Résumé
Ce mémoire est le fruit d’une enquête sur le problème de la nouveauté dans la philosophie
de Spinoza. Je me suis intéressé à la critique que ce dernier fait des nouveautés un peu
partout dans ses œuvres, et, au fur et à mesure où j’avançais dans mes recherches, j’ai
compris que si la nouveauté devait figurer au sein du système spinoziste, ce n’était pas en
tant que nouveauté objective, mais en tant que nouveauté radicale, inscrite au cœur même
de l’expérience de la béatitude éternelle. Le paradoxe de la nouveauté et de l’éternité est
donc devenu l’objet principal de mon enquête. C’est lui que j’ai découvert et expérimenté à
quelques endroits de l’Éthique et du Traité de la réforme de l’entendement. Or les
différentes expressions de ce paradoxe m’ont peu à peu amené à modifier mon problème
initial, car le paradoxe à partir duquel j’ai abordé le problème de la béatitude renvoyait de
diverses manières à l’écriture de Spinoza, laquelle réfléchit activement le problème de la
nouveauté en tant qu’elle s’inscrit essentiellement dans le parcours qu’effectue le lecteur
dans sa quête de la béatitude. Ce sont alors les stratégies d’écriture informant le rapport du
lecteur à la nouveauté que j’ai essayé de comprendre comme autant de moyens
philosophiques que Spinoza a forgés pour le lecteur désirant atteindre une nouvelle sagesse,
et qui, épris de ses affects, oscille perpétuellement entre l’admiration de la béatitude et la
fiction de la nouveauté ou sa critique, ayant peine à viser la cible de son désir. Du coup
mon enquête sur le problème de la nouveauté s’est transformée en la réflexion de mon
propre désir d’enquêter sur la nouveauté dans la pensée spinoziste. Car si Spinoza est
attentif aux causes qui nous déterminent à désirer la béatitude, il me fallait aussi me tourner
vers le problème de l’écriture en participant à l’instauration du champ des désirs, non plus
du point de vue de Spinoza, mais du mien, passant ainsi du rôle de commentateur
transparent à celui d’expérimentateur multiple résolument inclus dans son enquête
réflexive. Pour réfléchir ce rapport personnel à la nouveauté en philosophie, et afin
d’exposer les modalités du sentiment et des désirs sous-jacents à ma décision de prendre le
système de Spinoza comme objet de recherche et de pratique, il m’a paru nécessaire de
recourir moi-même à la fiction, laquelle éclate au carrefour du paradoxe de la nouveauté et
de l’éternité de la béatitude. C’est la fiction qui a permis à cette enquête de se différencier