UN SAINT
NOUVEAU?
1
un saint nouveau
« On sent quil croit à ce quil fait
comme il respire. Je ressens sa foi comme
une sorte de sainteté » 3.
ue dire de plus ? Tous les témoi-
gnages semblent bel et bien unanimes.
A peine après dix ans de ponticat, Jean-
Paul II avait conquis les catholiques. Si
elle a lieu comme prévu, sa canonisation
consacrera ces
témoignages
en donnant à
toute lÉglise
lexemple
dune person-
nalité absolu-
ment charis-
matique.
Vu lim-
portance
de cette dé-
marche, il vaut bien la peine de se pen-
cher avec plus dattention sur le dos-
sier. ue représente exactement lini-
tiative de lÉglise lorsquelle canonise
les saints ? En quoi la vie de Jean-Paul II
mériterait-elle de sinscrire dans cette
démarche ? La réponse à ces questions
devrait aider les âmes de bonne volon-
té à faire la pleine lumière sur le sens et
la portée de lacte annoncé par le pape
François pour le dimanche 27 avril
2014.
3 Édouard Leclerc, fondateur des Établissements
Leclerc, ibidem, p. 11.
« Jai eu la chance de rencontrer sou-
vent Jean-Paul II. Dès son élection, il ma
tout de suite impression: il avait lair
de venir non pas de Pologne mais de Gali-
lée, avec un let sur lépaule et lÉvangile
sous le bras… Les papes sont toujours im-
pressionnants par leur fonction. Chez lui,
cest lhomme qui suscite ladmiration
et le respect.
Entre ce quil
est, ce quil dit
et ce quil croit,
il ny a aucune
diérence » 1.
« A Pa-
ris, il rappe-
lait la déli-
té au baptême.
A la mission
ouvrière de
Saint-Denis, il disait : “ Continuez en
mettant Jésus-Christ au centre de otre
témoignage . Il reprenait la parole de
Paul VI : “ Il ny a pas dhumanité nou-
velle sil ny a pas dabord dhommes nou-
veaux de la nouveauté du baptême et de
la vie selon lÉvangile . Le 2 juin 1980,
à Lisieux, en quittant la France, Jean-
Paul II sécriait : “ Les temps que nous vi-
ons ont besoin de témoins ”. Jean-Paul II
est missionnaire, il parcourt le monde
entier avec risques et périls. Il appelle à
lunité, à la charité, à la communion » 2.
1 André Frossard, de lAcadémie Française, Témoi-
gnage donné au Pèlerin-Magazine, numéro hors-
série : Jean-Paul II, album 1978-1988, p. 10.
2 Mgr Marty, archevêque de Paris, ibidem, p. 12.
Témoignages
2
Jean Paul II un saInt nouveau
nise un saint correspond à tout ce quil
dénit et seulement à cela, cest-à-dire
au triple fait
– que la personne his-
torique qui est inscrite
au catalogue des saints
est vraiment sainte ;
– quelle a obtenu le
bonheur céleste ;
– quelle mérite ou ré-
clame un culte.
29 juin 1461 - Pie II, canonisation de
sainte Catherine de Sienne
La canonisation des saints tire son
nom du fait quelle consiste à inscrire
un bienheureux au Canon, cest-à-dire
au catalogue des saints.
Elle se dénit comme
une sentence déni-
tive du Souverain Pon-
tife moyennant la-
quelle un dèle béati-
é est proposé à toute
lÉglise pour quelle
le regarde obligatoire-
ment comme vraiment
saint, jouissant du bon-
heur du ciel et devant
faire ici-bas lobjet dun culte. Elle com-
porte donc un double jugement. •Un
jugement spéculatif, où lon arme que
le dèle béatié est saint et parvenu au
ciel. •Un jugement pratique et précep-
tif, où lon décide que ce dèle béati-
é doit faire ici-bas lobjet dun culte.
Et lon précise que tous les dèles sont
tenus de croire, sans le moindre doute,
que la personne canonisée est sainte
et parvenue au ciel, et de la considérer
comme ayant droit à un culte public.
Infaillibilité
des canonisations
Portée de l’infaillibilité
Le véritable objet formel de linfail-
libilité dont jouit le pape lorsquil cano-
Par la canonisation, le
Souverain Pontife déclare
infailliblement quune
personne a mené une vie
sainte, quelle est au ciel et
que les dèles doivent lui
rendre un culte.
La canonisation des saints
3
un saint nouveau
Preuves de cette infaillibilité
Premier argument : lÉglise est in-
faillible pour dire jusquoù sétend sa
propre infaillibilité. Or, lÉglise sattri-
bue linfaillibilité lorsquelle canonise
les saints. Bien sûr, cette infaillibilité des
canonisations na pas encore fait lobjet
dune dénition elle-même infaillible,
et, en particulier, le concile Vatican I na
pas jugé opportun de se prononcer ca-
tégoriquement en sa faveur. Cependant,
linfaillibilité des canonisations repré-
sente la doctrine commune des théo-
logiens, et elle est présupposée par la
discipline ecclésiastique. Dautre part,
lÉglise sattribue linfaillibilité chaque
fois quelle propose de façon péremp-
toire et irrévocable ce quelle oblige
tous les dèles à tenir, et seulement dans
ces cas-là. Or, lÉglise propose de façon
péremptoire et irrévocable la canonisa-
tion des saints, et elle oblige tous les -
dèles à la reconnaître comme telle. On
peut sen rendre compte si lon observe
les expressions dont elle use lorsquelle
accomplit cet acte ou cet exercice so-
lennel de son magistère. Par exemple,
celle utilisée par PieXII : « Pour lhon-
neur de la sainte et indivise Trinité, pour
lexaltation de la foi catholique et lac-
croissement de la religion chrétienne, par
lautorité de Notre Seigneur Jésus-Christ,
[ ] nous décidons et dénissons que les
bienheureux Jean de Brito martyr, Joseph
Cafasso et Bernardin Réalin confesseurs,
sont saints, et nous les inscrivons au cata-
logue des saints. Nous établissons que leur
mémoire doit faire lobjet dun culte de la
part de toute lÉglise » 4. Deux choses
apparaissent clairement dans cette for-
mule :
Premièrement, la dénition du
pape revêt un caractère péremptoire.
Deuxièmement, son objet nest pas seu-
lement un portrait idéal ou un type de
sainteté ; il sagit au contraire de la sain-
teté de la gloire céleste et du culte qui
reviennent à un personnage historique.
Deuxième argument : linfaillibi-
lité de lÉglise sétend aussi loin que le
réclame la n pour laquelle le Christ
4 Acta Apostolicæ Sedis, t. 30 ( 1947 ), passim.
2 mai 1940 - Pie XII,
canonisation de sainte Gemma Galgani
9 décembre 1962 - Jean XXIII,
canonisation de saint Pierre Julien Eymard
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