air. La présence de plusieurs sépultures dans un même site ne peut que souligner
la volonté d'un choix de la part des Néandertaliens. Ainsi, la grotte de Spy en
Belgique, l'abri du Moustier en Dordogne et la grotte de Kiik-Koba en Crimée ont
toutes trois livré deux sépultures. Mais certains sites en ont livré davantage : la
grotte d'Amud en Israël a livré les restes de cinq Néandertaliens, le grand abri de
La Ferrassie en Dordogne en a donné huit, Shanidar en Iraq neuf (BINANT, 1991 :
4-32). Le corps a été déposé dans une fosse spécialement aménagée pour le
recevoir ou dans une cuvette naturelle (DEFLEUR, 1993 : 249-250). Si l’on excepte
la situation de l'ancienne Union soviétique, le corps est le plus souvent orienté
d'est en ouest (BINANT, 1991 : 81). À Shanidar (Iraq), R. Solecki a découvert un
corps (Sh. 3) dans une crevasse parmi les pierres (SOLECKI, 1971 : 150). Plusieurs
corps (Sh. 4, 6, 7, 8) semblent d’ailleurs avoir été placés dans une niche (SOLECKI,
1971 : 168-169). Les sépultures de cette période ne comprennent qu'un seul corps.
Les pierres ou blocs calcaires sont suffisamment attestés pour que l'on
puisse non seulement considérer leur présence comme intentionnelle, mais encore
y voir le témoignage d'une pratique délibérée. En effet, certaines parties du corps,
comme la tête, sont particulièrement concernées, comme c'est le cas à la Chapelle-
aux-Saints, La Ferrassie 1 où une pierre plate fut déposée entre le ventre et la
cuisse droite, un autre bloc contre l'avant-bras gauche et deux ou trois autres à plat
sur la tête du défunt (BREUIL, 1921 : 343). Certaines de ces sépultures ont parfois
demandé des efforts importants aux membres du groupe. L’un des exemples les
plus remarquables, à cet égard, est sans conteste celui de la grotte du Regourdou,
en Dordogne. La couche IV – datée à 45.500 ± 1.800 B.P. – a, en effet, livré
plusieurs structures, dont une sépulture abritant le corps d’un adulte de sexe
indéterminé. Le défunt était placé dans une fosse peu profonde, sur un dallage de
pierres plates. Ses bras étaient repliés, les mains posées au niveau du crâne. Il
reposait sans doute sur des peaux d’ours. Fait curieux, le crâne était manquant, de
même que les os de la jambe – alors qu’ont été conservés les os du tarse (os du
pied) et du carpe. Il n’est pas possible de déterminer si ces os ont été ôtés lors des
premières fouilles effectuées en 1957 par le propriétaire ou s’ils ont été enlevés au
moment de l’inhumation. Il faut, en revanche, noter la présence de deux tibias
d’ours brun dans le prolongement du bassin, à l’emplacement qu’auraient dû
avoir les jambes si elles avaient été en extension. Un bloc avait été posé sur la
poitrine du défunt, sur lequel se trouvaient divers objets (un éclat, un nucléus, un
très beau racloir et un fragment d’humérus d’ours). Mais le fait le plus
remarquable est que cette sépulture avait été couverte par un « tumulus » formé de
blocs de pierre, de sable et de cendre. Ces blocs de pierre en grès, de plusieurs
kilos chacun, avaient été amenés de l’extérieur de la grotte, et constituaient une
superstructure de près de 1 m de haut. Au-dessus de ce « tumulus » avait été
déposé un bois de cerf élaphe. Enfin, et comme cela a parfois été observé pour
d’autres sépultures du Paléolithique moyen, un petit foyer avait été allumé par-
dessus (BONIFAY, 2002).
Mais cette sépulture n’était pas la seule structure archéologique
remarquable. Au sud de ce « tumulus » se trouvait une fosse aménagée entre des
dalles tombées du plafond et des murs en pierre, dont tous les « vides » avaient été
soigneusement comblés à l’aide de cailloux. La fosse avait une forme
subrectangulaire (1,5 x 0,60 m) et contenait les restes presque complets, mais
désarticulés avant le dépôt, d’une jeune femelle d’ours brun. Le crâne se trouvait
entre trois pierres formant un coffrage protecteur. Enfin, la fosse était couverte par
une grande dalle calcaire subtriangulaire pesant environ 800 kg, et qui devait
nécessairement avoir été déplacée sur une distance d’environ 2 ou 3 m. Entre cette