CURRICULUM Forum Med Suisse 2007;7:413–418 413 Insuffisance cardiaque: update 20071 Hans Peter Brunner-La Roccaa, Daniel Desalmandb a Kardiologie, Universitätsspital Basel, b Mediscope, Zürich Quintessence 쎲 Une insuffisance cardiaque ne doit jamais être le seul diagnostic. 쎲 Chaque patient en insuffisance cardiaque a besoin une fois au moins d’une échocardiographie. 쎲 Un BNP normal exclut pratiquement à coup sûr une insuffisance cardiaque (non traitée), mais un BNP élevé ne la prouve pas. 쎲 Les contrôles de la créatinine et des électrolytes sous traitement sont importants. 쎲 Traitement standard de l’insuffisance cardiaque avec fraction d’éjection (FE) diminuée: – Bêtabloquants (bisoprolol, carvédilol, métoprolol CR et nébivolol) et inhibiteurs de l’ECA chez chaque patient en insuffisance cardiaque stable sans contre-indication absolue (MAOP et BPCO ne sont pas des contre-indications); dose maximale possible. Si intolérance aux inhibiteurs de l’ECA, antagonistes du récepteur de l’angiotensine (AIIA). – Diurétiques autant que nécessaire, aussi peu que possible. Torasémide meilleur que furosémide. – Si symptomatologie persistante malgré traitement ci-dessus, lui ajouter: NYHA 0III: spironolactone; NYHA II: AIIA. – Envisager un Cardioverter-Defibrillator interne (ICD) chez des patients ayant une FE 930% (chronique). Surtout efficace chez les patients peu symptomatiques. – La resynchronisation cardiaque (CRT) diminue considérablement la morbidité et la mortalité si NYHA 0III et complexe QRS 0120 ms. – Formation des patients importante, évt dans le cadre d’une prise en charge en réseau. 쎲 Traitement de l’insuffisance cardiaque avec fraction d’éjection conservée: – Traitement de la pathologie de base. – Symptomatique (diurétiques surtout). – Evt AIIA ou inhibiteurs de l’ECA. Summary Heart failure: update 2007 쎲 HF must never be the only diagnosis. Introduction L’insuffisance cardiaque chez les patients âgés est maintenant le motif d’hospitalisation le plus fréquent. Cet article résume les points importants de la prise en charge des patients en insuffisance cardiaque et donne une idée du futur. Il se réfère au plus important congrès européen sur le tableau clinique de l’insuffisance cardiaque qui s’est tenu en juin 2006 à Helsinki, ainsi qu’au World Congress of Cardiology 2006 de Barcelone, sans oublier les toutes dernières recommandations suisses sur ce sujet qui seront publiées cette année. Diagnostic de l’insuffisance cardiaque Le diagnostic d’insuffisance cardiaque a été affiné ces dernières années par le dosage du BNP (ou du NT-BNP; supériorité d’un paramètre sur l’autre pas encore confirmée). Le BNP aide surtout à exclure une insuffisance cardiaque [1]. Si le BNP est normal chez un patient non traité, il faut sérieusement revoir le diagnostic d’insuffisance cardiaque. S’il n’est pas normal, il faut faire d’autres examens, car il s’avère de plus en plus que d’autres pathologies peuvent faire augmenter le BNP. L’échocardiographie est l’examen complémentaire de choix en première intention [2]. D’autres examens diagnostiques (par ex. angiographie) en fonction de la situation clinique, permettront de préciser plus à fond l’étiologie de l’insuffisance cardiaque. L’insuffisance cardiaque ne doit jamais être le seul diagnostic, car il faut toujours la mettre en rapport avec la pathologie de base, ce qui a des conséquences thérapeutiques. Cela ressort bien des dernières recommandations européennes et suisses (qui seront publiées cette année encore) [2]. 쎲 Every heart failure patient needs an echocardiography at least once. 쎲 Normal BNP largely rules out HF (if untreated), but high BNP does not prove HF. Monitoring de l’insuffisance cardiaque 쎲 Regular monitoring of potassium/creatinine. L’échocardiographie occupe une place très importante dans le monitoring des patients en insuffisance cardiaque. Elle ne doit cependant pas 쎲 Standard therapy for heart failure with reduced ejection fraction (EF): – Beta-blockers (bisoprolol, carvedilol, metoprolol CR und nebivolol) and ACE inhibitors in every stable HF patient without absolute contraindications (PAOD and COPD are not contraindications); maximise dose. In case of intolerance to ACE inhibitors, angiotensin receptor blockers. 1 Avec l’aimable soutien de la maison A. Menarini SA, Zurich, dans le sens d’un unrestricted educational grant. Vous trouverez les questions à choix multiple concernant cet article à la page 405 ou sur internet sous www.smf-cme.ch. CURRICULUM – Diuretics as much as necessary, as little as possible. Torasemide better than furosemide. – If symptoms persist despite the above therapy NYHA 0 III: add spironolactone, NYHA II: add ARB. – Consider implantable cardioverter defibrillator (ICD) in patients with EF 9 30% (chronic). Chiefly effective in mildly symptomatic patients. – Cardiac resynchronisation therapy (CRT) substantially reduces morbidity and mortality in NYHA 0 III and QRS complex 0 120 ms. – Patient education important, possibly as part of a care network. 쎲 Management of HF with preserved ejection fraction: – Treatment of underlying disease. – Symptomatic (chiefly diuretics). – Possibly ARB or ACE inhibitors. être faite de routine, mais seulement pour répondre à une question bien précise. Le monitoring non invasif de l’hémodynamique, l’identification des raisons d’un manque de réponse à un traitement et la pose de l’indication à une thérapie de resynchronisation ou à d’autres interventions sont les missions les plus importantes de l’échocardiographie. Les examens de laboratoire pour le diagnostic de base sont: hématologie de routine, créatinine/urée et électrolytes, sans oublier les tests hépatiques. Les autres examens dépendent de la situation clinique. Dans les cas peu clairs, il faut penser à des étiologies rares d’insuffisance cardiaque (dosage des hormones thyroïdiennes, bilan ferrique). Il est également important de rechercher des maladies concomitantes telles qu’un diabète. L’évolution sous traitement de la créatinine sérique et des électrolytes a une importance capitale, surtout avec les antagonistes du système rénine-angiotensine-aldostérone [3]. Tout le monde est d’accord pour dire qu’un inhibiteur de l’ECA doit aussi être administré, même si la créatinine est à 220 µmol/l, voire plus, tout en adaptant la dose à la pharmacocinétique de la substance. Une ascension de la créatinine de 30(–50)% après la mise en route d’un inhibiteur de l’ECA peut être tolérée, elle en exprime l’effet et non l’intolérance. Des contrôles rapprochés sont naturellement une condition sine qua non; ils sont impératifs avant tout dans les situations à risque et lors de chaque adaptation du traitement. La recherche d’une hyponatrémie est importante, car elle est de très mauvais pronostic. Le dosage du BNP ou du NT-BNP a été jugé comme très important par plusieurs orateurs à ce congrès; mais les résultats des très nombreuses études présentées sont en partie controversés. Il y a (encore) trop peu de raisons d’élargir la pratique du dosage du BNP. Elle est actuellement réservée au diagnostic d’une dyspnée d’origine Forum Med Suisse 2007;7:413–418 414 indéterminée (voir plus haut) et à l’estimation du pronostic de l’insuffisance cardiaque au stade chronique. Les premières études ont montré un effet bénéfique de la télémédecine dans le monitoring de patients en insuffisance cardiaque. Elle permet de diagnostiquer plus tôt les aggravations cliniques. Des programmes de prise en charge en réseau avec la télémédecine en Europe ont montré qu’elle permet d’améliorer la qualité de vie et le fonctionnement dans la vie courante, et de prévenir des hospitalisations. De grandes études d’évaluation de la télémédecine sur la diminution de la mortalité sont en cours depuis peu. Le diagnostic précoce d’une exacerbation semble être important, car il s’est avéré que chaque exacerbation d’une insuffisance cardiaque chronique peut être à l’origine d’une nouvelle lésion du myocarde et d’une nouvelle aggravation de l’insuffisance cardiaque. Traitement de l’insuffisance cardiaque chronique Médicaments Les experts ont interprété les résultats de toutes les études actuelles avec les bêtabloquants et dit que ceux-ci sont indiqués chez tout patient ayant une insuffisance cardiaque stable, qu’elle soit d’étiologie ischémique ou non. Les bêtabloquants diminuent significativement la mortalité des patients en insuffisance cardiaque. Mais il ne faut pas oublier que seules les substances bien étudiées que sont le bisoprolol, le carvédilol, le métoprolol CR et le nébivolol ont été utilisées. Les inhibiteurs de l’ECA font partie du traitement standard de l’insuffisance cardiaque, avec les bêtabloquants. Il faut en augmenter progressivement la posologie jusqu’aux doses prouvées efficaces. En cas d’intolérance aux inhibiteurs de l’ECA (effet indésirable fréquent: la toux sèche, mais l’insuffisance cardiaque peut elle aussi provoquer une toux sèche!), ce sont les AIIA (antagonistes du récepteur de l’angiotensine II ou sartans) qui sont l’alternative. Le traitement par inhibiteur de l’ECA et bêtabloquant doit se faire à des doses maximales chez tous les patients en insuffisance cardiaque. Il faut bien savoir que les valeurs tensionnelles cibles sont plus basses dans l’insuffisance cardiaque (systolique <130 mm Hg) que chez les patients sans insuffisance cardiaque. Si l’insuffisance cardiaque en est à un stade avancé, la valeur cible de tension artérielle systolique est même 9120 mm Hg. Ces médicaments doivent toujours être administrés répartis sur la journée; en fonction de leurs demi-vies, deux prises journalières sont indispensables. Des concentrations sanguines stables des médicaments ont un effet favorable sur le quotient efficacité/effets indésirables. C’est la clinique qui dit s’il faut commencer par CURRICULUM un bêtabloquant ou un inhibiteur de l’ECA (par ex. si tachycardie plutôt bêtabloquant) [4]. Si l’un de ces médicaments est bien titré, il est possible de commencer avec l’autre. En clinique, l’augmentation parallèle des doses s’est avérée praticable, mais en alternance. En cas de surcharge volumique, un diurétique est indiqué. Dans l’insuffisance cardiaque, le torasémide a des caractéristiques pharmacologiques plus intéressantes que le furosémide [5]. Avec son effet de rebond, le furosémide doit être administré deux fois par jour au moins, et encore mieux, trois fois par jour! Les experts sont tous d’accord sur le fait que les patients encore symptomatiques après traitement par inhibiteurs de l’ECA, bêtabloquants, évt diurétique ont besoin d’un traitement additionnel. En cas de symptomatologie marquée (NYHA 0III) spironolactone, et moins marquée (NYHA II) un AIIA. L’association de ces trois substances (inhibiteur de l’ECA, AIIA et spironolactone) ne devrait être administrée que par des médecins en ayant une bonne expérience et sous contrôle étroit de la créatinine et du potassium. Les premières études montrent que les patients en insuffisance cardiaque peuvent profiter des statines [6]. Les résultats de deux études randomisées (CORONA et GISSI-HF) nous diront plus précisément d’ici quelques années si les statines ont leur place dans le traitement de l’insuffisance cardiaque indépendamment de la cholestérolémie. L’aspirine et les revascularisations se sont avérées inefficaces dans le traitement de routine de l’insuffisance cardiaque et devraient être réservées aux patients ayant une cardiopathie coronarienne ou une ischémie notable (symptomatique). De nouvelles options intéressantes semblent être le traitement d’une anémie par érythropoïétine et celui d’une carence martiale. Mais nous ne disposons pas encore de résultats de grandes études cliniques randomisées. Une petite étude a montré un bénéfice de la testostérone, mais la proportion de drop-out a été très élevée. L’immunomodulation ne s’est avérée efficace que dans des sous-groupes de patients ayant une insuffisance cardiaque non ischémique ou à un stade non avancé d’insuffisance cardiaque ischémique. Toutes ces options thérapeutiques ne doivent donc actuellement être appliquées que dans le cadre d’études. Resynchronisation (Cardiac Resynchronisation Therapy, CRT) Les objectifs de la CRT sont les suivants: – optimisation du retard atrioventriculaire; – réduction de la dyssynchronie interventriculaire; – réduction de la dyssynchronie intraventriculaire. Forum Med Suisse 2007;7:413–418 415 La CRT abaisse significativement la mortalité des patients ayant une insuffisance cardiaque à un stade avancé (NYHA 0III), avec fraction d’éjection diminuée et complexe QRS large (0120 ms) par rapport au traitement médicamenteux optimisé, elle améliore la symptomatologie et semble même avoir un bon rapport coût–efficacité [7, 8]. De nombreux patients n’ont plus aucune difficulté dans leur vie courante après implantation d’une CRT. Le plus grand risque pour eux n’est donc plus la défaillance de la pompe cardiaque, mais la mort cardiaque subite. Selon quelques orateurs à ce congrès, cela parle pour l’utilisation généreuse d’une intervention combinée de la CRT avec défibrillateur intracardiaque (CRT-D); d’autres ne voient l’indication à une telle association que lorsque la CRT est indiquée et la probabilité de survie supérieure à cinq ans. Des études randomisées doivent encore montrer chez quels patients l’implantation d’une CRT isolée et chez lesquels une intervention combinée est indiquée. Bien que la durée du QRS soit toujours le critère pour ou contre une CRT, l’indication est aujourd’hui parfois posée par échocardiographie. 20–30% des patients en insuffisance cardiaque ne répondent pas à la CRT. Certains éléments montrent que ce pourcentage peut être réduit par l’échocardiographie, ce qui permettrait d’épargner une intervention chère et sans grandes chances de succès. Mais il faut encore pour cela une certaine expérience, et de nouvelles études devront montrer dans quelle mesure l’échocardiographie permet d’améliorer véritablement les chances de succès comparativement au critère très simple et largement indépendant de l’examinateur qu’est la largeur du QRS. Une nouvelle fonction des appareils CRT est intéressante, car grâce à un senseur intracardiaque, ils peuvent donner des renseignements sur le volume et la pression [9], ce qui pourrait permettre d’identifier et de traiter précocement les aggravations précliniques. Les premières études permettent en outre de penser que les patients n’ayant que des symptômes d’insuffisance cardiaque discrets pourraient profiter de l’implantation d’un tel appareil. Ces hypothèses doivent encore être confirmées par de plus grandes études. Traitement des patients en insuffisance cardiaque ayant d’autres maladies Patients ayant une cardiopathie coronarienne La cardiopathie coronarienne est la cause la plus fréquente (70%) d’insuffisance cardiaque. Un tiers de ces patients ont une fonction ventriculaire gauche conservée. L’hypertension et la fibrillation auriculaire sont d’importants mécanismes physiopathologiques, en plus de l’ischémie et de l’hibernation du myocarde. CURRICULUM Malgré cela, seuls quelques patients en insuffisance cardiaque ont un angor. Bêtabloquants et dérivés nitrés sont souvent efficaces. Une revascularisation est indiquée chez ceux dont l’angor ne répond pas aux médicaments et qui en sont fortement gênés. S’il n’est pas possible d’envisager une revascularisation, une autre option est l’amlodipine. L’ivabradine sera peut-être un jour une alternative pour les patients qui ne tolèrent pas les bêtabloquants. Elle agit directement et sélectivement sur le nœud sinusal et diminue ainsi la fréquence cardiaque sans abaisser la contractilité. Le traitement médicamenteux par inhibiteurs de l’ECA et bêtabloquants peut abaisser le risque d’IM des patients en insuffisance cardiaque, ce qui n’est pas le cas de l’aspirine ni de la warfarine. Une anémie doit être traitée. De plus, dans l’étude PROactive, la pioglitazone a montré qu’elle parvenait à abaisser significativement les accidents vasculaires chez les diabétiques de type 2. Mais les glitazones ne doivent être utilisées qu’avec toute la prudence requise et sous surveillance attentive chez les patients en insuffisance cardiaque, car elles peuvent provoquer une rétention d’eau. Elles sont même contre-indiquées dans l’insuffisance cardiaque à un stade avancé. Insuffisance cardiaque et insuffisance rénale Une insuffisance cardiaque est très souvent associée à une insuffisance rénale, ce qui peut considérablement compliquer le traitement d’une part, mais de l’autre côté, ces deux pathologies sont traitées en partie par les mêmes médicaments. Les inhibiteurs de l’ECA ou les AIIA sont très importants, non seulement dans l’insuffisance cardiaque, mais aussi dans l’insuffisance rénale. Les ARNS et inhibiteurs de la COX-2 doivent absolument être évités en raison de la rétention hydrosaline qu’ils déclenchent. Insuffisance cardiaque et arythmies Le traitement de patients avec insuffisance cardiaque et fibrillation auriculaire est complexe. Forum Med Suisse 2007;7:413–418 416 Bien que le maintien d’un rythme sinusal assure un meilleur pronostic, les interventions visant à l’obtenir peuvent présenter des inconvénients. C’est le principal argument de ceux qui défendent un simple contrôle de la fréquence de la fibrillation auriculaire, surtout chez les patients âgés et asymptomatiques. Chez les patients sans insuffisance cardiaque, aucune stratégie ne s’est avérée meilleure que les autres. Chez les patients avec insuffisance cardiaque, la meilleure stratégie reste encore à définir. Elle doit être adaptée aux symptômes du patient. La digoxine peut être utilisée à titre purement symptomatique. Chez les patients à haut risque de mort cardiaque subite, les bêtabloquants et l’implantation d’un ICD sont des interventions qui ont fait la preuve de leur efficacité. Selon les toutes dernières études, l’implantation d’un ICD est indiquée chez tous les patients symptomatiques (NYHA 0II, évt sans NYHA IV) dont la fraction d’éjection du ventricule gauche est 930%, pour autant que la prolongation de leur vie soit souhaitée [10]. Par contre, la prévention des arythmies ventriculaires par amiodarone n’est que symptomatique et elle n’a aucun effet sur le pronostic [10], ce dont il faut tenir compte lors de son indication. Les autres antiarythmiques n’ont aucune place dans l’insuffisance cardiaque. Traitements d’appoint de l’insuffisance cardiaque Voir tableau 1 p. Traitement de l’insuffisance cardiaque terminale Les diurétiques ne doivent être augmentés, et évt administrés plusieurs fois par jour qu’en cas de surcharge volumique. L’injection i.v. de diurétiques peut également être envisagée. L’association d’un diurétique de l’anse à un thiazide est une association très puissante. Mais il faut que la kaliémie soit toujours >4 mmol/l pour diminuer le risque d’arythmie. La digoxine peut atténuer Tableau 1. Mesures d’appoint dans l’insuffisance cardiaque chronique. Poids Perte pondérale uniquement si obésité extrême BMI cible env. 25–30 (BMI <25 associé à un moins bon pronostic) Cachexie signe de mauvais pronostic; doit être traitée spécifiquement Alimentation Restriction saline: la consommation de peu de sel semble judicieuse, mais selon de toutes nouvelles données c’est la constance de l’apport de sel qui est la plus importante Restriction liquidienne: ici aussi plutôt relâchement de la restriction, adaptation individuelle et quantités constantes en fonction des circonstances extérieures (améliore le bien-être du patient et donc sa compliance) Recommandation d’une alimentation riche en protéines et pauvres en acide gras saturés et trans Surveillance d’un bon équilibre électrolytique Activité physique Le training d’endurance semble avoir un effet favorable même chez les patients avec thérapie de resynchronisation L’étude HF-Action montrera comment le training physique agit sur la mortalité de patients en insuffisance cardiaque CURRICULUM les symptômes, améliorer la qualité de vie et diminuer les hospitalisations, mais elle n’a aucune influence sur la mortalité. Sa concentration sérique doit être régulièrement contrôlée et toujours être <1,0 ng/ml. D’autres traitements médicamenteux peuvent être envisagés au besoin (par ex. substances à effet inotrope positif), mais uniquement en milieu hospitalier. Le traitement des comorbidités est particulièrement important chez ces patients. Ceux qui sont en insuffisance cardiaque terminale profitent parfois beaucoup du contrôle de la fréquence et du rythme d’une fibrillation auriculaire ou du traitement de leurs troubles du sommeil, dépressions et autres problèmes. Aux stades très avancés, les traitements palliatifs (par ex. administration d’opioïdes [11]) sont indiqués chez les patients pour lesquels une transplantation n’entre pas en considération. La question de l’arrêt de l’ICD se pose également chez eux. Dans de nombreux pays, dont la Suisse, il y a un grand besoin d’évaluer les traitements palliatifs. Application des recommandations Des études américaines et européennes montrent parfaitement que les recommandations pour l’insuffisance cardiaque sont beaucoup trop peu appliquées. Le sous-traitement par inhibiteurs de l’ECA, bêtabloquants et spironolactone est énorme. Les patients en insuffisance cardiaque à haut risque surtout, par ex. ceux en insuffisance rénale en plus, ne bénéficient souvent d’aucun traitement par bêtabloquants et/ou inhibiteurs de l’ECA, alors que ce sont eux qui en profiteraient le plus. Pour une bonne adhérence au traitement à long terme, il est important que des traitements efficaces soient mis en route précocement. Les résultats d’une étude sont intéressants: ils montrent que les recommandations basées surtout sur les études faites chez des patients jeunes et de sexe masculin peuvent également être applicables à des patients plus âgés et de sexe féminin. Plusieurs études ont montré ces dernières années que la mise en pratique de ces recommandations est nettement meilleure dans le cadre d’une prise en charge en réseau [12]. La compliance des patients surtout peut s’en trouver améliorée, pas seulement pour le traitement, mais aussi pour l’autocontrôle et le respect des mesures d’accompagnement (voir plus haut), ce qui non seulement améliore leur qualité de vie mais diminue en plus les hospitalisations, et même la mortalité. Mais les différences sont très importantes d’un pays à l’autre. Alors que dans certains pays la prise en Forum Med Suisse 2007;7:413–418 417 charge en réseau est déjà bien implantée dans le traitement des patients en insuffisance cardiaque (par ex. Suède, Pays-Bas, Royaume-Uni), d’autres n’en sont qu’à leur premiers balbutiements (par ex. la Suisse [13]). Traitement de l’insuffisance cardiaque aiguë Pas grand-chose n’a changé ces dernières années dans le traitement de l’œdème aigu du poumon. Seuls quelques points en seront discutés ici [14]. Traitement général Le premier traitement est celui qui vise à maintenir le patient en vie. Il est donc important de très rapidement apprécier la situation et de mettre en route le traitement. Les patients ayant des problèmes au repos et au moindre effort doivent être traités d’emblée en milieu hospitalier. Les douleurs imposent une analgésie. Il est important de maintenir une saturation d’O2 >95% (oxygène, si nécessaire CPAP). En fonction de la tension artérielle, vasodilatateurs/diurétiques, substances inotropes ou évt substitution volumique sont indiqués. Le traitement causal, en fonction des facteurs déclenchants, est très important. La réouverture de l’artère dans une insuffisance cardiaque secondaire à un infarctus du myocarde améliore très nettement les chances de survie. En cas de déraillement hypertensif la baisse de la tension artérielle est essentielle. Mais il ne faut pas oublier qu’en cas de grave insuffisance cardiaque, même avec des valeurs normales de la tension, l’augmentation de la résistance périphérique peut avoir été à l’origine de la décompensation. Traitement médicamenteux au sens strict Voir tableau 2 p. Questions encore ouvertes à préciser dans un proche avenir – Intérêt des statines dans le traitement de l’insuffisance cardiaque. – Evaluation de l’utilité du BNP pour le contrôle/la surveillance du traitement. – CRT si NYHA II et fibrillation auriculaire. – CRT toujours avec ICD? – Traitement de l’insuffisance cardiaque avec fraction d’éjection conservée (insuffisance diastolique). CURRICULUM Forum Med Suisse 2007;7:413–418 418 Tableau 2. Médicaments destinés au traitement de l’insuffisance cardiaque aiguë. Dérivés nitrés Médicaments de première intention en cas de décompensation Si TA normale titration si nécessaire Diurétiques Les diurétiques de l’anse sont à choisir en première intention Aussi peu que possible, autant que nécessaire pour le contrôle des symptômes (beaucoup de nitrates, peu de diurétiques!) Association aux thiazides (meilleure réponse) Monitoring de la fonction rénale! Morphine Analgésie et sédation Est recommandé un bolus de 3 à 5 mg (peut être renouvelé) Inotropes Indiqués si hypoperfusion périphérique, prudemment (potentiellement toxiques) Dobutamine toujours le médicament standard Lévosimendan Ca-sensibilisateur surtout chez les patients en insuffisance cardiaque d’origine ischémique, et ceux sous blocage b, très bonne alternative à la dobutamine Anticoagulation Uniquement chez des patients ayant un ACS et une FA Prudence si insuffisance rénale (Cl <30 ml/min) Inhibiteurs de l’ECA Uniquement une fois le patient stabilisé, pas à la phase aiguë Bêtabloquants A la phase suraiguë uniquement si ischémie persistante ou tachycardie, prudemment Commencer après env. 4 jours – mais toujours encore pendant l’hospitalisation Références Correspondance: PD Dr Hans Peter Brunner-La Rocca Kardiologie Universitätsspital Petersgraben 4 CH-4031 Basel [email protected] 1 Wang CS, FitzGerald JM, Schulzer M, Mak E, Ayas NT. 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