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men psychologique, en utilisant leur connaissance spé-
cifique des tests psychologiques, plus particulièrement
des épreuves projectives. L’école de Lausanne, repré-
sentée par des psychologues tels que Rossel, Merceron,
Husain ou Revaz, a amené une importante contribu-
tion à l’analyse fine de la psychopathologie psychia-
trique. Grâce au test de Rorschach et aux images du
TAT, ils ont formalisé une approche spécifique de la
psychopathologie, complémentaire de l’approche médi-
cale, syndromique.
L’examen psychologique, plus spécifiquement celui du
fonctionnement de la personnalité, permet de faire la
part des choses entre les symptômes et la personnalité
sous-jacente, c’est-à-dire ce qui est stable et immuable
dans le fonctionnement psychique profond d’un sujet.
Il décrit et explicite les logiques internes de la psyché,
se référant – toujours dans le cas de l’école lausan-
noise – à un cadre théorique qui est celui de la méta-
psychologie freudienne, postfreudienne et de la psycho-
pathologie psychanalytique, enrichie des apports de la
psychologie génétique et d’autres sciences. Cette contri-
bution, pertinente dans l’optique d’une compréhen-
sion holistique du patient et de sa trajectoire au-delà
des épisodes de décompensation, permet dès lors de
remettre en perspective la crise aiguë et de mieux com-
prendre les symptômes psychiatriques. Par exemple, les
idées et actings suicidaires constituent un motif fré-
quent d’hospitalisation en psychiatrie. Ils ne s’appré-
hendent pas de la même manière en présence d’un amé-
nagement état-limite ou d’une structure psychotique.
L’hôpital psychiatrique public est le lieu qui accueille
les patients avec le niveau de décompensation le plus
élevé, où s’affrontent les tensions les plus fortes, les
équipes soignantes étant sans interruption au plus près
de la souffrance psychique et de la pathologie mentale
du patient, partageant son quotidien. Les durées plus
courtes des séjours hospitaliers et le grand nombre de
situations nouvelles amènent les équipes à devoir pro-
noncer rapidement un diagnostic clinique et un plan
de traitement adapté. Dans les faits, l’examen psycho-
logique amène un complément d’information au travail
pluridisciplinaire et bien souvent permet de répondre
à des questions posées par l’équipe de soin. Elles
portent principalement sur le diagnostic du fonctionne-
ment mental, comme par exemple est-ce que le patient
présente une structure psychotique de la personnalité,
ou est-ce qu’il fonctionne dans un registre narcissique ?
L’évaluation de l’efficience intellectuelle et la passa-
tion d’épreuves neuropsychologiques sont effectuées en
fonction du cas clinique. L’examen psychologique per-
met également d’expliquer certains aléas du processus
thérapeutique, comme par exemple la régression iatro-
gène, toujours possible en institution. Enfin, il contri-
bue à orienter le traitement post-hospitalier et de sur-
Evolution en institution psychiatrique
Depuis cinq à dix ans, en raison de l’évolution de la
démographie médicale et de la pénurie de médecins se
destinant à la psychiatrie – alors que les besoins aug-
mentent –, des psychologues cliniciens travaillant dans
le domaine du psychodiagnostic ont été appelés à occu-
per une fonction de médecin assistant à l’hôpital psy-
chiatrique, souvent pour des durées déterminées de
quelques mois. Au fil d’expériences jugées positives,
alors que certains se montraient sceptiques quant à
la capacité de ces professionnels d’assumer une telle
tâche, la pénurie de médecins s’accentuant encore, plu-
sieurs postes de médecins assistants se sont vus trans-
formés de manière pérenne en postes de formation
pour des psychologues.
Au regard des professions médicales, le rôle du psycho-
logue clinicien hospitalier correspond grosso modo à
celui d’un médecin assistant devant assurer les tâches
d’investigation et de prise en charge intégrée et pluri-
disciplinaire, sous la supervision d’un médecin, en
général chef de clinique. Dans cette fonction, le psy-
chologue se voit confier la responsabilité d’une partie
des lits de l’unité de soin, depuis l’admission du patient
jusqu’au projet de sortie, en passant par les entretiens
d’investigation, la mise en place d’un projet thérapeu-
tique et la coordination du réseau de soin en lien avec
l’entourage du patient, la répartition de l’ensemble de
ces tâches variant d’une unité à l’autre. Par la suite,
cette pratique s’est étendue à des postes de psychiatrie
ambulatoire adulte et de psychiatrie de l’âge avancé.
Dans ce contexte, le psychologue se trouve donc mis
au défi de redéfinir une spécificité afin de recouvrer
son identité de psychologue et d’occuper une place
légitime et distincte au sein de l’institution. Le risque,
dans bien des cas, est celui d’être finalement défini
par ce qu’il n’est pas: un médecin qui ne prescrit pas,
n’assume ni les gardes ni de responsabilité médico-lé-
gale (certificats médicaux, par exemple) – responsabili-
té qui, dans le cas précis, revient en général au médecin
chef de clinique. Par ailleurs, le psychologue n’est pas
soumis aux mêmes conditions de travail, par exemple
concernant l’horaire ou le salaire, ce qui n’est pas sans
répercussions sur l’organisation de l’institution. Dès
lors, il nous apparaît nécessaire d’éviter la confusion
des identités, d’une part en conservant un domaine de
compétence spécifique qui est l’investigation psycho-
logique, d’une autre en améliorant la formation des
jeunes cliniciens dans le domaine de la psychopatho-
logie.
Investigation psychologique en psychiatrie
Dans le canton de Vaud, principalement en psychia-
trie adulte, les psychologues ont surtout développé une
expertise dans le domaine de l’investigation et de l’exa-