d’intervention en situation de crise de Rochester (New York) _______ 30 Modèle d’une unité de crise en Ohio_________________________________________________ 32 Le Centre de recherche et de formation de l’université de l’Oregon pour la gestion non-aversive des troubles graves du comportement __________________________________________________ 33 Quelques propositions issues des travaux du consortium _________________________________ 35 3.11 Quels seraient donc des critères essentiels à une ressource résidentielle pour personnes autistes ? ___________________________________________________________________ 36 3.11.1 3.11.2 4. Pour les personnes qui ne présentent aucun problème de comportement_____________________ 36 Pour les personnes qui présentent un trouble grave du comportement _______________________ 38 La résidence Potvin correspond-elle à ces critères? _____________________________ 39 4.1. Qui sont les personnes vivant à la résidence Potvin aujourd’hui _____________________ 39 4.2 Le personnel de la résidence Potvin _____________________________________________ 41 4.2.1 4.2.2 La structure de poste : ____________________________________________________________ 42 Le roulement de personnel à la résidence Potvin : ______________________________________ 42 4.3 L’évaluation de l’implantation de la structure TEACCH à la résidence Potvin _________ 43 4.3.1 4.3.2 4.3.3 4.3.4 L’Échelle d’Évaluation de la Structure Environnementale (EESE): ________________________ Démarche d’évaluation à l’aide de l’EESE ____________________________________________ Le traitement de l’information recueillie______________________________________________ Qui sont les intervenants interviewés ________________________________________________ 43 45 46 47 4.4 Les résultats obtenus _________________________________________________________ 48 4.4.1 Questions d’ordre général préalables aux sept sous-échelles ______________________________ 4.4.1.1 Structure physique de la résidence ________________________________________________ 4.4.1.2 L’organisation du travail à la résidence Potvin ______________________________________ 4.4.2 Les résultats globaux aux cinq premières sous-échelles : pour l’ensemble des 6 intervenants ____ 4.4.2.1. Les résultats individuels par intervenant et par résident________________________________ 4.4.2.2. Résultats à la sous échelle «communication»________________________________________ 4.4.2.3. Résultats à la sous-échelle «structure» _____________________________________________ 4.4.2.4. Résultats à la sous-échelle «socialisation» __________________________________________ 4.4.2.5 Résultats à la sous-échelle «Évaluation du niveau de développement et planification des activités»____________________________________________________________________ 4.4.2.6 Résultats à la sous-échelle «gestion du comportement»________________________________ 48 48 49 51 52 52 53 53 54 54 4.5. Analyse des résultats _________________________________________________________ 55 4.6 En conclusion : la résidence Potvin répond-elle aux critères énoncés ?________________ 58 4.6.1 4.6.2 4.6.3 4.6.4 Qualités et compétences minimales pour l’intervention __________________________________ Favoriser le développement des compétences de l’intervenant_____________________________ Évaluation des résidents __________________________________________________________ La stabilité du milieu_____________________________________________________________ 59 59 59 59 iii 4.6.5 Espace physique suffisant pour bouger _______________________________________________ 4.6.6 Adaptation de la résidence ________________________________________________________ 4.6.6.1 De façon à rendre le quotidien prévisible ___________________________________________ 4.6.6.2 Révision du bâtiment pour s’assurer qu’il réponde à des normes de sécurité pour la personne et pour les autres________________________________________________________________ 4.6.7 Organiser les temps libres _________________________________________________________ 4.6.8 Le soutien d’une équipe __________________________________________________________ 4.6.9 Garder contact avec les différents milieux de vie de cette personne _________________________ 4.6.10 Mise en place d’un plan de traitement ou de gestion du comportement ______________________ 5. 59 60 60 60 60 60 60 61 Recommandations _______________________________________________________ 61 5.1. Préalables à prendre en compte dans l’orientation résidentielle ______________________ 61 5.1.1 5.1.2 5.1.3 5.1.4 5.1.5 5.1.6 La ressource la plus légère possible _________________________________________________ Des orientations en lien avec le psi __________________________________________________ Distinguer besoins résidentiels des besoins socioprofessionnels ___________________________ Le travail en réseau pour éviter l’isolement ___________________________________________ Travailler auprès de cette clientèle par choix __________________________________________ Association avec les milieux de formation ____________________________________________ 61 61 62 62 62 62 5.2 Recommandations en lien avec les critères essentiels à une résidence pour personnes autistes_____________________________________________________________________ 62 5.2.1 5.2.2 5.2.3 5.2.4 5.2.5 La stabilité : des personnes, des lieux, des routines _____________________________________ 63 Continuité d’un milieu de vie à l’autre _______________________________________________ 64 Identification d’un intervenant responsable du suivi dans tous les milieux de vie ______________ 64 Mise en place d’une équipe de soutien _______________________________________________ 64 Mise en place, actualisation et généralisation d’un plan de traitement ou de geston du comportement, et d’un plan de développement d’un répertoire de comportements attendus __________________ 65 5.3 Recommandations en lien avec les activités socioprofessionnelles_____________________ 65 5.3.1 5.3.2 5.3.3 Départager les mandats résidentiel, socioprofessionnel et réadaptatif _______________________ 65 Des activités socioprofessionnelles à l’extérieur du milieu résidentiel _______________________ 65 La mise en place d’activités socioprofessionnelles ______________________________________ 66 5.4 Orientations résidentielles et socioprofessionnelles pour les résidents actuels de la résidence Potvin______________________________________________________________________ 66 iv LISTE DES ANNEXES Annexe 1 : Document de travail du comité ASSTSAS – Résidence Potvin Annexe 2 : Objectifs et moyens visant à la réorganisation des services à la résidence Potvin Annexe 3 : La philosophie sous-jacente au programme TEACCH Annexe 4 : Rapport de monsieur John Dougherty – Appréciation de l’implantation de TEACCH à Potvin Annexe 5 : Rapport de monsieur Gilbert Leroux Annexe 6 : Projet résidence Potvin – document de travail sur les rôles et fonctions du personnel cadre en lien avec la résidence Potvin Annexe 7 : Résidence Potvin : milieu d’hébergement spécialisé Annexe 8 : Programme de formation à l’intention du personnel de la résidence Potvin et de l’équipe de remplacement Annexe 9 : Caractéristiques des usagers de la résidence Potvin Annexe 10 : Formations reçues par les six intervenants interviewés et date de la première assignation à la résidence Potvin Annexe 11 : Échelle d’évaluation de la structure environnementale (EESE) – Liste des items pris en compte pour chacune des sous-échelles Annexe 12 : Échelle d’évaluation de la structure environnementale – Répartition des questionnaires par intervenant et par résident Annexe 13 : Résultats obtenus à l’Échelle d’évaluation de la structure environnementale Annexe 14 : Commentaires recueillis par les intervenants sur l’organisation du travail à la résidence Potvin Annexe 15 : État de situation santé et sécurité du travail – résidence Potvin 1996-1999 RAPPORT SUR L’ÉTAT DE SITUATION À LA RÉSIDENCE POTVIN 1. INTRODUCTION Depuis 1992, une ressource résidentielle accueille à Farnham des personnes présentant une déficience intellectuelle et des troubles associés. Historiquement, cette ressource a offert des services à des personnes présentant des difficultés comportementales importantes. La qualité de vie pour les résidents et les conditions de travail pour les intervenants du 1230 Potvin ont maintes fois été la cible de questionnements, pour ne pas dire de remises en question, sur le type de ressource résidentielle, l’approche clinique et l’organisation du travail qu’on y retrouvent. À l’automne 1999, un nouveau chef de service est arrivé à la résidence. Un travail de collaboration s’est alors amorcé entre les gestionnaires de la zone (5 à l’époque, 3 actuellement) et la direction des services professionnels, pour clarifier les rôles des différents conseillers de l’établissement et celui d’un consultant externe, auprès des intervenants et des résidents de la résidence Potvin. 1.1. MANDAT D’ÉVALUATION DONNÉ AUX CONSEILLERS DE LA DSP Puis, au cours de l’hiver 2000, en même temps que s’amorce dans la zone 3 l’opération «Domino», qui vise à revoir l’offre de service résidentielle pour l’ensemble des clients de cette zone, la direction des services professionnels reçoit le mandat suivant : Procéder à une analyse de l’offre de service à la résidence Potvin qui réponde aux objectifs suivants : ! Analyser les critères que devrait présenter une ressource résidentielle qui offrirait une qualité de vie pour les personnes autistes; ! Vérifier jusqu’à quel point, la résidence Potvin répond à ce profil; ! Proposer des recommandations qui soient en lien : 1° Avec les besoins des personnes qui résident actuellement à la résidence Potvin; 2° Avec l’avenir de la résidence Potvin quant au mandat qui lui est dédié. Ce mandat, réalisé par la conseillère à la clientèle autiste et le conseiller en mesure et évaluation, tous deux de la direction des services professionnels, comprend l’élaboration d’une démarche afin de recueillir toute l’information pertinente à l’évaluation. 1.2 ÉTAPES DE LA DÉMARCHE ! Mise en place d’un comité de travail pour définir le mandat de la résidence Potvin : 2 À l’automne 1999, le chef de service actuel, monsieur Nantel, avait entrepris une démarche pour faire de la résidence Potvin, le «Projet Potvin». De septembre 99 à janvier 2000, quatre sessions de travail réunissent les gestionnaires de la zone1 et deux conseillères de la DSP2. Une représentante de la DRH a participé à la première rencontre, mais par la suite, aucun représentant de cette direction n’a participé aux sessions de travail. Ces rencontres ont été l’occasion d’amorcer une réflexion de fond sur le mandat que devrait avoir la résidence Potvin, sur l’intervention qu’on devrait y faire, sur les rôles et fonctions des différents gestionnaires qui gravitent autour de cette résidence, sur la formation nécessaire et le rôle du consultant embauché, sur l’organisation du travail et le rôle que devrait jouer la direction des ressources humaines dans les conditions à mettre en place pour favoriser une certaine stabilité dans cette résidence (voir annexes 6 et 7). Les travaux de ce comité ont été suspendus lors d’un congé d’un des gestionnaires de la zone. Par la suite, la restructuration de juin 2000 a fait entrer en jeu de nouveaux acteurs dans plusieurs des postes de gestionnaires de la zone, entraînant un bris dans le rythme des travaux de ce comité. Le présent exercice constitue une occasion de faire le point sur ces travaux et d’utiliser, dans la présente réflexion, les pistes d’analyse déjà avancées par cette équipe. Aussi, plusieurs éléments sont pris en considération dans le cadre de cette analyse : ! L’historique de la «clientèle» de cette résidence, réalisé avec la collaboration de la conseillère clinique de la zone; ! Le portrait (âge, diagnostic au dossier) de chacun des résidents, réalisé par le chef de service; ! Les déclarations d’événements accidentels et des heures travaillées, informations recueillies auprès de la DRH et de la DSTF; ! Identification et traduction d’un instrument «l’EESE3» afin de procéder à une évaluation de l’implantation de l’approche inspirée de TEACCH à la résidence; ! Entrevues auprès de six intervenants, des préposés et des éducateurs, du personnel régulier et du personnel sur appel à l’aide de l’«EESE»; ! Identification des critères essentiels à une résidence pour personnes autistes. L’analyse des données extraites de ces différentes sources ont ensuite été mises en lien entre elles et avec certaines données de littérature; 1 directeur de zone, chef de programme, chef de service, conseillère clinique 2 conseillère à la clientèle autiste et conseillère spécialiste de l’intervention en autisme 3 EESE : Échelle d’Évaluation de la Structure Environnementale, traduction du ERS «Environmental Rating Scale». Van Bourgondien et Mesibov, 1989. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 3 ! Recommandations. 2. HISTORIQUE : DE LA «RÉSIDENCE POTVIN» AU «PROJET POTVIN» 2.1 HISTOIRE DE BÂTIMENTS, MIGRATION D’UNE CLIENTÈLE La plupart des résidents qui ont vécu à la résidence Potvin provenaient du «campus d’Austin» dont l’origine remonte à madame Butters. Celle-ci fonde, en 1945, le «Memorial Hospital» pour y accueillir des enfants handicapés physiques et intellectuels. Plusieurs bâtiments se sont construits autour de son hôpital : sa maison s’est appelée pendant longtemps le «main building». Rénové au début des années 80, cet édifice abritait un bureau administratif, une infirmerie, des ateliers nommés «Skills unlimited» «Mille métiers», en français - et a été baptisé «Lady Butters». Tout près de cet édifice se dressait le «Pavillon» qui regroupait deux ou trois unités. Au premier plancher se retrouvaient les personnes en fauteuil roulant et au deuxième, des personnes sans handicap physique, mais assez peu autonomes en raison de la sévérité de leur handicap intellectuel. Sur ce même site, se trouvait une imposante maison blanche nommée la «White House» où résidaient une trentaine de personnes présentant une déficience intellectuelle, de jeunes adultes pour la plupart, plusieurs trisomiques et quelques-uns présentant en plus, des difficultés comportementales. Il y avait une douzaine de jeunes hommes et environ 17 jeunes femmes. Sur le site d’Austin, se trouvaient aussi deux petits bungalows construits dans les années 60, historiquement appelés les «cottages». Chacune de ces deux maisons abritait huit personnes : une d’entre elles fut baptisée le «Nid d’aigle», et l’autre, «La Sentinelle». On retrouvait au «Nid d’aigle» plusieurs personnes présentant des troubles du comportement et à «La Sentinelle», étaient regroupées une majorité de personnes présentant des handicaps sensoriels (cécité, surdité). C’est l’ensemble des bâtiments du site d’Austin qui a été surnommé le «Campus d’Austin». Avec le mouvement de désinstitutionnalisation qui s’est amorcé au début des années 80, les résidents du «campus» ont peu à peu été dirigés vers d’autres ressources résidentielles. Ainsi, aux environs de 1980, la résidence Adélard fut la première résidence ouverte à Magog, par le centre Butters. Les premières personnes qui sont parties du campus d’Austin pour aller vivre à Adélard sont décrites aujourd’hui comme ayant présenté une déficience intellectuelle légère, un fonctionnement très autonome, sans aucun trouble de comportement. La résidence Adélard accueillait huit clients qui demandaient peu de supervision. Le fonctionnement de cette résidence était assuré par un seul intervenant durant la journée, un seul intervenant en soirée et une personne était présente durant la nuit. Un chef de service avait la responsabilité de superviser cette seule résidence. Ce responsable travaillait trois jours par semaine au plan administratif et deux jours par semaine sur le plancher. Il travaillait aussi une fin de semaine sur deux. Souvent le responsable de la résidence était un éducateur; il y avait donc une présence éducateur en tout temps. Il y avait, dans ces résidences, une vision réadaptative pour tous les résidents. On offrait un service qui visait à dépasser les soins de base et l’entretien ménager pour U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 4 soutenir, chez les personnes, le développement des apprentissages. Avec la poursuite du mouvement de « désins », les clients de la résidence Adélard ont ensuite été dirigés vers des familles d’accueil ou même des appartements supervisés. À cette époque, le réseau des familles d’accueil relevait de la résidence Adélard pour le répit et le suivi des clients. Le répit des familles d’accueil était offert à la résidence. Les fins de semaine, on pouvait donc retrouver de 12 à 14 usagers en même temps, mais en général, tout se passait bien, car ces personnes ne présentaient aucune difficulté particulière et elles étaient toutes bien heureuses de se retrouver. Au fur et à mesure que des clients autonomes de la résidence Adélard quittaient pour aller vers des ressources plus légères, leur place à la résidence était comblée par d’autres clients venant du campus d’Austin. Plusieurs usagers, vivant antérieurement à la «Maison blanche» et au «Nid d’aigle», et présentant des troubles du comportement, se sont peu à peu retrouvés à Adélard; alors que la majorité des clients vivant à «La Sentinelle» et présentant majoritairement une déficience intellectuelle associée à des handicaps sensoriels sont déménagés à Sutton à la résidence Western (aux environ de 1988-89). Avec les années, les personnes les plus fonctionnelles ont trouvé des endroits pour être intégrées dans la communauté et les personnes présentant des problématiques complexes ont été dirigées vers Adélard et Western. Pour répondre aux besoins de cette clientèle, moins autonome, le nombre d’employés en place a augmenté : dans toutes les résidences, on est passé à deux employés sur le plancher en soirée et à un travailleur en présence la nuit. Tous les résidents quittaient la résidence durant la journée pour se rendre à l’atelier. Les activités en atelier étaient moins axées sur la production et se situaient à mi-chemin entre les SAHT et le type d’activités proposées en atelier par Opus : il y avait moins de contrats et plus d’activités dites occupationnelles. Au fur et à mesure qu’une place se libérait à Adélard, celle-ci était comblée par une nouvelle personne, sans préoccupation particulière quant au pairage «problématique clientèle versus le type de résidence». Avec le temps, on a constaté que les personnes qui se sont retrouvées dans cette résidence présentaient de plus en plus de besoins complexes. En 1990-91, les résidents et les employés d’Adélard sont déménagés à Potvin. Ce déménagement s’est fait parce que la ville de Magog, où est située la résidence Adélard, n’était plus sur le territoire du centre Butters. Les huit résidents qui sont arrivés à Potvin en 1990, ne sont pas les mêmes personnes qui habitent cette résidence aujourd’hui. 2.2 L’ÉVOLUTION DU MANDAT DE LA RÉSIDENCE POTVIN Six résidents, des accidents, des incidents et un roulement de personnel incessant U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 5 Vers 1995, on aurait commencé à parler de cette résidence comme étant potentiellement destinée à accueillir des personnes autistes. 2.2.1 L’ANALYSE DES SITUATIONS D’AGRESSION EFFECTUÉE PAR L’ASSTSAS Suite au nombre imposant d’accidents et d’incidents à la résidence Potvin (162 cas d’agression, déclarés entre le 1er janvier 1996 et le 31 août 1996), en 1997, un comité paritaire, formé de représentants de plusieurs instances, travaille à l’implantation d’un programme de prévention des agressions à la résidence Potvin (voir annexes 1 et 2). À ce moment, afin de comprendre la problématique des agressions et d’y trouver une solution, on procède à une observation systématique de l’activité des intervenants auprès des résidents. Cette observation permet de constater que : ! ! 94% du temps, le travail est consacré à la satisfaction des besoins physiques des résidents ; seulement 6% du temps de travail est consacré à interagir avec eux sur le plan relationnel. L’annexe 1 présente différentes statistiques en lien avec ces observations qui ont mis en évidence que la communication entre les intervenants et les résidents constituait une cible d’amélioration à considérer dans la prévention des situations d’agression. Observations en lien avec les agressions Partage du temps de travail auprès des résidents Travail consacré aux Interactions relationnelles Travail consacré à la Satisfaction des besoins physiques 6% 94 % Une analyse plus fine des communications permet de constater que, sur une période de 7 heures trente de travail durant la journée, 238 demandes sont formulées par les intervenants et les résidents et que la très grande majorité de ces demandes (86.6%) sont formulées par les intervenants; un peu plus de la moitié de ces demandes (52.1%) sont adressées à deux résidents en particulier; 76.1% des demandes sont faites verbalement alors que 23.9% le sont par un geste. ANALYSE DES COMMUNICATIONS SUR UNE DURÉE DE 7 H 30 (NOMBRE DE DEMANDES : INTERVENANTS + RÉSIDENTS= 238) INTERVENANTS 86.6% des demandes : U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 RÉSIDENTS 13.4% des demandes : 6 76.1% = demandes verbales 23.9% = demandes gestuelles Cette observation permet aussi de constater que, lorsqu’une demande est faite – que ce soit par un intervenant ou par un résident - une réponse est apportée une fois sur deux (52.1%); toutefois, les intervenants reçoivent une réponse à leurs demandes dans une proportion de 56.8% alors que les résidents reçoivent une réponse à leurs demandes que dans 25% des cas seulement. Pourcentage de réponses reçues 2.2.2 Intervenants Résidents 56.8% 25% DES RECOMMANDATIONS POUR FAIRE SUITE AUX TRAVAUX DU COMITÉ ASSTSAS Pour répondre aux différents problèmes soulevés par cet état de situation, des objectifs et des moyens sont proposés dans quatre champs d’intervention (voir annexe 2) : ! ! ! ! reconnaissance des limites d’intervention (c’est-à-dire cibler la clientèle); formation du personnel; communication entre les membres de l’équipe; planification et suivi. Le contenu du document de l’annexe 2 constitue en quelque sorte les assises de ce qu’il serait convenu de nommer «le projet Potvin». Il est alors suggéré : ! Au plan de la reconnaissance des limites : Que cette résidence soit ciblée pour offrir des services à une clientèle homogène d’adultes présentant un potentiel agressif en plus de caractéristiques d’autisme et pouvant profiter d’une programmation de type TEACCH; c’est là aussi que sont présentées certaines caractéristiques personnelles que devraient présenter les intervenants qui acceptent de travailler auprès des résidents de cette ressource résidentielle. Il y est suggéré que la direction des ressources humaines «mette sur pied une liste de rappel spécialisée afin de mieux faire face aux limites habituelles» de l’organisation de travail. C’est aussi là qu’il est proposé de limiter le nombre de résidents à un maximum de six. ! Au plan de la formation : Dans le champ de la formation, tout un programme est proposé : sensibilisation aux troubles envahissants du développement, formation TEACCH avec suivis réguliers U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 7 dans le milieu, techniques d’intervention préventive et techniques d’intervention non abusive avec suivi régulier, techniques d’observation, analyse fonctionnelle des comportements, approches d’intervention positive, et «approches d’intervention à restriction minimale (diversion, réorientation du comportement etc.)»; on recommande alors que seuls les intervenants qui ont réussi avec succès ces formations puissent être affectés à la résidence Potvin et qu’il y ait toujours un travailleur expérimenté en présence à chaque quart de travail. ! Au plan de la communication dans l’équipe : Plusieurs moyens sont proposés pour favoriser une communication efficace et un fonctionnement approprié des membres de l’équipe : − la mise en place de réunions d’équipe régulières, utilisation efficace du livre de bord : − la mise en place de réunions de ventilation pour l’ensemble du personnel; − une supervision clinique et administrative régulière de tout le personnel par le chef de service; − une responsabilisation de chacun des intervenants quant à la bonne communication interpersonnelle dans l’équipe. ! Au plan de la planification et du suivi des activités de réadaptation : Plusieurs moyens sont proposés dont l’utilisation d’enregistrements vidéo pour mieux comprendre et interpréter certains comportements de la clientèle : − l’établissement d’une liste des médecins spécialistes ouverts et disponibles à suivre cette clientèle; − l’accès, pour les travailleurs de Potvin, aux ressources matérielles et aux équipements requis pour prévenir les comportements agressifs; − l’achat de matériel pertinent aux activités prévues et requises dans le programme TEACCH, et − le «partenariat avec les ressources de jour et les services de travail, afin de permettre à la clientèle d’avoir accès à un minimum d’activités [socioprofessionnelles]…» ou − l’accès à divers contrats ou matériel pertinents à la programmation. En même temps que la fusion des établissements (Butters-Savoy avec Horizon) entraîne des transformations importantes au niveau de l’encadrement et de la direction de l’établissement et une instabilité dans l’ensemble de l’organisation, des actions concrètes sont entreprises à la résidence Potvin pour tenter d’actualiser certaines des recommandations issues des travaux de ce comité paritaire. Des efforts sont faits pour améliorer la qualité de vie des personnes et l’organisation du travail à la résidence Potvin. Des aménagements physiques sont faits pour prévenir certaines situations pouvant entraîner des comportements d’agression. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 8 C’est aussi dans le cadre des suites de ces recommandations que monsieur Gilbert Leroux, psychologue et formateur reconnu par la division TEACCH de Caroline du Nord, est embauché à titre de consultant externe pour implanter à la résidence Potvin une approche inspirée du programme TEACCH4. À l’automne 97, une formation de deux jours est donnée au personnel régulier de la résidence Potvin. L’objectif ultime de cette formation est de donner aux intervenants des moyens de diminuer les occasions susceptibles d’entraîner des comportements d’agression, en mettant en place des structures qui permettent de rendre leur environnement prévisible et en leur donnant des moyens de communication, augmentant du même coup la qualité de vie des clients et des intervenants. La formation vise entre autres à donner aux intervenants des connaissances théoriques sur les TED et leurs déficits, mais surtout des moyens pratiques pour prévenir au maximum les comportements excessifs d’agression, d’automutilation, de rituels stéréotypés. Tout le personnel régulier de la résidence Potvin a pu bénéficier de ces deux jours de formation, puis de «coaching» sur le terrain. Il eut été intéressant de vérifier combien de personnes avaient reçu cette formation initiale et combien de personnes de ce groupe travaillent encore dans cette résidence. Nous avons la réponse à cette question pour les six intervenants interviewés dans le cadre de la présente démarche, mais cette information n’a pu être rendue disponible pour l’ensemble des intervenants qui ont travaillé à Potvin depuis 1997. Durant les deux jours de formation, un survol de la philosophie et de l’approche a été fait en insistant particulièrement sur les sphères de la structure et de la communication. On y a présenté, entre autres, comment la structure physique de l’environnement peut aider la personne à comprendre ce qui est attendu d’elle dans chaque pièce de la maison, diminuant d’autant un niveau potentiel d’anxiété; et comment cette structure peut être raffinée par l’implantation, pour chacune des personnes, d’un horaire adapté à son niveau de fonctionnement (objets, images, pictogrammes, mots) d’un système pour l’utilisation de son horaire et éventuellement de moyens de communication alternatifs : échanges de pictogrammes (PECS5), cahiers de communication ou autres. L’objectif de l’intervention dans cette approche, c’est d’adapter l’environnement de façon à rendre la personne autonome; en fait, elle apprend à se référer à une structure prévisible plutôt que de tenter de se référer aux personnes qui le sont beaucoup moins. L’annexe 3 présente la philosophie sous-jacente à l’approche TEACCH. 2.3 4 5 L’ÉVALUATION DE L’IMPLANTATION DE LA STRUCTURE TEACCH À LA RÉSIDENCE POTVIN PAR JOHN DOUGHERTY, EN 1998 TEACCH : Treatment and Education of Autistic and related Communication handicapped Children, traduite en français par Traitement et Éducation pour Autistes (troubles envahissants du développement) et autres Enfants ayant un Handicap de Communication, tiré du document « Formation à l’autisme » par Gilbert Leroux Document distribué aux intervenants lors de la formation à l’automne 97. PECS: Picture Exchange Communication System U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 9 En mars 1998, soit six mois après la formation offerte par monsieur Leroux, monsieur John Dougherty, directeur clinique du programme TEACCH à Greenville, est invité à la résidence Potvin. Voici, brièvement présentées, ses observations et recommandations pour bonifier la structure en place (annexe 4) : 1. Le financement de cette ressource − Le rehaussement de la rémunération constitue une incitation pour maintenir dans la ressource des intervenants «formés». − Un budget adéquat devrait être mis à la disposition de la résidence pour faciliter l’achat de matériel nécessaire pour «créer» les horaires, les structures de travail, les gabarits et les activités qui seront présentées aux résidents. 2. Activités dans la communauté − Permettre aux résidents de faire des activités dans la communauté et préférablement, qu’ils puissent avoir à leur disposition un véhicule pour le transport. 3. Le nombre d’intervenants à la résidence est insuffisant Augmenter le nombre de postes permanents et garder le personnel en place pour au moins deux ans. Le roulement de personnel mine rapidement la qualité de l’intervention dans une ressource résidentielle. 4. Implication directe et formation de base de tous les gestionnaires et du personnel ayant une responsabilité administrative dans une telle résidence − Cela permet de mieux comprendre certaines demandes qui pourraient leur être faites en lien avec cette approche pour les usagers. 5. Précision du mandat de cette résidence − Il est recommandé de n’accepter que des personnes qui ont un diagnostic d’autisme; − Et parmi celles-ci, de ne recevoir qu’un maximum de deux personnes présentant des problèmes de comportement. 6. Recrutement du personnel en fonction de leur motivation et de leur désir de travailler auprès des personnes autistes − Les intervenants motivés à apprendre et à rechercher des solutions en équipe sont les mieux habiletés à travailler dans une ressource résidentielle pour personnes autistes. 7. Formation de base, puis une formation continue du personnel U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 10 − Dans le cadre d’un modèle TEACCH, il est recommandé que tous les membres du personnel actuel et futur puissent recevoir de 4 à 5 jours de formation pratique (hands-on) sur l’application de TEACCH en ressource résidentielle. − Assurer des formations sur les caractéristiques de l’autisme, des techniques d’enseignement structuré, sur l’autonomie, la communication et les habiletés sociales et de loisir, sur la gestion du comportement. − Des formations à l’interne et des consultations régulières auprès des consultants experts seront essentielles afin que le personnel se sente supporté dans son développement concernant l’implantation des principes de TEACCH. 8. Réunions entre les différents quarts de travail − Cela permet d’échanger directement et verbalement les informations concernant le fonctionnement de la résidence, les activités et les comportements des clients durant la journée. 9. Remise en question de certains postes Par exemple, celui de cuisinière. Cette personne doit faire uniquement de la cuisine ou ne devrait-elle pas être impliquée auprès des résidents dans des activités impliquant l’apprentissage d’activités de cuisine, par exemple. 10. Le rôle du chef de service : englober les tâches administratives, cliniques et de supervision − L’implication du chef de service directement dans le service à la clientèle est un atout pour une meilleure compréhension des difficultés vécues par les employés. 11. La résidence en tant que bâtiment − Au plan de la résidence comme telle, la maison convient bien aux besoins du programme : une clôture à l’arrière permet d’avoir de l’espace pour des activités à l’extérieur, chacun des résidents a sa chambre propre, la salle à dîner et la salle de séjour sont suffisamment grandes pour accommoder tous les résidents. − Il suggère toutefois l’installation d’une porte coulissante entre la pièce utilisée pour les pauses des clients et la salle de programmation. 12. Renforcer l’aspect sécuritaire du bâtiment − Il suggère aussi de renforcer l’aspect sécuritaire du bâtiment de façon à pouvoir faire face aux problèmes de comportements (murs, fenêtres, salles de bain), système d’alarme pour prévenir les fugues. 13. Programmation : augmenter l’autonomie, le degré de structure et l’intensité de la programmation U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 11 − Il recommande de travailler plus d’activités d’autonomie avec les clients. − Il mentionne qu’il y a un bon départ, mais il dit du même coup qu’il faudra un degré de structure et de programmation beaucoup plus intensif pour atteindre des objectifs de réadaptation. 14. Réduction de la médication − La structure mise en place, avec les horaires, les systèmes de travail, les tâches autonomes et les buts de communication pourra éventuellement permettre de diminuer la médication auprès de la clientèle. − Il recommande donc de s’associer un médecin de façon à procéder à une réduction de la médication tout en procédant à une augmentation de la structure. 15. Équilibrer le temps passé à la résidence et dans la communauté − La qualité de vie des personnes et leur propension à s’engager dans des comportements inappropriés seront influencées par leur habileté à fréquenter des environnements dans la communauté. 2.4 L’IMPACT DES TRANSFORMATIONS ORGANISATIONNELLES SUR LA RÉSIDENCE POTVIN Au printemps 99, madame Landry quitte son poste de chef de service à la résidence Potvin pour assumer un poste de conseillère spécialiste de l’intervention en autisme à la DSP. Au moment où elle quitte, l’établissement est en pleine «reconstruction» : alors qu’elle était responsable de la seule résidence Potvin, son successeur doit désormais partager son temps entre les résidences Potvin et Kirk. De plus, en l’espace de trois mois, il y a eu des changements de personnes dans les postes de directeur de zone, puis de directeur général, et deux personnes différentes ont occupé le poste de chef de service à la résidence avant que monsieur Nantel n’entre en fonction qu’à l’automne 99. Entre-temps, monsieur Leroux, consultant externe, est demeuré une personne de référence au plan clinique pendant un certain temps. Toutefois, durant la période estivale (de juin à septembre), monsieur Leroux était absent. Les intervenants se sont retrouvés sans soutien clinique et ce, particulièrement durant la période où un résident à besoins très complexes a été introduit à la résidence avec une équipe imposante de deux intervenants par quart de travail à lui seul. Durant l’année 1999-2000, le groupe de travail animé par monsieur Nantel propose «que le mandat de la résidence Potvin soit d’être un milieu de transition de réadaptation intensive afin d’orienter ensuite la personne vers un milieu de vie plus souple. Il est alors mentionné que l’important c’est de voir comment l’intervention à la résidence a amélioré la qualité de vie des résidents». Un document de travail en lien avec les rôles et fonctions (annexe 6) est remis à l’équipe pour discussion. De plus, à la demande du directeur de zone, la conseillère clinique, madame Bellefleur, et la chef de programme, madame Bélisle, soumettent au groupe un document de travail intitulé «Milieu d’hébergement U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 12 spécialisé» (annexe 7) et un programme de formation à l’intention du personnel de la résidence Potvin est produit (annexe 8). Lors d’une rencontre du groupe de travail, madame Bélisle, chef de programme, informe les membres du groupe d’une démarche qui était sur le point de s’amorcer entre la direction et les syndicats pour évaluer la possibilité de mettre en place un mécanisme favorisant une stabilité au niveau du personnel lors des remplacements. Les membres du groupe de travail conviennent qu’un représentant des ressources humaines devrait prendre part aux travaux du comité. Une rencontre du groupe de travail est prévue pour la fin janvier 2000. Cette rencontre fut reportée à une date ultérieure et ne s’est finalement jamais tenue, laissant les travaux du groupe en suspens. Interviewé dans le cadre de la présente analyse, en mai 2000, monsieur Leroux met pour sa part en perspective les différents facteurs qui ont contribué, selon lui, à une détérioration du climat à la résidence Potvin entre 1997 et 1999. Selon lui, la succession des chefs de service à l’été 1999, le roulement de personnel, l’introduction à la résidence Potvin d’un sixième résident présentant une problématique comportementale complexe et arrivant avec sa propre équipe de deux intervenants par quart de travail ont été des facteurs précipitants. De plus, pendant cette période, plusieurs intervenants ont vécu des conditions personnelles qui ont contribué à alourdir l’ensemble de la situation et entraîner une démotivation et une démobilisation générale. Selon monsieur Leroux, il aurait été important que le chef de service soit présent lorsqu’il venait offrir un entraînement terrain; le fait de déléguer le coaching aux intervenants en présence entraînât nécessairement des inégalités dans les façons d’aborder les interventions. Monsieur Leroux a aussi fait parvenir à l’organisation un rapport (annexe 5) dans lequel il fait part de ses observations quant à la détérioration du climat à la résidence Potvin. Monsieur Leroux déplore alors le fait qu’il n’y ait pas eu de suites au rapport produit par monsieur Dougherty. Entre-temps, un nouveau plan d’organisation, en juin 2000, a contribué au changement des acteurs dans ce système élargi : un nouveau directeur de zone, une nouvelle chef de programme, un nouveau directeur général, une nouvelle directrice des ressources humaines avec une équipe en partie renouvelée autour d’elle. C’est ainsi que le groupe de travail s’est effrité. Toutefois, des contacts sont demeurés entre le chef de service de la résidence et la direction des services professionnels pour demander de limiter, pour un temps, les interventions sur le terrain du consultant en autisme, de façon à pouvoir consolider l’équipe en minimisant au maximum les interférences potentielles. On devait aussi revoir comment pourrait être transformé le rôle et le mandat de monsieur Leroux. En parallèle à cette demande de monsieur Nantel, monsieur Leroux s’adresse à la direction des services professionnels pour manifester son inquiétude devant les changements qui s’annoncent dans la zone, craignant que ceux-ci ne contribuent à U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 13 détériorer encore davantage un climat de travail déjà la baisse. Monsieur Leroux n’offre plus de soutien à la résidence Potvin depuis le printemps 2000. 2.5 RECOMMANDATIONS ACTUALISÉES DEPUIS LA VISITE DE JOHN DOUGHERTY En voici certaines : ! ! ! ! Il y a plus de sorties dans la communauté; Des réunions ont été instaurées entre les quarts de travail; Il y a eu certaines modifications au plan des postes; Des modifications ont été apportées au bâtiment : fenêtres incassables, systèmes d’alarme aux portes, etc.; ! La programmation des clients s’est améliorée, mais on ne peut pas vraiment parler de fonctionnement autonome, car ils ont encore besoin de beaucoup d’aide pour suivre leur horaire. Trois ans après la présentation de ces recommandations, nous constatons toutefois que plusieurs de celles-ci demeurent encore sans écho. Encore une fois, plusieurs changements vécus dans l’organisation et à la résidence Potvin en particulier, ont pu contribuer à briser un rythme et une certaine ardeur qui avait suivi les formations de monsieur Leroux et, par la suite la visite de monsieur Dougherty. 2.6 UNE AMBIGUÏTÉ PAR RAPPORT AU MANDAT DE LA RÉSIDENCE POTVIN Dans les discussions au sujet du mandat de cette résidence, il semble qu’il y ait souvent eu une superposition d’idées et à la limite, une confusion entre «personnes autistes» et «personnes présentant des troubles de comportement». Au moins deux formulations différentes ont été données quant à un mandat pour la résidence Potvin : U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 14 1. En 1997, dans les suites au document de travail du comité ASSTAS (annexe 5), le premier objectif visant la réorganisation des services à la résidence Potvin touche la «reconnaissance de nos limites d’intervention», il y est mentionné au plan de la clientèle, ce qui suit :Desservir une clientèle plus homogène ayant des caractéristiques autistiques et ayant aussi besoin d’une programmation de type TEACCH. Cette clientèle peut présenter : ! un potentiel agressif; ! des troubles du sommeil; ! de l’hyperactivité; ! des troubles attentionnels; ! diverses stéréotypies excessives et fluctuantes; ! n’a accès à aucun service de jour; ! ou à un service de travail (à cause des limites de nos programmes d’intervention). «Nous recommandons que la résidence Potvin soit dotée d’une... ... mission spéciale pour accueillir une clientèle autistique adulte ayant un potentiel agressif. » 2. En septembre 1999, lors des sessions de travail du comité que nous appellerons le comité du «Projet Potvin», le mandat de la résidence est défini comme suit6 : «Le mandat de la résidence Potvin est d’être un milieu de transition de réadaptation intensive afin d’orienter ensuite la personne vers un milieu de vie plus souple.» 3. CRITÈRES AUTISTES ESSENTIELS À UNE RÉSIDENCE POUR PERSONNES Ces différentes définitions sont présentées ici pour aider à préciser le mandat que l’on pourrait vouloir donner à la résidence Potvin. On pourrait vouloir en faire une résidence pour personnes autistes, qu’elles aient ou non 6 Résidence Potvin, rôles et fonctions du personnel d’encadrement de la zone 5 et de la Direction des services professionnels, compte-rendu de la rencontre tenue le 8 novembre 1999, page 2, point 3 (disponible sur demande à la direction des services professionnels). U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 15 des problèmes de comportement; on pourrait en faire une résidence pour personnes présentant un trouble de comportement qu’elles soient ou non autistes, ou encore, comme cela semble être le cas pour l’instant, en faire une résidence pour personnes présentant un TED et des troubles graves de comportement. Une fois la clientèle bien identifiée, il faudrait ensuite définir le statut de cette résidence. Veut-on en faire un lieu d’hébergement, c’est-à-dire un lieu où habitent les personnes? Veut-on en faire un lieu de «traitement» ou de «réadaptation», transitoire? L’important étant de préciser les caractéristiques que devraient avoir les personnes qui y vivent et les structures à mettre en place pour améliorer leur qualité de vie ou pour atteindre les objectifs de réadaptation prévus. 3.1. CARACTÉRISTIQUES DE LA CLIENTÈLE AUTISTE À PRENDRE EN COMPTE7 La personne autiste présente à la fois des «déficits» aux plans des interactions sociales et de la communication et, en quelque sorte, des «comportements en trop» qui sont de l’ordre des rituels et des mouvements stéréotypés. Plusieurs de ces caractéristiques trouvent leur origine dans des facteurs neurologiques, neurobiologiques, génétiques et possiblement aussi infectieux. Parmi, les différentes atteintes neurologiques, la modification de la structure cérébelleuse, entraîne des conséquences importantes. Cette structure du cerveau, par où passent les circuits nerveux responsables d’apporter au «centre de traitement de l’information» les messages sensoriels venant de la périphérie, n’a pas connu un développement optimal. Des chercheurs (réf. Bauman8) ont démontré la présence dans le cervelet des personnes autistes de cellules sous-développées ou d’un nombre de cellules plus petit que dans la population en général. Cet état de fait entraîne des difficultés à décoder l’information sensorielle et celles-ci se retrouvent dans le répertoire comportemental de la personne en termes d’hypo ou d’hypersensibilité pour chacun des 5 sens habituellement considérés comme tels et aussi au plan de la proprioception (sensations corporelles en profondeur, liées à l’interaction des os, des muscles et ligaments dans les mouvements) et du vestibulaire (sensation de bouger dans l’espace). Le retard de maturation métabolique des lobes frontaux tout comme les lésions frontales sont très souvent apportés comme hypothèses cliniques pour expliquer les comportements 7 Les annexes, 2 et 3 présentent respectivement des définitions des « Troubles envahissants du développement », des « Troubles graves du comportement » et du « Double diagnostic ». 8 BAUMAN, Margaret, L. (1998). Neuro-anatomy : Cerebellar Dysfunction Spectrum-Cognitive/Motor, Annales du congrès “ The Spectrum of Developmental disabilities XX : Autism-Stretching the concept”, tenu le 30 mars et le 1er avril 1998 au John Hopkins Medical Institutions, Maryland U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 16 d’impulsivité, d’hyperactivité, d’agitation et éventuellement d’agression retrouve chez plusieurs personnes autistes. que l’on Les fonctions exécutives se trouvent aussi atteintes et on peut en percevoir les conséquences dans les mouvements stéréotypés et certains rituels présents dans un certain sous-groupe de ces personnes. Parmi les hypothèses actuelles sur les causes possibles des pathologies présentant un portrait clinique d’autisme, certains facteurs biochimiques sont aussi mis en évidence : des éléments de leur «chimie interne» présenteraient une constitution ou un fonctionnement différent de la norme. Ainsi, le taux de certains neurotransmetteurs serait différent chez la personne autiste versus la population en général; certaines recherches parlent d’intolérance à certaines substances alimentaires, certaines enzymes digestives étant absentes ou faisant mal leur travail, entraîneraient une accumulation dans le sang de déchets toxiques qui interféreraient avec un fonctionnement optimal du système nerveux central ayant pour conséquence une réduction de la capacité de fonctionnement du système nerveux central, une difficulté à être disponible et réceptif à l’environnement et ainsi, une atteinte au niveau de l’apprentissage, de l’imitation, etc. Ces différentes atteintes «physiologiques» se traduisent par un répertoire de comportements caractéristiques aux personnes autistes : ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! difficultés à établir un contact oculaire; difficulté à décoder le langage verbal; difficulté à décoder aussi les signes non-verbaux du langage; préférence à l’isolement, au retrait; insensibilité à la douleur; absence de crainte envers les vrais dangers; résistance aux contacts physiques (n’aime pas se faire toucher); résistance aux changements; fixations; fascination envers les objets qui tournent; mouvements corporels stéréotypés; préoccupation excessive et persistante envers des objets bien précis; impulsivité; persévération; hyperactivité; tendance à fuguer; comportements d’agression envers l’environnement, envers soi, envers les autres; problèmes de sommeil; apparitions cycliques de troubles de comportement; pathologies associées. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 17 Tous ces comportements ne se retrouvent pas tous en même temps chez une même personne. Même si dans cette liste, il est question de comportements d’agression, il faut bien noter que toutes les personnes atteintes d’autisme ne présentent pas nécessairement des comportements d’agression. Une personne peut avoir un diagnostic d’autisme et ne présenter aucun de ces comportements. Le répertoire de comportements présentés ci-dessus représente malgré tout un réel défi pour qui veut ou doit partager des moments de vie avec ces personnes. Vivre avec des personnes présentant un portrait clinique d’autisme implique, de la part de la famille, des aidants ou du personnel, une patience réelle, une attitude basée sur la conviction que l’on peut trouver le moyen qui aidera la personne autiste à mieux comprendre le monde dans lequel elle vit et qu’avec les moyens alternatifs adéquats mis à sa disposition, cette personne arrivera à communiquer avec son entourage, à trouver des façons pour fonctionner avec le monde, à vivre dans la communauté. 3.2. LES PERSONNES PRÉSENTANT UN TROUBLE GRAVE DU COMPORTEMENT Dans son rapport sur les troubles graves du comportement, le consortium formé du CCPE9 et de l’ASMC10 démontre la difficulté à cerner la notion de trouble grave du comportement qui réfère à plusieurs concepts différents : 1. La notion de «comportements destructeurs» (les comportements agressifs, d’automutilation causant des blessures requérant une intervention médicale, ou fréquents, ou impliquant la destruction de la propriété) : ! ces comportements destructeurs seraient plus fréquents chez les hommes et chez les personnes non-verbales; ! la fréquence croîtrait en fonction de la sévérité de la déficience intellectuelle; ! seraient plus fréquents dans les milieux résidentiels restrictifs; ! sont plus élevés chez les personnes déficientes intellectuelles atteintes de maladie mentale. 2. La notion de «comportements qui posent un défi» à l’intervenant et aux services («challenging behavior», Bruininks et al. 1994). L’ICAP11 mesure la fréquence et l’intensité de 8 catégories de comportements : ! comportements qui blessent les autres; ! qui blessent l’individu; ! destructeurs pour la propriété; 9 CCPE : Centre de consultation psychologique et éducationnelle inc. 10 ASMC : Association scientifique pour la modification du comportement 11 ICAP : Inventory for Client and Agency Planning U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 18 ! ! ! ! ! qui dérangent; qui sont des habitudes peu fréquentes ou répétitives; qui constituent un comportement socialement offensant; qui constituent un comportement de retrait; qui constituent un comportement non coopératif. 3. La notion de «comportements agressifs» : termes utilisés par Gardner et Moffatt (1990), qui en estiment la prévalence entre 9% et 24% chez les personnes présentant une déficience intellectuelle. Cette proportion s’amplifie à mesure que la sévérité du retard mental augmente (5.5% en déficience intellectuelle légère et 17.3% en retard mental profond). 4. La notion de «comportements perturbateurs» («disruptive behavior»), Attwood et Joachin (1994) définissent comme suit : ! «tout comportement qui implique une blessure substantielle ou qui requiert un traitement hospitalier, suite à une action violente d’une autre personne. Tout accident à un membre du personnel qui donne lieu à un rapport écrit et dont la blessure est apparemment causée par une action délibérée du client»; ! «tout comportement qui a pour effet d’apeurer un membre du personnel ou un autre client; par exemple lorsqu’un client renverse le mobilier, pousse ses pairs ou les menaces»; ! «tout client pour lequel on doit recourir à une procédure d’intervention d’urgence (police, PRN, services psychiatriques)». Afin de rendre «opérationnelle» la notion de trouble grave du comportement, le consortium propose de tenir compte des facteurs suivants : ! la gravité : «ces troubles rendent impérieux leur cessation»; les formes de la gravité sont multiples, mais la dénomination commune de ces formes est que l’intégrité matérielle, ou la santé, ou la santé mentale, ou même la survie de ces personnes sont en cause; leurs comportements sont marqués par la dangerosité»; ! la transgression : les troubles de comportement défient le milieu, ses normes, ses conventions, ses valeurs; tous les milieux y réagissent. Ces comportements dépassent les limites les plus permissives; ils transgressent un code de conduite et de morale, ils ont la «caractéristique d’être inadmissibles par consensus naturel et universel, c’est-à-dire partout, dans toute culture»; ! la dangerosité : le concept de dangerosité serait davantage un concept légal que scientifique (Sprag,1993). Ce concept est relatif. «Des intervenants habitués à gérer des comportements agressifs, interviendront tôt afin d’empêcher l’escalade de comportements plus violents. Certains milieux résidentiels auront davantage de moyens disponibles pour permettre une meilleure gestion des comportements agressifs (comme des chambres individuelles, un PRN, une politique de contention ou d’isolement). Confrontés à une crise, ils seront moins dépourvus pour intervenir. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 19 Il ne faut pas sous-estimer l’influence des facteurs neuropsychologiques dans l’évaluation de la dangerosité et des troubles mentaux chez les personnes ayant une déficience intellectuelle (Sabourin, 199512, cité dans le document du consortium)»; ! La perte de contact avec la réalité : «…les personnes souffrant de troubles graves du comportement ont un problème d’accès et de maintien dans la réalité. Par exemple, quand une personne ne peut comprendre cette réalité en raison d’une déficience intellectuelle et y réagit avec antagonisme ou démesure, elle est limitée d’accès. Quand une personne est envahie de délusions ou d’hallucinations, elle perd le contact avec le réel… Quand une personne agresse son propre corps et se dissocie d’avec elle-même. Quand une autre agresse les personnes qui l’entourent, elle distend son lien d’ancrage social jusqu’à la rupture. Dans tous les troubles graves, il y a diminution, distorsion ou blessure dans ce lien avec la réalité des autres ou des choses. Les personnes placées à long terme dans un hôpital psychiatrique sur la présomption qu’elles y sont parce qu’elles constituent pour elles-mêmes ou pour les autres une menace qu’on ne peut éradiquer (McGee et al.,1984), sont réputées en rupture plus ou moins totale de réalité13 ». Ainsi, les membres du consortium retiennent la définition suivante : «Le trouble grave du comportement se définit comme l’action ou la séquence d’actions généralement motrices, toujours violentes et destructrices, associées à un handicap ou à une maladie mentale. Ce trouble apparaissant être d’origine bio-psycho-sociale, ces actions étant émises par une personne en réaction à une stimulation environnante ou à un état interne et obéissant parfois à une certaine cyclicité, dont la nature et l’intensité sont telles que ces actions attentent dangereusement à l’intégrité de sa personne, à sa santé, à l’intégrité de la personne des autres, à leur santé, à leur santé mentale ou enfin, à l’environnement. Ce comportement est l’objet d’une tolérance variable selon les milieux, les cultures, les circonstances)»14. Le trouble grave du comportement est en quelque sorte le symptôme que quelque chose ne va pas et que pour y remédier ou en atténuer l’expression ou l’impact, il faut dans un premier temps identifier l’origine du trouble et la fonction de ce comportement dans le répertoire comportemental de la personne. 12 SABOURIN, G. (1995). L’influence des facteurs neuropsychologiques dans l’évaluation de la dangerosité et des troubles mentaux chez les personnes ayant une déficience intellectuelle. Dans : ASMC (1995) Synthèse des communications, deuxième congrès de l’Association Scientifique pour la Modification du Comportement sur les troubles de santé mentale chez les personnes déficientes intellectuelles. (pp.11-16) 13 Consortium formé par le CCPE inc et l’A.S.M.C. (1996) Rapport sur les troubles graves du comportement chez les personnes handicapées, p47 14 Consortium formé par le CCPE inc et l’A.S.M.C. (1996) Rapport sur les troubles graves du comportement chez les personnes handicapées, p.48 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 20 On reconnaît l’origine neurologique des troubles envahissants du développement et on reconnaît aussi que les troubles du comportement sont plus nombreux chez les personnes présentant un TED que chez les personnes présentant une simple déficience. De plus, le risque de présenter un trouble grave du comportement s’amplifie à mesure qu’augmente l’importance de la déficience intellectuelle d’une personne. 3.3 LES PERSONNES PRÉSENTANT UN DOUBLE DIAGNOSTIC Le terme «double diagnostic» aurait été utilisé pour la première fois par Menolascino en 1980 et désigne, en filigrane, le retard mental associé à un trouble de santé mentale dans une perspective de diagnostic et de traitement. Reiss15 parle de la notion de diagnostic masqué ou masquant pour identifier cette tendance qui consiste à sous-diagnostiquer la maladie mentale chez les personnes atteintes de retard mental ou de déficience intellectuelle, les problèmes de comportement étant alors imputables au seul retard mental. Cette pratique serait plus marquée lorsque la personne à évaluer présente un QI inférieur à 58 et la tendance à sous-diagnostiquer diminue au fur et à mesure que les professionnels développent leur expérience. «Le but du double diagnostic est de reconnaître la réalité des troubles de santé mentale chez les personnes par ailleurs atteintes de retard mental16». 3.4 DOUBLE DIAGNOSTIC, TROUBLES GRAVE DU COMPORTEMENT ET AUTISME Souvent, quand on parle dans la littérature de troubles graves du comportement chez les personnes handicapées, il est question, sans nécessairement les nommer comme telles, des personnes présentant des troubles envahissants du développement. «De 4 à 10% des personnes qui présentent un retard mental ont aussi un trouble envahissant du développement. Alors que le déficit léger constitue 85% des personnes ayant un retard mental, il regroupe seulement le quart des autistes dont plus de 40% ont un retard sévère ou profond (Adam et Sheslow, 1983) […] Il faut se rappeler qu’il existe une corrélation entre les troubles du comportement et le niveau de fonctionnement intellectuel, et que l’on peut assumer que la proportion des personnes autistes ayant des troubles graves du comportement est plus élevée chez les personnes qui ont un retard mental (Jacobson et Ackerman, 1993).[…] L’expression «double diagnostic» peut inclure presque automatiquement les personnes avec un TED et un retard mental. Elles se retrouvent donc dans cette catégorie avec les 15 Consortium…op. cit. P.39 16 Consortium… p. 40 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 21 personnes ayant un retard mental et présentant d’autres types de problèmes de santé mentale du type anxiété, troubles de l’attention, dépression, troubles bipolaires, etc. »17. Le trouble grave du comportement est en quelque sorte le symptôme que quelque chose ne va pas et que, pour y remédier ou en atténuer l’expression ou l’impact, il faut, dans un premier temps, essayer d’identifier des hypothèses soit sur l’origine du trouble, soit sur la fonction de ce comportement dans le répertoire comportemental de la personne. Le trouble de comportement constitue un moyen de communiquer à l’environnement que quelque chose ne va pas soit dans sa chimie interne, soit dans son bien-être physique ou affectif immédiat. Le trouble de comportement peut aussi être un indice de problème de santé mentale chez la personne. On reconnaît l’origine neurologique des troubles envahissants du développement et on reconnaît aussi que les troubles du comportement sont plus nombreux chez les personnes présentant un TED que chez les personnes présentant une simple déficience. De plus, le risque de présenter un trouble grave du comportement croît en fonction de l’importance du niveau de déficience intellectuelle d’une personne. 3.5. QUALITÉS ET COMPÉTENCES MINIMALES POUR L’INTERVENTION Toute personne intervenant dans le domaine de la déficience intellectuelle doit être consciente que ses attitudes et ses valeurs vont orienter son style d’action de façon à minimiser tout pouvoir d’influence qu’elle pourrait avoir et qui viendrait à l’encontre du développement de l’autonomie chez la personne auprès de qui se fait l’intervention. L’approche positive et l’appropriation sont deux modèles conceptuels très souvent appliqués à l’organisation et à la dispensation des services aux personnes présentant une déficience intellectuelle. L’Abbé, Morin, Sabourin et Alarcia (à paraître) identifient l’ensemble des qualités et des compétences requises [pour intervenir auprès des personnes présentant une déficience intellectuelle et des troubles graves du comportement] : ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! 17 «être respectueux; avoir une bonne estime de soi; être empathique; être capable de communiquer; être capable de travailler en équipe; reconnaître les forces de la personne; être authentique; être discret; conseiller plutôt que de contrôler; adapter des habiletés sociales adéquates; Consortium… p.87 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 22 ! favoriser le développement de l’autonomie de la personne18 ». 3.6. FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES DE L’INTERVENANT Pour intervenir auprès des personnes présentant une déficience intellectuelle et un trouble grave du comportement, la formation continue des intervenants est une priorité. Le développement d’habiletés à une action non-violente lors des crises permet une action proactive. Les déclencheurs d’une crise peuvent être identifiés et l’intervenant pourra agir avant que la situation ne se détériore. En situation de crise, l’intervenant serait plus efficace et sécuritaire dans son intervention. «Apprendre aux intervenants à mieux gérer leur stress constitue également un véhicule de formation apprécié et utile (Keyes, Dean, 1988). De plus, l’organisme responsable de services devra assurer à son personnel un support clinique et une supervision favorisant des échanges interpersonnels positifs19». Le suivi continu et l’évaluation régulière de la performance sont le lot quotidien de l’intervention auprès des personnes présentant une déficience intellectuelle et un trouble grave du comportement. Meador et Osborn (1992) soulignent que les intervenants travaillant dans la communauté possèdent moins d’expérience et d’habiletés pour intervenir auprès de cette clientèle que les personnes travaillant en institution. Au Québec, Caron et Delage (1995) ont développé un contenu de formation couvrant les aspects suivants : ! ! ! ! ! ! «la déficience intellectuelle : définition, diagnostic, étiologie; les troubles émotifs : prévention, évaluation, traitement; le travail en équipe inter-multidisciplinaire; le plan d’intervention individualisé; les comportements difficiles : évaluation et stratégie d’intervention; la médication psychotique. »20 Les éléments de formation proposés ici constituent une base à laquelle peuvent se greffer d’autres contenus, en fonction du groupe d’intervenants auquel elle s’adresse. 3.7. UNE INTERVENTION QUI FAVORISE L’ÉMERGENCE ET LE DÉVELOPPEMENT DES COMPORTEMENTS ADAPTATIFS DES PERSONNES À QUI SONT OFFERTS LES SERVICES Les personnes présentant une déficience intellectuelle et des troubles graves du comportement ont une faible estime d’elles-mêmes, elles ont un réseau social extrêmement limité et souvent même inexistant, elles n’ont pas développé de moyens 18 Consortium…p.79 19 Consortium…p.80 20 Consortium…p.80 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 23 pour effectuer de la résolution de problèmes et elles n’arrivent que difficilement et très souvent pas du tout à contrôler leur colère. Développer chez ces personnes un répertoire d’habiletés sociales nécessaires à leur fonctionnement quotidien constitue un objectif de première importance. Dans la revue de littérature qu’ils ont faite, les membres du consortium identifient des groupes de chercheurs qui ont mis en place des interventions visant l’apprentissage des stratégies de résolution de problèmes (Nezu, Nezu & Arean, 1991), le développement de l’affirmation de soi (Bregman, 1985) et les programmes de contrôle de la colère (Benson, 1992)21. 3.8 INTERVENTION AUPRÈS DES TED PRÉSENTANT DES TROUBLES GRAVES DU COMPORTEMENT Les causes précises de l’autisme n’étant pas connues, les perspectives de traitement demeurent limitées. Lovaas a suscité des espoirs importants avec sa stimulation précoce intensive, les efforts du DAN! (Defeat Autism Now!) tentent d’analyser de la façon la plus systématique possible des facteurs biologiques possiblement sous-jacents à la condition, mais en attendant que des réponses sûres soient données, il faut continuer d’utiliser les moyens d’intervention disponibles. 3.8.1 L’ÉVALUATION DE LA SANTÉ PHYSIQUE : Peine et al. (1995), en examinant des données sur une période d’une année auprès de 10 personnes âgées de 47 à 60 ans présentant à la fois une déficience intellectuelle et des troubles de comportement, ont pu constater une diminution des comportements aberrants dans 73% des cas, lorsque des problèmes physiques (dermatites, constipation, diarrhée, maux de tête ou d’estomac, problèmes de sinus, allergies, troubles épileptiques, arthrite) avaient été diagnostiqués et traités.22 Ainsi toute intervention devrait d’abord commencer par une évaluation médicale complète et minutieuse de la personne. La condition même de la personne peut faire en sorte qu’il faille du temps et de nombreuses observations et des essais et erreurs pour en arriver à identifier les bons éléments. 3.8.2 LA PHARMACOLOGIE : Ici, les auteurs consultés par les membres du consortium insistent sur l’importance d’appuyer l’intervention pharmacologique sur une hypothèse diagnostique suffisamment documentée. «L’utilisation d’une seule hypothèse diagnostique à la fois, pour intervenir auprès des personnes déficientes présentant des troubles graves de comportements, permettrait d’éviter la polypharmacologie et les effets souvent indésirables des 21 Consortium…p.79 22 Consortium…p.93 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 24 interactions médicamenteuses. Une meilleure interaction des approches médicales et comportementales permettrait une intervention plus efficace». 3.8.3 L’ANALYSE ET LA MODIFICATION DU COMPORTEMENT : La modification du comportement permet d’initier ou de créer, par différentes techniques (initiation, estompage, façonnement, imitation), de nouveaux comportements adaptatifs. Elle permet encore d’augmenter ou de maintenir un comportement adaptatif par le renforcement positif ou négatif. Il importe ici, de bien définir les comportements adaptatifs déjà présents dans le répertoire de l’individu et de bien cibler et définir les nouveaux comportements à développer. La modification du comportement pour diminuer un trouble grave du comportement suscite questionnements et controverses, surtout en raison des abus qu’ils peuvent engendrer. Pour cette raison, il est proposé d’utiliser des interventions à restriction minimale, allant des procédures les moins intrusives aux plus intrusives (L’Abbé & Marchand, 1986)23. 3.8.4 LE SUPPORT POSITIF DU COMPORTEMENT (POSITIVE BEHAVIORAL SUPPORT) : «Créé en 1987 par le National Institute on Disability and Rehabilitation Research», le Support Positif du Comportement (SPC) émerge des principes et des idées du courant de la modification du comportement des années 80. Celle-ci a toujours accordé beaucoup d’importance à la création de nouveaux comportements adaptatifs ainsi qu’au maintien ou à l’augmentation de leur répertoire, chez une personne. Les stratégies d’auto-contrôle et d’auto-comportement ont permis aux individus de mieux gérer leur vie. L’économie de jetons, les jeux de rôles et l’imitation ont favorisé la consolidation des acquis et le développement des nouveaux comportements en remplacement des comportements agressifs antérieurement émis par l’individu. Les stratégies d’intervention issues du SPC (Koegel, Koegel & Dunlap,1996b) constituent un effort pour diminuer les troubles graves du comportement chez les personnes présentant un retard mental, en respectant la dignité de la personne, en favorisant l’émergence de ses capacités, en lui offrant un plus grand éventail de possibilités et en favorisant une qualité accrue de son style de vie. Le SPC centre son intervention sur les valeurs de la personne. Il privilégie entre autres choses : ! le remplacement du comportement agressif par un comportement adaptatif fonctionnellement équivalent (Evans et Meyer, 1985); ! l’analyse fonctionnelle du comportement (L’Abbé et Morin, 1995); ! l’établissement de stratégies de communication et l’identification des fonctions du comportement agressif; ! le développement et le recours à des activités de loisir valorisantes et agréables; 23 Consortium…p.82 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 25 ! l’étude des contingences de renforcement; ! l’étude de la programmation et des horaires d’activités; ! le développement de l’autodétermination et de l’autocontrôle; (Crimmins & Berotti, 1996); ! la formation et le support du personnel; ! l’amélioration de la qualité de vie ; ! l’utilisation de stratégies de résolution de problèmes (Hughes & Rusch, 1996); ! l’entraînement aux habiletés sociales, l’expression des préférences et des choix du client (Hughes & Rusch, 1996); ! l’analyse fonctionnelle de la communication (Kahng, 1995). […]L’approche positive, l’appropriation et le SPC contribuent à prévenir l’apparition ou l’augmentation des comportements agressifs. Toutefois, si la cause de ce comportement est purement biologique ou si un trouble du comportement est lié à un trouble de santé mentale (ex. : la dépression), il importe que l’intervention soit en relation avec la cause.»24 3.8.5 TEACCH 25 : Ce programme sera présenté plus en détail. Mentionnons seulement que cette approche, tout comme la précédente, repose sur l’approche positive et qu’elle intègre et applique des moyens concrets adaptés aux déficits des personnes autistes leur permettant de donner du sens à leur environnement et de le rendre prévisible, diminuant dans une proportion pouvant aller jusqu’à 80%, l’apparition de troubles de comportement. TEACCH constitue une approche ou une structure d’intervention intéressante dans la mesure où elle permet d’intégrer dans le plan d’intervention d’une personne, toute technique ou toute intervention pouvant répondre à ses besoins. 24 Consortium… p.83-84 25 TEACCH : Treatment and Education of Autistic and related Communication handicapped Children, traduite en français par Traitement et Éducation pour Autistes (troubles envahissants du développement) et autres Enfants ayant un Handicap de Communication, tiré du document « Formation à l’autisme » par Gilbert Leroux Document distribué aux intervenants lors de la formation à l’automne ’97. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 26 3.8.6 PECS26 : Il s’agit ici d’un système de communication par pictogramme permettant à la personne de développer éventuellement une autonomie autant dans sa communication réceptive qu’expressive. 3.8.7 LES HISTOIRES SOCIALES : Technique visant à soutenir, à l’aide de petites histoires illustrées concrètement ou écrites, selon le niveau de fonctionnement cognitif de la personne, chez la personne autiste, la reconnaissance et la compréhension des règles intrinsèques à la communication ou encore les règles de vie qui souvent ne sont pas dites dans la vie quotidienne. Par exemple, comprendre que l’on doit respecter l’espace personnel des autres, comprendre pourquoi il faut attendre son tour, comprendre les étapes pour arriver à parler à quelqu’un au téléphone… 3.9 MODÈLES DE SERVICE EN AUTISME ET EN TROUBLES GRAVES DU COMPORTEMENT Ici encore, le rapport du consortium sur les Troubles graves du comportement présente une revue de littérature passablement exhaustive des différents modèles de services résidentiels et socioprofessionnels existant actuellement pour cette clientèle. On y mentionne que les services pour ces personnes sont récents et qu’ils ont été mis de l’avant par des parents qui ont ouvert la voie à différents types de services (stimulation précoce, préscolaire, scolaire primaire, scolaire secondaire, socioprofessionnel et résidentiel). Même si en plusieurs endroits ces personnes partagent les mêmes services que ceux offerts aux personnes présentant une déficience intellectuelle, les services présentés ici sont dédiés spécifiquement à la clientèle autiste ou avec un trouble envahissant du développement. Certains modèles précisent comment ils répondent aux troubles graves du comportement, d’autres pas. 3.9.1 MODÈLE INTÉGRÉ DE TYPE FERME : Plusieurs expériences sont citées : ! Somerset Court, en Angleterre, fondé en 1974; ! Le Bittersweet Farms en Ohio, fondé en 1983; ! Le Carolina Living and Learning Center, développé en Caroline du Nord par Schopler et Van Bourgondien en 1990, dans le continuum de TEACCH; ! L’Abri Montagnard, fondé en France en 1978, comporte un environnement résidentiel et un lieu de travail sur la ferme; 26 PECS : Picture Exchange Communication System U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 27 ! Au Québec, Terre des Jeunes reçoit des personnes handicapées depuis plusieurs années. Aux États-Unis, le Bittersweet Farm est le plus reconnu. Le site «comporte des édifices résidentiels pour environ 15 personnes (plus une dizaine en centres de jour). Ces personnes travaillent sur la ferme selon un horaire commun. Leurs loisirs sont en général effectués en groupe et comportent des marches en montagne et des excursions en bicyclette. Elles résident à la ferme et utilisent les services communautaires et les commerces du village… » «En ce qui concerne les troubles graves du comportement, les responsables indiquent (Kay, Karst, Giddan, Boss &Murray, 1990) que si ceux-ci persistent, la personne devra être transférée.»27 Ils sont prêts à accueillir une personne qui, dans un milieu donné ou à un moment donné, a pu présenter des problèmes graves de comportement; il est possible que ces personnes trouvent dans ce type d’environnement un contexte qui réduit ou atténue les troubles. La ferme peut tolérer un certain niveau de troubles de comportement, mais ne se sent pas nécessairement responsable d’un tel mandat pour les cas graves. «Un des facteurs de succès serait la variété d’activités possibles offertes aux résidents». «Les caractéristiques de ces communautés rurales en font des milieux de vie structurés pour les personnes autistes, plus que des lieux de réadaptation intensive ou de transition […] ils ne concernent pas directement la problématique des troubles graves du comportement, …]. Le modèle ne correspond pas à l’idée que l’on se fait de l’intégration sociale, mais «il correspond probablement à un aspect de ce que recherchent un certain nombre d’autistes, soit de la stabilité dans leur environnement». 3.9.2 MODÈLE URBAIN : LE COMMUNITY SERVICES FOR AUTISTIC ADULTS AND CHILDREN (CSAAC) Ce programme offre des services à 68 personnes autistiques au plan résidentiel et au plan socioprofessionnel. Au plan résidentiel, ces personnes sont logées dans 21 appartements, maisons de ville et unifamiliales. Le nombre maximum de personnes est parfois de 4, habituellement de 3 et souvent de 2, avec leur personnel. Au plan socioprofessionnel, les services consistent en des «emplois soutenus» dans des entreprises de la région. «L’entente avec les employeurs est que la personne autiste sera accompagnée de son conseiller tout le temps qui sera nécessaire pour qu’elle fasse l’adaptation requise à son poste de travail. Le conseiller garantit que le travail sera produit selon les spécificités de l’employeur, soit par la personne handicapée, soit par luimême et il réglera tous les autres problèmes qui pourraient se poser durant l’entraînement. On essaie de trouver des emplois qui correspondent aux compétences et même aux caractéristiques symptomatiques des personnes autistes.» 27 Consortium…p.96 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 28 Parmi les résidents, 78% avait une histoire de comportements agressifs ou d’automutilation. Une équipe multidisciplinaire par personne suit son évolution. La composition de cette équipe : ! intervenants directement impliqués dans les programmes socioprofessionnels; ! du personnel cadre de la résidence et du milieu socioprofessionnel; ! le psychologue, son assistant; ! la famille de la personne ou son représentant; ! psychiatre, s’il y en a un au dossier; ! orthophonistes intégrés à l’équipe multidisciplinaire. résidentiels et La philosophie d’intervention est basée sur l’approche positive, avec une démarche qui soit la moins intrusive possible. Deux comités doivent faire l’approbation des mesures plus restrictives : 1. un comité formé de l’équipe de gestion de comportements; 2. un comité d’éthique (Human Right Committee), composé de représentants des parents, de la communauté et du personnel. Selon les auteurs, Smith, Belcher et Juhrs (1995), il est possible, pour les personnes présentant même un comportement destructeur épisodique, à tout le moins de maintenir leur emploi à long terme avec le soutien d’une personne bien entraînée et l’implantation de plans comportementaux basés sur une évaluation fonctionnelle. 3.9.3 INTERVENTION AVEC LES LOISIRS Deux chercheurs (Sigafoos et Kerr, 1994) ont fourni des activités de loisir à trois adultes masculins, présentant une déficience intellectuelle, âgés de 19 à 30 ans et présentant des comportements d’agression, d’automutilation, de destruction de la propriété ainsi que des comportements stéréotypés. Au début de l’intervention, les comportements inadéquats se manifestaient durant les périodes d’inactivité. Ils ont observé qu’avec les activités de loisir, les comportements adaptatifs augmentent et que les comportements inadéquats diminuent. Ils concluent que les comportements inadéquats étaient probablement reliés au manque d’activités alternatives à ces comportements. 3.9.4 M AY INSTITUTE ET AUTRES Ici, on fait un survol de différents établissements qui offrent un continuum de services pour les personnes autistes. Le May Institute for Autistic Children s’adressent aux enfants et aux adultes et les services y sont conçus dans un cadre de services transitionnels. L’établissement de Benhaven dans le Connecticut (Lettick, 1983), qui dessert, sous le couvert d’une école, des enfants et des adultes. Le Jay Nolan Center en Californie (La Vigna, 1983) a été un des premier à offrir un continuum de services aux enfants, adolescents et adultes autistiques, autant au plan résidentiel, que vocationnel et communautaire. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 29 3.10 QUELQUES MODÈLES D’INTERVENTION EN SITUATION DE CRISE La plupart des modèles exposés jusqu’à maintenant présentent des types de services où l’aspect préventif de l’intervention est visible et étayé. Quand on voit, le nombre de situations d’accidents/incidents de la résidence Potvin, il semble opportun d’avoir quelques points de référence sur l’intervention en situation de crise : quelles sont les approches, la formation du personnel, le réseau de partenariat et de soutien implanté autour du service. 3.10.1 LE PROGRAMME START28 Ce programme est né en 1989 au Massachusetts au nord de Boston, pour dispenser des services d’évaluation pour les personnes en situation de crise (phase aiguë) et offrir des ressources de répit, dépannage. Dans sa philosophie d’intervention, ce programme considère que les troubles graves du comportement reposent sur des causes multiples (biologiques, psychologiques, sociologiques, environnementales) qu’il faut identifier pour planifier une intervention basée sur une hypothèse clinique valable. «La composition de l’équipe est la suivante : 1. Un psychiatre agissant comme directeur des services psychiatriques (4 heures par semaine); 2. Trois cliniciens à temps plein possédant une maîtrise; 3. Six cliniciens à temps plein possédant un baccalauréat (i.e. chaque clinicien détenteur d’un baccalauréat a une liste de 75 clients à suivre); 4. Psychologues; 5. Praticiens sociaux. Cette équipe offre des services à 680 personnes. Dans sa première année d’opération, l’équipe en situation de crise a facilité le placement en milieu psychiatrique de 23 personnes dont la durée de séjour a été inférieure à trente jours par individu.29 » Outre l’évaluation, les éléments suivants sont suggérés pour une intervention optimale : 1. «que l’équipe d’intervention en situation de crise, coordonne également la réinsertion du client dans son milieu d’origine; 2. qu’un client qui vit une crise importante puisse rapidement avoir accès à la clinique externe de psychiatrie communautaire; 3. que le répit s’effectue dans un cadre résidentiel semblable à celui du client; 4. que, dans les cas de crises aiguës en phase maniaque, l’équipe puisse compter sur des ressources institutionnelles immédiates (Beasley, Kroll ovner,1995). 28 START : Systematic Therapeutic Assessment Respite and Treatment 29 Consortium…p.151 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 30 Ces chercheurs tracent le profil suivant des 793 clients desservis en 1995 : ! ! ! ! ! lenteur intellectuelle : retard mental léger : retard mental moyen : retard mental sévère : retard mental profond : 8% 51% 27% 12% 12% »30 3.10.2 LE MODÈLE COMMUNAUTAIRE D’INTERVENTION EN SITUATION DE CRISE DE ROCHESTER (NEW YORK) «Davidson et al. 1995) préconisent dans leur modèle de service la présence des composantes suivantes : 1. l’intervention de crise par le biais d’une équipe multidisciplinaire; 2. l’implication d’un continuum de ressources (ressources de répit, support aux familles, résidence communautaire spécialisée dans l’intervention comportementale et unité d’évaluation-observation en psychiatrie); 3. des services de prévention de crise comprenant l’éducation et la formation du personnel; 4. l’utilisation du plan de services et le support aux familles. Ils précisent que le centre de crise doit permettre entre autres : 1. un fonctionnement 24 heures par jour ; 2. la participation des membres de l’équipe lors de la réintégration de la personne dans son milieu d’origine. Les auteurs mentionnent l’importance d’obtenir un consensus des principaux intervenants de la communauté dans la planification et l’élaboration de services d’intervention en situation de crise. Le programme d’intervention de crise est un programme conjoint élaboré et dispensé par les services en déficience intellectuelle et par le département de psychiatrie de l’Université de Rochester. L’équipe comprend : ! ! 30 un directeur de programmes; deux spécialistes en modification du comportement, un psychologue à demi-temps et un psychiatre à demi-temps. Consortium p.152 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 31 Les fonctions de l’équipe d’intervention en situation de crise consistent à : 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. fournir une disponibilité 24/24 heures pour répondre à toute urgence; participer à l’admission du traitement et du congé du client; effectuer des relances; identifier les clients à risque; conseiller et supporter les familles des usagers; consulter les établissements qui dispensent des services à ces clients; dispenser des programmes de formation en santé mentale et en modification du comportement (Davidson et coll., 1995). Pour supporter l’équipe d’intervention de crise, une ressource résidentielle a été aménagée afin de permettre l’admission à court terme d’individus en crise, et pour démarrer les programmes de modification du comportement (Cain, Davidson, 1995). Provenance de la clientèle : ! ! ! milieu familial : 52% résidence de 8 à 12 personnes : 31 % famille d’accueil ou appartement : 17 % Durée de l’intervention de l’équipe de crise : ! ! une journée à 296 jours : moyenne 65 jours; 7% des personnes n’ont pu être réorientées dans leur milieu d’origine. Les résultats de cette recherche démontrent l’importance de former les parents et/ou le personnel à la modification du comportement, aux principes d’intervention en situation de crise. Taux de récidives croissant au fil des ans (Reiss, 1994) : ! ! ! après un an : 1.9% après 2 ans : 9.5 % après 4 ans : 56.4 % Les caractéristiques du modèle de Rochester : 1° 2° 3° 4° 31 permet l’intégration des services en santé mentale et des services de réadaptation; maximise l’éducation et la formation des divers intervenants; crée un lien facilitateur entre les services de santé mentale et de réadaptation; intervient de façon préventive auprès des personnes identifiées à risque. 31 » Consortium…p.154 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 32 3.10.3 MODÈLE D’UNE UNITÉ DE CRISE EN OHIO En 1993, Ankerman32 aménage en Ohio une unité de vie pour 5 à 8 personnes dans un hôpital. Le séjour moyen varie entre 10 à 20 jours et on y reçoit environ 15 clients par mois. Le traitement consiste à : ! ! ! Diagnostiquer la présence de maladie mentale ou neuropsychiatrique; Stabiliser d’abord par la médication les problèmes de comportement qui en découlent; Appliquer par la suite des programmes de modification du comportement. «Sovner, Beasley et Desnoyers-Hurley (1995) identifient six fonctions nécessaires à ce type d’intervention de crise: 1. l’unité utilisant des mesures objectives doit être capable d’utiliser les données cliniques et de s’assurer de l’efficacité du traitement et ce, 24 hres/24; 2. l’unité doit être capable de contrôler une désorganisation sans avoir recours à la pharmacologie; 3. l’unité doit être capable de prendre en considération les facteurs sociaux et développementaux d’une crise. Identifier les signes précurseurs d’une crise et connaître comment la personne gère son stress constituent des pré-requis importants; 4. le psychiatre de l’unité prescrit une médication psychotrope seulement lorsqu’il y a présence d’un syndrome ou l’évidence de symptômes pouvant être associés à un trouble; 5. l’unité dispense des activités appropriées; 6. les membres de la famille, les intervenants communautaires et le client sont consultés dans la prise de décision. Isweran et Brener (1990) mentionnent que le programme de cette unité doit comporter les composantes suivantes : 1. un environnement structuré où la personne se sentira en sécurité tant par les routines et les règles de vie de l’unité que par son aménagement physique; 2. une évaluation et un suivi psychiatriques permettant l’élaboration d’un plan d’intervention sur la base d’une hypothèse de trouble de santé mentale bien documentée; 3. des interventions psychologiques individuelle ou de groupe); 32 appropriées Consortium…p. 157 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 (counselling, psychothérapie 33 4. des programmations visant le développement des habiletés sociales et le développement des habiletés résidentielles.33 » 3.10.4 LE CENTRE DE RECHERCHE ET DE FORMATION DE L’UNIVERSITÉ DE L’OREGON POUR LA GESTION NONAVERSIVE DES TROUBLES GRAVES DU COMPORTEMENT Ce centre de recherche et de formation, fondé en 1987 et sous la responsabilité de Horner, constitue une autorité dans le domaine des doubles diagnostics et des troubles graves du comportement. «Six universités sont liées au centre par contrat». La mission : Développer, évaluer et disséminer une technologie de contrôle béhaviorale qui : 1. 2. 3. 4. s’avère efficace avec des troubles graves du comportement; est conforme aux standards sociaux de non-aversité; est inspiré des données des sciences actuelles du comportement; peut être utilisé par le personnel en classe ou dans d’autres milieux d’intervention. (Horner, 1996). À cette fin, l’Université de l’Oregon a créé l’«Institute on Violence and Destructive Behavior». Le Centre intervient dans les familles, les écoles, les résidences communautaires, mais il n’opère pas lui-même de services résidentiels. Les sous-programmes du centre sont les suivants : 1. Support à la communauté : Offrir une structure de soutien à quelques 17 personnes handicapées désinstitutionnalisées, désignées par une institution psychiatrique de l’Oregon comme présentant les problèmes du comportement les plus graves; 2. Action préventive de non-institutionnalisation : Au total, 16 états font former du personnel par le Centre, dans l’usage des techniques béhaviorales les plus avancées; 3. Assistance technique : Le Centre assure une assistance ponctuelle, localement, aux enseignants, aux familles et aux instances de services, dans les environs des six universités participantes. En deux ans et demi d’opération, plus de 200 enseignants et agents de réadaptation ont bénéficié de cette assistance technique sur le site ainsi que 77 familles et 460 personnes handicapées; 4. Aide aux familles : 33 Consortium…p.157-158 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 34 Aider, par une présence soutenue, les familles qui ont un membre handicapé avec troubles graves du comportement. L’intervention porte sur les problèmes identifiés par ces familles. La recherche au Centre se concentre sur les besoins des familles; 5. La conception de procédures non-aversives d’intervention : L’effort est consacré à la mise au point de telles procédures par des recherches rigoureuses, des évaluations complètes, des recensions de la littérature scientifique. Dans ses premiers 30 mois d’existence, les six universités impliquées ont initié 35 études et publié quelques 20 recensions d’écrits. La recherche est au centre de toute l’activité de formation. 6. La formation : Elle est systématique et de tous les niveaux (doctorat, sessions ad-hoc préintervention et sessions en cours d’intervention sur le terrain, etc.) pour les membres des familles, les agents d’éducation/réadaptation, les étudiants. Les provisions de formation sont formatées en une douzaine de modules en techniques béhaviorales non-aversives. En trente mois, 24 000 personnes ont ainsi bénéficié de ces provisions, sur place, dans les états participants, On organise aussi des conférence nationales, ouvertes à la communauté internationale (quelques 12 pays, en plus des états américains). La philosophie du centre : ! les indicateurs de l’efficacité de l’action du Centre sont dans les situations et les modes de vie de la personne aidée (lifestyle outcomes); ! l’autocontrôle et les habiletés à choisir sont des moyens aussi importants que les conséquences traditionnelles pour surmonter des troubles du comportement; ! la prévention demeure encore la meilleure solution à de tels problèmes; ! les procédures d’analyse fonctionnelle représentent un outil très puissant comme programme d’aide non-intrusif; ! les interventions béhaviorales ou médicales isolées ne portent pas autant d’effet que celles d’un programme complet qui évalue l’ensemble des variables de milieu et d’intervention ainsi que les événements antécédents et conséquents; ! l’entraînement à des modalités fonctionnelles équivalentes de communication est un élément important du programme de restauration de l’adaptation de la personne concernée. 34» Les travaux du Centre universitaire de l’Orégon, en particulier ceux de l’Institut sur la violence et les comportements destructeurs, sont présentés ici en raison de l’intérêt que 34 Consortium…p 158-159 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 35 pourrait avoir pour notre établissement non seulement la philosophie et l’approche d’intervention préconisée, mais pour l’expertise qui pourrait y être cherchée en terme de formation ou de consultation, soit au plan local pour notre établissement, soit au plan régional. 3.10.5 QUELQUES PROPOSITIONS ISSUES DES TRAVAUX DU CONSORTIUM Après avoir présenté les caractéristiques de la clientèle et plusieurs types d’approches, après avoir donné les grandes lignes de différents modèles, les membres du consortium en viennent à parler du caractère ultra-spécialisé de certains éléments du programme et de la concentration des ressources que cela exige. Pour un maintien dans la communauté des personnes vivant en familles naturelles, en familles-substituts, en foyers de groupe, ou autre type de ressources résidentielles dans la communauté, plusieurs éléments sont essentiels : 1. Appui à l’usager et aux parents; 2. Acquisition, restauration et exercices de comportements adaptatifs suffisants; 3. Approche réseau reconnaissant les compétences du réseau de la réadaptation et celui de la santé mentale; 4. Le maintien de l’offre de service à cette clientèle de la part du réseau de la déficience intellectuelle; 5. «Un centre de crise médicopsychologique est créé pour le traitement et la restauration de la fonctionnalité de personnes en rupture d’adaptation avec leur milieu. C’est aussi un lieu de formation des personnes, en sa qualité d’instance affiliée à une ou des universités montréalaises [ou autre]; l’affiliation veut drainer l’expertise universitaire vers la ligne des services et assurer la formation de la main d’œuvre; 6. Des résidences communautaires à petits effectifs (en déficience intellectuelle et en déficience physique) qui sont en même temps (au même lieu) des centres de jours de travail. Des ressources pour un hébergement prolongé doivent aussi être disponibles en centre d’accueil ou ailleurs, ainsi qu’en hôpital psychiatrique. Ces derniers complètent la hiérarchie nécessaire aux services intégrés et non intégrés. Cette hiérarchie est comparable au système en cascade, qui, dans les années 75-80, a présidé au développement de l’éducation spéciale selon la philosophie de la normalisation. À une extrémité, l’intégration avec un minimum de structures d’appui; à l’autre, la ségrégation, avec un maximum de structures pour des cas extrêmes. Ce placement en institution doit être révisable périodiquement.[…]; 7. Il doit en résulter une prise en charge bien bouclée des personnes handicapées présentant des troubles graves du comportement : prise en charge d’abord par la restauration de leurs comportements adaptatifs, premier gage d’une solution durable; ensuite par l’accès à des résidences/centres de jour occupationnels (la résidence U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 36 s’imposant lorsque le maintien dans la famille n’est plus la meilleure option) et enfin, par le recours ultime aux urgences et aux ressources psychiatriques s’il le faut.35 » 3.11 QUELS SERAIENT DONC DES CRITÈRES ESSENTIELS À UNE RESSOURCE RÉSIDENTIELLE POUR PERSONNES AUTISTES ? «Les personnes autistes, bien qu’en nombre restreint, ont des besoins particuliers à cause de la variété de leurs symptômes et du double diagnostic (autisme et retard mental) fréquent chez elles; la plupart sont à risque élevé de présenter des troubles graves du comportement. Lorsqu’elles manifestent des troubles graves du comportement, à fortiori, leur besoin de soutien et d’encadrement est encore plus élevé.»36 Les éléments issus du rapport sur les troubles graves du comportement déposé par le consortium, présentés antérieurement, démontrent que l’on doive bien sûr circonscrire des caractéristiques que devraient avoir une ressource résidentielle pour ces personnes, mais que celle-ci ne devrait être qu’un élément dans une ensemble plus vaste qu’il faut aussi définir. 3.11.1 POUR LES PERSONNES QUI NE PRÉSENTENT AUCUN PROBLÈME DE COMPORTEMENT 1. Une évaluation devrait précéder toute orientation de service. Si la personne ne présente aucun problème de comportement, les évaluations suivantes devraient être recommandées : ! évaluation du niveau d’autisme à l’aide du GARS; ! évaluation du niveau de fonctionnement intellectuel; ! évaluation des comportements adaptatifs; ! profil psycho-éducatif pour adolescents et adultes (AAPEP); ! toute autre évaluation jugée pertinente au besoin. Et ce, pour bien identifier : ! les forces et les intérêts de cette personne; ! le niveau de structure requis par la personne; ! se fixer des objectifs au niveau du pairage du résident avec d’autres personnes et avec les responsables de la ressource d’accueil ou les intervenants de la ressource résidentielle; ! les aménagements physiques de la résidence; ! les aménagements des moments de vie. 2. Identifier d’abord une ressource d’accueil en fonction des qualités personnelles des responsables de la ressources d’accueil. Les qualités énumérées au point 3.5 devraient faire partie du profil recherché en plus d’avoir de l’intérêt et de la disponibilité pour participer à des formations au besoin. 35 Consortium…p168-170 36 Consortium…p.99 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 37 3. S’assurer de la stabilité du milieu : En raison de ses difficultés à comprendre tout ce qui se passe dans son environnement, à décoder le langage non-verbal, la personne autiste a besoin que l’on rende son univers simple et prévisible. Stabilité du milieu humain : La personne autiste a besoin de points de repaires stables. Il faut donc minimiser le nombre de personnes auxquelles elle a à se référer, quitte à ce que ces personnes puissent elles-mêmes être soutenues dans leurs actions et qu’elles puissent avoir du temps de ressourcement. Cette stabilité devrait aussi se retrouver au niveau des résidents qui partagent la même ressource résidentielle : le nombre de résidents devrait être défini en fonction des caractéristiques de chacun et du niveau d’adaptation possible de la part de la ressource d’accueil. 4. Espace physique suffisant pour bouger (cour arrière, espace autour de la résidence pour faire de l’exercice physique) à l’intérieur et à l’extérieur de la résidence; avoir accès à une chambre privée. 5. Adaptation de la résidence de façon à rendre le quotidien prévisible : ! mise en place de structures physiques qui vont guider la personne dans cette résidence selon les activités qui devraient caractériser chaque pièce; ! implantation d’un horaire (selon son niveau de fonctionnement, peut être très visible ou très discret) quotidien, hebdomadaire, mensuel; ! qui l’aide à se situer dans le temps et qui l’aide à vivre dans un contexte maximal d’autonomie; ! identifier des règles de vie que l’on souhaite voir respecter dans la résidence et trouver un moyen de les faire comprendre à cette personne (par exemple, respecter l’espace personnel des autres personnes, les heures pour prendre son bain; comment ranger ce qu’elle sort lorsqu’elle prend une collation,…). 6. Pour éviter tout risque de désorganisation, organiser les temps libres même si, pendant la journée la personne a des activités, il faudra l’aider à structurer ses temps libres à la maison que ce soit pour des activités de loisir ou des activités qui seraient plus d’ordre de l’entretien. 7. Être soutenues par une équipe, quelque soit l’expérience et les habiletés des personnes qui accueilleront la personne autiste, il importe d’éviter de se retrouver isolé. Il importe que des intervenants demeurent suffisamment en contact avec la personne pour qu’ils soient en mesure d’apporter des solutions concrètes quand des problèmes se poseront. Dans cette équipe une personne sera responsable du plan de service de la personne autiste et s’assurera, qu’en parallèle de la réponse au besoin d’hébergement de la personne, un programme de jour lui offre la possibilité de U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 38 continuer un développement de ses habiletés de communication, de ses habiletés sociales et d’un répertoire d’activités de travail ou de loisirs qui auront un sens pour elle. 8. Garder contact avec les différents milieux de vie de cette personne. En fait la communication entre les différents milieux de vie demeurent une condition gagnante pour assurer une cohérence dans l’intervention, une généralisation des acquis et une meilleure qualité de vie à cette personne. 3.11.2 POUR LES PERSONNES QUI PRÉSENTENT UN TROUBLE GRAVE DU COMPORTEMENT En fait, la question d’identifier des critères pour une ressource résidentielle destinée aux personnes autistes devient beaucoup plus complexe dans ce cas-ci et c’est pour cette raison que les différentes sections de la partie trois de ce document ont cumulé autant d’informations à la fois sur les distinctions à faire entre les différentes clientèles (autistes, troubles graves du comportement et double diagnostic), sur les différentes techniques et approches d’intervention pour le traitement, sur les modèles de ressources résidentielles mis en place à différents endroits aux États-Unis, en France et au Québec depuis les années 75, sur les quelques modèles qui intègrent un centre d’intervention de crise dans le continuum de services à mettre en place autour d’une ressource résidentielle. En plus des huit caractéristiques énumérées pour les personnes autistes ne présentant aucun trouble grave du comportement, ici la ressource résidentielle doit être considérée comme un des éléments de réponse aux besoins de la personne à prendre en compte dans le plan de service qui s’installe autour d’elle. La ressource résidentielle doit non seulement offrir une stabilité et une structure pour favoriser l’autonomie de la personne, mais elle doit aussi répondre à d’autres critères et constituer un maillon dans un processus plus large. Ainsi, avant d’identifier une ressource d’hébergement, les étapes suivantes devraient être respectées : ! Évaluation de la santé physique (vérification entre autres d’hypothèses d’épilepsie, de la glycémie); ! Évaluation des hypothèses de problèmes de santé mentale (dépression, troubles de l’humeur, autres…) possiblement sous-jacents aux troubles de comportement; ! Révision systématique de la médication avec un historique (introduite depuis quand, pour quelle raison à l’origine, les doses prescrites) et évaluer la pertinence de poursuivre; évaluer les effets conjoints des médications administrées pour voir si certains des troubles de comportement observés ne puissent être des conséquences des effets secondaires de la médication; ! Utiliser la médication en lien avec des hypothèses médicales ou psychiatriques bien documentées. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 39 Mise en place d’un plan de «traitement» ou de «gestion du comportement» : ! traitement visant une gestion préventive des troubles graves du comportement, cibler les comportements que l’on souhaite voir «apparaître» dans le répertoire comportemental de l’individu; ! favoriser l’émergence et le développement des comportements adaptatifs de la personne par les techniques connues de modification du comportement telles qu’elles sont utilisées entre autres dans le modèle d’intervention de «support positif du comportement» (voir 3.8.4) La ressource résidentielle en elle-même devrait rencontrer les critères suivants : ! Héberger un maximum de deux personnes présentant un trouble grave du comportement; ! Sécurité, pour la personne, pour ses pairs et pour les responsables de la ressource; ! Équipe stable, formée aux différentes approches pouvant répondre aux besoins de la clientèle; ! TEACCH pour une partie de l’aspect préventif rattaché aux troubles graves du comportement; ! Les techniques d’analyse et de modification du comportement telles que proposées par le Centre de recherche et de formation sur la gestion non-aversive des troubles de comportement (Horner, Orégon) (voir 3.10.4); ! PECS ou tout autre moyen alternatif de communication; ! Soutien clinique de l’équipe; ! Mise en place de conditions qui favorisent une stabilité d’équipe (voir les recommandations de John Dougherty); ! (En attendant la mise en place d’une équipe régionale d’experts en troubles graves du comportement), s’assurer la collaboration de psychiatres ayant un intérêt pour cette clientèle et procéder avec eux aux aspects d’évaluations médicales et psychiatriques à la clientèle; ! Dans la mesure où la ressource résidentielle ne puisse compter sur aucun «centre de crise» à proximité, mettre en place une équipe destinée à répondre en urgence aux situations de crise. 4. LA RÉSIDENCE POTVIN CORRESPOND-ELLE À CES CRITÈRES? 4.1. QUI SONT LES PERSONNES VIVANT À LA RÉSIDENCE POTVIN AUJOURD’HUI U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 40 Tableau synthèse du profil clinique des clients caractéristiques client 1 (39 ans) client 2 (49 ans) client 3 (48 ans) client 4 (44 ans) client 5 (26 ans) D.I. SÉVÈRE SÉVÈRE SÉVÈRE SÉVÈRE SÉVÈRE autisme autisme profond autisme infantile GARS non concluant aucune évaluation GARS non concluant troubles associés ! TC et/ou ! Automutilation ! TC ! TC ! ! Anxiété ! Automutilation ! Comportements compulsifs ! Difficulté à vivre des changements au quotidien TC ! TC ! Présence de contacts physiques socialement inappropriés Cinq personnes habitent présentement la résidence Potvin (voir annexe 9). Il s’agit de cinq hommes, âgés de 26 à 49 ans. Trois d’entre eux sont anglophones, les deux autres sont francophones. Parmi les diagnostics disponibles aux dossiers de ces personnes, dans quatre cas, la déficience intellectuelle sévère (ou le retard mental) est mentionnée; dans le cinquième cas, la déficience n’est pas mentionnée, mais le tableau clinique peut laisser croire que cette personne présente un niveau de déficience important. Cela demeure toutefois à vérifier. Deux personnes seulement, parmi les cinq, ont reçu un diagnostic d’autisme consigné au dossier : autisme profond évalué à l’aide du GARS37 dans un cas et autisme infantile, sans aucune réévaluation récente dans l’autre cas. Au plan des résultats d’évaluation disponibles dans le dossier de chacune de ces personnes, un seul de ces messieurs a reçu l’ensemble des évaluations utiles pour bien situer le niveau de fonctionnement de la personne au plan cognitif (Leiter38), au plan social (EQCA39) et au plan de ses forces, de ses intérêts et de ses émergences (PEP-R40, AAPEP41). Pour deux d’entre eux, le GARS a été utilisé sans résultat concluant, ce qui élimine ici l’hypothèse de diagnostic d’autisme, et pour un cinquième, aucune évaluation au GARS n’est disponible. Pour deux de ces personnes, on retrouve aussi au dossier une évaluation des besoins de service qui a été faite en 1995. L’annexe 9 permet de constater que les trois personnes pour lesquelles on ne retrouve pas de diagnostic d’autisme, d’autres diagnostics (soit au plan moteur, soit au plan de la santé physique ou de la santé mentale) se rajoutent à la déficience intellectuelle. Un 37 GARS: Gilliam Autism Rating Scale 38 Leiter : Leiter International Performance Scales (Arthur, 1952) 39 ÉQCA: Échelle Québécoise de Comportement Adaptatif 40 PEP-R: PsycoEducational Profil-Revised (PEP-R, Schopler et al. 1990) 41 AAPEP : Adults and Adolescents PsychoEducational Profile (AAPEP, Schopler et al. 1986) U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 41 d’entre eux présente de l’épilepsie, une surdité bilatérale profonde, une paralysie cérébrale, au plan des diagnostics et parmi les troubles associés, on retrouve de l’automutilation, des comportements d’agressivité dirigés vers les objets, une claudication due à une arthrose de la hanche et une énucléation de l’œil droit. Un autre présente un diagnostic de phénylcétonurie et, comme troubles associés, un trouble de comportement qui peut se traduire en comportements d’agression envers les objets et les personnes, une tendance à l’obésité, une hypersensibilité au niveau de la peau et une sensibilité à la lumière. La troisième de ces personnes a reçu un diagnostic d’encéphalopathie avec traits dysmorphiques et microcéphalie, hypoacousie, maladie affective bipolaire et asthme; cette personne présente aussi des troubles de comportement à certains moments et elle a tendance à avoir des comportements physiques socialement inappropriés. On peut voir aussi que toutes ces personnes ont fréquenté un centre d’activités socioprofessionnelles (atelier ou service d’activités de jour) à un moment ou l’autre de leur vie. Actuellement, trois des résidents de Potvin ne fréquentent aucun milieu socioprofessionnel. Quelques activités ont commencé à se faire dans la communauté avec deux ou trois de ces personnes (marches dans la rue ou parfois à la base de plein air, visites au dépanneur du coin, repas au restaurant, quilles, cueillette de pommes). Un de ces messieurs fréquente l’atelier cinq jours par semaine, et un autre s’y rend à mitemps en après-midi. Les besoins particuliers de ces personnes sont nombreux (annexe 9, page 2) et indiquent la lourdeur et la complexité de la prise en charge uniquement, dans un premier temps, pour assurer à ces personnes un milieu de vie qui soit sécuritaire et un environnement qui soit à la fois calme et stimulant : certains ont besoin d’être soutenus pour à peu près tous les moments de vie (l’hygiène est mentionnée ici, mais cela est aussi vrai pour d’autres secteurs d’autonomie), certains ont besoin qu’on leur rappelle d’aller à la toilette; pour certains, on doit noter la quantité de liquide qu’ils prennent, pour certains autres, on doit être vigilant pour qu’ils ne portent pas à leur bouche des objets noncomestibles, on doit intervenir lorsqu’ils entrent dans des rituels dont ils n’arrivent plus à se sortir d’eux-mêmes, on doit les encadrer pour marcher sur la rue, car ils ne connaissent pas le danger et peuvent à tout moment traverser la rue impulsivement parce que quelque chose les attire de l’autre côté (un objet, un oiseau, ou peut-être un enfant à saluer de près). La liste de ces besoins particuliers permet de voir l’effervescence du milieu de vie Potvin, la pression qui devient le lot du quotidien pour tous, résidents et intervenants, et le risque constant que la «vapeur» trouve une voie inappropriée pour sortir et diminuer momentanément la pression. Et malgré tout, depuis trois ans, un certain noyau d’équipe tente de maintenir les éléments de structures et d’approches qui leur ont été transmis dans la formation de l’automne 97 et le «coaching» qui a suivi. 4.2 LE PERSONNEL DE LA RÉSIDENCE POTVIN U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 42 4.2.1 LA STRUCTURE DE POSTE : La structure de personnel de la résidence Potvin c’est : ! ! ! ! Un chef de service (qui partage son poste entre 2 résidences); 4 éducateurs (3.4 postes équivalent temps complet); 8 préposés aux bénéficiaires (5.5 postes équivalent temps complet); 2 préposés de nuit (2 postes équivalent temps complet). Les titres d’emploi syndiqués (éducateurs et préposés) se répartissent en quatre statuts de travailleurs possibles : 1. 2. 3. 4. temps complet régulier (TCR); temps complet temporaire (TCT); temps partiel régulier (TPR); temps partiel occasionnel (TPO). Ensuite, à des niveaux d’implication et de responsabilité variables, gravitent autour de ce personnel tout un groupe de personnes. Il y a, bien sûr, le directeur des services à la clientèle de la zone, le chef de programme du territoire Cowansville/Farnham/Bedford ainsi que l’infirmier psychiatrique et la conseillère clinique de la zone. On compte aussi du personnel de soutien qui accompagne ce noyau : les conseillers de la DSP, les conseillers de la DRH, un consultant externe ainsi que les médecins-psychiatres. 4.2.2 LE ROULEMENT DE PERSONNEL À LA RÉSIDENCE POTVIN : L’analyse d’une banque de données, obtenue à la direction des services techniques et financiers, sur les heures travaillées à la résidence Potvin par tous les employés syndiqués durant la période s'échelonnant du 1er avril 1999 au 25 mars 2000 (tout juste moins d'une année) montre un portrait fort différent. Voici ce qui ressort au chapitre des statistiques descriptives globales : 1. 59 employés syndiqués différents ont travaillé auprès des usagers de la résidence Potvin durant cette période. 2. Voici la répartition par statut d'emploi du nombre total d'heures travaillées (29 380 heures) : TPO : TCR : TPR : TCT : 18 312 heures (62%) 7 566 heures (26%) 3 278 heures (11%) 224 heures (1%) Par rapport aux données présentées ci-dessus, seulement 37% des heures travaillées l'ont été par du personnel régulier (TCR et TPR). Par contre, ces résultats ne tiennent pas compte qu'un certain nombre d'employés ont évolué à travers plusieurs statuts et titres d'emploi durant cette période de temps. Aussi, plusieurs de ces heures ont été travaillées U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 43 la nuit et par conséquent, le roulement de personnel peut théoriquement avoir moins d'impact à ce moment de la journée. Pour tenir compte de cette hypothèse, voici les résultats où les préposés de nuit sont éliminés afin de présenter les heures travaillées durant les quarts de jour et de soir : Cinquante-sept (57) personnes différentes ont travaillé durant les quarts de jour et de soir. La répartition des heures travaillées est la suivante : 1. 65% des heures ont été travaillées par du personnel aux statuts «temps complet occasionnel» et «temps partiel occasionnel»; 2. Seulement 35% des heures ont été travaillées par du personnel régulier (TEC et TPR). Le roulement de personnel ne se traduit pas seulement pour les poste syndiqués. Malgré une la stabilité actuelle à ce chapitre, le nombre de chefs de service ayant œuvré à la résidence Potvin par le passé a été important. À la lueur de ces observations, le roulement de personnel à la résidence Potvin est un phénomène indéniable. Lorsqu’on tient compte des observations et recommandations de John Dougherty, du nombre important de cas d’agression et de l’importance d’un milieu stable compte-tenu des caractéristiques et des besoins des résidents, alors le constat est clair : L’organisation actuelle de la résidence Potvin, et le roulement de personnel qui en découle, ne permettent pas de répondre adéquatement aux besoins de la clientèle de cette résidence. 4.3 L’ÉVALUATION DE L’IMPLANTATION DE LA STRUCTURE TEACCH À LA RÉSIDENCE POTVIN 4.3.1 L’ÉCHELLE D’ÉVALUATION DE LA STRUCTURE ENVIRONNEMENTALE (EESE): (Environmental Rating Scale : ERS) Dès 1989, une équipe du programme TEACCH de la Caroline du Nord42 travaille à développer un instrument qui permettrait d’évaluer les programmes de traitement mis en place dans les ressources résidentielles pour personnes autistes. Les analyses préliminaires de la validité de l’instrument indiquent que la mesure discrimine bien les environnements prévus pour les personnes autistes des environnements prévus pour les personnes présentant une déficience intellectuelle. L’instrument permet aussi de mesurer la connaissance que les intervenants ont de l’autisme et du programme mis en place dans la résidence où ils travaillent. Le ERS se compose de 32 items qui découlent d’une compréhension des déficits de l’autisme et des stratégies d’intervention 42 Van Bourgondien, M.E.; Rechle, Nancy,C, Campbell, D »C; Mesibov, G.B. (1998). The Environmental Rating Scale (ERS): A Measure of the Quality of the Residential Environment for Adults with Autism. Research in Developmental Disabilities, Vol. 19, No 5, pp.381-394 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 44 qui se sont montrées utiles pour améliorer la qualité de vie des personnes autistes et leur intégration dans la communauté. Ces items ont été regroupés dans 5 sous-échelles : 1structure (6 items), 2- communication (5 items), 3- socialisation (6 items), 4-évaluation du niveau de développement et planification des activités (8 items) et 5-gestion du comportement (7 items); la validité et la fidélité de l’instrument ont été évaluées pour ces 5 sous-échelles. Deux sous-échelles supplémentaires, dont on ne fait pas mention dans l’article de 1998, permettent de porter un jugement qualitatif sur deux autres dimensions de l’approche soit 6- la continuité dans la journée de la personne d’un milieu de vie à l’autre (3 items) et 7- l’implication de la famille (2 items) pour un total de 7 sous-échelles et de 37 items passés en revue. Pour les fins de la présente analyse, le ERS a été traduit et est devenu le EESE43. L’échelle d’évaluation de la structure environnementale a été conçue pour évaluer la structure de l’environnement applicable à une variété de lieux de résidence. Cette échelle peut être utilisée autant dans un cadre de recherche que dans un contexte clinique et elle est censée mesurer le niveau de la structure du milieu en fonction d’un individu donné ainsi que la qualité de la mise en place de pratiques préventives pour les personnes qui habitent dans une ressource résidentielle donnée. L’EESE est conçue sur une base d’entrevue semi-structurée et sur le survol du programme appliqué dans la ressource résidentielle. La personne interviewée doit être directement impliquée dans les soins apportés à la personne. Les informations recueillies sont consignées par écrit et ces données seront ensuite analysées à partir d’un protocole d’évaluation. Chacun des 37 sous-items sont évalués sur une échelle allant de 1 à 5 : une valeur « 1 » indique le scénario qui soit le plus « pessimiste » possible alors qu’une valeur « 5 » indique le meilleur. Pour chacun des questionnaires, un pourcentage est obtenu à chacune des sous-échelles, à partir du cumul des valeurs 1 à 5 attribuées à chaque item. C’est ce pourcentage qui est utilisé ici en tant qu’indicatif qualitatif de l’implantation globale de la structure TEACCH à la résidence Potvin. La première partie de l’entrevue aborde des questions d’ordre général sur la structure physique de la résidence, sur l’organisation du travail, puis des questions générales aussi, sur une personne en particulier, sur la connaissance que l’intervenant a de ses forces et de ses faiblesses, avant d’aborder le contenu relatif aux autres sous-échelles. La version du manuel en français permet de présenter visuellement les résultats obtenus lors d’une entrevue. Cette présentation visuelle des différents domaines évalués permet à une équipe d’intervenants d’avoir une rétroaction pour chacune des sept sous-échelles. L’annexe 11 présente les différents items pris en compte dans l’évaluation de chaque sous-échelle. 43 EESE :Échelle d’Évaluation de la Structure Environnementale, U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 45 Cet instrument vise à évaluer la connaissance que l’on a de la personne et de son entourage, la pertinence de l’intervention et la cohérence dans l’intervention à l’intérieur du milieu résidentiel et d’un milieu de vie à l’autre. L’EESE permet de se donner une rétroaction sur l’organisation du milieu et l’intervention et de se donner des cibles communes d’amélioration. Il s’agit davantage d’un instrument qui permet de se donner une évaluation qualitative. En fait plus les résultats sont élevés (ils ont été ici ramenés en pourcentage), plus on peut considérer que l’approche TEACCH est bien intégrée et actualisée dans la résidence. 4.3.2 DÉMARCHE D’ÉVALUATION À L’AIDE DE L’EESE Six intervenants ont été rencontrés. Vingt et un (21) questionnaires portant sur l’Échelle d’Évaluation de la Structure Environnementale (EESE)44 ont été complétés. L’annexe 12 présente comment s’est fait la répartition des questionnaires. Pour chacun des résidents, on peut voir combien d’intervenants et lesquels ont répondu au questionnaire; et, pour chacun des intervenants, on voit aussi pour combien de résidents ils ont été interviewés. Sur les vingt-et-un (21) questionnaires complétés, les deux premiers intervenants ont répondu pour chacun des cinq résidents. Pratiquement 5 heures d’entrevues ont été nécessaires pour chacun de ces deux premiers intervenants; trois des intervenants ont répondu pour trois clients et un intervenant, pour deux. Les entrevues ont été réalisées avec beaucoup de sérieux, beaucoup d’informations ont été rendues disponibles non seulement sur l’implantation de TEACCH dans cette résidence, mais aussi et surtout sur la difficulté de maintenir le cap sur les objectifs et de maintenir un enthousiasme dans l’intervention au quotidien. L’implantation de la structure TEACCH amorcée à Potvin depuis 1997 a été passée en revue pour chacun des cinq résidents. Pour chacun d’eux, un questionnaire a été complété en entier par trois, quatre ou cinq des 6 intervenants interviewés. Le questionnaire passe en revue l’organisation physique de la résidence, l’organisation du travail à la résidence, puis les objectifs ciblés pour un client donné dans chacun des 7 domaines à considérer, pour que l’on puisse parler de l’implantation de l’approche inspirée du programme Teacch dans un milieu résidentiel : 1. La communication; 2. La structure; 3. La socialisation; 4.L’évaluation du développement de la personne et la planification des activités; 5. La gestion du comportement; 6. La continuité d’un milieu de vie à l’autre; 7. L’implication de la famille. Le questionnaire est aussi conçu pour voir comment ces objectifs sont travaillés dans le quotidien, les moyens utilisés par une équipe ou un intervenant en particulier pour adapter l’objectif à une personne donnée, plusieurs sous-questions tentent de voir si les apprentissages sont travaillés en contexte ou dans un milieu artificiel . 44 U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 46 Le but du ERS, tel que conçu par Van Bourgondien et Mesibov, est de mesurer le niveau de structure en fonction d’une personne donnée. Les auteurs considèrent que, pour les besoins cliniques ou de consultation, l’échelle permet d’évaluer les structures et les pratiques préventives mises en place pour la personne qui habite généralement une ressource résidentielle donnée. Ainsi, le questionnaire permet de voir jusqu’à quel point la personne interviewée garde à l’esprit la qualité préventive, en termes de comportements inappropriés ou excessifs, de l’implantation de la structure et de l’approche préconisée par TEACCH. Dans la démarche d’analyse de la résidence Potvin, les résultats obtenus à chacun des questionnaires complétés permettront d’obtenir une rétroaction visuelle des résultats obtenus à l’entrevue (voir annexe 13). Cette présentation visuelle des différents domaines évalués permettra aux intervenants, et éventuellement à l’équipe, d’avoir une rétroaction sur les points suivants : ! La résidence Potvin a-t-elle une organisation et un mode de fonctionnement qui répondent aux besoins de l’usager? ! L’intervenant interviewé a-t-il une bonne connaissance des structures et des adaptations mises en place pour l’usager? ! L’intervenant a-t-il une bonne connaissance de l’usager : − son niveau de communication − son niveau de fonctionnement cognitif − ses forces et ses intérêts? ! L’intervenant part-il des forces et des intérêts de l’usager pour lui faire pratiquer des apprentissages dans des domaines où il éprouve des difficultés? ! L’intervenant de la résidence Potvin a-t-il une connaissance de ce que fait l’usager dans le service socioprofessionnel durant la journée? En fait, l’utilisation du EESE dans la présente démarche d’évaluation permettra d’évaluer la connaissance que les intervenants interviewés ont des résidents et de leur entourage, la pertinence de l’intervention et la cohérence dans l’intervention à l’intérieur de la résidence et d’un milieu de vie à l’autre. L’information recueillie le sera donc à partir d’une base commune pour tous. 4.3.3 LE TRAITEMENT DE L’INFORMATION RECUEILLIE L’utilisation de l’EESE doit être replacée dans le contexte du mandat d’évaluation remis aux conseillers de la DSP quant à la résidence Potvin. Ce mandat consiste à dresser un tableau des critères essentiels que devrait présenter une ressource résidentielle pour personnes autistes, à vérifier si la résidence Potvin correspond à ce profil et à procéder à une analyse qui permette d’identifier les raisons d’être potentielles de l’écart entre le profil de la résidence actuelle et le profil souhaité. La démarche devrait ensuite U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 47 déboucher sur des recommandations en lien avec le mandat actuel de la résidence Potvin; les besoins des personnes qui y résident et leur qualité de vie; la connaissance que les intervenants ont de chacune de ces personnes et de la structure mise en place à la résidence pour répondre à ces besoins. Les propos recueillis permettront aussi de faire une analyse des besoins des travailleurs affectés à une ressource résidentielle semblable. Pour procéder à l’analyse du contenu des entrevues effectuées les 18, 19 et 20 octobre 2000, dans un premier temps, les propos recueillis auprès des six intervenants ont été regroupés pour chacun des clients. Cette première étape a permis de répondre aux questions relatives à l’implantation de l’approche à la résidence mais, aussi à l’organisation du travail qui sous-tend cette implantation de l’approche. Dans un deuxième temps, les propos recueillis ont été regroupés par thème pour l’ensemble des intervenants, de façon à mieux cerner la qualité de vie au travail, ce qui serait à maintenir dans l’organisation actuelle du travail et ce qui aurait avantage à être revu et bonifié. La présente démarche voudrait pouvoir conclure en précisant si la formule résidentielle développée à Potvin répond aux besoins des personnes qui y résident et dans quelle mesure, et d’identifier quelles seraient des conditions à mettre en place, à maintenir ou à améliorer pour atteindre une adéquation maximale entre les besoins de cette clientèle et le service offert. 4.3.4 QUI SONT LES INTERVENANTS INTERVIEWÉS Six intervenants ont accepté l’invitation de leur chef de service à collaborer à cette démarche d’évaluation en étant interviewés. Certaines balises ont guidé ces choix. Nous souhaitions obtenir des données à la fois de la part d’intervenants éducateurs, de la part de préposés, de personnel à temps plein, de personnel occasionnel, de personnel à temps partiel, de personnel de jour, de soir, de nuit, mais nous voulions voir aussi si les résultats seraient différents selon que les intervenants aient suivi ou non une formation TEACCH. Les six intervenants rencontrés couvraient l’ensemble de ces caractéristiques. Au plan de la première assignation, le tableau de l’annexe 14 permet de voir que, lors des entrevues en octobre 2000, trois des intervenants travaillaient à Potvin depuis 1 an ou moins et les trois autres depuis, 2½ ans, 4½ ans et 8 ans. Au plan de la formation, les intervenants 1 et 6 n’avaient aucune formation préalable (soit de préposé aux bénéficiaires, soit en éducation spécialisée) avant leur embauche aux CBSH; les deux ont reçu une journée de formation PDSB, un de ces deux intervenants a reçu deux ou trois jours de formation Omega et l’autre, une formation TIPS. Aucun des deux n’avaient reçu la formation TEACCH; ils ne pouvaient pas non plus parler vraiment de «coaching terrain» , leur quart de travail habituel faisant en sorte qu’ils appliquent ce qu’ils croyaient être les meilleures interventions possibles en fonction de ce qu’ils ont vu faire par leurs collègues et en fonction des informations que ceux-ci ont pu leur fournir. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 48 Les intervenants 2 et 5 n’ont pas de formation en éducation spécialisée; toutefois l’intervenant no 2 a reçu une formation de préposé aux bénéficiaires et l’intervenant 2 a un baccalauréat en sciences humaines; ces deux types de formation constituent des préalables intéressants en termes d’attitudes et de démarches (les questions à se poser, l’observation un peu plus attentive du comportement, …), mais ne donnent pas de techniques appliquées en termes d’intervention comportementale systématique. Aucun de ces deux intervenants n’a reçu la formation de deux jours sur TEACCH et un seul des deux a pu bénéficier d’un «coaching terrain» donné par monsieur Gilbert Leroux. L’intervenant no 3 a une formation en éducation spécialisée et a reçu les deux jours de formation TEACCH plus le «coaching terrain» qui a été donné par monsieur Gilbert Leroux et par madame Renée Landry. L’intervenant no 4 a reçu les deux jours de formation TEACCH et le «coaching terrain»; il possédait une expérience antérieure à la résidence Potvin avec certains des résidents. 4.4 LES RÉSULTATS OBTENUS 4.4.1 QUESTIONS D’ORDRE GÉNÉRAL PRÉALABLES AUX SEPT SOUS-ÉCHELLES 4.4.1.1 Structure physique de la résidence C’est en considérant l’ensemble des réponses des six répondants sur la structure de la résidence qu’on arrive à se faire une idée de l’ensemble des structures, des aménagements physiques qu’on y trouve. Ces aménagements sont prévus soit pour la sécurité des résidents (adaptation de la salle de bain, portes à codes pour les entrées et les sorties, fermetures électroniques pour la cuisine) soit pour leur permettre de faire certaines activités (salle d’activités avec un poste de travail pour chacun des résidents). Les environnements sont utilisés différemment selon les activités que l’on souhaite proposer aux résidents : ! ! ! ! ! ! cuisinette pour manger et pour les activités semi-autonomes; salon pour la détente; salle d’activités pour les activités autonomes; chambre à coucher pour les activités de base telles l’habillage,…; salle de bain pour les activités d’hygiène, le bain, l’élimination; cuisine pour le ménage, préparation de desserts, vidage du lave-vaisselle, préparation du repas. L’entrée est un endroit de transition permettant aux résidents de sortir à l’extérieur. Il y aurait aussi, pour un des résidents, une pièce personnelle en plus de sa chambre à coucher. Au moment de l’entrevue, chacun des intervenants n’aborde dans son discours, qu’une portion des aménagements physiques de la résidence et du lien de ces aménagements avec l’approche que l’on dit vouloir y implanter. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 49 Deux des intervenants déplorent l’absence d’une pièce nommée «salle d’isolement», pour l’un, et «salle de retrait», pour l’autre. Ce que ces deux intervenants déplorent, c’est le fait que les résidents n’aient aucun autre endroit que leur chambre à coucher pour relaxer seul ou se retirer; lorsqu’un résident se désorganise au rez-de-chaussée, comme les chambres à coucher sont majoritairement au sous-sol, il faut descendre les escaliers avec une personne qui n’est pas toujours disponible et consentante à le faire, ce qui peut occasionner des incidents ou accidents pour les résidents (et pour les intervenants). Un intervenant mentionne aussi que le fait de retirer les personnes dans leur chambre à coucher lorsqu’elles sont en désorganisation crée de la confusion sur l’utilisation de la pièce en question. Deux des intervenants ont mentionné que les fermetures électroniques et les grilles entre les armoires et les comptoirs de cuisine sont là pour un client en particulier. Ces aménagements ont permis de diminuer la fréquence de plusieurs désorganisations qui avaient lieu dans la cuisine, mais en même temps briment l’accès libre à cette pièce pour les résidents qui seraient susceptibles d’apprendre à s’y rendre ou non en fonction des circonstances. Des apprentissages se font dans la cuisine avec plusieurs résidents, mais ils sont toujours dépendants des intervenants pour y avoir accès. Deux des intervenants mentionnent que la résidence est structurée, qu’il y a des horaires pour les résidents, mais ils ne croient pas que ce soit si nécessaire et ils disent utiliser ces systèmes (par exemple, les horaires, ou les systèmes de renforcement lors des activités structurées) comme le font leurs collègues, mais sans trop grande conviction du bien-fondé de cette façon de faire. 4.4.1.2 L’organisation du travail à la résidence Potvin L’annexe 14 présente l’ensemble des commentaires recueillis auprès des six intervenants en ce qui a trait aux améliorations qui ont été faites depuis quelques années et aux frustrations qui demeurent. On s’est maintenant donné plus de moments pour partager l’information sur les résidents : à tous les jours, lors des changements de quarts de travail, les intervenants prennent une trentaine de minutes pour se partager l’information pertinente de la journée en cour. On a aussi instauré des réunions d’éducateurs qui devraient se tenir aux deux ou trois semaines, mais les gens mentionnaient, au moment des entrevues en octobre, que pour différentes raisons, ces rencontres ne s’étaient pas tenues depuis environ deux mois. On a aussi instauré des réunions d’équipe une fois par mois, mais en raison des quarts de travail et des coûts de remplacements, il y a seulement 30% du personnel qui y participe. Plusieurs préposés ont mentionné leur insatisfaction à ne pas pouvoir participer à ces rencontres et à n’avoir aucun endroit pour faire valoir leurs perceptions et leurs observations ou même pouvoir faire des suggestions soit au niveau de l’intervention, soit au niveau des instruments développés à la résidence. Plusieurs intervenants ont l’impression de ne pas être bien informés des plans d’intervention précis pour un client U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 50 donné. Plusieurs ont mentionné aussi que les façons de faire des trois éducateurs différaient et qu’ils n’étaient pas toujours certains de la façon de faire les interventions. Certains ont mentionné avoir reçu une information minimale avant de venir à la résidence Potvin. Lorsqu’ils travaillent de soir ou de fin de semaine, les intervenants ne voient pas nécessairement toutes les ramifications de l’organisation : le lien entre «Potvin» et «Butters-Savoy et Horizon» n’est pas évident. Les rôles et fonctions dans l’équipe ne le sont pas non plus, et lorsqu’on parle de responsables hiérarchiques qui ne sont pas dans la résidence, ils ne les connaissent pas non plus. Tout cela pour dire que le sentiment d’appartenir à un ensemble est mince pour plusieurs. Plusieurs intervenants ont collaboré avec cœur à ces entrevues donnant le maximum d’informations sur chacun des résidents, mais tous ont aussi manifesté des sentiments d’inconfort, d’insatisfaction, de sentiment de perte dans leur travail actuellement : les nombreux changements (chefs de service [4 en six mois]; chef de programmes, directeurs de zone [3 en un an], directeur général), ont créé énormément de turbulence sur la gestion de la résidence et cela s’est traduit en une perte de vitesse et d’enthousiasme par rapport à l’implantation de l’approche TEACCH qui allait bon train jusqu’à décembre 2000. Il y a énormément de roulement de personnel, et à chaque fois qu’une nouvelle personne arrive à Potvin, ce sont les intervenants en place qui doivent lui indiquer ce qu’il faut faire, comment il faut agir avec un client donné et finalement, la personne apprend en observant ce que font les autres. Sa compréhension «approfondie» de la problématique sera liée à ce que ses collègues auront cru bon lui dire ou auront eu le temps de lui dire. Vu sous cet angle, il n’est pas étonnant que la vision de l’intervention à faire s’effrite. Tous les intervenants ont parlé du stress engendré chez eux par les interventions insistantes d’un «proche significatif» d’un des résidents. Certains ont dit préférer ne pas intervenir, de peur d’avoir à mettre par écrit des interventions qui leur seraient ensuite reprochées de façon véhémente. La plupart se sentent isolés par rapport aux situations de crise qu’ils ont dû affronter. Ils aimeraient que quelqu’un de l’organisation, ou quelqu’un de l’extérieur, mais pas nécessairement du PAE (parce que ces intervenants, à l’heure actuelle ne connaissent pas assez leur réalité pour être vraiment soutenants), puissent leur offrir du soutien lorsqu’ils subissent une agression, à la fois pour les aider à ventiler, mais aussi pour réviser ce qui a conduit à la désorganisation et voir s’ils ont agi comme il faut. Plusieurs ont aussi mentionné qu’ils aimeraient avoir plus de feedback sur les interventions qu’ils font. Parfois, disent-ils, ils ne savent plus s’ils font ce qu’il faut faire ou ce qu’ils pourraient faire de mieux. Ils apprécient, pour la plupart, le soutien qu’ils reçoivent de la part du chef de service; ils apprécient les améliorations instaurées en terme d’organisation (rencontres d’équipes, U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 51 etc.), mais déplore le fait qu’il ait à se partager entre deux résidences ce qui minimise beaucoup l’investissement qu’il peut faire en termes cliniques. 4.4.2 LES RÉSULTATS GLOBAUX INTERVENANTS AUX CINQ PREMIÈRES SOUS-ÉCHELLES : POUR L’ENSEMBLE DES 6 L’annexe 13 (page 4) présente les résultats globaux à l’Échelle d’évaluation de la structure environnementale. Les pourcentages représentés par ces histogrammes sont le résultat de la compilation des réponses des six intervenants aux 21 questionnaires . La moyenne des résultats globaux aux 7 sous-échelles de l’EESE, équivaut à 42 %. Ce pourcentage, comme cela a été mentionné antérieurement, est un indicatif qualitatif de l’implantation globale de la structure TEACCH à la résidence Potvin. Ce tableau permet de constater que, malgré la faiblesse des résultats obtenus, les résultats les meilleurs se retrouvent dans les sous-échelles «Structure» (54%) (souséchelle 2) et «Communication» (50%) (sous-échelle 1). Cet état de fait pourrait refléter le contenu des deux jours de formation données à la résidence Potvin en 1997. En fait, la formation de cinq jours donnée, soit en Caroline, soit à Montréal, aborde généralement ces deux aspects dans les deux premiers jours. La structuration des activités en lien avec les «loisirs ou activités dans la communauté» ou les activités de «socialisation» (35%) (sous-échelle 3), ou les aspects liés à l’importance de «respecter le niveau de fonctionnement de la personne dans les activités qui lui sont présentées» (44%) (sous-échelle 4), viennent ultérieurement dans la chronologie de la formation sur l’approche TEACCH. La sous-échelle 6 «Continuité d’un milieu de vie à l’autre» (28%), qui porte les résultats les plus faibles, est tout à fait compatible avec le fait qu’un seul des résidents fréquente un service socioprofessionnel à temps plein et qu’un autre fréquente un atelier à mi-temps seulement. Il n’est pas surprenant que l’ensemble des intervenants interviewés aient peu d’information à donner sur l’aspect d’une généralisation à d’autres contextes environnementaux des apprentissages qui pourraient se faire dans la résidence ou l’inverse. De plus, même pour les deux résidents qui fréquentent un atelier, la communication entre les deux milieux (atelier et résidence) est minimale. Les intervenants de la résidence ne savent pas vraiment ce que font les résidents lorsqu’ils vont à l’atelier. Au moins deux intervenants ont dit avoir été à l’atelier et avoir vu les résidents se bercer : peut-être étaient-ils à une pause…? Trois des résidents n’ont pratiquement plus de contacts avec leur milieu familial d’origine ou élargi. Pour un des deux autres, il reçoit régulièrement la visite de personnes significatives de son entourage, mais celles-ci ne prennent pas vraiment part aux discussions en lien avec son plan d’intervention ou son plan de service. Ainsi, les résultats de la sous-échelle 7 (implication de la famille) (52%) qui pourraient laisser croire qu’il est de pratique courante de travailler avec les familles ne reflètent pas nécessairement les résultats d’une telle pratique ancrée et généralisée. Les familles étant absentes dans la majorité de ces dossiers, les résultats obtenus à cette sous-échelle reflètent davantage le biais entraîné par la préoccupation importante que suscite chez l’ensemble des intervenants l’implication «intense» d’une personne proche et significative pour un des résidents en particulier. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 52 Les résultats à la sous-échelle 5 «gestion du comportement» (34%) attirent particulièrement l’attention quand on sait que nous référons à une résidence qui, sans avoir un mandat officiellement défini, accueille 5 personnes dont les comportements : ! destructeurs, (qui posent un défi [peuvent blesser les autres, se blesser eux-mêmes, ont des habitudes peu fréquentes ou répétitives]); ! agressifs, ! perturbateurs, (accident à un membre du personnel qui donne lieu à un rapport écrit, tout comportement qui a pour effet d’apeurer un membre du personnel ou un autre client, tout client pour lequel on doit procéder à une mesure d’urgence –police, PRN, services psychiatriques). constituent une des principales raisons de leur orientation dans cette ressource résidentielle. Ce point sera repris plus en détail dans la section analyse des résultats. 4.4.2.1. Les résultats individuels par intervenant et par résident Les pages 1 et 2 de l’annexe 13 présentent les résultats moyens à l’EESE de chacun des six intervenants interviewés. Il importe ici de bien se rappeler que ces résultats ne viennent porter aucun jugement sur les qualités personnelles des intervenants, mais bien de ce en quoi les éléments recueillis rencontrent les critères établis par Von Bourgondien pour juger de l’implantation de l’approche (philosophie et pratique) TEACCH dans une ressource résidentielle. 4.4.2.2. Résultats à la sous échelle «communication» Les résultats à la sous-échelle «communication» (50%), en moyenne pour les six intervenants, se distribuent selon un écart allant de 36% à 57%. Les deux résultats les plus faibles ont été obtenus par les intervenants no 1 et no 6 qui sont les plus récents à la résidence, qui n’ont reçu comme formation de base que la formation PDSB et deux jours de formation OMEGA ou la formation TIPS, mais qui n’ont pas reçu les deux jours de formation TEACCH. Il s’agit aussi d’intervenants qui travaillent régulièrement le soir et les fins de semaine et qui n’ont donc pas beaucoup d’occasions de participer en équipe à des discussions cliniques qui pourraient possiblement offrir un palliatif au manque de formation. Quant aux résultats de l’ensemble, ils reflètent une implantation amorcée quant à la sphère de la communication, mais avec encore beaucoup à faire pour rencontrer des critères plus élevés de qualité. En fait, la plupart des intervenants rencontrés se montraient personnellement préoccupés par cet aspect. Pour quelques résidents, certains intervenants connaissaient la présence d’objectifs de communication (réceptifs ou expressifs) précisés au plan d’intervention, certains travaillaient même ces objectifs dans la mesure du possible en contexte, à l’heure du repas, mais ce n’était pas pratique généralisée à tous les intervenants, ce n’est pas généralisée non plus à tous les moments de vie. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 53 Lorsque les résultats sont analysés en fonction de chacun des résidents, les efforts d’implantation de la dimension communication semblent assez semblables d’un résident à l’autre. Toutefois, un écart de 10% existe entre le résident no 1 et le résident no 5. Cet écart pourrait refléter un état de situation qui n’a rien de surprenant en soi : l’équipe reçoit des pressions régulières pour que des activités soient faites pour un résident en particulier; quant à l’autre, au moment des entrevues, en octobre 2000, il était dans une phase où une ressource supplémentaire avait été mise en place pour le stimuler, sans quoi, il dormait sans arrêt; il est fort probable que l’aspect de la communication et ce qui a pu se faire avec lui, n’aient pas été très présents dans le discours des intervenants rencontrés. 4.4.2.3. Résultats à la sous-échelle «structure» Les résultats à la sous-échelle «structure» (54%) en moyenne se distribuent de 42% à 61%. En fait un seul intervenant a fait peu de mention de l’importance de la structure dans l’intervention. Pour tous les autres, c’est surtout cet aspect-là qui ressortait le plus de ce qu’ils avaient tirer de la formation TEACCH. En fait la résidence Potvin offre une structure physique apparente et en lien avec les problématiques comportementales qu’on y retrouve; mais dans le discours des intervenants, bien que cette structure physique contribue à prévenir des désorganisations ou l’expression de comportements excessifs et qu’elle devrait aussi permettre d’aller vers l’acquisition d’un fonctionnement plus autonome, ce dernier aspect n’est pas très présent dans le discours des intervenants. Lorsque la sous-échelle «structure» est analysée en fonction des données regroupées par résident, les résultats d’un seul résident se distinguent à la hausse par rapport à l’ensemble. Là encore, il est difficile de dire si la structure mise en place autour de ce résident est vraiment plus importante que pour les autres ou si le résultat reflète encore une fois, un biais dû à la présence insistante d’un proche. L’hypothèse de ce biais revient régulièrement, car tous les intervenants ont parlé de leur difficulté à vivre cette présence au quotidien. La préoccupation était présente pour tous, tout au long de l’entrevue, il est donc possible que les intervenants aient été plus attentifs dans leur description de ce qui se faisait autour de ce résident en particulier. 4.4.2.4. Résultats à la sous-échelle «socialisation» Les résultats à cette sous-échelle sont faibles en général. En fait, il n’y a que les intervenants de jour qui vont actualiser des activités en communauté avec quelques résidents. Il y a quelques objectifs touchant la socialisation aux plans d’intervention des résidents, semble-t-il, mais les réponses à ce sujet étaient plutôt évasives. Par contre, depuis une année ou deux, des efforts sont entrepris pour effectuer des sorties dans la communauté (restaurant, bowling, dépanneur, marches à l’extérieur). Il est encore difficile de trouver le moyen de faire participer les résidents à des activités physiques (baignade, randonnées pédestres, bicyclette…). Plusieurs raisons peuvent être à l’origine de cette situation : les caractéristiques mêmes de ces personnes font en sorte qu’il faut agir avec prudence, tant dans leur intérêt que dans celui de la communauté, les U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 54 installations sportives ne sont pas facilement accessibles à pied, autour de la résidence et des sorties sécuritaires planifiées, structurées selon l’approche TEACCH exigent du temps de préparation, des étapes bien structurées et des ressources humaines qui permettent de bien entourer la personne et de la recentrer sur les comportements attendus en cas de «fragilité comportementale». Certains intervenants relatent que certains résidents ont vécu des sorties au restaurant en ayant des comportements très corrects. Le résident qui reçoit la cote la plus faible à cette sous-échelle est rapporté comme étant une personne très anxieuse, difficile à contrôler lorsqu’elle présente des «accès» d’anxiété. 4.4.2.5 Résultats à la sous-échelle «Évaluation du niveau de développement et planification des activités» De façon générale, les intervenants connaissent assez bien le niveau de fonctionnement de la personne au niveau cognitif; toutefois, les intervenants parlent peu de son niveau de fonctionnement adaptatif. Peu d’intervenants ont parlé de la façon dont ils utilisaient les forces et les émergences des personnes pour planifier les activités; tous les intervenants ont parlé de l’utilisation des renforçateurs alimentaires comme renforçateurs pour les amener à participer à des activités autonomes ou semi-autonomes. Peu d’intervenants aussi ont parlé de préoccupations quant au fait de trouver des activités appropriées au niveau de fonctionnement de la personne. Peut-être le font-ils d’emblée, mais cela ne se retrouve pas dans leur discours. Un seul intervenant a mentionné que si la personne ne semblait pas progresser dans une tâche qui lui était présentée, on devrait revoir l’activité selon certains aspects. Des efforts sont quand même faits à la résidence pour intégrer les activités à des routines qui auront un sens pour l’individu : activités en lien avec la nourriture (préparer une collation, mettre les napperon, les couverts, vider le lave-vaisselle), en lien avec l’hygiène personnelle. 4.4.2.6 Résultats à la sous-échelle «gestion du comportement» Comme cela a été dit, ces résultats sont les plus faibles (34%) et de plus, ils sont homogènes pour l’ensemble des intervenants et pour l’ensemble des résidents. En fait, un des messages qui est donné lors des formations TEACCH, c’est que si une structure adéquate est en place, si la personne dispose de moyens de communication réceptifs suffisants pour comprendre ce qu’on attend d’elle et expressifs pour exprimer des demandes, si elle participe régulièrement à des activités dans la communauté et si les activités qu’on lui présente correspondent à son niveau de fonctionnement et à ses intérêts, il y aurait déjà 80% des problèmes de comportement qui seraient réglés. Déjà là, avec le taux d’implantation de l’approche à la résidence Potvin, les conditions maximales ne sont pas en place pour un gestion maximale des comportements avec la seule approche TEACCH. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 55 Aucun intervenant n’a parlé de règles de vie qui seraient expliquées de façon systématique (à l’aide de moyens qui leurs conviennent); tous ont dit qu’il n’y avait pas de renforcements systématiques des comportements attendus. Ce qui revenait dans le discours, ce sont surtout les différentes stratégies prévues pour certains clients, pour les aider à retrouver leur calme. Pour plusieurs, la contention, le PRN et le retrait sont planifiés correctement et les règles sont bien respectées et consignées, toutefois, on n’a peu l’habitude de se pencher sur le répertoires de comportements attendus. 4.5. ANALYSE DES RÉSULTATS En 1997, un rapport de l’ASSTSAS faisait état d’un nombre de 162 cas d’agressions déclarées à la résidence Potvin sur une période de six mois. Dans le but de comprendre la problématique de cette situation, une observation systématique des activités, des intervenants et des résidents avait permis de constater que 94% du travail était consacré à répondre aux besoins physiques des résidents et que seulement 6% du travail était dédié à des interactions relationnelles. On y observait aussi que sur une journée de travail de 7 h 30, 238 demandes étaient faites, dont 86.6% par les intervenants et seulement 13.4% par les résidents. Les intervenants trouvaient réponse à leurs demandes dans 56.8% des cas et les résidents dans 25% des cas seulement. De cette observation découle l’hypothèse que les situations d’agression pourraient être en lien avec une approche qui laisse peu de place aux interactions relationnelles, et qu’elles pourraient être le résultat du manque de moyens chez les résidents pour communiquer leurs besoins ou leurs frustrations de façon appropriée. Les comportements d’agression entraînent, de la part des intervenants, de nombreux arrêts d’agir et des interventions qui ont pour conséquence de limiter la réponse aux besoins psychosociaux des résidents, diminuant du fait même leur qualité de vie. C’est dans le but d’améliorer la qualité de vie des résidents, en leur donnant des moyens concrets pour développer une autonomie dans leur fonctionnement quotidien, pour développer des moyens de communication réceptifs et expressifs et ainsi, diminuer les situations d’agression que plusieurs mesures ont été proposées et que s’est amorcée l’implantation de la formation sur une approche structurée inspirée de TEACCH à la résidence. Lorsqu’on regarde les chiffres concernant les accidents/incidents reliés aux comportements d’agression, nous constatons, malgré les efforts investis, que la situation ne s’est pas améliorée. Un état de situation de la santé et sécurité au travail à la résidence Potvin, déposé en mars 1999 (annexe 15), mentionne que : «Depuis 1996, le service de SST a reçu en provenance de la résidence Potvin, 394 déclarations d'événements accidentels relatant des gestes d'agression du personnel par la clientèle. Ces rapports font état de la détresse psychologique générée par la menace constante de désorganisation de la clientèle, et par la répétition des agressions. Ils U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 56 parlent aussi des problèmes physiques, de la douleur et de la fatigue ressentis lors des efforts physiques intenses déployés pour maîtriser physiquement (contention) une personne en crise. Par contre, le nombre de ces déclarations, qui était de 230 en 1996, a diminué graduellement. Ainsi, en 1997, il était de 103 et de 49 en 1998.» Toutefois, selon une représentante syndicale dans une lettre envoyée au président du conseil d'administration de l'époque, ces «statistiques ne seraient pas représentatives de la réalité, en partie parce que les employés ne sont plus motivés à remplir les formulaires de déclaration en raison du manque de réaction de l'organisation et du manque de temps à consacrer à cette activité.» Il est important de souligner également que plus de 85% des déclarations sont en lien avec des agressions. L'état de situation de la santé et sécurité au travail de la résidence Potvin formule la conclusion suivante : «Malgré la reconnaissance de la situation par l'administration et les efforts d'amélioration consentis ces dernières années, de toute évidence, il reste beaucoup de travail à faire et d'avenues à explorer afin que la résidence Potvin devienne un milieu de travail sécuritaire où il est possible de conserver son intégrité physique et psychologique. Également, force est de constater devant le tableau partiel brossé précédemment, qu'il est utopique de penser que le personnel puisse actuellement dispenser un service de qualité à la clientèle de la résidence.» La mise à jour des données (1999 et 2000) montre que la situation n'a pas changée. Le nombre de déclarations d'événements accidentels fluctue sans toutefois revenir au niveau le plus bas observé. En fait, le nombre en 1999 est passé à 140, et en 2000, à 97. Dans le cadre de cette analyse de résultats, nous tenterons ici de répondre à la question suivante : «Pourquoi, malgré les efforts investis en termes ... ! ! ! ! ! de formation, d’ajout de structures physiques, d’ajout de postes de travail, d’ajout en termes de réunions d’équipes, d’organisation du travail, y a-t-il toujours autant de coûts rattachés aux conséquences reliées aux comportements des résidents?» U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 57 Les résultats obtenus à l’EESE, quant à l’implantation de l’approche TEACCH, constituent un indicatif qualitatif de l’implantation de la structure TEACCH à la résidence. Les résultats montrent un début d’implantation, une amorce qui demeure à être complétée. Ce que les résultats nous montrent aussi, c’est que le contenu des deux jours de formation plus structurée semble être ce qui paraît encore le plus significatif lors des entrevues. Les intervenants qui ont suivi ces formations présentent les résultats les plus élevés au plan de la structure et de la communication. On y voit aussi qu’il y a encore beaucoup à faire au plan de la socialisation, pour enrichir la qualité de vie des résidents en leur permettant de fréquenter d’autres milieux de vie. Les résultats à la sous-échelle «gestion du comportement» peuvent surprendre au premier abord, puisqu’ils sont les plus faibles alors que nous traitons d’une résidence dédiée à une clientèle présentant des troubles graves du comportement. En fait, tant que l’implantation de l’approche TEACCH demeure aussi partielle, on ne peut espérer atteindre une diminution maximale des troubles de comportement. Et même si on atteignait une telle diminution maximale, il faudrait toujours prévoir gérer 20 % de troubles de comportement possiblement liés à des problèmes d’ordre de santé physique ou mentale à traiter autrement. Beaucoup d’améliorations ont été faites à la résidence Potvin pour observer les signes précurseurs d’une crise comportementale et planifier des interventions pour prévenir l’escalade et finalement intervenir en situation de crise. Mais peut-être faudrait-il, dans une telle résidence, inscrire dans la structure TEACCH, qui constitue un programme préventif et d’amélioration de la qualité de vie, un programme beaucoup plus formel de gestion des comportements. La section trois de ce document présente plusieurs approches et plusieurs programmes qui s’adressent spécifiquement aux troubles graves du comportement. Chacun insiste sur un ou plusieurs aspects, mais finalement, nous retrouvons plusieurs recoupements avec ce qu’il est recommandé de faire au plan du comportement dans l’approche TEACCH lorsqu’elle est appliquée intégralement. Dans l’ensemble, ces approches visent à bien identifier les comportements que l’on veut encourager et à développer un répertoire de tels comportements lorsqu’ils sont inexistants. Ceci exige donc de maintenir l’aspect sécuritaire et préventif instauré à Potvin, mais de rajouter un aspect que l’on pourrait qualifier de «construction d’un répertoire de comportements attendus». Le support positif du comportement, «Positive Behavioral Support» (voir page 25, 3.8.4), ce que nous connaissons au Québec comme l’approche positive, suggère différents moyens de remplacer des comportements inappropriés par des comportements attendus. Nous aurions tout avantage à voir ce qui s’offre au niveau de formation à l’«Institute on Violence and Destructive Behavior» de l’université de l’Oregon qui publicise les différents formats de formation qu’ils offrent dans ce domaine et annoncent des résultats de recherches pratiques portant sur la conception de procédures nonaversives d’intervention. Ces techniques auraient été mises au point, disent-ils, par «des recherches rigoureuses, des évaluations complètes, des recensions de la littérature scientifique»; et les formations offertes sont à la fois théoriques et pratiques, auprès de personnes vivant dans la communauté ou ayant été temporairement retirées de leur U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 58 milieu. L’intervention vise la restauration de l’adaptation de la personne concernée et la réintégration dans son milieu de vie. À la résidence Potvin, beaucoup d’éléments de structures physiques ont été investis pour prévenir l’apparition des troubles de comportement. Cet investissement correspond aux besoins d’un, peut-être deux, des résidents actuels, mais pas nécessairement aux besoins de tous. À la question «Pourquoi les investissements à la résidence Potvin ont-ils si peu rapporté?», plusieurs éléments de réponse se trouvent déjà dans les commentaires des intervenants, différents rapports d’évaluation effectués en lien avec la résidence Potvin depuis 1997 ( annexe 14). Déjà, lors de sa visite en 1998, monsieur Dougherty a souligné plusieurs points à améliorer d’abord aux plans administratif et clinique. Il parlait de ce qui se faisait en Caroline du Nord pour reconnaître la lourdeur du travail auprès de cette clientèle. Il parlait de l’importance de mettre en place des conditions pour favoriser la stabilité du personnel. Il parlait aussi de l’importance de mettre plus de personnel permanent et d’avoir comme objectif de garder ces personnes au moins deux ans, car il faut six mois avant qu’un intervenant devienne à l’aise avec les différentes stratégies d’intervention et deux ans avant qu’il ne soit compétent. Les conditions actuelles de roulement, de manque de coaching terrain font en sorte que personne n’a ce sentiment d’être un intervenant qui puisse se sentir compétent. Il mentionnait aussi l’importance que tous les gestionnaires ayant une responsabilité administrative dans une telle résidence soient impliqués dans la mise en place du programme et que les cadres supérieurs reçoivent une formation de base sur l’approche de façon à mieux comprendre certaines demandes qui pourraient leur être faites. Il mentionnait aussi qu’une telle résidence ne devrait jamais accueillir plus de deux résidents présentant des troubles graves du comportement. En fait parmi ces recommandations, qui toutes auraient pu constituer des facteurs de conditions gagnantes, aucune n’a été actualisée jusqu’à maintenant. Les mouvements de restructuration de l’organisation n’ont pas facilité, chez les gestionnaires, une continuité dans toute cette démarche qui a été amorcée en 1997. 4.6 EN CONCLUSION : LA RÉSIDENCE POTVIN RÉPOND-ELLE AUX CRITÈRES ÉNONCÉS ? De toute évidence, les personnes qui y habitent et le personnel qui y travaillent le disent clairement, cette résidence et son organisation actuelle ne rend pas les gens heureux. Voici, passés en revue, les critères énoncés. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 59 4.6.1 QUALITÉS ET COMPÉTENCES MINIMALES POUR L’INTERVENTION Les intervenants rencontrés lors des entrevues présentent, à première vue, l’ensemble de ces qualités. Encore faudrait-il voir ce qui en est pour l’ensemble des intervenants. Les qualités et attitudes attendues devraient se travailler dans une démarche d’équipe (réunions, coaching-terrain et lors de supervisions individuelles). 4.6.2 FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES DE L’INTERVENANT Des efforts ont été faits dans ce sens lors de l’embauche de monsieur Leroux à titre de consultant externe. Depuis 1999, un programme de formation pour les intervenants de cette résidence (annexe 8) a été développé, mais n’est pas encore actualisé. 4.6.3 ÉVALUATION DES RÉSIDENTS Cet aspect est à travailler. Les personnes qui sont orientées vers une ressource résidentielle, surtout lorsqu’elles présentent des besoins complexes, devraient passer à travers un processus d’évaluation complet : ! ! ! ! ! ! ! évaluer le niveau d’autisme; situer le niveau de fonctionnement intellectuel; évaluer les comportements adaptatifs; évaluer les forces, les intérêts, les émergences de la personne (AAPEP); évaluer l’état de santé physique; évaluer les hypothèses de problèmes au plan de la santé mentale; réviser de façon systématique la médication. À la résidence Potvin, cet aspect de l’évaluation des résidents serait à développer. Comme cela a été mentionné antérieurement, un seul résident a reçu toutes les évaluations souhaitées. Cette absence d’évaluations plus formelles fait en sorte qu’il est plus difficile de se donner des cibles précises d’intervention à travailler en équipe. 4.6.4 LA STABILITÉ DU MILIEU Plusieurs rapports ont mentionné que le roulement de personnel important à la résidence Potvin ne permet pas d’avoir en place en tout temps un personnel formé qui connaisse bien chacun des résidents et les objectifs du plan de service ou d’intervention le concernant. De plus, une telle résidence ne devrait pas accueillir plus de deux personnes présentant un trouble grave de comportement à la fois et ici, bien sûr, les cinq résidents présentent des caractéristiques semblables. 4.6.5 ESPACE PHYSIQUE SUFFISANT POUR BOUGER La résidence Potvin offre à chacun une chambre privée, de l’espace pour les activités structurées, un espace clôturé à l’arrière. La résidence ne donne pas accès directement à un espace physique qui permettrait de courir, jouer au ballon, dépenser une énergie physique intense à l’intérieur. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 60 Les résidents ne disposent pas non plus d’un espace de repos autre que leur chambre à coucher lors de désorganisation. 4.6.6 ADAPTATION DE LA RÉSIDENCE 4.6.6.1 De façon à rendre le quotidien prévisible Ici, un gros effort a été fait et est visible aux plans de la structure physique de la résidence, des horaires, des activités et des routines. Ce qui est en place demeure à consolider en visant plus d’autonomie de la part des résidents. 4.6.6.2 Révision du bâtiment pour s’assurer qu’il réponde à des normes de sécurité pour la personne et pour les autres À ce niveau, à la résidence Potvin, on a mis en place des mesures de sécurité (fermetures, alarme, vitres incassables, etc.). 4.6.7 ORGANISER LES TEMPS LIBRES Là encore, des efforts sont faits pour que les résidents demeurent inactifs le moins souvent possible. Toutefois, il demeure difficile de cibler les activités susceptibles d’intéresser les personnes et de s’inscrire dans un répertoire de loisirs, car le niveau d’autonomie des personnes demeure faible. 4.6.8 LE SOUTIEN D’UNE ÉQUIPE La notion d’équipe est ici morcelée en fonction des quarts de travail. Des efforts sont faits pour améliorer la communication entre les intervenants : ! ! ! temps de rencontres entre les quarts de travail; réunions d’éducateurs; réunions d’équipe. Mais, le roulement de personnel et les remplacements à assurer durant les rencontres d’équipe font en sorte que ces moyens n’ont qu’une portée limitée sur la qualité de la communication dans l’équipe et par conséquent, sur la qualité de l’intervention et la qualité de vie des résidents. Lors des entrevues, plusieurs intervenants ont exprimé le sentiment d’isolement dans leur travail. Certains ont mentionné qu’ils souhaiteraient parfois avoir un feedback sur les interventions qu’ils font. 4.6.9 GARDER CONTACT AVEC LES DIFFÉRENTS MILIEUX DE VIE DE CETTE PERSONNE Au moment des entrevues, seulement deux des résidents participaient à des activités dans le cadre d’un programme socioprofessionnel et il y avait peu de contacts entre le milieu résidentiel et le milieu socioprofessionnel. Les liens avec le milieu familial ou les proches se font dans la mesure du possible. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 61 4.6.10 MISE EN PLACE D’UN PLAN DE TRAITEMENT OU DE GESTION DU COMPORTEMENT La gestion préventive du comportement se fait par la mise en place des structures physiques évoquées plus tôt et par des interventions individualisées impliquant prévention de l’escalade et au besoin, retrait dans sa chambre, contention, PRN. Toutefois, les intervenants interviewés mentionnent qu’il n’existe pas d’intervention visant à renforcer les comportements appropriés ou à développer un répertoire de comportements attendus. En conclusion, l’organisation du travail dans une ressource résidentielle de groupe, avec les remplacements prévus pour les congés et les vacances, génère en soi un roulement de personnel qui va à l’encontre du besoin de stabilité de la clientèle. Le roulement de personnel; les remplacements entraînent des impacts aux plans de la formation, de la communication entre les intervenants et par ricochet, sur l’intervention auprès des résidents. Difficile de maintenir une rigueur dans l’implantation d’une approche en l’absence d’une stabilité à laquelle des outils de gestion (réunions d’équipe, par exemple) ne peuvent que pallier partiellement. 5. RECOMMANDATIONS 5.1. PRÉALABLES À PRENDRE EN COMPTE DANS L’ORIENTATION RÉSIDENTIELLE 5.1.1 LA RESSOURCE LA PLUS LÉGÈRE POSSIBLE L’orientation vers la ressource la plus légère et la plus proche possible du milieu de vie naturel avec le soutien requis par les besoins de la personne devrait guider le choix d’orientation résidentielle. Dans tous les cas, il faudra s’assurer de bien faire la distinction entre les besoins requis au niveau des services résidentiels, les besoins requis au niveau des services socioprofessionnels et planifier le soutien en ressources humaines pour soutenir les différents milieux de vie. Les termes services socioprofessionnels doivent être utilisés ici dans un sens élargi pour parler d’activités de jour qui devraient s’inscrire dans le cadre du programme socioprofessionnel. 5.1.2 DES ORIENTATIONS EN LIEN AVEC LE PSI Les orientations cliniques de l’établissement devraient constituer des balises quant aux grandes orientations qui devraient guider nos choix résidentiels et socioprofessionnels dans l’ensemble. Le PSI demeurera la pierre d’assise des orientations pour une personne en particulier. Toute orientation résidentielle devra évidemment s’inscrire dans le cadre d’une démarche de PSI où toutes les évaluations proposées antérieurement auront été complétées ou seront planifiées avec un plan d’action précis avec un responsable du suivi. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 62 5.1.3 DISTINGUER BESOINS RÉSIDENTIELS DES BESOINS SOCIOPROFESSIONNELS En distinguant, pour chacune de ces personnes, les besoins en lien avec le programme résidentiel des besoins en lien avec le programme socioprofessionnel, il devrait être plus facile de cibler, d’une part, des objectifs de qualité de vie et, d’autre part, des objectifs que l’ont pourrait nommer ici de traitement ou de réadaptation. 5.1.4 LE TRAVAIL EN RÉSEAU POUR ÉVITER L’ISOLEMENT La notion de réseau, de «réseautage», de travail en réseau devrait aussi guider l’orientation des services à cette clientèle : il faudra mettre en place des mécanismes qui évitent aux différentes ressources (résidentielles ou socioprofessionnelles) de vivre l’isolement; des mécanismes qui permettent aux différents acteurs impliqués de chercher ensemble des solutions lorsque les problèmes surviennent. 5.1.5 TRAVAILLER AUPRÈS DE CETTE CLIENTÈLE PAR CHOIX L’organisation devrait mettre en place un mécanisme qui permette aux intervenants (autant dans les programmes soutien, socioprofessionnel que résidentiel) de faire le choix de travailler avec cette clientèle. Cette clientèle pose des défis certains et le choix d’intervenir auprès de ces personnes devrait être encouragé par des conditions de travail qui mettent en valeur l’investissement personnel qu’exige le quotidien avec ces personnes. La formation, le soutien clinique et le travail d’équipe seront toujours requis. 5.1.6 ASSOCIATION AVEC LES MILIEUX DE FORMATION Lorsque nous examinons les modèles qui nous viennent bien souvent des États-Unis, la rigueur et la structure perçue dans la littérature viennent en grande partie de l’association qui est faite là-bas entre les centres universitaires qui proposent des programmes de recherche qui doivent répondre à des besoins identifiés dans la communauté. Ces liens université – communauté existent ici au Québec, mais ne sont pas encore très visibles dans nos milieux en déficience intellectuelle. Une association formelle avec un milieu de formation pourrait aider à soutenir tout l’aspect de la démarche d’observation, évaluation, mise en place de programmes structurés, de «traitements» suivis des résultats obtenus. La collaboration avec un centre de formation universitaire relève aussi d’une réflexion et d’une décision à prendre au plan de l’établissement. 5.2 RECOMMANDATIONS EN LIEN AVEC LES CRITÈRES ESSENTIELS À UNE RÉSIDENCE POUR PERSONNES AUTISTES La réponse aux besoins, dans le cadre du programme résidentiel, devrait voir à ce que l’on maintienne ou que l’on améliore la qualité de vie de la personne lorsqu’elle est «chez elle»: En l’occurrence, pour l’ensemble des personnes résidant actuellement à la résidence Potvin, on pourrait identifier comme suit les facteurs de maintien ou d’amélioration de la qualité de vie : U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 63 5.2.1 LA STABILITÉ : DES PERSONNES, DES LIEUX, DES ROUTINES ! Être entouré d’un minimum de personnes, des figures stables, qui présentent les caractéristiques humaines décrites plus tôt (être respectueux, empathique, capable de communiquer, capable de travailler en équipe, authentique, discret, avoir une bonne estime de soi, adopter des habiletés sociales adéquates, favoriser le développement de l’autonomie de la personne, conseiller plutôt que de contrôler). La formule de foyer communautaire pourrait être une avenue à explorer pour certains des résidents actuels. Mais quelle que soit la formule retenue, il faudra préciser le soutien nécessaire à cette ressource pour assurer justement cette qualité de vie. ! Cette ressource ne devrait jamais recevoir plus de deux personnes présentant un trouble grave du comportement. Un soin attentif devra être apporté aux choix des co-résidents au niveau des intérêts communs si possible, mais au niveau surtout de la complémentarité comportementale. ! La ressource résidentielle comme telle aura avantage à reproduire ou encore à bonifier la structure qui a été mise en place pour chacune des personnes à la résidence Potvin. Pour chacun des résidents, il faudra passer en revue les structures physiques nécessaires à sa sécurité et à celles d’autrui, mais aussi l’organisation physique, les moyens techniques à mettre en place (horaires, moyens de communication, activités de loisir ajustées à la personne) pour favoriser l’autonomie de la personne, sa capacité de faire des choix parmi des suggestions d’activités qui soient motivantes pour elle, dans un respect de son espace vital, sans pour autant créer des contextes qui favoriseraient l’isolement. ! Tous les résidents actuels de la résidence Potvin sont à risque de se retrouver dans une situation d’agitation ou même de désorganisation comportementale : la résidence d’accueil devrait pouvoir offrir une pièce que l’on pourrait nommer «salle de décompression» ou «salon de relaxation» ou «chambre zen» qui soit associée à l’idée de se retrouver pour être bien, retrouver son calme. La conception d’une telle pièce devrait se faire en équipe, chacun des intervenants ayant une connaissance concrète des caractéristiques des résidents actuels et pouvant évaluer jusqu’à quel point, des résidents peuvent être invités à développer des stratégies d’autocontrôle». Si on parle de routines à établir dans la maison, cette pièce pourrait être tout-à-fait dénudée, tout comme elle pourrait comporter des suggestions visuelles de ce qu’il est souhaitable de faire lorsqu’on sent qu’une désorganisation est imminente (par exemple : s’asseoir dans un fauteuil et respirer profondément, s’étendre par terre sur un matelas et se couvrir d’une couverture lourde, écouter une musique qui calme, visionner une vidéo-cassette sur laquelle cette personne a été filmée antérieurement alors qu’elle suivait les étapes pour arriver à un état de calme…). ! Planifier, pour les moments de vie à la ressource résidentielle des routines illustrées par des moyens qui rendront l’information accessible à la personne. ! Identifier les règles de vie que l’on souhaite voir respecter dans cette ressource résidentielle. Très souvent, les règles de vie dans un milieu sont tacites, non-dites, U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 64 font parties de conventions et ce n’est souvent, lorsqu’elles sont transgressées, que l’on réalise qu’une personne a agi à l’encontre d’une règle. Identifier ces règles est un exercice qui devrait être fait avant l’accueil de la personne, puis en cour de route, au fur et à mesure que des incidents viendront mettre en lumière une règle qui n’était pas évidente avant. Trouver des moyens concrets pour faire comprendre ces règles à la personne et faire en sorte que celles-ci puissent être respectées. 5.2.2 CONTINUITÉ D’UN MILIEU DE VIE À L’AUTRE La notion de réseau à mettre en place autour de la personne devrait s’actualiser par la mise en place d’un système de communication régulier et si possible quotidien (surtout dans la période de transition) pour assurer une continuité dans l’intervention, pour s’assurer de bien suivre les «mouvements d’humeur» de la personne et pouvoir prévenir les situations pouvant susciter de l’anxiété, des désorganisations et des situations de crises. 5.2.3 IDENTIFICATION D’UN INTERVENANT RESPONSABLE DU SUIVI DANS TOUS LES MILIEUX DE VIE Pour rencontrer l’objectif de «stabilité» et de continuité de service d’un milieu de vie à l’autre, il faut s’assurer que le dossier soit pris en main par un intervenant qui a manifesté son intérêt pour travailler auprès de cette clientèle, qui connaît bien la personne, pour avoir passer du temps en intervention directe avec elle et qui aura les habiletés pour assumer le lien entre les différents milieux de vie. Au moment de la transition, cet intervenant est celui qui voit avec le milieu d’accueil comment implanter la structure et les routines, selon quelles étapes, c’est lui aussi qui évalue jusqu’à quel point et à quel rythme, il peut estomper sa présence dans ce processus. Chez les personnes autistes qui ont développé un fonctionnement autonome grâce à la structure TEACCH, la transition est en général grandement facilitée lorsque la structure et la routine établie antérieurement les précèdent dans leur nouveau milieu de vie. 5.2.4 MISE EN PLACE D’UNE ÉQUIPE DE SOUTIEN ! Les objectifs qui devraient guider la mise en place d’une telle équipe sont les suivants : − Éviter l’isolement des intervenants et des ressources (résidentielles ou socioprofessionnelles); − S’assurer que les recherches de solutions (qui sont généralement fréquentes avec ces personnes) se fassent dans le cadre d’un questionnement et d’un processus clinique rigoureux (observations systématiques, révision de l’état de santé physique et mentale, révision des routines, révision des activités, des moyens de communication…) : cette équipe est formée de l’intervenant responsable du suivi, du conseiller clinique, de l’infirmier psychiatrique ou de toute autre intervenant ou conseiller de l’établissement susceptible de contribuer activement à ce processus de résolutions de problèmes; U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 65 ! 5.2.5 Selon le milieu de desserte de la personne, compléter le «réseau de soutien» par des ressources de la communauté auprès desquelles des approches et dans certains cas des ententes auront pu être établies : médecins, psychiatres, policiers... MISE EN PLACE, ACTUALISATION ET GÉNÉRALISATION D’UN PLAN DE TRAITEMENT OU DE GESTON DU COMPORTEMENT, ET D’UN PLAN DE DÉVELOPPEMENT D’UN RÉPERTOIRE DE COMPORTEMENTS ATTENDUS ! Réviser dans les plans de traitement actuellement prévus ce qui serait à maintenir au niveau de l’intervention visant à prévenir les désorganisations et à les gérer lorsqu’elle surviennent; ! Mettre en place un programme (voir support béhavioral positif) qui vise à identifier les comportements que la personne auraient avantage à maintenir ou à développer pour améliorer sa qualité de vie et son potentiel d’intégration sociale; identifier ensuite les stratégies comportementales (façonnement, estompage, renforcements positif ou négatif, ignorance intentionnelle,…) qui devraient être appliquées de façon systématique dans tous les milieux de vie, dans le cadre du plan de «traitement » de cette personne. Le travail en équipe est important ici, les objectifs doivent être clairs et les retours en équipe pour clarifier des objectifs et des meilleurs moyens à mettre en place pour les atteindre sont primordiaux. 5.3 RECOMMANDATIONS EN LIEN AVEC LES ACTIVITÉS SOCIOPROFESSIONNELLES 5.3.1 DÉPARTAGER LES MANDATS RÉSIDENTIEL, SOCIOPROFESSIONNEL ET RÉADAPTATIF Jusqu’à maintenant, la résidence Potvin est identifiée comme étant une ressource résidentielle. En fait, dans le moment présent, le résidentiel ne constitue qu’une seule des fonctions qu’elle remplit actuellement. Cette résidence est présentement le lieu unique pour répondre aux besoins résidentiels, socioprofessionnels et cliniques ou réadaptatifs de ces personnes. En certaines circonstances, on pourrait aussi dire que cette résidence est aussi un centre de crise dans la mesure où c’est dans ce même lieu que doivent se gérer les désorganisations comportementales. 5.3.2 DES ACTIVITÉS SOCIOPROFESSIONNELLES À L’EXTÉRIEUR DU MILIEU RÉSIDENTIEL Si on pense à orienter certains des résidents dans des ressources plus légères, il faut planifier des activités socioprofessionnelles pour ces personnes. Ici, le terme «socioprofessionnel» doit être pris dans son sens large «d’activités de jours, à l’extérieur de son milieu résidentiel qui répondent à ses besoins». Le chapitre trois de ce document présente différents exemples de projets qui ont été proposés à des personnes présentant une problématique complexe (troubles graves du comportement associés à l’autisme, déficience intellectuelle ou problèmes de santé mentale). On parle, pour certains, de projets ruraux dans lesquels les activités de jour peuvent être des activités extérieures qui permettent une dépense énergétique tout en respectant le rythme de ces personnes. On parle aussi de projets urbains, dans lesquels U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 66 les personnes sont «accompagnées» dans la communauté dans des emplois qui correspondent soit à leurs intérêts, soit à leurs profils de stéréotypes. Dans l’état actuel des choses, la mise en place d’activités de jour pour ces personnes implique une décision et une démarche de l’établissement pour mettre en place les conditions qui permettront d’offrir à ces personnes des activités de jour qui répondent à leurs besoins. Cela peut vouloir dire une intégration dans les services de jour actuels, mais cela peut surtout vouloir dire transformer, pour certains, l’offre actuelle de services pour s’ajuster au niveau de fonctionnement et aux besoins de ces personnes; si par exemple, une personne aime faire des casse-tête (en bois), pourrait-on penser élargir son champ d’activités en lui faisant sabler des pièces de bois à encastrer (puis peindre et en bout ligne fabriquer de tels casse-tête, ou des gabarits utiles à d’autres fins). 5.3.3 LA MISE EN PLACE D’ACTIVITÉS SOCIOPROFESSIONNELLES La mise en place d’activités socioprofessionnelles exigera les mêmes conditions de mise en place énoncées pour le résidentiel : le socioprofessionnel devient un élément essentiel du PSI, l’intervenant responsable du suivi est impliqué activement dans le lien à faire avec l’équipe de ce service et les responsables du lieu d’hébergement. L’équipe de soutien peut ici être enrichie de la présence d’intervenants plancher dont le rôle sera d’implanter, dans le milieu socioprofessionnel (quel qu’il soit) la mise en place de la structure et des activités qui vont entourer cette personne. 5.4 ORIENTATIONS RÉSIDENTIELLES ET SOCIOPROFESSIONNELLES POUR LES RÉSIDENTS ACTUELS DE LA RÉSIDENCE POTVIN Ces recommandations ne remplacent pas les démarches d’évaluation faites ou à faire dans le cadre de la démarche de PSI. Pour trois des résidents (résident n° 1, résident n° 3 et résident n° 5) peut-être faudrait-il envisager une orientation vers une ressource résidentielle plus légère tout en tenant compte des aspects énumérés en 5.1.1 Il faudra choisir les responsables de la ressource en fonction des qualités personnelles énumérées antérieurement, de leur expérience avec cette clientèle et de l’aisance qu’ils pourront démontrer envers la gestion potentielle de comportements caractéristiques de ces personnes. Certaines caractéristiques des personnes, telles la langue, le milieu d’origine des personnes significatives, pourraient être pris en considération dans les choix à faire. Le nombre de résidents dans la ressource est aussi à considérer. Pour le client n° 1 en particulier, le nombre de co-résidents et leurs caractéristiques personnelles devraient pouvoir s’ajuster au fait que ce client requiert un environnement calme pour minimiser les comportements de rituels qui viennent perturber son fonctionnement. La mise en place d’un lieu, ou même de différents lieux susceptibles d’accueillir cette personne pour des activités de jour, activités qui répondront aux besoins de cette personne constitue une étape préalable à son transfert vers une ressource résidentielle plus légère. U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01 67 Le client n° 3, quant à lui, présente des déficits importants au plan physique. Cet aspect de sa condition devra être pris en compte de façon plus précise dans l’orientation résidentielle qui lui sera proposée. Il faudrait limiter, pour lui, les déplacements qui pourraient avoir à se faire sur plus d’un étage. Les résidents n° 2 et 4 sont les deux personnes qui semblent présenter les défis les plus importants au niveau de la gestion du comportement. En effet, plusieurs des structures physiques de la résidence ont été planifiées en vue de réduire l’apparition de certains des comportements du résident n° 2. Lorsque cette personne devient anxieuse, il s’ensuit des comportements qui exigent une surveillance importante et de nombreuses interventions de la part du personnel. Peut-être faudrait-il prévoir une orientation vers une ressource de type intermédiaire avec le résident n° 2. Quant au résident n° 4, ce qui semble caractériser son comportement global, c’est l’imprévisibilité de ses comportements d’agression. Là encore, peut-être faudrait-il envisager une ressource de type intermédiaire avec la mise en place, encore une fois, de la structure nécessaire à une prévention des comportements et à un «traitement» à la fois médical et réadaptatif pour améliorer la qualité de vie de ces personnes. Les choix d’orientation résidentielle et le soutien qui devra être mis en place devra être guidé avant tout par les besoins de ces personnes. L’organisation des services devrait par la suite permettre une flexibilité pour s’ajuster à ceux-ci. /ll U:\jeanyd\Mes Documents\cbsh\documents\Rapport Potvin formaté.doc 24/09/01