Dynamique homomorphe: Fatou et Julia au pays des fractals... Julien Bled∗ & Victor Lambert† Ens Cachan Bretagne Université de Rennes 1 Juin et juillet 2010 ∗ † julien.bled[@]ens-cachan.org victor.lambert[@]eleves.bretagne.ens-cachan.fr 1 Table des matières 1 Préliminaires b . . . . . . . 1.1 Sphère de Riemann et applications holomorphes dans C 1.2 Familles normales et théorème(s) de Montel . . . . . . . . . . . . . 1.3 Théorèmes utiles pour la suite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 3 4 5 2 Dynamique holomorphe : premières notions 2.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2 Ensembles de Fatou et de Julia . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3 Vers un point de vue plus local : orbites périodiques et points fixes . 7 7 7 8 3 Local 11 3.1 Points fixes non neutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 3.2 Cas irrationnellement neutre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 3.3 Cas parabolique : λq = 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 4 Un peu plus loin... 31 4.1 Structure de l’ensemble de Fatou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 4.1.1 Théorème de Sullivan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 4.1.2 Classification de Fatou-Cremer . . . . . . . . . . . . . . . . 32 A Théorie de l’approximation diophantienne 2 33 1 1.1 Préliminaires Sphère de Riemann et applications holomorphes dans c C Donnons désormais quelques propriétés fondamentales des fonctions holomorphes b sur C. b dans C sont les fonctions Proposition 1. Les applications holomorphes de C constantes. b dans C. Si l’on traduit Démonstration. Soit f une application holomorphe de C la continuité en l’infini, on obtient le caractère borné de f sur le complémentaire d’une partie compacte de C. Comme f est également bornée sur ce compact, f est bornée donc constante. b dans C b sont les fractions raProposition 2. Les applications holomorphes de C tionnelles. b dans C. b Démonstration. Soit f holomorphe de C Si f est constante, le résultat est immédiat. Sinon, comme les fonctions holomorphes non constantes, f a ses zéros isolés, si bien que f n’admet qu’un nombre b est compact). Soit P une fraction rationnelle fini de pôles et de racines (car C ayant pour racines (en tenant compte de leur multiplicité) les pôles de f et pour pôles les racines de f , de sorte que f P n’ait ni pôle, ni racine. La fonction f P b dans C. Elle est constante d’après définit alors une application holomorphe de C la proposition précédente, si bien que f est une fraction rationnelle. A fortiori, nous considérerons souvent des fractions rationnelles et nous utiliserons la définition du degré suivante : Définition 1. Soit f (z) = p(z) une fraction rationnelle. Le degré de f que nous q(z) noterons deg f est alors égal au maximum du degré de p et q. Cette définition du degré peut-être comprise autrement. En effet, pour tout c b il y a exactement deg f solutions à l’équation f (z) = c. appartenant à C, b dans C b qui sont holomorphes Proposition 3. Les applications holomorphes de C dans C au sens usuel sont les polynômes. 3 b dans C b et holomorphe dans C au sens Démonstration. Soit f holomorphe de C usuel. b → C est holomorphe donc constante d’après la proposition Si f (∞) 6= ∞, f : C 1. Ainsi, supposons f (∞) = ∞. Par continuité, f n’admet donc pas de zéros sur le complémentaire d’un compact K de C. Les possibles zéros de f se situent donc dans K, et d’après le théorème des zéros isolés, f admet un nombre fini b (éventuellement nul) de zéros sur K et donc sur C. Soit P un polynôme ayant pour racines (en tenant compte de leur multiplicité) les zéros de f , de sorte que la fonction g = f /P n’ait pas de racine dans C. Si b dans C g(∞) = ∞, alors la fonction g1 définit une application holomorphe de C qui s’annule uniquement en ∞, ce qui est impossible d’après la proposition 1. On b et à valeurs dans C et a donc g(∞) = λ ∈ C. Mais alors g est holomorphe sur C est donc constante, ce qui donne le résultat. 1.2 Familles normales et théorème(s) de Montel Commençons par définir la notion fondamentale de famille normale de fonctions holomorphes. Définition 2. Soit F ⊂ H (Ω) une famille de fonctions holomorphes. Une telle famille sera dite normale si de toute suite d’éléments de F on peut extraire une sous-suite qui converge uniformément sur tout compact de Ω. Le théorème suivant donne une condition suffisante pour justifier la normalité d’une famille de fonctions holomorphes : Théorème 1 (Montel). Si F ⊂ H (Ω) et F est uniformément bornée sur tout compact inclus dans le domaine Ω, alors la famille F est normale. La démonstration suivante est largement tirée de [6]. Démonstration. Spo Le lemme suivant donne une condition suffisante pour que la réciproque soit vraie. Nous ferons d’ailleurs appel à ce résultat ultérieurement : b Soit z tel que {f ◦n } soit normale sur un Lemme 4. Soit f holomorphe sur C. 0 voisinage U de z0 . Si z0 est un point fixe, alors pour tout compact K de U il existe CK > 0 telle que |f ◦n (z)| 6 CK , ∀z ∈ K, ∀n ∈ N 4 Démonstration. Procédons par l’absurde, supposons qu’il existe K compact de U telle que ∀M ∈ N, ∃zM ∈ K, nM ∈ N tels que |f ◦nM (zM )| > M . Mais zM ∈ K, ∀M ∈ N, donc il existe φ une extraction telle que zφ(M ) → z1 ∈ K. Or, {f ◦nφ(M ) } est normale sur U donc il existe ψ telle que f ◦nφ◦ψ(M ) → g. Comme ∀n ∈ N, f ◦n (z0 ) = z0 , on en déduit par unicité de la limite que g(z0 ) = z0 . (does it implies that |g(z1 )| < ∞, this is the point I don’t understand why... sorry, it is the same quesyion I asked you the other day, I thought I understood, but trying to write it, I realize that i don’t really understand) ◦nφ◦ψ(M ) (znφ◦ψ(M ) ) > ∞ et |g(z1 )| < ∞, alors que f ◦nφ◦ψ(M ) (znφ◦ψ(M ) ) → On a d’une part f g(z1 ) ce qui apporte la contradiction. Il existe un autre théorème de Montel extrêmement utilisé en dynamique holomorphe, dont nous ne ferons par contre pas la démonstration. b Théorème 2. Soit U un ouvert de C. Si a, b, c sont trois points distincts, alors toute famille d’applications holob \ {a, b, c} est normale. morphes fα : U → C 1.3 Théorèmes utiles pour la suite Dans la suite, nous ferons référence à certains théorèmes connus de l’analyse complexe, que nous rappelons ici. Théorème 3 (de convergence uniforme de Weierstrass). Si une suite de fonctions holomorphes fn : U 7→ C converge uniformément vers f , alors f est holomorphe. En outre, fn0 converge uniformément sur tout compact de U vers f 0 . On rappelle également l’inégalité de Cauchy à laquelle nous ferons souvent référence. Elle est un corollaire immédiat à la formule de Cauchy. Proposition 5. Soit f ∈ H(Ω), et D(a, R) ⊂ Ω. On a alors ∀n ∈ N (n) f (a) 6 n! max |f | Rn C(a,R) Théorème 4 (Principe du maximum). Soit Ω un ouvert connexe de C. Soit f holomorphe sur Ω. Si |f (a)| = maxz∈Ω |f (z)| avec a ∈ Ω, alors f est constante. Ce théorème est très utile pour démontrer le suivant. 5 Lemme 6 (de Schwarz). Si f : D −→ D est holomorphe et vérifie f (0) = 0, alors sa dérivée satisfait l’égalité |f 0 (0)| ≤ 1. De plus, 1. Si |f 0 (0)| = 1, alors avec c = f 0 (0), on a f (z) = cz et f est une rotation. 2. Si |f 0 (0)| < 1, alors |f (z)| < |z| ∀z 6= 0 est holoDémonstration. Remarquons tout d’abord que le quotient g(z) = f (z) z morphe de D sur D (évident sur D \ {0}, et en 0 car le développement analytique de f n’a pas de terme constant). Si |z| = r < 1, alors |g(z)| < 1r . Le Principe du Maximum (cf. 4) permet de déduire que |g(z)| < 1r , ∀ |z| 6 r. Ainsi, faisant tendre r vers 1, on obtient |g(z)| 6 1∀z ∈ D. En utilisant à nouveau le principe du maximum sur D, s’il existe z ∈ D tel que |g(z)| = 1, alors |g| est constante, et a fortiori g est constante, et on obtient aisément le premier cas de l’énoncé. < 1, et |f 0 (0)| = |g(0)| < 1. Sinon, |g(z)| = f (z) z 6 2 2.1 Dynamique holomorphe : premières notions Introduction La dynamique holomorphe consiste de façon générale en l’étude des itérations de fonctions holomorphes. Historiquement, le domaine s’est développé au XIXième siècle -surtout vers la fin- avec l’étude locale du comportement des itérées d’une fonction holomorphe, au voisinage d’un point fixe. Cependant, à part pour quelques cas simples, rien n’était connu quant au comportement global de ces itérées. C’est seulement au début du XXème siècle avec Fatou et que l’on a commencé à obtenir des résultats convaincants sur le sujet. 2.2 Ensembles de Fatou et de Julia Définition 3. Soit f une fonction holomorphe. L’ensemble de Fatou de f , que l’on b au voisinage desquels la famille (f ◦n ) note Ff , est l’ensemble des points de C n∈N est normale. b \ F , est appelé ensemble de Julia. Son complémentaire, noté Jf = C f Proposition 7. Ff est un ouvert complètement invariant ( i.e. f (Ff ) = f −1 (Ff ) = Ff ). Il en découle que Jf est un fermé complètement invariant. De façon intuitive, un point z0 ∈ Ĉ appartient à l’ensemble de Julia si et seulement si la dynamique dans un voisinage de z0 dépend sensiblement des conditions initiales, c’est-à-dire que des conditions initiales proches conduisent à des comportements extrêmements différents après un grand nombre d’itérations. Voici un exemple simple : Exemple 1. Soit f : z 7→ z 2 définie sur Ĉ. Le disque ouvert D est contenu dans l’ensemble de Fatou de f , car les itérées successives convergent uniformément vers zéro sur tout sous-ensemble compact. De la même manière, l’extérieur Ĉ \ D̄ est également contenu dans l’ensemble de Fatou car les itérées de f convergent vers la fonction constante z 7→ ∞ en dehors de D̄. A l’inverse, si z0 appartient au cercle unité, alors dans tout voisinage de z0 n’importe quelle limite d’itérées f ◦n aura nécessairement un saut de discontinuité en traversant le cercle unité. Ceci montre que l’ensemble de Julia de f est précisément le cercle unité. Remarque. Dans l’exemple précédent, l’ensemble de Julia est assez exceptionnel, au sens où il est particulièrement lisse. En effet, on connait bien des cas pour lesquels l’ensemble de Julia possède une structure bien plus compliquée. Par exemple, certains fractals bien célèbres peuvent être obtenus comme ensembles de Julia de fonctions rationnelles (courbe de Jordan, certains ensembles de Cantor...). 7 On peut lier la remarque précédente à la proposition 7 en soulignant la propriété d’auto-similarité de l’ensemble de Julia : si f (z1 ) = z2 dans Jf avec f 0 (z1 ) 6= 0, il y a un isomorphisme conforme induit d’un voisinage N1 de z1 dans un voisinage N2 de z2 qui envoie N1 ∩ Jf précisément sur N2 ∩ Jf . Le lemme suivant, sera utile pour lier l’étude globale de f à celle de f ◦k pour un k > 0 quelconque. Lemme 8 (Lemme d’itération). Pour tout k > 0, Ff ◦k = Ff et Jf ◦k = Jf . Démonstration. Il est clair que les deux égalités sont équivalentes. Il nous suffit alors de montrer Ff ◦k = Ff . Il est évident d’après la définition que Ff ⊂ Ff ◦k . Réciproquement, soit {f ◦ni } une sous-suite arbitraire de la suite des itérées de f . Pour tout i dans N, il existe li un entier naturel et ri dans Nk tels que ni = li k + ri . Et même, quitte à remplacer {f ◦ni } par une sous-suite, on peut supposer que ri = r, pour tout i. Mais alors, se donnant une sous-suite quelconque de la suite des itérées de f , on a montré qu’il en existait une sous-suite, un r et des li vérifiant f ◦ni = f ◦r ◦ g ◦li où g = f ◦k . Ainsi, dès que {g ◦p } est normale, {f ◦ni } l’est également ce qui montre l’inclusion réciproque. Maintenant que nous avons introduit quelques notions fondamentales liées à l’étude du comportement global des itérations de fonctions holomorphes, nous allons maintenant nous attarder sur un point de vue plus local, avant de revenir un peu plus tard aux ensembles de Fatou et de Julia. 2.3 Vers un point de vue plus local : orbites périodiques et points fixes Dans tout ce paragraphe, on considère f : Ĉ 7→ Ĉ (en fait, on la considère partant de U, à repréciser...) une fonction holomorphe. Commençons par introduire la définition suivante : Définition 4 (Orbite périodique). L’ensemble {z0 , z1 , . . . , zp−1 } est une orbite périodique de f si f (z0 ) = z1 , f (z1 ) = z2 , . . ., f (zp−1 ) = z0 . Si les entiers z0 , . . . , zp−1 sont distincts, alors l’entier p ≥ 1 est la période de l’orbite. 8 Les orbites périodiques ont une grande importance dans l’étude des itérées de fonctions holomorphes. Clairement, pour tout point zi appartenant à une orbite, la suite des itérées (f ◦n (zi ))n∈N est précisément identifiable et prend avec régularité les différentes valeurs z0 , . . ., zp−1 . Outre ce caractère aimable de l’itération aux points appartenant précisément à l’orbite, nous allons voir que le comportement de la suite (f ◦n ) au voisinage de ces points est fortement influencé par leur caractère périodique, en un sens encore à préciser. Remarque. L’infini peut être un point fixe. mettre des trucs dessus. On introduit maintenant la notion de multiplicateur. Définition 5 (Multiplicateur). La dérivée de f ◦p en un point de l’orbite est appelé multiplicateur de l’orbite. Remarque. Il est bien défini car pour tout zi , on a la formule (f ◦p )0 (zi ) = f 0 (z1 ) .f 0 (z2 ) . . . f 0 (zp ) . Nous souhaitons étudier le comportement de la suite des itérées de f au voisinage d’une orbite périodique. Précisons ce qu’on entend par là. En effet, a priori, ce n’est pas si intéressant que cela, puisque si par exemple (f ◦n (z0 )) converge, alors elle converge vers un point fixe. Ainsi, il paraitrait plus naturel de se limiter aux points fixes. Cependant, nous ne nous intéressons pas seulement à la convergence de la suite des itérées, mais plus généralement à son caractère normal. La convergence de sous-suites nous intéresse donc. Cela motive la définition suivante : Définition 6. Soit z ∈ S, on dira que (f ◦n (z0 )) converge vers une orbite périodique O de période p si (f ◦pn (z0 ))n∈N converge vers un point de O. Dès lors, on s’aperçoit d’après cette définition que l’étude autour des points fixes nous suffira puisque pour les points périodiques de période p, leur convergence est défini comme celle des itérées de la fonction f ◦p pour laquelle ils sont des points fixes. De plus, d’après 8, beaucoup de propriétés obtenues à propos des points fixes s’adapteront immédiatement aux points périodiques. Ainsi, pour toute la suite, nous nous intéresserons directement aux points fixes de f . De façon évidente le multiplicateur d’un point fixe de f est égal à la dérivée de f en ce point. On effectue alors la classification suivante, en notant λ le multiplicateur : – Si λ = 0, le point fixe est dit super-attractif. – Si 0 < |λ| < 1, il est dit attractif. 9 – Si |λ| > 1, il est dit répulsif. – Si |λ| = 1 et ∃n ∈ N tel que λn = 1, il est dit rationnellement neutre. – Si |λ| = 1 et ∀n ∈ N, λn 6= 1, il est dit irrationnellement neutre. Bien entendu, la terminologie choisie n’est pas dûe au hasard et on peut déjà deviner quel sera le comportement des itérées de f au voisinage du point fixe lorsque |λ| = 6 1. Nous verrons que les cas pour lesquels le point fixe est neutre sont nettement plus compliqués. 10 3 Local Ce qu’il est important de noter est que dans le cas où le point fixe est 0 (cas auquel on peut se ramener sans perte de généralité), on sait qu’on peut écrire f (z) = λz + ∞ X ak z k k=2 au voisinage de 0, et λ apparait alors comme le coefficient de la partie linéaire de f . L’étude de ces divers cas présente une constante : la volonté de se ramener à l’étude de la partie linéaire de notre développement analytique (et le premier terme non nul dans le cas λ = 0). Cela justifiera d’ailleurs le rôle prépondérant du multiplicateur, puisque c’est le coefficient de cette partie linéaire. Pour cela, il est nécessaire d’introduire ici la notion de conjugaison conforme : Définition 7. Une application f est dite conforme si elle est holomorphe et injective. (déf à mieux faire d’après ce que sait Julien) Remarque. Cela assure que sa réciproque est également holomorphe. Définition 8. On dit qu’une fonction f : U → U est conformément conjuguée à g : V → V s’il existe une apllication conforme φ : U → V telle que g = φ ◦ f ◦ φ−1 . Remarques. – g n = φ ◦ f n ◦ φ−1 (resp. g −1 = φ ◦ f −1 ◦ φ−1 ) assure que les itérées de g et de f (resp. g −1 et f −1 lorsqu’elles sont bien définies) sont conformément conjuguées. – Les points fixes de f correspondent à ceux de g. (si f (x) = x, g(φ(x)) = φ(f (x)) = φ(x)) – On verra également une fois qu’on les aura définit que les bassins d’attractions de deux fonctions conformément conjuguées se correspondent. Ces différentes remarques montrent que l’on peut voir deux fonctions conjuguées comme étant les mêmes (dynamiquement parlant) mais dans différents systèmes de coordonnées, cela nous conduit à espérer que f sera localement conjuguée au premier terme non nul de son développement analytique. Toutefois, nous n’obtiendrons pas nécessairement un résultat aussi fort dans tous les cas, ce qui nous conduit à définir d’autres notions. Définition 9. Soit f une fonction holomorphe considérée sur un ouvert où elle est égale à une série entière donnée (du type f (z) = λz + O(z 2 )). Alors nous dirons que f est : 11 – topologiquement linéarisable si elle est conjuguée à sa partie linéaire par une fonction continue. – formellement linéarisable si elle est conjuguée à sa partie linéaire par une série formelle. – holomorphiquement linéarisable si elle est conjuguée à sa partie linéaire par une fonction holomorphe. – conformément linéarisable si elle est conjuguée à sa partie linéaire par une application conforme. Remarque. Dans cette définition, les notions ont été introduites de la plus faible à la plus forte (mise à part les deux premières qui sont indépendantes). Ainsi, on cherchera surtout à obtenir une linéarisation conforme de f qui héritera alors des propriétés de la dynamique de sa partie linéaire. Toute cette recherche qui vise à conjuguer notre fonction holomorphe à une fonction générique est extrêmement développée en dynamique holomorphe, le but étant de déterminer les éléments de f qui jouent un rôle dans sa dynamique. Nous en présenterons dans la suite de nombreux résultats, qui ne seront cependant, pas exhaustif, tellement on a pu en rencontrer durant nos différentes recherches à ce sujet. Point de vue adopté : En fait, en dynamique holomorphe, on rencontre souvent la notion de germe. Définition 10. Soit f (z) = j∈N∗ aj z j où a1 6= 0. On dit que f ainsi défini est un germe formel de difféomorphisme centré en 0, ou bien un germe de difféomorphisme centré en 0 si la série est uniformément convergente sur un disque ouvert de rayon strictement positif. L’ensemble des germes (respectivement des germes formels) est noté Dif f (C, 0) \ (respectivement Dif f (C, 0)). P L’objectif principal qui sera toujours présent dans la suite sera de simplifier autant qu’on pourra ces germes par la relation de conjugaison. Il revient au même de considérer le développement analytique local autour de 0 de f holomorphe sur U, un voisinage de 0. C’est le point de vue que nous avons choisi d’adopter pour le reste de l’exposé. 3.1 Points fixes non neutres Définition 11. Un point fixe x de f est dit topologiquement attractif si il ◦n existe U ∈ V(x) tel que les f ◦n soient définies sur U et (f|U ) converge uniformément vers la fonction constante égale à x. Remarque. Un point topologiquement attractif est en particulier dans l’ensemble de Fatou. 12 L’attractivité topologique est uniquement caractérisée par la valeur du multiplicateur : Lemme 9 (Caractérisation des points topologiquement attractifs). Un point fixe d’une application f holomorphe est topologiquement attractif si et seulement si son multiplicateur vérifie |λ| < 1. Démonstration. Rappelons pour commencer que le point fixe considéré est 0. On a ainsi, du fait du développement de f en série entière sur un voisinage de l’origine, l’existence de deux réels strictement positifs r0 et C tels que : |f (z) − z| 6 C |z|2 , ∀ |z| < r0 Si l’on suppose que le multiplicateur vérifie |λ| < 1, on peut choisir c et r avec |λ| < c < 1 et r ∈ ]0, r0 ] tels que : |λ| + Cr < c On en déduit alors par l’inégalité triangulaire que pour tout z vérifiant |z| < r, on a l’inégalité |f (z)| 6 |λz| + C z 2 6 c |z| ce qui entraîne par récurrence : ∀n ∈ N, |f ◦n (z)| ≤ cn |z| et ce pour tout z tel que |z| < r0 . On a donc immédiatemment |f ◦n (z)| < cn r0 , ce qui entraîne directement la convergence uniforme de la suite (f ◦n ) vers la fonction nulle sur Dr0 (car 0 < c < 1) ce qui prouve la première implication. Réciproquement, si 0 est supposé topologiquement attractif, alors le théorème de convergence uniforme de Weierstrass (cf. ) assure que la suite des (f ◦n )0 converge uniformément vers la fonction nulle sur un voisinage U ∈ V(0). En particulier la suite (f ◦n )0 (0) = λn converge vers 0, ce qui comme chacun sait n’est possible que si |λ| < 1. Ceci termine la preuve de notre caractérisation. Le théorème suivant, très utile, date de 1884 et permet de montrer à quel point la dynamique des points non neutres est simple. Théorème 5 (Linéarisation de Koenigs). Si |λ| = 6 0, 1, il existe φ vérifiant φ(0) = 0 qui conjugue conformément f à g : ω 7→ λω sur un voisinage de l’origine. En outre, φ est unique à multiplication près par une constante non nulle. 13 Démonstration. – Preuve de l’unicité : S’il existe deux applications φ et ψ vérifiant les conditions de l’énoncé, alors l’application composée ψ ◦ φ−1 = b1 ω + b2 ω 2 + b3 ω 3 + . . . commute avec l’application ω 7→ λω. En comparant les coefficients des deux séries obtenues, on obtient λbn = bn λn pour tout n. Par hypothèse sur λ, cela implique b2 = b3 = . . . = 0. Par conséquent, ψ ◦ φ−1 = b1 ω, autrement dit φ(z) = b1 ψ(z). – Preuve de l’existence dans le cas attractif |λ| < 1. Soit c < 1 vérifiant c2 < |λ| < c. Tout comme dans la preuve de 9, on considère un voisinage de l’origine Dr tel que |f (z)| ≤ c |z| pour z ∈ Dr . Ainsi, pour tout point de départ z0 ∈ Dr , l’orbit z0 7→ z1 7→ . . . converge géométriquement vers l’origine, avec |zn | ≤ rcn . On a de plus |f (z) − λz| ≤ C |z 2 | pour z ∈ Dr , d’où |zn+1 − λzn | ≤ C |zn |2 ≤ Cr2 c2n . En posant k = Cr2 / |λ|, il s’ensuit que les nombres wn = zn /λn vérifient c2 |wn+1 − wn | ≤ k |λ| !n . Cette différence converge donc uniformément vers 0, et la suite de fonctions holomorphes z0 7→ wn (z0 ) converge uniforément sur Dr vers une limite holomorphe φ(z0 ) = limn→+∞ zn /λn . L’identité φ(f (z)) = λφ(z) est immédiate. De plus, puisque chaque wn est de dérivée égale à 1 à l’origine, il vient que la fonction limite a pour dérivée φ0 (0) = 1, et donc est un isomorphisme local conforme. – Preuve de l’existence dans le cas répulsif |λ| > 1. Il suffit d’appliquer le cas précédent à la fonction f −1 . Définition 12. Un point fixe x de f est dit topologiquement répulsif si il existe U ∈ V(x) tel que ∀x̂ 6= x ∈ U, ∃n > 1, f ◦n (x̂) ∈ / U. Il revient au même de dire que la seule orbite infinie qui soit dans U est celle de x lui-même. Lemme 10 (de caractérisation des points topologiquement répulsif). Un point fixe d’une application f holomorphe est topologiquement répulsif si et seulement si son multiplicateur vérifie |λ| > 1. 14 k Théorème 6 (de Böttcher). Si λ = 0, et localement f (z) = an z n + ∞ k=n+1 ak z , an 6= n 0, n > 2, alors il existe φ qui conjugue f à g : ω 7→ ω sur un voisinage de 0. En outre, celle-ci est unique à multiplication par une racine n − 1-ème de l’unité près. P Démonstration. On commence par choisir une constante c telle que cn−1 = an . Ainsi, la fonction cf (z/c), conformément conjuguée à f , a pour coefficient dominant 1. On pourra donc supposer sans perte de généralité que f est de la forme f (z) = n z (1 + b1 z + b2 z 2 + . . .). En notant ζ(z) = b1 z + b2 z 2 + . . . , on a f (z) = z n (1 + ζ(z)). On choisit maintenant un rayon 0 < r < 1/2 tel que |ζ(z)| < 1/2 sur le disque Dr . Alors l’application f transforme clairement Dr en lui-même, avec de plus |f (z)| ≤ 43 |z| et f (z) 6= 0 pour z ∈ Dr \ {0}. La k-ième itérée f ◦k transforme également Dr en lui-même, et par induction est de la forme k f ◦k (z) = z n (1 + nk−1 b1 z + . . .). On pose alors φk (z) = q nk k f ◦k (z) = z(1 + nk−1 b1 z + . . .)1/n = z(1 + b1 z + . . .), n en choisissant cette racine nk -ième qui a pour dérivée 1 en 0. 3.2 Cas irrationnellement neutre Cette fois-ci, au voisinage de l’origine, f est de la forme f (z) = λz + a2 z 2 + a3 z 3 + ... · · · avec λ = e2iπθ où θ ∈]0, 1[ est irrationel. On rappelle qu’une des questions que l’on se pose, c’est de savoir si f est conformément conjugué à sa partie linéaire (i.e holomorphiquement linéarisable). Pour ce qui est des points fixes irrationnellement neutres, ils ne le sont pas tous, et le théorème suivant nous en donne ue caractérisation importante : Théorème 7. Soit z0 un point fixe irrationnellement neutre pour f , alors les deux assertions suivantes sont équivalentes : – {f ◦n } est une famille normale sur un voisinage de z0 – f est holomorphiquement linéarisable sur un voisinage de z0 Démonstration. Supposons, comme on l’a fait jusqu’ici, sans perte de généralité que z0 = 0. Et soit λ le multiplicateur de f en 0. 15 Tout d’abord, si f est holomorphiquement linéarisable sur U, voisinage de 0, il existe φ ∈ H(U) telle que ∀z ∈ U, on ait f ◦n (z) = φ−1 (λn φ(z)). On peut en déduire que {f ◦n } est uniformément bornée sur tout compact inclus dans U. Ainsi, la linéarisabilité de f implique la normalité de {f ◦n }, d’après le théorème 1 de Montel. Réciproquement, supposons que {f ◦n } est normale au voisinage de 0, rappelons qu’alors 0 appartient à Ff l’ensemble de Fatou de f . Considérons U la composante de Fatou contenant 0. On peut par ailleurs supposer que ∞ ∈ / U. (Pourquoi ? à justifier...) D’après le lemme 4, comme 0 est un point fixe de f , pour tout compact K de U, il existe CK > 0 telle que |f n (z)| 6 CK , ∀z ∈ K, n ∈ N Définissons alors la suite {φn } sur U par φn (z) = X f ◦j (z) 1 n−1 n j=0 λj Cette suite étant uniformément bornée sur tout compact de U, elle est normale sur U. Soit K un compact de U, on a pour tout z ∈ K 2CK 1 f ◦n (z) |φn ◦ f (z) − λφn (z)| = n−1 − λz 6 n λ n Mais alors, la limite d’une sous-suite convergente de {φn } (qui existe et est holomorphe par normalité de {φn }) que l’on choisit de noter φ, vérifie φ ◦ f = λφ. En outre, de φ0n (0) = 1, ∀n, on en déduit φ0 (0) = 1, ce qui nous assure que φ est localement inversible autour de 0. Jusque-là, on a pu voir que Ff contient les points fixes attractifs tandis que les répulsifs et paraboliques appartiennent à Jf . Pour ce qui est des points fixes irrationnellement neutres, ils peuvent appartenir à l’un des deux ensembles, comme on le verra, et le théorème précédent justifie la définition suivante : Définition 13. Soit z0 un point fixe irrationnellement neutre. z0 est dit de Siegel s’il appartient à l’ensemble de Fatou (ce qui est équivalent d’après le théorème 7 à ce que f soit holomorphiquement linéarisable sur un voisinage de z0 ), et de Cremer s’il appartient à l’ensemble de Julia (i.e non holomorphiquement linéarisable sur un voisinage de z0 ). 16 Remarque. Les noms qu’on leur donne viennent des mathématiciens qui en ont démontré l’existence. Dans ce paragraphe, nous allons essayer de déterminer des conditions sur λ pour qu’un point fixe de multiplicateur λ soit de Siegel ou de Cremer. Pour cela, nous allons commencer par démontrer que f est toujours formellement linéarisable autour d’un point fixe irrationnellement neutre. Pour autant, nous verrons que la série formelle utilisée dans cette conjugaison n’est pas nécessairement convergente. En fait, ce résultat est même plus générale puisqu’on peut l’énoncer pour tout point fixe non parabolique. Théorème 8. On suppose donc en se plaçant sur un voisinage de l’origine que f (z) = λz + a2 z 2 + a3 z 3 + ... · · · avec λq 6= 1, ∀q ∈ N∗ . Alors, il existe T ∈ C [[X]] telle que T ◦ f = λT . En outre, T est unique à multiplication par un complexe non nul près. Idée : Commençons par écrire f (z) = λz + ai z i + O(z i+1 ) où ai est le premier coefficient non nul. Essayons d’éliminer (par conjugaison) ce terme d’ordre i. Pour cela, voyons ce qui se passe si l’on conjugue f avec φ(z) = z + αz k . On souhaite obtenir φ ◦ f (z) = λφ(z) + O(z i+1 ) ce qui équivaut à λz + λαz k + O(z i+1 ) = f (z) + α(f (z))k = λz + ai z i + αλk z k + O(z i+1 , z k+1 ) Ainsi, en choisissant k = i, cela revient à poser αi = − ai i−1 λ(λ − 1) c’est pourquoi cela ne fonctionne que dans le cas non parabolique puisqu’on a évidemment besoin de λi−1 6= 1, et ce pour tout i > 2, comme on va le voir dans la démonstration. Démonstration. Dans cette preuve, les αi utilisés seront ceux définies précédemment (le ai étant le i-ième coefficient du développement analytique de la fonction que l’on conjugue) ; ils sont bien définis puisqu’on est dans le cas non parabolique. Soit T2 (z) = z +α2 z 2 , alors d’après l’analyse faite préalablement, en définissant P f2 = T2 ◦ f ◦ T2−1 , on a f2 (z) = λz + i>2 bi z i . Par cette conjugaison, nous sommes 17 parvenus à élimine le terme d’ordre 2 de f . Ensuite, on va procéder récursivement. Faisons une étape supplémentaire pour clarifier les choses. Soit T3 (z) = z + α3 z 3 où α3 = − λ(λb23−1) . Alors f3 (z) = T3 ◦ f2 ◦ T3−1 (z) = P λz + i>3 ci z i . Finalement, en notant T (z) = lim (Tk ◦ · · · ◦ T2 )(z) k→∞ la série formelle limite, on a T ◦ f (z) = λT (z). Démonstration de l’unicité : Supposons qu’il existe S et T des séries formelles vérifiant S −1 (λS(z)) = f (z) = T −1 (λT (z)) en notant R = T ◦ S −1 , on obtient immédiatement ∀z dans le voisinage de 0 considéré R(λz) = λR(z) P Ainsi, avec R(z) = j>1 aj z j , en identifiant les coefficients, il vient ∀j > 1, λ(λj−1 − 1)aj = 0, si bien que 0 étant un point non parabolique pour f (λj−1 6= 1∀j > 1), il vient R = T ◦ S −1 = a1 Id, d’où le résultat. Et la démonstration de ce théorème nous donne un corrolaire immédiat. Corollaire 1. Au voisinage d’un point non parabolique, f est holomorphiquement conjugué à une fonction du type λz + O(z k+1 ) et ce pour tout k dans N. Evidemment, on peut perdre la caractère holomorphe (ou convergent de la série) à la limite. Et on va voir que c’est cette idée qui va nous permettre d’aboutir à la démonstration de l’existence de point fixe de Cremer. Avant d’en arriver véritablement là, nous avons besoin de la proposition suivante qui nous donne l’expression des coefficients de la série qui permet de linéariser f . Rappelons que nous travaillons sur un voisinage de l’origine où le développement analytique de f autour de l’origine est valable. Proposition 11. Si f s’écrit f (z) = λz + j>2 aj z j avec λ non parabolique. Soit T la série formelle qui linéarise f (on a donc T −1 ◦ f = λT −1 ). Alors, P j si on écrit T (z) = z + ∞ j=2 bj z , on a l’expression des coefficients de T , définies récursivement par la formule suivante : P n X 1 X aj bk1 · · · bkn ∀n > 2, bn = n λ − λ j=2 k1 +···+kj =n 18 Démonstration. On ne détaillera pas la preuve ici qui est très technique et ne présente pas véritablement d’intérêt. Il suffit en effet de comparer les séries f (T (z)) et T (λz) pour en identifier les coefficients. Remarque. Le résultat d’unicité dans le théorème 8 donne un sens à la proposition précédente puisque bien qu’on ait pris une fonction linéarisante de f particulière (avec T 0 (0) = 1), les autres en sont des multiples. Rappelons que l’on cherche des critères pour savoir si f est conformément linéarisable autour de 0 qui est un point fixe irrationnellement neutre. On a vu qu’elle était toujours formellement linéarisable, et le résultat d’unicité du théorème 8 nous permet d’affirmer que la question de sa linéarisation holomorphe est strictement équivalente à la convergence ou non de T défini dans la proposition précédente. Et ce qu’on va voir maintenant est extrêmement important. En effet, le résultat suivant a pour conséquence dans le cas irrationnellement neutre, qu’être holomorphiquement linéarisable est équivalent à être conformément linéarisable. On peut maintenant justifier et comprendre l’approche différente qui a été faite dans ce paragraphe où on ne se demandait pas si l’application qui conjuguait était conforme ou non, alors qu’on avait parlé précédemment que de conjugaison conforme. Finalement, c’est la même chose pour les points considérés. Lemme 12. Soit r > 0. Soit h holomorphe telle que h0 (0) = 1 qui linéarise f sur le disque Dr , alors elle h est conforme sur Dr . Démonstration. Il suffit de démontrer que h est injective sur Dr , elle sera a fortiori conforme. Soit donc (z1 , z2 ) deux éléments distincts de Dr vérifiant h(z1 ) = h(z2 ). On a f (h(z1 )) = f (h(z2 )), d’où h(λz1 ) = h(λz2 ), et par récurrence, on obtient h(λn z1 ) = h(λn z2 ), ∀n ∈ N. Or, par densité de {λn } sur U, g(η) = h(ηz1 ) − h(ηz2 ) = 0∀ηin(U ). g est alors une fonction holomorphe sur D et nulle sur la frontière, par le principe du maximum, elle est nulle sur D, ce qui contredit h0 (0) = 1. z1 et z2 ne peuvent donc pas être distincts, et h est injective. Désormais, pour déterminer si un nombre est de Cremer ou de Siegel, nous devons étudier la convergence de T (qui linéarise f formellement), et celle-ci dépendra évidemment de λ, mais surtout fortement de la quantité |λn − 1| qu’on a déjà pu voir apparaitre à plusieurs reprises. Théorème 9. Soit θ ∈ [0, 1] \ Q vérifiant 1 lim sup ({na})− n = ∞ n→∞ 19 Alors, il existe f de développement analytique autour de 0 qui est f (z) = e2iπa z + O(z 2 ) pour laquelle 0 est de Cremer. Démonstration. Pour commencer, voyons à quoi correspond cette hypothèse 1 lim sup ({na})− n = ∞ n→∞ Posons alors λ = e2iπa , grâce à quelques calculs trigonométriques on arrive aisément à montrer que |λn − 1|2 = 4 sin2 (πan) Introduisons la partie fractionnaire de an, notée {an} et définie par {x} = x − [x]. De |sin(πan| = |sin(π {an})|, on tire immédiatement |λn − 1| = 2π {an} + o({an}) Cela montre que l’hypothèse est en fait équivalente à 1 lim sup |λn − 1|− n = ∞ n→∞ Il nous faut désormais montrer que cette condition a pour conséquence que la série formelle T (unique à multiplication près par un complexe non nul) qui linéarise f a un rayon de convergence nul. Pour cela, nous devons choisir f de P la façon suivante : f (z) = λz + j>2 aj z j avec aj = e2iπθj où les θj sont définis récursivement comme suit. θ2 = 0, θ3 = arg(a2 ) et ∀n > 3 θn = arg n−1 X X aj j=2 bk1 · · · bkn k1 +···+kj =n où les bn sont donnés par n X 1 X aj bn = n bk1 · · · bkn λ − λ j=2 k1 +···+kj =n Il n’est pas du tout immédiat que cette construction est valable. Justifions là quelque peu, pour aider à la comprendre. On commence par poser θ2 = 0 et b1 = 1, on en déduit a2 , et donc b2 et θ3 . θ3 déterminé, nous pouvons construire a3 , et en déduire b3 et θ4 , etc... Il est clair que f ainsi construit converge bien sur un voisinage de 0 et est ainsi bien le développement analytique d’une fonction holomorphe sur un voisinage de l’origine (f elle-même par exemple, considéré sur son disque de convergence). 20 j A partir de là, soit T défini par T (z) = z + ∞ j=2 bj z . On sait d’après la proposition 11 que T linéarise f , et c’était d’ailleurs tout l’objet de cette construction. On a P (λn − λ)bn = an + n−1 X X aj j=2 bk1 · · · bkn k1 +···+kj =n {z | :=An } Par construction, on a arg(An ) = θn = arg(an ). An et an appartiennent donc à la même demi-droite issue de l’origine, ce qui permet d’obtenir l’inégalité suivante : |An + an | > |an | = 1 On en déduit |bn | = |An + an | |an | 1 > = |λn − λ| |λ| |λn−1 − 1| |λn−1 − 1| Ainsi, en utilisant l’hypothèse 1 lim sup |bn | n = ∞ n→∞ et le rayon de convergence de T est donc bien nul. On a bien réussi à construire f holomorphe sur un voisinage de l’origine, de la forme f (z) = λz + O(z 2 ), et qui n’est pas holomorphiquement linéarisable. En effet, si elle l’était, elle le serait par S = aT où a ∈ C et S holomorphe sur un voisinage de 0, mais S et T ont même rayon de convergence égal à 0. 0 est donc de Cremer pour f . On a donc démontré l’existence de point fixe de Cremer. Presque, car pour en être certains, nous devons tout de même examiner cette condition sur a. En effet, que signifie 1 lim sup ({na})− n = ∞ n→∞ Pour commencer, on peut la transformer en 1 lim inf ({na}) n = 0 n→∞ Et ainsi, nous pouvons voir apparaitre un lien plus évident avec la théorie de l’approximation diophantienne. En effet, on a le résultat suivant : 21 Proposition 13. Soit a un irrationel vérifiant 1 lim inf ({na}) n = 0 n→∞ alors, a est un nombre de Liouville, et en particulier transcendant. Ce résultat est entièrement démontré en annexe A, où d’autres points sont développés pour comprendre l’idée suivante. Ce type de réel qui conduit à l’existence de point de Cremer se laisse donc bien approcher par les rationnels. Au contraire, Siegel a justement démontré que dans le cas des nombres diophantiens (dont l’approximation rationnelle est "mauvaise"), on obtenait des points fixes autour desquels f était linéarisable. Définition 14. Un nombre réel θ est dit diophantien s’il existe C > 0 et 2 < µ < ∞ tels que ∀p ∈ Z, q ∈ N∗ , on ait : θ − C p > µ q q Théorème 10. Si θ est diophantien, et si le multiplicateur de f est λ = e2iπθ , alors 0 est de Siegel. Démonstration. pas facile facile Nous sommes donc parvenu à déterminer certaines conditions sur λ pour que le point fixe soit de Siegel ou de Cremer pour la fonction. Il existe des résultats plus avancés sur la question que nous nous contenterons d’énoncer ici. Définition 15. Soit θ ∈ R \ Q. Notons pqnn les réduites du développement en fraction continue de θ. On dit que θ satisfait à la condition de Brjuno si ∞ X log(qn+1 ) <∞ qn n=0 Remarque. Un nombre irrationnel a qui vérifie ce qu’on pourrait presque maintenant appeler la condition de Cremer 1 lim inf ({na}) n = 0 n→∞ satisfait aux conditions de Brjuno, étant donné que pour un tel point, on a même lim sup log(qn+1 ) = +∞ qn 22 Théorème 11. Soit θ ∈ R \ Q – Si θ satisfait à la condition de Brjuno, toute fonction f de multiplicateur e2iπθ est linéarisable. – Sinon, ∃f de multiplicateur e2iπθ qui ne soit pas linéarisable. Le résultat suivant, plus précis, a été démontré par Yoccoz. Théorème 12. Soit θ ∈ R \ Q, qui ne satisfait pas à la condition de Brjuno, alors f (z) = e2iπθ z + z 2 n’est pas linéarisable. Ce problème de linéarisation dans le cas irrationnel fait encore l’objet de nombreuses recherches, il a été par exemple conjecturé par Douady que : Conjecture 1. Si θ ∈ R \ Q ne satisfait pas à la condition de Brjuno, alors toute fonction rationnelle de multiplicateur λ = e2iπθ en z0 un point fixe n’est pas linéarisable autour de z0 . 3.3 Cas parabolique : λq = 1 Nous allons examiner dans cette section le cas parabolique, i.e. le cas où le point fixe considéré est de multiplicité λ vérifiant λq = 1 pour un certain q ∈ N∗ . Tout d’abord, nous montrons que f ne sera holomorphiquement linéarisable autour du point fixe que dans des cas très précis. C’est le propos du théorème suivant : Théorème 13. On suppose que sur un voisinage de l’origine f (z) = λz + O(z 2 ) avec λq = 1 pour un certain q ∈ N∗ . Alors, f est holomorphiquement linéarisable si et seulement si il existe m ∈ N tel que f ◦m = Id. Démonstration. Commençons par le sens le plus simple. Si f est holomorphiquement linéarisable, comme λz = g ◦ f ◦ g −1 (z), on a z = λq z = g ◦ f ◦q ◦ g −1 (z) et donc f ◦q = Id. Réciproquement, supposons qu’il existe m ∈ N tel que f ◦m = Id. Comme f ◦m (z) = λm z + O(z 2 ), on a λm = 1. Posons X f ◦j (z) 1 m−1 g(z) = m j=0 λj 23 On a immédiatement (en utilisant f ◦m (z) λm g ◦ f (z) = = = f ◦0 (z) ) λ0 X f ◦(j+1) (z) 1 m−1 m j=0 λj m 1 X f ◦(j) (z) λ m j=1 λj = λg(z) ce qui donne le résultat souhaité. Dans le cas non-linéarisable, qui est le plus fréquent, on peut tout de même obtenir une forme plus simple de notre fonction. Le théorème suivant nous sera en effet utile par la suite : Théorème 14. Soit f (z) = λz + O(z 2 ) une fonction holomorphe au voisinage du point fixe parabolique 0 de multiplicateur λ, avec λq = 1 et λj 6= 1 pour j = 1, . . . , q − 1 et vérifiant f ◦q 6= Id. Alors il existe n ∈ N et a ∈ C tels que pour tout t >> 1 fixé, f est holomorphiquement conjuguée à λz + z qn+1 + az 2qn+1 + O(|z|t ). De plus, n et a sont uniquement déterminés par la classe de conjugaison de f au voisinage de 0. En outre, on a dz 1 Z , a= 2πi γ λz − f (z) où γ est un petit cercle autour de l’origine orienté positivement. Démonstration. Soit f (z) = λz + aj z j + O(z j+1 ) avec aj 6= 0 le premier coefficient non nul. Si λ n’a pas de résonnance de degré j alors l’équation homologique peut être résolue et f peut être conjuguée à une application de la forme λz +O(z k ) pour un certain k > j. Puisque par hypothèse f ◦q 6= Id, par la proposition précédente f n’est pas linéarisable et après un nombre fini d’étapes on doit rencontrer un terme de résonnance. q étant l’ordre de λ, un terme de résonnance est nécessairement de degré nq + 1 pour un certain n ∈ N∗ . On peut donc supposer que f (z) = λz + aqn+1 z qn+1 + O(z qn+2 ) avec aqn+1 6= 0. 24 On choisit maintenant c ∈ C \ {0} tel que aqn+1 cqn = 1. En conjugant f par g(z) = cz, on obtient 1 g −1 ◦ f ◦ g(z) = (λcz + aqn+1 cqn+1 z qn+1 + O(z qn+2 ) c = λz + z qn+1 + aj z j + O(z j+1 ) := f1 (z) pour un certain j > qn + 1 et aj 6= 0. On souhaite "éliminer" le terme de degré j, on s’intéresse donc à l’existence d’une fonction holomorphe au voisinage de 0 de la forme T (z) = z + cz h qui résolve l’équation fonctionnelle T ◦ f1 (z) = λT (z) + T (z)qn+1 + O(z j+1 ). (1) En développant on obtient λz + z qn+1 + aj z j + c(λz + z qn+1 + aj z j )h + O(z j+1 ) = λz + λcz h + (z + cz h )qn+1 + O(z j+1 ) ce qui donne λz + z qn+1 j + aj z + c h X h k k=0 h = λz + λcz + qn+1 X k=0 qn + 1 k ! λk z (qn+1)h−kqn + O(z j+1 ) ! cqn+1−k z (qn+1)h−k(h−1) + O(z j+1 ) d’où λz + z qn+1 + aj z j + cλh z h + chλh−1 z h+qn + O(z j+1 , z h+2qn ) = λz + λz h + z qn+1 + (qn + 1)cz qn+h + O(z j+1 , z qn+2h−1 ). En soustrayant les différents termes on obtient h i aj z j + c(λh − λ)z h + c λh−1 h − (qn + 1) z qn+h = 0 + O(z j+1 , z h+2qn , z qn+2h−1 ). Ainsi, si j 6= mqn + 1 pour tout m ∈ N alors en choisissant h = j on obtient l’équation homologique aj + c(λh − λ) = 0 qui a une unique solution c et on peut alors résoudre l’équation (1). A l’inverse, dans le cas où il existe m ∈ N tel que j = mqn + 1, alors h = mqn + 1 entraîne λh = λ ce qui empêche la résolution de l’équation homologique. 25 Cependant, si on pose h = pqn + 1 pour p ∈ N que l’on précisera plus tard, alors on obtient amqn+1 z mqn+1 + c(p − 1)qnz (p+1)qn+1 = 0 + O(z mqn+2 ). Afin de résoudre cette équation on a besoin de p + 1 = m, ce qui nous entraîne à résoudre l’équation amqn+1 + c(p − 1)qn = 0, qui a une unique solution si et seulement si p 6= 1, i.e. m 6= 2. En résumé, on a montré que si j n’est pas un degré de résonnance pour λ alors on peut éliminer le coefficient aj . Dans le cas où j = mqn + 1 avec m > 2 alors on peut éliminer le coefficient aj . Cependant, dans le cas où j = 2qn + 1, alors on ne peut pas se débarasser du coefficient a2qn+1 qui est par conséquent un invariant. Notons-le a ∈ C. On peut donc conjuguer f à une application de la forme f2 (z) = λz + z qn+1 + az 2qn+1 + aj z j + O(z j+1 ) avec aj 6= 0, j > 2qn + 1. Alors par le même argument, si j 6= mn + 1 pour tout m on peut utiliser une fonction holomorphe au voisinage de 0 de la forme z + cz j pour éliminer le coefficient aj . Si j = mqn + 1 pour un certain m > 2 on peut utiliser une fonction holomorphe au voisinage de 0 de la forme z + cz (m−1)qn+1 pour éliminer le coefficient aj . On peut répéter cette opération autant de fois que nécessaire et l’on obtient le résultat recherché. L’invariance de n et a par conjugaison vient de l’unicité (par construction) de la forme simplifiée de f et de la transitivité de la conjugaison. Finalement, étant donné f (z) = λz + z r+1 + az 2r+1 pour un certain r ≥ 1 alors on a 1 1 1 1 = − r+1 = − r+1 (1 − az r + o(|z|r )) r λz − f (z) z 1 + az z −1 a + + h(z), r+1 z z où h(z) est holomorphe au voisinage de l’origine (car en fait dans l’égalité ci-dessus on pouvait par exemple écrire o(|z|r+2 ) au lieu de o(|z|r )). On en déduit que = 1 Z dz 1 Z −1 a = + + h(z) = a, 2iπ γ λz − f (z) 2iπ γ z r+1 z ce qui était le résultat recherché. 26 Remarques. 1. En itérant le processus de conjugaison dans la preuve, on obtient en fait le résultat suivant : f est formellement conjuguée à l’application g(z) = λz + z qn+1 + az 2qn+1 . 2. Si f (z) = z + ak+1 z k+1 + O(z k+2 ) est holomorphe au voisinage de zéro avec ak+1 6= 0 alors k + 1 est le premier terme non résonnant et tout comme dans la preuve du théorème précédent on peut conjuguer holomorphiquement f à une fonction holomorphe au voisinage de zéro de la forme z − z k+1 + az 2k+1 + O(z h ) avec h aussi grand qu’on veut. On utilisera cette remarque dans la démonstration du théorème principal de cette section. Définition 16 (Direction attractives et répulsives). On considère maintenant une fonction holomorphe au voisinage de zéro fixée, f (z) = z + ak+1 z k+1 + O(z k+2 ) avec ak+1 6= 0. Alors un point v ∈ U est une direction attractive si ak+1 v k est un réel négatif, et une direction répulsive si ak+1 v k est un réel positif. Il existe clairement k directions attractives et k directions répulsives. Remarque. Les directions attractives de f sont les directions répulsives de f −1 , et vice-et-versa. Définition 17 (Pétales attractifs et répulsifs). Soit f une fonction holomorphe au voisinage de zéro de la forme f (z) = z + ak+1 z k+1 + O(z k+2 ) avec ak+1 6= 0. Un pétale attractif centré sur une direction attractive v est un ouvert simplement connexe Pv tel que 1. 0 ∈ ∂Pv , 2. f (Pv ) ⊆ Pv , 3. limn→+∞ f ◦n (z) = 0 et limn→+∞ f ◦n (z) |f ◦n (z)| = v pour tout z ∈ Pv . Un pétale répulsif centré sur une direction répulsive v est un pétal attractif pour f −1 centré sur la direction attractive v pour f −1 . En considérant une fonction telle quelle celle de la définition ci-dessus, on notera . . ., vk+ pour les directions attractives de f et v1− , . . ., vk− pour les directions répulsives de f , ordonnées de façon à ce qu’en partant de 1 et en se déplaçant dans le sens des aiguilles d’une montre sur U le premier point que l’on rencontre soit v1+ , puis v1− , puis v2+ , etc. Le théorème suivant est le plus important des résultats sur le points fixes paraboliques : v1+ , 27 Théorème 15 (Théorème des fleurs de Leau-Fatou). Soit f holomorphe au voisinage de zéro de la forme f (z) = z + ak+1 z k+1 + O(z k+2 ) avec ak+1 6= 0. Soit o n v1+ , . . . , vk+ , v1− , . . . , vk− les directions attractives et répulsives de f . Alors 1. Pour tout vj± , il existe un pétal attractif/répulsif Pv± centré en vj± . j 2. L’union ∪kj=1 Pv+ ∪kj=1 Pv−j ∪ {0} est un voisinage ouvert de 0. j 3. Pv+ ∩ Pv+ = ∅ et Pv− ∩ Pv− = ∅ pour j 6= l. j j l l 4. Pv− intersecte seulement Pv+ et Pv+ , pour j = 1, . . . , k (avec la convention j j+1 j ± vk+1 = v1± ). 5. Pour tout pétale attractif Pv+ la fonction f|Pv+ est holomorphiquement conjuj j guée à ζ 7→ ζ + 1 définie sur {ζ ∈ C : Re(ζ) > C} pour un certain C > 0. Démonstration. Par la deuxième remarque qui suit le théorème 14, on peut supposer que f (z) = z − z k+1 + az 2k+1 + O(z h ) avec h >> 1, de telle sorte que les k directions attractives de f sont les k racines k-ièmes de l’unité. n o Soit δ > 0 vérifiant δ << 1. On considère l’ensemble z ∈ C : z k − δ < δ . Il est composé de k composantes connexes (que l’on note P1 , . . ., Pk ), chacune étant centrée1 sur une racine de l’unité. On va montrer qu’il s’agit des pétales attractifs de f . Posons ψ(z) := 1 . kz k Soit j fixé. On note Hδ = ψ(Pj ). Nous allons montrer que Hδ = w ∈ C/Re w > Soit w = 1 . kz k Alors Re w = k1 Re zk |z|2k 2 Si z ∈ Pj , alors z k − δ < δ 2 , i.e. Re 1 2kδ 1 Re k|z|2k 2k z k > |z|2δ . = zk . 1 Inversement, si Re w > 2kδ , soit z = (kw)−1/k (où la racine k-ième est choisie de sorte que pour R > 0 la racine R−1/k est dans la direction attractive vj+ ). Alors 1 Au sens "directionnel" du terme, ces composantes étant plutôt centrées sur k-ième de 1 28 √ δ∗ une racine ψ(z) = w. Montrons que z ∈ Pj . Or, Re w > 1 1 1 2δ w ⇔ − 2δRe w < 0 ⇔ 2 2 − Re <0 2kδ k k k |w| |w|2 k 2 2 1 ⇔ − δ < δ 2 ⇔ (kw)−1/k − δ < δ 2 , kw ce qui prouve le résultat recherché. On remarque que ψ : Pj → Hδ est inversible, avec ψ −1 (z) = (kz)−1/k où la racine k-ième est choisie de sorte que pour R > 0 la racine R−1/k est sur la demi-droite issue de l’origine et contenant vj+ . Maintenant on s’intéresse à ϕ := ψ ◦ f|Pj ◦ ψ −1 : Hδ → C. Alors f|Pj ◦ ψ −1 (z) = (kz)−1/k − (kz)−1/k k+1 + a (kz)−1/k 2k+1 +O (kz)−1/k h d’où ψ ◦ f|Pj ◦ ψ −1 (z) 1 = h k (kz)−1/k − = k+1 ((kz)−1/k ) 2k+1 + a ((kz)−1/k ) h + O ((kz)−1/k ) 1 h k (kz)−1/k 1 − (kz)−1 + a(kz)−2 + O |z|(1−h)/k z =h 1 − (kz)−1 + a(kz)−2 + O |z|(1−h)/k ik ik Ensuite, pour |z| >> 1 on a −(kz)−1 + a(kz)−2 + O |z|(1−h)/k < 1 et ainsi on en déduit que h 1 − (kz)−1 + a(kz)−2 + O |z|(1−h)/k ik = 1 + k −(kz)−1 + a(kz)−1 + a(kz)−2 + O |z|(1−h)/k +O =1− (car (1 + x)k = 1 + kx + O(x2 ) pour |x| < 1) 29 1 z2 1 1 +O 2 . z z ih En remplaçant dans l’expression précédente il vient ϕ(z) = z 1− 1 z +O 1 1 =z 1+ +O 2 z z 1 z2 =z+1+ b + ... z Montrons maintenant que ϕ(Hδ ) = Hδ . Pour ce faire, considérons z tel que 1 1 1 . On souhaite montrer que Re ϕ(z) > 2kδ . Or, puisque |z| > Re z > 2kδ , Re z > 2kδ si δ << 1 alors " # 1 b 1 < 1 + Re +O 2 < 2. 2 z z Ainsi, " Re ϕ(z) = Re z + 1 + Re b 1 +O 2 z z # > Re z > 1 2kδ , d’où l’inégalité recherchée. On a donc ϕ(Hδ ) ⊆ Hδ , ce qui entraîne f (Pj ) ⊆ Pj . De plus, on remarque que ϕ◦n (z) = z + n + O(1/n), donc pour z ∈ Hδ , f ◦n ◦ ψ −1 (z) = ψ −1 (z + n + O(1/n)) = (k (z + n + O(1/n)))−1/k qui tend vers 0 quand n → +∞, de façon "tangente" à vj− . Nous allons montrer maintenant que ϕ est conjuguée holomorphiquement à z 7→ z + 1 sur Hδ . Tout d’abord, estimons les valeurs prises par les itérées de ϕ : pour tout n ≥ 1 et z ∈ Hδ on n ≤ |ϕ◦n (z)| ≤ |z| + 2n. 2 30 4 4.1 4.1.1 Un peu plus loin... Structure de l’ensemble de Fatou Théorème de Sullivan On rappelle qu’un domaine stable est une composante connexe de l’ensemble de Fatou : c’est un domaine maximal de normalité. Nous nous intéressons à ces domaines stables. Tout d’abord, il est clair que deux domaines stables d’une fonction rationnelle f sont soit disjoints soit égaux. Ainsi, la suite (f ◦n (V )) des successeurs d’un domaine stable donné est constituée de domaines stables mutuellement disjoints, ou alors il existe deux entiers m ≥ 0 et p ≥ 1 tels que f ◦p+m (V ) = f ◦m (V ). Un domaine stable est appelé domaine d’errance si f ◦n (V ) 6= f ◦m (V ) pour n 6= m. S’il existe p ∈ N tel que f ◦p (V ) = V , alors V est dit périodique. Les prédécesseurs non-périodiques d’un domaine périodique sont quant à eux dits prépériodiques. Exemple 2. Si z0 est un point fixe attractif, alors le domaine stable contenant z0 est un domaine fixe (1-périodique). De même si z0 , z1 , . . . , zp−1 est un cycle attractif, alors les domaines stables contenant ces points forment un cycle de domaines stables périodiques. Le théorème suivant a été annoncé par Sullivan en 1982, avant qu’il en fournisse une preuve détaillée en 1985. Celle-ci n’est pas présentée dans ce document car elle fait appel à des notions un peu hors de notre propos avec entre autre la théorie des applications quasi-conformes. Théorème 16 (Sullivan). Il n’existe pas de domaine d’errance. Ce théorème nous assure donc que tout domaine stable est au moins prépériodique. Ainsi, pour un domaine stable arbitraire V il existe une itérée convenable f ◦m qui le transforme en un domaine stable périodique W = f ◦m (V ), et pour un entier p convenable, W, f (W ), . . . , f ◦p−1 (W ) forme un cycle périodique de taille p. On peut réduire l’étude de ces domaines à celle des domaines fixes car un domaine fixe de f ◦p est associé de façon équivalente à un domaine p-périodique de f. Le paragraphe suivant s’intéresse à la classification de ces domaines fixes. 31 4.1.2 Classification de Fatou-Cremer On distingue tout d’abord deux catégories principales de domaine fixes : – Un domaine de Fatou est un domaine fixe V tel que la suite (f ◦n ) converge localement uniformément vers un point fixe z0 ∈ V̄ . – Un domaine de rotation est à l’inverse un domaine fixe V tel qu’aucune des ◦n fonctions limites de la suite f|V ne soit constante. Plus précisément, V est appelé : – domaine de Böttcher ou bassin superattractif si z0 ∈ V et λ = 0 – domaine de Schröder ou bassin attractif si z0 ∈ V et 0 < |λ| < 1 – domaine de Leau si z0 ∈ ∂V et λ = 1 dans le cas du domaine de Fatou, où (f ◦n ) converge vers le point fixe z0 de multiplicateur λ. – disque de Siegel si V est simplement connexe et contient un point fixe neutre – anneau d’Arnol’d-Herman si V est doublement connexe ◦n dans le cas du domaine de rotation où aucune limite de f|V n’est constante. Théorème 17 (Classification de Fatou-Cremer). Tout domaine fixe de f est nécessairement d’un des cinq différents types ci-dessus. De plus, si V est un disque de Siegel ou un anneau d’Arnol’d-Herman, alors f est un automorphisme conforme de V . Ce théorème nous assure donc que la liste des cas présentés ci-dessus est exhaustive. 32 A Théorie de l’approximation diophantienne L’objectif de cette annexe n’est pas de donner de nombreux résultats de théories des nombres, mais juste de dégager quelques propriétés utiles des nombres irrationnels qui donnent des conditions sur le multiplicateur d’un point fixe pour que celui-ci soit de Cremer ou de Siegel. La théorie de l’approximation diophantienne est l’étude de diverses propriétés d’approximation de nombres réels par les rationnels. Une grande classe de ces nombres est utilisée par Siegel, il s’agit des nombres diophantiens, qui sont "mal" approximables par les nombres rationnels au sens suivant : Définition 18. Un nombre réel θ est dit diophantien s’il existe C > 0 et 2 < µ < ∞ tels que ∀p ∈ Z, q ∈ N∗ , on ait : θ − C p > µ q q Rappelons tout d’abord quelques notions élémentaires de théorie algébrique des nombres que nous allons utiliser. Définition 19. On dit que α ∈ C est algébrique sur Q s’il existe P ∈ Q[X] tel que P (α) = 0, P 6= 0. Définition 20. Un élément de C qui n’est pas algébrique sur Q est dit transcendant. Définition 21. Pour α nombre algébrique, Pα son polynôme minimal est le polynome unitaire de plus petit degré tel que P (α) = 0 et P 6= 0. Définition 22. Le degré d’un nombre algébrique est le degré de son polynôme minimal. Le théorème de Liouville permet cette fois-ci de définir une classe de nombres transcendants et d’en construire de manière explicite et assez simplement, comme on le verra juste après la démonstration de ce théorème. Théorème 18. Soit α un nombre réel algébrique de degré d > 2 (donc irrationnel).Il existe alors C > 0 tel que, pour tout rationnel pq , on ait : α − p C > q qd Autrement dit, α est diophantien de degré d. 33 Démonstration. Soit P ∈ Z[X] obtenu après avoir multiplié le polynôme minimal de α par le PPCM de ses coefficients. P (X) = ad X d + ... + a1 X + a0 ∀p ∈ Z, ∀q ∈ N∗ , p q P Ainsi, q d P p q ! p q = ad !d p + ... + a1 + a0 q ∈ Z∗ , et on en déduit immédiatement : P p q ! > 1 qd Posons M = supx∈[α−1;α+1] |P 0 (x)|. M > 0 car deg P > 1. D’après l’inégalité des accroissements finis entre α et pq ∈ [α − 1; α + 1] : P p q ! 6M p q car P (α) = 0 On a alors, ∀ pq ∈ [α − 1; α + 1] , α − pq > Et si p q 6∈ [α − 1; α + 1], α − p q >1> − α 1 . M qd 1 . qd Posant C = min 1, M1 , on a bien α − p C p > ,∀ ∈ Q q qd q Une idée importante qui ressort de ce théorème est qu’on approche moins bien les nombres algébriques que les nombres transcendants, par des nombres rationnels. Définition 23. Un réel α est appelé nombre de Liouville s’il est irrationnel, et si ∀n ∈ N∗ , ∃ pqnn avec qn > 0, tel que |α − pn 1 |< n qn qn 34 D’après le théorème précédent, tout nombre de Liouville est transcendant. Considérons par exemple α= ∞ X ak k! k=0 10 où ak ∈ J0, 9K est à support infini. Admettons ici que ce nombre est irrationnel et montrons que ce nombre est de Liouville. P ∀n ∈ N∗ , avec pn = 10n! k=0 n 10akk! et qn = 10n! , on a : 06α− ∞ X pn ak 1 10 9 1 1 = + + ... 6 6 1 + 6 n (10n! ) 10n! (qn )n qn k=n+1 10k! 10(n+1)! 10 100 Donc α est un nombre de Liouville, donc transcendant. Il s’agit d’un des rares critères de transcendance. En effet, il n’existe pas à proprement parler de théorie des nombres transcendants, mais plutôt quelques techniques permettant d’obtenir des résultats très partiels. Examinons alors de ce point de vue là la condition 1 lim inf ({na}) n = 0 n→∞ 1 Cela signifie que ∀ > 0, ∀n ∈ N, ∃m > n tel que |{ma}| m < . Autrement dit, ∀ > 0, ∀n ∈ N, ∃m > n, ∃pm ∈ Z tels que |ma − pm | < m Soit n ∈ N. ∃n0 ∈ N tel que ∀m > n0 , 2−m < m−n . Mais alors, si on applique l’hypothèse avec = 12 et n0 , cela donne : ∃m > n0 , ∃pm ∈ 1 m m2m 1 < ( )n m pm Z, a − < Ainsi, un nombre a vérifiant 1 lim inf ({na}) n = 0 n→∞ est bien de Liouville, et en particulier transcendant. 35 Bibliographie Références [1] Alan F. Beardon. Iteration of Rational Functions. Springer-Verlag, 1991. [2] François Berteloot and Volker Mayer. Rudiments de dynamique holomorphe. EDP Sciences, 2001. [3] Filippo Bracci. Local holomorphic dynamics of diffeomorphisms in dimension one. PhD course, 2006. [4] Lennart Carleson and Theodore W. Gamelin. Complex Dynamics. SpringerVerlag, 1993. [5] John Milnor. Dynamics in One Complex Variable. Princeton University Press, 2006. [6] Walter Rudin. Analyse réelle et complexe, 3ième édition. Dunod, 2009. [7] Norbert Steinmetz. Rational Iteration. Walter de Gruyter, 1993. 36