Sciences-Croisées Numéro 7-8 : Soin de l’âme A l’aube de la métaphysique. Jalons pour une préhistoire de la spiritualité Prof. Marc Grœnen Université Libre de Bruxelles (Centre de Recherches en Archéologie et Patrimoine) mgroenen @ulb.ac.be À L’AUBE DE LA MÉTAPHYSIQUE. JALONS POUR UNE PRÉHISTOIRE DE LA SPIRITUALITÉ RÉSUMÉ Après l’analyse de l’information dont le préhistorien dispose, la contribution évalue les moments où l’on peut saisir les indices d’une mise en place d’éléments métaphysiques dans les traces archéologiques. Les différents homininés sont examinés, et ce à travers la durée de la très longue préhistoire paléolithique, pour isoler les premiers indices d’activités spirituelles. Ensuite, le travail s’attache à mettre en évidence la richesse des pratiques cultuelles chez Néandertal et Cro-Magnon à travers les réponses au phénomène de la mort. Il montre ensuite l’existence de mythes et de rites dans l’art du Paléolithique supérieur. Il tente enfin de dégager la valeur de l’image pour nos lointains ancêtres. 1. PRÉALABLE MÉTHODOLOGIQUE Rien n’est plus évanescent que le monde des esprits. Pour les populations archaïques, les relations que l’homme entretient avec des forces ou des entités qui occupent un monde parallèle à celui qu’il appréhende par les organes de la perception sont, par essence, impalpables, même si ces entités ont bien souvent une inquiétante présence et une redoutable puissance. Le monde des esprits ne s’approche d’ailleurs qu’avec des précautions connues des seuls initiés. C’est dire qu’il faut, pour en connaître les secrets et en mesurer les effets, le support de la tradition orale ou le concours du texte écrit. Mais lorsque les cultures étudiées ont disparu depuis trop longtemps pour qu’il reste des traces de leurs croyances ou de leurs mythes, et a fortiori lorsqu’il s’agit de groupes qui n’ont jamais disposé de l’écriture, comme c’est le cas pour les populations de la préhistoire, on ne peut que regretter l’immatérialité de ces croyances. Car, pour l’archéologue qui exhume du sol les vestiges de ce lointain passé humain, seuls subsistent les témoins matériels que l’action du temps n’a pas atteints ou a partiellement épargnés. Il faut le rappeler, le préhistorien ne dispose pour tout document que ce que les fouilles archéologiques et les analyses de laboratoire lui donnent. La 1 critique préalable des documents doit donc être sévère, et plus d'une fois des faits qui semblaient acquis ont dû être entièrement réévalués. On peut, d'ailleurs, légitimement s'étonner de ce que les préhistoriens aient pu extraire d'un matériel, dont ils ne cessent d’ailleurs de souligner l'indigence, autant d'éléments conclusifs à verser au dossier des religions préhistoriques. C'est que, précisément, lorsque les faits parlent peu, ils sont équivoques ; il est, dès lors, aisé de les adapter à un quelconque modèle. Pendant longtemps, les préhistoriens ont considéré que l'histoire humaine ancienne était jalonnée de constantes religieuses universelles dont il était loisible de suivre l’évolution. De S. Reinach (1903) à J. Maringer (1958), en passant par T. Mainage (1921), G.H. Luquet (1926, 1931), H. Weinert (1946), P. Wernert (1948), H. Breuil et R. Lantier (1951) et E.O. James (1957), les auteurs ont posé l'universalité du fait religieux pour chacun des degrés de civilisation – sauvagerie, barbarie, civilisation – sur la foi d'une essence qui rendrait d'emblée pertinente la comparaison des faits sociaux au sein de chacun de ces états de culture. Dans la mesure où certains groupes vivent encore à l'état de sauvagerie et que leurs coutumes et leurs pratiques ont été observées par des voyageurs ou des ethnographes, Mainage peut avancer que les manifestations extérieures de leur activité peuvent encore être reliées au mécanisme mental qui les a produites (MAINAGE, 1921 : 123) et faire revivre les cérémonies magico-religieuses des Paléolithiques en comparant les vestiges fournis par l'archéologie avec ceux des primitifs actuels, sur la seule base du fait que la similitude des effets nous autorisera à invoquer la similitude des causes (MAINAGE, l.c.). Ce comparatisme facile a fait date. Étienne Patte (1960 : 6), qui a d'ailleurs lui-même fort peu respecté ce précepte de prudence, l’avait souligné : pour un fait observé, l'ethnographie nous apporte toujours plus d'une comparaison, c'est-àdire plus d'une interprétation. La démarche était donc elle-même sujette à caution ; elle s’est avérée franchement irrecevable lorsque les interprétations ont été bâties au départ d’éléments empruntés à des populations diverses. Comme l'a sévèrement relevé André Leroi-Gourhan (1990 : 81), il est étonnant que les préhistoriens aient utilisé, au début du 20e siècle déjà, tout un magasin de pratiques cueillies au hasard des récits de voyageurs aux antipodes, injurieuses pour les Pygmées ou les Fuégiens eux-mêmes, parce que tendancieusement choisies dans l'ignorance du ciment qui les rend solidaires d'une certaine image du monde. Durant les années 1960, cette approche universalisante des comportements religieux ne disparaît pas. Mais elle prend une forme différente. L’objectif est alors de retrouver des structures comportementales inhérentes à l'être humain et, de ce fait, nécessairement omniprésentes. Leroi-Gourhan ne fait d’ailleurs pas exception. Abordant les faits religieux au Paléolithique ancien et moyen, l'auteur estime qu'il serait excessif de ne pas imaginer un commencement à ce qui est universel dans les temps plus récents (Leroi-GOURHAN, 1990 : 146). De même, cet appel à un universel justifiant la subordination du factuel au principiel scande le travail de Marcel Otte. En soulignant la fréquence des calottes crâniennes des hominidés anciens, l'auteur constate que dans toutes les civilisations et de tous temps, le crâne ou la tête a pris cette fonction d'évocation ou de rappel d'un être mort ; et il conclut, s'il existe un universel quant à la pratique des objets-reliques, c'est bien celui-là et il est, précisément, le premier à apparaître (OTTE, 1993 : 37). Cette conviction se marque encore lorsque l'auteur aborde le feu : s'il est un phénomène aux origines d'une multitude de mythes, contenu dans toutes les 2 légendes, élément de tout rituel, universellement répandu, perpétuellement présent, c'est bien celui-là. Or, il est justement le premier attesté archéologiquement (OTTE, 1993 : 39). Que les traces de feu aient été découvertes dans des couches très anciennes est un fait archéologiquement incontestable, mais ce n'est pas parce que le feu est entré dans l'imaginaire mythologique ou qu'il a fait l'objet de rituels que les foyers anciens démontrent l'existence de pratiques religieuses ou de récits mythiques au cours de ces lointaines époques. Il importe de partir et de ne considérer que les documents archéologiques eux-mêmes. Bien entendu, cette exigence entraîne de nouvelles difficultés. Dès lors qu'ils sont arrachés à leur contexte symbolique, les objets sont muets sur les intentions qui ont présidé à leur réalisation. La trace archéologique constitue une marque culturelle fossile qu’il s’agit de décrypter en pratiquant une lecture palethnographique des surfaces paléolithiques. Toute la difficulté – et le problème se pose d’autant plus qu’il s’agit de fouille ancienne – est donc d’articuler les traces archéologiques entre elles de façon à ce qu’elles nous informent sur des modes de pensée structurés différemment des nôtres (GROENEN, à paraître). 2. QUELLE VIE SPIRITUELLE POUR LES PLUS ANCIENNES HUMANITÉS ? Cette difficulté de « lecture » des documents se pose évidemment d’autant plus que les périodes explorées sont anciennes : plus on remonte dans le temps, moins les documents ont de chance d’être à leur place d’origine. Pour les périodes les plus anciennes, la présence humaine se limite pour cette raison à des restes fossiles le plus souvent modestes. Pour les plus vieux « préhumains » bipèdes, comme Sahelanthropus tchadensis (Toumaï) vers 7 MA (millions d’années), Orrorin tugenensis (6 MA), Ardipithèque (5,5-4,4 MA), Australopithèque (4,2-2 MA) ou Paranthrope (2,7-1 MA), les milliers de restes osseux et de dents, tous découverts en Afrique, nous ne disposons pour l’instant d’aucune information sur leur habitat, sur leurs comportements ou sur l’existence éventuelle de pratiques spirituelles. Et il n’en va pas différemment pour les premiers représentants du genre humain – Homo habilis (2,4-1,4 MA) et Homo rudolfensis (2,4-1,7 MA). Toutefois, les industries en pierre taillée à partir de 2,6 MA produites par plusieurs de ces homininés nous invite à penser qu’il devait exister en ces temps reculés des schémas cognitifs déjà complexes. Le fait est, en tout cas, démontré pour l’atelier de taille mis au jour à Lokalelei au Kenya (2,34 MA) (ROCHE et al., 1999). Homo ergaster est le premier humain à avoir quitté l’Afrique. Sa dispersion rapide dans l’Ancien Monde l’a obligé à s’adapter à des milieux très différents. Peu avant 2 MA, on retrouve ses outils en Eurasie, puis ses restes osseux à Dmanisi en Géorgie (1,81 MA) ou à Sima del Elefante en Espagne (1,1 MA). Avec ce type humain, les productions d’outils sont organisées depuis des schémas opératoires multiples qui s’inscrivent dans des systèmes techniques complexes transmis à d’autres groupes, si bien qu’il semble légitime d’y voir le premier humain culturellement déterminé (LUMLEY, 2006, GROENEN, 2009 : 6579). Il ne subsiste, pourtant, dans les sites de cette période aucune indication permettant de démontrer l’existence de préoccupations spirituelles. Dans l’état actuel des connaissances, ces premiers indices apparaissent avec le descendant européen de Homo ergaster : Homo heidelbergensis. À la Sima de los Huesos, en Espagne, les corps de 32 individus ont été jetés dans un puits, il y a 350.000 ans 3 (ARSUAGA et al., 1998). Leurs restes gisaient avec un biface, non utilisé, soigneusement taillé dans un quartz rose (CARBONELL et al., 2003). De même, dans la grotte de Lamalunga dans les Pouilles en Italie se trouvait le corps d’un individu déposé dans le coin d’une salle entre deux piliers stalagmitiques, à l’abri des prédateurs (PESCE-DELFINO & VACCA, 1996). Enfin, il existe aussi quelques os d’animaux encochés. Les traces que l’on y trouve ne peuvent pas être considérées comme le résultat de rongeurs, ni d’activités de boucheries. Ces modestes témoins constituent donc aujourd’hui les premières gravures intentionnelles. Ils pourraient être, selon D. et U. Mania qui en ont mis au jour dans le gisement de Bilzingsleben en Allemagne – daté entre 420.000 et 350.000 ans –, les premières œuvres d’art (MANIA & MANIA, 1998). Même si les découvertes ne sont pas légions pour ces périodes anciennes, le hasard et le soin méticuleux des fouilles archéologiques permettent néanmoins d’entrevoir la croyance possible en un « monde des esprits » ou, plus modestement, de préoccupations dépassant les strictes nécessités liées à la vie quotidienne. Pour les périodes plus récentes de la préhistoire, les documents se font plus abondants, moins équivoques aussi. C’est le bilan de quelques-unes de ces exceptionnelles trouvailles dont nous nous proposons à présent de dresser la liste pour la période du Paléolithique moyen (300.000-35.000 ans) et supérieur en Europe (35.000-9.000 avant notre ère), occupée alors successivement par l’homme de Néandertal (Homo neanderthalensis) puis par l’homme de CroMagnon (Homo sapiens). Nous nous attacherons également à faire le parallèle avec les sépultures du Proche et du Moyen-Orient, en nous rappelant que dans cette région la présence de l’homme de Cro-Magnon a précédé celle de l’homme de Néandertal. En fait, les découvertes de restes humains fossiles sont nombreuses pour ces deux humanités. La plupart des défunts, pourtant, n’ont pas reçu les honneurs d’une sépulture. Nombreux sont, en effet, les ossements isolés qui comportent des marques de décharnement ou de traitements divers. Même si ces traces sont bien attestées à l’époque de l’homme de Néandertal (LE MORT, 1988, 1989), elles apparaissent également durant la période de l’homme de Cro-Magnon (LE MORT & GAMBIER, 1992). Par sa richesse documentaire, la sépulture conserve néanmoins une importance toute particulière qui justifie les nombreux travaux de synthèse qui leurs sont accordés (MAY, 1986, BINANT, 1991, DEFLEUR, 1993, GROENEN, 1997, MAUREILLE, 2004, VANDERMEERSCH [dir.], 2008, TILLIER, 2009). 3. DE LA SÉPULTURE AU « MONDE DES ESPRITS » CHEZ NÉANDERTAL Depuis la découverte de la sépulture de la Chapelle-aux-Saints par les abbés Louis Bardon, Amédée et Jean Bouyssonie en 1908, le traitement des défunts chez l’homme de Néandertal ne laisse aucune place au doute. Aujourd’hui, quinze gisements ont livré une soixantaine de sépultures pour le Paléolithique moyen. Malgré ce nombre impressionnant, il est cependant assuré que la sépulture restait une réponse funéraire exceptionnelle pour cette humanité. En réalité, nous ne disposons pas de sépulture avérée pour toute la période du Paléolithique moyen (300.000-35.000) : les plus anciennes actuellement connues proviennent du Regourdou et du Roc de Marsal et sont datées à plus de 70.000 ans avant notre ère (TURQ et al., dans : VANDERMEERSCH, dir., 2008 : 40). Le corps a été inhumé en grotte ou en abri sous roche ou, éventuellement, en plein 4 air. La présence de plusieurs sépultures dans un même site ne peut que souligner la volonté d'un choix de la part des Néandertaliens. Ainsi, la grotte de Spy en Belgique, l'abri du Moustier en Dordogne et la grotte de Kiik-Koba en Crimée ont toutes trois livré deux sépultures. Mais certains sites en ont livré davantage : la grotte d'Amud en Israël a livré les restes de cinq Néandertaliens, le grand abri de La Ferrassie en Dordogne en a donné huit, Shanidar en Iraq neuf (BINANT, 1991 : 4-32). Le corps a été déposé dans une fosse spécialement aménagée pour le recevoir ou dans une cuvette naturelle (DEFLEUR, 1993 : 249-250). Si l’on excepte la situation de l'ancienne Union soviétique, le corps est le plus souvent orienté d'est en ouest (BINANT, 1991 : 81). À Shanidar (Iraq), R. Solecki a découvert un corps (Sh. 3) dans une crevasse parmi les pierres (SOLECKI, 1971 : 150). Plusieurs corps (Sh. 4, 6, 7, 8) semblent d’ailleurs avoir été placés dans une niche (SOLECKI, 1971 : 168-169). Les sépultures de cette période ne comprennent qu'un seul corps. Les pierres ou blocs calcaires sont suffisamment attestés pour que l'on puisse non seulement considérer leur présence comme intentionnelle, mais encore y voir le témoignage d'une pratique délibérée. En effet, certaines parties du corps, comme la tête, sont particulièrement concernées, comme c'est le cas à la Chapelleaux-Saints, La Ferrassie 1 où une pierre plate fut déposée entre le ventre et la cuisse droite, un autre bloc contre l'avant-bras gauche et deux ou trois autres à plat sur la tête du défunt (BREUIL, 1921 : 343). Certaines de ces sépultures ont parfois demandé des efforts importants aux membres du groupe. L’un des exemples les plus remarquables, à cet égard, est sans conteste celui de la grotte du Regourdou, en Dordogne. La couche IV – datée à 45.500 ± 1.800 B.P. – a, en effet, livré plusieurs structures, dont une sépulture abritant le corps d’un adulte de sexe indéterminé. Le défunt était placé dans une fosse peu profonde, sur un dallage de pierres plates. Ses bras étaient repliés, les mains posées au niveau du crâne. Il reposait sans doute sur des peaux d’ours. Fait curieux, le crâne était manquant, de même que les os de la jambe – alors qu’ont été conservés les os du tarse (os du pied) et du carpe. Il n’est pas possible de déterminer si ces os ont été ôtés lors des premières fouilles effectuées en 1957 par le propriétaire ou s’ils ont été enlevés au moment de l’inhumation. Il faut, en revanche, noter la présence de deux tibias d’ours brun dans le prolongement du bassin, à l’emplacement qu’auraient dû avoir les jambes si elles avaient été en extension. Un bloc avait été posé sur la poitrine du défunt, sur lequel se trouvaient divers objets (un éclat, un nucléus, un très beau racloir et un fragment d’humérus d’ours). Mais le fait le plus remarquable est que cette sépulture avait été couverte par un « tumulus » formé de blocs de pierre, de sable et de cendre. Ces blocs de pierre en grès, de plusieurs kilos chacun, avaient été amenés de l’extérieur de la grotte, et constituaient une superstructure de près de 1 m de haut. Au-dessus de ce « tumulus » avait été déposé un bois de cerf élaphe. Enfin, et comme cela a parfois été observé pour d’autres sépultures du Paléolithique moyen, un petit foyer avait été allumé pardessus (BONIFAY, 2002). Mais cette sépulture n’était pas la seule structure archéologique remarquable. Au sud de ce « tumulus » se trouvait une fosse aménagée entre des dalles tombées du plafond et des murs en pierre, dont tous les « vides » avaient été soigneusement comblés à l’aide de cailloux. La fosse avait une forme subrectangulaire (1,5 x 0,60 m) et contenait les restes presque complets, mais désarticulés avant le dépôt, d’une jeune femelle d’ours brun. Le crâne se trouvait entre trois pierres formant un coffrage protecteur. Enfin, la fosse était couverte par une grande dalle calcaire subtriangulaire pesant environ 800 kg, et qui devait nécessairement avoir été déplacée sur une distance d’environ 2 ou 3 m. Entre cette 5 fosse et la sépulture se trouvait, en outre, un mur sur lequel reposait la dalle de couverture de la fosse. Enfin, sur la grande dalle, contre la paroi ouest de la grotte, avait été soigneusement aménagé un coffrage, limité par deux dalles posées de chant, dans lequel gisaient de nombreux restes appartenant à sept ours brun, les restes incomplets de deux crâne d’ours et un crâne de cerf. Il n’est pas inintéressant de souligner l’association homme, ours et cerf – également présent sur le tumulus qui recouvrait l’individu (BONIFAY, 2002). Cet exceptionnel ensemble témoigne non seulement de l’existence de travaux collectifs concertés, mais aussi de pratiques différées dans le traitement de la mort. L’individu du Regourdou a évidemment subi cette manipulation des os après décharnement. Celui-ci atteste d’ailleurs – et c’est le dernier point – la relation symbolique particulière liant l’homme et l’ours. La présence de mobilier funéraire associé à la dépouille inhumée souligne, pour cette humanité, la volonté de laisser des objets à la disposition du disparu, surtout lorsque, comme à la Quina 1, les instruments retrouvés – des racloirs, des pointes à base plus ou moins épaisse, un gros sphéroïde en calcaire et quelques os de ruminants et de cheval entaillés et utilisés – étaient, aux dires mêmes de l'inventeur, d’excellente qualité par rapport aux instruments recueillis dans le gisement (HENRI-MARTIN, 1911). Dans bien des cas, soit par préjugé, soit par l'imprécision des observations, la relation entre défunt et mobilier n'est pas assurée. Il importe, en effet, de garder à l'esprit que la fosse a pu être comblée avec des sédiments mêlés aux débris divers qui jonchaient le sol d'habitat ou, plus simplement, que l'archéologue a pu intégrer des restes appartenant à une couche d'habitat indépendante de la sépulture. Il reste que, dans certains cas, l'association entre des instruments de pierre ou d'os et le défunt inhumé ne fait aucun doute. Un petit bloc calcaire ainsi qu'un nodule de substance carbonifère (1,27 x 1,9 cm) ont, par exemple, été mis au jour à proximité du pied gauche du bébé de Shanidar (Sh. 0), tandis qu’une grande pièce en silex se trouvait à 5 cm de son crâne (SOLECKI, 1971 : 99). Si le mobilier funéraire est indubitable, la présence d'offrandes alimentaires reste, en revanche, problématique. À la Chapelle-aux-Saints, les inventeurs ont mis au jour trois ou quatre grands fragments plats d'os long audessus du crâne et l'extrémité d'un métatarsien de grand bovidé plus au-dessus (BOUYSSONIE & BARDON, 1908 : 517). Mais, comme le remarque bien Fabienne May (1986 : 11), les auteurs ne disent pas «sur» le crâne, mais «au-dessus», ce qui n'est pas la même chose. Quant aux prétendus restes osseux découverts à proximité du crâne et de la poitrine dans la sépulture 1 du Moustier par l'antiquaire suisse O. Hauser en 1908, dont on sait l'intérêt pour la valeur marchande des trouvailles archéologiques, on ne peut guère en faire état sans de sérieuses réserves (VALLOIS, 1939 ; MAY, 1986 : 6). Pour le Proche-Orient, la relation entre le défunt et des offrandes alimentaires est sans équivoque. Dans la sépulture 5 de Skhul, Mac Cown a découvert une mandibule de grand sanglier à proximité des deux avant-bras de l’inhumé, et dans la sépulture 9 du même gisement, à l'emplacement des jambes, se trouvait le crâne presque complet d'un grand bovidé auquel manquait toutefois l'extrémité postérieure et les cornes (MAC COWN, 1937 : 101-103). À Shanidar, plusieurs défunts étaient associés à des restes de grands mammifères (SOLECKI, 1971 : 160-161 et 172). Enfin, d'autres types de documents soulignent encore la codification complexe à laquelle le phénomène de la mort était soumis. À cet égard, la sépulture de Shanidar 4 a sans nul doute impressionné le plus la communauté 6 scientifique. Au moment de la découverte, l'inventeur récolta une série d'échantillons de sédiments tout autour des corps. Arlette Leroi-Gourhan, qui les analysa, y releva la présence d'une quantité anormalement importante de pollens appartenant à huit espèces de fleurs, parmi lesquelles se trouvaient une achillée, un séneçon à fleur jaune, plusieurs centaurées et une petite liliacée à fleur bleue. Enfin, les échantillons contenaient, en outre, des pollens d'uvette (Ephedra altissima), un arbrisseau dont les nombreux rameaux souples auraient pu servir de litière pour les corps, ainsi que des pollens de malvacées appartenant au genre Althaea, du type rose trémière. Ces plantes fleurissent actuellement aux environs du mois de mai ou de juin dans le mont Zagros, et on peut donc avancer – compte tenu de l'analyse pollinique et des datations radiométriques – que le défunt a été inhumé sur une litière de fleurs de diverses couleurs entre la fin mai et le début juillet, il y a plus de 50.000 ans (ARL. LEROI-GOURHAN , 1968). 4. LES CULTES FUNÉRAIRES DE L’HOMME DE CRO-MAGNON L’homme de Cro-Magnon, qui apparaît en Afrique vers 200.000 ans, est présent au Proche et au Moyen-Orient entre 130.000 et 100.000 ans. Dès ce moment, on enregistre les premières sépultures assurées à Skhul (GRÜN et al., 2005), puis à Qafzeh (YOKOHAMA et al., 1997), soit quelque cinquante millénaires avant les plus anciennes sépultures néandertaliennes. En Europe, il est acquis que l’homme de Cro-Magnon a pratiqué de multiples traitements pour gérer ses défunts. L’un d’eux – la sépulture – permettait sans aucun doute de leur assurer une survie confortable. Une cinquantaine de sites ont donné plus de 100 sépultures certaines ou probables. Le nombre de sépultures s'accroît donc de façon notable par rapport au Paléolithique moyen, sans que l'on puisse savoir si cette augmentation traduit le souci d'enterrer davantage, si elle provient d'une croissance démographique plus importante ou si elle résulte d'une meilleure conservation due au moins grand nombre de millénaires. Ces sépultures sont bien souvent aménagées en grotte, même si elles ne sont pas rares dans des sites de plein air, comme à Dolní Vĕstonice près de Brno (Moravie), ou à Šungir (Russie), par exemple. Un site peut abriter plusieurs défunts, ce qui suggère qu’un espace particulier leur était dévolu. Le célèbre site de Cro-Magnon (Dordogne), par exemple, contenait les restes de quatre individus (trois adultes et un nouveau-né). Au Proche-Orient, les grottes de Mugharet es-Skhul (la grotte du chevreau) au mont Carmel et de Qafzeh contiennent respectivement dix et seize individus (BINANT, 1991 : 4-32). La fosse contient généralement un seul défunt. Il existe, pourtant, des sépultures doubles (Grotte des Enfants à Grimaldi en Ligurie ou à Šungir en Russie), des sépultures triples (Barma Grande en Ligurie ou Dolní Vĕstonice en Moravie), ainsi que des espaces funéraires où les défunts ont été rassemblés. Tous les gisements ayant livré des restes humains ne peuvent pour autant pas être considérés comme des sépultures. À Předmostí (Moravie), les restes partiels d’une vingtaine d’individus ont été rassemblés dans un même espace. Les os ne se trouvaient pas en connexion anatomique, et il est démontré aujourd’hui qu’ils ont été amenés à cet endroit après décharnement (OLIVA, 20002001). À la grotte Polesini (Ligurie), les archéologues ont mis au jour les restes de quinze individus. La grotte Romanelli (Otrante) en a livré douze ; les abris Lachaud, Pataud et Cro-Magnon (Dordogne) respectivement neuf, sept et cinq ou six, et la grotte Continenza (Abruzzes) quatre (PALMA DI CESNOLA, 2001 : 2517 306, id., 2003). On le voit, cette situation n’est pas rare, et il n’est pas toujours aisé de déterminer le traitement funéraire effectué. La volonté de protéger le défunt est une constante durant le Paléolithique supérieur, comme cela apparaît, par exemple, à Qafzeh où les restes d'un adulte (Q 8) gisaient dans une anfractuosité naturelle du rocher (VANDERMEERSCH, 1981 : 32). Les fosses sont généralement peu profondes, et il n’est d’ailleurs pas rare que le défunt ait été déposé dans une cuvette ou en fonction d’une déclivité naturelle du sol, probablement pour que soit épargné le difficile travail de creusement. On peut dès lors s’étonner du fait que les restes de ces dépouilles n’aient pas été prélevés par les nombreux carnassiers d’alors. Les os du squelette sont, en effet, presque toujours en connexion anatomique et ne comportent qu’exceptionnellement des traces de rongement. C’est qu’une structure de protection recouvrait dans bien des cas les défunts. Celle-ci peut être constituée par un cordon de blocs de pierre ou par une couverture de pierre, comme cela a été observé à Duruthy (Landes) (LARTET & CHAPLAIN-DUPARC, 1874 : 136). Il est d’ailleurs intéressant de noter que la tête reçoit souvent une protection particulière, comme cela a été mis en évidence pour l’enfant de La Madeleine (Dordogne), dont la tête était protégée par un bloc calcaire et deux galets de quartzite formant un demi-cercle (PEYRONY, 1928). Cette structure de protection prend d’ailleurs parfois la forme d’un véritable caisson. À Mal’ta (Sibérie), deux dalles posées de chant et couvertes par une troisième protégeaient un enfant d’environ 3 ans (GOLOMSHTOK, 1933 : 345346, fig. 9). Une structure de ce type a également été observée à l’abri Tagliente (Vénétie) et à Saint-Germain-la-Rivière (Gironde), où une jeune femme de 25 ans a été déposée, il y a une quinzaine de millénaires, dans une structure formée de grosses dalles calcaires (BLANCHARD, PEYRONY & VALLOIS, 1972 : 14-17), qui évoque d’ailleurs davantage la chambre funéraire d’un dolmen qu’un caisson. Il est également significatif qu’en Europe centrale et orientale la superstructure ait été fréquemment construite avec des ossements de mammouth. Dans la sépulture de Kostienki 18 (site de Khvoiko), le défunt était recouvert par trois niveaux d'ossements de mammouth : le premier niveau comprenait des os longs disposés parallèlement entre eux, le second des os longs posés le long de la fosse et le troisième deux omoplates et deux tibias agencés au niveau du crâne et de la poitrine du défunt (PRASLOV & ROGATCHEV, 1982 : 187, fig. 66). Ces constatations suggèrent que la maison du mort était faite avec les mêmes matériaux que celle des vivants. Dans la sépulture de Kostienki 15 (site de Gorodtsov), un gros fragment d'omoplate de mammouth recouvrait les membres inférieurs d’un juvénile de 6 ou 7 ans. De plus, des os longs de chevaux disposés verticalement à proximité du sommet de la fosse ovale ont dû constituer les restes d'un recouvrement. Mais le fait le plus étonnant est la position de l’enfant. Celuici était assis sur un « siège » fabriqué au départ d’argile de couleur différente (ROGATCHEV, 1959 ; SINITSYN, 2004). Des indices archéologiques permettent d’avancer que les défunts étaient habillés de vêtements lors de l’inhumation, et certains d’entre eux semblent avoir été déposés sur une pièce de fourrure. En effet, les fouilleurs ont noté la présence de poils dans les grottes ligures du Cavillon (RIVIÈRE, 1872) et de Baousso da Torre 2 (VILLENEUVE et al., 1906-1919, II, 1 : 32). Quant aux vêtements, ils peuvent être déduits de la présence occasionnelle d’éléments servant à attacher ou à fermer les pièces de peau, comme les grandes épingles trouvées sous le menton des deux enfants de Šungir et peut-être les anneaux en pierre découverts dans la 8 sépulture de l’homme adulte de Brno 2. Exceptionnellement, la présence d’éléments de décoration cousus sur les pièces de cuir permet de se représenter la forme du vêtement dont était habillé le défunt. Le corps des deux enfants de la grotte du même nom était recouvert depuis la région de l’ombilic jusqu’au tiers supérieur des cuisses par un millier de nasses percées qui évoquent un pagne ventral rehaussé par ces coquillages (HENRY-GAMBIER et al., 2001). À Šungir 2, le thorax de l’homme adulte était couvert par 1.500 perles en ivoire de mammouth réparties en six rangées, tandis que des traces précisément relevées par les fouilleurs ont permis de déterminer que le défunt était habillé d’un pantalon (ALEXEEVA & BADER, 2000). D’autres éléments décoratifs, sans doute cousus sur le vêtement, ont encore parfois été retrouvés, comme des queues d’écureuil en relation avec plusieurs défunts aux Arene Candide (PALMA DI CESNOLA, 2003 : 137) ou deux doigts de cervidé sur la face postérieure du bassin de l’aîné des enfants (entre 2 et 4 ans) de la grotte des Enfants (HENRY-GAMBIER, 2001 : 120). Enfin, certains défunts semblent avoir été emballés dans un linceul – parfois fermé par une épingle d’ivoire –, comme c’est le cas pour les deux nouveau-nés et le bébé découverts à Krems-Wachtberg (Autriche) (EINWÖGERER et al., 2006 ; EINWÖGERER et al., 2009). Les défunts des deux sexes et de tous âges ont été très souvent richement parés de colliers de coquillages divers ou de canines d’animaux variés, de bracelets, de chevillières ou de jambelets. À Baousso da Torre 2, un homme adulte portait un somptueux pectoral composé de 162 coquilles percées (nasses, cardiums, cyprées, buccins et cérithes) et de craches de cerf. De même, l’adolescent de la Barma Grande 2 était paré d’un bijou formé par une série de vertèbres de poisson, de craches de cervidé et de nasses agencées en un superbe pectoral à plusieurs rangs (PALMA DI CESNOLA, 2003). En Europe orientale, les bijoux sont également présents, mais ils sont fréquemment réalisés en ivoire de mammouth ou en os. L’enfant de 3 ans de Mal’ta (Sibérie) possédait un diadème en os et ceux de Šungir 4 (Russie), de 7 et 12 ans, un diadème en ivoire. Ils étaient d’ailleurs aussi parés de bracelets en ivoire, et ceux de Šungir 4 de bagues en ivoire. Ces bijoux en ivoire devaient avoir une réelle valeur, tout comme certaines parures composées de coquillages. On sait, du reste, que les groupes du Paléolithique supérieur pratiquaient entre eux des échanges de matières premières ou de produits transformés : les tests de mollusques, fossiles ou non, ont occupé, à cet égard, une place prépondérante (TABORIN, 2004). L’enfant de la Madeleine, par exemple, a été paré de coquillages provenant non seulement de la façade atlantique (Neritina, Turitella et Dentalium), mais aussi de la Méditerranée (Cyclote neritea) (TABORIN, 1982). Richement vêtu et paré de ses plus beaux atours, le défunt a également bien souvent été saupoudré avec un pigment pulvérulent de couleur rouge intense : l’hématite. Ce rite funéraire n’est pas rare au Paléolithique supérieur, puisque la moitié environ des sépultures en contient (GROENEN, 1991, 1997). Dans certains cas, le défunt a été complètement enveloppé par cette poudre colorante (Chancelade, Cavillon ou Kostienki II). Dans d’autres, il en était seulement recouvert (la Madeleine, Saint-Germain-la-Rivière ou Baousso da Torre 2). Parfois encore, il avait été couché sur un lit d’hématite pulvérulente (Arene Candide, Šungir 3 et 4). Mais il arrive aussi qu’une partie du corps seulement soit concernée. On en retrouve alors au niveau de la tête (Barma Grande 1, Les Enfants 3 ou Šungir 1) ou – mais en Moravie uniquement – à la fois sur la tête et dans la région du pubis (Dolní Vĕstonice 15 et 16). 9 Le mobilier funéraire, quant à lui, n’est pas rare. Il comprend des instruments en pierre taillée ou en bois de renne qui, pour avoir été parfois réalisés dans des matières précieuses ou rares, n'en sont pas moins ceux que l'on découvre dans les couches d'habitat. Il ne faudrait cependant pas croire, comme on l'a avancé, que le mobilier aurait pu appartenir au défunt de son vivant et n'être donc pas lié à des croyances de survie : l’une des sépultures de Šungir (n° 4) contenait deux enfants inhumés tête contre tête avec deux longues lances en défense de narval, onze javelots, trois poignards, plusieurs disques, le tout en ivoire de mammouth, ainsi que deux bâtons percés et des aiguilles en bois de renne. Le matériel était en excellent état et ne semble pas avoir servi. La situation est identique au Proche-Orient. À Qafzeh 8, le défunt était accompagné de beaux instruments lithiques (VANDERMEERSCH, 1981). À Brno 2, un riche mobilier, composé de disques de pierre perforés et d’une statuette masculine articulée en ivoire, était associé aux restes d'un adulte (OLIVA, 2000-2001 : 191-214). À Šungir 4, O. Bader a découvert sur la poitrine de l'aîné une figurine représentant un cheval en os, décorée de cupules (BADER, 1971 : 337-338, fig. 4,4). Quant aux offrandes alimentaires, et malgré les avis positifs des préhistoriens, elles sont difficiles à démontrer. Bien entendu, les restes d’animaux ne sont pas rares, et en particulier ceux de bovidés et d’équidés. Pourtant, ces restes sont souvent représentés par les parties les moins charnues de l’animal. On trouve, par exemple, des fragments de mâchoires de renne (Bruniquel ou Barma Grande 4) ou de cervidé (grotte du Cavillon), ou encore les restes de maxillaire supérieur de jeune bouquetin (Bruniquel). Dans bien des cas, les dents seules sont présentes – cheval à Brno 2 et à Bruniquel, bovidé à Brno 2, Barma Grande 1 et Cavillon (Ligurie), cervidé ou chèvre à la Barma Grande 1. Parfois encore, ce sont des fragments de cornes de bovidé (Saint-Germain-la-Rivière [Gironde] ou Romito 2 [Calabre]) (PALMA DI CESNOLA, 2003) ou de bois de cervidé – en particulier ceux du renne – (Bruniquel ou Saint-Germain-la-Rivière) que les archéologues ont trouvés associés au défunt. Il faut bien l’avouer, ces éléments sont peu nutritifs, et l’interprétation comme offrande alimentaire n’est guère convaincante. On s’attendrait davantage à découvrir les restes osseux de parties charnues comme l’épaule ou la cuisse de l’animal. Enfin, dans la sépulture de Lagar Velho au Portugal, les fouilleurs ont mis au jour les restes d’un enfant de 5 ans. Le squelette d’un lapereau était posé à côté du tibia droit et un pelvis de cerf se trouvait à chacune des extrémités du jeune défunt (ZILHÃO & TRINKAUS, 2002). Une fois encore, ces trouvailles ne sont pas décisives. Il faut, tout d’abord, rappeler que – sauf exception – le lapin n’est pas consommé par les populations paléolithiques. Quant aux pelvis de cerf, les découvreurs admettent eux-mêmes qu’ils pourraient appartenir à un dispositif de protection ou de soutien. La prudence est, du reste, également de mise pour les fragments de bassin et les phalanges de renard polaire exhumés à Dolní Vĕstonice 2 (KLÍMA, 1960 : 7-14) : cet animal était chassé pour sa fourrure – ce qu’indique d’ailleurs la présence des phalanges –, mais ne semble pas avoir été consommé par ces populations (absence de traces de décarnisation). Il arrive pourtant que ces parties soient présentes. Mais même dans ce cas, on ne saurait conclure trop rapidement. Le fémur de bovidé sur lequel reposait la tête de la femme dans la triple sépulture de la Barma Grande 2 rappelle bien davantage l’appuie-tête en pierre de certaines inhumations de la même époque que les restes d’une pièce de viande destinée à la défunte. Il est, de même, difficile de déterminer si les fragments d'oeuf d'autruche – très rares au Proche-Orient – qui se trouvaient sur la poitrine du jeune défunt de Qafzeh 11 (VANDERMEERSCH, 1970) 10 relèvent du registre du mobilier ou d’offrandes alimentaires. Au total, peu d’éléments peuvent être, en toute sécurité, interprétés comme des offrandes alimentaires. Ce n’est pas dire qu’elles n’ont pas existé : les matières organiques sont condamnées à disparaître rapidement sans laisser de traces perceptibles. En outre, quelques documents résistent à la critique. C’est, entre autres, le cas pour un fragment de côte de cheval présentant des traces de brûlures, qui se trouvait dans la bouche de la femme dans la sépulture triple de Dolní Vĕstonice, ou pour le péroné de cheval disposé à proximité du jeune homme de la sépulture de Gough’s Cave, dans le Somerset. Tout se passe donc comme si certains défunts étaient en condition de pouvoir survivre après leur décès. Nous disposons d’ailleurs d’informations archéologiques complémentaires qui nous en apportent la confirmation. Dans la grotte du Cavillon (Ligurie), le défunt était entièrement recouvert d’une couche d’hématite rouge particulièrement épaisse au niveau de la tête. À cet endroit, un sillon avait été aménagé de la bouche et des fosses nasales vers l’extérieur du visage, avant d’être rempli de poudre d’hématite grise (RIVIÈRE, 1872 : 1207). Il est difficile de ne pas relever le fait que l’accent ait été mis sur les deux éléments qui rendent possibles les échanges vitaux avec le monde extérieur : le nez et la bouche. Mais les yeux semblent également avoir retenu l’attention. Au Mas d’Azil (Ariège), un crâne humain sans sa mandibule fut découvert dans un couloir, à l’entrée de la galerie Breuil. Il était associé à un fragment de bois de renne, à une partie de mâchoire de bison, ainsi qu’à quelques restes osseux d’animaux. Dans l’orbite gauche de ce crâne se trouvait une rondelle découpée dans une vertèbre lombaire de cervidé. Une autre rondelle, malheureusement brisée, correspondant à l’orbite droite fut récupérée à proximité du crâne par le fouilleur (VALLOIS, 1961). Il est évidemment difficile de déterminer si ces rondelles osseuses étaient destinées à simuler les yeux du défunt ou si, au contraire, elles avaient pour fonction de les fermer, mais il est évident qu’elles cristallisent une intention précise en relation avec cet organe des sens. Enfin, une dernière catégorie de faits archéologiques va nous permettre de mettre en évidence l’existence d’une métaphysique liée à la survie du défunt : l’immobilisation du corps par des liens ou par des blocs de pierre. Si certains individus ont été inhumés en décubitus dorsal ou latéral, il n’est pas rare de trouver des sépultures dans lesquelles le cadavre se trouve en position fléchie forcée. À Chancelade (Dordogne), un homme âgé de 50 à 60 ans a été déposé dans une fosse dont les dimensions étaient d’à peine 67 cm de long sur 40 cm de large (BRUN, 1867 : 10-11). Les os étaient en connexion anatomique, et il n’est donc pas possible d’envisager le rite de l’inhumation secondaire. Plus étonnant encore, la femme d’environ 25 ans de Bruniquel (Tarn-et-Garonne) avait les jambes rabattues vers le haut du corps, de sorte que ses pieds se trouvaient à côté de sa tête (BRUN, 1865). Dans ces cas, le corps a nécessairement dû être attaché avec des liens, et ceux-ci ont dû imposer au corps sa position recroquevillée avant la mise en place du processus de rigidité cadavérique qui commence vers la 3 e heure après le décès de l’individu. Certains défunts ont même pu être entièrement ligotés ou emmaillotés. L’homme adulte de la grotte Continenza (Abruzzes) avait non seulement les jambes fortement repliées, mais aussi les bras croisés sous le ventre. Il importe d’ailleurs de remarquer que la tête de l’individu avait été ôtée et remplacée par deux pierres posées sur un « coussin » de petites pierres, donnant à cette sépulture une dimension particulièrement insolite (GRIFONI CREMONESI, 1998, 2003). 11 Bien entendu, plutôt que d’envisager l’idée selon laquelle l’homme du Paléolithique a voulu immobiliser le corps, on pourrait alléguer la volonté qu’il avait de réduire les dimensions d’une fosse, dont on sait qu’elle devait lui coûter beaucoup d’efforts. Mais cette interprétation ne tient pas, car il est des cas où des blocs de pierre ont été placés sur le défunt. À la Barma Grande I (Ligurie) ou à Vado all’Arancio (Toscane), les défunts – un homme adulte dans le premier gisement, un enfant d’environ 2 ans dans le second – avaient un bloc posé sur le thorax. À Paglicci 2 (Pouilles), un bloc était posé sur les jambes du défunt, tandis qu’aux Arene Candide (Ligurie) le bloc était posé sur ses bras. La volonté d’immobiliser l’individu – peu importe qu’il s’agisse d’un homme, d’une femme ou d’un enfant – est ici manifeste. C’est dire que s’il est respecté et protégé, le défunt peut aussi être craint, et il ne fait donc aucun doute qu’il continue à vivre dans un monde qui lui appartient, après sa mort physique. 5. LES ÊTRES DU MYTHE, LA DANSE DES RITES La constatation d’une survie après la mort est particulièrement intéressante pour notre propos, car elle suggère l’existence d’une « métaphysique ». Le fait est banal tant il est connu, tous les groupes culturels ont élaboré un canevas d’explications, souvent fort complexe et formant système, par lequel les hommes donnent un sens à leur existence et justifient tout à la fois la raison d’être actuelle des choses et la place qu’ils occupent dans le monde. Ce système s’élabore sur la base de récits sacrés – les mythes – dont le contenu relate bien souvent des événements de première importance. Ceux-ci ont eu lieu au « temps des origines » et font intervenir des Êtres surnaturels (ELIADE, 1963 : 16-17, MALINOWSKI, 1968 : 126-135). La connaissance de ces mythes nécessite évidemment le recours au texte écrit ou à la tradition orale, ce qui est impossible pour l’époque du Paléolithique. Pourtant, les hommes de cette période nous ont laissé des bribes de leurs traditions dans les œuvres figurées sur les parois des grottes ou sur de petits supports en pierre, en bois de renne ou en ivoire de mammouth : les premières appartiennent au domaine de l’art pariétal, les secondes à celui de l’art mobilier. Certaines de ces représentations figurent des créatures qui n’ont pas existé. Le fait est d’autant plus troublant que les « artistes » du Paléolithique supérieur ont atteint un très haut niveau graphique, en particulier dans le rendu anatomique des animaux représentés. La précision de certains détails est telle que l'on peut le plus souvent déterminer non seulement le genre auquel l’animal appartient, mais aussi l’espèce à laquelle il se rattache ; et il n’est donc pas possible de voir dans ces figures irréelles le produit maladroit d’exécutants peu doués. Mais dans la mesure où les êtres représentés montrent des caractères en décalage par rapport au réel, nous pouvons penser que ces œuvres renvoient à des créatures surnaturelles, dont la présence est tellement constante, en particulier dans les mythes d’origine. Celles-ci peuvent être subdivisées en deux catégories : les « animaux » irréels et les créatures composites. La première comprend des êtres totalement imaginaires, la seconde des créatures formées de segments anatomiques appartenant à des êtres vivants de genres différents (BÉGOUËN, 1993 : 201-210, GROENEN, 2004 : 34-35). Ces motifs sont encore peu nombreux par rapport aux figures du bestiaire habituel. On relève une dizaine d’êtres irréels et le même nombre d’animaux composites dans tout l’art du Paléolithique supérieur. Il est vrai que les préhistoriens ne les ont pas vraiment cherchés, conduits qu’ils étaient par l’idée 12 selon laquelle les hommes de la préhistoire n’ont pu représenter que ce qu’ils voyaient (GROENEN, 2007). Les animaux irréels ne présentent pas de caractères formels récurrents. Chacun d’eux est donc unique, et l’on pourrait dès lors aussi bien y voir des produits de l’imagination créatrice des artistes. Il en va de même pour la plupart des figures composites, y compris pour celles que l’on trouve en plusieurs exemplaires sur le même objet mobilier (les « hommes-chamois » sur bâton percé de Teyjat [Dordogne]) ou dans la même grotte ornée (les « hommestaureaux » de la grotte du Gabillou [Dordogne]). Si l’on est bien, dans ces deux cas, devant une créature dont les caractères sont en décalage par rapport au réel, leur présence dans un seul gisement ne permet pas de leur accorder le statut de thème iconographique. Il faut, en effet, pour définir un thème iconographique, un motif ayant au moins deux attributs récurrents, et présent dans un espace géographique suffisamment vaste pour que l’on soit en droit d’accorder à ce motif une valeur culturelle. Or, de tels motifs existent au Paléolithique supérieur, tant dans l’art mobilier que dans l’art pariétal. Dans le Bade-Württemberg, l’une des grottes du Stadel, appelée Hohlenstein, a livré une statuette en ivoire de mammouth de 28 cm. Elle représente un être composite dont la tête est celle d’un lion et le reste du corps celui d’un homme. Cette ronde-bosse a été trouvée au fond de la grotte, dans une couche aurignacienne datée à environ 30.000 ans avant notre ère. L’œuvre a été mise au jour en août 1939, mais elle n’a vraiment été reconnue comme telle qu’après une soigneuse restauration effectuée en 1987 (SCHMID, 1989). Beaucoup plus récemment, entre 1999 et 2001, dans la même région, la grotte de Hohle Fels a livré une petite statuette en ivoire de mammouth d’environ 5 cm de haut, figurant également un « homme-lion ». Comme celle de Hohlenstein, la statuette se compose d’une tête dont la ligne générale est celle du lion, tandis que le corps, les bras et les jambes sont indubitablement humains (CONARD, 2003). La statuette de Hohle Fels remonte également à l’Aurignacien et, comme l’autre, elle a été datée aux environs de 30.000 ans avant notre ère. Étant donné les similitudes de ces deux œuvres, il semble légitime d’y voir un thème iconographique figurant un être surnaturel propre à des groupes aurignaciens du sud-ouest de l’Allemagne. Plus nombreuses dans l’art pariétal que dans l’art mobilier, les figures composites peuvent être subdivisées en deux sous-catégories : les êtres composites zoomorphes et les êtres composites anthropozoomorphes. Les premières articulent des segments anatomiques appartenant à des animaux de genres différents, les secondes mêlent une ou plusieurs parties animales à une partie du corps humain. Parmi les composites zoomorphes, on doit relever un être « cheval-aurochs », caractérisé de façon allusive par l’ajout de cornes et/ou de sabots bisulques à un animal dont la tête, l’encolure, le corps, les pattes et la queue appartiennent indiscutablement au cheval. Ce thème iconographique est présent dans un territoire relativement vaste. On le trouve dans les grottes des Combarelles I et de Lascaux en Dordogne, à Pergouset dans le Lot, à Ekaïn dans le Pays basque espagnol et dans les grottes d’El Castillo et de Hornos de la Peña en Cantabrie. Dans la mesure où il s’agit d’art sur paroi rocheuse, la datation reste actuellement difficile à préciser, puisque ces œuvres se trouvent en dehors de tout contexte archéologique. Néanmoins, le nombre de figures connues appartenant à ce thème iconographique et leur large distribution éclairent sur son importance. La présence d’une créature « cheval-aurochs » n’est d’ailleurs pas inintéressante. Car, comme l’ont montré jadis A. Laming-Emperaire et A. Leroi-Gourhan, le couple 13 animal fondamental est précisément constitué par la dyade cheval–bovidé (aurochs ou bison). Les figures anthropozoomorphes connues en plusieurs exemplaires dans des sites différents comprennent, dans l’état actuel de nos recherches, un « homme-oiseau » et un « homme-bison ». L’homme-oiseau a été repéré dans la scène du Puits de la grotte de Lascaux, sur le Grand Plafond de la grotte cantabrique d’Altamira et dans la grotte d’Addaura en Sicile. À Lascaux et à Altamira, le motif articule une tête d’oiseau, bien reconnaissable à son bec, à un corps, aux bras et aux jambes d’un être humain. En outre, le sexe, masculin, est en érection. Quant à la scène de la grotte d’Addaura, elle présente une série de personnages dans l’attitude de la danse, formant un cercle autour de deux protagonistes couchés sur le ventre aux jambes repliées, et dont la cheville est attachée au cou par un lien. Le sexe de ces deux hommes est dressé, à moins qu’il ne s’agisse d’un étui pénien. Mais la particularité de cette scène est que les personnages dansant ne sont pas de véritables « hommes-oiseaux ». Contrairement aux créatures composites de Lascaux et d’Altamira, ces hommes ont la tête recouverte par une sorte de cagoule affublée d’un bec d’oiseau. Si donc les figures des deux premiers sites sont bien des êtres surnaturels – et, comme tels, ils peuvent alors renvoyer à des créatures mythiques –, les personnages gravés à Addaura semblent plutôt faire partie d’un ensemble figurant une cérémonie au cours de laquelle des danseurs incarneraient ces « hommes-oiseaux » mythiques (GROENEN, 2004). Les mêmes conclusions frappent les figures composites d’« hommesbisons ». Ces motifs sont connus dans des grottes du sud de la France et du nord de l’Espagne : à Chauvet en Ardèche, aux Trois-Frères en Ariège et à El Castillo en Cantabrie. Dans tous ces cas, le motif se compose d’un être dont la tête et la partie supérieure du corps – poitrail et voussure dorsale – appartiennent au bison, et le reste – fesses et jambes – à l’humain. Même si la cheville se prolonge par un sabot dans le cas de la gravure des Trois-Frères, il est indubitable que nous nous trouvons devant une créature dont la partie inférieure est celle d’un homme. En effet, le sexe dressé se trouve en position inguinale comme c’est le cas chez l’homme, et non en position abdominale comme chez le bison. Enfin, la cuisse se prolonge par un genou qui permet de plier la jambe vers l’arrière et non par un jarret qui ramène la patte vers l’avant. Il faut d’ailleurs insister sur la cohérence formelle des figures composites dans l’art du Paléolithique supérieur. Quel que soit le thème figuré, toutes les figures anthropozoomorphes présentent les caractères de l’animal en partie haute et la forme humaine en partie basse. Il devait donc y avoir une codification très stricte dans la construction formelle des figures. Enfin, et comme nous l’avons relevé pour les « hommes-oiseaux » d’Addaura, il existe aussi dans la grotte des Trois-Frères une représentation d’homme dans l’attitude de la danse, et qui est revêtu d’une dépouille de bison. Ici encore, il nous semble légitime de penser que cette figure représente le protagoniste d’une cérémonie rituelle au cours de laquelle un personnage devait incarner la créature mythique de l’homme-bison (GROENEN, 2004). Au total, la documentation archéologique nous a permis de montrer l’existence d’une métaphysique – au sens le plus large du terme – au Paléolithique supérieur. En effet, les défunts inhumés dans des sépultures ont été bien souvent protégés par une superstructure faite dans des matériaux divers en fonction des régions. Ils ont reçu un mobilier funéraire varié parfois prestigieux et, dans certains cas, des offrandes alimentaires. En outre, ils ont eu les faveurs de 14 cérémonies au cours desquelles on saupoudrait, parfois abondamment, la fosse et/ou le cadavre d’hématite rouge. Mais surtout, s’ils ont été respectés, certains défunts de cette époque ont aussi été craints, comme le montrent les liens et les blocs de pierre destinés à les maintenir dans une position forcée ou à les immobiliser, et l’on peut donc considérer comme acquis le fait qu’ils fussent censés survivre après leur mort dans un autre monde. Par ailleurs, l’analyse de l’art pariétal et mobilier de cette période nous a permis de dégager des thèmes iconographiques figurant des créatures composites zoomorphes et anthropozoomorphes. Ces motifs sont élaborés sur la base de principes formels rigoureusement codifiés, et il n’est donc pas possible d’y voir le produit de l’imagination de quelque artiste. Dans la mesure où on les retrouve dans des sites différents, il est légitime de considérer ces êtres, dont les caractéristiques sont évidemment en décalage par rapport à l’ordre du réel, comme des protagonistes intervenant dans des récits mythiques. Dans ces conditions, les représentations d’êtres humains, couverts ou revêtus d’attributs d’animaux et figurés dans l’attitude de la danse, pourraient renvoyer à des cérémonies au cours desquelles l’être mythique devait intervenir. Bien entendu, le contenu de ces traditions ne peut guère être précisé davantage, mais il est remarquable que nous puissions déjà arriver à ce niveau de conclusion pour des populations qui ne nous ont pas laissé la moindre trace orale ou écrite de leurs croyances. BIBLIOGRAPHIE ALEXEEVA, T.I. & BADER, N.O. (2000). Homo sungirensis. Upper Paleolithic man: ecological and evolutionary aspects of the investigation. Moscou : Moscow Scientific World. ARSUAGA, J.-L. (1998). Los fósiles humanos de la Sima de los Huesos (Sierra de Atapuerca): su significado en la evolución humana. In E. AGUIRRE, Atapuerca y la evolución humana (pp. 171-192). Madrid : Centro de estudios Ramón Areces. BADER, O. (1971). Abitati dell'estremo Nord dell'Europa nel Paleolitico. 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