ÉTATS-UNIS – Janet Yellen : une intervention équilibrée,
mais consciente des risques baissiers
Michael CAREY
michael.carey@ca-cib.com
N°16/043 – 12 février 2016 2
Concernant les risques haussiers, l’idée selon
laquelle la baisse des cours du pétrole pouvait
soutenir l’économie américaine a été mentionnée.
Nous pensons toutefois que ce facteur pourrait
être en partie compensé par la baisse des
investissements dans le secteur pétrolier et par les
impacts négatifs collatéraux sur les conditions de
marché (baisse des actions, hausse des spreads
de crédit, inquiétudes sur l’exposition des banques
au secteur de l’énergie et sur leur volonté générale
de prêter).
Un facteur supplémentaire suggérant la
prudence dans la normalisation des taux est la
lenteur attendue de la remontée de l’inflation
vers l’objectif de 2% de la Fed. Les toutes
dernières baisses des prix de l’énergie vont
prolonger la faiblesse de l’inflation. Alors même
que l’impact du pétrole sur les prix se dissipera
lorsque les cours se stabiliseront, le maintien
durable d’une inflation basse augmente le risque
de baisse des anticipations d’inflation. Ceci
continue de préoccuper les officiels de la Fed dans
la mesure où les perspectives d’inflation
« dépendent en grande partie du bon ancrage des
anticipations d’inflation à long terme ». Au cours de
son intervention, Janet Yellen a noté que les
prévisions implicites d’inflation sur les marchés
avaient atteint des niveaux historiquement bas,
même si le FOMC considère que « l’évolution des
primes de risque et de liquidité » a contribué à
cette baisse. Certaines mesures des anticipations
d’inflation données par des enquêtes sont
néanmoins sur la partie basse de leur fourchette
récente, ce qui plaide pour une approche prudente
de la normalisation des taux.
La ligne du parti
L’intervention de la présidente de la Fed reflète
la position officielle du FOMC selon laquelle
« avec des ajustements graduels du réglage
monétaire, l’activité économique progressera à
un rythme modéré dans les années qui viennent
et les indicateurs du marché du travail continueront
de s’améliorer ».
L’analyse de la situation économique reste
fondamentalement la même. La bonne tenue de
l’emploi et la meilleure progression des salaires
soutiendront la consommation des ménages, dans
le secteur de l’automobile par exemple. Le secteur
du logement va continuer de progresser et la
croissance dans ces secteurs compensera la
contribution négative du commerce extérieur. Ce
dernier contribuera en effet négativement à la
croissance en raison d’une croissance atone de la
demande étrangère et de la force du dollar.
L’investissement – en dehors du secteur de
l’énergie – devrait continuer à progresser.
La Fed affirme que « l’évolution de la politique
monétaire n’est absolument pas écrite à
l’avance ». « L’évolution du taux des fed funds
dépendra de ce que les statistiques nous diront
des perspectives économiques et nous
réévaluerons régulièrement le niveau de taux qui
permettra d’atteindre puis de maintenir nos
objectifs d’emploi maximum et d’inflation à 2% ».
Une croissance plus forte ou une progression plus
rapide de l’inflation rendrait « appropriée une
hausse plus rapide du taux des fed funds… mais
une évolution moins rapide serait indiquée si
l’économie se révélait décevante ».
Séance des questions-réponses
Janet Yellen a essuyé des critiques de la part de
membres de la Chambre des représentants en
raison du taux de rémunération des réserves
excédentaires (le IOER, fixé à 0,50%), qui se
traduit par des versements importants aux
banques, y compris des banques étrangères. Une
alternative ne serait-elle pas envisageable ? La
présidente de la Fed a défendu la gestion des taux
de la banque centrale. Elle a notamment indiqué
que relever le taux des fed funds serait plus difficile
sans la capacité à utiliser l’IOER, l’alternative étant
une réduction des réserves de la Fed, réduction
qui obligerait la Fed à vendre des obligations du
Trésor et des MBS qu’elle détient en portefeuille,
ce qui pourrait se révéler néfaste.
Concernant le portefeuille d’actifs de la Fed, Janet
Yellen a réaffirmé que les membres de la Fed
voulaient que le processus de normalisation des
taux soit bien entamé avant de laisser le bilan de
la Fed se réduire mécaniquement, dans la mesure
où la fixation des taux courts est la manière la plus
indiquée de modifier la politique monétaire et de
communiquer sur celle-ci. Nous ne pensons pas
que la Fed modifiera sa politique de
réinvestissement avant fin 2017 au plus tôt.
Janet Yellen a relativisé les craintes de
récession affichées par les parlementaires et
ne s’attend pas en conséquence à ce que le
FOMC abaisse les taux. Elle a rappelé
l’amélioration continue du marché du travail et noté
que les pressions désinflationnistes de court terme
seraient probablement transitoires, mais a
néanmoins admis que l’évolution des marchés
financiers mondiaux pouvait conduire à une
croissance plus faible. Le FOMC analysera les
données au fur et à mesure de leur publication et
fera part de ses nouvelles prévisions à l’occasion
de sa réunion du mois de mars.
L’hypothèse de taux d’intérêt négatifs aux
États-Unis ne semble pas particulièrement
intéressante pour Janet Yellen, mais les stress
tests auxquels sont soumises les banques