origines et modes d`utilisation des célébrités par la publicité

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Doctorat de l'Université Paris 1 - Panthéon Sorbonne
Thèse de Sciences de Gestion - Spécialisation Marketing
présentée et soutenue publiquement le 29 Janvier 1993 par Jean-Marc LEHU
ORIGINES ET MODES
D'UTILISATION
DES CÉLÉBRITÉS
PAR LA PUBLICITÉ
tome 1/2
Président du Jury : M. le Professeur Henri MERCILLON
(Professeur à l'Université PARIS 1 - Panthéon Sorbonne)
Suffragants 
M. le Professeur Pierre GREGORY
(Professeur à l'Université PARIS 1 - Panthéon Sorbonne)
Mlle le Professeur Claire OPSOMER
(Professeur à l'Université PARIS 1 - Panthéon Sorbonne)
M. le Professeur Jean-Claude GILARDI
(Professeur à l'Université de NANCY II - Pôle Lorraine de Gestion)
Mme Claudine de FRANCE
(Chargée de Recherches au Centre National de la Recherche Scientifique)
L'Université de PARIS 1 - Panthéon Sorbonne
n'entend donner aucune approbation ni
improbation aux opinions émises dans les
thèses ; ces opinions doivent être considérées
comme propres à leurs auteurs.
Université Paris 1 - Panthéon Sorbonne . U.F.R. 06 - Gestion Sorbonne . Paris 1993
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Sujet :
Origines et modes d'utilisation des célébrités par la publicité
Résumé :
Les célébrités ne sont pas monotypes. Par leur diversité et l'évolution de leurs
caractéristiques, elles doivent mener à des choix et des modes d'utilisation
différents et de plus en plus adaptés aux spécificités de la stratégie publicitaire,
du produit et de sa cible. Cette dernière ne réagissant plus aujourd'hui de
manière aussi homogène et aussi automatique que par le passé.
Subject :
Origins and using modes of the celebrities in advertising
Summary :
Celebrities are not of a one-sided kind. The evolution of their variety as well as
their features lead to more and more choices and using modes relevant to
advertising strategy specificities, to the product and the targeted population.
This last, reacting not in such a homogeneous and automatic way as it did in
the past.
Résumé
3
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Remerciements
"Les compliments made in Hollywood n'ont pas toujours grande valeur."
Gene TIERNEY
"Self Portrait" 1979.
* * *
Nous adressons de vifs et
respectueux remerciements à M. le
Professeur Henri MERCILLON de
l'Université Paris 1 - Panthéon Sorbonne
pour ses recommandations avisées lors de
la rédaction de cette thèse, ainsi que pour
avoir accepté la Présidence de notre Jury
de soutenance. De vifs et respectueux
remerciements également à M. le
Professeur
Pierre
GREGORY
de
l'Université Paris 1 - Panthéon Sorbonne
qui accepta de diriger nos recherches, nous
guida et nous soutint à plusieurs reprises
dans l'orientation de ces recherches ainsi
que pour la mise en valeur de leurs
résultats.
De respectueux remerciements aussi à M.
le Professeur Jean BODDEWYN, du
Baruch College - City University of New
York pour ses informations et la
communication de certains de ses travaux
sur ce thème. Merci à ces trois distingués
enseignants pour les nombreuses sources
d'information qu'ils nous ont fait connaître
et leurs très précieux conseils. Nous
exprimons
également
toute
notre
gratitude à Mlle le Professeur Claire
OPSOMER de l'Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, pour son concours
lors de l'élaboration du questionnaire de
l'expérimentation. Nous exprimons aussi
notre reconnaissance à M. le Professeur
Jean-Claude GILARDI de l'Université
Nancy II - Pôle Lorraine de Gestion et à
Madame Claudine de FRANCE, Chargée
de recherches au Centre National de la
Recherche Scientifique, pour avoir accepté
de faire partie de notre Jury de soutenance
et d'être Rapporteurs sur cette thèse.
Merci également à M. Pierre BOUZITAT
pour ses commentaires sur la construction
du fichier de dépouillement de l'enquête, à
Anne-Claude LELIEUR, Co-auteur de
Célébrités à l'affiche avec Raymond
BACHOLLET et Conservateur de la
Bibliothèque FORNEY pour sa très
sympathique
et
enrichissante
collaboration en nous ouvrant l'accès aux
trèsors documentaires de l'Hôtel de Sens, à
Anne SAINT DREUX pour nous avoir fait
découvrir les extraordinaires documents
du Centre National des Archives
4
Remerciements
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Publicitaires., à Jean Marie BOURSICOT
de la Nuit des Publivores, pour ses
connaissances publicitaires ainsi que l'aide
qu'il nous a accordée, à Stanislas CHOKO
de la galerie INTEMPOREL et à nos
précieux contacts outre-Atlantique, Sherry
BALLANTICH,
Beverly
COLLINS,
Garnett J. HARRIS, Claude HELD,
Marilyn HERING, Jannine PETSKA,
Melanie Joan RILEY, Joan SEATON et
Tom J. STUTO pour leur inestimable
concours dans notre inlassable collecte
d'exemples publicitaires d'utilisation
d'une célébrité. Enfin, nous remercions du
fond du coeur Eric BOURGEOIS, Pascal
LECHEVALLIER,
Gérard
LEYNE,
Florence et Daniel ZANA pour l'aide et
surtout l'encouragement qu'ils nous ont
apportés.
Pour avoir doté cette étude des
références pratiques et professionnelles
qui nous semblaient indispensables, pour
compléter l'enseignement la recherche
scientifique et avoir enrichi cette thèse de
nombreuses anecdotes, nous adressons
toute
notre
reconnaissance
pour
l'appréciable collaboration et le précieux
temps qu'ils nous ont accordés, à Christine
ARFEUILLERES,
Réalisatrice
et
Directrice Générale responsable de la
création de l'agence ARFEUILLERES &
Associés ; Jean-Charles BENCHETRIT,
P.D.G. de l'agence B.C.R.C. ; Olivier
BENSIMON, Président de l'agence
SYNERGIE POLARIS B.J.K.E. ; Frédéric
BESSARD, Responsable Commercial à
l'agence OSCAR-INTERMARCO ; Marcel
BLEUSTEIN-BLANCHET
Présidentfondateur de l'agence PUBLICIS et Père de
la publicité française ; Jean-Michel BIARD,
Président de la société V.I.P. ; Gérald
BIGLE, Avocat à la Cour ; Sonia BINET du
Service Juridique du BUREAU DE
VERIFICATION DE LA PUBLICITE ;
Joanne BLACK, Vice-Présidente du service
Marketing MASTERCARD, Jean-Claude
BOULET, Co-fondateur de l'agence
B.D.D.P. ; Bernard BROCHAND, Président
du groupe EUROCOM ; David A.
BROOKS, Responsable du département
Communication
chez
CONTEL
TELECOMMUNICATIONS ; Lorraine
CALIENDO, Directrice du Centre
d'Information
de
l'AMERICAN
MARKETING ASSOCIATION ; Jean-
Michel CARLO, P.D.G. du groupe
YOUNG & RUBICAM ; Didier COLMET
DAAGE, P.D.G. du groupe SAATCHI &
SAATCHI France ; Daniel DAHAN,
Directeur au Groupe BELIER ; Richard
DEROURE, P.D.G. du groupe DOLCI
DIRE ; Pierre de PLAS, Président de
l'agence D.D.B., Claude DOUCE, Président
du groupe BELIER ; Owen J.
DOUGHERTY, Vice-Président, Director
de la communication de l'agence F.C.B.
CHICAGO ; Jean FELDMAN, P.D.G. de
l'agence F.C.A.! ; Philippe GAUMONT,
Président de l'agence F.C.B. ; Jean-Claude
GERSCHEL, Directeur de la société de
droits dérives A.P.M. ; Eric GILLIERON,
Responsable Commercial à l'agence
OGILVY & MATHER ; Jean-Michel
GOUDARD, Président de l'International
du groupe R.S.C.G. ; Jacques HEBERT,
P.D.G. de l'agence J. WALTER
THOMPSON ; Jacques HENOCH, VicePrésident de l'agence BELIER CONSEIL ;
Jacques HODEN Directeur de la
Communication de la société GENERAL
ELECTRIC-C.G.R. ; Richard G. JONES,
Vice-Président de l'agence YOUNG &
RUBICAM NEW YORK ; Hidetada
KOCHI, Directeur Général du bureau
d'observation DENTSU FRANCE ; AnnyClaude LEMEUNIER, Présidente de
l'agence BORDELAIS LEMEUNIER / LEO
BURNETT ; Pierre LEMONNIER, P.D.G.
de l'agence IMPACT ; Hervé LESSUR,
Directeur de la Création, associé de
l'agence COLLETTE, LESUR, DE SAINT5
Remerciements
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
ALIRE ; Stan LEVY, Directeur de Création
de l'agence SUCCESS/SLAD ; Philippe
MICHEL,
P.D.G.
de
l'agence
C.L.M./B.B.D.O. ; Donald O. MILLER,
Directeur
de
la
publicité
à
l'INDEPENDENT INSURANCE AGENTS
of AMERICA ; Jean-François MINNE,
P.D.G. de l'agence T.B.W.A. ; le Metteur en
scène Jacques MONNET ; Nicolas
MONNIER, Président de l'agence ALICE ;
Bernard MONTIBERT, Responsable des
Droits Dérivés aux EDITIONS ALBERTRENE ; Hubert de MONTMARIN,
Directeur Général de l'agence JEAN &
MONTMARIN ; Vincent NEGRE, P.D.G.
du groupe LINTAS ; Iracema NOGUEIRA
LIMA, Manager de l'agence UP.
PROPAGANGA BRAZIL ; Raphaël PALTI,
P.D.G. du groupe P.B.E. ; Madame
PAUMIER Responsable des droits dérivés
à la société BUBBLES ; Patrick
PHILIPPART,
P.D.G.
de
l'agence
CORYPHE ; Annie POUSSIELGUES,
Vice-Présidente de l'agence C.F.P. ; Alain
de POUZILHAC, P.D.G. du groupe H.D.M.
; Vic RAGOEN Directeur du Marketing de
la carte et Gérard DIJOUD, Directeur des
Relations Extérieures d'AMERICAN
EXPRESS ; Dick REIBOLD, Président de
THE REIBOLD COMPANY ; Yves-Marie
RENARD, P.D.G. de l'agence TED BATES ;
Roger RICHMAN, Président de THE
ROGER RICHMAN AGENCY ; Daniel
ROBERT, Président de l'agence ROBERT
& PARTNERS ; Jean-Claude ROBYN,
P.D.G. de l'agence MC CANN-ERICKSON
; Nathalie de ROCHECHOUARD,
Présidente de la société PLATEFORME ;
Michel ROGALE, P.D.G. de l'agence
D.M.B. & B. ; Peter ROGERS, Président de
la
société
PETER
ROGERS
&
ASSOCIATES, Jacques SEGUELA, VicePrésident du groupe R.S.C.G. ; Martine
SOULES, Responsable de la publicité chez
UNIROYAL ; William H. STOLBERG de
la société FLEISHMAN HILLARD Inc. ;
Jan VAN AAL, Président du Directoire de
l'agence GREY ; Michel VADON,
Directeur de Création de l'agence FAURE
VADON FOREST BRIDOUX ; JeanFrançois VARIOT, P.D.G. de l'agence
EQUATEUR ; Christian VIAL, VicePrésident de l'agence PUBLICIS ; Sudi
VICTOR, de la société MEDIA COUNSEL
Ltd ; Mark C. WESTERMAN, VicePrésident de l'agence W.B. DONER and
COMPANY et à Monsieur WITNER,
ancien P.D.G. de la société MERCURY
France 1.
Parce que des quatre coins du
monde, par leurs recherches, leurs
démarches auprès des ayants droit, leurs
sources d'informations, ils ont permis
l'illustration par l'exemple de chacun des
points développés dans cette thèse, pour
leur indispensable et précieux concours,
nous remercions vivement Marie-Claire
ADES (MUSEE DE LA SEITA), Gloria
ALAMO (YOUNG & RUBICAM),
Tsutomu ANDO (I&S), Heather ALLEN
(UNGARO),
Danielle
ALVAREZ
(LANCÔME),
Jocelyne
APPERCE
(PATHE-MARCONI), Linda AREHART
(SPIEGEL Inc.), Michel ARNAUD
(CHANEL), Agnès ARTIS (S.M.H.
FRANCE), Michel AUERBAC (A.M.P.),
Marie-Claude AUGE (SYNERGIE /
POLARIS),
François
BABOU
(MARTINI),
John
BADCOCK
(REVLON), Nancy BAMBERGER (MAC
CANN-ERICKSON), Dominique BAUD
(LEUTHE & ASSOCIES), Tom BENGEL
(STETSON HATS Company), Christophe
BERNARD (BRICOUT), Dominique
BERNARD (CAMPARI), F. BESSON
__________________
1 - Compte tenu de la mouvance extrême des publicitaires,
le nom de leur agence n'est donné qu'à titre indicatif, de
leur lieu d'exercice au moment de leur intervention sur ce
sujet. C'est la raison pour laquelle la date de l'entretien
ainsi que leur fonction, seront toujours mentionnées lors
de la première apparition du nom de l'intéressé, au cours
de cette thèse. Ne sera rappelée par la suite que la date de
l'entretien.
6
Remerciements
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
(GIRARD-PERREGAUX),
Laure
BESSON (LABORATOIRES MILES),
Martine BILINSKI (FAURE VADON
FOREST), Jean-Noël BIOUL (I.M.G.),
Karen A. BLACK (REEBOK), Greg
BOEKELOO
(DELLA
FEMINA
TRAVISANO), Christiane BOMMER
(LOMBARD ET ASSOCIES), Denis
BONAN (BELIER CONSEIL), Cécile
BONNEFOND (KELLOGG'S), Valérie
BONNET (LINTAS), Eric BONTPART
(JUMP), Denis BOUTTE (B.C.R.C.),
Sylvie BOUTINEAU (LINTAS), David
BOY (ELDORADO), Hubert BRO
(CANON), Peter BROCK (D.D.B.
NEEDHAM),
Chantal
BRUET
(ESSILOR), Pierre BRUNEAU (SEITA),
Luc BUCKENMEYER (REYMANN),
Sunny
BURROWS
(COCA-COLA
Company),
Isabelle
CALMEJANE
(DIRECTION DE LA SECURITE ET DE
LA CIRCULATION ROUTIERE / BISON
FUTE), Christian CANE (CREATION
MERVIL),
Christian
CASTRES
(CASTRES S.A.), Edith CAYARD (GLEN
TURNER),
Maïté
CAZEAU
(CONTINENTAL AIRLINES), Kristen C.
CHADWELL (CITRUS - ETAT DE
FLORIDE - USA), Elaine CHAPNICK
(AMERICAN LUNG ASSOCIATION),
Joseph CHAK (CHIAT DAY), Jean-Loup
CHEREL
(ASSIMIL),
Martine
CHEVAUCHERIE (COLLETTE), Polly
COCHRAN (W.C.R.S. MATHEWS
MARCANTONIO), Wendy COHEN
(CANNON
MILLS
COMPANY)
Christine COINDRE (CORYPHE), Anita
CORDIER (R.S.C.G.), Isabelle COORE
(BELIER CONSEIL), Rémi COUDERT
(TRIAC),
Claude
COURTEAUX
(GENERAL ELECTRIC Company),
Fabienne CROS (ALS CONSEIL),
Philippe
D'HERBOMEZ
(TIMEX
FRALSEN),
Romany
Da
GAMA
(W.C.R.S.), Martina DAHLSTRÖM
(ÖHJNE & Co REKLAMBYRA), JeanYves
DARDEL
(OSCARINTERMARCO),
Maritxu
DARRIGRAND
(NAPALI
-
QUICKSILVER), Annick DAVAINE
(NIKON), Nathalie DAVAINE (DASSAS
JAGLIN et ASSOCIES), Véronique
DAYNAC (ANDRE HAYAT), Thierry De
GANAY (P.A.C.), Vivian DELLA LUCIA
(R.S.C.G.), Gérard DELASSUS (AUSTINROVER),
Nicole
DELLAVALLE
(PUBLICITE
LANCEMENT
MARKETING), Germaine DELSALLE
(EDITIONS ALBERT-RENE), Annie
DEMELLIER
(GEORGES
RECH),
Patricia DEROUBAIS (D.M.B. & B.),
Betty De ROVERE (CONTACT &
CREATIVITE), Catherine DETAPPE
(ECOM et PARTENAIRE), Daniel
DEVINEAU
(SODIMAT
INTERNATIONAL), Jean-Baudouin De
CLERCK (3M), Yves De GIVRY
(COMITE NATIONAL CONTRE LE
TABAGISME), Danièle De GRAMONT
(VCS DISTRIBUTION), Geoffroy De La
BOURDONNAYE (PEPSI-COLA), MarieHélène Des COURTILS (LANDRIN &
ASSOCIES), Satoshi DOI (DENTSU Inc.),
Pascale DOUILLARD (CUSENIER),
Cécile DOURNEL (SYLVANIA GTE),
Aymar Du CLOSEL (RIO), Emmanuelle
DUNOYER (BELIER), Philippe DUPIN
de LACOSTE (GUERLAIN), Will ELDER
(MAD), Maryse ELISABETH (R.S.C.G.),
Véronique ESTAY (C.L.M./B.B.D.O.),
Jacqueline FAURE (SOURCE PERRIER),
Francis FERIAUD (GEMAP & MARIE),
A. FERNANDEZ (PHILIP MORRIS), D.
FERRETTE
(UNICOM
POLARIS),
Marie-Christel FIARD (EYEWORKS 3 France), Katherine M. FIELD (DELTA
AIRLINES Company), Jim FISHER
(B.J.K. & E.), Jackie FIXOT (EDI 7SCOOP), Margaret FLEMING (LINTAS
NEW YORK), Brenda FRANCOIS
(SAATCHI & SAATCHI), Pamela
FREEMAN (GUESS?), Roxanne FRIAS
(METROPOLE TELEVISION), Patricia
FRILET (INSTITUT LINGUAPHONE),
Isabelle
FRINGS
(OGILVY
&
MATHER),
Bruno
FROMAGE
(KRONENBOURG),
Sabine
FUKS
(MANDARINE),
Marie
GALLEGO
7
Remerciements
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
(H.D.M.), Laura GASPERONI (LEVER),
Alain GAULLIER (MIROIRS BROT),
Emmanuel
GIRAUD
(OSCARINTERMARCO),
Robert
GIROUX
(FARRAR, STRAUS & GIROUX INC.),
Michel GISPALOU (SOPALAIN), Luce
GIVOIS (H.D.M.), Francine GOMEZ
WATERMAN), Sabine GORECKI (MC
CANN ERICKSON), Mitsuo GOTO
(CANON), Pierre GOVARE (R.J.
REYNOLDS), Danielle GREEN (D.D.B.
NEEDHAM),
Odile
GROSSMAN
(SUCCESS/SLAD), Denis GUILLAUMIN
(MARTELL
&
C°),
Jean-Pierre
GUMPRICH (ROSSIGNOL), Gilles
GUNDHARDT
(MERCEDES-BENZ),
Francine GUTKOWSKI (NOUVEAU
LANGAGE), Fabienne HABOUSHA
(GENERAL MOTORS),
Alexandre
HANLET (PIANOS HANLET), JoAnn
HEFFERMAN HEISEN (PRIMERICA
Financial Services), Isabelle HERMANN
(MIRABELLE),
Gérard
HERVO
(C.E.A.F.L. DU VAL DE LOIRE), U.
HINTNER (E. LEITZ Ltd), Stéphane
HOFFMANN (LEROY-HAMEL), Nicki
HOLME (LOWE HOWARD-SPINK),
Peter HOWES (PARKER), Takae IMAJO
(I&S), Shinobu INA (DENTSU Inc.)
Nathalie INBONA (PHILIPS), Annie
JAOUEN (C.P.M. CONSULTANT), Anne
JEANNERET (POLE PROMOTION),
Stevie
JOHNSON
(CURTIS
PUBLISHING COMPANY), Jean-Claude
JOURET (BARAN LICENSING), Barbara
KAPLAN
(FORTUNOFF),
Hajime
Masako Maiko KATO (DENTSU Inc.)
Takashi KITAZAWA (DENTSU Inc.),
Jean-Fred KOENIG (F.C.A.!), Pierre
KUBEL
(SITBON
SUKERMANN
KUBEL), Harvey KURTZMAN (MAD),
Daniel
LACY
(TRACY-LOCKE
ADVERTISING), Danielle LAFOUGERE
(AUER),
Christine
LANCRENON
(GREY),
Catherine
LANGLOISREVILLON (ALICE), Antoine LAPLANE
(REMY-MARTIN),
Lydia
LASOTA
(AUSTRALIE),
Philippe
LATIL
(COMMUNICATION C.B. NEWS),
Odyle
LEBRET
(LEROY-HAMEL),
Véronique LECOEUR (MCDONNELL
DOUGLAS),
Norbert
LEDESMA
(LONGINES FRANCE - GROUPE
S.M.H.), Bernard LE FRANC (MARIE
BRIZARD), Michel LEGAY (FUSION),
Jacques LEMAIRE (B.L./L.B.), Jean-Luc
LENOIR (R.S.C.G.), Marie-Catherine LE
ROY (FUJI FILM), Danièle LIHOREAU
(ICEBERG), Michael LINTNER (JIM
BEAM BRANDS CO), Philippe LORIN
(AGENCE PHILIPPE LORIN), Jessica
LUMSDEN
(GOLIN/HARRIS
COMMUNICATIONS),
François
MACHENAUD
(ASTRA-CALVE),
Philippe MACIOCIA (AIR FRANCE),
Patrick MACRET (BRILLANT &
ASSOCIES), Dominique MAINETTI
(GAN), Guy MAITREJEAN (BAYARD),
Anne MAGNIEN (COMMUNICATION C.B. NEWS), Janine MALARD (YOUNG
&
RUBICAM),
Pascale
MALYE
(OSCAR-INTERMARCO),
François
MARCHE
(EVIAN),
Jean-François
MARSEILLE (HERTZ), Arlette MARTIN
(A.P.M.),
Dominique
MAUCLAIR
(WALT DISNEY), Jacques MAUREL
(ILFORD), Alan J. MAYER (HEUBLEIN
Inc.), Hoy McCONNELL (D.M.B. & B.
Chicago), Richard J. MEIDENBAUER
(TOSHIBA), Emmanuel MELIN (LA
SAMARITAINE), Bernard MICHAUD
(PENTAX), Thierry MICHEL (RAIN-X),
Shelley MILLER (CHRYSALIS), Bruno
MOERMAN (OFFICE BELGE DE
TOURISME), Robert MONTEUX (LE
REVENU FRANCAIS), Annie MOREL
(ELLESSE), Jay MORRIS (WINTNERS
INTERNATIONAL
COMPANY),
Tomoko MURATA (DENTSU Inc.),
Patrick NEIERTZ (LEO ISBA), Sanda
NITESCO
(DENTSU
FRANCE),
Christine NONIS (OPUS-HINTZY),
Alain OTHENIN-GIRARD (EYEWORKS
3), Daniel PAILLE (LUTHA), Gilbert
PAILLER
(ASSOCIATION
SAINTBERNARD), Eleni PAPADAKIS (GOLD
GREENLEES
TROTT),
Isabelle
PAPIEAU (ROSIERES), Roberto J.
8
Remerciements
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
PASSARIELLO (D.M.B. & B.), Martin J.
PAZZANI (HEUBLEIN Inc.), Pauline
PELON (PEYRAT & ASSOCIES),
Philippe PEREL (BELIER CONSEIL),
Karine PERRICAUDET (EQUATEUR),
Chantal
PERRIERE
(WILLIAM
SAURIN), Anne de PEYERIMHOFF
(ROBERT & PARTNERS), George
PIPAL (UNITED-MEDIA) Mathilde
PIZZALA (NUTRIAL), Georges POHU
(CARNAC SPORT), Michel POKORSKI
(BOUGIE CHAMPION), André PORTE
(REYMANN), Carol POTTER (LOWE
HOWARD-SPINK), Béatrice POULAIN
(R.S.C.G.), Danièle POUTS (PHILIPPE
LORIN), John PRETE (MAD), Christine
PREVOST (T.B.W.A.), Fabienne PRIEUR
(M.G.T.B. PROMEDIT), Taco PROPER
(I.B.M. ASIE), Patricia PRUGNO
(FCB/LKP),
Pierre
REGNAULT
(REYNOLDS
/
ETABLISSEMENTS
REGNAULT), Jean-Noël REINHARDT
(LE COQ SPORTIF), D. REITSMA
(MITA), Loïc RENAUD (BELIER
CONSEIL),
Patrick
RENAUD
(NOVATION), Laurence REY (PUBLICIS
CONSEIL), Daniel RICARD (STAND 21),
Cheri
RICKMAN
(CHRISTIAN
BROTHERS),
Diane
RIETHOF
(RYTHME ALPHA), Jacques ROBERT
(LES FILMS DU MARAIS), Dominique
ROGER (ZENITH TIME), Isabelle
ROLAND-GOSSELIN
(LANCÔME),
Eugénie
ROMI
(J.
WALTER
THOMPSON),
Patrick
RONEY
(CHRISTIAN BROTHERS), Kenneth
ROSS
(PEPSI-COLA
INTERNATIONAL),
Agnès
ROUX
(DOLCI-DIRE),
Jean-Louis
ROY
(KODAK-PATHE), Sandy ROWAN
(DELTA
AIRLINES
Company),
Véronique RUCHOT (BUSINESS), Eric
RUMPLER (RIO), Harry SAADA
(PYTHAGORE), Michelle SABATINI
(FRANCAISE
DE
SOINS
ET
PARFUMS),
Philippe
SANDT
(COLGATE-PALMOLIVE),
Nancy
SARNOFF (MANAGEMENT PLUS
ENTERPRISES), Bernard SAUSSINAN
(PARKER),
Nicolas
SCHAUFELBERGER
(DIAMANT
VERT),
Hans
SCHLICHTHABER
(GRANINI),
Martine
SCHNEIDER
(R.S.C.G.),
Jean-Pierre
SCHULTZ
(ETERNIT), Isabelle SCHWOB (GEMAP
CHAMBERY), Dominique SEBILEAU
(I.B.M.),
Marlène
SEINTIER
(HAIRSKIN),
Serge
SIMONIAN
(SWISSAIR), Murat SINANOGLU (LE
COQ SPORTIF), Christophe SOENEN
(ROYAL MOTO FRANCE), Claude
SOLANET (MC CANN ERICKSON),
Nicole SOULAT (ESTEE LAUDER),
Christiane STAHL (B.D.D.P.), Kathleen
STEPHEN
(PRINCESS
CRUISES),
Frances J. SULLIVAN (EASTMAN
KODAK
COMPANY),
Laurence
TAILLANDIER (IDEAL STANDARD),
Kunihiro TAKENAKA (DENTSU Inc.), S.
TANABE (T.D.K.), Isabelle TEBOUL
(R.S.C.G.),
François
TEISSEDRE
(EXOTIC INTERNATIONAL), Franco
TESORIERI (AMERICAN LENGEND
Company), Marie-Antoinette THIBAUT
(SEB),
Ken
TOBOT
(MEMTEK
PRODUCTS), Jude TOMPKINSON
(B.B.D.O.), Catherine TRELLU (GRAND
PUBLIC), Ruud TRIPPAERS (AGIO
HOLLAND
CIGAR),
Christian
VALORSO (CALLEGARI BERVILLE),
Roger VAN REMMEN (DAILEY &
ASSOCIATES),
Michèle
VAUDRY
(EDITIONS
DARGAUD),
Patricia
VERGNAULT (GRANADA COMPUTER
SERVICE), Michel VEYS (DINERS
CLUB), Liliane VIGNON (H.D.M.), JeanNoël VILLEMIN (REVLON), François
VLASSAK (ETINCELLE), Claudia VON
PLATTEN
(LUFTHANSA),
Alain
WAYSER (MARWAY), Jean-Jacques
WEBER (ETERNA-FRANCE), Jacques
WEISS
(JUMP),
Brad
WESTIN
(LUCASFILMS
Company),
Donna
WILSON
(CHRYSALIS),
Rémy
WUATELET (A.L.S. CONSEIL), YUKIO
(DI), Bruno ZARCATTE (BURMA),
Emilie ZENOU (PAN AM WORLD
AIRWAYS), de même que toutes les
9
Remerciements
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
célébrités et tous les photographes,
metteurs en scène, producteurs, ainsi que
leurs agents qui de droit ou de fait nous
ont apporté leur concours, ne serait-ce
qu'en participant un jour à des campagnes
ayant recouru à l'utilisation d'une
célébrité...
10
Remerciements
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Sommaire
"Comment a-t-on des idées ? Par la persévérance poussée jusqu'au bord de la folie.
Il faut avoir la capacité de supporter l'angoisse et de conserver son enthousiasme
pendant une longue période."
Charlie CHAPLIN
"My Autobiography" (1964)
* * *
Tome 1
Résumé
3
Remerciements
4
17
Introduction
Chapitre I :
Origines de la star
A / Le star system
1 - Les initiateurs
2 - Développement et conséquences
B / La star d'hier
1 - Eléments de définition
2 - Le mythe de la star
26
28
28
29
32
33
35
11
Sommaire
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
C / La star d'aujourd'hui
1 - Vulgarisation de l'appellation
2 - Evolution des caractéristiques
D / Star et publicité
1 - Origines du rapprochement
2 - Une technique séculaire
3 - Les stars nées de la publicité
Chapitre II :
Fondements marketing de
l'utilisation d'une célébrité
A / Recherche d'impact sur la cible
1 - Changement de ton de la communication
2 - Un facteur anti-zapping : attitude du consommateur
3 - Les personnages de bandes dessinées : des cibles diverses
B / Autres fondements
1 - Transfert de notoriété
2 - Utilisation de la caution de la célébrité
3 - Mise à profit d'une adéquation stratégique
4 - Recherche d'identification au modèle
5 - Normalisation de la consommation du produit
6 - Personnification du produit
39
39
42
44
49
50
69
91
93
101
108
126
139
139
144
148
157
171
186
C / Etude des motivations du consommateur
192
1 - L'enseignement général de la recherche
2 - Recherche sur l'utilisation d'un porte-parole célèbre
3 - Méthodologie de l'expérimentation
4 - Résultats et analyse
193
5 - Conclusions
376
201
233
242
12
Sommaire
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Tome 2
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
A / Définition du rôle publicitaire de la célébrité
1 - Le témoin
2 - Le porte-parole officiel
3 - Le bénéficiaire d'un contrat de sponsoring
4 - L'expert
5 - Le manager
6 - L'acteur
B / Caractéristiques de la célébrité recherchée
1 - Sexe et âge de la célébrité
2 - Porte-parole unique ou porte-parole multiples
3 - Utilisation des droits dérivés
C / Elaboration du contrat
1 - Dispositions légales
2 - Caractéristiques du contrat
3 - L'agent artistique
4 - Coût de la célébrité
Chapitre IV : Analyse du mode et des règles
d'utilisation d'une célébrité
A / Risques publicitaires à éviter
1 - La vampirisation du message
2 - L'absence de crédibilité
3 - La non identification du porte-parole
390
393
394
397
399
409
430
439
445
448
469
478
485
486
499
503
506
524
527
528
536
559
13
Sommaire
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
B / Précautions et caractéristiques d'exploitation
1 - Précautions pour la célébrité
2 - Précautions pour l'annonceur
3 - Durée d'utilisation et supports adéquats
C / Evocation publicitaire de la célébrité
1 - Sosies et imitations
2 - Le principe du détournement
3 - Les astuces publicitaires
571
571
577
586
597
598
607
620
Conclusions générales
627
Annexes
633
Annexe n°1 : Stars de bandes dessinées
1 - Le cas Droopy / Rank Xerox
2 - Le cas Astérix et Obélix
3 - Le cas Tintin
4 - Le cas Peanuts
Annexe n°2 : Le cas de la montre Rolex
1 - L'huître la plus chère du monde
2 - Sélection des porte-parole
3 - Succès de la campagne
4 - Concurrence
Annexe n°3 : Le cas de la carte American Express
1 - Do you know me ?
634
635
636
639
642
645
645
646
649
651
656
657
14
Sommaire
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
2 - Evolution : la campagne Portraits
3 - Adaptation : communication hexagonale
4 - Concurrence et détournements
Annexe n°4 : Le cas du savon Lux
1 - Origine de l'axe de la campagne
2 - Le choix des stars
3 - Pérennité et succès de la campagne
Questionnaire d'enquête
662
664
665
669
670
674
679
684
A / Construction du questionnaire
684
B / Versions A et B du questionnaire d'enquête
694
Table de distribution du χ²
705
Lexique
707
Références bibliographiques
728
. Principaux ouvrages et travaux de recherches
. Principaux articles de presse
729
756
Index +
787
Informations pratiques
808
Ce document est une version reformatée extraite de la thèse originale, afin
de mieux s’adapter à la lecture d’une version électronique. Il est mis à
disposition de Glamour Speakers pour une mise en ligne. Il présente par
ailleurs diverses illustrations qui peuvent parfois être différentes de celles
figurant dans la thèse originale. Pour toute information complémentaire,
merci de me contacter : [email protected] ou tel : (0) 169.030.680
15
Sommaire
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
A mes parents,
pour leur inconditionnel soutien.
16
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Introduction
"Dans le monde de la publicité on ignore ce qu'est le mensonge, on appelle plutôt ça
de l'exagération".
Roger O. THORNHILL...
"North by Northwest"
Alfred HITCHCOCK (1959).
* * *
En 1985, lorsque le chanteur
Michael JACKSON accepta de
participer avec ses frères, à la
communication publicitaire de la
boisson PEPSI-COLA aux États-unis,
pour un cachet de 5,5 millions de
dollars, il exigea que son visage
n'apparaisse pas plus de 2 secondes à
l'écran ainsi qu'un droit de contrôle
absolu sur la version finale du film1.
L'annonceur accepta cependant cette
exigence sans hésiter et reconduisit le
contrat de la star, d'année en année
avec
même
une
substantielle
augmentation du
rémunération2.
montant
de
sa
Lorsque dix ans auparavant, les
célébrités commencèrent à apparaître
de plus en plus nombreuses dans des
films publicitaires à la télévision
américaine,
certains
observateurs
qualifièrent l'événement de passager3
convaincus qu'ils étaient, que ce
phénomène de mode ne pouvait en
aucun cas perdurer. Sans doute
__________________
2 - En 1990, Charles GOODRUM et Helen DALRYMPLE
__________________
1 - Voir notamment : Steve BLOUNT et Lisa WALKER
avec l'AMERICAN ASSOCIATION OF ADVERTISING
AGENCIES "The Best of Ad Campaigns" paru aux
Editions ROCKPORT PUBLISHERS (1988), Rockport,
MA, Etats-Unis, page 152, et Roger ENRICO et Jesse
KORNBLUTH "The other guy blinked, how Pepsi won
the Cola Wars" Editions BANTAM (1986), New York,
Etats-Unis, chapitre 6, "The gloved hand".
se posèrent la question de savoir "Combien de bouteilles
de PEPSI, la compagnie doit-elle vendre pour récupérer le
coût du dernier spot publicitaire avec Michael
JACKSON ? Réponse : 192.307.692" Charles GOODRUM
& Helen DALRYMPLE "Advertising in America"
Editions HARRY N. ABRAMS Inc. (1990), New York,
Etats-Unis, page 18.
3 - "More than just a passing fancy" Ainsworth
HOWARD, ADVERTISING AGE, Dossier spécial
"célébrités et publicité" Section 2, du 30 Juillet 1979.
17
Introduction
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
avaient-ils oublié que dès la fin du
siècle dernier, les célébrités avaient
progressivement envahi la publicité
presse jusqu'à la fin des années trente,
puis s'étaient emparé des ondes
radiophoniques, pour enfin revenir en
force dès la fin des années 40 sur les
pages publicitaires de la presse
magazine.
Or,
si
cette
approche
publicitaire fut très abondamment
utilisée aux Etats-Unis, il n'est pas
possible d'attribuer la paternité de ce
phénomène
aux
publicitaires
américains, et encore moins de leur
reconnaître le monopole de l'utilisation
des célébrités dans la publicité. Tout
pays ayant bénéficié du développement
de la société de consommation et de
l'essor des media était alors à même de
voir se développer cette approche ; et la
France n'y échappa pas. Toutefois, si de
nombreuses recherches et articles
parurent
et
paraissent
encore
aujourd'hui outre-Atlantique, sur ses
raisons et ses modalités, ce phénomène
ne paraît pas avoir été perçu comme
suffisamment
important
jusqu'à
présent en France, pour susciter études
et recherches spécifiques. Alors que
parallèlement, les célébrités semblent
participer à de multiples, diverses et
plus nombreuses opérations de
communication, générant parfois des
investissements considérables.
D'autre part, à l'étude du
comportement du consommateur
aujourd'hui, on s'aperçoit que les
stéréotypes tant et justement mis à
profit ces dernières décennies, sont de
plus en plus difficilement discernables
et exploitables4. Alors que certains
auteurs préconisent une relative
standardisation internationale de
diverses études5, nous nous apercevons
qu'un même individu peut adopter
divers
comportements,
parfois
totalement différents - voire opposés au cours d'un même processus d'achat6.
Ses motivations et les traditionnels
freins qui leur sont opposés se sont à ce
point multipliés et diversifiés, que la
prévision rigoureuse et scientifique de
son attitude est devenue très complexe,
et c'est sans aborder le point encore
plus délicat du déclenchement du
comportement7.
L'homo
oeconomicus
de
BENTHAM
est
mort,
ses
interprétations successives désuètes et
la logique de son comportement
__________________
4 - Alain GRANGE CABANNE, Vice-PDG de l'Union des
Annonceurs, Intervention lors du colloque qui eut lieu le
4 Avril 1990 sur le thème : "Quelle publicité pour l'Europe
?". Propos reproduits sous le titre : "Les obstacles
techniques et culturels à la publicité" REVUE
FRANCAISE DU MARKETING n°130, 1990/5 p. 45-47.
5 - Peter COOPER "Internationalisation des études
qualitatives" (traduction de Christine SAINGARRAUDPUJOL) in REVUE FRANCAISE DE MARKETING,
n°134, 1991/4. p.69 et s.
6 - "Les 6-11 ans résistent aux stratégies internationales",
Katia ROUSSILLE, COMMUNICATION CB NEWS
N°170 du 28 Mai 1990.
7 - Voir notamment : "Interpreting consumer mythology ;
a structural approach to consumer behavior" Sidney J.
LEVY, JOURNAL OF MARKETING Volume 45 d'Eté
1981, pp. 49-61. Voir également : Richard VAUGHN
"How advertising works : a planning model... putting it
all together" JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH
Volume 20, du mois d'Octobre 1980, pp. 27-33 et son
complément "How advertising works : a planning model
revisited" JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH
Volume 26 du mois de Février / Mars 1986, pp. 57-66.
18
Introduction
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
obsolète, vive le consommateur multifacettes ! Même si certains chercheurs
se basent sur les études8 indiquant que
les consommateurs pensent qu'ils
existent trop de marques et que cela
complexifie leur choix, la "nouvelle
République de la Technologie" de
Theodore LEVITT n'est pas encore
parvenue à "homogénéiser les goûts
mondiaux, les aspirations et les
possibilités dans l'optique d'un marché
global qui permettrait des produits
standardisés à l'échelle mondiale".
Que reste-t-il aujourd'hui du
consommateur mondial décrit par le
Docteur DICHTER9 et tant recherché
depuis ? La tyrannie de la majorité n'est
plus10. Sous-jacents dès les années 80,
__________________
8 - En 1982, l'agence de publicité américaine B.B.D.O.
mena une enquête nationale au regard des 28.000
marques qui faisaient alors l'objet de publicité sur le
territoire américain. Il ressortit que si 10% des
consommateurs jugeaient le nombre de marques
disponibles insuffisant, ils étaient 40% à penser que cette
profusion de marques rendait leurs achats plus difficiles.
"Marketing : shoppers are often confused by all the
competing brands" Bill ABRAMS, THE WALL STREET
JOURNAL du 22 Avril 1982.
9 - "Le client à l'échelle mondiale" Ernst DICHTER,
Cahier de l'ADETEM n°8 (1963) réédité dans la REVUE
FRANCAISE DU MARKETING n°136 (1992/1) p.71 et s.
On peut légitimement s'interroger sur ces propos visant à
définir un comportement universel du consommateur, de
l'auteur qui par ailleurs expliquera l'année suivante que
"bien des motivations, derrière ce comportement restent
inconscientes" "Handbook of consummer motivations :
the psychology of the world of objects" Editions
McGRAW-HILL, New York, Etats-Unis (1964). Seraitce à dire que même dans son inconscient l'Homme
répond aux mêmes standards ?
10 - La cigarette MARLBORO est différente d'un pays à
l'autre, son succès repose en partie sur le fait quelle se
rapproche à chaque fois du goût moyen, goût différent
d'un pays à l'autre. Lorsque la SODIMA implante la
marque YOPLAIT aux Etats-Unis, elle conçoit des
yaourts beaucoup plus sucrés qu'en Europe. "Produit
Introduction
l'individualisme11 et le particularisme
règnent aujourd'hui en maîtres dans
nos sociétés occidentales12. L'industrie
automobile japonaise elle-même a déjà
perçu l'intérêt impératif des séries
limitées et personnalisées. Par ailleurs,
le N.I.H. factor13 évoqué par David
international"
mythique, le COCA-COLA est
différemment gazeux, différemment sucré, différemment
décliné, d'un pays à l'autre. L'enseigne "internationale"
Mac DONALD'S a stratégiquement choisi d'adapter non
seulement l'esthétique de ses restaurants à travers le
monde, mais également l'offre de ses produits. Ces
inévitables adaptations se retrouve en général pour tous
les produits alimentaires. Voir à propos de UNILEVER,
"European Advertising Strategies" Rein RIJKENS,
Editions CASSELL, Londres, Grande-Bretagne, 1992, p.
33.
11 - "Le consommateur devient de plus en plus
individualiste. Il y a un milliard de personnes sur la
planète ayant assez d'argent pour choisir ce qu'ils
veulent. Ils ne sont pas simplement solvables mais, ils
peuvent allez au delà du vêtement le plus simple et du
logement. Il sont capables de choisir ce qui représente
chez eux cette expression de soi, cet épanouissement de
la personne. C'est un phénomène extraordinaire mais cela
rend la publicité beaucoup plus complexe. Pendant 80
ans, il s'agissait d'un monde où il fallait traiter des masses
de plus en plus importantes, des media de masse,... Puis,
au début des années 80 tout s'est inversé, les media
deviennent de plus en plus ciblés, le consommateur
devient de plus en plus individualiste et cela ne
l'intéresse plus de faire partie d'une masse homogène et
anonyme. [...] C'est quelque chose de presque biologique
chez l'homme, il recherche toujours à faire ressortir sa
diversité. Je crois que cela continuera et ira même en
s'accentuant. [...] Le prochain défi est là." Extrait de
l'allocution d'Alex KROLL, P.D.G. du groupe YOUNG &
RUBICAM, 3ème Citée de la Réussite, Université de la
Sorbonne, 24-25 Octobre 1992.
12 - "La plupart des grands marchés proviennent de
marchés niches. La raison est que ces marchés niches
procurent de nombreuses leçons importantes sur le
consommateur - en particulier de penser à eux en termes
d'individus et de répondre à leurs besoins spécifiques"
Regis McKENNA in "Marketing in an Age of diversity"
HARVARD BUSINESS REVIEW Volume 66, n°5 de
Septembre / Octobre 1988, p.91.
13 - Littéralement : "pas inventé ici". Le principe repose
sur le fait que les consommateurs se montrent méfiants
19
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
OGILVY perdure avec plus ou moins
d'intensité selon les individus et les
produits considérés. "Jusqu'à ce que
nous soyons parvenu à Un Monde, il ne
peut
exister
de
Marketing
international, mais seulement un
Marketing local partout dans le
monde14".
La
célèbre
maxime
philosophique lapidaire de NESCAFE
résume à elle seule l'origine de son
succès : Think global, act local15.
Et il ne faudrait pas croire que ce
phénomène ne s'applique qu'aux biens
de grande consommation. Aujourd'hui,
dans
sa
communication
institutionnelle, le groupe suissosuédois A.B.B. (ASEA BROWN
BOVERI), leader mondial sur le secteur
des biens d'équipement, insiste
toujours sur sa maxime : «L'art d'être
local mondialement»16. Nous pensons
donc qu'il est vain d'essayer de forger
des règles applicables uniformément au
plus grand nombre, si ce n'est un
modèle tentant de démontrer que les
modèles et les systèmes17 universels ne
sont plus... Le consommateur multifacettes d'aujourd'hui n'escalade plus la
célèbre pyramide de MASLOW, pour
assouvir en dernier ressort ses besoins
d'accomplissement, mais il s'y promène
toute sa vie durant, dans une inlassable
quête "sisyphienne" d'un bonheur
absolu et personnel.
La "globalisation" des marchés
est encore un mythe et pour longtemps,
tant sont nombreux les obstacles aux
stratégies de marketing international18.
La segmentation chère à Wendell
SMITH19 reste la clé d'une stratégie
__________________
16 - Voir notamment : "Company profile : global hero"
envers toute innovation, tout produit, toute idée en
provenance de l'étranger. David OGILVY "La publicité
selon OGILVY" Editions DUNOD, Paris (1983). A ne pas
confondre avec ce que d'autres publicitaires - comme
l'agence J. WALTER THOMPSON - s'efforcent de
traduire par "now improved here / perfectionné
maintenant ici -, en opposition justement à celui évoqué
par David OGILVY. Le cas d'école est celui de KODAK
dont le thème "KODAK is color" lancé en 1985, fut
décliné, adapté, perfectionné par toutes ses agences YOUNG & RUBICAM, J.W. THOMPSON et Mc CANN
ERICKSON - à travers le monde.
14 - Propos de George WEISSMAN - alors Président de
PHILIP MORRIS Inc. - présentés par Lee ADLER, dans
son livre "Plotting Marketing Strategy, A New
Organization" Editions SIMON & SHUSTER, New York,
Etats-Unis (1967). p.229. Et c'est bien entendu sans
compter les influences durables ou passagères de certains
pays, de certains styles de vie sur d'autres. Voir
notamment "U.S. Style of life invades Europe" Dwight E.
ROBINSON, HARVARD BUSINESS REVIEW Volume
66, n°5 de Septembre / Octobre 1968 pp. 140-147.
15 - Pensez global, agissez local.
Romy JOYCE, INTERNATIONAL MANAGEMENT du
mois de Septembre 1992 et "US Brands abroad : an
empirical study of global branding" Barry Nathan
ROSEN, Jean J. BODDEWYN et Ernest A. LOUIS,
INTERNATIONAL MARKETING REVIEW Volume 6,
n°1, 1988, pp. 7-19.
17 - "Chaque système est donc vrai par ce qu'il propose et
faux par ce qu'il exclut et la prétention de tout expliquer
peut rapidement amener le système à l'état de délire
d'interprétation" Roger CAILLOIS "Le mythe et l'homme"
Editions GALLIMARD, Paris (1938,1972,1989) réédité en
collection FOLIO p. 18.
18 - Une liste de ces principaux obstacles fut dressée en
1968 par Robert D. BUZZELL dans "Can you standardise
multinational Marketing ?" HARVARD BUSINESS
REVIEW du Novembre / Décembre 1968 pp. 108-109,
tableau n°1. Voir également : "Multinational advertising :
factors influencing the standardised vs. specialised
approach" Barbara MUELLER, INTERNATIONAL
MARKETING REVIEW Volume 8, n°1, 1991, pp. 7-18.
19 - Wendell R. SMITH "Product diffentiation and
market segmentation as alternative Marketing Strategies"
JOURNAL OF MARKETING 21, Juillet 1956, pp. 3-8.
20
Introduction
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
marketing qui s'adapte et s'adaptera
sans cesse à la diversité des
consommateurs
de
l'entreprise.
Lorsque les petits LEGO danois furent
lancés sur le marché japonais à l'instar
des techniques promotionnelles qui
avaient été utilisées sur le marché
américain, le lancement échoua20.
L'échec retentissant des stylos
PARKER
ambitionnant
la
mondialisation de leur publicité en
1984 est encore dans l'esprit de
chacun21.
L'imposante
machine
marketing qui fit - en partie ? - l'énorme
succès du film Batman aux États-unis en
198922, fut transposée à l'identique lors
de la sortie du film en France.
Nombreux furent quelques mois après,
les détenteurs de licences qui avaient
toutes les peines du monde à écouler
leurs stocks de produits estampillés de
l'emblème de l'homme chauve-souris.
Non seulement le film n'eut pas le
même succès, mais le consommateur
français ne réagit pas du tout de la
même façon que son alter ego
américain, à la pression publicitaire et
promotionnelle de 15 millions de francs
qui fut mise en place.
Certes,
la
publicité
23
internationale existe , mais combien
existe-t-il de campagnes publicitaires
réellement internationales ? Quelle est
d'ailleurs la définition d'un "grand film
qui marche partout"24 en publicité ?
L'objectif de la publicité n'est-il pas au
départ de s'adresser à un individu en
tant que tel, et non à une foule aux
contours imperceptibles ? Certes des
exemples existent, GILLETTE, TIMEX,
ainsi que KODAK et MARLBORO,
dans une certaine mesure. Mais s'il est
aisé de les citer, c'est qu'ils font figure
d'exceptions25.
En 1986, les Professeurs Yoram
WIND
et
Susan
DOUGLAS26
__________________
23 - Voir notamment : "Advertising standardization" John
__________________
K. RYANS jr. et David G. RATZ, INTERNATIONAL
JOURNAL OF ADVERTISING du mois de Juin 1987, pp.
145-158.
20 - "Paradoxalement, en l'absence de diversité de
24 - Extrait des propos tenus par Jacques SEGUELA au
conduite dans l'organisation, la standardisation du
marketing ne fonctionnera pas. Lorsqu'un programme est
chargé d'un trop grand nombre de standards, l'efficacité
locale et l'expérimentation minutieuse des marchés
s'évaporent" Kamran KASHANI in "Beware the Pitfalls of
Global Marketing" HARVARD BUSINESS REVIEW
Volume 67, n°5 de Septembre / Octobre 1989, p 93.
Colloque "Quelle publicité pour l'Europe ?" le 4 Avril 1990
et reproduits sous le titre : "CITROEN : une campagne
unique pour l'Europe" dans la REVUE FRANCAISE DE
MARKETING n°130, 1990/5, p. 37-41.
21 - Voir notamment : "PARKER Pen : what went wrong ?
Why company global marketing plan foundered" Joseph
M. WINSKI et Laurel WENTZ ; "PARKER Pen finds
black ink" Kevin COTE, GLOBAL MARKETING /
INTERNATIONAL
SURVEY
1987
édition
/
ADVERTISING AGE du 13 Juillet 1987 ; "Goodby global
ads : Global village is fantasy land for big marketers" Julie
SKUR HILL et Jospeph M. WINSKI, ADVERTISING
AGE du 16 Novembre 1987.
22 - Plus de 12 milliards de dollars de chiffre d'affaires.
Introduction
25 - Au début des années 80, dans le but de lutter contre
la concurrence japonaise, BLACK & DECKER "globalisa"
ses actions à l'étranger. Certes aujourd'hui, ces outils ont
pratiquement tous le même aspect, dans les différents
pays d'implantation. Néanmoins, ils demeurent
extrêmement différents consécutivement aux différents
équipements électriques et autres variations de voltage
d'un pays à l'autre.
26 - "Le mythe de la globalisation" Yoram WIND et Susan
DOUGLAS, in RECHERCHE et APPLICATIONS EN
MARKETING N°3, Octobre 1986. Voir également
l'exemple de McDONALD'S dans "McWORLD ?"
Kathleen DEVENY, John E. PLUENNEKE, Doris JONES,
Mark
MAREMONT
et
Robert
BLACK,
21
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
analysaient en détail combien la théorie
du Professeur LEVITT27 reposait sur
des bases fragiles. Les différences dues
notamment à la culture, aux goûts, aux
normes nationales et à la structure des
affaires ne sont pas des vestiges du
passé. Bien au contraire et malgré les
multiples phénomènes d'acculturation,
elles subsistent28 et doivent être
considérées. Récemment encore les
publicitaires recherchaient vainement
la définition du "simple" consommateur
européen29, dont les caractéristiques
BUSINESSWEEK du 13 Octobre 1986, ainsi que celui de
GENERAL FOODS Corp. dans "Local move : GF prepares
regional plan with promo $" Judann DAGNOLI,
ADVERTISING AGE du 9 Février 1987.
27 - Theodore LEVITT "The globalization of markets",
HARVARD BUSINESS REVIEW, Mai-Juin 1983.
28
- Bernard DUBOIS "Culture et Marketing",
RECHERCHE ET APPLICATIONS EN MARKETING
Volume 2, n°1/1987, p. 43-54.
29 - Voir notamment "The average european does not
exist !" Isabelle MUSNIK, COMMNUNICATION CB
NEWS n°276 du 9 Novembre 1992. Déjà en 1988, le
groupe YOUNG & RUBICAM présentait dans les pages
du magazine STRATEGIES, les résultats de son enquête
qui démontrait que l'Européen moyen n'existait pas.
"Eurostyles : l'européen introuvable" Guillaume
BONNET, STRATEGIES N°608 du 16 Mai 1988. Voir
également "Quels sont les consommateurs européens ?"
Bernard
PINET,
REVUE
FRANCAISE
DU
MARKETING n°130, 1990/5 p.19-29. Ce qui faisait dire à
Yves de RICKEBUSCH - Directeur général de la société
d'études DEMOSCOPIE - deux ans plus tard :
"L'évolution est certes lente, mais elle est inéluctable et
naturelle. Nous allons vers une convergence des
comportements, des modes de vie et des mentalités des
Européens [...] si les Européens possèdent vraiment des
caractéristiques et des attentes communes, elles ne
s'expriment pas nécessairement en termes de
consommation" et Oliver GERADON de VERA Directeur général adjoint de la SECODIP - de compléter
en disant que "le consommateur européen existe, mais
seulement pour des produits transculturels, ceux qui se
situent au delà de sa culture traditionnelle particulière" in
"Vers un euro-consommateur" Véronique LE BRIS,
MARKETING MIX n°67 du mois de Novembre 1992.
autoriseraient les annonceurs à un seul
et même message universel compris de
tous
et
générant
le
même
comportement. Même sur un marché
national, le marketing doit de plus en
plus mettre en place, non sans
difficultés,
des
sous-systèmes
hybrides30 lui permettant de toucher
des consommateurs différents31. "Il n'y a
que très peu de produits, si toutefois il
en existe, que vous pouvez standardiser
en toute sécurité, je pense que toute la
folie du marketing global n'est qu'un
stratagème utilisé par les agences de
publicité pour obtenir de nouveaux
budgets" commentait déjà en 1984, le
Professeur Philip KOTLER32.
Dans
cet
univers
d'hétérogénéité, la célébrité serait-elle
alors aujourd'hui, l'une des solutions
permettant
systématiquement
de
toucher ces multiples et divers
consommateurs,
de
manière
universelle, ou au contraire, doit-on la
considérer
comme
un
élément
permettant d'affiner le ciblage d'un
groupe de consommateurs particuliers,
dans l'optique d'une incontournable
segmentation ?
Voir également "L'alimentaire à l'heure européenne : Ne
pas se tromper d'objectif" Philippe KAAS - OC & C
Strategy Consultants - L.S.A. n° 1323, Spécial SIAL du 22
Octobre 1992.
30 - "Managing hybrid marketing systems" Rowland T.
MORIARTY et Ursula MORAN in HARVARD
BUSINESS REVIEW Volume 68, n°6, de Novembre /
Décembre 1990, pp. 146-155.
31
- "Smart selling" Christopher POWER, Lisa
DRISCOLL et Earl BOHN BUSINESSWEEK
INTERNATIONAL du 3 Août 1992.
32 - "The ad biz gloms onto «global»" Anne B. FISHER,
FORTUNE du 12 Novembre 1984.
22
Introduction
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Pour répondre à cette question,
il nous semblait intéressant de mener
trois recherches en parallèle. En
premier lieu, une recherche matérielle
s'imposait. C'est à dire tenter de
rassembler le plus grand nombre
possible
de
cas
publicitaires
d'utilisation d'une célébrité, en France
et à l'étranger,33 pour prendre
connaissance de ce qui avait déjà été
fait. Quelles célébrités avaient-elles été
utilisées par la publicité ? pour quel(s)
produit(s) ? Et comment avaient-elles
été utilisées ? Dès lors que ces cas
furent recherchés au cours des six
dernières années, sans a priori quant
aux sources, supports, ou types de
porte-parole célèbres, on pourra
considérer que les 8.191 - saisie arrêtée
le 1er Août 1992 - cas publicitaires
d'utilisation d'une célébrité rassemblés,
constituent
un
échantillon
représentatif de ce qui a pu être fait.
Bien que les conclusions que l'on
puisse en tirer restent encore limitées,
il constituera une base appréciable
pour analyser le type de célébrités ainsi
que le sexe des porte-parole les plus
utilisés au regard des différents types
de produits ainsi que de certaines
__________________
33 - Les cas étrangers présentés sont en grande partie des
cas américains, notamment pour la double raison qu'il
s'agit du premier marché publicitaire mondial, ainsi qu'en
raison de l'abondante utilisation de cette approche aux
Etats-Unis. En 1989, les dépenses publicitaires
américaines représentaient 2,7% du P.N.B. (1er rang). A la
même époque les dépenses publicitaires françaises
représentaient 0,7% du P.N.B. (9ème rang). Sources :
STARCH, INRA, HOOPER Inc., J. WALTER
THOMPSON WPP Group. "PUB, la fin du pactole"
Bernard LALANE, L'EXPANSION n°395 du 20 Décembre
1990.
Introduction
marques. Pour éviter certains biais dans
la composition de cet échantillon, il ne
fut tenu compte que des cas vérifiés de
visu, ou recoupés au moins une fois.
C'est la raison pour laquelle
notamment, alors que l'on peut estimer
à plus de 2.000 célébrités le nombre de
porte-parole du savon LUX, seuls 323
cas "confirmés" sont recensés à ce jour
dans la base. Ces 8.191 cas constituent
ce que nous appellerons désormais la
base de données Alphastar34.
__________________
34 - Pour éviter le biais dû aux utilisations multiples
d'une même célébrité pour le même produit, la base ne
considère que les cas originaux (ex : l'association
Catherine DENEUVE / Parfum / CHANEL n°5 ne
représente qu'un seul enregistrement, alors que la star a
été identifiée à ce jour pour sa participation à 53 films
publicitaires et plusieurs dizaines d'annonces au profit
du n°5). Trois fichiers de correspondances lui sont
connectés.
Betastar1
regroupe
les
principales
caractéristiques (nom, prénom, sexe, activité(s)) des
porte-parole célèbres identifiés, soit 3.514 célébrités ;
Betastar2 regroupe l'ensemble des noms de marques qui
furent identifiées comme ayant eu recours à l'utilisation
publicitaire d'une célébrité, soit 2.943 annonceurs ; enfin,
Betastar3 regroupe l'ensemble des types de produits qui
furent un jour promus par une célébrité, soit 973 types
recensés à ce jour. Il a été malheureusement renoncé à
considérer la nationalité de la célébrité ou celle du cas
d'utilisation. Ces critères n'apparaissaient pas être
utilisables de façon déterminante ici, pour deux raisons
essentielles. En premier lieu, l'identité de la célébrité ne
garantissait nullement une exploitation nationale
corollaire, puisque de tout temps, en fonction de leur
degré de célébrité, elles furent employées par la publicité
dans plusieurs pays. En second lieu, divers produits sont
eux mêmes commercialisés et/ou fabriqués dans plusieurs
pays, mais dans certains cas sous des noms différents,
générant
l'utilisation
de
mêmes
campagnes,
d'adaptations ou de campagnes différentes. Il
apparaissait donc nécessaire de simplifier la procédure
d'enregistrement pour éviter en partie le biais de la
duplication. Enfin, on pourrait a priori reprocher à cette
base de données de ne pas considérer de facteur
temporel, en rassemblant des cas publicitaires de 1910 à
nos jours. Dès lors qu'il s'agissait d'avoir un aperçu sur ce
qui a été fait, il n'est pas apparu souhaitable de prendre
en compte ce type de facteur, de manière à éviter le biais
d'une codification arbitraire. En effet, quelle date - si
23
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Le deuxième axe de nos
recherches,
visait
à
recueillir
l'enseignement de la recherche
scientifique à ce sujet. De nombreuses
études furent menées - principalement
aux Etats-Unis - et cet axe nous
semblait
un
complément
incontournable, notamment pour
obtenir un guide d'aide à la
construction d'une expérimentation
personnelle. Celle-ci fut menée à l'aide
d'un support réel, afin d'étudier et de
mieux comprendre les réactions des
consommateurs, au regard de cinq
publicités utilisant cette technique
publicitaire.
professionnelle française et étrangère,
fournissant quelques compléments
d'information intéressants sur le sujet.
Il nous paraissait impératif
d'accompagner cette étude avec de
nombreux éléments pratiques et de
commentaires professionnels, pour
compléter l'apport scientifique, dès lors
que ce sujet offrait de très larges
champs d'investigation en France.
Notre objectif est d'apporter, par
petites touches successives, des
éléments de réponse et peut-être de
compréhension, à cette approche
publicitaire qui consiste à recourir à un
porte-parole célèbre.
Enfin, dernier axe de nos
recherches, une enquête auprès des
professionnels de la publicité pour
recueillir leur sentiment, leur analyse et
leurs
convictions
sur
cette
caractéristique
de
la
stratégie
publicitaire. C'est pourquoi de
nombreux éléments d'entretien de
publicitaires français et étrangers
viendront compléter, corroborer et
nuancer notre analyse. A des fins de
vérification ou de simple recoupement,
cette dernière recherche fut également
accompagnée par une compilation essentiellement sur ces dix dernières
années - d'articles de la presse
Nous retracerons donc dans un
premier temps l'origine de la star, pour
essayer de comprendre quand et
comment ces porte-parole stars
acquirent la notoriété puis l'image, qui
leur permirent d'être sollicités par la
publicité pour vendre ses produits. Puis
nous constaterons l'évolution de
l'appellation et son adaptation. Nous
étudierons alors ces porte-parole
célèbres utilisés par la publicité, pour
savoir s'ils sont "monotype," ou au
contraire, s'il est possible de classer les
célébrités utilisées en communication
persuasive selon leur degré de
notoriété, leur image et leurs
caractéristiques intrinsèques.
toutefois l'information était disponible - fallait-il retenir ?
L'exploitation d'une célébrité s'étale dans certains cas sur
plusieurs années, et parfois même de manière discontinue
(l'actrice Judy GARLAND fut utilisée par le savon LUX
en 1939, 1943, 1946, 1949 et 1954). Enfin, sera également
utilisé, un échantillon de 218 films publicitaires identifiés,
ayant utilisé un porte-parole célèbre, et exploités en
France entre 1970 et 1992, de manière à mettre en
évidence la tendance concernant la présentation de la
célébrité, dans le cadre d'une exploitation télévisée en
France pendant cette période.
Dès lors, dans un deuxième
temps, nous essayerons d'isoler les
fondements marketing de l'utilisation
publicitaire d'une célébrité. Si la
notoriété du porte-parole est a priori un
élément
primaire
fondamental
conduisant à son choix dans la
traditionnelle recherche d'impact, elle
n'est peut-être que l'élément initial et
24
Introduction
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
sous-jacent, et plus nécessairement
unique
dans
l'esprit
des
consommateurs. En effet, de nombreux
autres facteurs semblent conditionner
la décision de recourir à cette approche,
ainsi que le choix de la célébrité, en
fonction du rôle que l'on souhaite lui
voir jouer au profit du produit ou de la
marque.
Les
résultats
d'une
expérimentation menée auprès d'un
échantillon d'élèves en école de
commerce, nous permettront de vérifier
la perception de certains de ces
facteurs.
Le troisième objectif de cette
étude sera alors d'analyser les
modalités de ce choix, de manière à
définir les caractéristiques personnelles
que devrait avoir la célébrité
recherchée, en fonction de l'objectif
poursuivi. Au regard des résultats de
nos recherches, nous proposerons à
cette fin, une liste de questions filtres
permettant d'évaluer le choix du ou des
porte-parole célèbres sélectionnés,
ainsi que la liste des facteurs à
considérer pour évaluer le coût de la ou
des célébrités retenues. Nous tenterons
enfin de définir les conditions de
l'utilisation efficiente d'une célébrité
par la publicité, en parfaite adéquation
avec la stratégie de communication
poursuivie.
A chaque fois que cela sera
possible, le parallèle sera fait entre la
France et les Etats-Unis, tantôt pour
mettre en évidence les similitudes de
l'approche publicitaire adoptée de
chaque côté de l'Atlantique, tantôt à
l'inverse, pour mettre en lumière des
différences justifiées par la nécessaire
adaptation d'une campagne à sa cible.
Le choix des Etats-Unis pour établir
tantôt un parallèle, tantôt des
différences, fut fondé sur deux raisons.
La première est naturelle : les EtatsUnis ont vu naître le star-system et
sont le pays qui a utilisé, et qui
aujourd'hui encore, utilise le plus cette
approche publicitaire, d'où l'important
potentiel
d'exemples
qu'ils
représentaient. D'un autre côté, une
étude internationale réalisée de Mars à
Juillet 1981, par le Professeur Jean
BODDEWYN
au
profit
de
l'INTERNATIONAL ADVERTISING
ASSOCIATION, sur cette approche,
montra que les Etats-Unis étaient la
première nation à servir d'exemple en la
matière35. Quelques cas représentatifs
d'autres pays (Royaume-Uni, Italie,
Allemagne, Japon, Brésil, Australie,...)
seront utilisés ponctuellement pour
illustrer certains points particuliers.
En s'efforçant de répondre aux
trois objectifs précités, nous aspirons à
permettre de mieux comprendre les
fondements
de
cette
approche
publicitaire, d'exposer et de mettre
pleinement à profit l'enseignement de
la recherche, d'expériences pratiques et
de cas réels, de manière à mieux
appréhender les principaux risques liés
à cette technique. Nous pourrons dès
lors au fur et à mesure, mettre en avant
certains
principes
d'utilisation
efficiente d'une célébrité, permettant
de guider l'annonceur ou le publicitaire
envisageant cette approche.
__________________
35 - Jean J. BODDEWYN "Endorsements / Testimonials :
A 36 - country survey" dossier d'étude paru en Août 1981,
aux Editions de l'INTERNATIONAL ADVERTISING
ASSOCIATION Inc., New York, Etats-Unis.
25
Introduction
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
I
Chapitre I :
Origines de la star
A / Le star system
1 - Les initiateurs
2 - Développement et conséquences
B / La star d'hier
1 - Eléments de définition
2 - Le mythe de la star
C / La star d'aujourd'hui
1 - Vulgarisation de l'appellation
2 - Evolution des caractéristiques
D / Star et publicité
1 - Origines du rapprochement
2 - Une technique séculaire
3 - Les stars nées de la publicité
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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69
26
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
I
"Je ne propose pas de faire tourner ces films par nos vedettes, mais de mettre en
vedette les comédiens de nos longs métrages - des gens comme Lionel
BARRYMORE, Renée ADOREE, Conrad NAGEL, etc. Nous pourrions aussi
donner leur chance à de nouveaux comédiens dont nous espérons faire des stars
d'ici un an ou deux."
David O. SELZNICK à Louis B. MAYER
Le 17 Mai 1927.
Origines de la Star
* * *
Lorsque le producteur David O.
SELZNICK1 écrit ce mémo au
producteur Louis B. MAYER2 pour lui
__________________
1 - David O. SELZNICK, (1902-1965) : Fils de Lewis
SELZNICK (producteur de cinéma). Il fit ses débuts à la
M.G.M., puis travailla à la Paramount et à la R.K.O., mais
il revint à la M.G.M. en 1933 lorsque Irving THALBERG,
alors vice-président, tomba malade. En 1936, il créa la
SELZNICK International pour produire notamment Gone
with the Wind (Autant en emporte le vent).
2 - Louis B. MAYER, (1885-1957) : Il acheta une petite
salle de cinéma en 1907, puis se dirigea vers la
distribution et enfin vers la production pour fonder, la
Louis B. MAYER Pictures. En 1924, il fusionne sa
soumettre cette nouvelle approche
stratégique du cinéma, la star existe
déjà. Deux hommes, deux génies, dont
la vie est intimement liée à la naissance
du cinéma ont été, en partie malgré
eux, les créateurs de la star et avec elle,
du star-system. Il apparaît ici
nécessaire de rappeler les principaux
compagnie avec la METRO de Marcus LOEW et
Nicholas SCHENCK et la GOLDWYN Pictures de Lee
SHUBERT et F.J. GODSOL qui avait remplacé Samuel
GODLWYN après sa démission en 1922. D'abord baptisé
METRO GOLDWYN Pictures, le studio devint dès 1924,
la METRO-GOLDWYN-MAYER puis M.G.M..
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
27
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
détails de cette genèse de la star, pour
mieux comprendre l'objectif initial de
ses géniteurs, le pouvoir qu'elle allait
rapidement exercer sur ses fans, le
potentiel commercial extraordinaire
qu'elle
allait
immédiatement
représenter, mais également la
nécessaire évolution qu'allaient subir
les éléments qui la définissent.
A / Le star-system
Les stars étaient nées, et avec elles, leur renommée,
leurs caprices,...
1 - Les initiateurs
En 1884, alors âgé de 17 ans, un
jeune Allemand, Carl LAEMMLE,
arrive dans la ville de Chicago aux
Etats-Unis, pour y rejoindre son frère.
Après avoir exercé de multiples petits
métiers, il fait la connaissance en 1900
de Robert H. COCHRANE, jeune
publicitaire, qu'il engagera en 1906
comme directeur de la publicité, alors
qu'il vient d'ouvrir sa première salle de
projection. En 1909, LAEMMLE,
bénéficiant de l'essor croissant du
cinéma, est devenu propriétaire d'une
chaîne de salles dans le Midwest et au
Canada. La même année, pour se libérer
des entraves du Trust3, il fonde sa
propre maison de production du nom
__________________
3 - "Cinéma et Monopole. Le cinéma aux Etats-Unis :
Etude économique" Thèse pour le Doctorat en Droit
présentée et soutenue le 30 Juin 1952 par M. Henri
MERCILLON, Université de DIJON, Faculté de Droit,
Imprimerie Nationale (1953) p. 11.. Voir également
"Hollywood : L'âge d'or des studios" Douglas GOMERY,
Editions CAHIERS DU CINEMA, Paris, (1986) p. 15-24.
de
INDEPENDANT
MOTION
PICTURE Company, COCHRANE se
chargeant parallèlement d'une grande
campagne publicitaire anti-Trust.
Mais quittons quelques instants
Carl LAEMMLE pour observer le
déroulement d'une histoire similaire, et
s'étant déroulée à la même époque. En
1873, à Risce en Hongrie, naquit un
petit garçon du nom d'Adolphe
ZUKOR. A l'âge de 15 ans, comme de
nombreux autres émigrants venus de
l'Europe entière, il part à l'aventure vers
le Nouveau Monde. En 1888, il arrive à
New York avec 40 dollars cousus à
l'intérieur de son gilet comme le précise
à titre anecdotique, John Douglas
EAMES, dans son livre The Paramount
Story4.
Alors qu'il travaille dans le
commerce de la fourrure, il se lie
d'amitié avec un autre fourreur du nom
de Marcus LOEW et fait la
connaissance d'un certain Mitchell
MARK. Ce dernier distribue alors des
"penny-arcades", ces appareils très en
vogue, qui pour le prix d'un penny
permettaient à une personne de voir
quelques images animées, pendant
quelques dizaines de secondes.
Comprenant aussitôt l'intérêt de telles
machines, ZUKOR fonde en 1903, en
association avec MARK, AUTOMATIC
VAUDEVILLE Company, vite rejoint
par LOEW pour le développement de
l'affaire. Deux années plus tard, ils sont
__________________
4 - "The Paramount Story"
John Douglas EAMES
Editions OCTOPUS (1985), Londres, Grande-Bretagne p.
7. Voir également "The Hollywood Story" de Joel W.
FINLER paru aux Editions OCTOPUS BOOKS Limited
(1988) Londres, Grande-Bretagne, p. 140-142.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
28
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
propriétaires
de
plusieurs
Nickelodéons5,
"ces
opéras
de
quat'sous" comme les nomme Robert
BRASILLACH6. En 1910, ils fondent
avec un autre futur mogul, Nicholas
SCHENCK,
la
LOEW'S
CONSOLIDATED ENTREPRISES.
En 1912, le bouillonnant
ZUKOR revend ses parts et sur les
conseils du réalisateur Edwin S.
PORTER, part pour l'Europe. Il arrive
alors à Paris, où Louis MERCANTON
vient de mettre en scène la plus célèbre
actrice mondiale du moment : Sarah
BERNHARDT - qui était déjà l'un des
grands visages de la publicité à cette
époque -, dans Queen Elizabeth un film de
4 bobines. A cette époque, aux EtatsUnis, l'industrie cinématographique
était contrôlée par le Trust, la
MOTION
PICTURE
PATENTS
Company, qui avait arbitrairement
limité la durée des films à une bobine,
soit environ 10 minutes. ZUKOR,
ébloui, se porte alors acquéreur des
droits d'exploitation du film de
MERCANTON, pour les Etats-Unis.
De retour en Amérique,
l'exploitation du film est un succès et
permet à ZUKOR de fonder avec le
producteur de Broadway, Daniel
FROHMAN, une nouvelle compagnie :
__________________
5 - Nom donné aux premières salles de cinéma, au début
de simples arrières boutiques ou d'ordinaires hangars. Du
grec ôdeion, lieux consacrés au chant et au théâtre, et
nickel, de l'appellation populaire de la pièce de 5 cents,
généralement le prix d'une entrée.
6 - "Histoire du Cinéma" Oeuvres complètes, Robert
BRASILLACH, Editions PARIS CLUB DE L'HONNETE
HOMME, Paris (1964 - 1ère publication en 1935) tome X,
p. 46.
FAMOUS PLAYERS IN FAMOUS
PLAYS, qui se lance également dans la
production. C'est en 1913, qu'Adolphe
ZUKOR introduisit dans la production
cinématographique,
une
nouvelle
caractéristique. Sentant le désir de
nouveauté de la part du public, il
détourne ses caméras des visages
utilisés jusqu'à lors pour se tourner vers
les célébrités des scènes théâtrales, et
met "sous contrat" de jeunes acteurs
comme John BARRYMORE, Lillie
LANGTRY, James O'NEILL (père
d'Eugène O'NEILL) ou Fanny WARD.
2 - Développement et conséquences
Devenu son concurrent sur un
marché qui vient à peine de naître et
pour attirer encore plus le public, Carl
LAEMMLE7 quant à lui, débauche en
1913 l'une des actrices vedettes de la
BIOGRAPH Company8, Gladys Marie
SMITH, en doublant son salaire. La
jeune mais déjà célèbre comédienne,
qui avait changé son nom pour Mary
PICKFORD, gagne alors 175 dollars par
semaine. Toutefois, rapidement en
désaccord sur les plans artistique et
financier, l'actrice quitte peu après les
studios de l'INDEPENDANT MOTION
__________________
7 - "La fabuleuse histoire de UNIVERSAL" Clive
HIRSCHHORN Editions OCTOPUS, Londres, GrandeBretagne (1983), Editions CELIV, Paris, France (1985)
pour l'édition française p. 9-13. Voir également "The
Hollywood Story" de Joel W. FINLER paru aux Editions
OCTOPUS BOOKS Limited (1988) Londres, GrandeBretagne, p. 208-209.
8 - BIOGRAPH Company : Compagnie de production
cinématographique (1895-1914). Du nom de la caméra
inventée par DICKSON, un collaborateur d'EDISON.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
29
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
PICTURE Company de LAEMMLE. Il
faut savoir que depuis quelques temps,
les interprètes des films figurent au
générique9. Le public peut désormais
les identifier, ce qui constitue les
premiers pas vers la célébrité.
Christine de MONTVALON10
prête d'ailleurs à Carl LAEMMLE
l'invention de cette pratique avec
l'actrice
Florence
LAWRENCE11.
Richard DYER12 précise même que pour
attirer l'attention du public, Carl
LAEMMLE avait fait parvenir au
journal POST-DESPATCH de SaintLouis la nouvelle que l'actrice
LAWRENCE Florence - jusqu'à lors
connue comme simple BIOGRAPH Girl
__________________
9 - "D'abord anonymes, les acteurs prennent un relief, se
font connaître sous le nom de leur personnage (le
Cheik,...) ou sous un pseudonyme générique (Biograph
Girl,...)." Voir Robert BRASILLACH, op. cit. p. 21
10 - "Les mots du cinéma français" Christine de
MONTVALON, Editions BELIN, colllection Le Français
retrouvé, N°17, Paris (1987), p. 427-431. Voir également
"The story of Cinema" Volume I, David SHIPMAN,
Edition Hodder and Stroughton, Londres, GrandeBretagne (1982) p. 38, l'auteur date d'ailleurs en 1913, les
premières publicités des compagnies pour la promotion
de leurs acteurs en expliquant que si Carl LAEMMLE est
l'un des, sinon le précurseur(s) en la matière, c'est
essentiellement en raison du fait qu'il avait beaucoup
appris "du pouvoir et des avantages de la publicité" lors
de sa lutte contre le Trust.
11 - C'est là le premier principe du star-system, utiliser
des comédiens célèbres en tête de distribution,
essentiellement pour tirer profit de leur attrait envers le
public. Alors que les dictionnaires LAROUSSE et
ROBERT datent l'apparition du mot en 1952, le
MERRIAM-WEBSTER fait remonter son origine à 1902,
l'attribuant aussi bien au cinéma qu'au théâtre.
12 - "Stars" Richard DYER
Editions BRITISH FILM
INSTITUTE, Londres (1979), Grande-Bretagne p. 9-10.
- avait été tuée par un trolleybus dans
Saint-Louis. Le lendemain, il fit paraître
une annonce dans la presse
commerciale, dénonçant l'histoire
comme un odieux mensonge. Cet
événement fut la première occasion où
le nom d'une actrice fut connu du
public. Sortant de l'anonymat les
acteurs sont rapidement reconnus,
appréciés et demandés par le public ;
mais surtout, ils se voient peu à peu
dotés d'un instrument de pression,
notamment
financière,
sur
les
producteurs.
Lorsque Mary PICKFORD
quitte Carl LAEMLE, Adolphe
ZUKOR, saisit la balle au bond et
parvient alors à faire signer l'actrice
pour un salaire extraordinaire de 500
dollars par semaine. Il ira même jusqu'à
faire monter ce salaire déjà important, à
la somme astronomique de 10.000
dollars par semaine plus un bonus
annuel de 300.000 dollars et un
pourcentage sur les profits, en 1916,
pour conserver l'actrice au générique de
ses productions. Lorsqu'elle était
entrée à la BIOGRAPH Company, en
1909, Mary PICKFORD recevait un
salaire de 5 dollars par jours de travail
!13
__________________
13 - En 1916, chaque jour apportait son lot de chiffres
astronomiques communiqués par les Studios à propos
des contrats offerts aux stars. A ce sujet, il est parfois
difficile de recouper les sources d'informations pour
obtenir des données objectives. Les références les plus
précises paraissent être celles fournies par le journaliste
Terry RAMSAYE dont l'ouvrage paru en 1926, "A million
and one nights", narre l'histoire de l'industrie
cinématographique des débuts jusqu'en 1925. "A million
and one nights", Editions SIMON & SCHUSTER, Inc.
(1926, 1964, 1986), New York, Etats-Unis. "Mary, quite
contrary, takes a million" Chapitre 75, p. 741-754
(Edition 1986)
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
30
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
cette stratégie commerciale dont les
stars allaient constituer la principale
composante. Une stratégie dont les
Indépendants d'alors - Carl LAEMMLE
et Adolphe ZUKOR, mais aussi
William FOX, Jack WARNER, Joseph
et Nicholas SCHENCK, Marcus
LOEW, Samuel GOLDWYN,... - se
serviront pour se démarquer de plus en
plus du Trust15.
Consciemment
ou
inconsciemment, Carl LAEMMLE et
Adolphe ZUKOR - dont les
compagnies devinrent respectivement,
UNIVERSAL et PARAMOUNT, à la
suite de rachats et de fusions divers venaient de jeter les bases de ce que l'on
appellera plus tard les stars et avec
elles, le star-system14. C'est en effet de
leur apparition au générique des films
et de cette lutte financière entre des
studios à peine constitués que naquit
__________________
14 - "Le star system n'est pas tant une conséquence qu'un
élément spécifique de ces développements. Ses caractères
internes sont ceux mêmes du grand capitalisme
industriel, marchand et financier. Le star system est
d'abord fabrication. Ce mot est spontanément utilisé par
Carl LAEMMLE, l'inventeur des stars : "la fabrication des
stars est chose primordiale dans l'industrie du film"." "Les
stars" Edgard MORIN Editions du SEUIL (1957-72),
Editions GALILEE (1984) Paris, p 119.
Pour symboliser l'importance de
cette nouvelle variable dans le monde
du cinéma, notons pour l'anecdote que
ZUKOR lui-même dut baisser les bras16
lorsqu'en 1917, les studios FIRST
NATIONAL PICTURE lui ravir sa
blonde et éblouissante vedette pour un
salaire annuel de 1.100.000 dollars !
Certains producteurs comme Samuel
GOLDWIN s'amusaient alors à
commenter qu'il fallait plus de temps
pour rédiger un contrat engageant
Mary PICKFORD, que pour lui faire
tourner un film. Notons, que la même
compagnie avait déjà offert plus d'un
million de dollars à Charlie CHAPLIN
pour tourner huit courts métrages,
cette année-là. Nombreux sont
d'ailleurs les auteurs qui analysent 1917,
comme le point de départ de la "grande
course folle" aux stars et à l'argent.
__________________
15
- Donald HAVER "David O. SELZNICK'S
HOLLYWOOD" Editions SECKER & WARBURG
(1980), Londres, Grande-Bretagne pp. 9-13.
16 - Alors que la star était indécise sur l'opportunité de
continuer sa carrière cinématographique, Adolphe
ZUKOR qui avait parfaitement perçu le "potentiel"
qu'elle conservait, alla même jusqu'à lui proposer une
indemnité de 250.000 $ par an pour signer un contrat qui
stipulait qu'elle acceptait de ne plus tourner. "The birth
of the movies" D.J. WENDEN, Editions MAC DONALD,
Londres, Grande-Bretagne (1974) p.97 et s.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
31
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
L'année précédente, Mary PICKFORD
avait déjà créé sa propre compagnie, la
MARY PICKFORD FILM Company. Et
en 1919, avec Douglas FAIRBANKS,
Charlie CHAPLIN, et le metteur en
scène David W. GRIFFITH, ils
donneront naissance à leur propre
studio : UNITED ARTISTS.
Apparaissant dès lors au
générique des films ainsi que sur les
affiches de leur promotion et touchant
d'extraordinaires cachets ; les stars,
véritable capital des studios, étaient
définitivement nées, et avec elles, leur
renommée, leurs caprices, leur argent,
leurs scandales, leur cour et leurs fans.
Quelles raisons faisaient alors qu'une
femme ou plus tard un homme,
devenait une star ? Existait-t-il quelque
potion magique, quelques secrètes
incantations, dont le succès incontesté
conférait à leurs utilisateurs, gloire,
célébrité et sympathie ?
B / La star d'hier...
Elle provient d'une combinaison sans faille, qu'ont
su mettre au point les producteurs.
N'en
déplaise
à
Jacques
17
SEGUELA , on ne naît pas star, on le
devient, parfois par hasard, parfois du
jour au lendemain. "Dieu fait les stars.
C'est aux producteurs de les trouver"
dit un jour Samuel GOLDWYN, mais il
était lui-même producteur ! Dans son
autoportrait, l'actrice Gene TIERNEY
écrivit : "J'avais terminé trois films en
douze mois, dont le plus important
était La Route du Tabac. A présent, on
allait soigner mon image, s'occuper de
ma promotion, me faire entrer dans le
cycle de la fabrication d'une star"18. "M.
ZANUCK était comme les autres
moguls de ces années-là, un fabricant
de stars. Il pouvait faire une évaluation
de vous de la même manière que pour
un jeune poulain et voir quelque chose
en vous que vous même n'aviez pas
perçu." écrit Jeanne CRAIN19. Et dans
ses mémoires, le metteur en scène
américain Raoul WALSH raconte20 que
"quand on a fréquenté assez longtemps
le milieu du cinéma, on sait que le
succès est souvent une affaire de
hasard. Rita HAYWORTH allait s'en
__________________
17 - Jacques SEGUELA "Demain il sera trop star" Editions
FLAMMARION, Paris (1989).
18 - "Self Portrait" Gene TIERNEY, Editions WYDEN
Books, New York, Etats-Unis (1979). Paru en France sous
le titre "Mademoiselle, vous devriez faire du cinéma..."
Editions RAMSAY (1985-1991), p.75-76.
19 - "Jeanne of Fox" Jeanne CRAIN, 21 Mai 1984. Extrait
de "Hollywood on Hollywood - Tinsel Town Talks" de
Doug McCLELLAND Editions FABER and FABER Inc.
(1985) Winchester, MA, Etats-Unis, p. 276.
20 - "Un demi-siècle à Hollywwod" Raoul WALSH (titre
original : "Each Man in his time") Editions CALMANNLEVY Paris (1976), Editions RAMSAY Paris (1985) p.
288.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
32
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
apercevoir quand elle devint une star,
du jour au lendemain, en jouant
Virginia BRUSH dans The Strawberry
Blonde".
passion
Marcel
BLANCHET21.
BLEUSTEIN-
1 - Eléments de définition
L'étude de cette "condition" peut
être caractérisée par l'appellation ellemême. Une star - étoile en anglais - est
très belle, d'une beauté flamboyante
même. Elle brille sur un monde attentif
à ses moindres mouvements, mais
surtout elle reste inaccessible au
commun des mortels qui, ébloui, rêve
aux enchantements qui auréolent sa
vie. A l'origine, elle est actrice de
cinéma, quand, à l'occasion d'un film ou
simplement d'une scène, elle marque à
jamais le coeur d'un public qui lui
demeurera éternellement dévoué. "On
voyait des hommes et des femmes
entrer dans notre vie. On vivait avec
eux. On était pris dans le scénario, avec
les acteurs. Je me souviens de Pearl
WHITE. Toutes les semaines, on
tremblait pour elle" nous raconta avec
En définitive, la star est avant
tout une actrice parfaitement mise en
valeur par ses producteurs ; car bien
sûr, la star ne naît pas seule. Elle
provient d'une combinaison sans faille
qu'ont su mettre au point les
producteurs du studio pour lequel elle
travaille. Cette combinaison ne se
révèle pas toujours immédiatement. Le
portrait d'Ava GARDNER fut, selon la
légende, découvert dans la vitrine d'un
photographe, avant que ne lui soit
proposé de faire un bout d'essai.
Toutefois, après plus de cinq ans et
vingt-trois films, elle n'était toujours
que l'une des nombreuses petites
actrices de la M.G.M.. Il faudra que B.
Louis MAYER la prête aux Studios
UNIVERSAL pour que le metteur en
scène Robert SIODMAK révèle la star
qui sommeillait en elle, dans son film
The Killers22. Certes, la star est
généralement très belle, et tout à fait
__________________
21 - BLEUSTEIN-BLANCHET Marcel (1906) : Président
du groupe de communication PUBLICIS CONSEIL Paris,
qu'il fonda en 1926. Voir à ce sujet "Mémoires d'un Lion"
Marcel BLEUSTEIN-BLANCHET paru aux Editions
LIBRAIRIE ACADEMIQUE PERRIN, Paris (1988).
Entretien privé accordé le 23 Mai 1991.
22 - Réalisé en 1946, le film fut exploité en France sous le
titre Les Tueurs. Il faudra ensuite The Barefoot Contessa (La
Contesse aux pieds nus) de Joseph L. MANKIEWICZ en
1954, et enfin The night of the Iguana (La nuit de l'Iguane) de
John Huston en 1964, pour confirmer ce statut de star, et
même contribuer à élever l'actrice au rang de mythe
hollywodien dans les yeux de ses fans.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
33
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
destinée à séduire un public avide de
rêves et de modernes divinités23 ; mais
elle reste un produit généré puis géré24,
la plupart du temps à son insu, dans un
objectif purement commercial pour
répondre aux aspirations du plus grand
nombre25. Carl LAEMMLE utilisera
même le premier, le terme "fabrication"
pour décrire la manière dont est obtenu
"cet élément fondamental de l'industrie
du film"26.
__________________
23 - "Tout le monde aimait les stars : depuis l'émergence
de Marie PICKFORD, la nécessité des stars était
reconnue par chacun, du simple actionnaire du studio,
jusqu'au plus égotiste des metteurs en scène." Dans son
livre op. cit. p. 146 et s., David SHIPMAN analyse le
pouvoir de ces stars et, citant notamment Jean Renoir, il
s'interroge sur le véritable créateur d'un film, de la star ou
du metteur en scène. Il mentionne à ce sujet le cas du film
Casablanca et pose la question de savoir si ce film [de
Michaël CURTIZ] serait encore aujourd'hui aussi
présent dans nos esprits si Hedy LAMARR et Dennis
MORGAN en avaient été les interprètes, comme cela
était prévu initialement ? .
24 - Voir "A star is torn" de Robyn ARCHER & Diana
SIMMONDS paru aux Editions E.P. DUTTON (1986),
New York, Etats-Unis. Les auteurs y décrivent comment
Mary LLOYD, Bessie SMITH, Helen MORGAN, Jane
FROMAN, Carmen MIRANDA, Billie HOLIDAY, Edith
PIAF, Judy GARLAND, Dinah WASHINGTON, Marilyn
MONROE, Patsy CLINE et Janis JOPLIN furent très
souvent manipulées par leurs géniteurs.
25 - "Ce qui caractérise la star, c'est qu'elle est elle-même
avant même d'être le rôle qu'elle interprète. Le rôle n'est
qu'un avatar de son essence de star. [...] La star tient du
cliché, elle doit être immédiatement identifiable" "Le
Cinéma américain 1895-1980" Jean-Loup BOURGET,
Collection Le Monde Anglophone, Editions P.U.F., Paris
(1983) p. 65-66.
26 - "Le grand rêve américain pour quelques millions
d'individus est d'aller à Hollywood et de devenir une star.
Mais souhaiter profondément être une star - non pas une
actrice, mais bien une star - signifie être un produit", "Of
Stars and Brushes" Evelyn KEYES, in The New York Post
du 6 Août 1977. Extrait de "Hollywood on Hollywood Tinsel Town Talks", op. cit. p.78
"Les stars, ces pâtes à modeler,
nous raconta Pierre LEMONNIER27, il
n'y a pas de définition de la star. Toute
définition est réductrice : il y a autant
d'idiosyncrasies que de stars. Mais
puisque vous le souhaitez, je vais
prendre le temps d'être réducteur.
D'abord qu'entendez-vous par star ?
PAVAROTTI est une star. Oui, mais il
est né travailleur. CALLAS s'indignait
du peu de conscience professionnelle
de la plupart de ses partenaires.
BARYCHNIKOF, une star ? Non, c'est
un divo génial qui transpire depuis son
enfance. Pour moi, ces stars sont des
êtres habités, comme MOZART l'était
à quatre ans. D'autres stars le plus
souvent adolescents, n'étaient rien. Ils
avaient un physique, une belle petite
gueule. Et ils ont été découverts par des
spécialistes du "casting" alors qu'ils
étaient ignares [...]. La grandeur de ce
qu'on appelle des stars, c'est leur
vulnérabilité et donc dans le meilleur
des cas, leur idéoplastie : elles
deviennent ce qu'est leur gourou [...].
J'aime les stars parce que ce sont
souvent à l'origine, de petites cervelles
qui osmosent au contact de génies de
rencontres, on n'est rien sans
rencontres. On ne compte pas les QI
modestes qui ont atteint les sommets
du coeur et de l'éponge en étant
pressés, enrichis..."
Dans
leur
célèbre
recommandation parue dans le journal
Hollywood Reporter en Septembre 1935,
Stan LAUREL et Oliver HARDY
__________________
27 - LEMONNIER Pierre : Président de l'agence de
communication IMPACT. Entretien privé accordé le 29
Mars 1988.
Chapitre I : Origines de la star
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
écrivaient, entre autres, le conseil
suivant : "Nous allions oublier un point
très important, si tu espères gravir
l'échelle qui mène au succès en tant que
comique
de
l'écran.
Engage
immédiatement un attaché de presse
très fort pour qu'il puisse mettre en
valeur ta personnalité, parler de ta vie
sociale et insister sur le fait que tu es
un bon fils. Cela aide à briser la glace et
peut faciliter tes entrées dans les
bureaux des nababs de "l'Asile
cinématographique"". En effet, pour
être célèbre, la star doit avant tout être
médiatisée28 à outrance, mais surtout
pas sans contrôle. Car si elle voit son
nom étinceler à l'affiche des films
qu'elle interprète, si les interviews
qu'elle accorde - rarement - sont
toujours source d'émerveillement et
d'hystérie conjugués pour ses fidèles,
elle n'en reste pas moins mystérieuse à
souhait. Seul, ce mystère qui l'entoure,
soigneusement
entretenu,
est
susceptible de lui conserver son attrait.
cas GARBO n'aurait pas fait longtemps
illusion. L'imagination s'envole si les
questions restent sans réponse."29 C'est
ce savant mystère qui va captiver les
foules, intriguer les journalistes, pour
enfin susciter dans le meilleur des cas,
ce mythe qui enivrera ses fans, mais qui
dès le début, était écrit et planifié par
ceux qui lui donnèrent naissance. "Les
stars sont des êtres qui participent à la
fois à l'humain et au divin, analogues
par certains traits aux héros de
mythologies ou aux dieux de l'Olympe,
suscitant un culte, voire une sorte de
religion" écrit Edgar MORIN30.
Le réalisateur américain Rouben
MAMOULIAN racontait au sujet de
Greta GARBO que "plus elle se
renfermait sur elle-même, plus on
parlait d'elle, son style bizarre la rendit
encore plus célèbre et fit couler encore
plus d'encre que si elle avait accepté de
parler à la presse. Une femme
mystérieuse cesse de l'être si elle
commence à révéler ses secrets. En tout
__________________
28 - "La publicité des stars a donc pour mission de rester à
l'écoute des individus qui appartiennent à des groupes,
qui recherchent confusément la sécurité, l'aventure ou le
plaisir, à travers l'action collective et sociale" Sylvère
PIQUET "Les stars dans la pub et les courants socioculturels" in REVUE FRANCAISE DE MARKETING
N°108 1986/3 p. 75.
2 - Le mythe de la star
__________________
29 - Tichi WILKERSON et Marcia BORIE "La mémoire
d'Hollywood" Editions ERGO PRESS, Paris (1989) pp.
106-107.
30 - "Les stars" Edgard MORIN, op. cit. préface, p. 7-8.
Chapitre I : Origines de la star
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Ces stars, adorées, adulées, sont
dès lors élevées au rang de Déesses31 de
l'inconscient collectif32. Découvertes de
démagogues attentifs aux aspirations
des masses, susceptibles d'apporter
bonheur et joie par leurs prestations, ou
la simple narration de leurs faits et
gestes, elles ne sont à l'évidence, plus
maîtresses de leur destin, portées par
cette gloire, souvent trop rapide, qui les
étouffe. "Le fait que la moindre de vos
actions soit passée au crible est
inhérente à la vie d'acteur, et la majeure
partie d'entre eux le supportent de
bonne grâce parce qu'ils savent que cela
fait partie du travail" dit Lauren
BACALL33.
__________________
31 - Roland BARTHES observe les traits d'un "visage
déifié" ou encore que "la chair développe des sentiments
mystiques de perdition" lorsqu'il décrit dans ses
moindres détails le visage de l'actrice Greta GARBO.
"Mythologies" Roland BARTHES, Editions du SEUIL
Paris (1957) Collection Points, p. 71.
32 - "Nous pensons, quant à nous, qu'il y a bien une
«figure mythique» spécifique à l'espèce humaine mais
que cette figure est toujours présentée par le «visage»
d'une oeuvre située dans l'incarnation d'une culture" écrit
Gilbert DURAND, "Permanence du mythe et changement
de L'histoire" in "Le mythe et le mythique", Colloque de
Cérisy, Cahiers de l'Hermétisme, Editions ALBIN
MICHEL, Paris (1987) p. 22.
33 - "Baby chose to become adult" Lauren BACALL,
numéro spécial HOLLYWOOD REPORTER (1948).
Cet idéal féminin ne le reste pas
longtemps. Très rapidement, des
acteurs sont eux aussi portés aux
portes de l'Olympe cinématographique.
Les stars sont aussi bien féminines que
masculines, et des mythes se créent
également parmi des acteurs comme
Ramon NAVARRO, Hugh TREVOR ou
John GILBERT. Star parmi les stars, un
jeune acteur d'origine italienne,
Rodolpho GUGLIELMI caractérise
parfaitement l'extrémisme généré par
cette puissante vénération. En l'espace
de deux films, Les quatre cavaliers de
l'Apocalypse de Rex INGRAM et Le
Cheikh de George MELFORD tous deux
réalisés en 1921, cet acteur, plus connu
sous le surnom de Rudolph
VALENTINO, déchaîna littéralement la
passion sans borne de ses fans, pendant
ses quatre courtes années de gloire. Sa
légende lui survit encore aujourd'hui,
notamment en raison du fait qu'à
l'annonce de sa mort, alors âgé de 31
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
36
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
ans, quelques unes de ses groupies,
galvanisées, se suicidèrent aux portes
de sa clinique, par désespoir34 !
En définitive, "les stars sont
comme les dieux : tout et rien" observe
Edgar MORIN37.
On constatera d'ailleurs que
souvent le mythe va de pair avec une
courte apparition terrestre et/ou une
fin brutale, dont la soudaineté aura
désagréablement surpris l'ensemble des
fans. Et c'est peut-être en partie pour
combler l'impossibilité d'une "idolâtrie
terrestre" que les adorateurs d'une star
décédée cultivent et entretiennent son
mythe. Il faut peu de réel et beaucoup
d'imaginaire pour qu'il puisse prendre
forme. "Pour devenir un mythe, il faut
que rien n'est altéré l'image de cette
aspiration populaire qu'a donnée la
star" nous raconta Jacques SEGUELA35.
A propos de James DEAN, Jean
TULARD36 écrit qu'en "trois films, il
s'est élevé au niveau de mythe. A quoi
attribuer le culte dont il fut l'objet ? A
son talent ? Il était réel mais limité. A sa
mort brutale dans un accident de
voiture ? D'autres - hélas ! - ont connu
un sort identique sans susciter pareille
frénésie.
Peut-être
a-t-il
tout
simplement surgi au bon moment pour
capter une jeunesse avides d'idoles."
Pour générer ce mythe, elle doit
rester inaccessible. Eloignée de la vie
"ordinaire" pour justement autoriser le
rêve38 du plus grand nombre39, le
profond
désir
d'identification,
d'imitation, d'adoration. La star
possède un indéniable mana, qu'elle
exerce ou que ses producteurs lui font
exercer sur les foules, dans un but
commercial. On pourrait alors imaginer
un parallèle avec l'analyse de Jean
__________________
__________________
34 - "Growing up in Hollywood" Robert PARRISH,
Editions HARCOURT BRACE JOUANOVITCH, New
York, Etats-Unis (1976). Paru en France sous le titre "J'ai
grandi à Hollywood" Editions STOCK / RAMSAY, Paris
(1980) p. 60.
35 - SEGUELA Jacques : Vice-Président du groupe de
communication
ROUX,
SEGUELA,
CAYZAC,
GOUDARD & Associés Paris. Entretien privé accordé le
31 Janvier 1989.
36 - "Dictionnaire du cinéma" Tome 2 Jean TULARD,
Editions ROBERT LAFFONT, collection Bouquins, Paris
(1984) p. 340.
37 - "Les stars" Edgard MORIN, op. cit. p. 116. Voir
également le dossier "La tragédie des stars" présenté par
le magazine L'EVENEMENT DU JEUDI n°299 du 26
Juillet 1990, "Plus les destins sont tragiques, plus le
public aime. Ce n'est pas de la méchanceté, mais de la
fascination."²²
38 - "Le héros est donc celui qui résout le conflit où
l'individus se débat" Roger CAILLOIS op. cit. "Fonction
du mythe" p. 28.
39 - A travers les récits mythiques indochinois, Jacques
DOURNES analyse cette aspiration à l'identification par
le rêve : "Mythe et rêve révèlent un phénomène de
compensation : on imagine ce que l'on ne trouve pas dans la
vie ordinaire ; on se projette sur le héros du mythe avec
ses aspirations - l'impossible dans le quotidien [...] rêve et
mythes sont la révélation d'un plus en nous, la partie
immergée de l'iceberg." "Entre histoire et rêve : le mythe
épique. Un imaginaire indochinois étendu ailleurs" in "Le
mythe et le mythique", Colloque de Cérisy, Cahiers de
l'Hermétisme, Editions ALBIN MICHEL, Paris (1987)
p.111 et 117. On notera par ailleurs avec intérêt l'analyse de
l'auteur sur le lien : "mythe et identité". Pour Jacques
DOURNES cette identité est double. D'une part une
identité collective, d'autre part une identité personnelle
(celle du créateur). Comment dès lors ne pas mettre à
profit cette approche séduisante pour le cas particulier
de la star qui nous intéresse. La star serait dans ces
conditions dotée d'une double identité elle-aussi. Celle
de l'inconscient collectif qui lui permet la sympathie du
plus grand nombre d'une part, et celle de son géniteur,
qui sut la doter des éléments auxquels aspirait ce plus
grand nombre.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
37
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
BAUDRILLARD40. Dans son étude de
la théorie de la consommation, le
sociologue
explique,
tout
en
condamnant la théorie de la filière
inversée de GALBRAITH, que le
mécanisme des besoins chez le
consommateur découle du système de
production, insistant sur l'approche
non pas unitaire, mais systémique des
besoins. Le parallèle semble alors
intéressant en ce sens où la star peut
devenir mythe, dès lors qu'elle n'est pas
segmentante commercialement41.
A l'origine, aucune étude de
motivations n'était disponible pour
déterminer les attentes du public. Dès
lors il est impossible d'affirmer que la
__________________
40 - "Ce qui est vrai, c'est non pas que les besoins sont le
fruit de la production, mais que le système des besoins
est le produit du système de production. Ceci est tout
différent. Par système des besoins, nous entendons que
les besoins ne sont pas produits un à un, en relations avec
des objects respectifs, mais sont produits comme force
consommative, comme disponibilité globale" Jean
BAUDRILLARD "La société de consommation - ses
mythes, ses structures" Editions DENOEL, Paris (1970).
Disponible dans la collection Folio-Essais N°35, p. 103.
41 - La sémiologue Geneviève CORNU souligne le rôle
des mythes ainsi que "l'importance des objets
emblématiques" qu'elle compare à des objets totémiques,
dans la "cohérence de nos sociétés occidentales". "Les
mythes jouent un rôle prépondérant dans la codification
et la justification de l'organisation sociale : ce sont des
mythes d'intégration, et la publicité constitue le plus sûr
et le plus efficace moyen de propagande éducative. A ce
niveau, nous pouvons parler d'une fonction sociologique
des mythes." L'auteur explique alors que l'évolution des
cultures et de la communication font que "la publicité
devient le creuset dans lequel toutes les images peuvent
coexister [...] Le terrain est particulièrement favorable à
l'émergence de mythes : soit par la récupération des
mythes anciens, soit par l'extension de mythes nouveaux
qui sont spécifiques à l'imagination, à la sensibilité, aux
problèmes du monde moderne" in "Sémiologie de l'image
dans la publicité" Editions d'organisation, Paris (1990)
p.59 et 65.
Chapitre I : Origines de la star
star fut, dès l'émergence du
phénomène, conçue avec précision surtout dans son optique mythique42 -,
pour répondre aux aspirations du plus
grand nombre. En revanche, elle
correspondait à ces aspirations, à ces
besoins collectifs de beauté, de bonheur
et de joie43 comme l'avaient été avant
elle, les héros des contes de fées et
avant eux, les dieux et les déesses des
mythologies des civilisations et des
peuples anciens44. Ce n'est qu'au prix
de l'expérience, que les producteurs ont
progressivement su déceler les facteurs
jusqu'à lors contingents, et dès lors
recherchés, exploités voire créés. Des
facteurs qui n'allaient plus simplement
s'arrêter à un corps parfait ou à un
visage resplendissant. Peu à peu les
éléments de définition de la star vont se
multiplier et peu à peu ses producteurs
comprendront que la combinaison
idéale relève elle aussi du mythe.
__________________
42 - "La formation d'un mythe n'est donc pas à entendre à
proprement parler comme une invention ou une création,
mais comme une actualisation, ou, comme le présentait
déjà Platon, une réminiscence [...] Le mythe incarne idées
et valeurs dans des situations, des héros [...] L'être
personnifié qui se manifeste dans l'imaginal devient un
attracteur existentiel, au sens strict, un prophète qui
montre la voie, qui induit des attitudes mimétiques [...]."
Jean-Jacques WUNENBURGER "Les fondements de la
fantastique transcendantale" in "Le mythe et le
mythique", Colloque de Cérisy, Cahiers de l'Hermétisme,
Editions ALBIN MICHEL, Paris (1987) p. 45-49.
43 - "La publicité impose aux mythes qu'elle utilise un
optimisme foncier" Geneviève CORNU op. cit. p. 71.
44
- "Les mythes étaient autant d'histoires
extraordinaires exprimant la vie et la mort, la richesse et
la ruine, la puissance et la faiblesse... et mettaient en
scène ces dieux, ces déesses ou ces héros qui
surmontaient les épreuves et qui étaient donc des
exemples auxquels on pouvait s'identifier" Renaud
DEGON et Daniel JEANNIN "Les stars : étoiles de la
publicité ?" in REVUE FRANCAISE DU MARKETING
N°108, 1986/3 p. 39-40.
38
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
C / La star d'aujourd'hui
Comme tout phénomène né du passé, pérenne
aujourd'hui, elle a su s'adapter,
"En 1964, la Fox me devait
encore un film sur mon dernier contrat,
qui stipulait dix films en sept ans. Pour
liquider le contrat, on me confia un très
petit rôle, presque une participation
amicale, dans Trois filles à Madrid [...]. Ce
film représenta pour moi un tournant
assez triste. Mes motivations n'étaient
ni l'argent, ni l'orgueil, ni même l'envie
d'un ultime goût de gloire [...]. Mais le
Hollywood que je connaissais avait
disparu. Le star system qui m'avait
créée, moi, et celles qu'on appelait les
Fox Girls n'existait plus" écrit l'actrice
Gene TIERNEY45.
1 - Vulgarisation de l'appellation
Si l'on parle encore de nos jours
de star system, il serait erroné de croire
que les étoiles qui le composent
brillèrent de leur mille feux durant
toutes ses années. En premier lieu, nous
adhèrons totalement à la pensée
d'Edgar MORIN selon laquelle, il ne
resterait plus qu'une star, selon le
concept original : Elizabeth TAYLOR.
Cette précision faite, il faut en revanche
dans un second temps, admettre que si
ce concept original de la star n'est plus,
l'appellation n'en est pas morte pour
autant. Comme tout phénomène né du
passé mais persistant dans le présent
qui nous entoure, il a su s'adapter, se
modifier, et en fait, se conformer aux
évolutions des modes et des moeurs qui
régissent notre vie quotidienne. Même
__________________
45 - Gene TIERNEY, op. cit., p. 286.
Chapitre I : Origines de la star
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39
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
si Pierre LEMONNIER46 ajoute "qu'il
n'y a plus de stars. Ou presque. Les
valeurs qui montent dans le cinéma, la
radio, la télé n'ont plus rien à voir avec
GARBO ou DIETRICH. Les films qui
font recette - il y en a peu - ont pour
interprètes des acteurs qui... n'actent
plus, comme disait si bien Gérard
DEPARDIEU". Même si en effet, le
concept a perdu de son éclat au fil du
temps, de son sens originel47, il a
cependant compensé cette perte de
puissance par la "contagion" de
domaines qui lui étaient jusqu'à lors
inconnus.
Ainsi,
Jacques
HEBERT48
analyse "qu'imaginer que les stars
n'existent plus c'est commettre une
erreur considérable. Ce qui est exact,
c'est que les stars n'existent plus
uniquement au cinéma, parce qu'il y a
d'autres modes d'expression qui se sont
créés et qui font que le phénomène de
starisation peut passer par d'autres
voies artistiques que le cinéma. Mais
__________________
46 - Entretien privé accordé le 29 Mars 1988.
47 - "Ces caractères, il est vrai n'ont pas disparu de la
littérature de la société industrielle avancée, mais ils
survivent essentiellement transformés : la vamp, le héros
national, le beatnik, la ménagère névrosée, le gangster, la
star, le grand patron, la grande figure charismatique ; leur
fonction, très différente, est contraire à celle de leurs
prédécesseurs culturels. Ce ne sont plus les images d'une
autre manière de vivre mais plutôt des variantes ou des
formes de la même vie, elles ne servent plus à nier l'ordre
établi, elles servent à l'affirmer" Herbert MARCUSE
"One-dimensional man" Editions BEACON Press, Boston,
Etats-Unis (1964) paru en France sous le titre "L'homme
unidimensionnel" Editions : LES EDITIONS DE
MINUIT, p.84.
48 - HEBERT Jacques : Président de l'agence de
communication J. WALTER THOMPSON
Entretien privé accordé le 6 Juin 1988.
Paris.
imaginer que les gens n'ont plus besoin
et ne veulent plus de stars, c'est rêver,
ce n'est pas vrai. Il suffit d'aller dans les
festivals pour voir comment les gens se
ruent sur les stars quand elles sont là et
se rendre compte qu'ils ont toujours
envie et besoin d'elles." Certes, on parle
encore aujourd'hui de stars du cinéma,
mais d'autres secteurs comme le sport,
la chanson, la bande dessinée, le monde
des affaires et de la politique même, se
sont appropriés l'appellation magique.
Pour
quelles
raisons
?
Probablement par un abus de langage
au départ, puis par extension ensuite,
en raison des connotations positives et
mythiques qui continuaient d'entourer
le qualificatif. Notons d'ailleurs que ce
"détournement" de l'appellation n'est
pas récent, puisqu'une une publicité
américaine
pour
les
chapeaux
KAUFMAN, datant de 1934, soit
quelques années seulement après la
naissance de l'appellation, l'utilisait
déjà pour des célébrités autres que des
acteurs de cinéma. Certes, on y
retrouvait l'acteur américain George
JESSEL, mais également le comédien de
théâtre Phill BAKER, les animateurs de
radio Jack PEARL et Jack BENNY
(également acteur de cinéma) et le
magicien CARDINI, tous regroupés
sous
l'appellation
de
"stars".
Parallèlement
et
presque
simultanément au cinéma donc, on
parlera de star de la chanson. De
CARUSO à Michael JACKSON et
passant par Bing CROSBY, Maurice
CHEVALIER, Gene AUTRY, Frank
SINATRA, Edith PIAF, Elvis PRESLEY,
Charles TRENET, les BEATLES, les
ROLLING
STONES,
U2,
Rod
STEWART,
Dean
MARTIN,
LIBERACE, Johnny HALLYDAY, ZZ
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
40
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
TOP, Les Compagnons de la Chanson,
UB40, Michel SARDOU, Roch
VOISINE,
MADONNA,
Patrick
BRUEL,... les prétendants élus ne
manquent pas dans des genres de
musique très différents les uns des
autres. Des aspirations à la célébrité en
provenance des quatre coins du monde,
même si une fois encore, force est de
constater
encore
aujourd'hui,
l'hégémonie américaine sur le plan
mondial.
La
dérive
n'ira
qu'en
s'accentuant. Très rapidement les
sportifs bénéficieront eux aussi de
l'appellation magique. Et comme nous
le constaterons la publicité sera
d'ailleurs l'une des premières à user et à
abuser du qualificatif, le véhiculant
d'un secteur à l'autre pour des besoins
commerciaux. Nombreuses seront alors
les stars de la radio (parfois d'anciennes
stars du cinéma) et bien évidement de
la télévision. Dès lors, on peut
remarquer que la qualité de "star" n'est
Chapitre I : Origines de la star
plus réservée, par ces deux nouveaux
media, à leurs comédiens, acteurs de
fiction.
Très
rapidement,
les
présentateurs
et
animateurs
s'accaparent eux aussi le qualificatif.
Ainsi, la presse galvaude à qui
mieux mieux l'appellation, et naissent
les stars de la bande dessinée (MICKEY
et DONALD, POPEYE, TINTIN et
MILOU, ASTERIX et OBELIX, FELIX,
les SCHTROUMPFS, la Panthère
ROSE,...), les musiciens stars de tel ou
tel instrument (Sir Yehudi MENUHIN,
Yo-Yo MA, Vladimir HOROWITZ,...),
les chefs d'orchestre stars (Zubin
MEHTA, Herbert Von KARAJAN, Sir
Georg SOLTI...), les stars de l'opéra
(Luciano
PAVAROTTI,
Placido
DOMINGO, Kiri Te KANAWA,
Montserrat CABALLE,...), les stars de
l'information
(Patrick
POIVRE
D'ARVOR, Jean-Pierre ELKABACH,
Jean-Claude
BOURRET,
Anne
SINCLAIR, Dan RATHER, Peter
GANNETT,...), les stars de l'animation
télévisée (Jean-Pierre FOUCAULT,
Patrick SABATIER, Antoine De
CAUNES,
Christophe
DECHAVANNE, Oprah WINFREY,
Bill COSBY, John MADDEN,...), les
stars de la météo (Laurent CABROL,
Alain GILLOT PETRE, Willard
SCOTT...), les stars de la politique
(Georges
POMPIDOU,
François
MITTERRAND, Ronald REAGAN49...),
__________________
49 - Le phénomène n'est pas récent. Divers sénateurs
américains reçurent chacun 1.000 dollars en 1927, pour
apparaître sur des publicités pour les cigarettes LUCKY
STRIKE. Pour l'anecdote, on notera que parmi ces
sénateurs figurait un dénommé Charles CURTIS, qui fut
élu à la vice-présidence des Etats-Unis aux côtés de
Herbert HOOVER, l'année suivante... Voir notamment
"Pitching Motherhood and Pepsi" John LEO, TIME du 1er
Avril 1985 (attention : coquille non signalée 1927/1937
41
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
les très nombreuses stars du sport50
(PELE, Bjorn BORG, Mark SPITZ,
Jean-Claude
KILLY,
Bernhard
LANGER, Michel PLATINI, Eddy
MERCKX, Ayrton SENNA, Diego
MARADONA, POULIDOR, Denis
CONNER, John Mc ENROE, Alain
PROST,...), les stars du "business"
(Paul-Loup SULITZER, Bill GATES,
Akio
MORITA,
Jean-Luc
LAGARDERE, Sam WALTON, Zino
DAVIDOFF, Alain GOMEZ, Lee
IACCOCA, Bernard TAPIE,...), les stars
des media (Ted TURNER, Silvio
BERLUSCONI, Robert HERSANT,
Ruppert MURDOCH,...), les stars des
top-models51 (Cindy CRAWFORD,
Stéphanie
SEYMOUR,
Claudia
SCHIFFER,...), enfin la France se devait
de se doter des stars de la Grande
cuisine (Paul BOCUSE52, Michel
GUERARD,...).
dans cet article) ; "Testimonials from a less suspicious
Era" Jerry ADLER, NEWSWEEK du 12 Juin 1989.
EVANGELISTA participèrent à la campagne. Mais le
plus important était que les affiches portaient la
signature manuscrite des top-models. N'est-ce pas là un
signe de reconnaissance ? Voir également "Recessionproof supermodels" Rick TETZELI, FORTUNE
INTERNATIONAL, Volume 125, N°6 du 23 Mars 1992
sur l'intérêt porté à ces top-models depuis la crise du
secteur de la publicité ayant suivi la guerre du golfe.
"Sultry Cindy saunters into PEPSI's portfolio" Bob
GARFIELD, ADVERTISING AGE du 13 Janvier 1992, sur
le cas particulier de l'association PEPSI-COLA / Cindy
CRAWFORD. Au sujet de l'intérêt porté à ces topmodels par la télévision et le cinéma, voir notamment :
"Model agencies intensifying search for '10'" et "Major
model hunts near wrapup" James P. FORKAN,
ADVERTISING AGE du 7 Avril 1980 ; "Models : to be
U.S. superstars, they need the European experience" Pat
SLOAN, ADVERTISING AGE du 6 Juin 1985.
50 - Voir notamment : Alf H. WALLE "Archetypes,
athletes and advertising : a Jungian approach to
promotion" JOURNAL OF CONSUMER MARKETING
Volume 3, n°4 (Automne 1986) pp. 21-29.
51 - Phénomène récent, la médiatisation et la popularité
corollaire des top-models peuvent être considérées
comme le véritable phénomène de starisation du début
des années 90. Certes on connaissait les mannequins
vedettes et leurs évolutions publicitaires bien avant cela "Today's hot models - six most in demand for ads" James
P. FORKAN, ADVERTISING AGE du 31 Mai 1976. Mais
jusqu'à lors recherchés par la publicité pour leur beauté,
les top-models du début des années 90 le sont aussi pour
leur nom. PEPSI-COLA utilise Cindy CRAWFORD,
ESTEE LAUDER s'offre les services de Paulina
PORITZKOVA, REVLON séduit Claudia SCHIFFER,...
Et les annonceurs de communiquer également sur la
signature de contrats qui n'ont plus rien à envier à ceux
des stars du cinéma. Voir notamment : "The supermodels"
Barbara RUDOLPH, TIME INTERNATIONAL du 16
Septembre 1991.- "The supermodels" Barbara RUDOLPH,
TIME INTERNATIONAL du 16 Septembre 1991 ; "Le
marché des top-models" Michèle LOYER, CHALLENGES
N°61 de Juillet-Août 1992 ; "Top-models : enquête sur les
nouvelles stars" Collectif, LE NOUVEL OBSERVATEUR
du 20 Août 1992. Au mois de Septembre 1992, la marque
de vêtement KOOKAI lança en France, une campagne
d'affichage où des top-models revendiquaient avec
humour, une participation aux campagnes de la marque.
Cindy CRAWFORD, Estelle HALLYDAY et Linda
2 - Evolution des caractéristiques
Cette appellation est de ce fait
devenue un qualificatif dont les
composantes se sont modifiées53, lui
conférant ainsi, une adaptabilité fort
appréciée
d'avides
utilisateurs,
commercialement intéressés. Dès lors,
52 - "Paul BOCUSE, la nouvelle carte de WILLIAM
SAURIN" Dimitri FRIEDMAN, COMMUNICATION
C.B. NEWS N°223 du 9 Septembre 1991.
53 - "De mon temps Hollywood avait plus de classe. Il y
avait du prestige et de la curiosité. Aujourd'hui, les gens
dans les films se ressemblent tous, et tout le monde est
une "star". L'appellation a été vraiment dévalorisée."
"Everybody's a star" Alice FAYE, in Family Weekly du 25
Novembre 1984. Extrait de "Hollywood on Hollywood Tinsel Town Talks" op. cit., p. 280. Voir également "The
Story of Hollywood" de Barry Norman paru aux Editions
NEW AMERICAN LIBRARY, Collection "Plume" (1987),
New York, Etat-Unis, p. 69-70.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
42
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
si les fans persistent dans certains cas généralement liés au milieu du
spectacle - le mystère entretenu sur
lequel reposait la vie de la star, n'est
plus.
Le
développement
de
l'information, et la médiatisation rapide
et quasi totale des protagonistes d'un
événement, ont eu raison de cette
composante principale du mythe de la
star.
Aujourd'hui, la star n'a plus rien
à cacher, ou plus exactement, ne peut
plus rien cacher. A l'inverse des années
10, 20 puis 30 qui virent la naissance de
ce phénomène, toute dissimulation
serait maintenant presque nocive à la
star. Car si elle est star aujourd'hui,
c'est avant tout parce qu'elle est
médiatisée à outrance grâce aux succès
qu'elle remporte, ultra-présente sous
les feux de l'actualité, pour des raisons
professionnelles et/ou personnelles.
Or, cette information s'étant
développée d'une manière qualitative,
mais surtout de façon quantitative, la
star, pour rester star, doit plus que
jamais entretenir avec soin sa propre
médiatisation, au risque de voir son
éclat pâlir au profit d'une autre.
L'explosion de l'offre médiatique
(nombre de stations de radio, de
chaînes de télévision, de titres de
presse,...) a multiplié les possibilités
pour les "postulants" au statut de stars.
L'attention du consommateur n'est
plus concentrée comme auparavant, sur
tel ou tel support. Elle est
complètement
diluée,
abreuvée
continuellement
de
nouveaux
messages, de nouveaux noms, de
nouveaux visages. C'est pourquoi, en
raison de cette concurrence, ceux qui
sont parvenus au statut de star doivent
sans cesse occuper le terrain de
l'entretien du souvenir, pour conserver
ce statut tant convoité.
Pour conserver l'exemple du
cinéma où naquit l'appellation : il y a
certes de grandes stars encore
aujourd'hui, mais il suffit qu'elles
n'apparaissent plus sur les écrans
pendant une courte durée, pour
qu'aussitôt l'attention que leur portait
leur public, se détourne au profit d'une
autre54. Les grands archétypes ont
disparu et aujourd'hui, à l'instar du
cinéma hier, la télévision est devenue le
vecteur souvent incontournable de la
pérennité de la célébrité. Or de ce
medium de masse, point de salut.
Toutefois, et c'est sans doute là
l'une des clés du secret, il faut savoir
entretenir ce souvenir dans l'esprit du
public. "Rester star, c'est gérer le secret,
manager la fuite, distiller la confidence,
écrit Jean-Noël KAPFERER55, la
transparence tue la star : une star n'est
pas un copain. Le secret total l'anéantit
__________________
54 - "Lessons from Hollywood Hit Men" Christopher
KNOWLTON, FORTUNE INTERNATIONAL Volume
118 N°5 du 29 Août 1988. Voir également l'analyse à base
d'un grand nombre d'exemples de Jean-Louis GINIBRE
"Les avatars d'une carrière de star" PREMIERE du mois
de Septembre 1992.
55 - "Rumeurs : Le plus vieux média du monde" Jean-Noël
KAPFERER Editions du SEUIL Paris, 1987, p. 204. Voir
également "Vraies ou Fausses ? Les Rumeurs" MORGAN
Hal, Kerry TUCKER et Marc VOLINE, Editions FIRST,
Paris, 1988, sur Isabelle ADJANI p. 19, Rudolphe
VALENTINO p. 63, George REEVES p. 131, Mama CASS
p. 134, Paul mc CARTNEY p. 135 et 139, Lauren BACALL
p. 159, Humphrey BOGART p. 161, Joan CRAWFORD p.
163 et à titre d'exemple pour Michael JACKSON dans
"Michael 1er, Roi du nouveau marketing" Emmanuelle
FRADET-VANANTY, COMMUNICATION CB NEWS
n°234 du 25 Novembre 1991.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
43
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
autant : le public et les fans asphyxiés
par le manque d'information ont
disparu. Le mystère soigneusement
dosé maintien la foi". Même si ce
mystère doit être médiatiquement
entretenu ! Cette composante nous
permet d'introduire par conséquent,
une caractéristique essentielle de la star
d'aujourd'hui,
qui
est
l'aspect
extrêmement volatile de son attirance.
On peut trouver une explication à cette
nouvelle caractéristique, dans le fait
que les spectateurs que nous sommes,
ont mûris. L'abondance d'informations
ayant favorisé cette maturité et ce recul
face à ces personnages.
Les stars de cinéma ne sont plus
ces héros auxquels le public
s'identifiait très facilement ou rêvait de
s'identifier presque immédiatement. Il
ne sera pas dit que l'impact, le rêve et
l'identification ont disparu, mais le
public est plus mûr, sur-informé
quantitativement, et dès lors, son rêve
achevé, il fait plus aisément la part des
choses et la distinction entre les
plaisirs de son rêve, et les composantes
de la réalité. En Mai 1986, l'acteur
Christophe LAMBERT déclarait à la
presse que "la connerie en France, c'est
que l'on a voulu casser le star-system,
faire descendre les acteurs dans la rue.
C'est idiot de bousiller la part du rêve.
Le système américain est plus
intelligent, les stars sont inaccessibles,
elles gardent leur aura de mystère. Mais
quand un Cary GRANT descend dans
la rue - ça arrive rarement - à ce
moment-là, il est tout à son public.
Certains acteurs ici se plaignent de la
familiarité du public. C'est d'un
prétentieux ! Si un acteur ne veut pas
qu'on lui tape sur le dos, il reste chez
lui. A partir du moment où il sort, il
doit tout accepter"56.
La star elle-même a changé. Elle
est moins l'objet modelé au gré et à la
fantaisie de ses géniteurs. Elle aussi
s'est émancipée de la tutelle totale qui
pesait sur elle. Ainsi, les stars n'ont pas
disparu. Non, elles existent au contraire
aujourd'hui plus nombreuses et plus
diverses qu'hier. Plus indépendantes,
plus maîtresses de leur vie, même si
leur destin reste encore bien souvent
dans les mains de producteurs de tout
ordre. Le seul attribut qu'elles aient
véritablement conservé de la définition
d'origine est justement la célébrité.
D / Stars et publicité
Il était inévitable qu'elles tombent dans les pervers
filets de la publicité.
Observons les éléments du
fichier de correspondance Betastar1, de
la base de données Alphastar. Il est
constitué des nom, prénom, sexe et
activité(s) de 3.514 porte-parole
publicitaires célèbres de 1910 à nos
jours, identifiés à ce jour. A
l'observation
de
la
répartition
présentée ci-dessous, on notera que le
nombre total de porte-parole - 3.704
dans le tableau - diffère avec le nombre
de références contenues dans le fichier
Betastar1.
__________________
56 - "Christophe LAMBERT" Alexandre GRENIER,
VIDEO7 du mois de Mai 1986.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
44
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Types de porte-parole
Hommes
%
Femmes
Total
%
%
Acteurs
815
44,05%
1035
55,95%
1850
50,30%
Sportifs
376
84,88%
67
15,12%
443
12,04%
Chanteurs
171
53,94%
146
46,06%
317
8,62%
Musiciens
125
92,59%
10
7,41%
135
3,67%
Animateurs
102
78,46%
28
21,54%
130
3,53%
Ecrivains
83
82,18%
18
17,82%
101
2,75%
Imitations et sosies
70
79,55%
18
20,45%
88
2,39%
Politiciens
58
74,36%
20
25,64%
78
2,12%
Metteurs en scène
74
96,10%
3
3,90%
77
2,09%
Personnages de B.D.
63
85,14%
11
14,86%
74
2,01%
Managers
54
88,52%
7
11,48%
61
1,66%
Journalistes
21
75,00%
7
25,00%
28
0,76%
Danseurs
7
33,33%
14
66,67%
21
0,57%
Couturiers
9
69,23%
4
30,77%
13
0,35%
11
91,67%
1
8,33%
12
0,33%
4
57,14%
3
42,86%
7
0,19%
Divers
211
78,44%
58
21,56%
269
7,31%
Total :
2.254
60,85%
1.450
39,15%
3.704
100,00%
Grands Cuisiniers
Peintres
Source : Base de données Alphastar
Fichier de correspondance Betastar1
(saisies arrêtées au 1er Août 1992)
Cela s'explique tout simplement
par le fait que 190 célébrités sont
célèbres dans plusieurs domaines1, dont
il paraissait intéressant de tenir compte
ici. Exemple vivant de la vulgarisation
de l'appellation de star, certains, après
avoir commencé une carrière de
chanteur, devinrent homme d'affaires,
puis manager sportif, puis animateur
d'émissions de variétés à la télévision,
pour
terminer
politicien,
en
rebondissant à chaque fois sur la
célébrité de chancun de ces domaines.
__________________
1 - Dans ces conditions, seuls les deux principaux ont été
retenus pour leur enregistrement.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
45
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Représentation graphique de la répartition des types de porte-parole publicitaires célèbres (fichier Betastar1)
Sportifs
Chanteurs
Musiciens
Animateurs
Ecrivains
Imitations et sosies
Politiciens
Metteurs en scène
Personnages de B.D
Managers
Journalistes
Danseurs
Couturiers
Grands Cuisiniers
Divers Peintres
Acteurs
Les résultats de ce tableau et
plus encore cette représentation
graphique montrent parfaitement que
parmi les célébrités sollicitées par la
publicité, une sur deux était acteur de
cinéma ou de télévision. Si l'on
considère les trois principaux types de
porte-parole célèbres - acteurs, sportifs
et chanteurs - ils représentent plus de
70 % des porte-parole publicitaires
célèbres identifiés. Ces résultats nous
enseignent d'autre part, que les
hommes célèbres sont plus recherchés
par la publicité, que les femmes
célèbres. La célébrité serait-elle
sexiste ?
En effet, à l'exception des
danseuses et des actrices, tous les
autres domaines de célébrité voient le
sexe féminin s'effacer devant le sexe
masculin. Avec des types de célébrités
plus marqués que d'autres. On
remarquera par exemple le cas des
musiciens, des metteurs en scène, des
managers et des personnages de B.D. ou
la disproportion hommes / femmes est
très importante. On ne retiendra pas le
cas des Grands cuisiniers à propos de
cette disproportion entre les deux
sexes, au regard du faible nombre de
cas relevés, même si a priori on peut
penser que ce constat les concerne
également. Il de notoriété que la
profession elle-même est occupée par
des hommes de façon majoritaire.
Ce qui donne un rapport total de
6 porte-parole publicitaires célèbres
masculins contre 4 porte-parole
publicitaires célèbres féminins.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
46
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
L'étude de ces résultats doit
cependant être relativisée en précisant
qu'il n'est pas tenu compte ici, du degré
de
célébrité
du
porte-parole
publicitaire identifié. A titre d'exemple,
si ce critère avait pu être retenu - mais
sur quelle base objective ? - le nombre
des actrices recensées aurait très
probablement été dépassé par celui des
acteurs. La lecture de la liste des noms
pour cette rubrique, laisse apparaître
en effet, un grand nombre de cas de
gloire éphémère pour les stars
féminines. Enfin, il faut rappeler que
cette répartition porte sur une période
s'étalant de 1910 à nos jours. S'il était
possible de faire porter avec précision
cette analyse, sur une période plus
restreinte, mais plus récente, la
première place détenue par les acteurs
de cinéma bien que conservée, ne serait
plus aussi détachée de celle des
sportifs, de plus en plus utilisés.
AYDS furent intéressés par la taille de
guêpe de Paulette GODDARD, Hedy
LAMARR ou Anita EKBERG, les
céréales KELLOGG'S mirent à profit la
forme de la nageuse actrice Esther
WILLIAMS, les chaussures BALLBAND furent très intéressées par les
pieds de Rhonda FLEMING et de
Lucille BALL, la lotion capillaire JERIS
s'empara des cheveux de Charlton
HESTON, Dana ANDREWS, Alan
LADD.
A
l'origine,
l'une
des
caractéristiques essentielles de la star
étant qu'elle dispose d'influence et de
célébrité, donc d'impact à un moment
donné, il était inévitable qu'elle tombe
dans les pervers filets de la publicité.
Sans aller jusqu'à dire que "la star est
une marchandise totale comme l'écrit
Edgar MORIN1, pas un centimètre de
son corps, pas une fibre de son âme, pas
un souvenir de sa vie qui ne puisse être
jeté sur le marché", il est vrai que la
publicité saura rapidement utiliser,
parfois même à bon escient, les diverses
parties de son corps. Les tournedisques GRAMOPHONE sollicitèrent
la voix de CARUSO, les édulcorants
__________________
1 - "Les stars" Edgard MORIN, op. cit. p. 120.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
47
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Les colliers de perles CIRO ne
voyaient en Madeleine CARROLL, Fay
COMPTON et Adèle ASTAIRE que
leur
cou,
le
couturier
Karl
LAGERFELD utilisa la minceur d'Inès
de la FRESSANGE pour valoriser les
tailleurs CHANEL, les chemises
HATHAWAY s'illustrèrent avec le
buste de Bill COSBY ou encore celui de
Ted TURNER, les accessoires de
manucurie LA CROSS recoururent aux
mains de Joan CAULFIELD, Yvonne De
CARLO et Alice BRADY, les
cosmétiques
DIADERMINE
n'attachèrent de valeur qu'à la pureté
de la peau de Carole LAURE puis de
Gabrielle LAZURE, le dentifrice
DENTOL concentra son attention sur
les dents de Gabrielle ROBINNE,
Albert BRASSEUR et Dolly DAVIS,
KNORR sollicita les connaissances
gastronomiques de Pierre PERRET, les
montres GRUEN employèrent les
poignets de Joan FONTAINE, Guy
LOMBARDO et Mary MARTIN, la
crème à raser WILLIAMS démontra,
joues et menton de Ralph BELLAMY,
Humphrey BOGART, José FERRER ou
Boris KARLOFF à l'appui, la qualité de
son produit, la lingerie LEJABY fut
fascinée par la poitrine d'Isabelle
ADJANI2, puis par celle de Mathilda
MAY, pour ne citer que ces quelques
exemples. Le mythe allait dès lors être
exploité par d'autres "engendreurs" de
mythes3.
__________________
2 - Pour cette campagne, l'agence VISION ACTUELLE
obtint en 1988, le Grand Prix Stratégies, le Prix Mode
Textile et le Prix Presse magazine.
3 - "Journalistes et publicitaires sont des opérateurs
Chapitre I : Origines de la star
mythiques : ils mettent en scène, affabulent l'objet ou
l'évènement. Il le «livrent réinterprété» - à la limite, ils le
construisent délibérément. Il faut donc si l'on veut en
juger objectivement, leur appliquer les catégories du
48
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
1 - Origines du rapprochement
L'auteur
américain
Frank
4
PRESBREY date en 1477, la première
publicité écrite, réalisée en anglais pour
un livre écrit par William CAXTON, et
traitant des règles religieuses à suivre
pendant les fêtes de Pâques. En fait,
tout dépend du système de références
considéré. Les célèbres albums romains
ou
les
différents
emblèmes
caractéristiques situés à l'extérieur des
échoppes
des
bouchers,
des
poissonniers ou encore des boulangers
de Pompeii constituaient déjà en 79,
une forme de publicité. Quant à la
première utilisation d'une star... Si le
star-system ne vit le jour qu'au début
des années 1910, la publicité ne l'avait
pas attendu pour utiliser de célèbres
porte-parole afin de vanter les mérites
des produits dont on leur confiait la
charge avec ou sans leur accord.
Il est très difficile de dater
précisément les premières utilisations
de ce type. Pour palier le manque de
sources fiables en la matière, notons
simplement que cette stratégie
publicitaire reposait à l'origine sur la
seule célébrité du personnage, sans
aucun souci marketing d'adéquation ou
de résultats spécifiques. Elle fut donc
utilisée, dès que le développement de
l'information rendit possible la
"médiatisation" et dès lors la célébrité
des personnalités de l'époque. Dès que
l'on perçut l'impact dont pouvaient
bénéficier ces personnalités, auprès
mythe : celui-ci n'est ni vrai ni faux, et la question n'est
pas d'y croire ou de ne pas y croire [...] La publicité est
une parole prophétique dans la mesure, où elle ne donne
pas à comprendre ni à apprendre, mais à espérer." Jean
BAUDRILLARD, op. cit. p. 196 et suivantes.
__________________
4 - "The History and development of advertising" Frank
PRESBREY
Editions DOUBLEDAY, DORAN &
Company Inc. (1929), New York, Etats-Unis.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
49
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
d'un public en général peu cultivé,
sous-informé et donc largement
crédule. Nombreuses furent ainsi les
têtes couronnées et les politiciens de
l'Europe entière dont les traits, souvent
caricaturés, étaient déjà utilisés à des
fins commerciales à la fin du XIXe
siècle..
Les premiers recours à des
porte-parole célèbres, rémunérés pour
leurs bons offices, peuvent dans ces
conditions être approximativement
datés
vers
1880-1890.
Rosine
BERNARD, plus connue sous le nom de
Sarah BERNHARDT ne présentait-telle pas dès cette époque, lingerie,
cosmétiques, alcools, biscuits et
bonbons5 ? C'est très précisément en
1890 qu'elle fut peinte par CHERET sur
les affiches de LA DIAPHANE, la
célèbre poudre de riz6. Ces célébrités
trouvaient alors essentiellement leur
origine sur les scènes de théâtre, dans
les cabarets, ou les spectacles de
variétés. Mais dès les premières années
du XXe siècle, la publicité eut
également recours à des danseuses, des
chanteuses, des écrivains, ou toute
autre personnalité - aventuriers,
inventeurs, sportifs... - rendue célèbre
par l'actualité d'alors. Ce fut par
exemple le cas de Sacha GUITRY
encore très jeune, qui posa pour une
__________________
5 - Comme notamment aux Etats-Unis pour les chocolats
LOWNEY'S. "Advertising in America - The first 200
years" Charles GOODRUM et Helen DALRYMPLE,
Editions Harry N. ABRAMS, Inc. Publishers, New York,
Etats-Unis (1990) p. 28.
6 - "Célébrités à l'affiche - 100 ans de personnages
célèbres dans la publicité" Anne-Claude LELIEUR et
Raymond BACHOLLET, Editions CONTI-EDITA,
Lausanne, Suisse (1989) p. 123.
publicité humoristique parue en
Novembre 1913 dans l'Illustration, pour
les ceintures FRANCK-BRAUN. Leur
célébrité leur conférait un statut, une
autorité de fait et reconnue, dont on
peut penser que l'exercice sur une
population
de
consommateurs
relativement naïfs pouvait avoir des
résultats commerciaux positifs.
2 - Une technique séculaire
Avec le recul que nous autorise
le temps, il apparaît qu'aucun secteur,
aucun produit n'omit de courtiser un
jour
une
célébrité,
pour
sa
communication publicitaire et rares
furent alors les stars à refuser ces
propositions lucratives7. Privée ou
publique, humanitaire ou commerciale,
il est impossible de ne pas trouver au
moins une célébrité dans l'historique
publicitaire
de
chaque
secteur
d'activité.
Marcel
BLEUSTEINBLANCHET8 nous expliqua que "ça
donnait une valeur formidable à la
publicité, ça l'enrichissait. Les gens
aimaient entendre ces vedettes dans
leur rôle. Lorsqu'elles faisaient de la
publicité, elles le faisaient à leur
manière, et c'était un succès parce que
les gens étaient un petit peu crédules.
Le rôle des publicitaires est de trouver
des idées pour leurs clients. Moyennant
__________________
7 - Contrairement à ce que pense la journaliste Caroline
BRUN, "A la grande époque d'Hollywood, rares étaient
les stars qui s'abaissaient à faire la pub d'une marque ou
d'un produit [...] En France, le phénomène est beaucoup
plus récent" CAPITAL N°11 du mois d'Août 1992.
8 - Entretien privé accordé le 23 Mai 1991.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
50
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
500 ou 1.000 francs, on faisait faire une
déclaration à l'acteur en disant : «Je
déguste le sirop Dugludu parce qu'il m'a
guéri de mon rhume». C'était vraiment
de la réclame". Rappelons qu'à cette
époque, la star n'est pas du tout
segmentante ; elle est susceptible de
faire rêver pour différentes raisons,
plusieurs cibles à la fois. Elle devient
alors un élément marketing de
notoriété puissamment fédérateur et
très profitable pour la communication
publicitaire. Dès 1901, le fabricant de
biscuits LEFEVRE UTILE (LU) éditait
deux albums où le consommateur
pouvait
coller
des
vignettes
représentant le portrait des célébrités
du monde du spectacle. Ces vignettes
lui étaient remises pour chaque achat
de biscuits LU. En 1905, FELIX POTIN
cachait lui aussi 500 célébrités dans ses
tablettes de chocolat pour élargir le
nombre de ses consommateurs.
Au début du XXe siècle, la
publicité se faisait essentiellement par
voie écrite, faute de pouvoir recourir à
la radio, ou même au cinéma,9 encore
bien trop avare de son support sensible
pour le confier massivement aux
publicitaires. C'est la raison pour
laquelle ce sont dans les magazines et
journaux de l'époque, ainsi que sur
quelques affiches, que l'on trouve trace
de publicités utilisant le témoignage ou
la caution d'un personnage célèbre. On
notera d'ailleurs que dans certains cas,
__________________
9 - Sauf cas très exceptionnels. Au Centre National
d'Archives Publicitaires, la Présidente Anne Saint Dreux
et son équipe sont parvenus à dater en 1897, la réalisation
du premier film publicitaire par les frères LUMIERE,
pour le savon SUNLIGHT du groupe LEVER. C.N.A.P.,
113 rue des Moines, 75017 PARIS, Tél : 42.28.89.89.
les techniques utilisées ne sont pas si
éloignées
de
celles
employées
aujourd'hui. En 1910, saisissant
l'occasion d'un nouveau record de
l'aviation, la société MARIE BRIZARD
eut l'idée d'utiliser le témoignage du
célèbre aviateur BIELOWEIC sur une
publicité
pour
son
anisette.
Témoignage traditionnel, il est
cependant intéressant de remarquer la
construction originale pour l'époque,
de cette annonce. En premier lieu, une
accroche
était
suivie
d'une
photographie, dont l'utilisation était
encore loin d'être usuelle pour une
publicité, en 1910. Puis, la présentation
écrite de la main de l'aviateur lui-même,
de son impression à la suite de cet
exploit. L'utilisation du témoignage
direct est aujourd'hui encore un facteur
d'impact supplémentaire reconnu. Ce
n'est qu'à cet instant, que le lecteur
découvrait enfin le nom de l'annonceur,
MARIE BRIZARD. Le nom de
l'anisette n'était à aucun moment repris
sur l'annonce. Celle-ci comportait alors
le risque que la marque ne soit pas
perçue. Ecriture peu lisible, caractères
très fins,... En revanche, la photo de
l'aviateur, par son caractère peu usuel,
attirait immédiatement l'attention, et
une fois pris connaissance du thème de
l'annonce - le record Paris-Bordeaux l'intérêt du lecteur se portait
automatiquement sur le témoignage de
cette célébrité, comme s'il s'agissait de
rédactionnel.
L'objectif était atteint, la
publicité avait subtilement rempli son
rôle. Le lecteur était consciemment ou
non, commercialement informé par le
célèbre aviateur que "le véritable
réconfort après un raid en aéroplane,
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
51
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
c'est un verre
BRIZARD." !
d'anisette
MARIE
A cette époque, abondaient déjà
produits de beauté et autres remèdes
de bonne femme. Dès lors, allait naître
l'association publicitaire la plus
durable qui soit entre célébrités et
produits de consommation. Car si les
parfums et les cosmétiques sont encore
aujourd'hui grands consommateurs de
stars et principalement de stars
féminines, cette association bénéficie
d'une très vieille expérience. Toutefois,
si
cette
association
reste
caractéristique, elle n'en demeurait pas
moins prévisible, concernant cette
approche publicitaire. En effet, comme
nous l'avons vu, la star est
généralement très belle10 et très
maquillée. Dès lors, qui, mieux qu'une
très belle femme et surtout reconnue
comme telle, pouvait offrir son
témoignage à des produits dits "de
beauté" ?
__________________
10 - "L'expert posséde l'expérience, le consommateur type
tire son intérêt de la similitude [...] les célébrités faisant
de la publicité sont généralement attractive et
sympathique". Hershey H. FRIEDMAN et Linda
FRIEDMAN "Endorser effectiveness by product type"
dans JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH
Volume 19 du 5 Octobre 1979, p.63-71
En France, bien avant Max
FACTOR, George WESTMORE et
Elizabeth ARDEN – les célèbres
maquilleurs des stars hollywoodiennes
–, l'un des plus fameux exemples reste
le cas du parfumeur LENTHERIC.
Musiciennes renommées, actrices de
vaudeville ou de théâtre, cantatrices,...
LENTHERIC fit siennes toutes les
célébrités féminines de l'époque.
Pourtant, l'utilisation de la célébrité
n'était pas toujours mise en valeur de
manière adéquate. Le témoignage ou
même simplement le visage de la
célébrité était parfois totalement
rapporté, comme en témoignent la
plupart des publicités exploitées en
1913. Elles ressemblaient au publirédactionnel
que
l'on
connaît
aujourd'hui, en expliquant en détail la
manière de recourir aux différentes
couleurs de poudre de riz pour modifier
les contours du visage. A aucun
moment le visage de la célébrité n'était
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
52
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
relié de quelques manières que ce soit,
au contenu du texte.
Mais LENTHERIC avait depuis
plusieurs années déjà créer ce code de
l'utilisation de célébrités, pour
cautionner ses parfums. Dès lors,
probablement pour rester fidèle à cet
axe publicitaire, ne pas briser le code,
et conserver l'identification dans
l'esprit
du
consommateur,
le
témoignage même muet, d'une célébrité
était requis quelque soit le contenu de
ses
publicités.
Ces
célébrités
représentaient des symboles de gloire,
de beauté, pour le vulgum pecus, et la
publicité a toujours aimé jouer avec les
symboles11.
Dès le milieux des années 20, si
la publicité continue toujours à utiliser
des célébrités du monde des variétés
comme Maurice CHEVALIER et
Yvonne
VALLEE
pour
les
graphophones VITUS en 1925, elle ne
se trompe pas sur le fantastique
potentiel d'un cinématographe encore
très jeune mais en pleine effervescence
depuis l'avènement du parlant12. Cette
__________________
12 - Selon les auteurs, la date exacte diverge, certains
__________________
11 - "Le travail de la publicité est de manipuler les
symboles. Les symboles de la mode, de l'élégance sont
utilisés pour présenter sous des couleurs séduisantes les
vêtements, les cosmétiques. Les symboles de la gaieté
juvénile vendent des softdrinks et des confiseries. Les
symboles de l'aventure et de la sportivité sont utilisés
pour promouvoir des cigarettes ou de l'alcool [...] La
publicité est un fantastique créateur et dévoreur de
symboles" S.I. HAYAKAWA "Language in thought and
action" Editions HARCOURT, N.Y.., Etats-Unis (1964)
pp. 268-269.
Chapitre I : Origines de la star
puristes mettant en exergue les premiers essais réalisés
par Thomas A. EDISON ou d'autres pionniers du
cinématographe, d'autres considérant la première
exploitation commerciale. Dans cette dernière optique, le
premier film partiellement (environ 281 mots) parlant fut
produit par la WARNER Bros. - qui livrait alors une
historique lutte technologique avec la FOX, pour être la
première compagnie à produire un film parlant - en 1927.
Il s'agit du légendaire The Jazz Singer mis en scène par Alan
CROSLAND et avec pour interprète principal, le
chanteur acteur Al JOLSON. Voir notamment sur ce
point Joel W. FINLER op. cit. p. 37-38 . "La fabuleuse
histoire de la WARNER Bros." Clive HIRSCHHORN,
Editions CELIV, Paris (1984) p. 57. "La société de
connivence - Media, Mediations et classes sociales" Paul
53
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
évolution ne fut d'ailleurs pas sans
poser de problèmes à quelques stars,
dont la voix "catastrophique" mit leur
carrière en péril. Ce fut notamment le
cas de Corinne GRIFFITH, Pina
MENICHELLI, Renée ADOREE, Bessie
LOVE, Ramon NOVARRO ou encore
John GILBERT, qui fut contraint par
les Studios, de prendre des cours de
diction, mais ne parvint jamais à
retrouver la gloire qu'il avait eu au
temps du muet. Le charme était
rompu !
De surcroît, de nouvelles salles
apparaissent, elles sont équipées pour
les projections sonores dans de
"bonnes" conditions. Les films euxmêmes sont de plus en plus diffusés. Ils
ne sont plus l'apanage de quelques
rares copies exploitées quelques
semaines dans l'arrière salle d'une
épicerie. Le cinéma est devenu en une
poignée d'années une véritable
industrie. Pour briller, cette industrie
avait besoin d'étoiles, et elle se les ait
découvertes ou créées.
C'est donc très logiquement que
les publicitaires d'alors détournent leur
regard vers ces nouvelles célébrités que
l'on appellera désormais les stars. Et
toutes se prêtent au jeu de la publicité.
Ainsi, Charlie CHAPLIN et David W.
GRIFFITH vantent les mérites des
caméras BELL & HOWELL, Mabel
NORMAND, Norma TALMADGE,
Priscilla DEAN et Betty COMPSON
utilisent les cosmétiques WATKINS et
Gary COOPER devient "Prince de
l'élégance" pour les pulls JERRY-J dès
1927. En France, MISTINGUETT pose
pour l'apéritif REGALS et pour les
BEAUD, Editions AUBIER/Res. BABEL, Paris (1984) p.
166-167 .
Chapitre I : Origines de la star
vêtements LEMERCIER RAGLENAT.
SAINT-GRANIER ne porte que les
casquettes ELINA, ARLETTY choisit
ses bijoux chez OREUM, Huguette
DUFLOS déguste l'apéritif CAMPARI
et se maquille avec TOKALON ou
BICHARAT
alors
qu'Yvonne
PRINTEMPS choisit de se parfumer
avec ISABEY. La campagne des
portraits célèbres de CADUM13 bat son
plein. L'aviateur Charles LINDBERGH
signe ses autographes avec un
WATERMAN et recommande l'huile
MOBIL.
1930, le cinéma doit lui aussi
faire face à la crise économique, les
films sont moins nombreux. Or, qui dit
crise, dit besoin de communication
accru pour survivre aux dépends de la
concurrence sur un marché qui se
restreint. Tous les Studios créent ou
réorganisent alors leur département
publicité, les plaçant même parfois
directement sous le contrôle du
Directeur du studio. C'est l'apogée des
indiscrétions, des commérages, des
fausses-vraies et des vraies-fausses
informations sur le Studio, ses films et
bien entendu ses stars14, qui se heurte
__________________
13 - Voir également en annexes, l'analyse du cas LUX page
669.
14 - "Une manipulation et un façonnage minucieux des
stars étaient caractéristiques de la M.G.M., qui était
également très fière de posséder l'un des meilleurs
département photos de Hollywood ayant sous contrat
des photographes de premier plan tels que Clarence
SINCLAIR BULL, Ruth HARRIET LOUISE et George
HURRELL. Ce département était un outil essentiel pour
présenter sous de séduisantes couleurs, les principales
stars féminines. De surcroît, une prise de vues initiale
était absolument essentielle pour chaque nouvelle
arrivée, aussi bien pour tester la réponse du public au
regard de photographies échantillons insérées dans les
magazines, les journaux et les publications des fan-clubs,
54
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
rapidement aux contrôles du HAYS
Office15. Cette médiatisation accrue des
stars va favoriser leur utilisation par la
publicité, cette dernière disposant dès
lors d'une foultitude de porte-parole
célèbres, en lesquels le consommateur
aura toute confiance ou aimera tout
simplement s'identifier en consommant
les mêmes produits et les mêmes
services. Par ailleurs, de nombreux
publicitaires comprennent que cette
approche comporte le gros avantage de
pouvoir souvent délaisser quelque peu
l'argumentation produit, au profit d'un
visage
sensé
convaincre
le
consommateur
par
sa
simple
16
juxtaposition au produit .
que pour permettre aux dirigeants du studio d'analyser
avec l'aide complémentaire d'un test écran, l'opportunité
d'offrir un contrat à la nouvelle venue". "The Hollywood
Story" de Joel W. FINLER paru aux Editions OCTOPUS
BOOKS Limited (1988) Londres, Grande-Bretagne, p. 1617. Recherchant les attentes du public, on perçoit dès lors
l'adjonction des principes d'une démarche marketing, à
l'unique et traditionnel flair des moguls.
15 - A la demande des Studios faisant face à divers
scandales, dont l'affaire William Desmond TAYLOR,
Will HAYS, ex-Directeur général des Postes du Président
HARDING, fut nommé à la tête d'un bureau qui allait
rapidement porter son nom. Son objectif était en quelque
sorte de faire la police au sein des Studios. A partir de
1930, il veilla à l'application des très strictes règles
énoncées dans le célèbre Production Code. "Hollywood The glamour years (1919-1941)" de Robin LANGLEYSOMMER paru aux Editions HAMLYN (1987), Londres,
Grande-Bretagne, p. 24-25, 93. Voir également "Behind de
screen - the history and techniques of the motion picture"
Kenneth MacGOWAN, Edtions DELL PUBLISHING C°
Inc., New York, Etats-Unis (1965) p. 352.
16 - "La publicité induite par les stars s'apparente à une
forme de publicité qui sera dite pure parce que dégagée de
toute information factuelle à l'égard du prix, de la qualité
du produit, de la localisation ou de la disponibilité du
service rendu" Silvère PIQUET op. cit. p. 76.
Les annonceurs américains les
plus divers l'ont bien compris et se
battent déjà à noms de stars. Si Shirley
TEMPLE apprécie les automobiles
DODGE, Ginger ROGERS, Eddie
CANTOR, Janet GAYNOR, Frederic
MARCH, Gary COOPER, Tyrone
POWER ou Carole LOMBARD
conduisent une automobile De SOTO,
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
55
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Lawrence TIBETT lui, roule en
PACKARD, et Lilly DACHE choisit
PONTIAC, alors que Geneviève
TOBIN, Al JOLSON, George BRENT
ou Dick POWELL leur préfèrent
BUICK. Bing CROSBY quant à lui
hésite
entre
De
SOTO
et
OLDSMOBILE ! Le dentifrice CALOX a
déjà séduit de très nombreuses stars
telles que Joan BENNETT, Melvyn
DOUGLAS, Olivia De HAVILLAND,
Joan BLONDELL, Fred Mac MURRAY,
Dick POWELL, Miriam HOPKINS,
Claudette
COLBERT,
Dorothy
LAMOUR, Merle OBERON, Shirley
TEMPLE,
Barbara
STANWYCK,
Veronica LAKE, Fred ALLEN,... Bob
HOPE se rase avec GEM, alors que Joan
CRAWFORD, Rosalind RUSSELL et
Greer GARSON sont parmi les
premières d'une longue liste à
apparaître sur les annonces pour
l'argenterie ROGERS Bros. Fred Mac
MURRAY et Shirley TEMPLE
conseillent à leurs fans les céréales
QUAKER. Quant aux trois fondateurs
de
UNITED
ARTISTS,
Mary
PICKFORD, Charlie CHAPLIN et
Douglas
FAIRBANKS,
ils
accompagnent Gloria SWANSON en
croisière pour la compagnie maritime
CUNARD.
C'est alors que les premiers soap
opera apparaissent sur les ondes
17
__________________
17 - Soap opera : Série de fiction, à l'origine radiophonique
(dès 1932) puis télévisée, qui était sponsorisée par un
annonceur. Certains débutèrent à la radio et terminèrent
à la télévision comme "The Guiding light" diffusé sur CBS.
Créé par Irna PHILLIPS, ce soap opera apparut le 30 Juin
1937 à la radio et fut transposé à la télévision en 1952. Au
moment où ces lignes sont tapées, les péripéties de la
famille BAUER et de leur entourage ne sont toujours pas
terminées... "Total television - a comprehensive guide to
programming from 1948 to the present" Alex McNEIL,
radiophoniques
américaines,
galvanisant l'attention de centaines de
milliers d'auditeurs. Les agences de
publicité ne s'y trompent pas et tels de
véritables studios de production
cinématographique, sont fières de
présenter les multiples stars au service
de leurs annonceurs, comme par
3ème édition, Editions PENGUIN BOOKS, New York,
Etats-Unis (1991) p. 315-319 ; Charles GOODRUM &
Helen DALRYMPLE "Advertising in America" op. cit.
page 39. Littéralement "opéra savon" parce qu'au début
ces séries étaient en grande majorité parrainées par des
marques de lessive de groupes tels que LEVER ou
PROCTER & GAMBLE. Voir notamment : "The Saga of
P&G's IVORY soap : Keeping a brand afloat 100 years"
Nancy F. MILLMAN, ADVERTISING AGE du 2 Juillet
1979. Il arrivent parfois que ces annonceurs produisent
eux-mêmes ces séries et les échangent (bartering) aux
chaînes de télévision contre de l'espace publicitaire ; si
c'est aujourd'hui moins le cas pour diverses raisons, il
n'était alors pas rare dans les années 50 de voir
l'annonceur saisir cette opportunité pour veiller à ce que
le scénario comporte une ou plusieurs occasions de faire
consommer ou utiliser ses produits par les héros. La seule
différence avec les exemples actuels est que le show n'a
alors qu'un seul sponsor. On parle de Bing CROSBY et
KRAFT CHEESE, de Bob HOPE et PEPSODENT, Fibber
McGEE et JOHNSON WAX,..."Great moments of
television" Thomas G. AYLESWORTH, Editions
EXETER BOOKS, New York, Etats-Unis (1987) p. 12.
Voir également "History of television" Rick
MARSCHALL, Editions GALLERY BOOKS, New York,
Etats-Unis (1986) p. 26-93 ; "Soap Opera History" Mary
Ann COPELAND, Editions MALLARD PRESS /
Publication International Ltd, Lincolnwood, Illinois,
Etats-Unis (1991) et "Des enzymes gloutons pour la
culture
audiovisuelle"
Laurent
NEUMANN,
STRATEGIES n°542, 22 Décembre 1986. Toutefois, on
oubliera pas de rappeler le cas cité par Vance PACKARD
dans son livre "La persuasion clandestine" paru au
éditions CALMANN-LEVY (Paris, 1958, page 145) à
propos de la série I Love LUCY - exploitée de 1951 à 1957 qui était sponsorisée par les cigarettes PHILIP MORRIS.
Ce show fut le plus populaire de la télévision à l'époque.
Or, dans le même temps les ventes de cigarettes PHILIP
MORRIS chutèrent de 17%. La raison évoquée par le
magazine Tide serait alors que le public avait "tendance à
parler de l'excellence de la pièce pendant l'émission
publicitaire" ! Voir également à propos de ce dernier
exemple le paragraphe : un facteur anti-zapping, page
108.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
56
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
exemple
l'agence
J.
WALTER
THOMPSON18 dès 1935. En France
aussi, quelques annonceurs perçoivent
que cette stratégie comporte toujours
de nombreux avantages. La chanteuse
Joséphine BAKER est par exemple en
1931, l'ambassadrice publicitaire de
COLUMBIA. Le célèbre GROCK, "le
plus grand clown de tous les temps"
selon Groucho MARX, devient le
porte-parole des lames de rasoir
KIRBY-BEARD.
Gisèle
ARELLY
recommande
le
dentifrice
VADEMECUM, alors que Dolly
DAVIS, DRANEM, Alice BONHEUR,
Albert
BRASSEUR,
Gabrielle
ROBINNE, Suzanne REVONNE ou
Esther KISS lui préfèrent celui
commercialisé
sous
la
marque
DENTOL. Comme la célèbre cantatrice
Hortense
SCHNEIDER,
l'actrice
Danielle DARRIEUX pose pour les bas
CORNUEL. Yvonne PRINTEMPS,
Sacha
GUITRY
et
Sergheï
RACHMANINOV font confiance aux
gramophones de LA VOIX DE SON
MAITRE. Gaby MORLAY ne se baigne
qu'avec un maillot JANTZEN et les
bijoux BURMA lancent leur grande
campagne célébrités avec des stars
toujours plus belles et toujours plus
nombreuses telles que Edwige
FEUILLERE, MISTINGUETT, Viviane
ROMANCE, Gaby MORLAY, Elvire
POPESCO ou Madeleine RENAUD.
COLETTE quant à elle, écrit sur des
bulles de PERRIER, entre deux
bouffées de LUCKY STRIKE...
__________________
18 - J. WALTER THOMPSON est à cette époque, l'une
des deux agences avec LORD & THOMAS, les plus
actives dans ce domaine. Stephen FOX, "The mirror
makers : A history of American advertising and its
creators"
Editions WILLIAM MORROW AND
COMPANY (1984), New York, Etats-Unis page 156.
1940, alors que la radiodiffusion
est depuis quelques années en pleine
expansion19, les Majors20 se distinguent
__________________
19 - "Convenables ou non, ces émissions furent
consommées par un public avide qui possédait
collectivement quelques dix-sept millions d'appareils
radio et prêtait aux cajoleries des agences publicitaires
plus de cinquante millions de paires d'oreilles
complaisantes. Les annonceurs étaient ravis de voir leurs
produits cautionnés par des artistes aussi renommés
qu'Al JOLSON, Eddie CANTOR, Will ROGERS, Bing
CROSBY ou George BURNS et Gracie ALLEN - pour ne
citer qu'une partie des transfuges du cinéma et du musichall attirés par la radio et par des cachets allant jusqu'à
cinq mille dollars par semaine." "Flywheel, Shyster &
Flywheel" Michael BARSON, paru en France sous le titre
"Reniflard and C°" aux Editions PRESSES DE LA
RENAISSANCE , Paris (1989). Le livre présente
l'émission radiophonique des Marx Brothers diffusée sur
le réseau CBS pendant les années 30. Dans son avant
propos, l'auteur présente et analyse le rôle, les ambitions
et le pouvoir des grandes compagnies américaines, qui
étaient alors les sponsors de ces programmes
radiophoniques.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
de plus en plus des minors21. Le poste
de radio vit ses plus belles heures de
gloire, notamment en raison de la
guerre. Sur le vieux continent le public
se détourne quelque peu des salles de
cinéma pour consacrer son attention
aux nouvelles du front et parce que les
nouveaux films sont plus rares. En
Europe, les progressions d'Adolphe
HITLER privent les Majors de plus de
50 % de leurs débouchés, et la
production cinématographique en
subit sévèrement les conséquences.
20 - Du latin major "plus grand que". Abréviations de Major
companies, les plus grandes compagnies de production
cinématographiques américaines The Big Five parmi
lesquelles on trouvait Paramount, Metro-GoldwynMayer (M.G.M.), Warner Bros., Fox (qui deviendra 20th
Century Fox à la suite d'une fusion avec la 20h Century
en 1935) et Radio Keith Orpheum (R.K.O.)
comparativement aux Minor companies, The Little Three
d'une part, représentées par Universal, United-Artists et
Columbia ; et aux Indépendants d'autre part. Voir sur ce
point "Cinéma et Monopole. Le cinéma aux Etats-Unis :
Etude économique" Henri MERCILLON, op. cit. p. 113 et
suivantes. "Economie du Cinéma américain" Joël
AUGROS, Editions MEDIATHEQUE - EDILIG, Paris
(1985) p. 12-25. "Hollywood : L'âge d'or des studios"
Douglas GOMERY, op. cit. p.13 et suivantes. "The
Hollywood Story" Joel W. FINLER, Editions OCTOPUS
Books, Londres, Grande-Bretagne (1988) pp. 44-47 ; 67 et
suivantes.
21 - Voir Robert BRASILLACH, op. cit. p. 118.
De surcroît, après le HAY's Office,
l'industrie du 7ème Art, est touchée de
plein fouet par les attaques du
politicien Martin DIES, accusant
Hollywood de communisme généralisé
et de pousser les Etats-Unis à entrer en
guerre. De ce fait, la radio devient
rapidement le prisme de toute
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
information. Si l'auditeur ne peut en
raison du medium lui-même, voir le
visage du speaker, certaines voix,
certains
shows
sont
tellement
identifiables et appréciés du public,
que ce dernier se trouve rapidement de
nouvelles idoles y compris parmi
certaines stars du cinéma, reconverties
à ce "vieux" medium. Et la publicité ne
perd pas un instant pour s'arroger une
fois encore ces talents en herbe ou
confirmés,
en
associant
leur
personnalité à ses chers annonceurs.
C'est aux Etats-Unis la grande
époque
des
"sponsorisations"
radiophoniques
qui
seront
immédiatement déclinées en télévision
quelques années plus tard. On constate
d'ailleurs un revirement total du
comportement des Studios, par rapport
à la décennie précédente. Ces derniers,
percevant dès lors la radio comme un
trop sérieux rival, interdirent à leurs
grandes vedettes de participer plus
longtemps
à
des
programmes
radiophoniques. C'est ainsi par
exemple que Tyrone POWER, dont les
émissions radiodiffusées connaissaient
un large succès, dut arrêter sur
injonction personnelle de Darryl F.
ZANUCK, fondateur de la 20th
CENTURY qui venait de fusionner
avec la FOX, en 1935.
Dès le lendemain de la guerre, le
cinéma est redevenu assez puissant
pour ne plus craindre une éventuelle
concurrence de la part de la radio et les
acteurs sont à nouveau nombreux sur
les ondes. Si en France, les stars
disparaissent presque totalement de la
communication publicitaire, la guerre
n'influence
aucunement
l'activité
commerciale
des
stars,
outreAtlantique. Ainsi Frank SINATRA,
Edgar BERGEN, Groucho MARX,
Maria MONTEZ, Loretta YOUNG,
Perry
COMO,
Jeannette
Mac
DONALD, Judy GARLAND Betty
HUTTON, Carmen MIRANDA, Bing
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
CROSBY et même Mickey MOUSE
apparaissent sur des publicités pour le
géant GENERAL ELECTRIC. Fred
ALLEN devient le porte-parole numéro
un
des
carburants
TEXACO.
L'argenterie ROGERS Bros. séduit
Paulette GODDARD, Kay FRANCIS,
Ginger ROGERS, Carole LOMBARD,
Ellen DREW, Laraine DAY, Loretta
YOUNG, Linda DARNELL, Mirna LOY
et bien d'autres. Basil RATHBONE,
Eddie BRACKEN, Dorothy LAMOUR,
Edward G. ROBINSON, Jimmy
DURANTE, Claude RAINS et Adolphe
MENJOU ne signent leurs autographes
qu'avec un stylo STRAFORD. Esther
WILLIAMS, qui raffole des céréales
KELLOGG'S, présente la collection de
maillots de bain COLE et Humphrey
BOGART de ne porte plus que des
chapeaux RESISTOL.
gouvernementale, dans le cadre de
campagnes pour l'achat de bons du
Trésor américain.
Fin des années 40, la seconde
guerre mondiale est terminée, la
reconstruction et avec elle la croissance
et la consommation, s'installent. Tous
les produits se cherchent alors leur
porte-parole d'une campagne, ou
exclusif, alors qu'un nouveau vecteur
de communication s'affirme : la
télévision22. De surcroît, ce nouveau
medium se destine, comme la radio, à
un très vaste public. Or, la star
comporte par définition, l'avantage de
pouvoir s'adresser à l'ensemble de cette
__________________
22 - Voir "Television in America" de Thomas G.
Sans oublier la participation
symbolique de la quasi totalité des
stars en faveur de la communication
AYLESWORTH, Editions EXETER BOOKS, New York,
Etats-Unis (1986) p. 103 et s. ; "The Golden age of
television" Rick MARSCHALL, Editions EXETER
BOOKS, New York, Etats-Unis (1987). A propos des
débuts de TELE-PARIS en France, voir notamment
"L'aventure de la télévision, des pionniers à aujourd'hui"
Jacques MOUSSEAU et Christian BROCHAND,
Editions NATHAN IMAGE, Paris (1987).
Chapitre I : Origines de la star
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
audience23. Quel que soit son "domaine"
de célébrité, la chasse est ouverte. La
guerre publicitaire des stars est
déclarée, et principalement aux EtatsUnis. Attention, tous les coups sont
permis, tous les produits sont à vendre,
et très rares sont les stars que l'on ne
parvient pas à séduire. Car souhaiter
engager une star pour vendre son
produit ou son annonceur, est une
chose ; la convaincre comme nous
l'analyserons ci-après, en est une autre.
Or, la publicité gère elle-même le nerf
contractuel de la guerre commerciale :
l'argent. Pour un travail ordinairement
peu
astreignant,
d'une
durée
généralement courte, la publicité offre à
ses porte-parole, de satisfaisants
subsides, propres à convaincre les plus
puritains. Les Américains ont été les
premiers à comprendre les avantages de
cette opportunité et à en exploiter tous
les aspects.
DOUGLAS, alors que son partenaire de
nombreux films, Bing CROSBY,
présente aux consommateurs, avec
Nancy
OLSON,
les
multiples
utilisations possibles des rubans
adhésifs SCOTCH. La naïade Esther
WILLIAMS loue HERTZ, mâche du
chewing-gum WARRENS, et se
maquille avec LUSTRE-CREME. Une
marque pour laquelle opte également
Marilyn MONROE qui vante par
ailleurs aux hommes, les chaussures
CITY-CLUB de PETERS. Aux côtés de
Charles BOYER, Charles LAUGHTON
et Agnès MOOREHEAD, LE cow-boy
américain, "the Duke" John WAYNE,
vante les mérites d'une pause café en
savourant des chocolats WHITMAN'S
avec
Douglas
FAIRBANKS
Jr,
Elizabeth TAYLOR, Van JOHNSON,
Esther WILLIAMS, James STEWART,
Dorothy
LAMOUR,
Burt
LANCASTER, Alan LADD,...
C'est alors la plus faste période
d'association entre les stars et la
publicité, qu'ait connue la publicité,
notamment aux Etats-Unis. PARKER
lance une splendide campagne avec
Doris DAY, Charles COBURN, William
HOLDEN et Bob HOPE, qui par
ailleurs affirme ne voler que sur DC-6
__________________
23 - "Les nouveaux supports, radio ou télévision, qui
relèvent de la «constellation Marconi» s'adressent dans le
même moment à une vaste audience, et posent aux
publicitaires un problème synchronique : les millions de
téléspectateurs qui voient simultanément la même
annonce la perçoivent-ils tous de la même manière ? C'est
ce qu'affirme implicitement la théorie de la
communication de masse ; parler de «mass media»
suppose un public massifié, c'est à dire amorphe." Gérard
LAGNEAU "Sociologie de la Publicité" 3ème édition
Collection Que Sais-Je ?, Editions P.U.F., Paris (19771988) p. 25.
Groucho MARX préfère les
céréales KELLOGG'S pour son petit
Chapitre I : Origines de la star
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
déjeuner, et n'utilise que des batteries
AUTO-LITE pour sa voiture. Exemple
suivi par Gene TIERNEY, Virginia
MAYO, Gary COOPER, Tyrone
POWER, Betty GRABBLE, Gene
AUTRY, Alan LADD, Fred Mac
MURRAY, Maureen O'HARA, Loretta
YOUNG et Jeanne CRAIN notamment.
Richard WIDMARK, à l'instar de
Ronald REAGAN, José FERRER,
Charlton
HESTON,
William
HOLDEN, Richard CARLSON, Danny
KAYE, Jeff CHANDLER, Anthony
QUINN, Ray MILLAND, Steve
COCHRAN, Peter LORRE, Jerry
LEWIS, Tony CURTIS ou Alan LADD
ne choisit ses chemises que chez VAN
HEUSEN.
Suivant les conseils de Paulette
GODDARD, Ann BLYTH et Jane
RUSSELL recommandent les produits
SYLVANIA tout en se meublant chez
LANE CEDAR CHESTS. Linda
DARNELL, Carole LANDIS, Teresa
WRIGHT, Barbara STANWYCK, Gary
COOPER et Ginger ROGERS ne
boivent plus que du thé LIPTON,
lorsque ce n'est pas du cola ROYAL
CROWN, qui de son côté lance lui
aussi une grande campagne Célébrités,
sur laquelle nous reviendrons.
En France, dans les années 1950,
les stars qui se montrent en publicité
sont encore peu nombreuses. On trouve
néanmoins quelques exceptions comme
Gilbert BECAUD qui roule déjà en
scooter VESPA, Georges BRASSENS et
SHEILA pour les téléviseurs PHILIPS,
Jean MARAIS pour le magazine
LECTURE
D'AUJOURD'HUI
et
l'apéritif CINZANO avec Martine
CAROL, Luis MARIANO, Micheline
PRESLE et Raymond ROULEAU.
PSCHITT également, qui réussit déjà à
séduire diverses vedettes telles Dany
ROBIN, Jeanne MOREAU, Geneviève
PAGE et Danièle DELORME pour une
mini-saga publicitaire en faveur de sa
boisson gazeuse. Sans oublier bien sûr
LUX qui exploite en France l'image de
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
stars américaines telles que Judy
GARLAND ou Susan HAYWARD mais
qui commence également à utiliser de
plus en plus de stars françaises comme
Simone SIGNORET, Jeanne MOREAU,
Brigitte BARDOT, Line RENAUD,
Renée SAINT-CYR, Martine CAROL,
Nicole COURCELLE ou Françoise
ARNOULT qui avec Annie CORDIE et
Annie GIRARDOT utilisent MAKEUR
pour leur maquillage.
Le début de la décennie suivante
confirme le développement de cette
association stars / publicité et
notamment en France. Gilbert
BECAUD, Michel PAJE et Lucky
BLONDO écrivent leurs textes avec un
stylo
WATERMAN
alors
que
REYNOLDS engagent les FRERES
JACQUES, également sollicités par les
parapluies SAUVAGNAT. Louison
BOBET, de même que Gil DELAMARE,
ne sort jamais sans sa médaille
RHESOR. Le célèbre duo Georges De
CAUNES et Roger COURDERC
commente les avantages de la lotion
capillaire ISOPAN-H. France GALL
utilise la teinture POLYCOLOR.
MOUSTACHE qui préfère la bière
SLAVIA, sait aussi déguster le punch
DUQUESNE. Pierre DORIS ne mange
que des pâtes LUSTUCRU et persuade
les Français des avantages de la
méthode ASSIMIL d'apprentissage des
langues
étrangères.
Sophie
DESMARET, Colette RENARD et
Sacha DISTEL vantent les avantages
des rideaux PLEIN JOUR. Jean
MARAIS atteste la qualité textile du
PLI
PERMANENT
et
Claude
FRANCOIS présente lui-même sa ligne
vestimentaire PODIUM.
Quant à LUX, il poursuit sa
moisson de stars avec Mireille
MATHIEU, Milène DEMONGEOT,
Catherine DENEUVE, Jane FONDA,
Marie-José NAT, Ursula ANDRESS et
Michèle MORGAN entre autres. Mais
témoin
de
l'évolution
des
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
caractéristiques des stars, de leur
relative démythification, certaines
campagnes poursuivent même les stars
dans leur vie quotidienne. ordinaire
C'est par exemple le cas des conserves
WILLIAM SAURIN. Ainsi en 1967, le
comédien Daniel GELIN et toute sa
famille, se prêtent à un publi-reportage
de trois pages, réalisé en collaboration
avec le magazine PARIS-MATCH, sur
les qualités des produits WILLIAM
SAURIN. Dans cette optique, trois
pages consécutives de publicité
peuvent avoir un énorme impact. Or,
avec un rédactionnel aussi conséquent,
le risque d'évaporation naturelle des
lecteurs est très important D'où l'idée
d'intégrer un fil conducteur qui
accroche ce lecteur dès la première
page et ne le libère qu'à la fin de
"l'article publicitaire". Daniel GELIN
jouait parfaitement le rôle de ce fil
conducteur, aidé il est vrai par la
caractéristique essentielle du publireportage : une rédaction et une mise
en page similaires à celles des autres
articles du support. Aux États-unis, si
Frank SINATRA fait la promotion des
hôtels SANDS en écoutant ses
enregistrements sur magnétophones
GARRARD, si Stephanie POWERS et
Rhonda FLEMING se protègent des
ultraviolets
avec
la
lotion
COPPERTONE et si Jerry LEWIS
saute de joie en enfilant des chaussettes
INTERWOVEN, les stars américaines
sont relativement moins nombreuses
que les années précédentes, à
apparaître en publicité. En effet, après
l'idéalisme
de
la
société
de
consommation empreinté aux années
30, l'Amérique se réveille brutalement,
plus réaliste, pour découvrir la guerre
du Viêt-nam.
Aucune tendance n'est éternelle
et de la seconde moitié des années 60
jusqu'aux premières années de la
décennie 70, les stars sont moins
sollicitées. Les moeurs évoluent et les
stars qui se sont peut-être trop
humanisées au contact de leurs
semblables, ont à jamais perdu une
grande partie de leur pouvoir mystique.
Le cinéma qui jusqu'à présent avait
véhiculé l'histoire de héros invincibles,
se tourne lui-même peu à peu vers
d'autres personnages. Plus ordinaires,
plus humains, parfois sordides, les antihéros qui sont nés dans les dernières
années de la décennie 60, s'affichent
désormais au grand jour, et en tête
d'affiche de surcroît.
Corollaire immédiat, la publicité
se détache quelque peu de ses
célébrités, sans pour autant toutefois
renoncer à leur utilisation. On notera
que ce recul quantitatif relatif coïncide
avec la période phare des sciences du
marketing. Le comportement du
consommateur apparaît comme un
élément de plus en plus discernable,
maîtrisable, exploitable. Si en France,
WOOLITE entame en 1973 sa propre
saga "hollywoodienne", non pour laver
plus blanc, mais "sans feutrer ni
rétrécir" au contact des stars, les autres
exemples caractéristiques demeurent
moins nombreux.
Aux Etats-Unis, la publicité
précise parallèlement peu à peu son
intention de tourner son regard vers
d'autres stars, moins sollicitées jusqu'à
lors. ROLEX par exemple, entame une
grande campagne avec des sportifs, des
chanteurs d'opéra, des metteurs en
scène, des musiciens, des explorateurs
et des scientifiques dont les prestations
Chapitre I : Origines de la star
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
publicitaires étaient jusqu'à lors quasi
inexistantes pour la plupart. Quant aux
stars de la carte AMERICAN
EXPRESS24, qui elle aussi lance une
nouvelle grande campagne, si l'on
connaît leur nom, étrangement mais à
propos, leur visage ne nous est pas
familier. Que sont donc devenues les
stars mythiques de Hollywood ?
Ce retrait des stars ne dure pas
et 1972-74 voit une nouvelle inversion
de tendance plus puissante que la
précédente.
Aux
Etats-Unis
principalement, le cinéma renoue avec
les grandes aventures. Ainsi, les héros,
différents et plus nombreux, sont de
retour parmi nous, et avec eux une part
de ce mythe auquel bien que ni croyant
plus tout à fait, on aime rêver25. C'est
un phénomène intéressant que l'on
avait déjà rencontré dès les années 20
et 30 avec The LONE RANGER,
Charlie
CHAN,
Nick
l'INTROUVABLE, Dick TRACY et
autres Mr MOTO. A nouveau, plusieurs
stars américaines doivent désormais
partager de plus en plus leur notoriété
et leur image avec leurs personnages26.
__________________
24 - Voir également en annexes, l'analyse des cas ROLEX
(page 645) et AMERICAN EXPRESS (page 656).
25 - "Sorte de sauvage noble qui en a eu assez du système
qui réduit les hommes à des numéros et qui pris les armes
contre lui avec adresse, astuces et talent. [...] Aimez-le ou
détestez-le, avec ses deux séries de films à succès,
Sylvester STALLONE à réinstallé le héros au fronton de
la mythologie américaine" in "Rocky and Rambo" Peter
GOLDMAN, Peter McALEVEY, Shawn DOHERTY, John
McCORMICK et Frank MAIER, NEWSWEEK du 23
Décembre 1985. Voir également "Bang ! Pow ! Zap !
Heroes are back" Gordon M. HENRY, Eborah FORBIS et
Walter GALLING, TIME du 6 Octobre 1986.
26 - Ce phénomène est d'autant plus intéressant ici, que
Sean CONNERY est James BOND,
Sylvester STALLONE est ROCKY ou
RAMBO, Christopher REEVE est
Superman, Roy THINNES est David
R.S.C.G. Paris repense la communication des caméscopes
de son client HITACHI en Mai 1991, elle ne recourt pas à
l'acteur Roy THINNES, mais à son interprétation du
célèbre personnage de David VINCENT, le héros de la
série culte de Larry COHEN, The Invaders (exploitée en
France sous le titre Les envahisseurs) lancée en 1967.
L'agence utilisera la même musique, la même voix de
doublage, le même code visuel de la célèbre image
déchirée et bien entendu le même petit doigt rigide et
levé, pour un décodage sans hésitation de la part du
téléspectateur. Voir "Hitachi débusque David VINCENT"
Isabelle TERRAY, COMMUNICATION CB NEWS
N°212 du 20 Mai 1991. Très exactement un an plus tard,
forte du succès de sa précédente campagne, R.S.C.G.
récidivera avec, non pas l'utilisation de Peter GRAVES,
mais de son interprétation de Jim PHELPS, tiré de la série
de Bruce GELLER lancée en 1966 : Mission Impossible. Une
fois encore fois, le code visuel de la série sera respecté
avec notamment la musique de Lalo Schiffrin, l'allumette
mettant le feu à une mèche parcourant l'écran et une
cassette partant en fumée à la fin du message. Voir
notamment : "Mission HITACHI pour Peter Graves"
Marie-Guy BARON, LE FIGARO du 10 Mai 1992.
HITACHI : "Mission pas impossible" Monique
RICHEBOIS, STRATEGIES N°788 du 11 Mai 1992.
"HITACHI fait de l'audience avec des séries américaines"
Philippe LATIL, COMMUNICATION CB NEWS N°256
du 11 Mai 1992. En Octobre 1992, l'agence conçut une
annonce pour le mini caméscope VMH 37 avec le
détournement d'une photographie de l'acteur Patrick
McNEE, dans son rôle de John STEED, l'agent secret de
la série télévisée The Avengers (exploitée en France sous le
titre Chapeau melon et bottes de cuir). Et les cas d'utilisation
publicitaires sont nombreux. Les bougies automobiles
AC n'utilisérent pas Guy Williams, mais Don Diego de la
Vega alias Zorro ; le café STENTOR et les Chapeaux
STETSON n'utilisèrent pas Harrison FORD, mais
Indiana JONES ; les PTT américains n'utilisèrent pas
William SHATNER et Leonard NIMOY pour leur
campagne de sensibilisation à l'utilisation du code postal,
mais le capitaine James T. KIRK et son lieutenant Mr.
SPOCK ; les stations services AMOCCO n'utilisèrent pas
Clayton MOORE, mais The Lone Ranger ; BINACA
n'utilisa pas Bela LUGOSI et Boris KARLOFF, mais le
Comte DRACULA et la créature du Docteur
FRANKENSTEIN,... Nous reviendrons sur ce point page
409, dans le cadre du paragraphe définissant le rôle
publicitaire de la célébrité en tant qu'expert.
la publicité suivit le mouvement. Lorsque l'agence
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
VINCENT, Clint EASTWOOD est
l'inspecteur Harry CALLAHAN, Peter
SELLERS est l'inspecteur CLOUZEAU
de la Sûreté, tiré de la série des films de
la Panthère Rose, Leonard NIMOY est Mr.
SPOCK, Harrison FORD est Indiana
JONES, Peter GRAVES est Jim
PHELPS, Peter FALK est le lieutenant
de police COLOMBO27... et nombreux
sont les consommateurs qui suivent
encore leurs aventures avec la plus
grande attention. Pour exprimer la
pérennité de ce phénomène, Tom
WOLF dit un jour que "la seule
différence entre JAMES BOND et The
LONE RANGER, c'est qu'il ne tire pas
une balle d'argent à la fin de l'épisode,
mais qu'il remplit un rapport en trois
exemplaires"28.
__________________
27 - Lorsque le papier toilette américain SCOTT sollicita
le concours de l'acteur Peter FALK en 1978, c'est le
lieutenant COLOMBO qu'il recherchait "parce qu'il est
connu de millions de personnes comme étant quelqu'un
qui écoute avec attention l'histoire de l'autre, dit que ça
semble parfait, puis s'attache à démolir l'histoire en
s'attaquant à un petit détail" expliqua Al SCHAEFER,
Président de l'agence SCHAEFFER qui conçut la
campagne. SCOTT ne voulait pas entamer une guerre des
prix lancée par son concurrent FORT HOWARD
PAPER, et souhaitait ainsi "faire la preuve" de sa qualité.
Voir "SCOTT hires COLUMBO for pricing case"
Anonyme, ADVERTISING AGE du 21 Août 1978. Lorsque
l'année suivante, la collective de la presse écrite fit appel à
l'acteur Edward ASNER, elle recherchait essentiellement
en lui le personnage de Lou GRANT, connu du public
comme étant depuis 2 ans déjà, le rédacteur en chef du
journal de la série télévisée de CBS, Lou GRANT. Voir :
"NEWSPAPER
Readership
Council"
Anonyme,
ADVERTISING AGE du 25 Juin 1979.
28 - Sur la "métamorphose" de ces héros au fil des ans, voir
notamment : "The licensed Characters : today's hot
salesmen" Cy SCHNEIDER, ADVERTISING AGE du 30
Avril 1979 et "The descent of Muscleman" Lawrence
MONDI, TIME du 19 Août 1991.
Ces
personnages,
même
simplement interprétés l'espace de
quelques films ou de quelques épisodes
de séries, finiront par avoir la même
notoriété - voire une notoriété
supérieure - et donc, le même potentiel
publicitaire
comme
nous
le
constaterons. Or, on peut sur ce point
remarquer l'absence de noms français.
Non que le personnage d'Arsène
LUPIN ne se substitue pas parfois à
l'acteur Georges DESCRIERES, celui
de MAIGRET à Jean RICHARD ou
celui de Lemmy CAUTION à Eddie
CONSTANTINE,...
Mais
l'identification de l'un à l'autre, et
inversement, n'a rien de comparable
avec les cas américains énoncés
auparavant. Le cinéma américain
serait-il alors seul détenteur des clés de
la magie que l'on attribue au 7ème Art ?
Probablement pas, mais la puissance de
l'industrie
cinématographique
américaine, complétée - concurrencée ?
- par la télévision a permis une
médiatisation plus puissante de ces
personnages, les élevant directement au
rang de star, sans toujours de
préoccuper de l'interprète.
La publicité suit bien entendu
avec intérêt ce retour des stars29. Mais
n'est-ce pas quelque part le propre de la
publicité, que de sans cesse rompre
__________________
29 - En 1975 aux Etats-Unis, 15% de la publicité diffusée
en prime time était occupée par des cas d'utilisation de
célébrités. "Commercial actors squeezed by stars - Real
People", James FORKAN, ADVERTISING AGE du 17
Novembre 1975. Ce pourcentage atteignait 20 % en 1978
"Celebrities in TV ads spotlighted as key trend" Harry
Wayne McMAHAN, ADVERTISING AGE du 27 Février
1978. Nombreux sont les professionnels qui estiment
qu'aujourd'hui, ce pourcentage oscille encore entre 10 et
20 % suivant les secteurs et les produits considérés.
Chapitre I : Origines de la star
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
avec l'habituel pour mieux surprendre
le consommateur, de manière à attirer
son attention, en s'inspirant des
tendances ? Toujours est-il que les
stars, essentiellement grâce à la
télévision, deviennent à nouveau des
vecteurs de communication très
intéressants. Certes, les modalités
d'utilisation diffèrent, elles sont mieux
maîtrisées. Le développement de la
télévision commerciale a beaucoup
contribué à ce développement de
l'utilisation
des
célébrités
en
30
publicité , notamment en tant que
"facteur anti-zapping" comme nous
l'étudierons. On notera d'ailleurs que ce
retour sera si rapide et si volumineux
aux États-unis, que les professionnels
nommeront dès 1976 "un présentateur
star de l'année"31.
Cette participation massive des
stars à la publicité peut également
trouver une partie de son explication
dans leur nombre. Comme nous l'avons
vu plus haut, les stars du cinéma - ou
plus exactement, les postulants au
statut de star - sont de plus en plus
nombreuses
et
la
production
cinématographique est elle, déjà en
déclin à cette époque. Les places au
soleil sont donc très chères. Or, la
publicité constitue non seulement un
moyen idéal de compléter ses revenus,
mais surtout, compte tenu du mode de
diffusion de masse, elle permet à la
célébrité de rester dans l'esprit de
millions de consommateurs, et qui sait
d'être peut-être aperçue et remarquée
par un producteur...
__________________
30 - "Quel que soit le prix, l'utilisation des acteurs de
télévision dans la publicité est en augmentation" in "TV
regulars strike gold in adland" James P. FORKAN,
ADVERTISING AGE du 24 Juin 1977. "En France, la
propension de la technique à se développer dépendra
principalement de la multiplication des chaînes privées et
des programmes publicitaires" Sylvère PIQUET op. cit. p.
75.
31
- Pour sa participation à la communication
AMERICAN EXPRESS, l'acteur Karl MALDEN sera le
premier à recevoir la nommination. Il sera suivi par O.J.
SIMPSON en 1976, Bill COSBY en 1977, Mariette
HARTLEY et James GARNER en 1978, Brooke SHIELDS
en 1980, Robert MORLEY en 1981, John HOUSEMAN en
1982, Rodney DANGERFIELD en 1983, John CLEESE en
1983, Cliff ROBERTSON en 1984, William PERRY en
1985, Paul HOGAN en 1986, Michael J. FOX en 1987,...
"AD AGE Star presenter for 1980 : MORLEY's airline
image : it's basically who I am" Josh LEVINE,
ADVERTISING AGE du 2 Juin 1980. Voir également à
propos de Karl MALDEN : "Karl MALDEN for
AMERICAN EXPRESS wins AA's "Star presenter"
award", ADVERTISING AGE, collectif, du 31 Mai 1976.
On notera également qu'il est l'illustration par l'exemple
de la montée en puissance des personnages interprétés
par ces stars, car s'il fut engagé par l'agence OGILVY &
MATHER, c'est essentiellement en raison de son
interprétation du lieutenant de police Mike STONE,
dans la série Streets of San Francisco (exploitée en France
sous le titre Les rues de San Francisco) qui remportait un
énorme succès à l'époque. Voir pour plus de détails sur ce
point le développement en annexes, page 656, du cas
AMERICAN EXPRESS.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
67
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Parallèlement, témoin de ce
souhait de raviver la star d'origine,
comme pour s'approprier une part de
son aura magique, la publicité va
également de plus en plus souvent
flirter avec la psychagogie, et faire
appel à l'immortelle image qu'ont su
créer certaines d'entre elles. Bien
qu'humainement disparues, les stars,
les vraies, celles des origines,
conservent magie, puissance et
sympathie auprès d'un large public,
renouvelé de génération en génération à
l'aide notamment des rediffusions
télévisées de leurs films.
C'est ainsi que l'image des
grands mythes de l'histoire du cinéma
américain tels Gary COOPER, Charlie
CHAPLIN, Clark GABLE, James
DEAN, John WAYNE, Jean HARLOW,
Joan CRAWFORD, Marilyn MONROE
et bien d'autres, deviennent les porte-
parole de nombreux produits et de
nombreuses sociétés qu'ils n'auront
jamais connus32 ! C'est là, la dernière
grande qualité de la star des origines.
Une caractéristique que même ses
créateurs n'avaient envisagée, imaginée
ou même espérée. La star, par le mythe,
le rêve et les espérances qu'elle
engendre ne peut se satisfaire de
l'existence matériellement exiguë, qui
lui est accordée par une humaine vie
terrestre33.
Telles
les
étoiles
inaccessibles à la main de l'homme, elle
continue de briller longtemps après sa
mort ; leur éternel éclat scintillant à
jamais dans l'oeil des générations de
mortels qui lui succèdent. Elles
deviennent alors paradoxalement, des
objets de publicité beaucoup plus
maîtrisables...
__________________
32 - Voir à ce sujet : "Greatful dead : salaries from beyond
the grave" Don LIPPER, PREMIERE MAGAZINE, Des
Moines, Etats-Unis d'Amérique, mensuel, Octobre 1988.
"Marilyn's symbol sells to millions with millions"
Anonyme, SAN FRANCISO EXAMINER, Etats-Unis
d'Amérique, quotidien, le 20 Octobre 1988. "Deceased
celebrities : Kept in limelight by Hollywood agent" John
R. EMSHWILLER, THE WALL STREET JOURNAL,
Etats-Unis, le 8 Novembre 1988. Voir également
"l'élaboration du contrat" page 485.
33 - Si en 1988, la bière - la boisson alcoolisée ! - Adolphe
COORS utilisa les chansons du chanteur décédé Ritchie
VALENS dans ses publicités à l'attention des
consommateurs américains hispaniques, c'est parce qu'il
avait conservé une "grande popularité posthume" même,
si des événements conjoncturels, comme le film de Luis
VALDEZ La Bamba qui retraçait la vie du chanteur,
n'étaient pas étrangers au fort regain d'intérêt pour la
star. Chaque année aux Etats-Unis, d'autres légendes,
comme le grand joueur de base-ball, Babe RUTH, font
l'objet plusieurs années après leur mort de dizaines de
contrats publicitaires. Voir "Celebrity licensing gets
tougher" Gary LEVIN, ADVERTISING AGE du 1er
Février 1988.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
68
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Si les années 80 et 90 confirment
ce relatif regain d'intérêt pour les
célébrités, le recours à leurs services
diffère. Elles sont de moins en moins
plaquées
artificiellement
à
la
communication d'un produit. Et il n'y a
plus de surcroît de cycle utilisation /
non-utilisation comme auparavant. La
communication publicitaire évolue
désormais beaucoup plus rapidement.
Par ailleurs, en raison notamment de la
vulgarisation de l'appellation et donc
de la variété sans cesse croissante de
célébrités à leur disposition, les
publicitaires prennent de plus en plus
conscience qu'il existe plusieurs
modalités d'utilisation, et que seul un
choix méticuleux pour une utilisation
adéquate, peut permettre de tirer profit
de l'une ou de plusieurs de ces
célébrités.
choix de leurs prestations publicitaires.
Conscientes que leur image est liée à
celle du produit, elles se rendent
compte des avantages mais aussi des
inconvénients d'un tel mariage, et ne
sont donc plus aussi faciles à séduire.
Enfin, le public plus mûr et surtout
plus et mieux informé est lui aussi
devenu plus exigeant, plus critique à
l'égard
de
ces
associations
commerciales.
3 - Les stars nées de la publicité
"Durant le tournage du film, j'ai
découvert qu'il était aussi un acteur.
C'est en fait le comédien qui, chez lui,
crée la star" écrit Otto PREMINGER à
propos de Gary COOPER, dans son
autobiographie34.
La publicité révèle, lorsqu'elle
utilise des porte-parole qui par leurs
caractéristiques - essentiellement
physiques - sont par la suite,
fréquemment choisis pour différents
produits. Qui connaissait Paulina
PORIZKOVA en 1984, alors que la
future actrice / top-model déambulait
devant la camera de Neil KRAFT pour
la
chaîne
de
magasins
THE
35
PRESSMAN Brothers . Véritable
__________________
34 - "Autobiographie" Otto PREMINGER, Editions Jean-
Claude LATTES (1981), RAMSAY, Paris N°58 (1988) p.
159.
35 - Quelques années plus tard elle sera star de cinéma et
D'autre part, les célébrités ellesmêmes sont plus prudentes quant au
Chapitre I : Origines de la star
deviendra le top-model vedette des cosmétiques ESTEE
LAUDER. "Advertising, principles and practice" William
WELLS, John BURNETT et Sandra MORIARTY,
Editions PRENTICE HALL, seconde édition, Englewood
Cliffs, Etats-Unis, 1989-1992, p. 631. Voir également
l'évolution des modalités de son utilisation par ESTEE
69
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
talent-scout36 des temps modernes, la
publicité peut parfois même dans ces
conditions, servir ensuite de véritable
tremplin
vers
une
carrière
cinématographique à ces mannequins
publicitaires. Pour leur physique37, leur
capital
de
sympathie,
de
représentativité, et de reconnaissance,
mais aussi par leur talent de comédien,
ces personnages sont rapidement très
souvent sollicités. Comme la star de
cinéma, ils bénéficient progressivement
de ce capital de reconnaissance, que
l'on peut parfois rencontrer chez leurs
homonymes du cinéma, mais sans ses
excès, tout au moins au départ. Ils sont
reconnus le temps d'une prestation
publicitaire, mais sans plus. Le grand
public connaît d'ailleurs rarement leur
nom.
LAUDER : "Face value" Linda WELLS, NEW YORK
TIMES MAGAZINE, Part 2, du 26 Février 1989.
36 - De l'anglais talent, talent, don artistique, et scout,
éclaireur. Par extension : dénicheur de vedettes. Pur
produit hollywoodien, le talent-scout parcourt les EtatsUnis, voire le monde pour les plus grandes compagnies, à
la recherche de la future star qui s'ignore encore. "Les
états-majors d'Hollywood ne mésestimaient pas cette
évidence. Leur premier souci était la chasse au physique.
Sans cette raison nécessaire, à défaut d'être suffisante,
point de star possible. Les studios inventèrent les talent
scouts. Leur métier : sillonner le monde à la recherche de
l'exception. Des chasseurs de corps, constamment sur la
piste des étoiles. De Lana Turner, découverte sirotant un
soda chez Schwab's, le drugstore-vitrine de Beverly Hills,
à Ursula Andress, dépistée à Paris par les Joss Randall de
la Paramount..." Jacques SEGUELA "Hollywood lave plus
blanc" Chapitre II - Le physique de la star, Editions
FLAMMARION, Paris (1982) p. 105.
37 - Dans "Advertising in America - the first 200 years" op.
cit., Charles GOODRUM et Helen DALRYMPLE
exposent le cas des Breck Girls (p. 41). Plus de deux cents
jeunes adolescentes modèles, venant des quatre coins des
Etats-unis, furent utilisées pour des portraits dont on
doit le célèbre concept pastel à Charles SHELDON. Or,
lorsque l'on observe le nom de ces jeunes étudiantes
d'alors, on y retrouve celui de stars du petit et/ou du
grand écran d'aujourd'hui, comme Cybill SHEPHERD,
Kim BASSINGER, Cheryl TIEGS, Brooks SHIELDS,
Jaclyn SMITH,... Voir également le cas des soins
capillaires WELLA avec Farrah FAWCETT, Jaclyn
SMITH (à nouveau) et Kate JACKSON in "Three 'angels
sell hair care for WELLA" Anonyme, ADVERTISING
AGE du 2O Septembre 1976.
Le principal avantage de cette
célébrité est que le risque qu'ils volent
la vedette au produit est moindre. Plus
que la renommée, essentiellement
recherchée chez les stars du cinéma, ces
personnages sont en général et avant
tout très charismatiques, répondant
physiquement très précisément aux
exigences de la stratégie publicitaire38.
__________________
38 - N'agissant que pour la marque ou le produit pour
lequel, elle a été créée, elle est généralement plus efficace
si il y a pérennité de la stratégie publicitaire l'utilisant.
Une étude réalisée en 1992 aux Etats-Unis confirme
qu'elles sont souvent plus correctement associées avec le
produit dont elles ont la charge. Gail TOM, Rebecca
CLARK, Laura ELMER, Adeward GRECH, Joseph
MASETTI Jr. et Harmona SANDHAR "The use of created
versus celebrity spokespersons in advertisements"
JOURNAL OF CONSUMER MARKETING Volume 9,
n°4, Automne 1992, page 48.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
70
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
En
France,
Christophe
SALLENGRO, est à ce sujet, un
exemple type de la star révélée. La
publicité et notamment les spots pour
les restaurants FREETIME, les
revêtements de sol GERFLOR et le jeu
PICTIONNARY, ont fait de lui une
véritable star de pub, qui avait su
découvrir chez lui les qualités d'un bon
comédien et un système auditif
particulièrement capteur d'attention.
"C'était tellement étrange que les
téléspectateurs regardaient" précise
Jacques HENOCH39 qui fut Directeur
de création chez T.B.W.A. pour la
campagne GERFLOR. D'où les scores40
IPSOS suivants :
__________________
39 - Jacques Hénoch : Vice-Président de l'agence BELIER
Conseil, Paris. Entretien privé accordé le 17 Avril 1988.
40 - score d'agrément : Pourcentage de personnes qui, lors
d'un test de mémorisation d'un message publicitaire,
expriment positivement leur satisfaction à l'égard du
message dont elles ont le souvenir. score d'impact :
Pourcentage
de
lecteurs
(ou
auditeurs
ou
téléspectateurs) qui se souviennent d'avoir remarqué la
parution d'une publicité donnée (annonce, film,
communiqué) dans un support publicitaire précis. score
de reconnaissance : Pourcentage de personnes appartenant à
l'audience d'un support auxquelles on montre une
publicité parue dans ce support et qui déclarent l'avoir
déjà vue. Score prouvé (GALLUP et ROBINSON) :
Proportion de l'audience déclarée message publicitaire
capable de restituer spontanément au moins un élément
spécifique de ce message. score spécifique (forme précise du
score prouvé) : Pourcentage de personnes qui, faisant
partie de l'audience d'un support, sont capables de citer
de mémoire des éléments d'un message qui vient d'être
diffusé pour la première fois. D'après le "Dictionnaire
commerciale" de l'Académie des Sciences Commerciales,
Conseil de la Langue Française, Editions : Entreprise
Moderne d'Edition, Paris, 1987. Voir également "The
dictionary of advertising" Laurence URDANG, Editions
NTC BUSINESS BOOKS, Lincolnwood, Ill, Etats-Unis,
1988.
Scores IPSOS
Oct. 1986
(Christophe SALENGRO /
GERFLOR)
Impact
. Score brut
55
. Score spécifique
44
. Score prouvé
44
. Score de reconnaissance
Agrément
75
. Positif
77
. Négatif
20
. Indifférent
3
"Film de Pub"
Philippe BENOIT, Patrick LE BRIGAN, Didier TRUCHO T
Editions GALLIMARD, Paris (1988) p. 134
Comme on peut le constater
dans le tableau qui précède, le film
obtint de très bons résultats IPSOS.
"Nous cherchions quelqu'un qui avait
une certaine personnalité physique. Les
éléments essentiels restent la simplicité
de la démonstration et le fait que tout
est centré sur le produit, si j'ose dire".
"Christophe
SALLENGRO
était
quelqu'un qui n'était pas standard, qui
avait un certain physique" ajoute JeanFrançois MINNE41. Cet impact, obtenu
à travers diverses campagnes, lui
permit même de faire ses premiers pas
dans quelques longs métrages. En
France simplement, on pourrait encore
citer les cas caractéristiques de JeanClaude
DREYFFUS
(qui
fut
l'extraordinaire M. MARIE) ou encore
Marc De JONGE (le dégustateur
imperturbable de BOURSIN), sans
oublier bien sûr qu'encore inconnus,
COLUCHE,
Gérard
JUGNOT,
Christian
CLAVIER,
Thierry
__________________
41 - Jean-François MINNE, P.D.G. de l'agence T.B.W.A.
Paris. Entretien privé accordé le 20 Avril 1988.
Chapitre I : Origines de la star
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
LHERMITTE,
Michel
BLANC,...
passèrent eux aussi sur le petit écran
lors d'une page de publicité, avant
d'exercer leurs talents au cinéma.
La principale raison que l'on
peut apporter à cette fonction de
découvreur de stars et même de talents,
de la publicité, réside en grande partie
dans les castings. De même que pour un
long métrage, les porte-parole d'un
produit, d'un service ou d'un
annonceur, ne sont en général pas
choisis au hasard. La stratégie de
communication adoptée spécifie avec
précision les différents critères à
respecter lors la sélection du type de
protagoniste(s) pressenti(s). Critères
physiques, vocaux, d'élocution, de
maintien,... seront autant d'impératifs à
respecter par l'acheteuse d'art, de
manière à ce que la ou les personne(s)
finalement choisie(s), serve(nt) au
mieux le concept défini. Or, le nombre
des
longs
métrages
cinématographiques n'a rien de
comparable avec la foultitude de films
réalisés pour les besoins de la publicité.
Ainsi, voyant défiler sous ses yeux, un
nombre incalculable de postulants, il
est facile à cette dernière d'extraire de
ce
fantastique
vivier,
quelques
spécimen pour les qualités relatives et
parfois absolues qu'ils présentent.
C'est ainsi que Marie-Pierre
CASEY, comédienne avant d'entrer en
publicité, trouva dans le rôle de Madame
Chiffon pour PLIZ42, une extraordinaire
occasion de s'attribuer la célébrité
__________________
42 - "La preuve que Marie-Pierre CASEY pouvait le
refaire" C.F., FRANCE-SOIR MAGAZINE du 10 Janvier
1987.
recherchée, du jour au lendemain. "Elle
était totalement inconnue au moment
où on l'a fait, nous expliqua Pierre De
PLAS43. C'est très simple. On avait
besoin - c'est très méchant - d'une
femme de ménage. Si vous demandez à
votre propre femme de ménage, ce n'est
pas sûr qu'elle sache jouer la comédie, à
mon avis si, quand je vois la mienne
avec ce que je lui donne comme argent,
à mon avis, elle la joue très bien... Mais
normalement elles ne sont pas capables
de jouer la comédie. Donc lorsque l'on a
demandé à des agents d'acteurs, on
nous a dit : «Mais il y en a une qui est
formidable dans ces rôles de femmes de
ménage, c'est Marie-Pierre CASEY». On
a recherché une femme de ménage, pas
Marie-Pierre CASEY".
Même si en France nombreux
sont les acteurs et actrices qui veulent
oublier ces premiers pas, il ne faut pas
négliger le fait que la publicité servit
non seulement leur carrière mais fut
aussi à leurs débuts une appréciable
source de revenus, comme elle l'est
d'ailleurs encore aujourd'hui mais dans
des proportions beaucoup plus
importantes. Notons au passage que
l'on ne rencontre pas cet état d'esprit,
ce complexe d'infériorité vis à vis de la
publicité, chez les anglo-saxons et
notamment aux Etats-Unis, où un
grand nombre de célébrités sont porteparole de multiples produits, et où la
grande majorité des acteurs ayant
réussi, commença également un jour
par vendre à l'écran autre chose que luimême.
__________________
43 - Pierre de PLAS, Président de l'agence de publicité
D.D.B. Entretien privé accordé le 19 Avril 1988.
Chapitre I : Origines de la star
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Pour l'anecdote, notons le cas de
la campagne réalisée en 1968 pour la
bière KRONENBOURG. Le mannequin
utilisé était australien et très connu des
milieux publicitaires australiens. Il
avait notamment participé à la
communication des carburants B.P. et à
celle des chocolats BIG FRY44. Mais qui
? en 1968, pouvait prédire que ce
comédien/mannequin publicitaire du
nom de George LAZENBY, allait
l'année suivante obtenir une notoriété
internationale en reprenant le rôle de
Sean CONNERY dans l'interprétation
du célèbre personnage de Ian
FLEMING, l'espion James BOND 007,
dans le film de Peter HUNT Au service
secret de sa Majesté ! Révélé par ses
différentes prestations publicitaires et
notamment celle pour les chocolats
BIG FRY qui lui valut succès et
célébrité down-under, les producteurs
de la saga d'espionnage Harry
SALTZMAN et Albert BROCCOLI
décidèrent de l'engager. George
LAZENBY n'avait jamais tourné
d'autres long métrages auparavant ! Il
expliquera d'ailleurs quelques années
après, ô combien les autres acteurs de
la distribution lui firent sentir cette
inexpérience relative45.
__________________
44 - "The official James BOND 007 movie books" Sally
HIBBIN, Editions HAMLYN (1987), Londres, GrandeBretagne. "James Bond - a celebration" Peter Haining,
Editions PLANET BOOKS (1987), Londres, GrandeBretagne.
45 - "The James BOND Bedside companion" Raymond
BENSON, Editions BOXTREE, Londres, GrandeBretagne (1984) p. 32 et 163. "James Bond 007 - Licence de
tuer" Jean-Marc PALAND et Jean-Marc PINSON,
Editions EDILIG, Paris (1987) p. 38. "James Bond 007
Story" Patrick RUFO, Editions WIN PRODUCTION,
Paris (1987) p.41.
Ainsi, faut-il reconnaître le
talent de certains annonceurs et de leur
agent publicitaire, pour déceler la star
naissante et la révéler au grand
public46. Celle qui dans son domaine, à
son niveau, est déjà sur la pente
ascendante de la gloire, sans pour
autant être déjà médiatisée à outrance.
Ne serait-ce d'ailleurs pas là, le
"meilleur" cas d'utilisation d'une
"célébrité". Un porte-parole connu pour
ses qualités dans son milieu (sport, café
théâtre, cabaret,...) mais dont la
notoriété auprès du grand public ne
serait pas encore suffisante, pour
risquer de nuire à l'impact du produit
sur le consommateur. Peut-être, mais
tel n'est pas l'objet précis de la présente
étude. Car en définitive, ces porteparole sont la plupart du temps
méconnus par la majeure partie de la
cible, lors de leur première utilisation.
Il n'est donc point question de célébrité
ici.
Mais si la publicité révèle les
stars de demain, elle va également
parfois plus loin, en créant elle-même
ses propres célébrités. "Une partie du
génie de Cécile B. De MILLE consistait
à laisser les acteurs construire euxmêmes leur personnage, exactement
comme il leur laissait le choix de leurs
bijoux. Ils devenaient ainsi des
__________________
46 - En 1983, l'agence de publicité GEMAP, eut l'idée de
solliciter un coureur automobile du nom d'Alain PROST,
pour être le porte-parole des pyjamas CHRISTIAN
CANE. Le lien star / produit n'était pas évident, mais ce
qu'il est intéressant de relever ici, c'est simplement l'idée
de l'agence d'utiliser ce jeune pilote dont les victoires
successives pouvaient peut-être déjà à l'époque, laisser
présager à l'observateur averti, qu'il serait un jour
champion du monde.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
73
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
personnages réels, et non de simples
mannequins
faisant
des
gestes
d'automates." écrit l'actrice Gloria
SWANSON47 dans ses mémoires.
D'aucuns affirment que pour
pouvoir utiliser une star dans la
stratégie de communication d'un
produit, en évacuant totalement le
problème de la vampirisation, il n'est
plus sûr moyen que de créer soi-même,
sa star, à l'exemple du mythe des
producteurs hollywoodiens de la
grande époque48. N'existant que par et
__________________
pour le produit, elle ne peut générer
d'impact que pour ce dernier49. En 1952,
le Petit RODOLPHE alors âgé de 4 ans,
devint le personnage central des films
pour le shampooing DOP, connu et
reconnu par la France entière. Mais l'on
a
pas
éternellement
4
ans,
malheureusement. L'année suivante
alors que David OLGIVY proposait de
mener une campagne d'informations
sur l'arrivée aux Etats-Unis d'un
nouveau breuvage disponible pour
seulement 15 cents, le client lui-même
suggéra l'utilisation publicitaire de son
Directeur de la publicité. Son souhait
était de parvenir à une campagne
beaucoup plus axée sur l'image, en
assurant au consommateur une version
domestique du produit, fidèle à
l'originale. C'est ainsi que le
Commandeur Edward WHITEHEAD
entra dans la communication de
SCHWEPPES50.
remarketing strategies that have turned failures into
success" Editions MERCURY BOOKS (1991), Londres,
Grande-Bretagne, page 202-207, qui détaille le cas de
Nancy GREEN qui incarna le personnage de Aunt
JEMINA pour la pâte à crêpes du même nom.
49 - Alors que la publicité télévisée pour les marques de
cigarettes était encore autorisée aux Etats-Unis, il fut
calculé que le personnage du cow boy était si attaché à la
marque MARLBORO, que plus de 95% du public pouvait
identifier la marque après seulement 5 secondes de
projection du film. La moyenne pour l'ensemble des
marques étant à l'époque de 16% ! "Do your ads have VI/P
? Harry Wayne McMAHAN, ADVERTISING AGE du 14
Juillet 1980.
47 - "Swanson on Swanson" Gloria SWANSON, Editions
50 - Il devint réellement l'homme de SCHWEPPES et ce,
RANDOM HOUSE, New York, Etats-Unis (1980). Paru
en France sous le titre "Gloria Swanson par elle-même rêve d'une femme" Editions STOCK, Paris (1981),
Editions RAMSAY, Paris (1986).
pendant plus de 18 ans ! D'aucuns - dont David OGILVY
lui-même - dirent que son succès venait en partie en
raison de sa barbe et sa moustache si caractéristiques à
une époque où la mode était au rasage de près.
"WHITEHEAD portait une touffe de poils drus et
broussailleux sur le visage. Sa croissance luxuriante le
rendit aussi exotique que le cache-oeil de l'homme
d'HATHAWAY. Les gens réagir de la même manière :
Pourquoi porte-t-il cela ? Qui est-il ? La curiosité se
74
48 - Voir notamment : "You, too, can star in TV
commercials or maybe you can't" Philip RVESIN, THE
WALL STREET JOURNAL du 10 Mars 1981 et Michael
GERSHMAN "Getting it right the second time Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Le 22 septembre 1951, un
Américain, immigré russe noble mais
inconnu, le baron George WRANGEL,
munit d'un cache-oeil de circonstance,
devint l'homme à la chemise HATHAWAY51
imaginé par David OGILVY, pour défier
l'homme au col ARROW. Mondialement
célèbre grâce à ses prestations
publicitaires pour la marque de
chemises, il sera même immortalisé par
le sculpteur DERUJINSKY en 1958.
Une star était née... Le baron
WRANGEL sera interviewé par la
presse, suivi et considéré telles les stars
du grand écran. Pendant près de 30
années, le même David OGILVY fit
vendre au personnage de Titus
MOODY, vieux boulanger de la
Nouvelle-Angleterre,
le
pain
52
PEPPERIDGE FARM . "A condition
qu'ils n'apparaissent pas déplacés par
rapport
à
votre
produit,
les
personnages obtiennent des résultats
supérieurs à la moyenne" écrit le
publicitaire anglo-saxon. Le seul
transforma en une augmentation des ventes pour un
produit que de nombreux buveurs continuaient de
trouver seulement marginalement acceptable au goût"
écrit Stephen FOX, dans "The mirror makers : A history
of American advertising and its creators" op. cit., page
233.
problème majeur qui se pose alors au
publicitaire est de faire vivre ce
personnage de film en film53.
Certes, l'idée semble simple a
priori.
Or,
maints
docteurs
"FRANKENPUB" qui s'y attelèrent ne
virent pas se réaliser le succès
escompté. Il ne suffit pas de créer un
personnage que l'on insère plus ou
moins bien dans un plan media le plus
vaste possible. En créant une star,
l'objectif est certes de contourner les
inconvénients directs afférents à cette
dernière et que nous détaillerons plus
tard, mais également et surtout de
pouvoir jouir de ses attributs
traditionnels : impact, crédibilité,
reconnaissance,
sympathie,
puis
notoriété d'où capitalisation. Les
différents exemples présentés ci-après
furent couronnés de succès parce qu'ils
parvinrent à créer une star qui
réunissait ses différents facteurs, ainsi
qu'une constante originalité dans son
exploitation. Bref, une gestion de sa
carrière. Si aujourd'hui la très originale
star d'un jour Max HEADROOM54,
n'est plus qu'un vague souvenir, c'est
simplement qu'il est l'exemple même
d'une star qui n'a pas su gérer sa
carrière, ou plus exactement, dont on a
pas su gérer la carrière.
51 - Leo BOGART "Strategy in Advertising - Matching
media and messages to markets and motivations"
Editions NTC BUSINESS BOOKS (1990) Seconde
édition, Lincolnwood, IL, Etats-Unis page 80. Voir
également "Charlie Haas on advertising" Charlie HAAS,
NEW WEST 4, du 5 Novembre 1979.
52 - Voir à ce sujet : David OGILVY op. cit. p. 59, 79 et
107. Incarné par l'acteur Charlie WELCH avait participé
à d'autres publicités notamment pour les pâtisseries
SARA LEE et l'aspirine ALKA-SELTZER avant de
devenir le célèbre Titus MOODY. "WELCH is "Old
Timer" of commercials stars" Judann DAGNOLI,
ADVERTISING AGE du 8 Février 1988.
__________________
53 - "Le personnage doit pouvoir surfer sur la houle
marketing sans se noyer. Le choix se porte ainsi que sur
des personnages mûrs sinon âgés. La jeunesse viéllit mal !"
François CUEL "Pub cherche héros", MEDIAS n°84 du 24
Septembre 1984.
54 - Voir également le détail de l'utilisation de ce
personnage par COCA-COLA page 440.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
75
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Car c'est souvent là, le principal
écueil de cette stratégie, il ne suffit pas
de créer et d'imposer une star comme
personnalisation de la marque, encore
faut-il sans cesse l'intégrer dans des
campagnes faisant preuve d'originalité
au risque de lasser le consommateur. Si
cette composante est considérée avec
suffisamment de précautions, alors ces
personnages peuvent perdurer de
campagne en campagne. L'image du
fermier quaker de QUAKER OATS fut
déposée pour un petit déjeuner à base
de céréales en 1877, par Henry
PARSONS CROWELL55 et apparaît
encore aujourd'hui ponctuellement sur
le packaging des produit ou dans la
communication. Un autre exemple de
succès les plus caracétéristiques est
sans doute le cas de CAPTAIN IGLO et
de ses bâtonnets de poisson. Lorsqu'en
1966, UNILEVER Grande-Bretagne
demanda à son agence LINTAS56 de
réfléchir sur un nouveau concept, il
n'imaginait probablement pas que ce
même concept serait encore utilisé plus
de 25 ans après.
Le personnage apparut dans les
écrans publicitaires britanniques en
Février 1967 sous le nom de CAPTAIN
BIRDS EYE de manière un peu
__________________
précipitée. En effet, UNILEVER n'était
pas réellement convaincu de l'intérêt de
ce concept au regard des faibles
résultats obtenus lors des tests. Mais
l'information
comme
quoi
un
concurrent réfléchissait lui aussi à ce
sujet finit par le décider d'accepter. Le
succès fut immédiat. En effet, le
personnage du Capitaine permettait de
s'adresser simultanément aux enfants
ainsi qu'à leur mère. Après un court
retrait entre 1971 et 1974, CAPTAIN
BIRDS EYE s'installa définitivement
dans la communication des bâtonnets
de poisson produits par UNILEVER et
fut même décliné dans différents pays.
Adaptation oblige, il ne conserva son
nom de CAPTAIN BIRDS EYE qu'en
Grande-Bretagne et en Irlande, mais on
lui préféra celui de CAPTAIN FINDUS
en Italie et de CAPTAIN IGLO dans le
reste de l'Europe57.
"Les personnages disparaissent
lorsqu'il y a un appauvrissement de la
communication" observe Jan VAN
AAL58. Le personnage devenant alors
une véritable contrainte créative,
l'agence comme l'annonceur n'hésitent
__________________
57 - "Ce qui est vraiment extraordinaire c'est que les
hand : the managerial revolution in American business"
Editions HARVARD UNIVERSITY PRESS , Cambridge,
Etats-Unis, 1977 ; Arthur F. MARQUETTE "Brands,
trademarks and goodwill" Edtions McGRAW-HILL,
New York, Etats-Unis, 1967 ; Harrison THORNTON
"The History of the QUAKER OATS Company" Editions
UNIVERSITY OF CHICAGO PRESS, Chicago, EtatsUnis, 1933.
producteurs de cette idée publicitaire ont réussi à la
développer d'une manière tellement internationale que le
personnage très britannique du Capitaine n'est pas
perçue comme britannique dans les autres pays ; en
France il est perçu comme étant un Français, aux yeux
des Allemands il est allemand, en Hollande il est un
Hollandais typique. Ce n'est pas surprenant alors que
dans les cercles de UNILEVER et LINTAS, il n'y ait
aucune discussion au sujet de la durée de vie du
Capitaine ; il est simplement immortel" Rein RIJKENS,
op. cit. p. 40.
56 - Via ses différentes agences, LINTAS gère aujourd'hui
58 - Jan VAN AAL : Président du Directoire de l'agence
ce produit UNILEVER partout dans le monde.
GREY, Paris. Entretien privé accordé le 10 Janvier 1989.
55 - Voir notamment Alfred D. CHANDLER "The visible
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
76
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
pas à s'en débarrasser59. Christine
ARFEUILLERES60 analyse à ce sujet
qu'il y a toujours eu "une volonté de
faire mourir les personnages. On a
l'impression que le consommateur en a
assez, alors qu'en réalité ce sont les
publicitaires et les annonceurs les
premiers lassés de leurs publicités. Les
postes de créatifs, chefs de publicité, ou
Directeur
du
marketing
chez
l'annonceur sont des postes à
évolution, les gens changent. C'est sans
doute frustrant, alors, de reprendre une
success story et de ne devenir qu'un
tout petit maillon de cette success
story. Chacun a envie d'y ajouter sa
patte. Ou on n'a pas l'habilité à le faire,
en disant balayons tout ça. Ou on a
l'habilité à le faire, mais ça demande
beaucoup de modestie ; ce qui n'est pas
ce qui caractérise notre métier. C'est
pire encore lorsque les annonceurs
changent d'agence". "Les vraies vedettes
sont les vedettes que l'on crée. Or, on
tue tous les personnages, ce qui est à
mon avis une erreur magistrale. Parfois,
les annonceurs ne croient plus à leur
produit. C'est aussi dans un souci de ne
pas laisser vieillir la marque" commente
Michel VADON61. Alors adieu Mère
__________________
59 - Après de plusieurs et fructueuses années de
complicité aux Etats-Unis, la marque automobile ISUZU
décida de se séparer du personnage de Joe ISUZU (David
LEISURE) imaginé par l'agence DELLA FEMINA
TRAVISANO. Voir "So long Joe ISUZU" Cleveland
HORTON, ADVERTISING AGE du 6 Août 1990 et Steve
BLOUNT et Lisa WALKER, 1988, op. cit. pp. 98-107.
60
- Christine ARFEUILLERES : Réalisatrice et
Directrice Générale responsable de la création de l'agence
ARFEUILLERES et Associés. Entretien privé accordé le
30 Mai 1991.
61 - Michel VADON : Directeur de la création et associé
de l'agence FAURE, VADON, FOREST, BRIDOUX.
Entretien privé accordé le 4 Juin 1991.
DENIS, El GRINGO, GERMAINE,
Maître KANTER, Mamie NOVA,
George KILLIAN'S, Père DUCROS62,...
Ce
dernier
personnage
publicitaire relevait pourtant d'une
idée originale. 1978, les conditions
d'une bonne utilisation étaient réunies
et les Epices DUCROS63 décidèrent
avec leur agence, HAVAS CONSEIL, de
personnaliser leur image sous les traits
du comédien Pierre MIRAT. Avant
l'utilisation d'un personnage, l'idée est
forte : DUCROS se décarcasse pour
trouver
les
meilleurs
épices.
Maintenant, le recours à un personnage
sympathique notamment par son côté
méridional, très présent dans les écrans
publicitaires au moment de son
lancement, habillé en cuisinier pour la
caution de l'habit, démonstratif sans
tomber dans l'excès de l'explicatif, a
fait que le public associa très
rapidement le comédien à un "Père
DUCROS" dévoué à sa tâche, et au
service du consommateur. En 1987,
fidèle
à
cette
communication,
DUCROS détenait 60 % du marché
français des épices et des herbes ! Mais
en 1990, le personnage fut considéré
comme un élément vampirisant la
communication64. Après avoir disparu
visuellement, il disparut totalement
l'année suivante.
__________________
62 - Notons toutefois que ces personnages faisant partie
du patrimoine de la marque, certains réapparaissent
après plusieurs années d'absence, comme ce fut le cas en
1991 de Monsieur Plus, chez Balhsen.
63 - Voir notamment : "Créez épicé : Comment les
DUCROS se sont décarcassés" PHILIPPE COLL,
CREATION n°1 du mois de Janvier 1985.
64 - "Meutres en série dans la publicité" Dossier collectif,
CB NEWS N°105 du 2 Janvier 1989.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Lorsque l'on crée une star de
dessin animé telle que MAMIE
NOVA65, cela comporte l'avantage que
le temps n'a pas ou peu prise sur elle, il
est même possible de la rajeunir ou de
la vieillir artificiellement au gré des
exigences publicitaires. Quand on crée
une star à partir d'un être vivant, cet
avantage est naturellement beaucoup
moins maîtrisable. Ainsi, lorsque la star
elle-même devient trop âgée ou
disparaît,
la
communication
publicitaire peut éprouver de grosses
difficultés. Certes, de nombreuses stars
sont aujourd'hui utilisées à titre
posthume, avec les précautions et les
risques que cela comporte. Mais dans le
cas présent, la star créée ne bénéficie
pas d'une renommée assez importante,
au besoin ranimée par la projection de
quelques uns de ses films, comme pour
les stars du cinéma. Son aura ne
s'exerce que sur le petit monde de la
publicité ; or, celui-ci ne cesse de se
renouveler.
C'est ainsi que lorsque Jeanne
DENIS plus connue sous le sobriquet
de la Mère DENIS devint trop âgée
pour être utilisée, la marque VEDETTE
fut contrainte de déplacer malgré elle,
la communication de ses machines à
laver sur un autre terrain. Dès 1971,
présentée par une campagne d'affichage
comme la véritable lavandière, elle
apportait à la marque l'expérience de la
tradition. "C'était un personnage à
grosses ficelles. Mais même si ce n'était
pas toujours très crédible, c'était
sympathique"
observe
ARFEUILLERES66.
Christine
Au fil de la communication,
chaque machine à laver VEDETTE
matérialisait le savoir de la Mère
DENIS67. Son témoignage nous venait
de la France profonde, France des
traditions où la coutume populaire veut
que le temps n'ait pas prise sur la
qualité du travail. Et si deux ans plus
tard, lors de son utilisation au cinéma
et à la télévision son C'est ben vrai ça
amusait bon nombre de jeunes citadins,
son témoignage conservait la force que
confère la simplicité et la conviction
qui le caractérisaient. Sa caution venue
d'une autre époque, introduisait un
subtil anachronisme propre à écarter
du produit, toutes les éventuelles
connotations négatives d'un lavage
mécanique. La marque VEDETTE passa
quant à elle de la neuvième à la
deuxième place du classement des
marques les plus vendues. Dans son
essai sur la normalisation publicitaire,
François BRUNE68 raconte "qu'au dire
de témoins, la Mère DENIS n'a pas été
une véritable lavandière [...]. Paysanne
par l'habitat, la Mère DENIS a surtout
été garde-barrière de profession. La
__________________
66 - Entretien privé accordé le 30 Mai 1991.
67 - En réalité l'utilisation de la Mère DENIS ne fut pas
__________________
programmée, comme la création d'un code de
communication de la marque VEDETTE, par l'agence
BAZAINE. A l'origine, le personnage était là dans le
simple objectif du test comparatif (lavage traditionnel
soigné / lavage en machine). Ce n'est véritablement qu'à
la lecture des scores d'impact que l'agence décida d'en
faire le personnage central de la communication.
65 - Voir l'analyse du publicitaire Philippe MICHEL lors
68 - "Le bonheur conforme" François BRUNE, Collection
de la présentation du cas MAMIE NOVA page 134.
Le Monde Actuel, Editions GALLIMARD NRF, Paris
(1981, 1985) p. 42-44.
Chapitre I : Origines de la star
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78
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
hantise de la propreté ne fut pas son
caractère fondamental. De l'extérieur,
on remarquait plutôt un goût prononcé
pour le Calvados, et pour le Martini".
Il est aujourd'hui difficile de
vérifier l'exactitude de ces propos,
même si Jeanne DENIS ne les réfutait
pas. Mais même si ils étaient confirmés,
cela n'apporterait que plus d'intérêt à
cette création publicitaire. VEDETTE
et l'agence BAZAINE étant parvenus à
effacer ces caractéristiques négatives
tout au long de l'exploitation
commerciale de cette star créée, qui
dura jusqu'en 1984 ! D'ailleurs, la Mère
DENIS ne serait pas la première star
complètement recréée, totalement
remodelée et vidée de sa personnalité
première, à des fins commerciales...
Combien de stars du cinéma peuvent se
vanter d'avoir su conserver leur nature
et leur personnalité originelles, souvent
en complète opposition avec leur
inévitable médiatisation ?
D'ailleurs, comme une véritable
star, il fut difficile de passer à une autre
communication. "Il est difficile d'effacer
la Mère DENIS qui a été une complice
dans les foyers pendant 20 ans [...] Plus
les personnages sont forts et typés, plus
il est difficile pour la marque de s'en
séparer"
nous
précisa
Bernard
69
BROCHAND , "on voit bien les limites
d'une telle utilisation. Plus les
__________________
69 - Bernard BROCHAND : Président du groupe
EUROCOM Paris. Entretien privé accordé le 11 Mai 1988.
Déjà en 1984, le journaliste François CUEL écivait :
"VEDETTE vit tellement dans et par la Mère DENIS, que
la disparition de cette dernière causera de gros problèmes
: la nouvelle, largement relayée par les media, empèchera
toute utilisation directe de la défunte" in "Pub cherche
héros", MEDIAS n°84 du 24 Septembre 1984.
personnages sont forts et typés, plus il
est difficile pour la marque de s'en
séparer. Le recours à Eddy MITCHELL
constitue un essai de sortie intelligente
qui déplace le problème." L'agence
ICEBERG eut en effet en 1988, l'idée de
recourir au chanteur Eddy MITCHELL
pour donner sa parole de Vedette sur les
qualités des machines à laver de la
marque. L'année précédente, dans le
film "Les voisins" réalisé par Gérard
JUGNOT, pour les lave-vaisselle
VEDETTE, le spectateur attentif
pouvait encore apercevoir dans la
cuisine, en clin d'oeil, une photo
encadrée de la célèbre lavandière.
Même
si
l'utilisation
d'Eddy
MITCHELL fut originale, il faudra
plusieurs années pour que l'on oublie la
Mère DENIS...
Dans le secteur des pâtes
alimentaires, il est intéressant de
constater
que
ce
sont
deux
personnalités créées, qui se sont
opposées pendant plusieurs années.
Pour LUSTUCRU, GERMAINE70 nous
présentait les pâtes aux oeufs frais nonfêlés,
puis
leur
renommée
intergalactique. "GERMAINE était un
personnage qui était sensé représenter
un certain nombre de vertus qui sont
celles de la marque LUSTUCRU."
raconte Daniel DAHAN71. "Elle a permis
__________________
70 - "Germaine est la Caroline de Monaco de la pub,
superstar sans compétence particulière si ce n'est qu'elle
existe et qu'exister est l'ambition de toutes les marques.
[...] Les héros comme ceux-ci interviennent avant tout
sur des secteurs sans conscience de marque : celui des
pâtes est particulièrement handicapé sur ce point"
François CUEL ibid..
71 - Daniel DAHAN : Directeur au groupe BELIER Paris.
Entretien, en compagnie de Claude DOUCE Président du
groupe BELIER Paris, accordé le 3 Mai 1988.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
de
faire
passer
auprès
des
consommateurs des vertus qui mises en
avant directement par la marque
auraient été jugées trop traditionalistes
et un peu passéistes. A travers un
personnage comme celui-là, on a pu
construire une saga.
Et c'est intéressant de créer une
histoire à partir d'un personnage
réinventé, mais faisant partie de la
mémoire collective, parce que cela
permet d'une part d'avoir la continuité
et d'autre part de rendre intéressantes
certaines qualités de la marque qui
autrement paraîtraient banales. Ça
devient distinctif. Le dernier avantage
est que cela donne une souplesse au
discours de la marque et amplifie son
champs. Cela se passait dans une ferme
et LUSTUCRU pouvait mettre en
avant la rigueur, la qualité et le sérieux
comme avant. Et puis lorsqu'il a fallu
moderniser pour préparer l'arrivée de
nouveaux produits, on a pas hésité à
confronter GERMAINE aux petits
hommes verts72. La marque a pu
totalement
intégrer
toutes
les
dimensions de la modernité à une
image de tradition."
__________________
72 - "Germaine épate les martiens" Henri BOVET, LE
FIGARO MAGAZINE du 23 Janvier 1988.
Scores IPSOS
film Lustucru / Germaine
Impact
Oct. 1984
. Score brut
68
. Score spécifique
27
. Score prouvé
32
. Score de reconnaissance
Agrément
64
. Positif
79
. Négatif
14
. Indifférent
7
"Film de Pub"
Philippe BENOIT, Patrick LE BRIGAN, Didier TRUCHO T
Editions GALLIMARD, Paris (1988) p. 52
Film : "Les martiens"
Comme le montrent les scores
d'impact IPSOS présentés ci-avant,
cette approche semble avoir été
payante pour LUSTUCRU en termes
de notoriété et d'image.
Claude DOUCE73, alors au
groupe BELIER se rappelle de la
proposition à l'annonceur et du décès
de la première GERMAINE :
"L'annonceur n'en voulait pas. Quel mal
pour vendre ce personnage ! Et lorsque
le premier personnage est décédé, il a
fallu trouver quelqu'un avec un
caractère qui incarne la tradition, la
qualité de la cuisine, la sympathie. Mais
aussi qui lui ressemble un peu dans la
gestuelle, l'intonation. C'est difficile
pour les grandes vedettes, c'est possible
pour les semi-vedettes.". Et si certains
publicitaires à l'oeil averti comme
__________________
73 - Claude DOUCE : Président du groupe BELIER Paris.
Entretien en compagnie de Daniel DAHAN Directeur au
groupe BELIER Paris, accordé le 3 Mai 1988.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
80
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Michel
ROGALE74,
alors
chez
D.M.B.&B. trouvèrent "que le passage
de la première à la deuxième
GERMAINE, on l'a vraiment senti dans
le casting", gageons que le public dans
sa grande majorité n'y prêta pas
attention, trop intrigué qu'il était, de
voir son héroïne kidnappée par les
petits hommes verts, "fêlés des pâtes".
En fait, le personnage fut créé en 1979
pour donner indirectement la réplique
à André AUBERT qui, avec son
imitation de FERNANDEL dans le rôle
de Don CAMILLO, travaillait depuis
quatre ans déjà, au service de la
concurrence75.
C'est en effet dès 1975, que Don
PATILLO76 nous donnait pour la
première fois l'absolution, pour tout
pêcher de gourmandise concernant la
consommation des pâtes, des pâtes oui,
mais des PANZANI ! "PANZANI est
une société qui a toujours été
innovatrice."
précise
Alain
De
77
POUZILHAC , "Elle fut par exemple la
première à montrer ses pâtes dans des
emballages cello alors que tous les
autres fabricants les cachaient. Puis,
__________________
74 - Michel ROGALE : Président Directeur Général du
groupe D.M.B. & B. Paris. Entretien privé accordé le 12
Juillet 1988.
75 - "Les fabricants de pates ne sont plus des nouilles"
Olivier LAMOUR, STRATEGIES n°572 du 7 Septembre
1987.
76 - "Meutres en série dans la publicité" Dossier collectif,
CB NEWS N°105 du 2 Janvier 1989. "Don PATILLO n'est
pas mort" Isabelle TERRAY, COMMUNICATION CB
NEWS N°206 du 1er Avril 1991.
77 - Alain de POUZILHAC : Président Directeur Général
du groupe H.D.M. Paris. Entretien privé accordé le 9 Juin
1988.
PANZANI a fait des efforts dans la
qualité de ses pâtes. Dans l'exécution
stratégique, il fallait alors faire passer
ce côté performant par rapport aux
concurrents. Dans le food, pour
montrer le côté plus performant, on
tombe tout de suite dans la
gourmandise".
Pour savoir comment naquit
l'idée du personnage de Don PATILLO,
il était inévitable de solliciter Christine
ARFEUILLERES78 et force est de
constater que la créativité intervient
parfois également dans les grandes
conceptions publicitaires. Par ailleurs,
cette explication du cas est
particulièrement intéressante, car elle
rassemble de nombreux sujets que nous
détaillerons dans les prochains
chapitres. "Fin 1974, le budget
PANZANI était un peu en panne.
PANZANI vivait sur la magie du nom.
Il fallait maintenir son leadership. Mais
les créatifs et leurs projets se faisaient
renvoyer parce qu'à l'époque M.
PANZANI qui était immigré italien,
souffrait beaucoup de ses origines et ne
voulait pas que l'on rappelle ces temps
qui avaient été pénibles pour lui et très
mal vécus. Il ne voulait pas entendre
parler de l'Italie. Ça limitait d'autant
plus qu'il n'y avait pas d'argument
rationnel. PANZANI n'avait jamais
joué l'U.S.P.79. LUSTUCRU jouait les
__________________
78 - Entretien privé accordé le 30 Mai 1991.
79 - Unique Selling Proposition.
Le publicitaire
américain Rosser REEVES expliqua dans son livre "Reality in advertising" Editions Alfred KNOPF, New
York, 1961,1990, Etats-Unis, pp. 47-48 -, comment cette
méthode de création publicitaire fut imaginée à l'agence
TED BATES, dans les années 40. L'objectif était avant
tout de faire au consommateur une proposition puissante
et exclusive par rapport à la concurrence.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
oeufs frais, RIVOIRE & CARRET
jouait le blé dur et PANZANI utilisait
le thème "qui dit pâte dit PANZANI".
A la suite d'une étude de
motivations, on s'était aperçu que les
pâtes étaient devenues un aliment
tellement banal que la raison d'achat
était essentiellement la marque. Ce qui
est alors arrivé très vite c'est la
signature Des pâtes oui, mais des
PANZANI. A cette époque, Valéry
GISCARD D'ESTAING était devenu
Président de la République et il
instaura les dîners chez les Français.
Sachant que jamais on n'aurait servi des
pâtes à un invité, j'ai eu rapidement
l'idée d'un schéma de scénario que l'on
pouvait décliner et qui était raccroché à
l'actualité. Avec un couple de Français
chez qui il allait se passer quelque
chose, l'homme demandait :
"- Mais qu'est-ce qu'on lui sert avec le
chevreuil.
- Des pâtes, répondait la femme.
- Des pâtes, mais t'es folle ! ! !
- Des pâtes oui, mais des PANZANI."
J'avais prévu plusieurs scénarios
mettant en scène Henri IV, Louis XIV,...
des grands personnages qui se voyaient
servir des pâtes, mais pas n'importe
lesquelles, des PANZANI parce que
c'était un plus. J'avais vendu le Oui mais
des PANZANI auprès de M. PANZANI
et de l'équipe BSN qui venait de
racheter PANZANI. Mais, je n'étais pas
tout à fait satisfaite de jouer l'air du
temps. Il fallait trouver un élément de
pérennité parce que les Présidents... Ça
change. Il n'y a pas de recette, sauf que
j'avais promis de présenter des
scénarios bien ficelés avec une idée
pérenne, mais que l'avant-veille au soir
je n'avais toujours rien trouvé. Ce soir-
là, un copain m'appela pour aller dîner
chez lui mais je lui répondis que j'avais
une charrette, que c'était impossible.
Mais j'acceptai en définitive. Au retour,
lorsque j'ai repris ma petite voiture, je
me suis arrêtée au feu rouge de la porte
d'Auteuil. Je revois toujours ça. Et tout
d'un coup je l'ai eu ce film, j'ai eu le halo
de lumière... Et Don CAMILLO s'est
imposé à moi. Don CAMILLO ment
toujours au Seigneur, mais il ment
gentiment en essayant de cacher ses
petits défauts. J'ai donc vite écrit ça sur
un petit bout de papier et j'ai enfin pu
passer une bonne nuit.
Le lendemain matin, je me
souviens que j'ai ennuyé tout le monde
à l'agence pour me rappeler comment
parlait Don CAMILLO, rebaptisé Don
PATILLO, pour arrivé à : «Vous voyez
Seigneur, je vis très simplement, je me
contente d'un verre de vin de ma petite
vigne. Ce n'est pas pêcher Seigneur. Et
de ces quelques pâtes, alors,... Et le Bon
Dieu l'interrompait en disant : Des
Pâtes Don PATILLO... Oui, mais des
PANZANI», et il était obligé de dire
oui."
A la demande des commerciaux,
deux autres films furent conçus pour
les écrans destinés aux enfants, qui
avaient été définis comme puissants
prescripteurs pour les pâtes. Un film
avec l'Ogre du Petit-Poucet et un film
d'animation avec ASTERIX. Mais au
premier test d'impact / mémorisation, il
s'avéra que "les gosses n'avaient
pratiquement pas vus ASTERIX et
l'Ogre. En revanche, ils avaient vu Don
PATILLO et ils l'avaient retenu".
Et Christine ARFEUILLERES
de nous expliquer le choix du comédien
Chapitre I : Origines de la star
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82
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
André AUBERT. "J'ai appelé Jacques
MONNET qui travaillait chez CITECA,
et on a d'abord cherché le frère de
FERNANDEL, tout en recherchant les
ayants droit, auteurs, producteurs,...
Mais nous n'avons jamais eu de réponse
sur les ayants droit. Le frère de
FERNANDEL dit oui, mais avec
beaucoup de scrupules à remplacer son
frère. Tellement de scrupules que deux
jours avant le tournage il nous a dit :
"non non, je ne peux pas faire ça". Je
crois me souvenir que c'est Daniel
CAUCHY qui connaissait un imitateur,
André AUBERT, qui entre autres
imitait
FERNANDEL
en
Don
CAMILLO. Ils l'ont contacté, et il a été
merveilleux de bout en bout."80
__________________
"D'une certaine façon, observe
Jean-Michel CARLO81, Don PATILLO
c'est FERNANDEL. Ça a été un succès
absolument fabuleux. Pourquoi ? Parce
que c'est un personnage de légende créé
par le cinéma, c'est une personnalité.
Mais c'était tellement au service du
produit, des pattes et de la
gourmandise, et d'une continuité qui
dure
depuis
15
ans
avec
systématiquement la même chose, ça a
fonctionné."
La durée est en effet l'expression
même du succès d'un personnage.
Autre cas caractéristique de création
publicitaire : UNCLE BEN'S, le riz qui ne
colle jamais. En 1971, alors que Louis
ARMSTRONG venait de décéder, on
découvrit dans les écrans publicitaires
avec beaucoup d'amusement un
sympathique vieil homme noir qui, sur
une musique jazz évoquant la
Nouvelle-Orléans, chantait :
80 - Lors du Grand Prix de la Publicité de 1986, la
campagne reçut le Prix de la pérennité. Début 1992, soit17
ans après le début de la saga, le film obtenait encore 83 %
de scores d'agrément (pour un standard de 67%) "La
presse gagne en attribution" Isabelle TERRAY,
COMMUNICATION CB NEWS n°239 du 6 Janvier
1992. Observons que les pâtes, devenues peu à peu un
produit générique comme le fait remarquer Christine
ARFEUILLERES, ont souvent essayé de se démarquer en
créant ou en utilisant des personnages célèbres.
RIVOIRE & CARRET utilisa diverses stars pour sa
communication publicitaire. Ce fut l'inoubliable
COLUCHE encore peu connu, surpris en plein repas,
mais aussi l'extraordinaire duo composé des inénarrables
Daniel PREVOST et Pierre DESPROGES, notamment
dans un sketch sur les fondements métaphysiques de
l'éternelle interrogation : "qui de la poule ou de l'oeuf...?"
Sommet de l'humour publicitaire, ce sketch reste luiaussi gravé dans la mémoire des amateurs. Enfin en 1987,
c'est le chanteur Tom NOVEMBRE qui participait à la
communication de la marque, sa gourmandise l'arrachant
à une partie de cartes entre amis. "Tom pousse RIVOIRE
& CARRET" Guillonne de LAFORCADE, STRATEGIES
n°551 du 2 Mars 1987.
__________________
81 - Jean-Michel CARLO : Président du groupe YOUNG
& RUBICAM France, Paris. Entretien privé accordé le 28
Avril 1988.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
83
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
- "Hey beep beep peedy, Hey lap lap peedy, Hey peedy lap lap
peedy. Non non je ne suis pas Armstrong, je suis UNCLE BEN'S.
Moi je fais du riz, il est formidable, il ne colle jamais. C'est ça qui
me donne envie de chanter..."
Ainsi naissait la saga française
d'UNCLE BEN'S, le riz long grain
américain. Car, si le riz est américain, la
personnalisation de l'oncle BEN
présent sur le packaging, est en
revanche une invention bien française !
L'agence
D.M.B.&B.
(DARCY
MASSIUS BENTON & BOWLES)
alors MASSIUS LANDAULT pensa que
c'était une bonne idée que de donner
vie et rendre célèbre ce personnage
d'illustration, dont le riz était arriver en
France des Etats-Unis, trois ans
auparavant. Aux Etats-Unis, la
communication est beaucoup plus
basée sur le produit et de l'oncle BEN,
les américains ne connaissent que
l'immortel visage présent sur le
packaging !
Si le personnage fut utilisé
pendant toutes ces années pour
diverses campagnes de communication,
celles-ci ont évolué, s'adaptant toujours
à leur époque. Les deux premières
années furent logiquement consacrées à
la présentation d'UNCLE BEN'S et à la
personnalisation de la marque. Il fallait
faire connaître ce nouveau personnage,
le rendre célèbre. Une fois fait, dès 1973,
le porte-parole de la marque s'est
attaché, jusqu'au début des années
1980, à vanter la principale qualité du
riz : "il ne colle jamais". Le point
commun des différents films étant qu'il
régnait toujours une atmosphère de
fête.
Détail intéressant, de 1973 à
1980, UNCLE BEN'S quitta sa
Louisiane natale pour des barbecues et
des fêtes plus "européennes", plus
"françaises", et il devint d'ailleurs
rapidement le seul acteur noir présent à
l'écran. En 1976, alors que le décor était
celui d'une soirée très sélecte se
déroulant dans un appartement, il était
même totalement absent du casting !
En 1980, retour aux sources, il
réapparut sur un bateau à roues
voguant sur le Mississippi. Par la suite,
le produit ainsi que ses caractéristiques
étant connus, la communication devint
plus soft, mettant en scène de véritables
petites histoires, dont l'action se
déroulait en Louisiane. Enfin, dès 1983,
UNCLE BEN'S passa de la fonction
d'invité à celui d'hôte dans une grande
bâtisse coloniale. La communication
publicitaire saisit alors au passage
quelques scènes (fêtes, mariage, retour
du fils à la maison,...) de sa vie
familiale1.
"UNCLE
BEN'S
est
un
personnage qui fait très très bien son
travail. D'abord parce qu'on le trouve
partout. Il est sur le packaging, mais
également dans les films. Il y a là une
__________________
1 - "Le patriarche ne sera pas collant" Henri BOVET, LE
FIGARO MAGAZINE du 30 Décembre 1987.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
84
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
synergie importante. Synergie aussi du
personnage avec la Louisiane, la
musique, ainsi que cette ambiance de
fête. Ce n'est pas un UNCLE BEN'S qui
va nous dire des recettes très précises,
c'est un UNCLE BEN'S qui vit au
rythme de la Louisiane, c'est à dire dans
tout un contexte qui lui va bien. C'est
aussi un personnage que l'on a du mal à
exporter. Dans d'autres pays les clients
locaux préfèrent jouer la stratégie des
grands chefs. UNCLE BEN'S reste une
figure sur le packaging." précise Michel
ROGALE2, alors Président de l'agence
D.M.B.&B., "sporadiquement il a été
utilisé dans d'autres pays d'Europe,
comme
la
Grande-Bretagne,
l'Allemagne et l'Espagne mais pas de
manière continue. Aujourd'hui [1988],
nous commençons à l'exporter vers
l'Italie, la Grèce et l'Autriche" ajoute
Roberto PASSARIELLO, Responsable
commercial du produit à l'agence, "mais
ces pays lui préfèrent souvent une
campagne internationale qui s'appelle
Top Chefs, qui met en scène des Grands
Cuisiniers. On l'a testée en France pour
voir quelle serait la réaction du
consommateur. Mais elle n'a pas très
bien fonctionné."
Chacun connaît le visage
d'UNCLE BEN'S, ne serait-ce que parce
qu'il figure sur l'emballage. Mais
combien sont ceux qui auront noté que
le rôle ne fut pas toujours interprété
par le même comédien. Combien sontils à avoir vanté les mérites du célèbre
riz ? En 18 ans, UNCLE BEN'S n'eut pas
moins de cinq visages différents aux
accents différents eux aussi. Plus
__________________
2 - Entretien privé accordé le 12 Juillet 1988.
qu'une anecdote, ce détail montre
combien le personnage lui--même
surpassait ses différents interprètes.
"Au début, nous n'avions pas pensé que
UNCLE BEN'S devrait être une seule et
même personne" indique Roberto
PASSARIELLO, "depuis 1982, il a le
même visage"3, celui de Earl SYDNOR,
extrait d'un méticuleux casting réalisé
aux Etats-Unis4. Enfin lors du
lancement de la communication pour le
riz à cuisson rapide ou les riz préparés,
le héros fut éloigné progressivement
dans les premiers films. Son personnage
restait beaucoup trop attaché au riz
blanc et à la tradition.
Autre produit, autre exemple,
autre "création" caractéristique de star.
En 1981, l'afficheur AVENIR demande à
l'agence C.L.M./B.B.D.O., de concevoir
une campagne - d'affichage bien sûr __________________
3 - Un autre personnage célèbre eut lui-aussi de
nombreux visages : El GRINGO du café Jacques VABRE.
En revanche, il est intéressant de savoir que c'est là pour
de simples raisons juridiques qu'il était impossible à
l'agence d'utiliser le même interprète. "A l'époque où il a
été lancé par D.D.B., c'était l'accent, la grosse moustache,
très populaire en complet décalage avec ce qu'attendait le
consommateur. C'est pour cela que l'on a voulu changer
en éliminant ce facho qui sélectionnait des grains"
explique Michel VADON de l'agence FAURE VADON
FOREST BRIDOUX. "C'était le type qui venait en
costume trois pièces, le petit fonctionnaire minable qui
venait se mettre dans un western. J'aurais préféré garder
le même personnage. Mais là, Monsieur Jacques VABRE
existe. Il a vendu son nom avec interdiction absolue
d'utiliser sa personne. Juridiquement on est attaquable si
on laisse penser qu'il y a un M. Jacques VABRE. Comme
réellement JACQUES VABRE avait plus de 250 experts
dans le monde, on a varié." Entretien privé accordé le 4
Juin 1991.
4 - Mais l'on ne vieillit pas indéfiniment en publicité, et
après 10 ans de bons et loyaux services, Earl SYDNOR fut
remplacé par un autre comédien noir accompagné de 3
égéries, en 1993.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
85
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
qui allait susciter émois et passion lors
de sa sortie. Aujourd'hui encore, si le
nom du célèbre afficheur reste
parfaitement collé à la campagne, c'est
le nom de la star que l'agence venait
consciemment ou pas de créer, qui reste
dans les mémoires : MYRIAM. Ce cas
comporte un grand intérêt ici au regard
de la sélection du mannequin. Et
Philippe MICHEL5 de retracer la
conception de la campagne imaginée
par Joël LEBERRE et Pierre BERVILLE,
ainsi que la célébrité quasi instantanée
qui s'abattit sur la jeune femme
sélectionnée. L'extrait d'interview qui
va suivre est reproduit dans son
intégralité car reflétant pas à pas le
déroulement des événements, ne seraitce que pour nuancer l'analyse /
interprétation maintes fois rencontrée
de certains auteurs manifestement mal
informés6.
"La scène se passait en 1981, au
moment délicieux où l'on n'avait pas le
droit de jouer avec l'utopie socialisteféministe et le juridictionisme que
Gisèle HALIMI et Yvette ROUDI
s'apprêtaient à appliquer. Il y avait des
textes de loi qui interdisaient aux
publicitaires de se servir de leur corps.
J'ai eu beau leur dire que leur corps
m'intéressait peu, c'est vrai que l'on a
voulu faire une démonstration sur le
fait qu'elles avaient tort, en en faisant
une provocation. Le stalinisme mérite
__________________
5 - Philippe MICHEL, Président Directeur Général de
l'agence C.L.M. / B.B.D.O. Paris. Entretien privé accordé
le 30 Mai 1988.
6 - "Puissance Pub - la force du temps dans la
communication" Aimé LEMOYNE, Editions DUNOD,
Paris (1989) p. 189-190.
toujours d'être dénoncé là où il pêche.
Le grand pêcher stalinien est de vouloir
faire le grand bonheur des autres à leur
insu. Ça a été le grand pêché socialiste,
le grand pêché barbu, le grand pêcher
féministe. Mais tout cela c'est mort et
évacué déjà.
MYRIAM
a
été
une
contribution, c'est certain. Donc, pour
faire une provocation, par rapport aux
idées dont ils étaient certains qu'elles
étaient majoritaires en France, il fallait
faire très attention parce que l'on était
sur le fil du rasoir. N'importe qu'elle
vulgarité, intention un peu sale, aurait
été condamnée immédiatement. La
deuxième raison pour laquelle il fallait
faire attention au choix de MYRIAM,
c'était le public. Chacun d'entre nous
adore une chose, c'est d'être manipulé,
d'être baiser. Mais bien, parce que si
c'est un tout petit peu mal fait, l'autre
est mort. Le grand plaisir de la
séduction, c'est d'être victime de cette
séduction. C'est délicieux et on en
redemande. Donc il ne fallait pas se
tromper. Nous voulions jouer avec les
gens,
jouer
d'eux,
de
leur
représentation
mentale,
et
en
particulier de la connaissance qu'ils
avaient de la publicité, qui jamais ne
faisait ce qu'elle disait. Il fallait par
conséquent leur apprendre que la
publicité allait faire ce qu'elle avait dit,
entre le 1er Septembre j'enlève le haut et le
4 Septembre j'enlève le bas, elle avait
vraiment enlevé le haut ! Donc elle avait
appris qu'elle allait continuer et cette
fois-ci au grand dam du spectateur.
Puisque personne n'avait imaginé la
manière, le retournement de situation,
à laquelle la publicité se livre toujours
pour ne jamais dire cette chose triste
qui s'appelle la vérité. Réussir là où l'on
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
86
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
croyait que l'on allait échouer. Là, où
les gens attendaient des poils, ils ont eu
des fesses !
C'est ça qui a d'abord fait le
succès du mécanisme. Quant au choix
de la jeune fille, il fallait qu'elle soit
d'une innocence, d'une tranquillité
d'être sensible. On avait choisi avant la
jeune fille, la posture : droit devant, les
mains sur les hanches, devant un fond
bleu, la mer. Pourquoi les mains sur les
hanches et face à la caméra, parce que
jamais un mannequin ou une posture
érotique ne se met comme ça, on visse
dans ces cas là. On met les hanches de
travers et les épaules dans un autre
angle, et depuis les Egyptiens, on a rien
trouvé d'autre que de visser le corps
pour le rendre attirant, jusqu'au mec
qui se regarde dans la glace...
Nous avons donc décidé de ne
pas visser et au contraire de regarder
carrément. C'était la posture de cette
fille qui d'emblée disait : "Je me moque
de vous, mais gentiment". Les
journalistes ne s'y sont pas trompés et
ils ont recherchés le nom de cette fille
parce qu'ils ont compris que c'était un
message avec lequel elle était d'accord
et qu'elle le faisait de façon intense et
drôle. Elle regardait bien l'objectif : "Je
vais enlever le haut... Je le fais.
Maintenant, je vais enlever le bas...
Bande de cochons, vous ne me croyez
pas, eh bien voilà ! je vous ai bien eu.
Messieurs Dames au revoir et à
bientôt". Les journalistes ont alors
recherché son nom, et elle s'appelait
effectivement MYRIAM. La pauvre a
alors été soumise aux feux de
l'actualité, alors que simple et sobre, ce
n'était pas ce qu'elle recherchait ; et elle
a fui des vues de l'humanité. Je sais
qu'elle est restauratrice aujourd'hui aux
alentours de Lyon ou de Grenoble7. Elle
a obtenu une notoriété beaucoup moins
factice qu'on aurait pu l'imaginer,
l'ennui c'est qu'elle l'a mal vécue alors
qu'elle aurait pu très tranquillement
s'en servir.
Maintenant son choix a été
extraordinairement difficile. Casting à
perte de vue dans l'agence. Nous avions
décrit une forme de sein, une forme de
fesse, une teinte, un bronzage et une
opacité de peau, très très précisément.
Parce qu'il y a des seins qui dans leur
mollesse et leur douceur appelle la
caresse ou à des tas d'autres rêves,
d'autres fantasmes, l'oeil se trouble.
C'est la même chose pour les fesses, la
présence d'un plis sous une fesse est
tout à fait charmant, mais il raconte des
histoires, que l'on avait pas envie de
raconter. Il fallait donc qu'elle soit
simplement sportive et musclée. Il
fallait également qu'elle ait les cheveux
courts. Il ne fallait pas une belle blonde
ou une belle brune qui ait de belles
lèvres etc. Nous avons recherché l'antipulpeuse. Il fallait qu'elle soit bien en
chair, mais surtout pas pulpeuse, y'en a
mare des pulpeuses ! Une pulpeuse vit
en étant une poupoute. Une poupoute,
c'est la contraction entre poule et pute.
Une poule pour les autres alors qu'en
vrai, la motivation est monétaire, un
échange économique en tout cas. Donc
les pulpeuses sont des poupoutes !
__________________
7 - En réalité, après une retraite dans bergerie bouddhiste
des Alpes du Sud, la fille du sculpteur Lazlo SZABO qui
n'avait que 18 ans lors de la campagne AVENIR, est
aujourd'hui serveuse dans un pub-restaurant dans la ville
de Porto, au Portugal. "Myriam" Patrick AMORY,
INTERVIEWS du mois de Septembre 1992.
Chapitre I : Origines de la star
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87
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
D'ailleurs, elles posent dans LUI ou
dans PLAYBOY, ou elles tiennent des
parfumeries... pensant que... mais il ne
faut pas être cruel comme ça. Donc, ce
fut la révélation d'un personnage qu'on
ne voyait jamais. Je voulais montrer à
Gisèle HALIMI que leur corps ne nous
intéressait pas, ce qui nous intéressait,
c'était le corps de la femme normale,
qui vit très bien dans sa peau, et si bien
qu'elle peut se mettre nue sans choquer
quiconque.
Le résultat fut à la hauteur de ça.
Tous les sondages sur les femmes ont
comprendre quelque chose et d'être un
peu manipulés, que c'est devenu un
personnage fameux. Le cerveau ne
retient rien qui ne l'ait intéressé. Le
cerveau se débarrasse toujours des
choses superflues. Comme notre travail
c'est la mémoire, elle possédait encore
en 1988, 47 % de mémorisation, pour
seulement 1 million de francs de
panneaux publicitaires." En l'espace
d'une campagne et trois affiches1,
MYRIAM est entrée au Parthénon des
stars de la publicité, gravée à jamais
dans l'esprit de ceux qui virent et
vécurent cette fabuleuse campagne2.
Dernier exemple, un cas
américain lui aussi très caractéristique.
Sa médiatisation fut si bien orchestrée,
qu'en 1988, deux ans après son
lancement, ses spots télévisés arrivaient
en seconde position au classement
VIDEO STORYBOARD, en termes de
mémorisation.
__________________
1 - David OGILVY, op. cit. p. 26.
2 - La campagne reçut le Grand-Prix de l'Affichage 1982.
alors montré qu'à 70 ou 75 %, elles
trouvaient ça très bien et pas choquant
du tout. Donc prétendre que la nudité
du corps féminin est une insulte à ce
même
corps,
c'est
outrepasser
largement ses droits, et c'est même
suspect. C'est lui créer une valeur, un
mystère, c'est le tchador avant la lettre,
c'est revendiquer la couverture d'un
objet de pêcher, puisqu'il faut le cacher.
Alors je le montre et tout va bien merci
! C'est pourquoi ce personnage a
incarné une surprise, une révélation.
Les gens étaient si contents de
Son dossier de presse intitulé
"L'être, derrière la légende", par de
nombreux aspects dont le mystère,
rappelle d'ailleurs les grandes stars
d'autrefois : "Tout commença en 1983
lorsque le hasard lui fit rencontrer, lors
d'une surprise-partie, un exécutif de la
compagnie ANHEUSER-BUSH, le
premier brasseur américain et leader
mondial incontesté. Se mourant
d'ennui, ce dernier fit la connaissance
de notre ami philosophe, qui lui révéla
que la base d'une bonne surprise-partie
était une bière BUD LIGHT, justement
brassée par ANHEUSER-BUSH...
Lorsque quelques jours plus tard, il fut
invité à exposer son point de vue au
quartier général de la compagnie, à
Saint-Louis, ce fut l'ovation. Une star
était née. A partir de là, ce fut les
contraintes habituelles de la vie d'une
célébrité,
contrat,
essais,...
et
finalement la pose pour des affiches
BUD LIGHT. Il fit ses débuts à la
télévision en tant que porte-parole de la
marque, en Californie, puis sur le plan
national en 1987, lors de la
retransmission
du
Superbowl.
Aujourd'hui, il est devenu Directeur
Marketing au sein de la société,
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
88
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Conseillé Spécial en surprise-partie
pour BUD LIGHT, et dispose de toutes
les facilités dues à son rang. Son agenda
déborde en permanence".
En ce qui concerne la star ellemême, le dossier de presse la définit
comme un : "Cadre supérieur
constamment entouré de très belles
femmes, les Spudettes, ses compagnes
de charme. Conservant quelques
aspects énigmatiques, il est devenu un
symbole de tout ce qui est plaisir et
amusement. Connu dans le monde
entier pour son flegme, sa vive
intelligence, son charme et ses manières
sophistiquées. Il est en permanence
demandé en tant qu'invité d'honneur
dans les milieux les plus sélects et est
coutumier des cercles royaux ; les
célébrités fortunées du monde entier
lui
demandent
conseils
et
recommandations. Pour lui, faire une
surprise-partie est un savant mélange
de science et d'art. Il est LE pionnier en
la matière. «Je suis simplement né avec
un talent pour avoir du plaisir et de
l'amusement» a-t-il récemment déclaré
dans un de ses rares moments privés,
«et je le ferai, même si je n'étais pas
payé. Les types qui dirigent BUD
LIGHT ont décidé que c'est un talent
que je me devais de partager avec le
monde entier». Personne ne connaît
exactement son âge. D'ailleurs, il
change de sujet de conversation lorsque
l'on insiste dans cette direction
invoquant le fait que «le plaisir et
l'amusement n'ont pas d'âge !». Bien
qu'il soit particulièrement doué pour
plusieurs langues, il affectionne de ne
parler qu'un langage peu connu, et se
résumant dans des expressions du
visage, comprises uniquement par les
initiés de ses surprises-parties. En fait,
ce langage est une sorte de moyen de
communication fort usité par ces
mêmes initiés qui fréquentent clubs et
surprises-parties, où compte tenu du
volume sonore, on discute peu. Un
enchaînement de simples froncements
de sourcil très précis peut signifier une
suite de quelques 200 mots d'anglais,
mais parfaitement assimilables dans les
grandes capitales cosmopolitaines du
monde." "Toutefois, il est toujours
accompagné de traducteur" nous
précisa enfin son porte-parole, Bill
STOLBERG3.
Son nom : Spuds MACKENZIE.
Jusqu'ici, rien d'extraordinaire en
matière de création de personnage
publicitaire. Or, il faut savoir que cette
nouvelle star n'était autre qu'un chien
Bull Terrier anglais ! David VADEHRA,
Président de la société d'études VIDEO
STORYBOARD, analysa qu'en 1987/88
les publicitaires américains sont
revenus en force à l'utilisation des
enfants et des animaux, en raison de
leur aspect "mignon et honnête. Les
spectateurs aiment voir des chiens qui
parlent dans les publicités, depuis
qu'ils traitent leurs propres animaux de
compagnie comme des membres à part
entière de la famille"4.
Si l'idée de cette utilisation était
particulièrement
originale,
son
exploitation fut à la hauteur de ses
__________________
3 - William H. STOLHBERG : Responsable de la
communication du produit BUD-LIGHT
FLEISMAN HILLARD, Inc. Etats-Unis.
chez
4 - "In TV viewer's favorite 1987 ads, offbeat characters
were the stars" Ronald ALSOP, THE WALL STREET
JOURNAL du 3 Mars 1987.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
89
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
ambitions. En 1987, les ventes de bières
BUD LIGHT ont augmenté de 20 %,
notamment grâce au concours de ce
nouveau personnage, baptisé par la
presse américaine le "Gourou du bon
temps" et médiatisé comme toute autre
star l'aurait été ! Notons cependant que
les films publicitaires mettant en scène
Spuds MACKENZIE étaient eux aussi
très originaux, donnant à la star un
comportement quasi humain. Cette
année là, l'originalité et la pertinence de
cette communication valut à juste titre,
à la bière BUD LIGHT, le second score
de mémorisation5 (derrière le film
d'animation pour la collective pour les
raisins californiens). Oubliés MILOU,
RAN TAN PLAN, ASTA, LASSIE,
IDEFIX ou RIN TIN TIN, il n'y a
désormais de vraies stars canines, que
dans la publicité !...
"Je pense qu'il y aura toujours
des personnalités. Je crois que la
recherche d'une personnalité, sa mise
en avant... les stars ne disparaîtront
pas. Ces nouvelles stars ont un look, un
charisme qui fait qu'elles sont écoutées
à un moment donné" observe Bernard
BROCHAND6.
Cette présentation de la star - et
plus généralement d'une célébrité sous ses multiples facettes et ses
multiples révélations étant faite, il nous
est alors possible d'essayer d'isoler les
fondements marketing qui génèrent
son utilisation par la publicité.
__________________
5 - Voir également Gail TOM, Rebecca CLARK, Laura
ELMER, Adeward GRECH, Joseph MASETTI Jr. et
Harmona SANDHAR "The use of created versus celebrity
spokespersons in advertisements", opt. cit., pp. 45-51, car
Spuds MACKENZIE fait partie des célébrités créées
utilisées pour l'étude comparative.
__________________
6 -- Entretien privé accordé le 11 Mai 1988.
Chapitre I : Origines de la star
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
90
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
II
Chapitre II :
Fondements marketing de
l'utilisation d'une célébrité
A / Recherche d'impact sur la cible
91
93
1 - Changement de ton de la communication
101
2 - Un facteur anti-zapping : attitude du consommateur
3 - Les personnages de bandes dessinées : des cibles diverses
108
B / Autres fondements
1 - Transfert de notoriété
2 - Utilisation de la caution de la célébrité
3 - Mise à profit d'une adéquation stratégique
4 - Recherche d'identification au modèle
5 - Normalisation de la consommation du produit
6 - Personnification du produit
126
139
139
144
148
157
171
186
C / Etude des motivations du consommateur
192
1 - L'enseignement général de la recherche
2 - Recherche sur l'utilisation d'un porte-parole célèbre
193
3 - Méthodologie de l'expérimentation
4 - Résultats et analyse
5 - Conclusions
233
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
201
242
376
91
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
II
"L'actrice devait être jolie et si possible posséder quelques notions de comédie. Elle
n'avait pas besoin d'avoir le sens de l'humour, en ce qui me concernait. Je redoutais
qu'elle ne se mette à rire au milieu d'une séquence, nous obligeant à la refaire."
Buster KEATON
"My wonderfull world of slapstick" 1960.
Fondements marketing
de l'utilisation d'une célébrité
* * *
Quels sont les fondements
marketing qui incitent les publicitaires
à utiliser une ou plusieurs célébrités ?
Le mythe de la star ? Trop vague. Le
rêve ? Trop illusoire. La beauté ? Trop
éphémère.
Leurs
interprétations
cinématographiques ? Pure fiction.
S'il est évident qu'une part de
chacun de ces éléments vient influencer
la décision du publicitaire, la première
raison à l'utilisation d'une célébrité, est
la principale résultante de la
combinaison de ces différents éléments,
à savoir l'impact que la célébrité a
auprès du public et de préférence
auprès de la cible. Cet impact, qui sera
mis à profit par la publicité pour faire
passer son message, en profitant de
l'attention
momentanée
du
consommateur. Et cet impact est
devenu aujourd'hui vital alors que l'on a
calculé qu'un consommateur américain
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
92
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
moyen par exemple est exposé chaque
jour à 5.000 messages publicitaires1 !
A / Recherche d'impact sur la
cible
Dans cet objectif, la célébrité atteint généralement
son but.
Une étude menée en 1975 par
Jean-Jacques LAMBIN2 montrait qu'en
moyenne une hausse de 1% des
dépenses publicitaires occasionnaient
une progression de 0,1% des ventes ou
de la part de marché. Toutefois, l'auteur
reconnaissait que si l'on considérait
que "la publicité pouvait influencer
d'une certaine manière les ventes
futures en créant un réservoir de
goodwill, alors 1% d'augmentation des
dépenses publicitaires générait en
moyenne 0,25 % d'augmentation des
ventes ou de la part de marché".
Pour savoir si une campagne
marche bien, fonctionne bien ; pour savoir si
une annonce ou un film publicitaire a
réussi, on utilise généralement le terme
__________________
1 - Marc JEZEGABEL et Martine ROBERT, "Rentable la
publicité... Jusqu'où ?" DYNASTEURS n°29 du mois de
Septembre 1988. Voir également : "Consumer behavior"
Michael R. SOLOMON, Editions ALLYN AND BACON /
SIMON & SCHUSTER Inc. (1992), Needham Heights,
MA, Etats-Unis, page 125.
2 - "What is the real impact of advertising ?" Jean-Jacques
LAMBIN, HARVARD BUSINESS REVIEW, Mai / Juin
1975, pp. 139-147. L'auteur a procédé à une étude sur
plusieurs pays européens, plusieurs types de produits
totalisant 225 "années-marques" d'observation. On notera
cependant, qu'il s'agit là d'une étude strictement
quantitative, et qu'à aucun moment la nature, la qualité,
le mode de diffusion,... de chaque campagne n'ont été
considérés.
d'impact. Si les ventes ont augmenté, si
les distributeurs référencent davantage
ou plus aisément le produit, si l'action
publicitaire a généré du trafic dans les
points de vente, si le nom du produit
est connu d'un plus grand nombre de
consommateur, si l'image de la société
auprès de la cible a été modifiée,... on
dira que la campagne a eu un très bon,
voire un excellent impact. Pourtant
comme on peut le constater, le résultat
n'est pas le même à chaque fois.
Aux Etats-Unis, les locations
automobiles HERTZ utilisèrent le
coureur américain O.J. SIMPSON pour
la première fois en 1975. En 1977, "une
étude consommateur montra une
augmentation de 23% de l'impact brut
de la communication publicitaire de
HERTZ avec O.J. SIMPSON, une
augmentation de 41% du taux de
notoriété spontanée et une poussée de
35% de HERTZ comme meilleure
agence de location de voitures"3. Ce
terme d'impact est capital dans l'étude
__________________
3 - "O.J. tops year's star presenters" Louis J. HAUGH,
ADVERTISING AGE du 20 Juin 1977. On notera par
ailleurs que les résultats financiers de l'entreprise en 1976
se soldaient par un profit net de 42 millions de dollars
(soit environ 50% de plus que l'année précédente). A
l'origine, l'association HERTZ / O.J. SIMPSON avait été
imaginée par l'agence TED BATES, considérant la
rapidité de O.J. SIMPSON en tant que courreur et la
possibilité de transférer cette image de rapidité, aux
services de locations automobiles diffusés par HERTZ.
Au regard des résultats, la simple participation
publicitaire initiale de l'athlète se transforma rapidement
en un poste de porte-parole officiel de la compagnie.
Ainsi, O.J. SIMPSON continua d'apparaître dans les films
pour les locations automobiles, mais il participa
également aux opérations de communication interne, et
accepta d'apparaître sur des documents promotionnels à
l'attention des enfants. Voir également : "O.J. SIMPSON
juices HERTZ's image" Kate BERTRAND, BUSINESS
MARKETING du mois d'Août 1992.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
93
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
qui nous intéresse, car non seulement
l'on recherchera toujours cet impact
pour l'action publicitaire, mais le rôle
du publicitaire sera en définitive de
"gérer" l'impact personnel de la
célébrité pour le transférer au bénéfice
de la marque.
Lorsqu'en Mai 1982, l'acteur
italien Aldo MACCIONE - première
star de la saga - arrive dans la
communication des PETITS COEURS
de BELIN4 sur les conseils de l'agence
F.C.A.!, IPSOS calcule un "score
d'impact brut" et un "score de
reconnaissance" de 61% chacun. Ces
chiffres expriment un succès. Mais
qu'est-il advenu des ventes ? La
notoriété du produit est-elle acquise ou
au contraire, ne s'agit-il que d'un
souvenir très éphémère ? L'image du
produit / de la marque a-t-elle été
modifiée ?5 La célébrité a-t-elle
influencé ce résultat ?
__________________
4 - "Comment faire durer une histoire de coeur" Philippe
COLL, STRATEGIES n°520 du 9 Juin 1986.
5 - La part de marché passera de 4,3% en Mai 1982 à 5,8%
en Juin-Juillet de la même année. Par ailleurs, la
campagne obtiendra 79% d'agrément positif contre 11%
de négatif (10% d'indifférents). Le tout pour un budget
relativement modeste pour une exploitation en
télévision, de 2,8 millions de francs. On notera que
PETITS COEURS est un cas d'exception, car il est très
rare que l'on puisse obtenir des informations précises sur
le résultat de la campagne ou plus exactement sur les
résultats des ventes du produit après exploitation de la
campagne. Hormis le fait que le lien entre publicité et
résultats économiques ne soit jamais certain, la raison
systématiquement invoquée par les professionnels est
que la mise en avant d'une augmentation des ventes grâce
à l'utilisation d'une campagne employant une célébrité,
occasionne inéluctablement une révision à la hausse des
exigences de ladite célébrité lorsqu'elle a connaissance
des résultats. Ce que ni l'agence ni l'annonceur ne
souhaitent pour des raisons compréhensibles.
A la fin des années 70, une
société d'études américaine - TELLBACK - mit au point un système de
mesure électronique visant à mesurer
cet impact. Un échantillon de 10 films
publicitaires - utilisant tous une
célébrité6 - fut extrait du classement
ADVERTISING AGE des 100 meilleurs
films de l'année. Après observation d'un
échantillon de consommateurs, la
méthodologie
utilisée
prétendait
obtenir de manière informatique "une
notation composite d'après un calcul
qui combinait les changements
d'attitude
avec
les
évaluations
conscientes de chacun des films, par les
répondants". Les 160 consommateurs
composant l'échantillon représentatif
participèrent à 5 séances d'évaluation.
Toutefois, le journaliste Harry
W. McMAHAN7 qui s'était fait l'écho
de ce système, reconnaissait que si
"fondamentalement, les tests TELLBACK donnent une rapide évaluation
de l'attrait ainsi que de l'impact que
peuvent avoir des spots. Des sondages
plus détaillés seraient nécessaires pour
explorer une relation totale entre star
et annonceur." Ces limites considérées,
on pouvait néanmoins constater
d'après les résultats obtenus, que des
__________________
6 - En réalité, le film pour les assurances LINCOLN
NATIONAL LIFE avec Abraham LINCOLN servait de
film de contrôle.
7 - "Rating the stars in TV commercials : Bugs BUNNY vs.
Catherine DENEUVE" Harry W. McMAHAN,
ADVERTISING AGE du 22 Août 1977. Pour être
pleinement apprécié, l'article doit être rattaché à un
précédent sujet du même auteur : "100 best of '76 : stars,
jingles up ; year marks first $234,000 minute"
ADVERTISING AGE du 31 Janvier 1977.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
94
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
différences considérables existaient
pour des films recourant à la même
approche. Il suffit d'observer les scores
des extrêmes pour s'en convaincre.
moyenne = 57,4
90
80
70
60
50
40
30
20
10
0
83
82
73
72
71
50
Manufacturer's British Airways
Hanover Bank
(Robert
(Paul Lynde)
Morley)
Polaroid
(Candice
Bergen)
Johnson &
Johnson (Bugs
Bunny)
Air France
(Gene Kelly)
Alka-Seltzer
(Speedy)
44
Lincoln
Mercury
(Catherine
Deneuve)
37
Lincoln
National Life
(Abraham
Lincoln)
32
30
S.T.P. oil
(Robert Blake)
Burlington
(Petula Clark)
"Rating the stars in TV commercials : Bugs BUNNY vs. Catherine DENEUVE"
Harry W. McMAHAN
ADVERTISING AGE du 22 Août 1977
D'après le graphique TELL-BACK "Composite Ratings" présenté page 37.
Le
film
de
la
banque
MANUFACTER'S HANNOVER avec
Paul LYNDE obtint un score de 83 alors
que celui pour les chaussettes
BURLINGTON avec Pétula CLARK ne
dépassait pas 30. On retiendra
également le score de 44 seulement,
obtenu par le film avec Catherine
DENEUVE pour la marque automobile
LINCOLN MERCURY, ainsi que le fait
qu'il toucha nettement plus les
hommes que les femmes1.
Il est ici nécessaire de faire une
précision importante en fonction de ce
qui va suivre. Il est indéniable que si le
terme "d'impact" est communément
__________________
1 - Il sera intéressant de faire le parallèle entre cette
observation, les résultats obtenus par l'actrice lors du
lancement de son parfum, et l'étude menée par le groupe
CHESEBROUGH POND au sujet de son image. Voir
pour cela les informations présentées page 554.
utilisé
par
l'ensemble
des
professionnels de la publicité, il n'en
demeure pas moins sibyllin, équivoque,
voire
problématique
quant
à
l'interprétation à lui donner, au regard
des mesures obtenues. Parmi les
nombreux auteurs qu'il passe en revue
dans son étude de l'attitude, Kristian
PALDA cite Norman HELLER2 comme
ayant été l'un des prescripteurs de ce
type de mesures. "Les publicitaires font
l'hypothèse que si la publicité doit
vendre, elle doit communiquer, et la
publicité qui communique le mieux est
celle qui produira la plus forte
impression de la mémoire"3. La qualité
__________________
2 - Norman HELLER "An application of psychological
learning theory to advertising" JOURNAL OF
MARKETING n°20 du mois de Janvier 1956, pp. 248254.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
95
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
de cette impression de la mémoire
variant d'un medium à l'autre, d'un
support à l'autre.
jusqu'à l'étape finale, à savoir l'acte
d'achat.
Expliquant que même les
psychologues se montrèrent très
longtemps prudents sur la définition de
l'attitude, il part du schéma que Robert
LAVIDGE
et
Gary
STEINER
4
construisirent en 1961 et qui présentait
les six étapes menant à l'achat, comme
le montre le schéma présenté cidessous.
Mais Kristian PALDA de
s'interroger sur ces composantes cognitif, affectif et conatif - de
l'attitude et sur leur influence sur le
comportement du consommateur, en
apportant des exemples supportant
cette
association,
et
d'autres,
aboutissant au résultat inverse. Ainsi,
alors que des études personnelles
"confirme l'hypothèse que l'attention
tend à précéder ou même à contribuer
au taux d'achat. Elles ne font que
montrer qu'une attention supérieure
coexiste avec des taux d'achat plus
élevés"5. Et l'auteur de conclure en
regroupant
dans
un
tableau
synoptique, les différentes faiblesses
afférentes
à
chaque
approche
méthodologique, notamment en ce qui
concerne l'ordre de survenance de ces
composantes.
Prise de conscience
Connaissance
Appréciation
Préférence
Conviction
Achat
COGNITIF
(domaine des pensées)
AFFECTIF
(domaine des émotions)
CONATIF
(domaine des motivations)
Source : LAVIDGE Robert J. et Gary A. STEINER
"A model for predictive measurements of advertising effectiveness",
JOURNAL OF MARKETING d'Octobre 1961.
D'après le contenu du schéma de la table 1 page 61.
Le premier objectif de la
publicité, selon ces deux auteurs, est de
faire
prendre
conscience
au
consommateur potentiel de l'existence
du produit, puis de lui transmettre des
attitudes favorables à son sujet, de
manière
à
déclencher
un
comportement. Le rôle de la publicité
est ensuite de faire se déplacer les
consommateurs d'une étape à l'autre,
L'anthropologue
américain
Melford SPIRO6 propose à notre avis
lui aussi un cheminement intéressant
en cinq niveaux dans l'optique
cognitive de la communication
persuasive, menant implicitement le
consommateur du cognitif au conatif.
Alors que très logiquement les
publicitaires sont essentiellement
intéressés par les niveaux 4 et 5, le
__________________
3 - Kristian S. PALDA "The hypothesis of a hierarchy of
5 - Kristian S. PALDA, op. cit. p.20. Nous reviendrons sur
effects : a partial evaluation" JOURNAL OF
MARKETING RESEARCH du mois de Février 1966, pp.
13-24.
la notion d'attitude dans la section C consacrée à l'étude
des motivations des consommateurs page 192.
4 - Robert J. LAVIDGE et Gary A. STEINER "A model for
cit. page 228, d'après ses travaux parus dans AMERICAN
ANTHROPOLOGIST 68 du mois d'Octobre 1966, sous le
titre : "Buddhism and economic action in Burma".
predictive measurements of advertising effectiveness",
JOURNAL OF MARKETING d'Octobre 1961 p. 61.
6 - Melford SPIRO est cité par Michael SCHUDSON, op.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
96
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
principe de prise en considération de
cette approche impose que les étapes
préalables aient été concrétisées, pour
aspirer
voir
le
consommateur
éventuellement vérifier les deux
dernières étapes7.
Les consommateurs peuvent être
informés très faiblement sur un concept
idéologique.
Ils peuvent s'informer et comprendre le
concept.
Ils peuvent croire que le concept est
exact ou juste.
Le concept peut alors leur paraître
pertinent et contribuer à informer leur
environnement comportemental. Ils
organisent alors leur vie conformément à
cette croyance.
L'expression, souhaitée par
l'auteur,
de
l'éventualité
du
déclenchement de chaque étape, nous
paraît extrêmement pertinente pour
illustrer ô combien le déclenchement
du comportement recherché chez le
consommateur
n'est
pas
l'aboutissement
d'un
processus
mécanique, automatique et universel.
En définitive, cet impact
dépendra au départ de l'objectif
publicitaire poursuivi. Les résultats de
l'analyse comparative de la pression
publicitaire réalisée par Hubert
ZIELSKE8 en 1957-58 restent très
intéressants. A partir de 3.650
interviews, concernant l'envoi par la
poste de 30.016 publicités dans des
conditions de sécurité remarquables,
l'auteur démontre que les modalités
d'exposition de la cible à la publicité
doivent dépendre directement des
objectifs recherchés. C'est également
l'optique de Pierre GREGORY.
Ils peuvent intérioriser cette croyance,
ainsi elle n'est plus simplement cognitive,
mais très motivante. Elle ne guide plus
simplement, mais incite à l'action.
Source : D'après Melford SPIRO
"Buddhism and economic action in Burma"
AMERICAN ANTHROPOLOGIST 68 du mois d'Octobre 1966.
__________________
__________________
7 - Certains chercheurs tels que Herbert KRUGMAN -
8 - Hubert A. ZIELSKE "The remembering and forgetting
"The impact of television advertising : learning without
involvement" PUBLIC OPINION QUATERLY, 29,
Automne 1965, pp. 349-346 - pensent toutefois que dans
nos sociétés occidentales développées, il est tout à fait
possible - voire fréquent - que le consommateur passe
directement au niveau 4, sans même passer par le niveau
3. A l'instar de Roland BARTHES, sans doute pensent-ils
que nous ne consommons plus que des images et non
plus des croyances.
of advertising" JOURNAL OF MARKETING du mois de
Janvier 1959, pp. 239-243. Voir également l'étude de Cyril
FREEMAN, où il cite notamment Russell H. COLLEY
qui en 1961, lia la mesure des résultats de la publicité à la
définition d'objectifs publicitaires (DAGMAR : Defining
Advertising Goals : For Measured Advertising Results)
"How to evaluate advertising's contribution ?" Cyril
FREEMAN, HAVARD BUSINESS REVIEW de Juillet /
Août 1962 pp. 137-148.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
97
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
OBJECTIFS PUBLICITAIRES
NIVEAUX D'INTERVENTION DE
MOYENS DE CONTRÔLE DE
L'ACTION PUBLICITAIRE
L'EFFICACITE PUBLICITAIRE
* Rendre sympathique un produit, une
marque, une firme,...
- Echelles de sympathie, de préférence
AFFECTIF
- Points d'image
* Susciter une préférence.
- Tests associatifs ou projectifs
* Faire connaître un produit, une
marque, une firme, une action,...
- Questions sur la mémorisation, la
COGNITIF
notoriété (brute, assistée, prouvée).
* Imposer les qualités et les avantages
- Questions sur la compréhension, la
avancés par le message.
perception du message, sa valeur
d'attention
- Courbes de réponses mettant en
relation l'exposition (en nombre de
contacts) et la mémorisation (assistée,
prouvée...).
* Inciter les personnes d'une cible à
acheter un produit, à choisir une
- Question sur les intentions d'achat,
PRE-COMPORTEMENTAL
mesure du pouvoir de conviction des
marque.
messages.
* Forger une attitude favorable à l'achat.
- Echelles d'attitudes, différenciateur
sémantique
* Faire vendre un produit, améliorer les
bénéfices d'une entreprise.
- Suivi de la part de marché, de la
CONATIF
* Modifier des comportements
pénétration, des premiers achats
consécutifs à la campagne, des réachats, des croisements mediaproduits.
- Plans d'expérience révélant la
sensibilité des ventes à la pression
publicitaire, l'élasticité prix
- Observations (caméra pupillométrique)
et comptages (marchés témoins,
coupons-réponses)
- Analyse de régression (variable
indépendante = publicité ; variables
dépendante = ventes).
Source : "Le contrôle de l'efficacité publicitaire"
Pierre GREGORY
RECHERCHE ET APPLICATIONS EN MARKETING n°4 Janvier 1987 p.73
Dans un article paru en Janvier
19871 il expose lui aussi l'ambiguïté du
terme d'impact, lui préférant un exposé
des différents "outils de contrôle
__________________
1 - Pierre GREGORY, "Le contrôle de l'efficacité
publicitaire" RECHERCHE ET APPLICATIONS EN
MARKETING N°4 Janvier 1987, pp. 71-83. Voir
également Stan RAPP et Tom COLLINS "La
métamorphose du marketing : ou comment gagner sur
vos marchés en maîtrisant la relation avec le
consommateur" Editions PUBLI-UNION, Paris, 1991, pp.
92-96.
correspondant à chaque niveau de
l'action publicitaire" et permettant de
mesurer l'efficacité publicitaire au
regard des objectifs publicitaires
poursuivis.
Et l'auteur de préciser que s'il
existait "une méthode incontestée
d'appréciation de l'efficacité des
campagnes de publicité ; combien plus
délicate deviendrait soudain la position
des agences conseils face aux
annonceurs, des créatifs de ces agences
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
98
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
face à leur direction générale". Aussi
présente-t-il le tableau synoptique
précédent, des éléments de choix des
On perçoit dès lors parfaitement
combien la simple notion d'impact1
mise en avant par les publicitaires est
réductrice.
Toutefois, bien que conscient de
cette relative imprécision du terme
d'impact, en lui-même, ce dernier sera
cependant
conservé
pour
la
présentation des éléments qui vont
suivre. Non seulement parce qu'à
défaut d'un critère absolument objectif,
il est encore aujourd'hui l'expression la
plus utilisée par les professionnels pour
stigmatiser le premier effet d'une
campagne sur sa cible2, mais surtout
parce que l'absence d'une information
totale pour chacun des exemples
constitutifs de cette section ne permet
pas une indication plus précise à ce
jour.
De fait, même si l'objectif final
de la publicité reste de faire progresser
les ventes, nous considérerons que cet
impact représente à l'origine, la
concrétisation d'un effet sur la cible, se
rapportant à chaque fois à l'objectif
initial poursuivi. Autant que possible, il
__________________
1 - Une analyse rétrospective détaillée des principaux
auteurs à propos des techniques de mémorisation est
présentée par Jean-Michel RONSSE dans son livre
"MEDIA MARKETING", Editions DE BOECK
UNIVERSITE, Bruxelles, Belgique, (1991) chapitre 8, pp.
137-167.
2 - Voir également : "Low recall and high recognition of
advertising" Herbert E. KRUGMAN, JOURNAL OF
ADVERTISING RESEARCH Volume 26, du mois de
Février / Mars 1986, pp. 79-86.
moyens de contrôle de l'efficacité
publicitaire en fonction des objectifs.
sera indiqué ce que ce dernier
représente, même si la plupart du
temps, on peut considérer a priori, qu'il
constitue essentiellement un facteur
d'attention3, porté à la campagne par
les éléments de la population cible. Ce
n'est que dans le premier paragraphe de
la section C, que l'on pourra distinguer
certaines composantes de la perception
de la publicité par la cible, à l'exposé
notamment de différents travaux de
recherche sur le recours à un porteparole publicitaire célèbre.
On notera enfin pour conclure
cette introduction, la mise en équation
particulièrement réductrice, rapportée
par Tsin KANEHISA4 au sujet de
l'utilisation d'une célébrité par la
publicité au Japon : "Les spécialistes
ont même trouvé une formule montrant
l'effet de cette symbiose commerciale,
et permettant de mesurer précisément
le degré d'appréciation que l'on peut
attendre du public : si l'on suppose
qu'aux yeux du public la marque x a
une mauvaise cote : -2 (mal connue, ou
de moindre qualité) et la vedette une
très bonne cote : +3 (très populaire),
l'assimilation de la marque x et de la
vedette va conférer un recul de
popularité à la vedette de deux points
(-2 + 3 = +1), tandis que la marque x va
remonter sa cote jusqu'à +1 (-2 + 3 = +1)
grâce à la popularité de la vedette".
__________________
3 - Voir : John CAPLES "Tested advertising methods"
Editions PRENTICE-HALL, Inc. (1974) Quatrième
édition, Englewood Cliffs, NJ, Etats-Unis, page 205.
4 - Tching KANEHISA "La publicité au Japon" Editions
MAISONNEUVE & LAROSE, Paris (1984) p. 124.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
99
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Vous faîtes alors normalement une
économie d'argent et vous bénéficiez de
tous les attributs d'image de ce
personnage"
explique
Michel
ROGALE5. Certains auteurs6 ont mis
en évidence trois grandes écoles en
matière de création publicitaire : la
"brand image school" qui recherche
essentiellement la présentation de
l'image émotionnelle puissante du
produit, la "logical presentation
approach school"7 qui recherche une
proposition spécifique à chaque
produit, et la "visibility school" qui
confie à la publicité la tâche de capter
l'attention du consommateur par tout
moyen susceptible de parvenir à un
impact publicitaire.
Dès lors, nous considérerons a
priori que c'est essentiellement cet
impact que le publicitaire8 recherche,
lorsqu'il recoure à l'utilisation d'un
__________________
5 - Entretien privé accordé le 12 Juillet 1988.
6 - Voir notamment John R. STUTEVILLE et Marc D.
ROBERTS "Marketing in a consumer oriented society"
Editions WADSWORTH PUBLISHING, Belmont,
Californie, Etats-Unis, 1975, pp. 208-214.
7 - On cite souvent Rosser REEVES et l'U.S.P. (Unique
Selling Proposition) comme l'un des chefs de file naturels
de cette école, alors que David OGILVY fait figure de
Gourou de la "Brand image school".
8 - "Il existe une limite déterminée à ce dont le
"L'avantage de l'utilisation d'une
star c'est de faire le trou. Vous vous
servez de ce personnage comme d'une
locomotive qui va tirer votre marque,
votre produit. En général, c'est un
personnage connu, il est déjà médiatisé.
consommateur peut se souvenir, au sujet des 30.000
marques bénéficiant de publicité. Il ne peut pas se
souvenir de toutes les publicités qu'il lit, de la même
manière qu'il n'est pas en mesure de mémoriser
l'Encyclopédie BRITANNICA. [...] C'est comme si sa tête
comportait une petite boîte pour chaque type de produits
donné. Cette boîte est limitée par son incapacité à se
souvenir ou par son manque d'intérêt." Rosser REEVES
"Reality in advertising" Editions Alfred KNOPF, New
York, 1961,1990, Etats-Unis, page 39.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
100
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
porte-parole célèbre. C'est la raison
pour laquelle ce dernier peut parfois
être recherché comme facteur antizapping. Enfin, nous étudierons cet
impact dans le cas particulier de
l'utilisation des personnages de bandes
dessinées célèbres, au regard des cibles
visées et/ou atteintes.
1 - Changement de ton de la
communication
L'une des causes majeures de
l'essoufflement des résultats d'une
campagne provient de la banalité du
ton et de l'invariabilité du rythme dans
lequel elle peut tomber, si les créatifs
n'y prennent garde. Il est une maxime
bien connue des publicitaire qui dit que
: "l'indifférence tue l'impact". Or,
l'originalité suscite l'attention dés lors
que par nature elle diffère de l'habitude.
L'utilisation d'une célébrité peut alors
se révéler un excellent moyen de
réveiller la communication, en cassant
ce rythme par trop ronronnant et
exsangue d'originalité. Elle permet
généralement de contourner le
problème de la répétition et redonne à
la communication un bon taux
d'attention, un bon score d'impact.
En France, en 1984, l'agence
GRAND PUBLIC utilisa le comédien
Claude PIEPLU pour la collective du
fromage de chèvre, de manière à
réveiller la communication du produit
jusqu'à lors très conventionnelle. Il n'y
avait pas à proprement parler de lien
évident entre Claude PIEPLU et le
fromage de chèvre, mais son
introduction dans le continuum de la
communication utilisée jusqu'à lors
permit
retenir
l'attention
du
téléspectateur. L'effet de surprise était
assuré, l'impact de la campagne rétabli.
D'aucuns d'ailleurs ne recherchent que
cet impact, comme par exemple
l'association Johnny HALLYDAY / Café
LEGAL, depuis décembre 1990 et qui se
différenciait fondamentalement de la
communication précédente. "D'abord
de la notoriété. C'était une opportunité,
on n'a pas véritablement cherché une
adéquation avec le produit. Johnny est
quelqu'un qui a une image forte et il y a
une bonne mémorisation de la
campagne"9.
Une
si
bonne
mémorisation que le contrat du
chanteur fut reconduit l'année
suivante10.
Là aussi, les exemples pouvant
illustrer ce fondement de l'utilisation
d'une célébrité sont très nombreux. Au
Japon, en 1984, la marque de
cosmétiques KOWA recourut à la
célèbre chanteuse Mao DAICHI. Le cas
__________________
9 - Christian BARBIER, Directeur du Marketing LEGAL.
"Les stars font-elles vendre ?" Alain CHARRIER, L.S.A.
N°1266 du 22 Août 1991.
10 - A sa sortie, la campagne fut souvent critiquée au
regard justement de l'absence de lien naturel entre le
chanteur et le produit, et prédisant de ce fait des résultats
catastrophiques. Toujours est-il que "la campagne Johnny
de Décembre 1990 à Janvier 1991 nous a permis de gagner
1 point de part de marché en une année [...] Les
campagnes Johnny ont définitivement assis notre
notoriété. Auprès du public puisque notre taux en
spontané est passé à 80% mais aussi auprès de la
distribution. Certains accords de référencement tels que
ceux de SYSTEM U ou PARIDOC en national ont été
conclus grâce à ces campagnes. Les distributeurs se
disaient : s'il y a Johnny dans le coup c'est que c'est du
solide" commentait Yves RENAUD, Directeur Général de
LEGAL. "LEGAL-Johnny : +1% par an" Emmanuelle
FRADET-VANANTY, COMMUNICATION CB NEWS
du 7 Septembre 1992.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
101
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
est également intéressant en raison du
fait qu'il associa le vieux couple
recherche d'impact / recherche
d'identification. Lancée sur le marché
depuis une dizaine d'années, les ventes
progressaient
normalement
mais
lentement.
Pour
accélérer
leur
évolution en rajeunissant l'image de la
crème ANON, il fut décidé de rompre
avec l'axe de communication utilisé
jusqu'à présent. L'agence DENTSU,
partit à la recherche d'une star, idole
des jeunes, qui soit capable d'assurer
cette mission. Elle devait être accueillie
très naturellement par l'ensemble du
public. La chanteuse Mao DAICHI fut
choisie en fonction des critères âge,
beauté de la peau, réputation et
notoriété. Hidetada KOCHI11 nous
expliqua qu'elle parvint à rompre le ton
de la communication utilisée jusqu'à
lors et occasionna un regain d'intérêt
des jeunes consommatrices japonaises,
avides d'utiliser elles aussi "la crème de
Mao DAICHI".
campagne : "Elevé au BANANIA".
"Lorsque l'on dit : «EINSTEIN élevé au
BANANIA», c'est un coup de chapeau.
On essaye pas de faire entrer l'image
d'EINSTEIN dans le BANANIA. C'est
un clin d'oeil." nous expliqua Jacques
SEGUELA12. Dénotant complètement
avec la communication habituelle de
BANANIA sur ses valeurs nutritives
notamment, mais également avec celle
de ses concurrents, cette campagne mise en valeur par des photographies
de qualité - eut un énorme impact
comme l'attestent les résultats du
baromètre
IPSOS-STRATEGIES
présentés ci-dessous. Les résultats les
plus élevés concernèrent les visuels qui
présentaient un sosie légal d'Albert
EINSTEIN et une imitation elle aussi
légale de Don Diego de la VEGA, alias
ZORRO pour les intimes du vengeur
masqué.
En 1988, la marque BANANIA
accepta, sur les conseils de son agence
R.S.C.G., de rompre avec sa
communication
habituelle
en
organisant une campagne d'affichage
"multi-célébrités" avec l'image de
RAMSES, HERCULE, MARIANNE,
LEONARD De VINCI, LOUIS XIV,
ZORRO et Albert EINSTEIN. Chaque
affiche présentait une légende, courte
en raison du support, mais toujours
humoristique et surtout en rapport
avec le personnage. Enfin chaque visuel
était complété avec la signature de la
__________________
11 - Hidetada KOCHI : Directeur Général du bureau
d'observation DENTSU FRANCE. Entretien privé
accordé le 9 Juillet 1988.
__________________
12 - Entretien privé accordé le 31 Janvier 1989.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Scores en %
Ensemble
Hommes
Femmes
18-34 ans
Standard
(boissons chaudes)
Impact
. reconnaissance
. attribution
Agrément
. positif
. négatif
. Indifférent
78
64
81
65
74
63
78
69
46
19
77
22
1
77
21
2
76
24
-
81
19
1
54
40
6
"BANANIA: quel punch !"
Baromètre IPSOS-STRATEGIES
STRATEGIES n°609 du 23 Mai 1988
"L'objectif principal de cette
campagne n'est autre que la volonté de
réactualiser et positionner l'image de
marque de BANANIA" expliqua
Emmanuelle BREVAND1. Notons au
__________________
1 - Emmanuel BREVAND, Chef de produit BANANIA
chez CORN PRODUCTS COMPANY. Extrait d'une
interview par Véronique DAHM, STRATEGIES du 7
Mars 1987.
passage qu'en utilisant plusieurs
célébrités, toutes originales les unes par
rapport aux autres, BANANIA évitait
également la mémorisation de l'une
d'entre elles au détriment de son
produit. Par la suite, l'agence ajouta
MERLIN L'Enchanteur ainsi que
ATHOS, PORTOS et ARAMIS à sa
galerie de célébrités et déclina la
campagne en télévision.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
103
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Ce qui choque retient l'attention
par nature. Dès lors, les célébrités à
scandale sont souvent les plus
extraordinaires instruments qui soient
pour briser le rythme de la
communication, en changeant le ton
suivi jusqu'à lors. En 1985, la R.A.T.P.
demanda à Serge GAINSBOURG de
faire brûler non pas un billet de
banque, mais un ticket de métro devant
la caméra en lançant : "T'as le ticket
chic, moi j'ai le briquet choc"2. Ce fut
également le cas en 1987, aux EtatsUnis, lorsque la société NEW RETAIL
CONCEPT misa sur l'idée de son
agence KIRSCHENBAUM & BOND
d'utiliser pour sa ligne de sportswear
NO EXCUSES - «Pas d'excuse» dans sa
traduction littérale -, l'ex-mannequin
Donna RICE. Pour bien comprendre
l'intérêt de cette proposition, il faut la
replacer dans son contexte politique.
L'idée d'utiliser un mannequin célèbre
en publicité n'a rien d'extraordinaire en
soi. En revanche, le fait d'utiliser un
mannequin qui fit les semaines
précédentes la une des journaux de la
presse écrite et télévisée dans tout le
pays, avait de quoi rompre avec le ton
de la communication publicitaire
habituelle.
dernière avait été sa maîtresse !
L'agence avait alors sauté sur l'occasion
en imaginant le scénario d'un spot
publicitaire en adéquation avec le nom
de la marque et la situation ainsi
révélée. Donna RICE3, déclarait tout en
riant, alors que la caméra faisait un
travelling sur ses jeans pour finir sur
son visage : "Je ne fais pas d'excuses
(NO EXCUSES),... je les porte tout
simplement." Sure du potentiel de son
idée, l'agence avait également pensé à
solliciter Fawn HALL, l'assistante de
Lieutenant Colonel Oliver NORTH,
très impliqué dans le scandale de l'IranGate4. Mais à l'époque, l'ampleur du
scandale Gary HART les avait fait
changer d'avis. Résultat : le candidat
démocrate dû renoncer à briguer
l'investiture de son parti, alors que les
évolutions publicitaires de son exmaîtresse généraient une appréciable
augmentation des ventes de jeans NO
EXCUSES5...
__________________
3 - De surcroît, la réalisation de ce film n'était pas sans
rappeler un autre spot américain, tourné quelques mois
plutôt pour CALVIN KLEIN avec l'actrice Brooks
SHIELDS, "Sign painters get the brush-off" Lenore
SKENAZY, ADVERTISING AGE du 23 Mars 1987.
4 - En revanche, on notera la campagne anglaise pour la
Rappelons que les primaires
pour les élections présidentielles de
1988 venaient juste de commencer et
que Gary HART, candidat à
l'investiture démocrate, avait reconnu
sous la pression des journalistes et les
déclarations de Donna RICE, que cette
__________________
2 - "La mégalomanie chromatique du ticket" Béatrice
WOLFSOHN, STRATEGIES n°495 du 18 Novembre
1985.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
banque GIRO exploitée en Février 1989 et conçue par
l'agence BARTLE, BOGLE HEGARTY. Lancée la semaine
d'ouverture du procès du Colonel NORTH, elle utilisait
une photographie de l'intéressé avec l'accroche : "Avec
quelques exceptions notables, personne ne peut
transférer votre argent partout dans le monde avec plus
d'efficacité que nous". On rappelera que le Colonel
NORTH était accusé d'avoir vendu des armes à l'Iran et
d'avoir illégalement transféré les fonds de la transaction
au profit des Contras du Nicaragua. Pour le côté
publicitaire, voir "BBH lampoons Oliver NORTH in
GIRO first", Anonyme, CAMPAIGN du 3 Février 1989.
5 - "No excuses for sleazy marketing" Bob GARFIELD,
ADVERTISING AGE du 14 Septembre 1987. "Nous avons
choisi Donna parce qu'elle est un magnifique mannequin
104
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
A quelque niveau que ce soit,
lorsqu'il est associé à la célébrité,
l'humour peut lui-aussi se révéler un
excellent atout complémentaire en
faveur de l'impact. En 1966, pour
rompre
avec
la
traditionnelle
présentation technique des avantages
de sa méthode d'apprentissage des
langues étrangères, ASSIMIL confia au
comédien Pierre DORIS, le soin de
réveiller sa communication en presse
magazine. Pas question ici de faire
appel à un linguiste distingué qui, bien
qu'en parfaite adéquation, aurait vite
fait de retomber dans le traditionnel
discours technique des avantages /
inconvénients. Et Pierre DORIS de
personnifier
divers
adjectifs
caractérisant le comportement possible
du consommateur face au produit.
Tantôt "surmené", tantôt "sceptique",
tantôt "paresseux", le comédien rendait
la communication plus proche du
consommateur et l'annonceur put
mesurer avec intérêt ce changement de
ton de la communication.
Cette solution est très souvent
adoptée, parce que si la star est
génératrice d'impact, l'humour l'est
et qu'elle génère énormément d'intérêt de la part des
media" déclaraient les responsables de NEW RETAILS
CONCEPT, la société de marketing responsable de la
campagne, in "People" Guy D. GARCIA, David E.
THIGPEN, TIME du 24 Août 1987. Certains
professionnels émettent cependant des réserves quant à
l'utilisation de ces "adverse exposure", ces personnages
dont la célébrité est issue d'un scandale. Ainsi, le célèbre
agent américain Marty INGELS confiait-il au magazine
de l'AMERICAN MARKETING ASSOCIATION,
MARKETING NEWS, que "cette exploitation était
condamnable [...] les implications sont évidentes ; et pour
moi, symptomatiques d'une profonde et inquiétante
lacune dans le cadre de la morale américaine" "Sleazy grab
for bucks" MARKETING NEWS du 20 Novembre 1987.
généralement lui-aussi. D'où l'intérêt
synergique d'associer les deux lorsque
c'est possible. Ainsi en 1971, la marque
de pâtée pour chien, CANIGOU, fit
appel à Philippe CASTELLI, désopilant
dans sa tentative de démontrer que son
compagnon était exceptionnel. Le
comédien essayait de convaincre son
chien - un basset - de sauter par dessus
un journal porté à sa hauteur. Mais le
chien, qui n'était pas nourri avec
CANIGOU,
refusait
alors
catégoriquement... Quelques mois plus
tard, dans la même optique, Philippe
CASTELLI fut sollicité par les
magasins de la SAMARITAINE. Il
parvenait
alors
à
démontrer
physiquement et matériellement que
l'on ne trouve tout qu'à la
SAMARITAINE.
Dernière approche : lorsque le
produit est si typé, si catalogué par le
public, que ce dernier connaît ou plus
exactement croit connaître à l'avance
l'axe de sa communication publicitaire
et ne s'y intéresse plus. C'est
notamment le cas des titres de la presse
dite de charme. En raison du
positionnement et du contenu des
magazines qui la composent, la
communication tourne généralement
autour de la présentation de très belles
femmes, plus ou moins dévêtues et
posant dans des positions dont la
suggestivité est légalement contrôlée.
Le sexe est encore très souvent un
facteur d'impact.
A la fin de l'année 1987, la
version
française
du
magazine
PLAYBOY demanda à son agence
CALLEGARI BERVILLE, de lui
préparer une campagne d'affichage
susceptible de rompre avec cette idée
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
105
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
préconçue, et capable d'attirer
l'attention
d'un
lectorat
plus
important, par un moyen original. C'est
ainsi que l'on vit s'afficher sur les murs
de France, trois célébrités, qui par leurs
fonctions ou leurs activités ne
correspondaient pas aux mannequins
utilisés d'ordinaire par le magazine. En
effet, photographiés par Bettina
RHEIMS, Charles HERNU (ancien
Ministre de la Défense), Karl
LAGERFELD (couturier) et Maurice
PIALAT (metteur en scène) avaient
tous les trois accepté de poser allongés,
pour un poster triple pages, décliné en
affichage. Ces visuels avaient pour
accroche : "Dans PLAYBOY, les
hommes exposent leurs personnalités"
et étaient sous-titrés : "Tout ce qui
touche les hommes est dans
PLAYBOY". Le magazine souhaitait
alors démontrer que les portraits
peuvent être intellectuels, sans pour
autant perdre de leur intérêt6.
Rappelons qu'en 1975, lors d'une
campagne presse magazine, PLAYBOY
avait déjà eu recours à cette approche
humoristique, en utilisant une photo de
Woody ALLEN.
mais surtout brisait lui-aussi le ton de
la communication utilisé jusqu'à lors.
Une star (masculine) était ici utilisée
parmi de nombreuses autres stars
(féminines), et de surcroît pour une
lessive... Ce fut également le cas
lorsqu'en 1987, Darry COWL apparut
parallèlement à Alice SAPRITCH dans
la campagne JEX FOUR8. "Il faut savoir
finir une campagne pour la prolonger",
nous expliqua Olivier BENSIMON9, "il
est toujours embarrassant qu'une
marque soit soutenue par une seule
vedette. On ne sait jamais ce qui peut
arriver avec tous les problèmes de
droits, ça peut changer, elle peut elleaussi changer d'avis. Donc l'idée était
de trouver un spot où la vedette change
et j'ai écris un spot avec Darry COWL
pour s'orienter vers un nouveau jeu. Les
scores que l'on obtient montrent que le
film fut bien reçu, qu'il communiquait
bien, qu'il tenait la rampe et qu'il tenait
le choc par rapport à Alice SAPRITCH.
La vedette pèse moins que le produit,
donc ça a joué un rôle d'équilibre qui
est très important."
Enfin, notons qu'une célébrité
peut elle-même venir rompre le ton de
la communication d'une autre célébrité.
Certes, l'utilisation de Jacques
DUTRONC7 dans la campagne
WOOLITE constituait un clin d'oeil
__________________
6 - "Les non-lecteurs ont une fausse image du magazine"
expliqua Pierre BERVILLE, Directeur associé de l'agence.
"Le playmec de la semaine" Véronique DAHM,
STRATEGIES N°588 du 21 Décembre 1987.
7 - "Le premier homme WOOLITE est arrivé" Patrick
FIOLE, LE MATIN du 8 Novembre 1984
__________________
8 - "Jexclusif : deux vedettes font la bombe" Olivier
LAMOUR, STRATEGIES n°572 du 7 Septembre 1987.
9 - Olivier BENSIMON : Président de l'agence de
communication SYNERGIE POLARIS / B.J.K.E. Paris.
Entretien privé accordé le 25 Mars 1988.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
le spot n'a d'intérêt que si il bégaye. Au
départ, il ne voulait pas et je l'ai obligé à
bégayer, ce qui est une épreuve de force
terrible." Ce bégaiement forcé permit à
l'acteur de prononcer le nom de la
marque JEX un nombre incalculable de
fois.
Pour
l'anecdote,
Olivier
BENSIMON - qui ressemble par
ailleurs physiquement énormément à
Darry COWL10 - raconte que lorsqu'ils
sont arrivés à Madrid pour le tournage,
"Darry COWL n'avait pas ses lunettes,
et il me dit que ce n'était pas grave,
qu'il n'en avait pas besoin pour voir.
Alors je lui ai répondu : «Mais Darry tu
n'es pas Darry COWL, si tu n'as pas tes
lunettes !» et ça a pris toute la matinée
pour trouver des lunettes qui n'étaient
pas les siennes, mais qui étaient
quasiment les siennes, pour qu'il puisse
jouer du Darry COWL. Autre gag, il ne
bégaye pas dans la vie, il parle tout à
fait normalement, je bégaye plus que lui
! Mais je voulais qu'il bégaye, parce que
__________________
10 - "Très souvent la personnalité d'un présentateur
provient de roles cinématographiques ou télévisuels
(homme dur, bon garçon, fin connaisseur, expert
culinaire, etc.) et c'est un reflet de ce personnage que le
présentateur apporte dans le film publicitaire" Keith V.
MONK
INTERNATIONAL
ADVERTISING
ASSOCIATION Report - "Guidelines : use of celebrities
in advertisements", New York, Etats-Unis, Décembre
1985.
Cette
anecdote
illustre
parfaitement un point très important
lors de l'utilisation d'un porte-parole
célèbre par la publicité. Elle démontre
si besoin était qu'une célébrité n'est pas
seulement un visage, une voix, un
nom,... C'est un ensemble de
caractéristiques
qui
doivent
impérativement être réunies pour
permettre son identification par le
public. Véritable paradigme de la
Gestalttheorie, la star doit être
considérée non pas pour l'une de ses
caractéristiques, mais comme un
ensemble
de
caractéristiques
indissociables. Darry COWL ne
bégayant pas et sans ses lunettes si
typiques, n'était plus Darry COWL. Le
publicitaire encourait alors le risque
d'une interrogation de la part du
public, pour savoir ce qui n'était pas
conforme à l'image qu'il possédait de la
star.
JEX FOUR est un cas très
intéressant car, il comporte deux
exemples de stars utilisées pour deux
objectifs légèrement différents. Comme
nous l'avons vu, l'utilisation de Darry
COWL illustrait parfaitement la
volonté de changer de ton, tout en
perpétuant la stratégie d'utilisation
d'une célébrité. Alors que l'utilisation
initiale de la comédienne Alice
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
SAPRITCH11 répondait quant à elle à
un pur objectif d'impact.
En 1952 aux Etats-Unis, le
Commissaire à l'Eau de Toledo observa
un phénomène étrange lorsque le
célèbre show télévisé I love Lucy avec
Lucille BALL et Desi ARNAZ fut
diffusé sur l'unique chaîne de télévision
de la ville. Il remarqua qu'à chaque
écran publicitaire, il se produisait une
baisse de pression extraordinaire de
l'eau, pouvant être expliquée par le
fonctionnement simultané de très
nombreuses chasses d'eau12. On en
déduit une attention moindre des
téléspectateurs
pendant
les
interruptions publicitiaires.
2 - Un facteur anti-zapping
Concernant l'utilisation d'Alice
SAPRITCH, Olivier BENSIMON13
raconte ce choix d'une star pas comme
les autres. "Voilà un produit14 qui
déplaît souverainement aux ménagères,
aux femmes en général. Le four est une
corvée épouvantable. Pendant deux ans
on a fait un film qui était très
proctérien, la mousse qui colle, la
mousse qui colle pas, la saleté qui s'en
__________________
11 - Voir également "Le retour de JEX et d'Alice" MEDIAS
n°85 du 8 Octobre 1984.
12 - Voir notamment : "Zapping nonsense : should
television media planners lose sleep over it ?" Prema
NAKRA,
INTERNATIONAL
JOURNAL
OF
ADVERTISING du mois d'Octobre 1991, pp. 217-222,
ainsi que "Using high tech tools to measure audience" et
"Zapping of TV ads appears pervasive" deux articles de D.
KNEALY, THE WALL STREET JOURNAL du 25 Avril
1988.
__________________
13 - Entretien privé accordé le 25 Mars 1988.
14 - La célébrité peut ici jouer un rôle intéressant pour
doter la marque d'un caractère discriminant. En effet, les
détergents sont des produits souvent considérés comme
génériques. En général, les consommateurs sont
persuadés qu'il y a peu de différence quant à la qualité,
d'une marque à l'autre. Voir notamment "Generics : their
impact on national and private brands" John J.
WHEATLEY, John S. Y. CHIU et Douglas ALLEN,
ADVANCES IN CONSUMER RESEARCH, Volume 9,
Ed: ACR 1982, pp. 195-200.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
va, la saleté qui s'en va pas. Zéro !
Résultat, quasiment zéro ! J'ai pensé à
Alice SAPRITCH et en ai parlé au
client qui a dit pourquoi pas. C'était un
peu un joker. On allait faire de l'antivedette, de l'anti-héroïne. A la limite je
dirais qu'elle a une tête à mettre dans le
four, sans méchanceté, faut pas le dire
mais c'est un peu vrai, elle a un
physique un peu ingrat. Mais elle avait
un charisme, et je parlerais plutôt de ça.
Je dois dire pour être sincère, que j'ai
beaucoup
hésité
entre
Alice
SAPRITCH et Jacqueline MAILLANT.
J'ai beaucoup hésité, et très
franchement, j'ai pensé au début que
Jacqueline MAILLANT serait mieux.
Mais en parlant avec le client, le client
m'a dit que peut-être Alice SAPRITCH,
etc. Bon ! On a pris le risque et je lui ai
écrit un spot où : «Avant j'étais moche,
ma vie était un enfer,...». Ce spot a eu
un impact formidable. On avait 17 à 18
% de parts de marché, on est passé
grâce à elle, grâce à ce spot, à pas loin
de 50 %. On a pris en trois ans, une part
de marché considérable, grâce à Alice
SAPRITCH puis à Darry COWL qui
renouvela le genre."
Progression de la Pdm de JEX Four
1981
1982
1984
1985
1986
Part de marché en %
26%
33%
37%
46%
49%
Source : L.S.A. n°1266 du 22 Août 1991
Le produit et son mode de
distribution n'ayant pas été modifiés, il
est indéniable que par son talent, la
comédienne a, dès 1982, contribué au
succès de cette communication et par
là-même à l'augmentation de la part de
marché. Or, il s'agit d'un détergent.
Pourquoi et comment penser utiliser
une star du cinéma pour ce type de
produit. Quelle était la crédibilité du
porte-parole ? Mais là réside l'un des
principaux atouts d'une célébrité. On
se retourne sur son visage, on est
attentif à ses évolutions sur le petit
écran, on écoute son message1. Pour
__________________
1 - "Il existe plusieurs raisons pour lesquelles un porte-
parole célèbre peut être influent : ils attirent l'attention
sur les publicités dans le flot encombré des messages, ils
sont perçus comme plus divertissants et ressentis comme
dignes de confiance en raison de l'absence d'intérêt
personnel. Le dernier élément tient de l'idée réçue que les
grandes stars ne travaillent pas simplement pour la
quelle raison ? Simplement parce
qu'elle est célèbre, et que cette célébrité
lui confère de l'impact. Le public la
connaissait avant qu'elle n'apparaisse
dans le film publicitaire, mais il regarde
ses nouvelles évolutions, intrigué,
amusé, intéressé.
En 1990, l'agence britannique
HOWELL HENRY CHALDECOTT
LURY eut à concevoir une campagne
pour son client MIDLAND BANK, qui
lançait FIRSTDIRECT, une banque
sans guichets. "C'est la première pub
rémunération de leur témoignage, mais sont motivées par
une sympathie réelle pour le produit. L'expérimentation
réalisée par les auteurs vérifie alors le modèle de
HOVLAND (voir note de bas de page infra, page 195).
"An experiment revealved the effectiveness of celebrity
endorsers" Charles ATKIN et Martin BLOCK, JOURNAL
OF ADVERTISING RESEARCH Volume 23, N°1, Février
/ Mars 1983 pp. 57-61.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
qui reconnaît la réalité du zapping"
déclara à la presse, Steve HENRY2, l'un
des créatifs de l'agence. Quelques
semaines après le film du lancement,
simulant une invasion hertzienne, les
téléspectateurs
virent
apparaître
l'actrice Charlotte RAMPLING qui leur
conseillait de rester sur ITV pour
connaître
les
avantages
de
FIRSTDIRECT ou contraire de passer
sur CHANNEL 4. Une surimpression
venait compléter ce message avec les
mentions : ITV / optimiste d'une part et
CHANNEL 4 / pessimiste d'autre part.
chaîne, notamment pendant les pages
publicitaires qui interrompent le
programme qu'il regardait initialement.
La propagation des zappeurs est
principalement favorisée par le nombre
croissant de chaînes. Ce comportement
s'est considérablement développé
depuis la quasi généralisation des
télécommandes à distance4 qui
permettent au téléspectateur (zappeur)
de changer de chaîne sans même avoir
besoin de se déplacer5. En France, le
Véritablement
apparu
/
considéré au début des années 1980 aux
Etats-Unis3, le channel switching ou
zapping, de l'anglais "to zap" (se déplacer
rapidement), est en publicité, le fait
pour un téléspectateur de changer de
4 - Une étude intitulée "le loisir des Français" menée en
__________________
5 - Le zappeur ne doit cependant pas être confondu avec le
2 - "G-B : HOWELL HENRY CHALDECOTT LURY,
l'agence
de
l'anti-pub"
Isabelle
MUSNIK
COMMUNICATION CB NEWS N°173 du 18 Juin 1990.
3 - Déjà dans en 1983, Bill ABRAMS pointait ce
phénomène du doigt, expliquant que les annonceurs
seraient rapidement contraints d'en tenir compte.
"Marketing : zappers switch off TV ads and scare some
media buyers" Bill ABRAMS, THE WALL STREET
JOURNAL du 6 Octobre 1983. Dans "Profiling the
zappers", JOURNAL OF MARKETING RESEARCH
n°25, Avril/Mai 1985 pp.15-19, Carrie HEETER Coordinatrice du laboratoire de technologie de la
communication de l'Université d'Etat du Michigan - et
Bradley
S.
GREENBERG
Professeur
de
télécommunications dans la même Université, mettaient
en évidence que les hommes zappaient plus que les
femmes, les jeunes adultent plus que les anciens, les
enfants plus que leurs parents. Mais surtout, l'étude
démontrait que parmi les motivations au zapping, la
première était conduite par la curiosité pour savoir ce
qu'il y avait sur les autres programmes, immédiatement
suivie par la volonté d'éviter les publicités. Voir
également : "Advertising, principles and practice"
William WELLS, John BURNETT et Sandra
MORIARTY, op. cit. page 238.
__________________
1988 par l'INSEE, indiquait que 60 % des personnes
interrogées reconnaissaient avoir modifié leur
comportement depuis l'utilisation d'une télécommande.
On estime que la possession d'une télécommande double
la potentialité du facteur zapping. Voir également Carrie
HEETER et Bradley S. GREENBERG, op. cit. p.18.
zippeur dont le comportement est plus sophistiqué d'un
point de vue technique. Le zippeur sélectionne le
programme qu'il souhaite regarder et l'enregistre sur
bande vidéo. Lors de la projection de son programme, il
utilise les fonctions d'avancée rapide de son
magnétoscope pour dépasser les pages publicitaires. Si le
zappeur contourne l'exposition publicitaire, le zippeur
réduit de surcroît le facteur temporel, de l'interruption de
son programme. Le spécialiste identifiera également le
flipping qui consiste à changer de chaîne avec pour simple
motivation le plaisir du changement de chaîne ; le
switching ou changement de chaîne décidé (parfois
prémédité) dans le but de regarder un programme précis ;
le grazing - du verbe "to graze" en anglais, qui signifie
paître / brouter - qui consiste à passer d'une chaîne à
l'autre de manière à regarder plusieurs programmes
simultanément. Voir également : "Zipping, Zapping and
nipping" Philip J. KITCHEN, INTERNATIONAL
JOURNAL OF ADVERTISING du mois de Mai 1986 pp.
217-222, "Mass communication : an introductory survey"
James D. HARLESS, seconde édition, Editions Wm. C.
BROWN PUBLISHERS (1990), Dubuque, IA, Etats-Unis,
page 323, et "Discrimination Vs. avoidance : "zipping" of
television commercials" John J. CRONIN et Nancy E.
MENELLY, JOURNAL OF ADVERTISING Volume 21,
n°2 du mois de Juin 1992, page 6, qui expliquent qu'il
n'existe pas de moyens de lutte réellement efficaces si ce
n'est peut être pour le premier film de l'écran.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
110
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
phénomène
est
plus
récent6.
Cependant, de 1983 à 1989, le nombre
de séquences d'écoute quotidienne a
doublé7. Une typologie développée
conjointement par le C.N.R.S. (Centre
National de Recherche Scientifique) et
l'I.N.A.
(Institut
National
de
l'Audiovisuel) permet la construction
d'un mapping à deux axes où sont
présentées 5 familles de zappeurs :
+ Les zappeurs fous : 20 %
Utilisation quasi systématique de la
télécommande pendant le carrefour de
20h30, cumul d'un grand nombre de
séquences courtes (de 1 à 6 minutes).
On retrouve ces individus dans les
couches sociales élevées de la
population,
bénéficiant
d'un
équipement
audiovisuel
qualitativement et quantitativement
important.
+ Les infidèles : 20 %
__________________
6 - Voir notamment : "Le zapping n'a pas «encore» saisi la
France" Eric de BRANCHE, STRATEGIES n°522 du 23
Juin 1986 et "Qu'est-ce qu'ils font pendant la pub ?"
Dossier spécial zapping, Estelle LEROY et Marc
PELLERIN, COMMUNICATION & BUSINESS n°83 du
13 Juin 1988.
7 - Etude CNET-CNRS réalisée sur un panel constant
MEDIAMETRIE en Juin 1989 (base de 1.913 ménages). En
7 ans le nombre de séquence par jour est passé de 11 à 23.
Or, si l'on ne constate pas de grande différence entre les
différents jours de la semaine, en revanche, l'intensité du
zapping est variable selon l'heure de la journée. Ainsi, la
période access prime-time est beaucoup plus propices
aux séquences courtes (moins de 10 secondes) que
pendant le prime-time. Cela confirme en partie une étude
menée par Barry M. KAPLAN, Vice-Président, Directeur
des Media à l'agence TED BATES de New York en 1985 et
reproduite dans JOURNAL OF ADVERTISING
RESEARCH n°25, Avril/Mai 1985, pp.9-12.
Intensité de fractionnement de l'écoute
moindre que les zappeurs fous. Le
zapping joue ici une fonction sélective.
On retrouve ces individus dans les
catégories
socioprofessionnelles
intermédiaires de la population. Ils sont
généralement jeunes, fortement équipés
et regardent peu la télévision.
+ Les modérés : 20 %
Positionnés légèrement au dessus de la
moyenne quant au fractionnement de
l'écoute. On les retrouve également
dans
les
catégories
socioprofessionnelles intermédiaires de
la population et ils se distinguent par le
jeune âge du chef de famille.
+ Les nonchalants : 17 %
Très au dessous de la moyenne sur le
plan des indicateurs de fractionnement
de l'écoute. Ils regardent la télévision
un peu plus que la moyenne des
Français.
+ Les contemplatifs : 23 %
L'exemple type du foyer téléphage,
inactif et relativement âgé pour la
plupart. Ils regardent au moins 30
minutes de programme avant de
changer de chaîne, puis conservent ce
nouveau choix.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
111
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
En constante progression, le
nombre de zappeurs préoccupe les
annonceurs du monde entier. Chez
NIELSEN, le zapping a implicitement
causé la création d'une nouvelle chaîne
par les appareils de mesure d'audience.
Ainsi, lorsque le téléspectateur change
de chaîne plus de trois fois dans un laps
de temps de 30 secondes, l'appareil
affecte ce temps à la "pseudo-chaîne"
recherche1. Aux Etats-Unis, où en 1988
la société d'Etudes PERCY évaluait à
plus de 60% le nombre de
téléspectateurs reconnus non attentifs
à la publicité, de nombreuses idées
virent le jour pour tenter de pallier ce
__________________
problème d'audience. Parmi les plus
originales on note celle qui consistait à
faire précéder la page de publicité par
un écran noir de quelques secondes. De
retour sur sa chaîne initiale, le
téléspectateur zappeur était alors piégé
par la page de publicité qui débutait.
Cette solution fit l'objet de longues
études, car elle permettait par ailleurs
de récupérer des téléspectateurs qui
avaient déserté physiquement le petit
écran le temps de l'interruption
publicitaire,
pour
des
raisons
alimentaires ou plus strictement
personnelles.
Une seconde idée fut de
coordonner les plages publicitaires en
même temps sur les différentes
1 - "SOFRES-NIELSEN : Le zapping c'est nul !" Pierre
MESNIER, STRATEGIES N° 684 du 22 Janvier 1990.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
112
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
chaînes2.
Ainsi,
même
si
le
téléspectateur zappait, il se trouvait
piégé par d'autres spots publicitaires sur
les autres chaînes. En définitive, de par
leur mise en application complexe ou
leur important coût relatif, aucune de
ces solutions ne fut réellement et
officiellement retenue, et les grandes
sociétés d'étude de l'audience se
concentrent aujourd'hui sur la mesure
de plus en plus précise du nombre de
zappeurs, de leurs caractéristiques,
ainsi que sur les raisons de leur
comportement. De nombreux progrès
techniques
permettent
ainsi
d'enregistrer très précisément les zap et
les zip et mèneront peut-être un jour, à
l'obtention d'une solution miracle3.
Solution d'autant plus attendue
qu'aujourd'hui, seule la nouvelle
génération
d'appareils
de
reconnaissance passive - du type
MOTIVAC - permettent "réellement"
de savoir si les panelistes sont toujours
devant leur poste4 !
__________________
2 - Cette solution est non-officiellement parfois pratiquée
en France.
3 - Franck McDONALD, Directeur des media et des
services marketing de la sociétée CUNNINGHAM &
WALSH de New York analysait déjà en 1986, le problème
de la durée de certaines coupures publicitaires pendant
les films. Dépassant les 5 minutes, elles favorisent
naturellement la lassitude du téléspectateur. De surcroît,
l'allongement de ces pages de publicité a permis au
téléspectateur de prendre l'habitude de faire autre chose y compris rechercher un meilleur programme -, dès lors
qu'il sait désormais pouvoir compter sur un laps de
temps suffisant. "Zapping the clutter", Franck
McDONALD, ADVERTISING AGE du 29 Septembre
1986. Voir également "Zapping of TV ads appears
pervasive" THE WALL STREET JOURNAL du 25 Avril
1988.
4 - Déjà en 1985, Barry KAPLAN (op. cit p.12) préconisait
un raccourcissement des écrans publicitaires pour éviter
le contournement de la publicité par le téléspectateur. Le
Pour
conclure,
on
peut
s'interroger
sur
l'évolution
du
phénomène zapping en parallèle de la
généralisation future du procédé PiP5.
Les comportements seront-ils les
mêmes ? Comment les sociétés de
mesure d'audience comptabiliserontelles alors les téléspectateurs ?
Pendant ce temps, certains
publicitaires
émirent
l'hypothèse
qu'une célébrité, par l'impact qu'elle
crée, pouvait être l'une des solutions au
zapping et à l'attention6 dès lors que le
film concerné était le premier film de
l'écran, ou tout au moins parmi les
premiers. Cet impact ayant lieu dès les
premières secondes du spot, la star
peut alors jouer le rôle de facteur captif
anti-zapping. "Une personnalité est
toujours un critère d'attention"
confirme Bernard BROCHAND7. En
revanche, il est bien évident que si la
réalisation n'est pas à la hauteur des
attentes du public, le sursis antizapping n'est que de quelques
secondes. Alors, sans que la célébrité
ait le temps de délivrer son message et
programme reprenant plus rapidement, il est alors moins
tenté de passer sur d'autres chaînes, voire de quitter
physiquement son écran.
5 - Procédé Picture in Picture, permettant d'insérer un ou
plusieurs écrans de plus petite taille sur l'écran prinicpal
de manière à suivre simultanément plusieurs chaînes à la
fois.
6 - Voir également : "VCR users do without ads : study"
ADVERTISING AGE du 31 Octobre 1983 ; "In search of
zap-proof commercials" Felix KESSLER, FORTUNE
INTERNATIONAL du 21 Janvier 1985 ; "Advertisers need
quick fix for zipping, zapping" Ronald B. KAATZ,
MARKETING NEWS du 9 Mai 1986, "America zaps !"
collectif, TV GUIDE du 15-21 Août 1992.
7 - Entretien privé accordé le 11 Mai 1988.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
113
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
notamment le nom de l'annonceur, le
téléspectateur porte déjà son attention
sur d'autres programmes. Ce qui fait
dire à Jean-François VARIOT8 "qu'il n'y
a pas d'effet magique chez les stars" et
qu'elles ne peuvent par conséquent
constituer un élément anti-zapping,
rejoignant
ainsi
Hubert
De
9
MONTMARIN qui pense que "le seul
critère anti-zapping, ce n'est pas une
star, mais le plaisir et l'intérêt qu'ont
les gens à voir une campagne".
Michel ROGALE10 nuance en
expliquant que selon lui "la star est
immédiatement repérable. Si elle est
sympathique au consommateur, il va la
garder avec lui pendant les 30 secondes
ou les 45 secondes. Si au contraire il l'a
repérée et qu'il ne supporte pas cette
star, il va zapper. C'est clair. On a tous
ce genre de réflexes."
Mais les professionnels sont en
définitive très partagés sur ce sujet.
"Bien sûr puisqu'elle est génératrice
d'impact. C'est l'impact qui tue le
zapping. Je pense d'ailleurs que l'on est
encore au début de l'utilisation des
stars dans la publicité, et que l'on sera
de plus en plus obligé d'utiliser tous les
moyens d'intérêt possible dans nos
petites trente secondes" explique
Jacques SEGUELA11. "Lorsque vous
__________________
8 - Jean-François VARIOT, P.D.G. de l'agence de
publicité EQUATEUR. Entretien privé accordé le 24 Mai
1988.
9 - Hubert de MONTMARIN, Directeur Général de
l'agence de publicité JEAN & MONTMARIN. Entretien
privé accordé le 6 Juin 1998.
10 - Entretien privé accordé le 12 Juillet 1988.
11 - Entretien privé accordé le 31 Janvier 1989.
utilisez une personnalité, vous captez
sa personnalité et essayez de la faire
rebondir sur votre produit. La difficulté
est que le produit reste vainqueur"
considère Annie POUSSIELGUES12. "Il
est vrai que si un personnage dispose
de qualités personnelles par son talent
ou son aspect physique, ce qui est
encore le mieux, qu'il donne envie
d'oublier qu'il parle de publicité, pour
ne plus se complaire que dans
l'utilisation du personnage, c'est vrai
que c'est l'arme absolue précise
Richard DEROURE13, mais avec tout
de même le risque que le personnage
fasse oublier le produit."
En 1987, l'agence DOLCI DIRE
fut l'artisan d'un film publicitaire
réalisé par le metteur en scène Vincent
de BRUSS pour l'exposition CITECINE à la Cité de Sciences de LA
VILLETTE. Le concept original était de
montrer un montage image par image
du contenu de l'exposition. Or, il était
très difficile de faire un montage
intéressant
et
surtout
capteur
d'attention sur quelque chose qui
n'existait pas encore. L'agence eut alors
l'idée originale de mettre en scène
Gérard JUGNOT14. Le gros plan
immédiat sur l'acteur munit de lunettes
noires, accessoire essentiel d'une star,
__________________
12 - Annie POUSSIELGUES, Vice-Présidente de l'agence
de publicité C.F.P.. Entretien privé accordé le 30 Mai
1988.
13
- Richard DEROURE, P.D.G. du groupe de
communication DOLCI DIRE. Entretien privé accordé le
17 Mai 1988.
14
- "DOLCI DIRE martyrise Gérard JUGNOT"
Véronique DHAM, STRATEGIES N°583 du 23
Novembre 1987.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
114
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
était alors le facteur anti-zapping, et le
scénario du film suffisait ensuite à
conserver l'attention du téléspectateur.
Richard DEROURE raconte : "Nous
avions choisi Gérard JUGNOT parce
que c'est un comédien fantastique, et
que c'est un comédien qui est aussi bon
quand il parle que quand il ne parle pas.
C'est aussi un mime. Or, nous voulions
le mettre en scène avec Henri
CHAPIER qui lui au contraire est très
bavard." Pendant cette interview de
Gérard JUGNOT, Henri CHAPIER est
en définitive le seul à parler ! Et
Richard DEROURE de conclure : "Un
coût de production et d'espace très
limité est toujours pour les créatifs une
incitation à trouver quelque chose de
très provocant."
L'utilisation d'une célébrité
comme facteur anti-zapping peut
également naître pour des raisons de
fortes concurrences conjoncturelles.
Certains
produits
ont
une
consommation
relativement
saisonnière. En France, les glaces par
exemple, voient leur consommation se
concentrer essentiellement pendant
l'été et par tradition, lors des fêtes de
fin d'année. Cela occasionne sur les
écrans profusion au même moment, de
spots des différentes marques. En 1988,
l'agence ALS CONSEIL eut l'idée de
recourir à la chanteuse LIO pour la
communication de son client, les glaces
PILPA15. Même si elle avait été choisie
par l'agence parce que "féminine,
savoureuse et impertinente, elle
__________________
15 - En 1991, pour se rapprocher un peu plus de ses plus
jeunes consommateurs et capter leur attention, PILPA
utilisa les personnages des dessins animés de la
WARNER tels que Daffy DUCK et Bugs BUNNY.
correspondait à la personnalité de la
marque" (sic), la chanteuse n'avait, a
priori, pas de véritables rapports avec
les glaces. Or, son utilisation originale
par rapport aux films concurrents
parvenait parfaitement à capter puis
conserver l'attention du téléspectateur
peu habitué à voir une star jouer au
billard avec des boules de glace. Pour
retenir immédiatement l'attention,
l'agence eut même l'idée d'adapter la
chanson en vogue de la star "Je casse
tout ce que je touche" en "Je glace tout
ce que je touche". La musique alors
connue, jouait elle aussi le rôle d'un
appréciable élément anti-zapping.
En 1988, lorsque pour son
annonceur, les salades 5ème SAISON,
l'agence H.D.M. Lyon utilisa le
concours de Monsieur Météo Alain
GILLOT PETRE, c'était avant tout
parce que le produit, peu connu des
consommateurs, avait besoin d'un
impact immédiat que la célébrité était
éventuellement en mesure de lui
fournir. Là aussi, hormis un éventuel
lien indirect entre la météorologie et les
salades, rappelons que la page météo
d'un journal télévisé obtient toujours
l'un des plus forts taux d'attention. Dès
lors l'utilisation d'Alain GILLOT
PETRE dans les écrans publicitaires du
prime time semblait judicieuse.
Les Américains ne s'y sont
d'ailleurs pas trompés puisque Willard
SCOTT, célèbre Monsieur Météo de
l'autre côté de l'Atlantique, est lui aussi
sollicité par de très nombreux
annonceurs tels que la banque FIRST
AMERICAN, les hôtels HOWARD
JOHNSON, la boisson COCA-COLA,
les
peintures
TRU-TEST
WEATHERALL, le café MAXWELL
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
115
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
HOUSE, l'organisation NURSERY
MARKETING COUNCIL, les magasins
COTTER & COMPAGNY ou encore la
collective de Agrumes de FLORIDE qui
vit en lui un formidable porte-parole
pour ses oranges, pamplemousses et
citrons à travers le pays.
En 1987, la COMPAGNIE
FINANCIERE DE SUEZ fut privatisée.
"On arrivait dans le domaine des
privatisations après SAINT-GOBAIN
et surtout PARIBAS qui avait eu en
plus une campagne assez spectaculaire.
Les premières privatisations avaient
intéressé les Français parce que c'était
les premières." explique Jean-Claude
BOULET16, de l'agence B.D.D.P. qui
réalisa la campagne pour SUEZ. L'idée
fut alors de bâtir une campagne sur le
thème "les stratèges de l'argent"17 en
exposant les multiples capacités de
SUEZ. Mais il fallait également avoir de
l'impact. Un impact susceptible de
générer rapidement de multiples
actionnaires. Précisons que le contexte
boursier était déjà assez morose et que
la privatisation avait lieu au retour des
vacances d'été. Autant d'éléments qui
devaient être compensés par un
élément exogène, capable d'introduire à
la fois impact et séduction. Le choix de
l'agence se porta alors sur le choix
d'une célébrité : la première star
française, ambassadrice du charme et
de l'élégance, Catherine DENEUVE.
__________________
Dans un premier film18 lancé le
14 Septembre, d'une voix off, douce et
posée elle racontait SUEZ pour
n'apparaître que pendant les 7
dernières secondes. Elle s'adressait
alors directement aux téléspectateurs
pour conclure avec un conseil
d'ouverture : "Réfléchissez !". La rareté
des prestations publicitaires françaises
de la star ajoutait également à son
impact. Une fois le concept installé, un
autre film la montra plus longuement,
par la suite. Les stars sont liées à
l'argent ; une star comme Catherine
DENEUVE exposant la manière de
l'investir
attira
inévitablement
l'attention du téléspectateur. Or,
survint l'inattendu : le krach boursier
international. Le spot ainsi que la
prestation de Catherine DENEUVE
furent amplement critiqués par
certains journalistes assimilant la
plupart du temps contexte boursier
international
et
communication
publicitaire hexagonale. On ne
retiendra ici que deux éléments. En
premier lieu, la campagne fut primée
par les professionnels19 et ce à diverses
reprises, ce qui est assez rare en France
pour une campagne recourant à
l'utilisation d'une personnalité20. En
__________________
18 - Catherine DENEUVE servait de lien à 4 films qui
furent réalisés par Jean-Pierre ROUX, Pat MORGAN,
Lester BOOKBINDER et David BAILEY. A noter que les
4 films furent tournés en un temps record puisque la
production ne s'est étalée que de la mi-Juillet au 1er
Septembre.
19 - B.D.D.P. reçut pour la campagne SUEZ, le prix
16 - BOULET Jean-Claude : Manager co-fondateur du
Société de Service du Grand Prix Stratégies 1988.
groupe de communication B.D.D.P. Paris. Entretien privé
accordé le 18 Mai 1988.
20 - Cinq ans plus tard, YVES SAINT-LAURENT
17
- "SUEZ : la parole est d'argent" Anonyme,
STRATEGIES N°573 du 20 Septembre 1987.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
confiera au réalisateur Jean-Baptiste MONDINO, le soin
de mettre en scène Catherine DENEUVE pour la ligne de
cosmétiques de la marque et encore une fois, la campagne
sera primée. Elle obtiendra le prix "secteur hygiène,
116
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
second lieu, si elle bénéficia d'un score
de reconnaissance très élevé de 87 % et
d'un score d'agrément de 61 %, elle
obtint surtout un score spécifique de 67
%, ce qui la classe en tête du hit-parade
IPSOS des 30 meilleures campagnes
télé de niveau 1 depuis 1982 en score
spécifique.
On notera cependant de moins
bons résultats chez les hommes que
chez les femmes. Le public masculin
n'apprécierait-il pas les conseils d'une
femme, et qui plus est Catherine
DENEUVE, en matière de finance ?
beauté, soins, accessoires" du Grand Prix Stratégies de la
Publicité 1992.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
117
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Scores en %
Ensemble
Femmes
Hommes
film SUEZ
Standards
(Bud. = 4,9 MF)
Impact
. Brut
86
88
83
56
. Spécifique
67
72
61
22
. Prouvé
73
76
70
29
87
89
85
63
. Positif
61
64
58
64
. Négatif
22
21
23
20
. Indifférent
17
16
19
. Reconnaissance
Agrément
10
"Suez : les stratèges de l'impact"
Baromètre IPSOS-STRATEGIES
STRATEGIES n°586 du 14 Décembre 1987
Les chiffres présentés ci-devant
doivent cependant être relativisés dans
le cas d'une comparaison au regard des
standards, dès lors que le budget
engagé par SUEZ n'avait rien de
standard1.
__________________
1 - Alors que PARIBAS avait déjà dépensé un budget de
50 millions de francs pour sa campagne de privatisation,
celui de la COMPAGNIE FINANCIERE DE SUEZ
dépassa 62 millions de francs. Voir notamment "Des
produits en panne d'image" Patricia LOUE, LE MONDE
du Samedi 21 Novembre 1987 et "Rentable la publicité...
Jusqu'où ?" Marc JEZEGABEL et Martine ROBERT,
DYNASTEURS n°29 du mois de Septembre 1988. Il faut
cependant noter que le message était très détaillé sur
l'histoire et les métiers exercés par SUEZ. Ainsi cette
relative "complexité" exigeait-elle un plan media
important. On sait que dans ce cas, la répétition est
impérative. Voir sur le lien entre la complexité du
message et la répétition : "Ease of message as a moderator
of reception effects in advertising" Punam ANAND et
Brian STERNTHAL, JOURNAL OF MARKETING
RESEARCH, Volume 27, Août 1990, traduction proposée
par la revue RECHERCHE ET APPLICATIONS EN
MARKETING "Le rôle modérateur de la compléxité du
traitement des messages sur les effets de la répétition
publicitaire", RAM Volume 6 , N°2 (1991) pp. 17-24.
Les campagnes de lancement de
produits
sont
les
premières
2
"consommatrices" d'impact , car leur
premier objectif est, avant de délivrer
un message, de faire connaître le
produit
ou
l'annonceur3.
Le
présentateur Antoine De CAUNES,
participa pour ces mêmes raisons au
lancement de la barre chocolatée
MILKA NUSSINI. "C'est un coup de
lancement"
explique
Jean-Michel
__________________
2 - "Leurs associations avec des marques sont pratiquées
pour diminuer les risques de perception par le
consommateur, en particulier pour de nouvelles marques,
inconnues jusqu'à présent ou non encore essayées." in
"What a spokesman does for a sponsor" Joseph M.
KAMEN, Abdul G. AZHARI, Judith R. KRAGH,
JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH, Volume 15,
N#2, Avril 1975.
3 - "Les annonceurs devraient utiliser plus amplement ce
type de porte-parole [célébrités] pour la publicité de
leurs produits. Si le souvenir de la publicité et celui du
nom de la marque sont les plus recherchés, les
annonceurs devraient utiliser une célébrité comme porteparole." Hershey H. FRIEDMAN et Linda FRIEDMAN
op. cit., pp.63-71
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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118
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
CARLO4 de l'agence YOUNG &
RUBICAM qui avait la charge de ce
lancement, "on arrivait avec une barre
qui bénéficiait d'une expérience de
chocolatier et non de confiseur comme
de nombreuses autres. Il fallait faire
une démonstration sur le produit qui
plaise aux jeunes de 15 à 25 ans, sur un
ton qui parvienne à être drôle et
attractif. On a pensé à Antoine De
CAUNES parce qu'il était le
présentateur vedette d'une émission de
rock depuis très longtemps et qu'il a
l'humour de cette génération. De plus,
il est sympa et parle avec un débit
complètement accéléré." Au fils de trois
films de 30 secondes, la star parvenait,
imperturbable, à délivrer son message
alors que divers éléments parasites
(monstre, diable,...) venaient troubler
sa prestation à dessein. "Le marché des
barres légères possède beaucoup de
leaders qui ont su faire de leurs
campagnes de véritables légendes. Il
fallait donc faire le trou dès le
lancement et faire une campagne à fort
impact"5.
déjà originale en elle-même. Déclinée en
presse magazine, télévision et affichage,
cette campagne obtint elle aussi dans
son ensemble et pour ses diverses
exécutions,
d'excellents
scores
d'impact. Deux vagues d'affichage
eurent lieu, utilisant à chaque fois
Grace JONES. La première du 1er au 15
Octobre 1984, la seconde, du 10 au 30
Septembre 1985. Le teasing, fort
générateur d'impact lui-même, fut
également utilisé à chaque fois. IPSOS
calcula alors les résultats suivants :
En 1984, il s'agissait toujours
d'impact, lors d'une campagne
d'affichage pour les automobiles
CITROEN CX. L'agence R.S.C.G. fit
appel la chanteuse et actrice, Grace
JONES. Notons toutefois que la star
venait ici parfaire l'impact d'une
communication orchestrée par le
metteur en scène Jean-Paul GOUDE et
__________________
4 - Entretien privé accordé le 28 Avril 1988.
5 - Cécile MOREL, Chef de Publicité sur NUSSINI chez
YOUNG & RUBICAM, interviewé par Véronique
DHAM, "MILKA ou la tentation" STRATEGIES N°584
du 30 Novembre 1987.
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Scores campagnes
CITROËN CX en %
Moyenne
Affichage du 19.10.84
Affichage du 8.10.85
voitures
françaises
Ensemble
18-34 ans
Ensemble
18-34 ans
(Ensemble)
. Reconnaissance
84
87
67
75
46
. Attribution
41
48
39
47
22
. Confusion
Agrément
31
31
15
16
14
. Positif
60
69
67
76
42
. Négatif
37
29
30
22
43
. Indifférent
3
2
3
2
15
Impact
"Affiches de Pub 1983-1985"
Phillipe BENOIT et Didier TRUCHOT
Editions CHÊNE, Paris (1986)
D'après les résultats de la p. 148
Cette campagne obtint de très
bons résultats comme on peut le
constater au vu des chiffres qui
précèdent. En revanche, s'il existe une
très nette différence entre la vague 1984
et la vague 1985, il serait risqué de
comparer ces deux résultats sans
précautions, même si tous les deux
recoururent au teasing. En effet, il
n'eurent pas lieu exactement à la même
époque de l'année et quand bien même,
encore faudrait-il considérer tous les
éléments de la campagne tels que la
création : buste stylisé de l'actrice dans
la première vague, photographie et
trucages dans la seconde ; le moment de
l'enquête IPSOS - 4 jours après la
première vague, 8 jours après la
seconde - ; la pression publicitaire des
concurrents ; le fait que la première
vague consacra la totalité du budget à
l'affichage, soit 2.300 panneaux - rare
pour le secteur automobile -, alors que
la seconde fut accompagnée d'un film à
la télévision ; l'axe de la campagne :
lancement de la CX injection turbo
pour la première vague, lifting de la
voiture pour la seconde,... Autant
d'éléments
différents
qu'il
est
nécessaire de considérer pour ne pas
tomber dans le piège de la comparaison
hâtive.
Mais cette campagne comporte
un second intérêt qui illustre le fait que
même en recourant à une star
internationale, il est parfois difficile de
décliner directement la campagne d'un
pays à l'autre. La globalisation trouve
vite ses limites à la rencontre des
mentalités et des habitudes de chacun.
"Je crois que c'est la meilleure
utilisation de star qui ait été faite à
l'agence et peut-être même en France."
nous confia Jacques SEGUELA1, "Il y a
une adéquation complète entre
l'agressivité esthétique, un peu
métallique de Grace JONES, et le
restyling de la CX. Le film a beaucoup
de talent et surtout les affiches. Sans
__________________
1 - Entretien privé accordé le 31 Janvier 1989.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
120
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
doute les plus belles affiches que j'ai pu
faire. Lorsque l'on voit la CX dans sa
coiffure ou l'affiche de Grace JONES où
ses yeux sont remplacés par deux
phares de CX. Cette campagne nous a
d'ailleurs procuré beaucoup de soucis
parce qu'elle a très bien marché en
France et devait être Européenne. Mais
elle a été refusée dans les pays un peu
puritains comme la Suisse ou la
Hollande, où l'on a été obligé de
changer de campagne, tellement on a
reçu de lettres d'insultes du
consommateur de base. C'était une
campagne très agressive. Grace JONES
est noire, le consommateur dans
beaucoup de pays reste très raciste
même s'il ne l'avoue pas. Surtout, la
création ne laisse jamais les gens
indifférents. Elle devient passionnelle
et provoque facilement l'amour ou la
haine."
Maintenant, si la star est par
essence génératrice d'impact, il est
toujours préférable de l'intégrer dans
un scénario ou un décor qui mettra cet
impact en valeur. C'est ce que compris
l'agence
OSCAR-INTERMARCO
lorsqu'elle décida d'utiliser pour son
client
RADIOLA
en
mal
de
reconnaissance, les services des
réalisateurs
comédiens
Gérard
JUGNOT,
puis
Frédéric
MITTERRAND2.
__________________
2 - "Le principe du maçon" Olivier DARMON, BAT n°99
du mois de novembre 1987.
Frédéric BESSARD3, l'un des
responsables du budget, précise les
raisons de ce choix : "Dans la stratégie
du groupe PHILIPS, RADIOLA était
une marque qui était un peu suiveuse,
une marque qui grâce à un réseau très
provincial, très populaire, avait ce
positionnement, et récupérait des
acheteurs qui n'étaient pas couverts par
la marque PHILIPS. En termes de
produits, RADIOLA n'avait pas de plus
qui lui permette d'avoir une
communication innovatrice. Nous lui
avons donc recherché une personnalité
publicitaire.
Cette
personnalité
publicitaire, nous l'avons faite en
fonction des grands traits de caractère
de la marque. Une marque à
consonance française : RADIOLA. Elles
ne sont pas nombreuses. Une marque
qui du fait de sa distribution est très
connue des gens, sympathique, sans
frime et qu'ils apprécient pour sa
solidité. Ce n'est pas du tout une
marque haut de gamme à ce moment
précis. Puis nous avons très vite porté
notre choix sur le grand spectacle à la
française et humoristique. Très
logiquement, dans l'univers des Huns
que l'on a développé à cette époque, on
a cherché une vedette qui soit un
accélérateur d'impact. C'était la pleine
époque du Splendide et celle des gens
du Splendide. Gérard JUGNOT est très
vite devenu notre choix. Par ailleurs,
nous travaillions avec Jean-Marie
POIRE
qui
lui
aussi
nous
recommandait JUGNOT."
__________________
3 - BESSARD Frédéric : Responsable commercial à
l'agence OSCAR-INTERMARCO, Paris. Entretien privé
accordé le 30 Mars 1988.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
121
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Le film magnétoscopes eut un score
IPSOS de reconnaissance égal à 87 % et
un score d'agrément de 89 %. L'agence
réalisa un film pour les magnétoscopes,
où grâce à l'arrêt sur image de sa
télécommande,
Gérard
JUGNOT
pouvait intervenir dans l'action et
sauver sa Belle, des hordes de Huns ;
ainsi qu'un film pour les téléviseurs où
les Huns envahissaient le salon de la
star pour lui voler son poste. Dans ce
dernier film, Gérard JUGNOT tentait
une riposte en brandissant la hache
géante qu'un des Huns avait oubliée,
mais se ravisait immédiatement après le
grognement de l'un d'entre eux en lui
susurrant "Vous oubliez votre serpette
!". Ce fut l'élément le mieux mémorisé
de la campagne. Pour l'anecdote, cette
fameuse tirade ne figurait pas dans le
story-board initial, et c'est sur
proposition de Gérard JUGNOT au
moment du tournage, qu'elle fut
introduite. "Nous faisons un travail de
collaboration
termine
Frédéric
BESSARD, ce n'est pas un problème
que l'idée vienne d'un acteur ou d'un
réalisateur, si cela enrichit la
communication".
Au delà de l'anecdote, cette
précision est relativement importante
pour mesurer l'implication de la
célébrité. Il sera toujours intéressant de
rechercher sa participation active à la
construction de la campagne, pour une
prestation plus naturelle et donc
normalement plus crédible auprès de la
cible.
Parfois, le publicitaire n'hésite
pas à associer un soupçon de
provocation pour que l'impact soit
maximisé. Ce fut le cas de la campagne
pour les sous-vêtements MARINER,
que l'agence R.S.C.G. réalisa en 1986.
Jean-Marie POIRE était une nouvelle
fois derrière la caméra. Décidant de
recourir à deux stars pour devenir les
porte-parole de cette campagne, se
posait une nouvelle fois le problème du
produit. Comment le présenter ?
L'agence eut alors l'idée de filmer deux
véritables strip-teases. Si l'érotisme est
fréquemment employé, le principe du
strip-tease se rencontre assez rarement
dans la communication publicitaire car
il peut très facilement tomber dans le
piège du vulgaire. Il est encore plus rare
lorsqu'il s'agit de stars. Même l'actrice
Kim BASINGER reste en négligé pour
les bas GOLDEN LADY4. Décidé à
provoquer un impact maximum,
l'agence ne renonça pas à l'idée et
parvint à convaincre deux stars de se
déshabiller pour MARINER : le
footballeur Dominique ROCHETEAU
et l'écrivain Jean-Edern HALLIER.
Ainsi, l'impact peut provenir de
l'apparition de la star là où l'on ne
l'attend pas du tout, sans recherche
d'adéquation particulière. L'impact
pour l'impact. Stratégie appréciable sur
des marchés où sont présentes un
grand nombre de marques, et où il est
difficile de se distinguer par un plus
produit. En 1986, l'acteur Jean-Marie
PROSLIER
surpris
tous
les
téléspectateurs en tenue de Sol
CARLUS, l'esclave de CESAR qui
__________________
4 - Voir notamment "BASINGER tours Europe, Japan in
advertising" Michelle Mc CARTER, ADVERTISING
AGE du 18 Février 1991 et "Kim BASINGER bissée par
GOLDEN LADY" Philippe LATIL, COMMUNICATION
CB NEWS n°270 du 28 Septembre 1992. Selon la société
d'études PUBLIMETRIE, la diffusion du premier film en
1991 avait généré une augmentation de la notoriété de la
marque passant de 20% à 35%.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
122
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
séduit CLEOPATRE par l'éclat de ses
sols lavés avec TERRA de JOHNSON.
En 1970, l'agence EUROADVERTISING réalisa pour son client
le chocolat LANVIN, un film mettant
en scène l'extraordinaire peintre
Salvador DALI. Comme le précise JeanClaude BOULET5 de l'agence B.D.D.P.,
"il n'y a aucun rapport entre Salvador
DALI et le chocolat à croquer. La star
est alors un amplificateur, c'est tout.".
L'impact de cette campagne fut tel que
le spot fit le tour du monde. Jamais
utilisé en publicité et pour un cachet de
quelques 10.000 dollars, le souvenir du
peintre de génie avec sa tirade : "Je suis
Fou du chocolat LANVIN !" alors que sa
célèbre moustache frétillait, reste
encore aujourd'hui gravé dans bien des
mémoires.
Lors d'une interview réalisée sur
le tournage du film, le Maître du
surréalisme déclara que "l'unique
différence entre DALI et un fou, c'est
que je ne suis pas du tout fou. Mais
sans être fou, j'apprécie comme la
manifestation la plus... Pop, du cinéma,
les intermèdes et le moment où je
déguste
les
commercials
[films
publicitaires en anglais], justement
dans lesquels il y a le chocolat LANVIN
qui m'arrive,... qui me tombe sur la tête
comme une figue !"6. Pour l'anecdote, il
faut savoir que compte tenu de l'idée
qui consistait à faire frétiller les
moustaches du Maître pour attirer
l'attention du consommateur, les
publicitaires eurent recours à un
masque de cire, réalisé spécialement à
cet effet par le musée GREVIN.
L'illusion était telle que personne ne
s'en aperçut. Dix-neuf ans plus tard,
l'agence C.L.M./B.B.D.O. lança la barre
chocolatée PRALINI de LANVIN7. Le
budget était très peu important et
l'agence décida d'en consommer la
totalité sur une seule journée - le
dimanche 5 novembre 1989 - avec
divers montages du film. Le scénario
racontait l'histoire d'un casting réalisé
en vue de trouver un sosie... du Maître !
L'impact du premier film avec DALI
avait été tel, qu'il en restait encore
quelque chose en 1989, dans la mémoire
collective.
Il existe enfin des cas où
l'impact de la star est recherché en
raison des connotations négatives qui
entourent
généralement
la
communication habituelle. C'est par
exemple le cas de l'État et du Service
Public en général. Annonceurs tout à
fait particuliers, leurs messages
peuvent à tout moment tomber dans un
style direct ou non, ressenti comme
autoritaire. Résultat, le public se
détourne du contenu du message et la
communication échoue. Il faut donc
dans ces conditions dédramatiser. La
star peut alors apparaître comme un
générateur
d'impact
qui
saura
contourner - tout au moins en partie ces connotations négatives.
__________________
5 - Entretien privé accordé le 18 Mai 1988.
6
- "Interview de Salvador DALI", Anonyme,
documentaire du Centre National d'Archives
Publicitaires.
__________________
7 - "Pralini se lance en un dimanche" Alain CHARRIER,
LIBRE SERVICE ACTUALITE N° 1184 du 10 Novembre
1989.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
123
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
En France, les exemples sont
multiples de Bernard DARNICHE pour
l'Agence pour les Economies d'Energie
à Michel GALABRU pour le Ministère
de l'Environnement. A l'agence
SUCCESS / SLAD, Stan LEVY,8 qui mit
en scène cette dernière campagne, se
souvient : "Je cherchais d'une part un
personnage qui puisse incarner le
Français moyen ronchon, à la fois pour
donner un impact à la campagne et en
même temps une dimension populaire
au message. Comme le message est un
message transmis par un ministère,
c'est toujours ressenti comme du
prêchi-prêcha. Si vous décortiquez le
contenu du message il est très très
didactique, très sérieux. Alors Michel
GALABRU, parce que l'idée est un
Monsieur Français moyen, ronchon,
qui a l'habitude en général de se
plaindre du voisinage parce qu'il subit
les nuisances. Ça s'est fait de la façon la
plus simple et la plus farfelue compte
tenu du comportement du bonhomme,
qui n'a pas l'habitude de faire de pub. Il
n'avait je crois, jamais fait de pub à
l'image. C'est un homme qui n'a pas du
tout fait un numéro de star. Ça a été
pour moi, un régal de le diriger, parce
que c'est une Rolls de la comédie. C'est
ce qui m'a énormément surpris. Au
cheveu près il vous sort l'intonation
qu'il faut, la gestuelle qu'il faut. Ce fut
très naturel. C'est un des comédiens les
plus fins qui soit."
Le 25 Octobre 1985 à 23 heures
se produisit un événement qui changea
__________________
8 - LEVY Stan : Directeur de création de l'agence de
communication SUCESS/SLAD, Paris. Entretien privé
accordé le 27 Septembre 1988.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
la vie de 55 millions de Français9. Ce
jour là, la Direction Générale des
Télécommunications mit en place le
système de la nouvelle numérotation. Si
le célèbre bouton rouge sur lequel le
Ministre
des
P.T.T.
Louis
MEXANDEAU appuya à l'heure dite
était purement factice, l'opération de
communication qui accompagna ce
bouleversement fut elle, bien réelle. En
raison de l'importance de cette
opération, le budget total de
communication était de 60 millions de
francs. En Novembre 1983, après le
lancement d'une spéculative entre les
agences DELRIEU-DUPRAT, HAVAS
Conseil,
OPUS-HINTZY
et
PERCEVAL, c'est l'agence OPUSHINTZY qui fut chargée de la
campagne publicitaire. Et c'est le
présentateur vedette Léon ZITRONE
fut retenu pour faire passer le message
auprès des usagers. Assistée d'une
petite fille pour rendre encore plus
sympathique la communication, il
expliquait avec sa précision habituelle,
les modalités de ce changement. Pour
l'anecdote on notera que le jour J, au
Central
Murat,
lorsque
Léon
ZITRONE dut en direct passer
officiellement le premier appel à 8
chiffres, il commit une erreur et tomba
sur une abonnée inconnue... "Il faudra
donc que Léon ZITRONE s'y reprenne
à deux fois pour joindre Caroline, qui
n'a pu s'empêcher d'éclater de rire en
voyant son partenaire se tromper. Cette
erreur imprévue aura finalement pour
conséquence
de
crédibiliser
__________________
9 - "Un succès sur toute la ligne" Simone MUET et
Jacques HINTZY, Editions de LA DOCUMENTATION
FRANCAISE, Paris (1986).
124
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
immédiatement l'opération aux yeux et
aux oreilles des journalistes" 10.
Autre pays, autre exemple.
L'objectif stratégique est similaire, mais
la mise en application, différente. Aux
Etats-Unis en 1987, le Ministère de
l'intérieur décida de lancer une grande
campagne en faveur de la préservation
des parcs publics sur le thème : "Soyez
fiers de l'Amérique". "Cette campagne
fut développée à la suite des
observations du Secrétaire d'Etat, M.
HODEL, d'après lesquelles nous
(Américains) ne serions pas capables
de protéger 700 millions d'âcres de
terre publique, si 240 millions
d'Américains ne prenaient pas garde."
nous expliqua Mark C. WESTERMAN,
Vice-Président de l'agence W.B.
DONNER qui eut la charge du budget.
"Pour délivrer ce message, nous
avons sélectionné des individus qui
étaient perçus par les Américains
comme très naturels dans ce rôle. Clint
EASTWOOD, Charles BRONSON et
Lou GOSSETT Jr.. C'était par ailleurs
des vrais durs qui pouvaient inciter le
public à faire quelque chose, à agir pour
préserver ces ressources. Il ne suffisait
pas d'obtenir une campagne dont on se
souviendrait un an après, nous voulions
une campagne qui les touche
intérieurement et génère une réponse."
C'est le Président Ronald REAGAN
lui-même qui l'année précédente, avait
personnellement adressé une requête
__________________
10 - "ZITRONC et DUTRONE : Les dessous d'un
tournage fou" Philippe COLL et Philippe CHANCEL,
CREATION n°5 du mois de Mai 1985 ; "L'histoire cachée
de la numérotation" Philippe COLL, STRATEGIES n°531
du 6 Octobre 1986.
en ce sens aux trois stars qui furent les
porte-parole remarqués et écoutés de
cette extraordinaire campagne11.
Depuis 1950, le Service des Parcs
Nationaux utilise le concours de sa
mascotte, l'ours SMOKEY12, pour
sensibiliser le public. Cette fois encore,
la copy strategy recommandait une
approche émotionnelle qui puisse
mener à l'action. Bien qu'il s'agisse
d'une campagne gouvernementale,
l'agence W.B. DONNER choisit une
approche beaucoup plus agressive de
façon à obtenir le plus fort impact
possible. Ainsi le film pouvait-il être
interprété au premier ou au second
degré. De surcroît, l'impact était aidé
par
la
première
participation
publicitaire de Clint EASTWOOD hormis son engagement dans la lutte
contre la drogue -13. De même que les
acteurs Lou GOSSET Jr et Charles
BRONSON, il se promenait dans un
parc public et s'adressait directement
__________________
11- Voir également sur le communication des grandes
causes, le chapitre 10 pp. 190-211, "Promoting through
Mass Communication" in "Social Marketing : Strategies
for changing public behavior" Philip KOTLER et Eduardo
L. ROBERTO, Editions THE FREE PRESS, New York,
Etats-Unis (1989).
12 - SMOKEY BEAR est même doté d'une licence
commerciale cédée par le Service des Parcs Nationaux
afin de récolter des fonds pour la prévention contre les
incendies. "Old SMOKEY" Eileen KEERDOJA,
NEWSWEEK du 15 Novembre 1976.
13 - L'acteur ne souhaita cependant pas apparaître sur les
déclinaisons en presse écrite de la campagne. "Coming
clean - President convinces tough guys to join for public
lands" Janet MEYERS, ADVERTISING AGE du 13 Avril
1987. Voir également sur ces réserves de la star quant aux
caractéristiques du plan-media, le cas de Catherine
DENEUVE pour la COMPAGNIE FINANCIERE DE
SUEZ page 573.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
125
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
aux téléspectateurs. Leur message
concret exprimait leur dégoût et leur
agacement de voir tant de gâchis, et la
nécessité de prendre garde à la
préservation des parcs publics en
impliquant le téléspectateur. Les films
se terminaient avec le logo de la
campagne et l'adresse du comité de
La mascotte du Service des Parcs
Nationaux américains, SMOKEY the
BEAR, est un animal encore
aujourd'hui très célèbre aux EtatsUnis. Il est essentiellement destiné à
séduire les enfants dans un premier
temps, puis les parents par leur
intermédiaire1. Il en est de même avec
les personnages célèbres de bande
dessinée ou de dessin animé qui ne sont
pas toujours un facteur d'impact
destiné à toucher une cible purement
enfantine ?
3 - Les personnages de bandes
dessinées : des cibles diverses
Comment être d'accord avec
David OGILVY lorsqu'il généralise et
écrit que les dessins animés peuvent
vendre aux enfants, mais que leurs
__________________
1 - "Alfred POFFENBERGER, psychologue très écouté
des publicitaires, leur recommandait de s'adresser
directement aux enfants. Ayant l'expérience des
«difficultés considérables qu'on rencontre lorsque l'on
s'attaque aux habitudes» des adultes, il insistait sur
«l'importance qu'il y avait à faire passer l'innovation par
le truchement des enfants»." Stuart EWEN "Conscience
sous influence - Publicité et genèse de la société de
consommation" Editions RES/Champ Urbain AUBIER
MONTAIGNE, Paris (1977/1983), p.145. Voir également
Vance PACKARD, op. cit. pp. 149-155, qui cite
notamment les travaux de Clyde MILLER sur la manière
de conditionner les réflex des enfants.
soutien. Le résultat fut à la hauteur du
pari. Des milliers de lettres parvinrent
des quatre coins des Etats-Unis pour
soutenir l'effort entrepris et une
nouvelle campagne fut lancée à
l'attention cette fois des enfants.
résultats sont inférieurs à la moyenne
quand il s'agit de vendre à des adultes2.
En publicité, le seul principe général
que l'on puisse considérer est qu'il est
dangereux de généraliser. Notamment,
dans le cas présent, lorsque ces dessins
animés font par exemple eux aussi
appel à une célébrité. Pourquoi cette
approche
serait-elle
moins
convaincante qu'un film ou une
annonce avec des personnages réels, si
les
principes
d'adéquation,
d'originalité, de crédibilité et de bonne
exécution sont réunis3 ? Divers
exemples présentés ci-après viendront
confirmer cette pensée.
Lorsque l'on parle de célébrités,
ce ne sont pas toujours des
personnalités
réelles,
ou
plus
exactement des personnalités de chair
et d'os. En effet, le talent de certains
dessinateurs a, dans de nombreux cas,
réussi à créer une personnalité dont les
formes et le caractère étaient tout droit
issus de leur fertile imagination. A
l'exemple de nombreuses stars du
cinéma, certains de ces personnages,
telle la PANTHERE ROSE, naquirent
d'un hasard cinématographique. Ce
nonchalant personnage fut imaginé par
__________________
2 - David OGILVY, op. cit. p.109.
3 - "BD : Les publicitaires coïncent la bulle" Olivier
LAMOUR, STRATEGIES n°595 du 15 Février 1988.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
les dessinateurs américains Fritz
FRELENG et David De PATIE à la
demande du metteur en scène Blake
EDWARDS pour simplement donner
une touche d'originalité au générique
de son film The Pink Panther, en 1964.
Qui aurait pu alors croire que c'était le
début d'une longue carrière en tant que
star du cartoon.
Le personnage FIDO DIDO fut
créé en 1985 par un Directeur
Artistique de l'agence J. WALTER
THOMPSON de New York, Susan
ROSE. Sa conception provient d'un
griffonnage sans intention que Susan
ROSE avait fait sur un napperon de
bar... L'année suivante, il devint l'une
des plus grandes stars du licensing4 par
l'intermédiaire de la société UNITEDMEDIA. En 1990, il devenait le porteparole publicitaire international n°1 de
la boisson SEVEN-UP5 à travers le
monde.
Devenant ainsi, eux aussi des
célébrités, ces personnages de bande
__________________
4 - Il arrive parfois que l'on rencontre le terme de
merchandising utilisé pour représenter cette utilisation de
droits dérivés. C'est là un abus de langage dû à une
traduction littérale sans précautions. Le merchandising
peut être défini comme l'élément du marketing englobant
toutes les techniques commerciales qui permettent de
déterminer l'emplacement et d'aménager le lieu de vente,
puis d'y présenter le produit, dans des conditions
physiques et psychologiques optimales. En fait, si l'on
parle à tort de merchandising au lieu de licensing, c'est en
raison d'une utilisation partielle du terme américain
original pour désigner cette exploitation des droits
dérivés : character merchandising.
5 - "FIDO-DIDO : l'impression sans blague" E.T.,
STRATEGIES n°650 du 10 Avril 1989, "FIDO DIDO
manages to draw out the cool side of PEPSICO' SLICE"
Bob GARFIELD, ADVERTISING AGE du 18 Juin 1990.
dessinée ou de dessin animé
constituaient naturellement un "outil"
potentiel que la publicité s'est
empressé de mettre à profit6.
Aujourd'hui, tous se sont attachés une
licence d'exploitation à des fins
commerciales, parfois même beaucoup
plus lucrative que la simple perception
des droits de diffusion littéraire,
télévisuelle
et
plus
rarement
cinématographique
auxquels
ils
pouvaient aspirer. Ainsi, suivant le
personnage
et
les
conditions
d'exploitation fixées par son créateur
ou ses ayants droit, il est possible de
défier les lois du cartoon et de la bande
dessinée, en faisant courir WILL
COYOTTE et BIP BIP non plus l'un
après l'autre, mais pour les vêtements
de sport NIKE, en utilisant la verve de
DAFFY DUCK et le célèbre "What's up
Doc ?" de BUGS BUNNY pour
l'audiovisuel SONY, le pop-corn BAFF
ou les glaces PILPA, en sollicitant le
flegme de GASTON LAGAFFE pour le
réseau télématique TRANSPAC ou
pour l'Union des Transports Publics7,
le sauvage RAHAN pour les vitamines
ARKOGELULES, le marin POPEYE
pour les comprimés HEPT-A-MYL, les
confiseries KINDER ou les matelas
DUNLOPILO, ou encore MICKEY
pour rouler en CHEVROLET ou voler
sur U.T.A. vers les Etats-Unis,...
Quant aux professionnels, V.I.P.,
ALBERT-RENE,
UNITED-MEDIA,
__________________
6 - "De nouvelles aventures pour TINTIN reporter ?"
Dossier de L'INSTITUT DE L'ENFANT, Editions I.E.D.
Paris, 1988.
7 - "LAGAFFE prend le bus" Eric de BRANCHE,
STRATEGIES n°560 du 4 Mai 1987.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
127
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
WARNER Bros..8, A.P.M., BARAN
LICENSING, WALT DISNEY, et
quelques autres sociétés sont présentes
sur le marché extraordinairement
lucratif des droits dérivés, pour
permettre aux célèbres personnages de
bande dessinée et de dessin animé, de
participer à différentes opérations
publicitaires choisies9.
Si l'on recherche la principale
raison à cette utilisation, le premier
réflexe serait de penser à la cible que
l'on désire atteindre. L'équation est
simple, la grande majorité du public de
ces dessins animés ou de ces bandes
dessinées est constituée par une
population très jeune. Or, on sait que
les produits pour lesquels le risque de
performance
ou
risque
socioéconomique est bas, la principale
source d'information des jeunes se
trouve être les media, alors que
l'influence des parents et des pairs
semble au contraire relativement faible
ici, notamment chez les adolescents10.
Dès
lors,
on
comprend
parfaitement que les barres chocolatées
MILKY WAY utilisent la complicité du
célèbre lapin, BUGS BUNNY, pour
présenter
publicitairement
ses
__________________
8
- "BUGS BUNNY contre MICKEY" K.R.,
COMMUNICATION CB NEWS N° 157 du 19 Février
1990.
9 - "Marketers' ressource to licensing : special report"
Collectif, ADVERTISING AGE du 28 Mai 1990.
10 - Voir notamment : George P. MOSCHI et Roy L.
MOORE "Decision making among the young : a
socialization perspective" JOURNAL OF CONSUMER
RESEARCH Volume 6 du mois de Septembre 1979, pp.
101-112.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
confiseries à ses jeunes consommateurs
potentiels. "Dès 8 ans, l'enfant est
capable de reconnaître dans un
magazine, des pages de publicité
d'autres types de discours, même si la
page publicitaire met en scène un
personnage de bande dessinée ou de
télévision
bien
connu"11.
C'est
__________________
11 - Georges RENOUARD "L'enfant et la publicité :
Problèmes et résultats d'une expérience" p. 31. D'autres
auteurs vont même plus loin : "Il semble que dès 2 ans et
demie, les enfants se livrent à un «monitoring» c'est à
dire que, sans regarder de façon constante, ils jettent
fréquemment les yeux sur l'écran. C'est plus tard que
l'assistance totale au spectacle télévisé commence, c'est à
dire vers 4 ans et demi ou 5 ans" Jean MEE "L'enfant et la
publicité : 10 ans d'expériences américaines" p. 121. Ces
deux articles sont extraits du Séminaire I.R.E.P. sur
"L'enfant et la publicité" d'Avril 1979. De surcroît,
l'utilisation d'écrans séparateurs entre les publicités et
les programmes ne semble pas affecter la perception /
distinction des deux, par les enfants de 3 à 10 ans.
"Program-commercial separators in children's television :
do they help a child tell the difference between Bugs
BUNNY and the QUIK RABBIT ?" Mary Ann STUTTS,
Donald VANCE et Sarah HUDLESON, JOURNAL OF
ADVERTISING n°10 du mois de Juin 1981, pp. 16-25. Voir
également sur le lien entre l'enfant et la publicité :
"Advertising directed at children / Endorsements in
advertising" Reports by the Committee on Consumer
Policy, OCDE Publications, Paris (1982), "Children and
commercial persuasion : an attribution analysis" Thomas
S. ROBERTSON et John R. ROSSITER, JOURNAL OF
CONSUMER RESEARCH 1, du mois de Juin 1974, pp.
13-20 ; et sur les campagnes de prévention menées aux
Etats-Unis : "Group W. act ads urge parents to smarten
up" Lenore SCENAZY, ADVERTISING AGE du 19
Janvier 1987. Voir également "Marketing to kids :
Understanding the child consumer" Collectif,
ADVERTISING AGE Special Report du 10 Février 1992.
Manifestement, la publicité devra d'elle même se montrer
de plus en plus honnête dans la présentation de ses
produits à ces consommateurs bercés dès leur plus jeune
âge par cette même publicité. Ils seront dès lors très
probablement beaucoup plus exigeants que ne le furent
les générations qui les précèdent. On notera toutefois
q'une récente étude fait ressortir le fait que les enfants
ont une attitude générale de plus en plus négative à
l'égard de la publicité. Voir à ce propos : Glen RIECKEN
et Ugur YAVAS "Children's general product and brand specific attitudes towards television commercials"
128
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
notamment ce qui motive les boissons
FANTA, pour lesquelles l'agence Mc
CANN ERICKSON crée de nouvelles
aventures aux personnages de Walt
DISNEY,
MICKEY,
DONALD,
DINGO,...
Jean-Claude ROBYN12 raconte
l'adéquation de ce choix avec l'image
du soft-drink : "Le concept d'utiliser
des personnages de WALT DISNEY
pour FANTA, est le fruit des
cogitations de plusieurs agences Mc
CANN dans le monde. Il est simple. On
s'adresse à des enfants, qui sont
prescripteurs, et l'acheteur est la mère
de famille. Les enfants de l'âge de ceux
qui boivent FANTA, on le sait aiment
WALT DISNEY, il n'y a qu'à voir le
succès du DISNEY CHANNEL. En
second lieu, les mères de famille aiment
WALT DISNEY, pour beaucoup de
raisons. Ce sont des personnages
qu'elles ont elles-mêmes connus
lorsqu'elles étaient enfants, elles les
trouvent sympathiques et ils sont très
rassurants par rapport aux personnages
des dessins animés japonais comme
GOLDORAK et autres monstres de
l'espace."13 Des stars en parfaite
INTERNATIONAL JOURNAL OF ADVERTISING du
mois de Septembre 1990, pp. 136-148. Il est donc
impératif à la publicité de s'adapter, au risque de ne pas
faire bénéficier ses produits du formidable effet
prescripteur que représentent les enfants. En France en
1990, on estimait qu'ils influençaient 43% des dépenses
des familles. "L'enfant, la pub et la TV" Caroline de
MALET, MARKETING MIX n°68, Décembre
1992/Janvier 1993.
12 - Jean-Claude ROBYN, Président du groupe Mc
CANN-ERICKSON France. Entretien privé accordé le 7
Avril 1988.
13 - "On ne peut bien développer des produits dérivés
destinés aux enfants que si les personnages ont la caution
des parents" Fabrice PLAQUEVENT, Directeur
Commercial des licences chez WALT DISNEY Company
adéquation par conséquent avec la cible
des produits dont elles sont les porteparole.
En revanche, lorsque l'on
observe d'un peu plus près les
différents produits qui, pour leur
communication publicitaire, ont un
jour fait appel à un personnage célèbre
du dessin animé ou de la bande
dessinée, notre équation initiale trouve
très vite ses limites. Les enfants sont-ils
coeur de cible des ordinateurs APOLLO
lorsqu'ils sont présentés par le PETIT
PRINCE d'Antoine de SAINTEXUPERY ? des bougies automobiles
AUTO-LITE vantées par Dick TRACY
? des mini-ordinateurs I.B.M. lorsqu'ils
sont vaillamment défendus par
AGGAR le Viking ? des huiles B.P.
recourant
aux
sympathiques
SCHTROUMPFS ? de la compagnie
AIR FRANCE lorsqu'elle utilise les
services de la flegmatique PANTHERE
ROSE ? des automobiles VOLVO
lorsque SYLVESTRE le chat reste
impuissant devant la cage de TITI,
symbole de protection ? de LOGABAX
pour ses ordinateurs prescrits par les
personnages de DUPONT et DUPOND,
en pleine odyssée lunaire ? du Sapeur
CAMEMBERT pour le camembert
BRIDEL ? de TOYOTA pour ses
automobiles vantées par POPEYE le
célèbre marin de Max FLEISCHER ? de
A.T.T. lorsque la compagnie laisse à
SUPERMAN le soin de personnifier ses
France" in "A la une" Alain CHARRIER, L.S.A. n°1298 du
2 Avril 1992. Vance PACKARD - op. cit. page 154 - cite
Ernst DICHTER à propos de l'utilisation dans les années
50 aux Etats-Unis, du personnage de Davy CROCKETT
pour toucher les enfants : "Les enfants cherchent une
occasion de s'exprimer en fonction des traditions du
pays. CROCKETT la leur fournie. Les enfants très
imaginatifs croyaient vraiment être Davy CROCKETT".
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
129
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
services ? de N.C.R. ou I.T.T. qui eurent
eux-aussi recours au super-héros
"kryptonien" de Jerry SIEGEL et Joe
SHUSTER, pour leurs produits et leurs
services ? Assurément non !
Lorsque toutes ces sociétés
utilisent une star de la bande dessinée
ou du cartoon pour faire valoir leurs
produits ou leurs services, cela répond
à d'autres impératifs, beaucoup plus
subtiles qu'il n'y paraît souvent au
premier abord. D'ailleurs, si les enfants
sont plus rarement que prévu, la cible
de telles publicités en France, c'est
notamment
en
raison
d'une
recommandation du B.V.P. (Bureau de
Vérification de la Publicité) qui indique
que :
"Les personnages de fictions classiques ou célèbres ou à la mode, nés de
l'imagination de dessinateurs, de cinéastes ou d'écrivains (héros de bandes
dessinées, de films de fiction, de fables ou de contes), jouissant d'une notoriété, ne
peuvent être utilisés sous formes de dessins, marionnettes, comédiens costumés,
etc. dans la publicité destinée aux enfants si cette utilisation est susceptible de
constituer, aux yeux d'un public enfantin, une caution pour les produits présentés.
Ces personnages ne doivent donc ni recommander le produit ou son utilisation, ni
être en situation de l'utiliser de façon normale."
Maintenant, lorsque pour ses
téléviseurs FST VISION, PHILIPS
utilise SCREWY SQUIRREL, l'écureuil
fou, et son vieil ami, le chien
MEATHEAD - deux créations du
dessinateur Tex AVERY -, cela dénote
complètement dans la communication
traditionnelle
des
appareils
audiovisuels, tout au moins en France.
Ici, le consommateur potentiel est
attiré par deux caractéristiques. Le fait
que les dessins animés de Tex AVERY
s'adressent à un public adulte1,
susceptible d'être attiré par les
__________________
1 - Voir également sur ce point l'analyse de l'association
d'un autre personnage de Tex AVERY, DROOPY avec les
matériels de bureautique RANK XEROX en annexes,
page 635.
évolutions de deux personnages qu'il
connaît. Mais surtout, par le côté tout à
fait inhabituel de cette communication
publicitaire.
Il en est de même lorsqu'en
1973/74, l'agence PUBLICIS imagina
pour son client, les AUTOMOBILES
RENAULT, une campagne presse
magazine basée sur l'utilisation de
personnages de bande dessinée tels que
MANDRAKE, BICOT, La Famille
FENOUILLARD ou Bibi FRICOTIN2.
La cible avouée était "jeune et
moderne". Or, la communication
reposait sur de "vieux" personnages
classiques de la bande dessinée, que les
__________________
2 - Alain LACHARTRE "Objetif Pub" Editions ROBERT
LAFFONT - MAGIC STRIP, Paris (1986) pp. 43-46.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
130
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
conducteurs d'automobiles de 1974,
acheteurs potentiels, pouvaient avoir
connus étant enfants. Enfin, elle aussi
utilisait un mode de communication
sortant totalement de l'ordinaire et
conférant ainsi au produit un impact
supplémentaire occasionné par la
simple curiosité. Sur l'aspect de
l'impact occasionné par le côté extraordinaire de l'utilisation de la bande
dessinée, rappelons le lancement de la
R5, en 1972. Devenu un cas d'école
aujourd'hui, celui-ci avait été basé sur
l'utilisation du dessin animé, faisant
ainsi preuve d'une originalité extrême
comparativement à tout ce qui avait pu
être réalisé auparavant, pour le
lancement d'une automobile.
Or, si ces personnages sont très
souvent utilisés pour dénoter avec la
communication traditionnelle, ils sont
parfois employés également pour leurs
qualités intrinsèques. L'objectif est
alors d'obtenir de l'impact auprès de la
cible tout en utilisant un personnage
que celle-ci reliera naturellement au
message publicitaire ou à l'annonceur.
C'est ainsi qu'en 1988, l'agence
ETINCELLE eut la bonne idée de
recourir à un plan extrait d'un long
métrage des studios WALT DISNEY,
montrant l'héroïne, BLANCHE NEIGE,
en train de récurer la maison de Sept
Nains. L'objectif était d'illustrer la
compétence de son client, la société de
nettoyage ABILIS. En utilisant un
extrait de cette scène caractéristique de
BLANCHE NEIGE et les Sept Nains,
l'annonce, d'une manière très originale,
conférait à la société ABILIS, les
qualités de minutie et d'efficacité d'un
personnage facilement identifiable.
Allant encore plus loin dans la
mise en valeur des qualités des
personnages
utilisés,
certaines
campagnes vont jusqu'à tenter
l'identification avouée des éléments de
la cible, aux héros de bandes dessinées
ou de dessins animés utilisés. A titre
d'exemple, citons la campagne pour la
société multi-services informatiques,
C.C.M.C., réalisée par l'agence RIO en
1986. Pendant plusieurs annonces,
l'agence eut recours à deux agents
secrets britanniques très célèbres, le
colonel Francis BLAKE et son ami, le
Professeur Philip MORTIMER, héros
du dessinateur Belge Edgar Olrik P.
JACOBS3. Recourant même à la célèbre
Marque Jaune, l'agence réécrivit pour
des déclinaisons en presse quotidienne
et en presse magazine, de minihistoires empreintes des aventures de
ces héros, où le colonel BLAKE
symbolisait les experts comptables et
où
le
Professeur
MORTIMER
représentait l'annonceur, C.C.M.C..
L'une des annonces presse quotidienne
de 1987 s'étalait même sur trois pages.
Elle se lisait comme une véritable
bande dessinée, avec une histoire dont
le dénouement finissait adroitement
sur la présentation de la société
C.C.M.C..
Il en fut de même en 1988,
lorsque
l'agence
OSCARINTERMARCO réalisa pour son client,
le CREDIT LYONNAIS, une campagne
basée sur l'utilisation des personnages
de dessin animé, imaginés en 1939 par
les dessinateurs américains William
__________________
3 - Il en coûta entre 150.000 et 200.000 francs d'achat de
droits à l'agence. "Jacobs à la rescousse de la micro"
Anonyme, STRATEGIES n°535 du 3 Novembre 1986.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
131
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
HANNA et Joseph BARBERA, TOM et
JERRY. Si les banques sont de plus en
plus nombreuses à solliciter les
économies des adolescents, cette
campagne ne s'adressait néanmoins pas
directement à cette cible, mais à tout
client, acquis ou potentiel. L'utilisation
de ces deux toons avait pour objectif
d'une part de rompre le sérieux du ton
habituel de la communication bancaire
et d'autre part, de recourir à deux
personnages originaux qui pouvaient
très bien symboliser par leurs qualités,
les rapports entre le CREDIT
LYONNAIS et ses clients. Le cliché
traditionnel veut que le banquier
(TOM) soit toujours après son client
(JERRY) pour lui faire respecter ses
engagements aux échéances prévues.
"Les personnages de TOM & JERRY
ont été choisis pour illustrer la
campagne «Epargne» car ils sont
réputés
pour
leurs
relations
conflictuelles permanentes, mais qui se
terminent toujours en happy-end",
nous précisa Emmanuel GIRAUD,
Responsable du budget à l'agence
INTERMARCO, "ils permettent ainsi
de représenter la relation difficile
«traditionnelle» qui peut exister entre
un client et son banquier, tout en
évitant une trop forte agressivité dans
le message. Le visuel du gruyère
(happy-end) montre l'efficacité du
CREDIT LYONNAIS a bien servir ses
clients quels qu'ils soient". Il ne fut
cependant pas possible d'obtenir
d'informations sur le fait de savoir si ce
très subtil symbolisme fut bien perçu /
interprété par la cible...
Par ailleurs, à l'observation des
nombreux cas d'utilisation, on
s'aperçoit que la publicité n'utilise pas
seulement les stars de la bande
dessinée,
mais
qu'elle
attache
également un certain intérêt au
personnages dits "secondaires". La
raison est double. Ils sont d'une part
souvent plus malléables que les
personnages centraux, et d'autre part,
moins
célèbres,
leurs
droits
d'utilisation sont la plupart du temps
plus abordables.
"De toutes façons, nous ne
voulions pas utiliser TINTIN dès le
début car il était trop marqué par les
albums. Tout l'intérêt de notre choix
résidait dans le fait que le Professeur
TOURNESOL n'était pas la vedette
principale : nous avons donc pu peu à
peu gommer son caractère et le
façonner à l'image de FRUIT D'OR"
expliquait-on chez ASTRA-CALVE4.
On peut également citer le cas de la
CASTAFIORE pour l'automobile GS
CITROEN en Belgique, DAFFY DUCK
pour les entremets FLANDISE, DINGO
pour les yaourts CHAMBOURCY,
Elmer FUDD pour les photocopieurs
CANON, le capitaine HADOCK pour
les paires de jumelles KRYS, Olive pour
la lessive SOLO, Porky PIG pour la
boisson BORDEN,... Tous personnages
__________________
4 - LACHARTRE Alain op. cit. p.39. Voir également en
annexes l'analyse du cas TINTIN, page 639.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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132
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
secondaires,
mais
facilement
"rattachables" aux aventures d'une star
de la bande dessinée.
Création de personnages "célèbres"
Enfin notons le cas de
personnages de la bande dessinée ou du
cartoon qui, créés par et pour la
publicité, devinrent eux-aussi célèbres.
Parce que parfaitement intégrés dans
leur champs de communication et dans
notre univers de consommation, et
surtout parce que ne bénéficiant pas
d'aventures extra-publicitaires, ils sont
moins présents dans nos esprits.
Pourtant ils n'en demeurent pas moins
des stars de la bande dessinée ou du
dessin animé conçues et utilisées à des
fins publicitaires. Le cas des céréales
par exemple est extrêmement riche
d'enseignements que ce soit le chien de
CHOCAPIC, l'abeille de LOOPS, la
grenouille de SMACK, le lièvre et la
tortue de CHEERIOS, le singe de
CHOCO POPS, les lutins de RICE
CRISPIES, l'ours de CHOCOS, ou bien
Tony, le tigre de FROSTIES apparu en
1956 et décliné aujourd'hui dans le
monde entier.
"L'avantage est qu'on peut leur
faire dire ce que l'on veut" remarque
Jean-Michel GOUDARD5. En effet, ici
pas d'auteur ou d'ayant droit à qui
l'agence et/ou l'annonceur devront
payer des droits dérivés. De surcroît, ils
sont beaucoup plus faciles à mettre en
scène et surtout à concevoir en
fonction du rôle auquel on les destine.
En revanche, ils n'obtiennent pas
toujours la célébrité à leur première
apparition. Certains n'obtiendront
d'ailleurs jamais la gloire escomptée.
D'autres cependant gagneront la
sympathie du public, deviendront
célèbres telles les stars de cinéma et
leur personnage restera ainsi gravé
dans la mémoire de chacun. Enorme
avantage : conçus pour le produit, ces
personnages ne font que le servir sans
aucun risque de parasitage.
__________________
5 - Jean-Michel GOUDARD, Président de l'International
du groupe de communication ROUX, SEGUELA,
CAYZAC, GOUDARD & Associés Paris. Entretien
accordé en 1987.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
133
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
sympathique père DODU au célèbre
dindonneau,
de
la
bonne
GRAND'MERE qui sait faire un bon café
mais qui est réduite à une expression
packaging aujourd'hui, de GROS
QUICK qui a toujours une énorme envie de
NESQUIK - que les personnages TOM
et JERRY avaient auparavant dégusté
le temps d'une campagne -, de
MONSIEUR PROPRE toujours aussi
propre que l'on peut se voir dedans, de la
tornade blanche d'AJAX, et de bien
d'autres encore, sans oublier bien sûr
une célèbre mamie que l'on n'a jamais
cessé de remercier...
C'est le cas du rondouillard
Bibendum MICHELIN du dessinateur
O'GALOP, du tirailleur sénégalais de
BANANIA, hélas aujourd'hui disparu
au combat publicitaire à la demande
d'intellectuels
africains6,
du
__________________
6 - La légende veut qu'un tirailleur sénégalais, dont
l'histoire ne retiendra pas le nom, ait été évacué vers
l'arrière après avoir été blessé au front en 1917. Recueilli
par un pharmacien de Courbvoie, l'homme prononca la
célèbre expression "Y'a Bon ! après voir goûté un mélange
cacao-sucre-farine de banane que l'apothicaire
commercialisait depuis 1912. C'est alors que ce dernier
eut l'idée de reproduire le visage de son pensionnaire
pour la publicité de son produit dès 1917. Toutefois,
début des années 20, un serviteur noir né du crayon
caricatural de JOLLIOT remplace le tirailleur. Vers 1925,
le tirailleur réapparait pour s'installer définitivement
dans le code graphique de la marque, même si, dès 1984,
sa présence sur le packaging n'est plus que symbolique.
De grands affichistes auront redessiner ses traits : SEPO,
DORLAND, R.L. DUPUY, Hervé MORVAN" "Négripub"
Collectif sous la direction d'Anne-Claude LELIEUR,
Editions SOCIETE DES AMIS DE LA BIBLIOTHEQUE
FORNEY, Paris (1986) p. 145 et suivantes. Voir
également "Na ! de BANANIA : le petit déjuner espiègle"
Patrick HAAS, LE FIGARO ECONOMIE du 4 Février
1991. "BANANIA au musée - 80 ans d'art et d'histoire
Née chez PUBLICIS, MAMIE
NOVA, à l'instar de son homologue
torréfactrice, ne fut pas immédiatement
un personnage célèbre de bandes
dessinées. A son origine publicitaire,
elle avait à faire à un garnement célèbre
lui-aussi, qui ne voulait que du MAMIE
NOVA comme dessert. Ce garnement
1912-1992" Collectif sous la direction d'Agnès
DELANNOY, Editions MUSEE ROYBET-FOULD,
Courbevoie (1992). "L'aventure BANANIA" Daniel
BORDET, Editions C.P.C. France, Clamart (1991). Sur
l'évolution et l'actualisation des traits des visages de la
publicité, voir : "The face of advertising" Lucy A. Mc
CAULEY, HARVARD BUSINESS REVIEW Volume 67,
n°6 de Novembre / Décembre 1989, pp. 155-159.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
adulte mais néanmoins hurlant dans sa
chaise pour bébé géante, n'était autre
que le comédien Roger PIERRE,
désopilant dans son interprétation du
bébé capricieux, restée dans la mémoire
de chacun.
Philippe MICHEL7 raconte en
détail cette double naissance : "MAMIE
NOVA a été créée par PUBLICIS.
Lorsque les Laiteries NOVA sont
venues nous consulter [Agence
C.L.M./B.B.D.O.], nous leur avons dit
que PUBLICIS avait tout trouvé de la
promotion de la marque NOVA
lorsqu'il avait mis en scène Roger
PIERRE sur sa chaise, et qui disait
d'une façon débile, très content d'avoir
régressé jusqu'à la chaise du bébé :
«Merci MAMIE NOVA». C'est la raison
pour laquelle je leur ai dit que nous
allions continuer avec «Merci MAMIE
NOVA» ! Ce film avait été jugé trop
atroce, mais «Merci MAMIE NOVA» était
la seule chose dont les gens se
souvenaient. Or, comme ce que l'on
garde en mémoire est ce qui est
pertinent quelque part, c'est donc que
cela apportait quelque chose aux gens.
__________________
7 - Entretien privé accordé le 30 Mai 1988.
Au lieu de ce méfier de la régression à
laquelle les produits laitiers frais
appellent - le retour à l'enfance - je me
suis dit avançons, mais profitons-en
pour rendre à César ce qui est à César.
C'est pas grâce à Maman, c'est pas
grâce à Grand-Maman, c'est grâce à
Mamie NOVA que les enfants sont
contents. Alors que nous n'avions pas
beaucoup d'argent et que nous
cherchions un moyen de rentrer dans la
mémoire, dans le Top of Mind, de façon
très rapide, nous voulions trouver une
idée qui s'intègre immédiatement dans
le discours des foyers. Qu'est ce que
l'on dit à sa Maman quand c'est bon, on
dit : «Merci». Merci qui ? Merci
Maman. Elle est gonflée Maman, parce
que c'est Mamie NOVA qui fabrique, et
le seul mérite qu'elle a eu, c'est de
l'acheter. Alors merci qui ? «Merci
MAMIE NOVA !». Or, la campagne
initiale créée par C.L.M. / B.B.D.O.
n'utilisait pas de personnages réels,
mais un dessin d'une Mamie
imaginaire. En 1984, MAMIE NOVA
récoltait
77%
de
score
de
reconnaissance sur les 18-34 ans8. Trois
ans plus tard, ce score grimpait à 93% !
Mais Philippe MICHEL va
encore plus loin, en proposant à son
client une campagne des plus
surprenantes, et qui faisait de MAMIE
NOVA la véritable star de la
communication. Star qui là-encore
pouvait difficilement porter atteinte au
produit,
puisqu'elle
incarnait
véritablement ce produit : "Et puis, j'ai
__________________
8 - "Affiches de Pub 1983-1985" Philippe BENOIT et
Didier TRUCHOT, Editions CHÊNE, Paris (1986) pp.
36-37.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
135
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
aussi voulu démontrer une théorie de
communication, qui était qu'il fallait
tout faire, sans rien dire. J'avais alors
dit au client que nous allions faire une
campagne d'affichage où l'on ne verrait
ni la marque, ni le produit ! Ah, ils
furent vraiment surpris. Ni la marque,
ni le produit ! Et pendant très
longtemps, il n'y a jamais eu la marque.
Ce sont les gens qui se sont dit euxmêmes : «Merci MAMIE NOVA» Ce sont
eux qui ont découvert eux-mêmes la
réponse9. Le jeux n'était pas bien
complexe, nous l'avions effectivement
rendu plus difficile, en lui cachant son
beau regard, mais plus difficile tu
parles... Alors que PUBLICIS ne s'en
était jamais servi que comme un
personnage publicitaire, nous lui avons
donné une personnalité. Elle a
revendiqué qu'on lui dise merci, et puis
elle a rosi, elle s'est déguisée,..."
Notons enfin, que jamais à court
d'idées,
l'agence
relance
la
communication dès 1987, en mettant en
scène, non plus MAMIE NOVA, mais
ses rivales, les autres Grand-Mères,
puis en 1989, ses petits-fils. Une
nouvelle
fois,
Mamie
NOVA
disparaissait. Mais cette nouvelle
communication un peu trop "décalée"
ne plut pas à la cible. Les campagnes
conçues pour une interprétation au
second degré étaient comprises au
__________________
9 - En 1986, la campagne avec les affiches "pointillés" et
"de dos" n'obtint qu'une mention dans la catégorie
alimentation du Grand Prix de l'Affichage. Mais en 1987,
la campagne avec les affiches "Qui est la plus appétissante
?", "Qui est la plus fraîche ?", "Qui est la plus parfumée ?"
reçut le Prix de cette même catégorie. Voir également sur
la découverte de la révélation par le public : "Allons
z'enfants de la Pub - Nova : le slogan suggéré" Ghislaine
OTTENHEIMER, L'EXPRESS du 5 Avril 1985.
premier degré. Le budget passa alors
dans les mains d'une autre agence, B.L. /
L.B..
Toujours dans le domaine des
produits laitiers, il est un personnage
célèbre qui lui perdure de campagne en
campagne ne cessant de rajeunir au fil
des ans : LA VACHE QUI RIT. Ce
produit des Fromageries BEL a même
été exporté avec succès aux Etats-Unis.
Une idée simple qui a fait son chemin,
et qui fut mise en dessin animé par
l'agence T.B.W.A10.. Sympathique, ce
personnage née en 1927 du crayon de
Benjamin RABIER11 a surpassé les
espérances mises en elle lors de sa
création. Si depuis lors, elle a subi sans
dommage, quelques liftings destinés à
rajeunir et moderniser son image, c'est
qu'elle est bel et bien devenue une star
elle aussi ; véritable symbole de la
marque, immédiatement identifiée par
le consommateur.
Dans les différents exemples
exposés ci-devant, les stratégies
publicitaires
mises
en
oeuvre
__________________
10 - Le concept de la vache-star fut créé en 1984 par
l'agence T.B.W.A. puis décliné de campagne en
campagne. Voir également "La VACHE QUI RIT tourne
U.S." Julie ADES & Cristina ALONSO, STRATEGIES
N°688 du 19 Février 1990.
11 - Alain LACHARTRE, op.cit. p.16.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
136
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
incorporent l'élément de la sympathie,
que confère généralement à chaque fois
à son personnage, l'utilisation de la
bande dessinée ou du dessin animé.
Quoi de plus logique dès lors, que de
faire appel à ces personnages stylisés,
pour être les porte-parole d'une
communication d'Etat généralement a
priori austère. BISON FUTE fut créé
pour que les Français utilisent les
itinéraires bis au départ des vacances,
et GASPI naquit pour faire admettre à
ces mêmes Français, que les économies
d'énergie n'étaient pas ridicules, et qu'il
fallait éviter de GASPIller.
Le samedi 2 Août 1975, plus de
600 km de bouchons paralysèrent le
réseau routier français. Quelques mois
plus tard, le Ministère des Transports
lança BISON FUTE sur le sentier de la
guerre de l'embouteillage12. Annie
POUSSIELGUES13, qui participa à
l'élaboration des deux personnages
raconte que "pour BISON FUTE, il
__________________
existait déjà une opération du nom de
Primevères. L'objectif était déjà de
donner aux Français, avant qu'ils ne
partent en vacances, des informations
sur l'état des routes. L'émetteur était
l'ordinateur
du
Ministère
des
Transports. Notre volonté fut alors
d'essayer de déguiser un peu cet
ordinateur à l'intérieur d'un petit
personnage qui est devenu par la suite,
BISON FUTE. Nous nous sommes alors
dit que ce serait intéressant de créer un
petit personnage sympathique, qui
puisse plaire à la fois aux parents et aux
enfants, qui puisse servir d'illustration
au thème, qui puisse avoir une voix à la
radio, etc. Nous avons fait une
recherche très exhaustive et puis nous
nous sommes dit que l'on partait sur la
piste des vacances. Or, que pourrait-il y
avoir sur la piste des vacances ? Et
pourquoi pas un indien ? Nous avons
donc créé un petit indien. S'est ensuite
posée la question de savoir quel type
d'indien. Parce qu'avant d'obtenir le
petit indien que l'on connaît, il y eut
entre autres, un grand chef Sioux, mais
c'était un peu trop autoritaire. Etant
trop autoritaire, il pouvait être ressenti
comme donnant des ordres, et cela
pouvait poser des problèmes de
perception des messages. Il valait
mieux inciter les gens à écouter les
conseils. Donc, nous avons décidé de
créer un petit indien très sympathique.
Quant au nom, nous sommes parvenus
à BISON FUTE après une recherche de
noms, parce que cela exprimait bien le
concept."
12 - "Le point sur... Bison Futé" Laurent ARTUR DU
PLESSIS et Olivier MICHEL, LE FIGARO du 20 Mai
1989.
13 - Entretien privé accordé le 30 Mai 1988.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Début des années 80, le monde
subit un second choc pétrolier, et
l'heure est aux économies d'énergie. De
même que dans l'exemple précédent,
pas question d'imposer purement et
simplement
aux
consommateurs,
l'obligation de faire des économies
d'énergie. C'est alors que naît GASPI.
"Il fallait créer une imagerie
concernante, c'est à dire qui délivre le
message, et qui soit là aussi, incitateur
mais pas autoritaire." poursuit Annie de
POUSSIELGUES. "Dans la mesure où
c'est un message gouvernemental, vous
ne pouvez pas vous permettre d'être
autoritaire, dans notre pays. S'il est
perçu comme autoritaire, les gens le
contournent immédiatement. Nous
avons alors créé ce petit personnage un
peu trop rond, dont on a dit à l'époque
qu'il ressemblait beaucoup à Raymond
BARRE, avec un entonnoir sur la tête.
L'entonnoir était bien sûr le symbole de
ce qui est débile. Il fallait par
conséquent chasser ce petit personnage
qui était tout bedonnant de son trop
plein de pétrole. Et GASPI, tout
simplement parce que GASPIllage".
Aujourd'hui, le seul reproche
que l'on pourrait faire à ses deux
sympathiques
personnages,
qui
remplirent parfaitement leur mission,
c'est d'avoir disparu trop rapidement
de la communication gouvernementale.
Multiples changements de politiques et
de gouvernements obligent. En 1986,
Joseph DANIEL, ancien Chef du S.I.D.14
commentait que "cette symbolisation
appelle tout naturellement le dessin
__________________
14 - Service d'Information et de Diffusion du Premier
Ministre
animé et une certaine caricature. D'où
le fait que, après 1981, l'Etat ait refusé
ce type de communication jugé
infantilisant." Et Joseph DANIEL de
donner l'exemple de DECIBEL, un
autre petit personnage qui devait
représenter la lutte contre le bruit, et
dont la naissance fut ainsi refusée en
198215.
Aujourd'hui, la surproduction de
pétrole a rendu quelque peu obsolète le
rondouillard GASPI. En revanche, le
personnage de BISON FUTE subit
plusieurs modifications. Si en 1985, le
personnage disparut complément sur la
décision d'un Directeur de la Sécurité
Routière,
sa
tête
réapparut
ponctuellement à partir de 1987 alors
qu'une étude montra qu'il bénéficiait
encore d'un taux de reconnaissance
assistée de 94 % et d'un taux
d'agrément positif de 83%. En 1989, une
peintre indienne émit une protestation
à l'attention du Secrétariat d'Etat
chargé des Transports Routiers. Elle
trouvait que le personnage utilisé
pouvait constituer une insulte envers
un peuple presque disparu,... Le soin lui
fut alors confié de le redessiner. C'est
ainsi qu'une version très réaliste vit le
jour cette année-là, superposée au "O"
du mot "Bison". Malheureusement
nombreux furent ceux qui trouvèrent
que le nouveau personnage ressemblait
plus à celui de la Mère Denis, qu'il
n'illustrait le concept d'origine. En
1990, la Sécurité Routière prit enfin
conscience qu'il était temps d'arrêter
ces modifications successives.
__________________
15 - "L'Etat en marge du Star-System ?" Joseph DANIEL,
ADETEM, REVUE FRANCAISE DU MARKETING
N°108 1986/3 de Mai-Juin-Juillet 1986, pp. 69-70.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Après un appel d'offre public,
six agences furent retenues pour la
dernière étape d'une spéculative qui
visait à concevoir un logo sans
personnage.
Cependant
l'agence
sélectionnée - CARRE NOIR - précisa
qu'il "fallait un personnage déclinable
mais stable ainsi qu'une charte
graphique constante". Le résultat, fut la
version stylisée du personnage qui
apparaît encore en 1992, sur tous les
documents de la Sécurité Routière.
Nous venons de voir, que
l'utilisation d'une célébrité pouvait être
notamment très appréciable lors d'un
lancement de produit. L'impact généré
par le porte-parole permet alors parfois
de se distinguer dans le bruit
publicitaire. Dans ce cas, une fois
repéré par le consommateur, grâce à la
célébrité, il va falloir tout mettre en
oeuvre pour transférer une partie de la
notoriété du porte-parole sur le
produit.
B / Autres fondements
Etre reconnu, séduire et convaincre, pour
déclencher le comportement
On critique souvent l'utilisation
d'une célébrité en publicité, en
indiquant qu'elles ne sont utilisables
qu'à la seule fin de créer de l'impact,
mais qu'elles ne peuvent aller jusqu'au
déclenchement du comportement
d'achat. Nous avons déjà vu dans le
cadre de la section précédente que
cette objection n'était pas réellement
fondée. D'autre part on sait que le
souvenir influence le jugement16. Enfin,
est-il besoin de rappeler que dans leur
étude sur l'efficacité de la publicité,
Robert LAVIDGE et Gary STEINER
placent la technique du "testimonial"
non pas au niveau cognitif, ni même
affectif, mais bien parmi le type de
publicité relevant du domaine conatif17.
Pour s'en convaincre, il suffit de
constater que l'utilisation d'une
célébrité ne répond pas au seul
impératif d'impact, mais que d'autres
fondements peuvent parallèlement ou
même
peut-être
de
manière
intrinsèque, générer l'intérêt de
recourir à un porte-parole célèbre.
1 - Transfert de notoriété
"Tout le monde connaît nos
jouets, mais personne de connaît notre
nom" se plaignait Harold Nizamian
DAKIN, Président de l'entreprise
américaine DAKIN Toys en 1978.
Jusqu'à ce que l'agence MAXWELL
ARNOLD décide d'organiser une
campagne utilisant des célébrités. Les
acteurs Jonathan WINTERS et Vicki
CARR ainsi que le boxeur Rocky
GRAZIANO apparurent quelques
semaines avant les fêtes de Noël. En
utilisant ces porte-parole célèbres,
__________________
16 - Voir notamment : Donald V. MOSER "Does memory
affect judgement ? Self-generated versus recall memory
measures" JOURNAL OF PERSONALITY AND SOCIAL
PSYCHOLOGY Volume 62, n°4, pp. 555-563.
17 - Robert J. LAVIDGE et Gary A. STEINER, op. cit. p.
61.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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139
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
"l'idée était de faire de DAKIN un nom
générique pour les animaux en peluche"
expliqua
alors
Bud
ARNOLD,
18
responsable du budget .
"La star s'est créée au travers de
media une personnalité, une aura. Le
publicitaire va essayer par la
capitalisation de cette aura de greffer
son produit et d'accélérer le
mouvement, la connaissance du
produit, par l'apport de cette
personnalité qui elle a déjà construit
depuis longtemps une aura" analyse
Patrick PHILIPPART19.
Absent de la publicité depuis 4
ans, le quotidien LA CROIX décida de
communiqué à nouveau en 1988, pour
essayer de regagner son lectorat perdu.
"C'est un quotidien qui est très
apprécié
dans
les
milieux
journalistiques mais qui souffre d'un
manque évident de renommée, surtout
parce qu'il est presque diffusé par
abonnement" expliqua alors Evelyne
SOUM, P.D.G. de l'agence AUDOUR,
SOUM, LAURUE / S.M.S.20. Pour
regagner cette notoriété : une grande
campagne d'affichage, déclinée par la
suite en radio et en presse magazine fut
organisée.
Les
deux
célébrités
sollicitées pour cette campagne furent
les
comédiens
Marie-Christine
BARRAULT et Claude RICH. La même
année, dotée d'un budget de 25 MF.,
__________________
18 - "DAKIN gets Cuddly with celebrities" Margaret
LeROUX, ADVERTISING AGE du 19 Juin 1978.
19
- Patrick PHILIPPART, Président de l'agence
CORYPHE. Entretien privé accordé le 11 Avril 1988.
l'agence
MOUILLARD
&
MOUILLARD fut chargée de restaurer
la notoriété de la marque française
d'électroménager ARTHUR MARTIN.
Raoul MOUILLARD expliqua alors
que : "nous ne voulions pas d'un film
lessive. Nous voulions un film drôle et
des acteurs connus. C'est pour cela que
nous avons demandé à Coline
SERREAU de réaliser ces deux films et
de diriger ainsi Marie-Anne CHAZEL
et Claire NADEAU"21.
Les célébrités sont célèbres.
C'est un fait, voire un pléonasme que de
le rappeler. L'intérêt d'utiliser l'une
d'entre elles dans une campagne de
publicité peut donc correspondre à la
volonté d'attribuer au produit une
partie de cette célébrité. Comme nous
l'avons dit, l'objectif est alors d'utiliser
une célébrité pour ensuite essayer de
transférer une partie de sa notoriété en
faveur du produit ou de l'annonceur
qu'elle présente. La tâche est d'autant
plus difficile qu'il n'existe de pas de
procédé mécanique simple et infaillible
permettant d'y parvenir. Si comme
l'impact, ce résultat est recherché
depuis que l'on utilise des célébrités en
publicité, contrairement à l'impact, il
n'est pas automatique. Nombreux sont
les annonceurs qui ont marier leur
produit avec une star, sans que ce
mariage d'intérêt ne produise de
résultats en faveur du produit.
Pourquoi ? Tout simplement
parce que le procédé de transfert entre
parfois en opposition avec le processus
d'impact. Pour avoir de l'impact, il est
__________________
20 - "LA CROIX part en Croisade" Etienne DUBOIS,
21 - "ARTHUR MARTIN fait son cinoche" Véronique
STRATEGIES N°591 du 18 Janvier 1988.
DHAM, STRATEGIES N°589 du 4 Janvier 1988.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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140
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
nécessaire de se faire remarquer, de
mettre la célébrité en valeur de manière
à ce qu'elle attire l'attention du
consommateur. Or, de son côté, le
transfert de notoriété requiert une
présence de la célébrité qui soit
suffisamment discrète, pour que, une
fois l'attention du consommateur
attirée, celle-ci se porte non sur le
porte-parole22, mais sur le nom du
produit ou de l'annonceur. L'art du
publicitaire devra alors s'exercer pour
doser cette apparition de la célébrité de
manière à concevoir un scénario au
profit du produit et non de son porteparole. L'objectif sera de rendre plus
facile la mémorisation par le
consommateur, du message présenté
par une célébrité, qu'un message
présenté par un consommateur type ou
utilisant toute autre approche.
En 1987, la société AMERICAN
CAN qui recentrait ses activités dans
les services financiers décida de
changer de nom pour s'appeler
désormais PRIMERICA. Elle contacta
alors son agence de publicité
__________________
22 - "En moyenne, les films publicitaires construits autour
de célébrités ne permettent pas assurément un
changement de marque ; les consommateurs
reconnaissant un changement influencé par un film
utilisant une célébrité, étaient 21% de moins que la
moyenne des changements tous films confondus. En
revanche, lorsqu'ils sont observés sur la capacité du
téléspectateur à se souvenir d'un message, 24 heures
après l'avoir vu, ces films obtiennent des scores de 22%
supérieurs à la moyenne. Pourquoi cette différence de 21% et +22% entre la préférence d'une marque et le
souvenir ? Nous soupçonnons que c'est parce que la
plupart de ces messages concentre l'attention sur la
célébrité plutôt que sur le produit." David OGILVY et
Joel RAPHAELSON, "Research on advertising techniques
that work - and don't work" HARVARD BUSINESS
REVIEW de Juillet / Août 1982, p. 15.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
MARQUARDT & ROCHE pour que
celle-ci lui soumette divers projets
visant à transférer la notoriété de
AMERICAN CAN sur PRIMERICA
dans les meilleures conditions. Budget :
3 millions de dollars.
Sur les différentes solutions
envisagées, l'annonceur retint celle
mettant en scène une célébrité pour
créer le lien nécessaire à ce transfert.
L'agence contacta alors Michael
WAYNE qui gère la succession de son
père pour obtenir l'autorisation
d'utiliser une photo du plus célèbre
cow-boy des Etats-Unis : John
WAYNE. En raison du fait que Michael
WAYNE
n'accorde
que
très
difficilement et judicieusement cette
autorisation23, John WAYNE est
aujourd'hui légalement très peu utilisé
par la publicité, et dispose ainsi d'un
impact important. Quant à sa notoriété,
chaque Américain a au moins une fois
dans sa vie, vu l'un de ses films, et la
cible des professionnels visés avait elle
grandi avec ses multiples aventures sur
le grand écran.
L'idée fut d'associer le cas
personnel de l'acteur à celui de la
société. En effet, John WAYNE
s'appelait en réalité Marion Michael
MORRISON. Il avait lui-même changé
de
nom
pour
des
raisons
24
professionnelles . A la sortie de la
__________________
23 - "Wayne heirs OK straight-shooting Primerica pitch"
Nancy ZELDIS, ADVERTISING AGE du 1er Juin 1987.
24 - John WAYNE est crédité pour la première fois au
générique d'un film en 1929. Il est figurant dans une
comédie musicale Words and Music et utilise alors le nom
Duke MORRISON. Après quelques autres films avec
John FORD, il est remarqué par le metteur en scène
Raoul WALSH. Celui-ci prépare un western The Big Trail
141
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
campagne, Ed ROCHE, le Directeur de
Création de l'agence déclara au
magazine Advertising Age : "Ce qui nous
frappa fut le nom de Marion, ça ne
correspond tout simplement pas à un
héros de western, de la même manière
qu'une compagnie qui propose
désormais des services financiers ne
correspond pas à l'appellation "can"
[boîte de conserve en anglais]"25.
Cette même approche avait déjà
été utilisée en 1985 par l'agence
FALLON MAC ELLIGOT pour les
pizzas PONTILLOS qui souhaitaient
changer de nom pour DAVANNI'S. La
campagne avait alors utilisé comme
porte-parole : JOHN WAYNE (exMarion MORRISON), Jean-Paul II (exKarol WOJTYLA) et Boris KARLOFF
(ex-William PRATT). La même idée
fut ensuite reprise en 1989 par le
disposant d'un gros budget. Toutefois, Gary COOPER
ayant décliné la proposition du rôle titre, Raoul WALSH
décide d'économiser le cachet d'une star pour l'utiliser au
profit de scènes en extérieur. Il engage alors un inconnu,
Duke MORRISON, sur le conseil de John FORD. C'est
alors que les Directeurs de la FOX décident de lancer à
grands renforts de publicité, une nouvelle star nommée
John WAYNE, nom pour lequel l'intéressé n'a jamais été
consulté... Voir notamment : "John Wayne and the
movies" Allen EYLES, Editions A.S. BARNES and Co.
Inc., New York, Etats-Unis (1976).
25 - L'annonce fut insérée dans THE WALL STREET
JOURNAL,
BUSINESS
WEEK,
FORBES,
INSTITUTIONAL
INVESTOR,
BARRON'S,
FINANCIAL TIMES, INVESTOR'S DAILY, THE NEW
YORK TIMES, USA TODAY et quelques autres
publications sélectionnées. Aujourd'hui en raison de son
succès, le changement de nom d'AMERICAN
NATIONAL CAN en PRIMERICA est devenu un cas rédigé par Norman KLEIN et Stephen A. GREYSER étudié à la HARVARD BUSINESS SCHOOL case # 588066, "Cases in advertising and communications
management" Stephen A. GREYSER, Editions
PRENTICE-HALL, 3ème édition, Englewood Cliffs, NJ,
Etats-Unis, (1992) pp. 119-140.
groupe 3M, lorsque sa filiale
HARRIS/3M pris le nom de LANIER.
Quatre célébrités furent utilisées : les
acteurs Boris KARLOFF à nouveau,
Judy GARLAND (ex-Frances GUMM),
W.C. FIELDS (ex-William Claude
DUKENFIELD) et le chanteur Chubby
CHECKER (ex-Ernest EVANS). De
nombreuses études ont montré qu'au
delà des rapports d'associations
consuméristes, du gouvernement, ou
encore de la simple et néanmoins
puissante
information
verbale
transmise par un proche, la marque
était l'un sinon le critère le plus
discrimant dans le processus d'achat26.
La notoriété et l'image de celles que l'on
appelle les "grandes" marques fait
souvent bien plus que n'importe qu'elle
publicité, destinée en définitive à
entretenir cette notoriété et cette
image. L'utilisation d'une célébrité est
alors une solution pour les suiveurs ou
les challengers pour accroître leur
propre notoriété, par une opération
publicitaire de transfert.
En France, en 1986 les magasins
de
Télévision
Hi-Fi
Vidéo
CONNEXION déclarèrent à leur
agence de publicité, leur volonté
expansionniste.
Pour
cela,
ils
nécessitaient une plus forte notoriété
auprès de leurs clients potentiels,
notamment pour se faire une place
entre DARTY et la FNAC. Quelques
mois plus tard, Serge GAINSBOURG
__________________
26 - Voir notamment : "Consumer ranking of risk
reduction methods" Ted ROSELIUS, JOURNAL OF
MARKETING 35, du mois de Janvier 1971, pp. 56-61. ou
encore "The world of goods" Mary DOUGLAS et Baron
ISHERWOOD, Editions BASIC BOOKS, New York,
Etats-Unis, 1979, pp. 75-76.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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142
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
affirmait haut et clair : "CONNEXION :
Des mecs qui en ont"27. Enorme impact,
engendrant un surcroît de notoriété de
l'enseigne, générant un trafic important
et redynamisant la croissance.
Pour expliquer le transfert de
notoriété du personnage de Serge
GAINSBOURG, Hervé LESUR28 alors
en charge du budget, expose le
raisonnement qui l'a amené à solliciter
à nouveau le concours du seul homme à
avoir osé brûler Pascal en direct à la
télévision, en plein prime time: "Nous
détenons le budget CONNEXION
depuis longtemps. On est parti de la
campagne de 1986 : «Des Mecs qui en
ont» et on est arrivé sur cette campagne
: «Pour l'innovation, je connexionne».
Le seul link, le seul point commun, c'est
GAINSBOURG. «Les mecs qui en ont»
est une campagne qui a fonctionné
début 1986, et qui a bien fonctionné car
la marque CONNEXION s'est fait
connaître grâce à la provocation verbale
et grâce à GAINSBOURG. Cela a bien
marché puisqu'il y a eu 35 %
d'augmentation des ventes dans les
magasins".
Le transfert de notoriété de la
célébrité vers la marque avait
parfaitement fonctionné. S'est ensuite
__________________
27 - "Serge GAINSBOURG : de pubs en pubs..." Philippe
LATIL, COMMUNICATION CB NEWS N°203 du 11
Mars 1991. "Serge GAINSBOURG était un vecteur
intéressant pour toucher notamment la cible des 15-25
ans" in "Connexion s'attaque à DARTY" Chritine
RICHARD, LE QUOTIDIEN DE PARIS du Lundi 21
Octobre 1985.
28 - Hervé LESUR, Directeur de la Création, associé de
l'agence COLLETTE, LESUR, DE
Entretien accordé le 20 Janvier 1987.
SAINT-ALIRE.
posé le problème des campagnes
suivantes, pour savoir s'il fallait
capitaliser sur l'image de Serge
GAINSBOURG en continuant ce
transfert ou au contraire changer
complètement d'axe. "Pour la nouvelle
campagne on s'est posé la question de
savoir si on devait reprendre
GAINSBOURG ou bien choisir
quelqu'un d'autre. Il est évident qu'on
avait intérêt à garder GAINSBOURG,
parce que c'était un personnage qui
nous avait bien aidé l'année précédente,
qui a priori, a un jeu cohérent avec
l'innovation et qui est une personnalité
qui ne laisse pas indifférente, car il est
haï par 90 % de la population. Mais au
moins, il existe dans la tête des gens."
Le décès de la star interrompit son
utilisation.
CONTEL est une importante
société américaine spécialisée dans le
secteur des télécommunications. Mais
qui la connaissait avant de rencontrer
une publicité sur laquelle figurait
l'acteur Charlton HESTON ? D'aucuns
diront qu'après tout peu importe,
puisque l'on n'appartient certainement
pas à la cible... En revanche, en 1985 il
devint évident à son vice-Président
Norm BRUST, que CONTEL était
également très peu connue de sa cible !
Et là, le problème prenait forme. D'où la
décision de créer cette année là, un
véritable département communication.
"Il n'y avait rien pour notre équipe de
vente ou nos clients sur quoi accrocher
leur chapeau" nous précisa avec
humour
David
A.
BROOKS,
Responsable
du
département
Communication, "Aucun hameçon si
vous
préférez.
Il
apparaissait
clairement
que
si
CONTEL
ambitionnait d'occuper une niche dans
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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143
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
un environnement non-régulé, nous
avions besoin de cet hameçon."
L'une des solutions était alors de
solliciter une célébrité et d'essayer de
transférer rapidement un peu de la
notoriété de son nom, de son image, sur
celui de la société. S'adressant au grand
public comme aux professionnels,
encore fallait-il trouver une célébrité
dont le sérieux et la réputation pourrait
en faire un porte-parole permanent et
non le jouet d'une simple annonce qui
mettrait CONTEL en valeur l'espace de
quelques heures ou quelques jours.
"Monsieur HESTON apporta à notre
compagnie
un
comportement
professionnel et digne, à la manière
d'un homme d'Etat" poursuivit David
A. BROOKS, "un comportement auquel
bien sûr, nous étions heureux d'être
associés. Sa réputation et le taux de
reconnaissance de son nom furent et
demeurent extraordinaires. Quelle
meilleure image pouvions nous utiliser
dans un marché en expansion !". En
Janvier 1988, une étude fut menée par le
Wall Street Journal, sur la communication
de la société CONTEL. Il s'avéra que
34,8 % des lecteurs étaient familiers
avec CONTEL alors que ce taux
atteignait 15,8 % avant la publication
de la nouvelle campagne avec Charlton
HESTON, qui ne dura que 16 mois.
Notoriété transférée, opération réussie.
Cette mise à profit de l'impact
de la célébrité, doit non seulement
permettre l'attention de l'audience en
faveur du film, mais une amélioration
de la notoriété de la marque ou du
produit. Dans certains cas particuliers,
il est également possible de solliciter
directement la caution de la célébrité.
2 - Utiliser la caution de la célébrité
Nous sommes ici dans le cas où
le témoignage du porte-parole célèbre
est si puissant qu'il devient une
véritable caution en faveur du produit.
L'objectif est alors double. Il s'agit non
seulement de transférer une partie de la
notoriété de la célébrité en faveur du
produit, mais d'opérer également un
transfert d'une partie de son image.
Toutes les célébrités ne peuvent bien
entendu prétendre à cet exercice, et
cette approche dépend essentiellement
de la crédibilité de la célébrité, perçue
par l'audience.
Lorsque le pilote automobile
Bernard DARNICHE accepte de poser
pour les publicités HAIRSKIN, il
cautionne directement la marque de
postiches et de soins capillaires tout
simplement parce qu'il est un
utilisateur naturellement convaincant
du produit. Ainsi, pour se libérer de
diverses contraintes ou de diverses
connotations négatives qui pourraient
être associées au produit en rendant
plus puissante la communication, le
publicitaire peut parfois rechercher
chez la célébrité, un témoignage
maximisant l'implication du porteparole. De manière à obtenir une
véritable caution. Il faut toutefois noter
que cette caution n'est possible que si
la crédibilité du témoignage est
immédiatement perçue par la cible.
Dans le cas contraire, l'impact généré
par le porte-parole jouera en la défaveur
du produit, l'associant à une tromperie
dans l'esprit du consommateur. Il est
donc nécessaire que le lien quel qu'il
soit avec le produit soit évident. C'est
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
144
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
pourquoi,
c'est
très
souvent
l'expérience du porte-parole qui sera
mise à profit.
L'approche est très ancienne.
Dans les années 30, le LINGUAPHONE
INSTITUTE,
utilisait
déjà
le
témoignage des plus grands linguistes
et des plus célèbres écrivains de
l'époque, pour attester de la qualité de
son enseignement des langues. De H. G.
WELLS à Bernard SHAW en passant
par MAETERLINCK ou encore le
Président de l'Académie Goncourt de
l'époque, J.-H. ROSNY,... tous par leur
témoignage d'hommes de lettres
renommés venaient cautionner les
propos tenus par l'Institut.
En 1992, en France, l'agence
GREY lança un nouveau produit via un
film télévisé de trente secondes.
L'objectif était d'introduire sur le
marché français, un substitut de repas
lancé aux Etats-Unis dans les années
70, SLIM-FAST. Cas intéressant car,
ayant obtenu le visa PP délivré par le
Ministère de la Santé29, il s'agissait de
la première publicité télévisée en
France, pour ce type de produit. S'il est
fait le choix de recourir à une célébrité,
au regard du produit, c'est pour que
celle-ci puisse faire la preuve de son
efficacité. En effet, un porte-parole
célèbre revêt ici un avantage certain.
Etant connu du consommateur
__________________
29 - "Première pub télé pour un substitut de repas"
Emmanuel FRADET-VANANTY et Isabelle TERRAY,
COMMUNICATION CB NEWS du 27 Avril 1992.
Malgré l'attaque de divers concurrents, Ultra Slim Fast
détenait aux Etats-Unis, au début de l'année 1992, 88%
de parts de marché. "NESTLE targets dieters with new
chocolate fix" Bradley JOHNSON, ADVERTISING AGE
du 24 Août 1992.
auparavant, celui-ci sera à même de
constater de l'efficacité du produit.
Alors que le doute subsistera toujours
avec l'utilisation d'un consommateur
type, inconnu de la cible auparavant.
L'agence GREY, également
détentrice du budget aux Etats-Unis a
depuis longtemps recours à diverses
célébrités
connues
pour
leur
embonpoint préalable. Ainsi, l'acteur
Peter De LUISE, les sportifs Dan
DIERDORF et Tommy LASORDA, le
chanteur Mel TORME, les animatrices
Oprah WINFREY, Kim FIELDS et
Christina FERRARE ainsi que l'ancien
Maire de la ville de New York Ed
KOCH apparurent preuve à l'appui
dans la communication de SLIM-FAST
puis de ULTRA-SLIM-FAST, plus
récemment. En France, c'est l'actrice
Marie-Christine BARRAULT qui fut
retenue pour le lancement du produit le
Lundi 26 Avril 1992. Il fallait que ce soit
une femme, notamment en raison du
fait que si le produit à déjà conquis plus
de 30 millions d'Américains, les
consommateurs séduits sont à plus de
70 % des consommatrices. Filmée par
Roger
VADIM,
la
comédienne
présentait au téléspectateur une
photographie
d'elle-même
avant
l'utilisation du produit, puis détaillait
son mode d'utilisation ainsi que les
raisons de son efficacité. La caution
était alors crédible de visu.
Les stars du cinéma sont par
ailleurs reconnues pour les régimes
drastiques que leur imposaient
(imposent ?) les producteurs, ce qui
ajoute à la puissance du message. Le
dernier avantage de recourir à une
célébrité
pour
un
produit
"amaigrissant" est également de
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
145
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
déculpabiliser en partie son utilisation.
Pour s'imposer sur le marché des
édulcorants, dans les années 40 puis 50
aux Etats-Unis, AYDS n'hésita à
solliciter le concours de stars telles que
Sonja HENIE, Paulette GODDARD,
Joan BENNETT, Yvonne De CARLO,
Hedy LAMARR, Corinne CALVET,
Anita EKBERG, Mona FREMAN,
Maureen O'SULLIVAN ou Ann
SHERIDAN. A partir de 1983,
WEIGHT WATCHERS eut recours à
l'actrice Lynn REDGRAVE30 sur les
conseils de son agence D.D.B..
Il
peut
être
également
intéressant de recourir à la caution
d'une célébrité lorsque le produit est un
bien anomal, c'est à dire qu'il dispose
d'un prix élevé et que son l'achat
nécessite réflexion en raison de ses
caractéristiques. L'objectif est alors de
faciliter son acceptation par le
consommateur. Rien ne s'y oppose en
théorie, toutefois, il devient capital,
voire impératif, qu'un lien fort et
indiscutable existe alors entre le
produit et le porte-parole célèbre.
Ce fut souvent le cas des
appareils photographiques. Dans ce
cas, deux méthodes sont en général
employées. La première consiste tout
simplement à solliciter le témoignage
d'un
photographe
célèbre31, de
préférence également connu pour
__________________
30 - Quatre ans plus tard, WEIGHT WATCHERS
attribuait lui-même à cette campagne une grande partie
de son succès. "WEIGHT WATCHERS gaining HEINZ
unit builds share as it leans on STOUFFER" Judann
DAGNOLI, ADVERTISING AGE du 13 Juillet 1987.
31 - "Nec plus Leica, vulgum pecus non est" Olivier
LAMOUR, STRATEGIES n°561 du 11 Mai 1987.
utiliser personnellement la marque
d'appareils. Le choix du porte-parole
dépendra alors de la cible que l'on
souhaite atteindre. Plus celle-ci sera
large,
plus
la
renommée
du
photographe devra être importante,
voire universelle. Ce fut par exemple le
cas de la marque PENTAX, qui utilisa
en 1975 le concours de Jacques-Henri
LARTIGUE, pour son modèle ASAHI
ESII. Plus de 70 ans au service de la
photographie et des réalisations
exceptionnelles conféraient à l'un des
plus célèbres photographes du monde,
une expérience incontestable aussi bien
auprès des amateurs que des
professionnels et cautionnait ainsi le
choix de PENTAX.
La seconde approche, plus
fréquente, consiste à parfaire cette
caution avec une illustration du travail
du photographe avec le matériel
présenté. Ce fut par exemple le cas la
même année, de la campagne pour les
appareils NIKON, dont le célèbre
photographe Helmut NEWTON fut
l'un des protagonistes. Certes, une
discrète photographie du professionnel
figurait sur l'annonce au regard des
éléments de son témoignage, mais
surtout, l'appareil faisait face à une
photo prise par Helmut NEWTON
avec son propre NIKON.
Cas original, HASSELBLAD eut
également recours à cette stratégie
pour sa communication internationale,
en sollicitant des célébrités du support
sensible pour photographier d'autres
célébrités telles que Debbie HARRY
photographiée par Michael KENNEDY,
Karl LAGERFELD par Patrick JACOB,
FAYE DUNAWAY par Terry O'NEILL,
Frank ZAPPA par Lynn GOLDSMITH,
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Johnny CASH par Dmitri KASTERINE,
Chrissie HYNDE par Linda Mc
CARTNEY, Anne-Sophie MUTTER
par Christian VOGT, Esa-Pekka
SALONEN par Tuija LINDSTRÖM,
Ingemar STENMARK par Hans
GEDDA ou Grace JONES par Greg
NORMAN, par exemple. Compte tenu
du grand nombre de célébrités ayant
accepté le principe de la campagne, il
était tout à fait possible de la décliner
dans chaque pays avec des célébrités
spécifiques et plus adaptées. C'est ainsi
qu'apparurent notamment en France
Isabella ROSSELLINI et Paul BOCUSE.
Notons, parallèlement à ces
deux approches, celle adoptée par la
non moins célèbre marque LEITZ en
1987, pour son appareil LEICA R5. Elle
utilisa
la
caution
non
d'un
photographe,
mais
du
fameux
explorateur Robert SWAN de retour
de son expédition au pôle Sud. Celui
qui venait de marcher sur les traces du
Capitaine SCOTT témoignait que,
compte tenu des conditions naturelles
extrêmes, il avait besoin du "meilleur
appareil". Pas question une fois sur
place d'avoir "une seconde chance". Là
encore, le cautionnement technique
était total. Dès lors, on s'aperçoit que
dans la plupart des cas de caution, c'est
une expérience qui est mise à profit
pour illustrer cette caution au yeux de
la cible. Nous reviendrons sur ce point
plus en détail, sous l'angle de
l'expérience dans le chapitre suivant.
Enfin, remarquons un dernier
cas de caution "indirecte" original.
Celui de la comédienne Denise GREY
dans la campagne de l'agence DASSAS
JAGLIN pour son client JAVEL PLUS
LA CROIX, en 198732. Ces dernières
années, à diverses reprises la
comédienne avait interprété le rôle
d'une grand-mère dynamique et restée
intellectuellement très jeune. Or, cette
interprétation correspondait si bien à la
comédienne elle-même, qu'elle lui valut
une énorme notoriété en tant que telle.
Par ailleurs, chacun sait la grande
expérience
que
l'on
reconnaît
implicitement à une grand-mère en
matière de bons gâteaux ou de linge
bien lavé. Il suffit de se remémorer les
évolutions de la sympathique Mère
DENIS exposées précédemment, pour
sans
convaincre.
D'ailleurs,
la
comédienne utilisée dans un scénario
de fiction n'apportait pas la caution de
Denise GREY - dont la connaissance
d'un produit comme l'eau de Javel
aurait pu être discutable -, mais celle
d'une grand-mère se rendant à
l'improviste chez sa petite-fille.
Scores IPSOS
film Denise Grey - Javel plus
Impact
. Score brut
. Score spécifique
. score prouvé
. Score de reconnaissance
Agrément
. Positif
. Négatif
. Indifférent
Juin 1987
67
58
59
78
89
5
6
"Film de Pub"
Philippe BENOIT, Patrick LE BRIGAN, Didier TRUCHOT
Editions GALLIMARD, Paris (1988) p. 108
Bien que très indirecte, la
caution de la star, servie par
__________________
32 - "Lessieur lance JAVEL Plus" Philippe COLL,
STRATEGIES n°547 du 2 Février 1987.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
147
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
l'exploitation d'un scénario original,
reçut des scores IPSOS d'agrément
positif assez exceptionnels, avec 89%
chez les femmes, mais surtout de 94%
chez les femmes de plus de 35 ans,
d'après une source annonceur !
Dans certains cas, la caution de
la célébrité peut être beaucoup plus
spontanée et l'on peut alors espérer que
ce lien naturel déclenche plus
facilement encore la crédibilité du
message aux yeux de la cible. C'est le
cas d'une adéquation stratégique.
3 - Mise à profit d'une adéquation
stratégique
Pour être sûr de donner des
résultats dépassant le simple stade de
l'impact, la célébrité doit permettre de
tirer
profit
d'une
adéquation
stratégique
perceptible
par
le
destinataire de la communication.
Dans cette optique, la principale
question que doit alors se poser
l'agence de publicité est : "Quel est le
lien entre la célébrité et le produit ou
l'annonceur
?".
Existe-t-il
une
quelconque adéquation stratégique
entre le produit et ce porte-parole
célèbre ? "Quand le personnage est en
parfaite adéquation avec la stratégie de
la campagne, c'est un accélérateur de
mémorisation. Le problème est que
souvent c'est mal utilisé, il y a un
manque d'idée à la base." note Jacques
HENOCH33 du groupe BELIER.
"Quand le personnage est adapté au
__________________
33 - Entretien privé accordé le 17 Avril 1988.
sujet, il devient témoin de la qualité du
produit. Lorsqu'il n'est pas adapté, le
personnage fait de l'ombre au produit,
il le phagocyte" indique Jean-Charles
BENCHETRIT34.
Cette adéquation célébrité /
produit fut souvent et est encore
parfois négligée, parce que la célébrité
est
très
souvent
recherchée
uniquement pour son simple impact.
Mais dans la plupart des cas, il s'agit
d'une grave erreur, dont le produit finit
toujours par payer les conséquences en
termes de résultats commerciaux.
L'adéquation stratégique est le lien
incontournable entre l'impact et la
crédibilité. Or, c'est la plupart du
temps cette crédibilité du message, qui
permettra de détourner l'attention du
consommateur de la célébrité vers le
produit. Le message est crédible, son
objet devient alors centre d'intérêt.
L'adéquation en question peut
revêtir plusieurs formes. La première et
bien entendu la plus recherchée, car la
plus facilement perceptible par le
public, est l'adéquation directe
célébrité / produit.
Š Adéquation avec le produit
L'utilisation de sportifs célèbres
pour des matériels, des accessoires ou
des vêtements de sport est l'une des
illustrations traditionnelles. C'est par
exemple en 1988, l'utilisation du
tennisman Miloslav MECIR pour
__________________
34 - Jean-Charles BENCHETRIT, P.D.G. de l'agence
B.C.R.C.. Entretien privé accordé le 23 Septembre 1988.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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148
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
présenter les chaussures de tennis
REEBOK. Le porte-parole était alors
champion de tennis, REEBOK fabrique
des chaussures de tennis, le porteparole sollicité utilisait ces chaussures
pour jouer au tennis,... l'adéquation
existe naturellement. On retrouve ce
cas d'adéquation directe entre un
écrivain et un stylo, par exemple.
Lorsque BIC Etats-Unis utilisa à la fin
des années 80, le témoignage des
écrivains à succès Robert LUDLUM et
Ken FOLLETT pour son stylo à bille
BIC METAL POINT ROLLER, il y avait
adéquation stratégique entre le produit
et la célébrité.
Lorsque l'acteur américain
Walter PIDGEON vantait les mérites
des portails et grillages WALTER
PIDGEON STEEL, que Polly BERGEN
conseillait l'utilisation les cosmétiques
TORTUE, que Jean-Claude KILLY
présentait les anoraks KILLY, que
Gérard PELISSON ou Paul DUBRULE
exposent les résultats du groupe
ACCOR, que Bernard TAPIE explique
les activités du groupe B.T.F., ou que
Lee IACOCCA35 recommande l'huile
__________________
d'olive Villa NICOLA, leur message est
également crédible, car leur adéquation
stratégique au produit provient du fait
qui sont les managers des entreprises
qui sont mises en avant.
Š Adéquation avec l'axe de la campagne
Mais cette adéquation directe
avec le produit est parfois difficile à
obtenir en fonction du produit. On
peut alors rechercher une adéquation
avec l'axe et/ou le ton de la campagne.
En
1988,
l'animateur
Frédéric
MITTERRAND avec son élocution
caractéristique fut ainsi utilisé pour la
communication des automobiles OPEL.
Le discours de la publicité automobile études marketing visant à définir le
véhicule idéal qui conviendra au plus
grand nombre obligent - se différencie
peu d'une marque à l'autre, sur des
segments identiques. L'objectif de
l'agence Mc CANN ERICKSON n'était
pas du tout de présenter Frédéric
MITTERAND comme le conducteur
idéal de voitures OPEL, mais
simplement
d'associer
l'élocution
particulière de la célébrité au ton de la
campagne.
35 - "IACOCCA acts like Paul NEWMAN" Laurie
KRETCHMAR, FORTUNE INTERNATIONAL, Volume
126, N°2/15 du 27 Juillet 1992.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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149
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Ainsi, cette adéquation célébrité
/ produit peut être indirecte. La même
année, les bouillons cube KNORR
utilisèrent le chanteur compositeur
Pierre PERRET. Par ailleurs connu
pour son goût pour la bonne cuisine et
auteur du Petit PERRET Gourmand, il
existait un lien, entre le produit et la
star. Pierre PERRET fut également
utilisé quelques mois plus tard par les
chaudières E.L.M. LEBLANC1. Là aussi,
il existait une certaine adéquation, en
raison du succès de la chanson de
Pierre PERRET, Le plombier, qui lui reste
attachée et implicitement mise en
avant.
C'est également ce que fit
l'agence
américaine
COMPTON
2
Advertising en 1984 . L'un de ses
clients - la compagnie financière
PAINE WEBBER lui avait demandé de
concevoir un film mettant en scène le
tennisman dont elle était le sponsor.
Or, il n'y avait a priori pas de lien entre
Jimmy
CONNORS
et
PAINE
WEBBER. Certes, une utilisation
traditionnelle aurait été de présenter le
sportif comme utilisateur des services
financiers de la société. Mais pour se
démarquer de cette solution de relative
facilité, COMPTON choisit d'utiliser
une adéquation avec l'axe de la
communication. Cet axe était que
vouloir investir tout seul était comme
__________________
1 - Voir notamment : "La communication Business to
de vouloir jouer seul au tennis contre
Jimmy CONNORS. Et le film de
présenter un cours de tennis avec d'un
côté le sportif, de l'autre la
reproduction d'un bureau de la
compagnie et ses employés, à même le
cours. Bien entendu, malgré ses efforts,
Jimmy CONNORS, seul, ne parvenait
pas à gagner ce match des plus
insolites.
En 1981, la collective pour les
avocats de Californie décida de faire
appel à une star pour bénéficier de son
impact. Dans le cas d'un produit de
grande consommation comme l'avocat,
il est difficile de trouver une star en
adéquation avec le produit ou même
représentative de la cible ; cette
dernière est par trop hétérogène. De
plus, en plein dans la vague santé et
respect du corps, qui commençait à
submerger les Etats-Unis, la collective
souhaitait communiquer sur ce thème.
Il fallait donc choisir une star qui
puisse évoquer cet axe de la
communication. La sculpturale Angie
DICKINSON
correspondait
parfaitement à cette stratégie qui
consistait à vanter la faible teneur en
calories de l'avocat3.
En 1988, les automobiles
MERCEDES-BENZ
confièrent
à
l'agence Philippe LORIN le soin de
réaliser une campagne pendant le
Festival International du Film, à
Cannes. Chaque jour, une annonce
paraissait dans Globe, quotidien de
circonstances.
Après
quelques
Business" de Pierre SIQUIER, Editions DUNOD, Paris,
1990, pp. 59-60.
__________________
2 - "2 chefs-d'oeuvre d'opportunisme" Anonyme, MEDIAS
3 - "DICKINSON dresses up avocado ads" Anonyme,
n°83 du 10 Septembre 1984.
ADVERTISING AGE du 29 Septembre 1980.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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150
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
recherches dans la photothèque privée
de
MERCEDES-BENZ,
Philippe
LORIN finit par extraire différentes
photos en noir et blanc, parfois
dédicacées, sur lesquelles diverses stars
apparaissaient au volant ou aux côtés
de leur voiture, une MERCEDES bien
sûr4 ! L'accroche de la campagne
"MERCEDES aime le cinéma, le cinéma
aime MERCEDES" ainsi que le moment
de son exploitation définissent à eux
seuls l'axe et le ton de la campagne. Les
stars apparaissaient dès lors comme des
porte-parole idéals. Zsa Zsa GABOR,
Lilian HARVEY, Anita EKBERG,
Sophia
LOREN,
mais
aussi
FERNANDEL,
Hardy
KRUGER,
Charles AZNAVOUR, Gary COOPER
et Yul BRYNNER illustrèrent cette
superbe campagne. Remarquons que
les photos n'étaient pas simplement
choisies en fonction de stars mais
également de la voiture. Ainsi, les
différents modèles présentés étaient-ils
également sélectionnés pour montrer
que depuis toujours, les stars aiment
MERCEDES. Pour l'anecdote, on
regrettera que l'agence n'est pas utilisé
ou retrouvé la célèbre photo d'Alfred
HITCHCOCK, au volant de son coupé
MERCEDES et promenant Leo5, le lion
de la M.G.M. assis à ses côtés.
__________________
4 - Voir également : "Cars of the stars : How auto-loving
celebs stylish commute between camera sessions" Jean
LEWIS, Special report, ADVERTISING AGE du 25
Juillet 1988.
5 - Lorsqu'en 1924 les compagnies METRO, GOLDWYN
Pictures et Louis B. MAYER Pictures fusionnèrent, Leo le
lion, emblème de la GOLDWYN Pictures, fut conservé en
raison de son symbolisme fortement encré dans l'esprit
des spectateurs. Il avait été imaginé quelques années
auparavant, par le Responsable de la publicité du studio,
Howard DIETZ, qui devint Chef de la publicité de la
M.G.M..
Š Adéquation avec la cible du produit
Il est également possible de
rechercher une adéquation avec la cible
du produit. En 1958, l'utilisation du
jeune et dynamique chanteur Gilbert
BECAUD correspondait parfaitement à
la jeune cible des scooters VESPA, en
matière de culture, goûts, de styles de
vie,... Et même si l'identification totale
n'était pas l'objectif avoué de la
campagne,
l'acceptation
de
la
communication
était
amplement
facilitée par ces différents points
communs.
Le public aime les célébrités en
général et plus encore lorsqu'il pense
avoir un lien avec elles. Lorsqu'en 1972,
l'agence OGILVY & MATHER utilisa
aux Etats-Unis, le célèbre sportif, Joe
DiMAGGIO, en tant que porte-parole
de la banque BOWERY SAVINGS, la
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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151
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
plus grande banque d'épargne de New
York, l'attention portée à ses spots
publicitaires grimpa de plus de 50 % en
l'espace de seulement 8 mois. Joe
DiMAGGIO, qui fut l'un des maris de
Marilyn MONROE, avait auparavant
été le plus célèbre joueur de base-ball depuis le grand Babe RUTH - de
l'équipe des Yankees, exerçant
justement dans la ville de New York. Il
était le héros des new-yorkais et ainsi
ressenti comme plus proche d'eux.
terres down under aux Etats-Unis en
1985, il eut recours à l'acteur australien,
Paul HOGAN6. L'année suivante,
lorsque la SOPEXA communiqua sur le
territoire américain en faveur des
produits alimentaires et des vins
français, elle utilisa le concours de
l'emblématique
mime
Marcel
7
MARCEAU .
__________________
Cas annexe d'adéquation à la
cible, lorsqu'une société exporte ses
produits. Deux solutions sont alors
possibles si elle souhaite recourir à un
porte-parole célèbre pour doter son
produit d'un indispensable impact. La
première consiste à, utiliser des stars
nationales connues à l'étranger et que
l'on "expatrie" avec le produit pour qu'il
s'entoure des connotations de son pays
d'origine. Lorsque l'Office du Tourisme
australien voulu vanter la beauté des
6 - Le cas est intéressant car contrairement à l'Autralie où
il était déjà une star du petit écran, Paul Hogan était
encore peu connu aux Etats-Unis où son show était
diffusé - le succès cinématographique international du
film Crocodile Dundee n'invervint qu'en 1986 -, en revanche,
il était un visage suffisamment connu et surtout déjà
rattaché à l'Australie pour être utilisé avec profit. Voir
notamment "Paul Hogan : The Aussie taking America by
storm" Mary McKINNEY ADVERTISING AGE du 4
Février 1985.
7 - "European producers trying to drain surplus" Laurel
WENTZ et Claire WILSON, ADVERTISING AGE
Special Report du 31 Janvier 1985.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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152
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
C'est également le cas de
nombreuses sociétés françaises dont les
produits de luxe sont diffusés sur les
marchés japonais et/ou américains. "La
publicité japonaise utilise beaucoup
d'Européens. Dès que l'on veut
sophistiquer quelque chose, on met un
Européen"
observe
Alain
De
1
POUZILHAC . Alain DELON fut
longtemps le porte-parole publicitaire
des cognacs REMY MARTIN en Asie,
Marcello MASTROIANNI celui de
MARTELL, Catherine DENEUVE,
l'ambassadrice de CHANEL n°5 aux
Etats-Unis,...
En 1982, la chaîne de grands
magasins japonais haut de gamme,
SEIBU, fit appel au comédien, écrivain,
metteur en scène Woodie ALLEN.
Après deux refus successifs en Juillet et
Octobre, toute l'équipe de création de
l'agence japonaise I&S se rendit à New
York, au mois de Décembre, pour tenter
une dernière fois de convaincre la star.
Après avoir consulté son entourage,
pris connaissance de tous les roughs
que l'agence avait apportés et considéré
le fait que ses films allaient
prochainement être présentés au public
japonais, Woodie ALLEN accepta de
prêter son concours, parce que la
communication respectait en définitive
totalement son image. Mais quel était le
véritable lien entre Woodie ALLEN et
les magasins SEIBU ? Quelle
adéquation l'agence I&S avait-elle
trouvée entre le genial acteur et cet
annonceur japonais ? De surcroît, le ton
volontairement
décalé
de
la
communication ne pouvait en aucun
cas toucher le grand public, cible de la
campagne. Malgré toutes les objections
conceptuelles que l'on pourrait
adresser a priori à cette campagne, elle
eut un immense et incontestable
succès.
Création
artisitique
exceptionnelle, elle parvint également à
remplir ses objecifs commerciaux.
"La plus belle campagne avec
une star est une utilisation qui a été
faite à Tokyo par un de mes copains, le
grand créatif Japonais, Shigesato ITOI,
pour les magasins SEIBU, où l'on voyait
Woodie ALLEN avec tous les pêchers
du monde, plus voûté que jamais, à son
bureau et qui disait : "la vie est
merveilleuse". C'était une utilisation
vraie de tout l'humour européen de
Woodie ALLEN et la campagne a été
un grand succès" commenta Jacques
SEGUELA2.
En 1992, la société d'études
VIDEORESEARCH Co publia les
résultats d'une enquête sur le taux de
reconnaissance
des
célébrités
occidentales par les consommateurs
japonais.
__________________
__________________
1 - Entretien privé accordé le 9 Juin 1988.
2 - Entretien privé accordé le 31 Janvier 1989.
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© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
153
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Taux de reconnaissance des stars occidentales au Japon (1991)
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
Julia Roberts
Jodie Foster
Katharine Ross
Liza Minnelli
Brooks Shields
Catherine Deneuve
Jane Fonda
Sophia Loren
Elizabeth Taylor
Audrey Hepburn
Kevin Costner
Al Pacino
Clint Eastwood
Kirk Douglas
Eddie Murphy
Arnold
Schwarzenegger
Dustin Hoffman
Sylvester Stallone
Sean Connery
Alain Delon
0%
Etude réalisée au mois d'Août 1991 (musiciens non considérés)
Source : VIDEO RESEARCH Co. - Tokyo - DENTSU Inc. - 1992
On notera la première place de
l'acteur français Alain DELON, les taux
de reconnaissance relativement élevés plus de 80% pour les deux premières
célébrités masculines et féminines ainsi que la présence de stars
confirmées, essentiellement. "Bien que
certaines stars telles que celles-ci
soient très sélectives à propos de leur
apparition dans des publicités sur leurs
marchés domestiques, elles accueillent
avec plaisir les opportunités outre-mer"
commentait la journaliste Julie SKUR
HILL en Juin 19921.
Soit
seconde
approche,
l'annonceur opte pour l'utilisation de
célébrités locales plus en adéquation
avec la cible et permettant alors de
__________________
1 - "Int'l stars warm up to ad climate outisde of U.S." Julie
SKUR HILL, ADVERTISING AGE INTERNATIONAL
du 22 Juin 1992.
contourner partiellement du facteur
N.I.H. de David OGILVY. REMY
MARTIN sollicita ainsi le témoignage
en tant qu'acteur, du metteur en scène
Martin SCORSESE aux Etats-Unis.
Autre
cas,
la
SODIMA,
qui
commercialise les yaourts YOPLAIT
aux Etats-Unis s'est ainsi associée les
services de stars américaines du petit
écran comme Jack KLUGMAN,
Michael CONRAD, Terry GARR et
Alice BEASLEY pour sa communication
d'outre-Atlantique.
Enfin, en 1989 les TELECOM
britanniques utilisèrent différentes
célébrités étrangères pour s'adresser
aux touristes eux-aussi étrangers. C'est
ainsi notamment que le comédiens Bob
HOPE qui fut chargé d'attirer
l'attention des vacanciers américains,
alors
que
Michel
DRUCKER
s'adressait aux vacanciers français,
belges et suisses. Destinés à figurer sur
des documents d'informations tels que
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
154
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
des plan d'accès, la célébrité permettait
d'attirer beaucoup plus facilement
l'attention des touristes de chaque
nationalité visée.
Š Adéquation totale
Maintenant, la combinaison
éventuelle de ces différents types
d'adéquation demeure la solution rare
mais idéale. En 1987, la CARTE JEUNE
eut recours à l'animateur vedette du
moment : Childeric MULLER. Stan
LEVY2 raconte ce mariage : "A l'époque
CHILDERIC était animateur à RADIO
MONTE CARLO. Notre démarche a
été de ne pas considérer la CARTE
JEUNE comme un produit émis par un
Ministère, fait dans je ne sais quel but
de récupération électorale. Le film
comportait ce côté un peu dérision et
l'on sait que les jeunes acceptent et
apprécient la dérision.
D'autre part, à la suite de tests,
on s'est aperçu que leur façon de penser
est très concrète. Savoir que l'on
s'occupe d'eux, ils n'en ont rien à faire.
Ce qui les intéresse c'est savoir
concrètement ce que ça leur rapporte.
Les tests ont révélé que leurs
préoccupations
concernaient
les
fringues, les concerts, les disques, le
sport, les voyages... Il fallait trouver un
ton jeune sans faire faux jeune, dans le
coup sans faire branchouille, direct
sans être prêchi prêcha, pour montrer
les avantages de la carte. CHILDERIC
nous paraissait être un personnage qui
avait ce côté malin, en contact direct
avec notre cible, les 15-25 ans. Il se
__________________
2 - Entretien privé accordé le 27 Septembre 1988.
trouvait en plus qu'il allait commencer
son émission sur LA 5. Tout cela faisait
un mix très intéressant. Par ailleurs, le
film était simple, drôle, et ne détruisait
pas son image. On était en spéculative
avec plusieurs agences. La meilleure
idée était de faire les spots en maquette
avec CHILDERIC. Je suis donc allé
passer un week-end à Marseille avec
lui, qui avait accepté le pari. Là aussi,
j'ai fait le réalisateur en herbe dans un
studio pourri du fond de Marseille pour
faire une vidéo avec trois clous et deux
radis. En définitive, le mariage
CHILDERIC / CARTE JEUNE a très
bien marché." Le budget fut donc confié
à l'agence SUCCESS/SLAD. Après le
lancement de la campagne, il se vendit
plus de cartes en Novembre et
Décembre 1987 que pendant toute
l'année 1986 ! En adéquation avec la
jeune cible du produit, CHILDERIC
correspondait aussi parfaitement au
ton de la communication ainsi qu'au
produit lui-même. La communication
fut reconduite l'année suivante3.
En revanche, dans le cas
d'absence totale d'adéquation, on
tombe rapidement dans le cas des
parachutages de stars pour l'impact,
dont les résultats sont souvent à la
hauteur de la méthode... Quel était le
rapport entre le danseur Jacques
CHAZOT
et
les
plaquettes
désodorisantes CRISTALLINES ? Entre
__________________
3 - La télévision est reconnue pour être devenue au fil des
ans, l'une des principales - sinon la principale - sources
d'information pour les jeunes consommateurs. Voir
notamment : "Television and interpersonal influences on
adolescent consumer learning" Gilbert A. CHURCHILL
Jr. et George P. MOSCHIS, JOURNAL OF CONSUMER
RESEARCH Volume 6 du mois de Juin 1979, pp. 23-35.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
155
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
les chewing-gum FLEERS et l'actrice
Joan CRAWFORD ? Entre les acteurs
ABBOTT et COSTELLO, et la pastilles
digestives TUMS ? Entre John WAYNE
et le thon en conserve STAR-KIST ?
Entre Jean ROCHEFORT et les tuiles
REDLAND ? Entre le tennisman Arthur
ASHE et l'aspirine BUFFERIN ? Entre
le chanteur compositeur Elton JOHN
et les biscuits CADBURY ? Entre
Sylvester STALLONE et le jambon
japonais ITO HAM ?...
Pourtant, l'adéquation de la
célébrité au produit, doit être
considérée comme une condition
indispensable, permettant de lier
efficacement les deux protagonistes de
ce mariage commercial. Sans elle, pas
de lien. Et sans lien, l'impact
n'engendrera
jamais
la
totale
reconnaissance du produit, l'attention
du public demeurant sur le visage de la
célébrité. Or, si l'on utilise une célébrité
pour présenter ou vanter les avantages
d'un produit, c'est avant tout pour faire
la promotion du produit et non celle de
la célébrité, qui logiquement n'en a pas
besoin. C'est là un point capital sur
lequel nous reviendrons dans le cadre
du chapitre III, lors de l'analyse du
choix d'une célébrité.
En conclusion de ce paragraphe,
on peut cependant isoler un cas
particulier échappant partiellement à
ce principe : le coupon-réponse. En
1952 et 1953 par exexmple, le
constructeur
d'appareils
à
air
conditionné
FEDDERS-QUIGAN
utilisa aux Etats-Unis des stars telles
que Humphrey BOGART, Jane
RUSSELL, Ann SOTHERN ou José
FERRER. Là aussi, il n'y avait aucune
espèce d'adéquation évidente entre le
produit et le porte-parole célèbre, l'axe
de la communication ou la cible, si ce
n'est la caution de la star simplement
en tant que célébrité. Mais FEDDERSQUIGAN parvenait cependant à
contourner cette lacune en utilisant le
principe du couponing. La célébrité
devait alors uniquement jouer son rôle
de génératrice d'impact de manière
suffisamment puissante pour orienter
le lecteur vers l'argumentaire de
l'annonce. Le contact avec le prospect
devait être assuré par le coupon
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
156
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
figurant sur l'annonce. Peu importait
dès lors les résultats d'un éventuel
calcul du taux de reconnaissance a
posteriori.
Il vient d'être exposé que parmi
des
possibilités
d'adéquation
stratégique, figurait celle d'une identité
du porte-parole célèbre avec la cible.
Une approche annexe consiste à
insister sur cet aspect de la
communication de manière à miser sur
l'identification.
4 - Recherche d'identification au
modèle
Pour toute une génération de
consommateurs de bière, le buveur de
GUINNESS n'a jamais eu de visage.
C'est là un cas d'école. Dès années 1930
au années 1950 GUINNESS avait posé
ce principe dans sa stratégie
publicitaire. "Elle prétendait que si
GUINNESS était une boisson pour
chacun, l'identifier avec un segment
particulier du marché aurait limiter son
attrait"4. Il était impératif que
l'identification avec un type de
consommateur particulier ne soit pas
possible.
Dans son autobiographie, le
grand metteur en scène américain
Frank CAPRA raconte qu'en 1934, à la
sortie de son film It happened one night,
Harry COHN, le Président de la
__________________
4 - "The evolution of GUINNESS Advertising" F.G.
WIGGLESWORTH, JOURNAL OF ADVERTISING
HISTORY 3 de Mars 1980.
Columbia qui avait produit le film, dut
âprement lutter contre les fabricants de
linge de corps "parce que GABLE avait
lancé la mode de ne pas porter de
maillots de corps"5.
Il a été démontré que si le
contexte dans lequel évolue le
personnage d'un message publicitaire,
ou le personnage lui--même est
susceptible
de
rappeler
au
consommateur, un univers ou un
comportement qui lui est familier, alors
il est possible qu'il s'identifie au porteparole du message6. Ainsi son attitude
peut-elle être plus facilement orientée
favorablement envers le produit, voire
dans certains cas considérablement
modifiée par rapport à son attitude
initiale7. La communication publicitaire
peut alors servir de médiateur entre le
__________________
5 - "The name above the title" Franck CAPRA Editions
MacMILLAN Company, New York, Etats-Unis
d'Amérique (1976), paru en France sous le titre
"Hollywwood Story" Editions STOCK/OPERA MUNDI
(1976), Editions RAMSAY (1985) pp. 238-239.
6 - En s'attachant la participation de "gagneurs" les parcs
d'attractions WALT DISNEY utilisèrent cette stratégie
dans la seconde moitié des années 80. Le concept était de
présenter l'exploit de la célébrité et de lui demander ce
qu'elle comptait faire à présent. Celle-ci répondait alors
"aller à Disneyland" et "aller à Disneyworld" en fonction
des Etats d'exploitation du film... "DISNEY scouting
winners for ads" Wayne WALLEY et Sara E. STERN,
ADVERTISING AGE du 2 Mars 1987 et "Who's next for
DISNEY ? Ads boost image by jumping into winner's
circle" Wayne WALLEY, ADVERTISING AGE du 17
Octobre 1988.
7 - Voir notamment l'étude de Timothy C. BROCK
"Communicator-recipient
similarity and decision
change" JOURNAL OF PERSONNALITY AND SOCIAL
PSYCHOLOGY, 1965, Volume 1, n°6, pp.-650-654, sur le
changement de décision d'un acheteur potentiel de
peinture au regard d'une opinion du vendeur similaire ou
différente à la sienne.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
157
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
produit et le consommateur pour créer
cette
relation
de
désir.
"Les
personnalités jouent seulement le rôle
de porte-parole, de porte-voix, de hautparleur en raison de leur notoriété. Ça
c'est le smig de la personnalité, mais
quand elles sont bien intégrées, elles
vont jouer ce rôle de médiateur, de
transformateur d'une fonction de désir.
A travers le processus d'identification,
de projection, d'imitation, peu importe,
à travers ce processus de médiation et
de
médiatisation
s'opère
une
transformation en désir. Ce désir crée
alors une intensité de transformation à
la marque" analyse Daniel DAHAN8.
Si parmi les fondements
marketing de l'utilisation d'une
célébrité, la mise à profit de cette
caractéristique de la star est
aujourd'hui quelque peu en voie de
disparition, elle mérite cependant
d'être présentée car elle perdure pour
certains
produits
(cosmétiques,
9
vêtements , bijoux,...) et surtout parce
que le nombre de cas publicitaires
ayant fait appel à elle dans le passé est
__________________
8 - Entretien, en compagnie de Claude DOUCE Président
du groupe BELIER Paris, accordé le 3 Mai 1988. Voir
également : "Personality characteristics related to
susceptibility to influence by peers or authority figures"
Leonard BERKOWITZ et Richard M. LUNDY,
JOURNAL OF PERSONALITY Volume 25, 1956, pp. 306316.
9 - Ann HOLLANDER - "Seeing through clothes"
Editions VIKING PRESS, New York, Etats-Unis, 1978 analyse parfaitement cette volonté d'identification voire
d'imitation par le biais des vêtements. Les célébrités les
plus médiatiques sont vecteurs et parfois même
générateurs de la mode. Or, Thorstein VEBLEN mettait
en évidence dès 1894, l'utilisation des vêtements comme
expression d'une position sociale - "The economic theory
of women's dress" POPULAR SCIENCE MONTHLY 46,
du mois de Novembre 1894.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
très important. Comme nous l'avons vu
dans le chapitre précédent, à sa
naissance et pendant de nombreuses
années, la star fut auréolée de tout un
monde de rêve, de tout un mythe. Ce
mythe suscita bien des passions et de
farouches volontés d'identification10.
Les annonces publicitaires d'alors ne
nécessitaient que peu de réflexion
quant à leur conception, la présence de
la star suffisait par elle-même à justifier
l'objectif. Inciter le consommateur à
imiter son modèle.
Sur le principe du symbole
interprétatif détaillé par Bernard
CATHELAT11,
l'objectif
de
la
communication est alors de pousser
l'élément de la cible à s'identifier à la
célébrité en consommant les mêmes
produits.
L'approche
dite
12
situationnelle,
montre que de
__________________
10 - "La star publicitaire n'est pas seulement un génie
tutélaire qui nous garantit l'excellence d'un produit. Elle
invite efficacement à adopter ses cigarettes, son
dentifrice, son rouge à lèvres, son rasoir préféré, c'est à
dire à nous identifier partiellement à elle. Elle fait vendre
savons, combinaisons, réfrigérateurs, billets de loterie,
romans, qu'elle imprègne de ses vertus. C'est un peu de
l'âme et du corps de la star que l'acheteur s'appropriera,
consommera, intégrera à sa personnalité." "Les stars"
Edgard MORIN, op. cit. pp. 156-158.
11 - Dans sa typologie des symboles utilisés par les
publicitaires - symboles intentionnels, symboles
interprétatifs et symboles connatifs -, le sociologue
Bernard CATHELAT analyse les symboles interprétatifs
comme étant ceux qui "suscitent des sentiments, par la
mise en scène de personnages dont les situations, les
sentiments, les relations auxquels le consommateur peut
et doit s'identifier". "Publicité et Société", Editions
PETITE BIBLIOTHEQUE PAYOT / DOCUMENTS P83,
Paris (1968, 1976, 1987, 1992) p. 145.
12 - Russell W. BELK "Situational variables and
Consumer behavior", JOURNAL OF CONSUMER
RESEARCH, Décembre 1975, pp. 157-164, partiellement
contesté par Bernard DUBOIS dans "Un autre aspect
158
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
nombreux
et
divers
facteurs
situationnels jouent un rôle dans le
déclenchement du comportement
d'achat, ainsi que sur les conditions de
déclenchement de ce comportement.
D'où l'intérêt de faire utiliser le produit
par la célébrité. La mise en situation
dans des conditions normales pourra
susciter le souhait d'imitation13. Et si ce
souhait d'identification est parfois très
puissant, c'est qu'il n'est pas tant
l'aspiration à l'identification, à
l'imitation et/ou au fait d'atteindre ou
exprimer un statut social supérieur,
mais souvent celui de "masquer le
niveau
de
vie
présent
du
consommateur" ainsi que son statut
social actuel14.
Le principe était alors très
simple et il faut bien admettre que
comme tout principe qui dure, il
devait/doit bien comporter quelque
chose d'intéressant et surtout de
valorisant et rentable pour l'annonceur.
Dans ce cas précis, la célébrité utilisée
est si célèbre qu'elle doit par sa
renommée et son image, effacer tout
doute quant à la crédibilité de la
communication sur les qualités du
produit, et générer un désir
d'imitation15. A titre d'exemple, de
grands noms du spectacle tels que John
WAYNE,
Agnès
MOOREHEAD,
Charles BOYER, Charles LAUGHTON,
Cedric HARDWICK et le clown
Emmett KELLY furent sollicités en
1953 pour une campagne collective des
producteurs américains de café, de
manière à inciter les américains à comme ces célèbres acteurs - faire des
"pauses café".
Dans le cas d'une cible très
jeune, l'identification peut alors
facilement faire appel au mythe du
héros exposé dans le premier chapitre.
En 1987, aux Etats-Unis, la préparation
pour petit déjeuner OVALTINE fit
appel à CAPTAIN MIDNIGHT, le
héros de la série du même nom et très
célèbre dès le milieu des années 195016.
Lorsque ces mêmes petits Américains
demandent à leur maman d'acheter des
__________________
dans l'étude du consommateur : l'approche situationelle"
REVUE FRANCAISE DE MARKETING n°129, 1990/4
pp. 73-81.
13 - "Les scores image-produit tendent à être plus
favorables lorsqu'une célébrité est utilisée, un effet qui
peut être fonction des conditions sociales dans lesquelles
le produit pourraient être utilisé." Jon B. FREIDEN
"Advertising Spokesperson effects : an examination of
endorser type and gender on two andiences" JOURNAL
OF ADVERTISING RESEARCH Volume 24, n°5 de
Octobre / Novembre 1984, p.34.
14 - Voir à ce sujet les travaux de Marcus FELSON et
notamment "Individuous distinctions among cars, clothes
and suburbs" PUBLIC OPINION QUATERLY 42,
Printemps 1978 pp. 49-58, et "The masking of material
inequality in the contemporary United-States : Felson's
reply" PUBLIC OPINION QUATERLY 43, Printemps
1979 pp. 120-122.
15 - "Il est enfin une autre manière par où un nom propre
d'individu peut marquer un produit : c'est le cas de ce que
nous appellerons «l'utilisateur prestigieux». Déjà au
XIXe siècle , l'encre HUGO. KILLY pour le ski, BORG
pour le tennis ont prêté, en même temps que leur nom,
leur image de champion. Le consommateur espère
bénéficier par contiguïté-similarité, bref par magie, des
qualités du champion. En même temps qu'un objet, il
achète un droit d'identification à l'image, droit attesté
par le nom." Marcel BOTTON et Jean-Jack CEGARRA
"Le nom de marque", Editions Mc GRAW-HILL, Paris
(1990) pp.14-15.
16 - L'agence CAMPBELL-MITCHUM en charge du
budget retrouva Richard WEBB - l'actor d'origine - et
parvint à le convaincre de participer à une tournée
publicitaire sur le thème de CAPTAIN MIDNIGHT.
"Ovaltine goes classic : ads bring back flavor of 1950s"
Scott HUME, ADVERTISING AGE du 26 Octobre 1987.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
159
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
sous-vêtements FRUIT OF THE
LOOM, ce n'est pas par hasard, mais
simplement parce que la publicité des
produits les montrent en compagnie de
BATMAN, MUSCLOR, SUPERMAN,
SPIDERMAN, et autres super-héros.
S'ils consomment des confiseries
NUTS, c'est parce que POPEYE le fait
aussi. S'ils acceptent de manger des
plats cuisinés HEALTHY CHOICE, de
boire des boissons A & W, et
réclament d'aller passer un week-end
au parc d'attraction KNOTT'S BERRY
FARM, c'est parce que SNOOPY leur
conseille. S'ils mangent des céréales
GENERAL FOODS POSTUM, boivent
du FANTA, se mouchent dans des
mouchoirs KID CARE, jouent avec des
jouets MATTEL ou des jouets LIGHT
& LEARN, demandent à leur papa de
s'arrêter chez ESSO pour prendre de
l'essence et d'acheter un magnétoscope
PANASONIC, c'est qu'ils sont sûrs de
l'excellence de ces produits, car
MICKEY17
leur
a
dit
qu'ils
deviendraient aussi fort et aussi
intelligent que lui, s'ils faisaient comme
lui...!
En France, en 1988, en
déclinaison de la campagne d'affichage
présentée plus haut, BANANIA appela
ZORRO au secours de son produit lors
d'une campagne télévisée. Dans ce
dernier cas, l'utilisation de l'alter-ego
de Don Diego de VEGA répondait à la
triple logique suivante : En premier
lieu, il avait été l'un des visuels de la
campagne d'affichage ayant eu le plus
fort score d'impact. D'un autre côté, par
__________________
17 - Voir également "DISNEY ne s'endort pas sur Mickey"
Catherine HEURTEBISE, COMMUNICATION
BUSINESS n°83 du 13 Juin 1988.
&
l'intérêt que lui portent les enfants, il
demeurait un personnage connu des
mères de famille qui étaient alors plus
sensibles à la communication ainsi
qu'aux observations de leurs enfants18.
Enfin, malgré son absence de couleurs,
la série interprétée par Guy
WILLIAMS en 1959 pour les Studios
WALT DISNEY, conservait près de 30
années plus tard, tout son attrait. Au
regard des taux d'audience obtenus par
la rediffusion des aventures du
personnage
de
Johnston
MAC
CULLEY, on s'aperçut qu'il suscitait
encore fortement chez le jeune
téléspectateur,
passion
et
enthousiasme.
Et
ZORRO
de
triompher une nouvelle fois du
Capitaine MONASTARIO, du Sergent
GARCIA et du Caporal REYES, grâce à
BANANIA bien entendu... Comme à
l'habitude, le produit constituait alors
le lien entre l'enfant et son héros, la
possibilité
d'identification
par
l'imitation. Par ailleurs, l'étonnant
pouvoir de prescription de cette cible,
justifiait alors à lui seul l'exploitation
de ce vieux mythe du héros19.
__________________
18 - Voir notamment : Stephen C. COSMAS et Niki
YANNOPOULOS "Advertising directed to children : a
look at the mother's point of view" JOURNAL OF THE
ACADEMY OF MARKETING SCIENCE, Volume 9, n°3,
Eté 1981, pp. 174-190.
19 - "Les enfants sont enclins à croire que ce qu'ont leur
dit dans un programme de télévision n'est pas la vérité,
mais toute la vérité" Extrait du rapport de Lord ANNAN
p. 166 "Report of the Committee on the Future of
Broadcasting" (1977) cité par la F.T.C. (Federal Trade
Commission). Voir "Federal Trade Commision staff
report on TV advertising to Children" Summary and
recommendation, ADVERTISING AGE du 27 Février
1977.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
160
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
En réalité, si cette approche des
célébrités a très bien fonctionné dans le
passé, c'est essentiellement en raison
du fait qu'à l'origine, elle disposait de
ce vaste pouvoir qui suscitait
admiration et envie chez de nombreux
fans, par ailleurs consommateurs
potentiels. Dès lors, il est difficile de
penser que ce type de consommateurs
ait totalement disparu. En 1992,
l'actrice Anny DUPEREY interpellait
les consommatrices françaises en leur
disant que que pour avoir le même teint
qu'elle, il leur fallait boire VICHY
CELESTINS.
Toutefois,
le
En effet, ce sont là des attributs
essentiels, reconnus à la star telle qu'on
l'imagine.
Toujours
parfaitement
maquillée et disposant des plus belles
parures de joyaux1. Il existe donc une
__________________
1 - Voir notamment "The rise and fall of diamonds" de
développement de l'instruction et des
moyens d'information a fortement
restreint l'importance relative de ces
consommateurs. De ce fait, il serait
dépassé et peut-être même risqué
aujourd'hui, de fonder l'utilisation
d'une célébrité sur cette raison, pour
n'importe quel produit. On notera
cependant que cette caractéristique fut
et reste très souvent celle des produits
de beauté, des parfums et des bijoux. La
raison en est très simple. Ces éléments
font très souvent partie intégrante de
l'identité même de la star.
New York, Etats-Unis, 1982, page 124, où l'auteur détaille
la stratégie de la société DE BEERS, qui, dans les années
30 puis 40, visait à utiliser des stars de cinéma telles que
Merle OBERON ou Claudette COLBERT, comme
représentants "indirects" de la marque, en fournissant des
parures
de
diamants
aux
productions
cinématographiques, de manière à pouvoir ensuite
utiliser certaines scènes montrant le produit, dans ses
publicités.
Edward Jay EPSTEIN, Editions SIMON & SCHUSTER,
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
161
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
adéquation stratégique naturelle entre
la célébrité et le produit. Et c'est en
raison de ce lien direct et naturel qui
existe historiquement entre la star, sa
définition et ces différents produits,
que l'identification du consommateur
au porte-parole est encore rendu
possible aujourd'hui2.
En France, le joaillier BURMA
utilisa pendant de très nombreuses
années le témoignage de célébrités pour
créer cette volonté d'identification du
consommateur aux grands noms du
théâtre, du cinéma ou du music-hall. De
1936 à 1952, de célèbres visages vinrent
illustrer la communication du bijoutier.
Si dans les dernières années
d'utilisation de cette stratégie, les
porte-parole célèbres étaient moins
nombreux ou utilisés épisodiquement
et généralement de façon indépendante,
il en fut tout autrement lors du
lancement de cette campagne. Pendant
ses premières années d'existence, il
était impossible de comptabiliser le
nombre de célébrités qui apparaissaient
sur les nombreuses annonces de la
marque.
Ainsi, relève-t-on des noms aussi
célèbres que Joséphine BAKER,
__________________
2 - Dans leur étude à propos des prescripteurs au regard
du type de biens, William BEARDEN et Michael ETZEL
définissent quatre catégories de biens - "publicly
consumed luxuries, "privately consumed luxuries",
"publicly consumed necessities" et "privately consumed
necessities" - et mettent en évidence que plus les biens
sont des produits de luxe et consommés en public, plus
l'influence des groupes de référence est importante.
"Reference groupe influence on products and brand
purchase decisions" William O. BEARDEN et Michael J.
ETZEL, JOURNAL OF CONSUMER RESEARCH 9,
Septembre 1982, pp. 183-194.
Blanche MONTEL, MISTINGUETT,
Elvire POPESCO, Viviane ROMANCE,
Huguette DUFLOS, Dita PARLO,
SPINELLY, Lucienne BOYER, Mireille
BALIN, Claude MAY, Alice FIELD,
Renée DARGENT, Mary MARQUET,
Gaby MORLAY, Edwige FEUILLERE,
Michèle
MORGAN,
Madeleine
RENAUD, Suzy PRIM ou Leslie
CARON par exemple. A titre
exceptionnel, ces femmes célèbres
furent même accompagnées par des
hommes, eux aussi célèbres et présents
pour personnifier l'une des principales
caractéristiques du bijou, celle d'être
"offert par un homme à une femme" ; et
SAINT-GRANIER,
André
De
JONQUIERES, Victor FRANCEN,
Maurice CHEVALIER, Henri GARAT,
Tino ROSSI ou Jules BERRY de
participer à quelques campagnes.
En définitive, cette campagne
était ni plus ni moins que la déclinaison
quelques années après, d'une campagne
qui avait déjà ses propres références. En
effet, dès les années 20 en GrandeBretagne, une Maison soeur des Bijoux
BURMA, CIRO PEARLS, eut elle aussi
amplement recours à cette approche
pour la promotion de ses colliers de
perles fines. Gertrude LAWRENCE,
Fay COMPTON, Sylvia HAWKES, Eve
GREY,
Joan
BARRY,
Madge
COMPTON, Lilian DAVIES, Dorothy
FIELD et Sheila HUNT furent parmi les
innombrables stars qui prêtèrent leur
cou au célèbre joaillier londonien. Avec
la multitude de célébrités qu'ils
utilisaient, ces bijoutiers cautionnaient
leur
produit
mais
rattachaient
également leur produit à l'univers de la
star et non à l'utilisation d'une seule
d'entre elles.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
162
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Plus récemment, le bijoutier
américain FORTUNOFF, opta quant à
lui pour la solution inverse qui consiste
à n'utiliser le témoignage que d'une
seule star. Il lui était alors impératif de
choisir une très grande star. Car seul un
"mythe" pouvait rallier à lui la totalité
de la cible sans risque d'exclusion. Or,
le célèbre bijoutier ne souhaitait pas
recourir à l'image d'une star décédée,
l'axe publicitaire visant à montrer une
célébrité active et dynamique dans la
vie courante. C'est alors qu'il parvint à
séduire l'une des toutes dernières
grandes stars, partie intégrante du
mythe hollywoodien et dont la carrière
cinématographique ne pouvait que
conforter ce choix.
communication du bijoutier avec une
mise en page sensiblement identique
depuis 1981. Le bijou était toujours
accompagné d'une photo de la star
sous-titrée d'une citation. Toutefois,
dès 1983, FORTUNOFF utilisa
d'anciennes photographies de Lauren
BACALL, comme pour faire un peu
plus encore appel au mythe de son
porte-parole et à son extraordinaire
beauté (d'alors).
__________________
En France, en 1985, le bijoutier
CAPLAIN SAINT-ANDRE souhaita
accroître sa notoriété par le lancement
d'une nouvelle campagne, sans
toutefois tomber dans le piège potentiel
traditionnel d'une collective des bijoux
en or. De manière anecdotique, cet
exemple
est
parfaitement
caractéristique de ce phénomène
d'identification. "Le budget n'était pas
énorme"
explique
Patrick
4
PHILIPPART , de l'agence CORYPHE
qui réalisa la campagne, "mais pour
faire sortir CAPLAIN SAINT-ANDRE
assez rapidement il fallait frapper un
grand coup, et là, effectivement,
l'utilisation d'une personnalité est
intéressante. On n'a pas pris une star
trop jeune parce que l'on ne voulait pas
donner cette image à CAPLAIN
SAINT-ANDRE. Notre cible était
plutôt les 25-45 ans. Nos produits sont
de moyen de gamme, il nous fallait
donc par ailleurs quelqu'un de
populaire. On a eu la chance d'avoir
Marlène JOBERT qui correspondait
parfaitement à cette approche et qui
était disponible en termes de publicité.
Elle n'avait pas d'autres contrats à ce
moment-là."
__________________
3 - Jean TULARD op. cit. p. 136.
4 - Entretien privé accordé le 11 Avril 1988.
La star qui accepta de se faire le
porte-parole des bijoux FORTUNOFF
fut
l'actrice
Betty
PERSKE,
mondialement
connue
sous
le
pseudonyme de Lauren BACALL. Celle
qui fut un jour "remarquée par Howard
HAWKS sur la couverture de
HARPER'S BAZAAR" comme l'écrit
Jean TULARD3, allait alors susciter le
désir
d'identification
chez
de
nombreuses femmes américaines, en
portant quelques unes des plus
éclatantes parures FORTUNOFF et en
présentant ses plus belles pièces
d'orfèvrerie. A l'origine, "la campagne
fut lancée en 1979 au moment de
l'ouverture de notre boutique à
Manhattan sur la 5ème Avenue" nous
expliqua Barbara KAPLAN, vicePrésidente du Département Promotion.
Dix années plus tard, la star était
toujours
présente
dans
la
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
163
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Exploitée en presse magazine, la
campagne était déclinée en P.L.V.
(publicité sur le lieu de vente) chez les
bijoutiers "qui étaient heureux d'avoir
Marlène JOBERT dans leur vitrine". La
première annonce utilisée pendant
trois semaines avec une dizaine de
parutions, généra 22.000 appels sur le
numéro vert et le dépôt de 15.000
bulletins dans les urnes placées chez les
bijoutiers. Mais Patrick PHILIPPART
nous raconta une anecdote qui illustre
le fait que le rêve d'identification
suscité par les stars, pour ce type de
produit, n'a pas entièrement disparu.
"Pour la première annonce il y avait un
collier, un bracelet une boucle d'oreille
et deux bagues. On a mis une bague sur
son petit doigt parce que pour la photo,
on la voyait plus entière. Or, on s'est
aperçu que Marlène JOBERT avait de
tous petits doigts et il a donc fallu
couper la bague et la faire toute petite
pour qu'elle puisse venir sur son petit
doigt. Mais une fois la campagne
passée, CAPLAIN SAINT-ANDRE s'est
aperçu que les bijoutiers lui faisaient
beaucoup de demandes de petites
bagues, d'un diamètre anormalement
petit. Pourquoi ? Parce que les gens
venaient avec l'annonce de la
campagne, et disaient : «On a vu
Marlène JOBERT, et elle la porte sur le
petit doigt, comme ça». Cela avait créé
une espèce de mode. Enfin, une mode,
c'est un grand mot, mais c'est là que
l'on s'aperçoit de l'effet de la star. Or, le
problème était que les bijoutiers ne les
avaient pas en disponibilité bien sûr.
CAPLAIN SAINT-ANDRE a donc été
obligé de fabriquer très vite de
nombreuses bagues à ce petit
diamètre."
Autre attribut pour lequel les
célébrités, et principalement les stars
du cinéma, suscitent encore l'envie
d'identification, celui des cosmétiques5.
Est-il besoin de rappeler que le secteur
des produits de beauté est celui qui de
loin, utilisa et utilise encore le plus
grand nombre de célébrités. Bien avant
George WESTMORE et ses fils6, Max
FACTOR ou Elizabeth ARDEN, les
produits de beauté des marques
__________________
5 - "Il y a dans la «personnalisation» un effet semblable à
celui de la «naturalisation» qu'on retrouve partout à
l'oeuvre dans l'environnement, et qui consiste à restituer
la nature comme signe après l'avoir liquidée dans la
réalité [...] le «naturel» qui hante toute publicité est ainsi
un effet de «make-up» : «Ultra-Beauty vous garantit un
maquillage velouté, uni, durable, qui donnera à votre
teint cet éclat de naturel dont vous rêvez !» Jean
BAUDRILLARD op. cit. pp. 126-127.
6 - WESTMORE Frank et Muriel DAVIDSON "The
WESTMORES of Hollywood"
Editions J.B.
LIPPINCOTT COMPANY (1976), Philadelphie et New
York, Etats-Unis.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
164
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
DIXOR, TOKALON, MALACEINE ou
LENTHERIC par exemple, s'étaient
faites leurs, la majeure partie des
célébrités alors disponibles. La star est
idéalement belle7. "A l'usine nous
fabriquons des cosmétiques, au
magasin nous vendons de l'espoir" dit
un jour Charles REVSON, le Président
des cosmétiques REVLON Inc8.
__________________
7 - Dans l'optique décrite par Erving GOFFMAN. La
publicité devient selon lui une "hyper-ritualisation" en ce
sens où elle vise à décrire des situations idéales et à
présenter ces situations comme plausibles et réalisables
aux consommateurs. "Gender advertisements" Erving
GOFFMAN, Edtions HARPER and ROW, New York,
Etats-Unis, pp. 15 et 84.
8 - Cité par Charles SANDAGE et Vernon FRYBERGER
dans "Advertising theory and practice" Editions
RICHARD D. IRWIN, Homewood, Illinois, Etats-Unis
(1975) page 191. Voir également "L'imagination au service
du
Marketing"
Theodore
LEVITT,
Editions
ECONOMICA, Paris (1985), page 133 et suivantes, ainsi
que "Fire and ice : the story of Charles REVSON - The
Man who built the REVLON Empire" Andrew TOBIAS,
Editions WILLIAM MORROW, New York, Etats-Unis,
1976.
Sa beauté et sa jeunesse vont de
pair avec son éclat. La star n'a pas
d'âge, elle est belle, c'est tout. Si
Marilyn MONROE, Louise BROOKS
ou Greta GARBO ont suscité la
création d'un mythe autour de leur
nom, c'est en partie en raison du fait de
la brièveté choisie ou non, de leur
carrière
cinématographique.
Leur
beauté intacte était alors à jamais
gravée dans l'histoire du Septième Art
et ainsi dans la mémoire collective. Le
principal ennemi de la star de cinéma,
n'est ni son personnage, ni son
producteur, ni son agent, ni son public,
c'est le temps. "Les stars se regardent
dans leurs miroirs et constatent que
leur beauté disparaît, que leur jeunesse
s'enfuit, c'est une expérience difficile à
vivre et encore plus dure pour les
actrices, pour lesquelles beauté rime
souvent avec célébrité." observait le
metteur en scène américain Rouben
MAMOULIAN.
Leur statut confère aux stars du
cinéma une position de référence, en
matière de maquillage, parfums et
autres produits de beauté. Leur
utilisation par la publicité tend à
rendre accessible à un large public l'une
de leurs caractéristiques (beauté,
jeunesse,
statut,
pouvoir
de
9
séduction,...) . Si elles sont moins
exposées aujourd'hui - notamment
parce qu'elles mêmes sont moins
nombreuses -, elles furent naguère le
symbole d'innombrables marques, voire
de plusieurs marques en même temps !
__________________
9 - "La star peut aussi appeler l'identification en
s'abaissant au niveau de la clientèle pour l'élever mieux
(savon Lux)" Bernard CATHELAT op. cit. p. 161.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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165
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
A ce sujet, les noms de George
WESTMORE et Max FACTOR
reviennent souvent, car maquilleurs des
stars hollywoodiennes, ils surent
parfaitement utiliser à travers le
monde, ces mêmes stars qu'ils
côtoyaient sur les plateaux, pour
mettre en valeur les différents produits
qui portent encore aujourd'hui leur
nom.
Moins connu aujourd'hui, le
nom de WESTMORE fut néanmoins
pendant les années d'or des studios
hollywoodiens, LA référence. George
WESTMORE, fondateur du nom fut
aux premiers jours des stars du cinéma,
le maquilleur attitré de Mary
PICKFORD, Mabel NORMAND et
Marie DRESSLER entre autres.
Véritable géniteur d'une dynastie de
maquilleurs de stars. En 1935, quatre de
ses fils, dignes successeurs du Maître,
occupaient les postes suivants : Wally
était Chef de maquillage à la
PARAMOUNT,
Perc,
Chef
de
maquillage à la WARNER Bros, Ern,
Chef de maquillage à la R.K.O., quant à
Monty, ses responsabilités s'exerçaient
à la M.G.M. ainsi qu'à la FOX. A l'instar
de Max FACTOR, ou Elizabeth
ARDEN, peu à peu, ces noms illustres
devinrent de célèbres marques de
cosmétiques utilisant les stars pour
principal vecteur de leur publicité.
A titre d'exemples, June
ALLYSON, Joan CRAWFORD, Mirna
LOY,
Irène
DUNNE,
Rita
HAYWORTH, Alice KELLY, Donna
REED, Virginia MAYO, Alice KELLY,
Rosalind RUSSELL, Arlène DAHL,
Marilyn
MAXWELL,
Claudette
COLBERT,
Vera
ELLEN,
Ann
SOTHERN, Yvonne De CARLO, Ava
GARDNER, Eleanor POWELL, Judy
GARLAND, Leslie CARON, Ginger
RODGERS et plus récemment Dayle
HADDON, Jane SEYMOUR et Jaclyn
SMITH prêtèrent leur visage aux
produits de beauté MAX FACTOR,
dont l'extraordinaire fond de teint,
"Satin smooth", avait déclenché les
passions au milieu des années 30.
On notera que jusqu'au début
des années 60, ces stars étaient
systématiquement présentées avec le
titre de leur dernier film ainsi que le
nom du studio qui les employait. Cette
pratique disparue avec l'indépendance
croissante des stars - en partie liée à
l'étendue de leur renommée - qui
rendait superflu et contractuellement
"contournable" un tel rappel.
Hillary BROOKE, Constance
MOORE, Joan BLONDEL, Gail
PATRICK, Martha O'DRISCOLL et
Joan BENNETT posèrent pour BEAU
CAKE - foncièrement inspiré du
célèbre PAN-CAKE de MAX FACTOR
- ; Virginia MAYO, Jane RUSSELL,
Joan BENNETT, Claire TREVOR,
BELITA et Gloria SWANSON pour les
lotions JERGENS ; Maureen O'HARA,
Anne BAXTER, Bette DAVIS, Anita
EKBERG,
Joan
LESLIE,
Gene
TIERNEY et Marilyn MONROE pour
WESTMORE
HOLLYWOOD
;
Paulette GODDARD, Deborah KERR,
Dolores Del RIO, Virginia BRUCE,
Myrna LOY, Brenda JOYCE, Susan
PETERS, Merle OBERON, Joan
FONTAINE et Ava GARDNER pour le
fond de teint WOODBURY. Lily
DAMITA, Merle OBERON, Frances
LANGFORD,
Ethel
MERMAN,
Madeleine CARROLL ou Miriam
HOPKINS pour RICHARD HUDNUT.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
166
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Ava GARDNER mais cette fois
accompagnée de Esther WILLIAMS,
Barbara STANWYCK, Jeanne CRAIN,
Jane WYMAN, Ruth ROMAN, June
ALLYSON, Loretta YOUNG, Rhonda
FLEMING, Anne BAXTER, Maureen
O'HARA, Kathryn GRAYSON, Jane
RUSSELL, Betty HUTTON, Lana
TURNER ou Elizabeth TAYLOR pour
la marque LUSTRE-CREME.
Ainsi, comme on peut le
constater sur ces quelques exemples, la
plupart des stars apparurent sur les
annonces de plusieurs marques
concurrentes. C'est bien là, la preuve
que ces annonceurs ne recherchaient
pas une star particulière, mais la star en
tant que telle10. Enfin, il ne faut pas
oublier les stars masculines dont la
beauté devait également être préservée.
Et Burgess MEREDITH et le sportif
Pete ROSE de calmer le feu du rasoir
avec AQUA VELVA, alors que Farley
GRANGER,
Charlton
HESTON,
Dennis O'KEEFE, Alan LADD, William
BENDIX, Dana ANDREWS, Kirk
DOUGLAS, John GARFIELD et
Ronald REAGAN participaient par
exemple à la communication des
__________________
10 - On peut citer ici Michel GAY, car son analyse de
l'image de la femme dans la publicité rencontre
parfaitement le rôle donné à ces stars : "Le modèle
publicitaire féminin dominant est alors jeune, bourgeois,
et sexuellement libéré, parce que ces différents traits vont
dans le sens du système marchand [...] Le personnage
présenté dans le message publicitaire apparaît comme un
être dénaturé et idéalisé qui n'a d'autre vocation de
paraître : la femme nous est restituée comme signe. En ce
sens, elle ne reflète pas une réalité immédiate, mais
apparaît comme le symbole direct ou indirect d'une
féminité mythique et d'un imaginaire collectif" p. 593.
"L'image de la femme dans la publicité : 1969-1986"
Michel GAY, Thèse de Doctorat de 3ème cycle, non
publiée, Université Paris 1 - Panthéon Sorbonne, 1988.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
lotions
capillaires
JERIS.
John
WAYNE, Stewart GRANGER, Charles
BOYER, John HOWARD, Dick
POWELL, Gregory PECK, Bruce
CABOT ou George MONTEGOMERY
lui préférèrent celle fabriquée par
JERGENS. Pour l'anecdote, notons à la
fin des années 1940 l'utilisation très
sérieuse mais néanmoins pittoresque,
de l'acteur Boris KARLOFF - maintes
fois talentueux interprète du monstre
hideux de FRANKENSTEIN - utilisé
pour la crème à raser WILLIAMS, en
raison de son "visage ultrasensible" !
Ce recours aux plus belles stars
féminines est encore usité de nos jours.
Parmi les utilisations les plus
caractéristiques, on peut relever la
campagne pour les cosmétiques
REVLON, qui mit récemment en scène
diverses célébrités telles que Liza
MINNELLI, Grace JONES, Joan
COLLINS, Lauren HUTTON, Audrey
HEPBURN, Connie SELLECA, Melany
GRIFFITH, Brooks SHIELDS ou
l'animatrice vedette Oprah WINFREY.
On trouve également L'OREAL qui
utilisa Cybill SHEPHERD ; Diahann
CARROLL pour LASSALE ; Eva
GABOR pour PAULA YOUNG ;
CLAIROL qui confia la présentation de
sa gamme ULTRESS à Linda EVANS ;
REXONA à Michelle PFEIFFER et
Jenna De ROSNAY ; les shampooings
JHIRMACK à Victoria PRINCIPAL ;
MAYBELINE, qui fut dans le passé
vanté par Rita HAYWORTH et Merle
OBERON, utilisant Lynda CARTER
devenue entre temps Directrice conseil
de la marque en 198011, et LANCÔME
__________________
11 - Voir notamment : "Lynda CARTER helps whip up
tactic for new MAYBELLINE line" Pat SLOAN,
ADVERTISING AGE du 5 May 1980.
167
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
"monopolisant" Isabella ROSSELLINI
pour la quasi totalité de ses campagnes
dans le monde12.
"Je trouve que l'utilisation
d'Isabella ROSSELLINI c'est très malin,
pour deux raisons", observe JeanMichel GOUDARD13, "la première est
que pour avoir travaillé sur du
cosmétique, je sais que le problème
permanent est de trouver un modèle. A
chaque photo, il faut trouver ce modèle.
C'est un travail considérable. Alors
quand vous en trouvez un qui est bon,
autant le garder tout le temps. Vous
évitez déjà de faire des erreurs. Le
deuxième gros avantage, c'est Isabella
ROSSELLINI, que ce soit en impact, en
relations publiques, en retombées
presse,... vous gagnez sur tous les
tableaux." "C'est plus l'utilisation de la
femme la plus belle du monde que
l'utilisation d'une star. C'est la femme
Isabella ROSSELLINI qui est la marque
LANCÔME [...] C'est plus qu'une
relation commerciale ordinaire, il y a eu
un accord profond. Même si le pire
arrivait, l'empreinte est indélébile"
complète Christian VIAL14 de l'agence
PUBLICIS.
Les Etats-Unis et le Japon - où
en 1988, bien des années après l'acteur
Charles BRONSON (précurseur en
1970), le groupe musical A-HA
__________________
12 - "Visages de marques" Fabienne AZIRE & Birgitt
HÖRLIN, L'EXPRESS supplément "STYLES" N°1 du 17
Octobre 1986.
13 - Entretien accordé en 1987.
14 - Christian VIAL, Vice-Président de l'agence de
communication PUBLICIS. Entretien privé accordé le 7
Avril 1988.
personnifiait
les
cosmétiques
MANDOM - sont encore une fois de
grands
pourvoyeurs
d'exemples.
Toutefois, en France, Gaby DESLYS
cautionnait dès 1916 la marque
PERFECTA, Pearl WHITE préférait
MALACEINE en 1923, Gaby MORLAY,
les cosmétiques DIXOR en 1927,
Blanche MONTEL le rouge à lèvres
ROUGIX en 1929, imitées par de
multiples autres célébrités d'alors et
pour les marques les plus diverses.
Aujourd'hui, les exemples sont plus
ponctuels,
comme
Fanny
COTTENCON dans une très belle
campagne pour JULIAN JILL, Marlène
JOBERT pour MARY COHR, ou
Pauline
LAFFONT15,
Elisabeth
BOURGINE, Charlotte VALENDREY
et Annabelle MOULOUDJI pour
LILIANE
FRANCE,
Gabrielle
LAZURE
pour
DIADERMINE,
Catherine DENEUVE en 1992, pour
Yves SAINT-LAURENT16.
Après analyse des informations
de la base de données Alphastar, il
__________________
15 - Pour la première campagne seulement.
16 - On notera pour la France comme pour les Etats-Unis
l'utilisation de célébrités d'âges très différents. De la
vedette débutante comme Elisabeth BOURGINE à la star
confirmée telle que Catherine DENEUVE. Un
raisonnement hâtif pourrait conduire à penser que ces
célébrités ne s'adressent manifestement pas à la même
cible au niveau de l'âge. Or c'est un exemple intéressant
montrant que la star n'est dans ce cas pas du tout
segmentante. Des études réalisées en France au début des
années 80 ont montré qu'en matière d'habitudes d'achat
et d'usage de cosmétiques, le comportement d'achat
subissait une influence réciproque entre les mères et leurs
filles. E. TISSIER-DESBORDES, "Interaction familiale et
comportement d'achat des mères et des filles" ACTES DU
10ème
SEMINAIRE
INTERNATIONAL
DE
RECHERCHE D'AIX, 1983, cité par Bernard DUBOIS,
"Culture et Marketing" op. cit. p.56.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
168
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
s'avère que parmi les cas de publicité
où les services d'une ou plusieurs
célébrités furent utilisés, plus de 2 cas
sur 10 furent des publicités pour des
produits d'hygiène ou de beauté17.
Comme le montrent les résultats
présentés dans le tableau ci-dessous, le
secteurs "hygiène et beauté" se détache
très nettement des autres.
__________________
17 - Pour construire ce tableau synthétique, il a fallu
effectuer divers regroupements parmi les 973 intitulés de
produits figurants dans le fichier de correspondance
Betastar3. La rubrique Divers qui figure en bas de tableau,
regroupe ce qui n'a pu être logiquement affecté sans biais,
aux autres rubriques. Il s'agit par exemple d'aluminium,
de lentilles de contact, de services numismatiques, de
serrures, d'hôtels, d'hôpitaux, d'engrais ou encore de
filtre à café ou de paires de ciseaux,... Une analyse plus
détaillée sera présentée dans le cadre de l'étude des
caractéristiques de la célébrité page 445 et suivantes.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
169
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Répartition par secteurs des cas d'utilisation
publicitaires recensés pour avoir utilisé une
ou plusieurs célébrités
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
Hygiène et beauté
Nombre
Part en %
1572
19,19%
Habillement et chaussures
895
10,93%
Automobiles et transport
588
7,18%
Produits alimentaires
535
6,53%
Boissons non alcoolisées
473
5,77%
Alcools
428
5,23%
Loisirs, édition, presse,...
371
4,53%
Photographie, cinéma, audiovisuel
365
4,46%
Tabac, briquets et allumettes
358
4,37%
Bijoux, montres et argenterie
320
3,91%
Campagnes institutionnelles
292
3,56%
Equipement de la maison
243
2,97%
Banque et assurance
233
2,84%
Associations, fondations, instituts, clubs,...
232
2,83%
Distributeurs (magasin, enseigne,...)
178
2,17%
Informatique, bureautique et télématique
155
1,89%
Collectives (tous secteurs confondus)
135
1,65%
Restaurants
119
1,45%
Médical, pharmacie et parapharmacie
111
1,36%
Produits d'entretien (détergents, lessives,...)
103
1,26%
Campagnes publiques et parapubliques
93
1,14%
Paires de lunettes (y compris de soleil)
70
0,85%
Stylos, porte-plume, crayons,...
70
0,85%
252
3,08%
8.191
100,00%
Divers
Total
Source : Base de données Alphastar
(saisies arrêtées au 1er Août 1992)
Comme son titre l'indique, ce
tableau représente la répartition des
cas d'utilisation recensés. Il est dès lors
nécessaire
de
relativiser
ses
enseignements en disant qu'il ne tient
pas compte de la pression publicitaire
de chaque cas. En d'autre terme, il
concerne chaque cas intrinsèquement,
sans prendre en considération les
répétitions et déclinaisons éventuelles
d'une même campagne. Cela explique
notamment le 9ème rang seulement des
"tabacs, briquets et allumettes", alors
que le simple exemple des cigarettes
figure parmi les cas d'utilisation de
célébrités les plus caractéristiques et
les plus importants en volume, jusqu'au
milieu des années 60 environ, mais cet
exemple sera développé plus en détail
dans le cadre du paragraphe suivant.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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170
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Représentation graphique de la répartition des secteurs d'activité des cas d'utilisation d'un porte-parole célèbre
Stylos, porte-plume, crayons,...
Hygiène et beauté
Divers
Paires de lunettes (y compris de soleil)
Campagnes publiques et parapubliques
Habillement et chaussures
Produits d'entretien (détergents, lessives,...)
Médical, pharmacie et parapharmacie
Restaurants
Collectives (tous secteurs confondus)
Automobile
et transports
Informatique, bureautique et télématique
Distributeurs (magasin, enseigne,...)
Associations, fondations, instituts clubs,
Banque et assurance
Produits alimentaires
Equipement de la maison
Campagnes institutionnelles
Bijoux, montres et argenterie
Tabac, briquets et allumettes
Boissons non alcoolisées
Cinéma,
audiovisuel,
photographie,
Loisirs,
édition,
presse,...
Alcools
Source : Base de données Alphastar
(saisies arrêtées au 1er Août 1992)
5 - Normalisation de la consommation
du produit
"convention obsèques" dans un spot de
marketing direct, sur les écrans de
télévision français dès le début des
années 90.
Au départ, il s'agit d'un fondement
associé à la recherche d'identification
du consommateur, à la célébrité en tant
que modèle. Mais la démarche va plus
loin. Cette approche est utilisée pour
déculpabiliser le consommateur et/ou
normaliser la consommation du
produit, la célébrité apportant sa
caution
de
"connaisseur
non
professionnel". Les célébrités peuvent
alors être de puissants normalisateurs,
car elles permettent de dissiper en
partie les connotations négatives qui
sont attachées au produit dont elles ont
la charge. Parler d'obsèques est un sujet
très délicat en publicité. D'où l'intérêt
de désensibiliser le sujet en utilisant un
porte-parole célèbre. C'est ce que
compris avec succès NORWICH
UNION en utilisant l'acteur JeanMarie PROSLIER pour présenter sa
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
171
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Les deux types de produits qui
recoururent le plus à des célébrités
pour ces raisons, sont les dérivés du
tabac et les boissons alcoolisées.
L'utilisation de porte-parole célèbres
permet de gommer en partie les aspects
négatifs de l'image de ces produits à
propos de leurs effets sur la santé du
consommateur. Si un personnage aussi
public qu'une star fume et boit sans
altération majeure, pourquoi le
consommateur moyen ne le pourrait-il
pas lui aussi en toute liberté. La
célébrité fait alors office de réducteur
de frein à la consommation, notamment
auprès de populations jeunes1 ou peu
cultivées.
__________________
1 - Voir notamment les travaux de Sandra TEEL et J.E.
TEEL "Marketing lessons learned from the ban on
broadcast advertising for cigarettes" JOURNAL OF
MARKETING, 43-1, (1979) pp. 45-50 ; ainsi que ceux de
George P. MOSCHIS "Point of view : cigarette
advertising and young smokers" JOURNAL OF
ADVERTISING RESEARCH, Avril / Mai 1989, pp. 51-60.
Aujourd'hui, l'un des exemples
les plus connus en raison de la carrière
post-cinématographique de son porteparole, reste la publicité pour les
cigarettes
CHESTERFIELD,
avec
Ronald
REAGAN
exploitée
notamment en 1948 à l'occasion de la
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
172
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
sortie de son dernier film The voice of the
Turtle, ou encore celle parue à l'occasion
de Noël, en 1951. Si cette approche a
aujourd'hui cessé pour les raisons que
nous analyserons, elle reste l'un des cas
les plus caractéristiques de l'utilisation
de cette stratégie visant l'effet
normalisateur.
C'est très probablement LUCKY
STRIKE qui le premier employa des
stars
dans
sa
stratégie
de
communication et ce, dès la fin des
années 19202. Mais déjà à cette époque,
plusieurs marques telles que PLAYER'S
et WILLS percevant l'impact des stars
d'alors, inséraient dans leurs paquets,
des vignettes à leur effigie. Et si l'on
retrouve encore aujourd'hui de
nombreux exemples publicitaires, c'est
simplement que les différentes marques
recouraient alors essentiellement au
support de la presse magazine.
Or, le cas des marques de
cigarettes - essentiellement aux EtatsUnis - est particulièrement intéressant
en termes de positionnement3.
Aujourd'hui, bien qu'étant toujours et
même plus qu'hier, issue d'une
production oligopolistique, chaque
marque de cigarettes a sa propre
communication4.
__________________
__________________
2 - C'est pendant la décennie 1920-1930 que la
consommation de cigarettes explose littéralement aux
Etats-Unis. Dès 1919, les ventes de cigarettes dépassent
celle du tabac à pipe. En 1921, elles devancent les ventes
de cigares et en 1922 l'emportent sur la consommation du
traditionnel tabac à chiquer. Les travaux de Benno
MILMORE et Arthur CONOVER figurent - sous le titre
"Tobacco consumption in the United States, 1880-1955" en appendice à l'étude de William HAENZEL, Michael B.
SHIMKIN et Harman MILLER "Tobacco smoking
Patterns in the United-States" PUBLIC HEALTH
MONOGRAPH 45, 1956, page 107.
3 - Depuis les recherches de John WATSON à l'agence J.
WALTER THOMPSON dans les années 20, on sait que
les fumeurs de cigarettes sont majoritairement incapables
de reconnaître leur marque de cigarettes lors d'un blind
test [test à l'aveugle pendant lequel la marque est
occultée]. Voir notamment "The founder of
behaviourism" David COHEN et J.B. WATSON, Editions
ROUTLEDGE & KEGAN PAUL, Londres, GrandeBretagne, 1979, page 178.
4 - Voir à ce sujet Michael SCHUDSON, "Advertising, the
uneasy persuasion - its dubious impact on American
society" Edition BASIC BOOKS, Etats-Unis, 1984, pp.
178-208.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
173
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Certaines sont très caractéristiques,
comme l'esthétisme doré de BENSON
& HEDGES dont le packaging est le
devenu le héros, le mauve soyeux de
SILK CUT, le chat noir de CRAVEN,
l'aventurier de CAMEL5 ou le cow-boy
de MARLBORO, la cigarette la plus
vendue dans le monde. Chaque marque
subit un véritable positionnement leur
permettant seul, de se différencier de la
concurrence.
__________________
5 - Aujourd'hui, dans les pays anglo-saxons comme au
Japon, CAMEL n'utilise pas l'image de l'aventurier, mais
celle d'un personnage de bande dessinée à tête de
chameau surnommé Joe, devenu le héro de la marque, et
très porteur auprès de jeunes consommateurs. Et l'on sait
combien le modèle employé dans une publicité pour
cigarettes est un facteur discrimant. Voir Michael B.
MAZIS, Debra JONES RINGOLD, Elgin S. PERRY et
Daniel W. DENMAN "Perceived Age and attractiveness
of models in cigarette advertissements" JOURNAL OF
MARKETING Volume 56, du moins de Janvier 1992, pp.
22-37.
Or, à l'observation de la
communication
des
principales
marques, dès années 306 jusqu'au début
des années 60, on s'aperçoit qu'avec
quelques rares petits plus-produit
différents,
tous
les
leaders
s'acharnaient à se battre sur le même
terrain avec le même positionnement :
celui des célébrités ! Ces leaders d'alors
s'appelaient CAMEL, CHESTERFIELD
et LUCKY STRIKE.
Peut-être par crainte de perdre
quelques pourcentages de parts de
marché
en
adoptant
une
communication différente de celle de
leurs principaux concurrents, tous
s'évertuaient à séduire de nouvelles et
plus nombreuses célébrités que leurs
__________________
6 - Une étude du numéro 12 du magazine FORTUNE -
publiée sous le titre "The Fortune survey", (Juillet 1935) faisait état qu'à l'époque 26,2% des femmes de moins de
40 ans fumaient des cigarettes, de même que 65,5% des
hommes de moins de 40 ans.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
concurrents. Ces célébrités étaient
alors en grande majorité des stars de
cinéma. La quasi uniformité de la
communication explique sans doute le
nombre très important de publicités
qui furent exploitées à cette époque.
On notera par ailleurs que la très
grande majorité de ces publicités
resituait toujours la star, d'après le film
dont elle était la ou l'une des vedettes
au moment de la parution de l'annonce.
Cela permettait d'une part d'attirer un
peu plus le rêve et la magie du cinéma
sur le produit ; d'autre part, cela
affirmait la crédibilité de certaines stars
parfois peu connues d'une partie du
public au moment de leur exploitation
publicitaire7.
__________________
7 - L'autre explication - officieuse - de cette mention
réside dans le fait que ces stars étaient alors sous contrat
strict et exclusif, avec leur maison de production.
Souvent, ces dernières n'autorisaient leurs stars à
participer à différentes évolutions publicitaires, que si
elles touchaient une commission au passage. Cette
contrepartie de leur accord pouvant la plupart du temps
prendre la forme d'une présentation de leur dernier film
sur les dîtes publicités. Celles-ci jouaient alors le double
rôle de faire cautionner la marque de cigarettes par la
star, mais également d'annoncer la sortie du dernier film
PARAMOUNT, de la dernière production WARNER
BROS, du nouveau grand spectacle de la M.G.M. ou du
dernier show télévisé de la C.B.S.,...
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Célébrités
Chesterfield
Lucille BALL
Joan BENNETT
Claudette COLBERT
Gary COOPER
Joan CRAWFORD
Robert CUMMINGS
Linda DARNELL
Groucho MARX
Maureen O'HARA
Basil RATHBONE
Rosalind RUSSELL
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
STANWYCK
Jack WEBB
(82)
Old Gold
L&M
Winston
Fatima
(14)
(10)
(6)
(6)
N
N
Philipp
Morris
(48)
(2)
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
Ann SOTHERN
Barbara
Lucky
Strike
(95)
Jim ARNESS
Camel
N
N
N
N
N
Source : Base de données Alphastar
(saisies arrêtées au 1er Août 1992)
Pour percevoir ô combien cette
approche reposait sur l'utilisation de
célébrités et non d'une célébrité
particulière en adéquation stratégique
avec le produit et/ou la marque, il suffit
de noter le fait qu'à l'instar des
cosmétiques que nous avons présentés
précédemment, plusieurs de ces stars
furent sollicitées - parfois à quelques
mois d'intervalle seulement - pour
différentes marques. Pour preuve,
observons le tableau ci-dessus, extrait
de la base Alphastar, et qui indique les
différentes participations de quelques
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
célébrités, ainsi que le nombre de stars
recensées à ce jour, pour chacune de ces
marques1.
__________________
1 - Au regard des enseignements de la théorie de
l'attribution, on peut s'interroger sur les résultats d'une
telle homogénéité des messages et d'une inévitable
superposition dans l'esprit du consommateur en raison
du parasitage des marques entre elles. Diverses études
ont montré que la similitude des messages faisait naître
dans l'esprit de ce dernier non pas le lien avec les
caractéristiques du produit qui étaient avancées, mais
avec l'évidente intention de l'annonceur de lui vendre
quelque chose. D'où dans certains cas l'apparition d'un
blocage psychologique au regard de l'argumentaire
véhiculé par le message publicitaire quel qu'il soit. Voir
notamment sur ce point Robert B. SETTLE et Linda L.
GOLDEN "Attribution theory and advertiser credibility"
176
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
A l'époque, bien que le Reader's
Digest - premier support à soulever le
problème - ainsi que diverses
organisations dont le Ministère de la
Santé Publique arguaient déjà des
méfaits de l'abus produit sur la santé
du fumeur, aucune indication n'était
portée en ce sens sur le paquet ou sur
les publicités en faveur du produit.
Alors que la publicité pour le tabac et
les cigarettes visait avant tout le
développement des parts de marché par
rapport aux concurrents plus que le
développement de la consommation
totale de cigarettes2, le cinéma luimême, contribuait, indirectement mais
largement à la promotion du produit.
Alors que le baiser d'un homme à une
femme restait une évolution très
contrôlée, la cigarette n'était pas du
tout considérée comme un objet de
délit3. Ce n'est qu'en 1966 que le
gouvernement américain commença à
imposer l'apposition, sur tous les
paquets de cigarettes et leurs
publicités, de formules préventives des
dangers potentiels afférents à leur
consommation, et c'est en 1971, que le
produit fut interdit de publicité
télévisée.
En
1988,
la
législation
américaine s'enrichit d'un nouveau cas
de jurisprudence qui allait faire date.
Une femme, Rose CIPOLLONE, puis
ses descendants avaient attaqué
plusieurs fabricants de cigarettes à
propos de l'insuffisance de ces
indications préventives sur l'emballage
et les publicités. Pour la première fois,
un plaignant obtenait gain de cause.
Plus de 300 cas d'action en justice
avaient été recensés aux Etats-Unis
depuis 1954, et celui-ci faisait figure
d'exception
en
accordant
aux
plaignants 400.000 $ de dommages et
intérêts, après cinq années de
procédure. Décédée d'un cancer du
poumon, Rose CIPOLLONE n'avait pas
arrêté de fumer après que l'on ait
découvert chez elle, une tumeur
maligne, ni même après les diverses
opérations qu'elle subit.
En fait, si ce cas nous intéresse
plus particulièrement, c'est que
l'essentiel du débat portait sur les
publicités des marques incriminées.
Comme indiqué plus haut, les
différentes
marques
éprouvaient
beaucoup de difficultés à personnaliser
leur communication sans pour autant
abandonner le terrain des stars4. Les
__________________
JOURNAL OF MARKETING RESEARCH Volume XI,
du mois de Mai 1974 pp. 181-185.
2 - Voir "Marketing : giving smokers added value is
tobacco firms' latest idea" Margaret LOEB, THE WALL
STREET JOURNAL du 30 Juin 1983.
3 - En 1957, le comédien George BURNS, qui fut élu
Meilleur fumeur de cigares de l'année, déclara alors :
"J'utilise depuis si longtemps un cigare comme accessoire
sur scène, qu'il fait presque partie de ma personnalité". Il
fut par ailleurs en 1944 avec sa partenaire Gracie ALLEN,
l'un des porte-parole célèbres de la marque de cigares
BLACKSTONE.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
4 - CAMEL fut le premier dès les années 30 a séduire
quelques sportifs comme le patineur Jack SHEA, le
tennisman Bill TILDEN, les joueurs de baseball Lou
GEHRIG, James COLLINS ou le nageur Larry "Buster"
CRABBE. L'objectif était alors de démontrer que la
consommation de cigarettes n'altérait en rien la forme
physique. Quelques années plus tard, la même marque
utilisait encore plus subtilement ce vieux truc
publicitaire qu'est la caution indirecte et implicite. Avec
son slogan More Doctors smoke CAMELS - Les docteurs sont
plus nombreux à fumer des CAMEL -, le fabricant de
cigarettes ne faisait certes que rapporter les résultats
d'une enquête menée auprès de 113.597 docteurs. Mais
sans l'être, cette indication comportait en définitive,
177
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
avocats
de
Rose
CIPOLLONE
avançaient que leur cliente avait été
abusée par une publicité de la marque
L&M au milieu des années 50, qui
indiquait que les cigarettes avec filtre
L&M étaient tout simplement
recommandée par les docteurs. Rose
CIPOLLONE avait alors adopté L&M
en délaissant CHESTERFIELD. Les
stars toujours présentes étaient
d'ailleurs les supports indirects de ces
"recommandations médicales". C'est
essentiellement cet excès publicitaire
qui fut condamné en 1988. Et comme le
fit
alors
remarquer
Hamish
MAXWELL - P.D.G. de PHILIP
MORRIS - "un cas ne crée pas une
tendance", tout en faisant appel du
jugement.
toutes les caractéristiques d'une quasi caution de la part
du corps médical. Voir également sur le cas particulier de
l'action en justice de la famille CIPOLLONE contre le
groupe LIGGETT : "Tobacco ads : times have changed"
Fred DANZIG, ADVERTISING AGE du 20 Juin 1988,
"Shattering the smoke freedom" Stephen KOEPP, TIME
INTERNATIONAL du 27 Juin 1988, "Tobacco warnings"
Brooks TIGNER, INTERNATIONAL MANAGEMENT
de Février 1991 et "Suing cigarette makers" Marcus
MABRY et Bruce SHENITZ, NEWSWEEK du 6 Juillet
1992.
Toutefois,
aux
États-unis,
notamment en raison des trop
importantes connotations négatives
qui commençaient à entourer le
produit, les célébrités se dégagèrent
peu à peu de sa communication, dès la
fin des années 50. De plus en plus
consciente de leur rôle d'agent
normalisateur, elles contraignirent les
annonceurs et leurs agences à plus
d'originalité. La dernière grande
campagne de ce type pouvant être
définie comme étant celle réalisée en
1963 par l'agence J. WALTER
THOMPSON, pour les cigarettes L&M
et dont le champion de golf Arnold
PALMER était le porte-parole. Ce
retrait fut progressif et limité aux
Etats-Unis au départ, puisque CAMEL
par exemple, continua pendant
quelques années encore à recourir à des
sportifs célèbres à l'étranger et en
France notamment. Enfin, dans
certains pays, les stars continuèrent à
prêter leur image au produit, comme
par exemple en Argentine où l'acteur
Mel FERRER se fit le porte-parole de
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
178
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
BENSON & HEDGES5, ou au Japon6,
n'hésitant pas à recourir à des
célébrités parfois décédées comme le
grand jazzman Duke ELLINGTON, le
peintre Man RAY, le scientifique Albert
EINSTEIN, et l'écrivain Raymond
CHANDLER ; les acteurs James
COBURN, Roger MOORE, Tom
BERENGER, Robert WAGNER et
Pierce BROSNAN restant fidèles à la
marque de cigarettes LARK, du groupe
PHILIP MORRIS.
Si en France, la communication
publicitaire pour le tabac par
l'intermédiaire
de
porte-parole
célèbres, reste très exceptionnelle, il
existe néanmoins dans le passé,
quelques
exemples
très
caractéristiques. Dès la fin des années
1920, la société d'État7 mettait en scène
__________________
5 - "FERRER touts B&H expensive image" Anonyme,
ADVERTISING AGE du 10 Juillet 1978.
6 - Le 29 Septembre 1986, la newsletter marketing
britannique Marketing Breakthrough indiquait qu'au Japon,
une publicité sur deux recourait alors à l'utilisation d'une
célébrité, nippone ou étrangère.
de grandes vedettes d'alors telles que
les chanteurs GEORGIUS, Georges
MILTON ou Armand BERNARD .
Mais ses deux plus belles réalisations
restent les deux films qui dans les
années 50, utilisèrent comme porteparole, les comédiens FERNANDEL et
Michel SIMON.
En raison de ces connotations de
plus en plus négatives qui étaient
attachées à la cigarette, on vit se
développer nombre de campagnes antitabac. De fait, les stars ne pouvaient
plus rester indifférentes. Surtout
depuis que certaines d'entre elles,
comme John WAYNE, rendait public
leur maladie liée au tabagisme. Certes,
dans les années 60, les stars n'étaient
pas encore les porte-parole de la lutte
contre le tabagisme ; il était encore trop
tôt pour cela, alors qu'elles venaient à
peine de cesser d'être les promoteurs de
la cigarette. Mais stars et tabac ne
faisaient plus bon ménage. Les
fabricants quant à eux, avaient déjà
compris qu'il était nécessaire de
modifier sensiblement leur terrain de
communication, de se trouver d'autres
porte-parole. Par ailleurs, au regard de
l'inexorable baisse de la consommation
relative de cigarettes dans les pays
occidentaux, et des contraintes légales
de plus en plus nombreuses quant à la
publicité, les grands fabricants
américains
accélérèrent
leurs
investissements dans des pays où ils
étaient encore peu présents, comme par
exemple les pays du Sud-Est asiatique.
7 - La S.E.I.T.A. (Société Nationale d'Exploitation
Industrielle des Tabacs et Allumettes) fut créé en 1925.
Elle est l'aboutissement de nombreuses dispositions des
gouvernements royaux, impériaux et républicains d'alors,
qui pendant 300 ans ont occasionné la création, la
disparition ou la modification de plusieurs organismes
dont l'objet était de permettre à l'Etat d'exercer un
contrôle tantôt sur la production, tantôt sur la
distribution, tantôt sur les deux, tantôt sur aucune de ces
activités au nom de la liberté. A partir de 1926, elle fut
progressivement doté d'un véritable objectif commercial
avec tous ses attributs, dont une véritable fonction
publicitaire.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
179
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Tel le tabac qui la compose, la
cigarette avait consumé ses plus belles
années dans les pays occidentaux.
Ainsi, pour pouvoir raconter ses
aventures aux jeunes Américains,
même LUCKY LUKE dut remplacer
son éternelle cigarette par un brin
d'herbe jugé plus en adéquation avec le
public
du
héros.
Dès
1970,
l'AMERICAN CANCER SOCIETY
utilisait le témoignage vivant de stars
telles que Raquel WELCH, Ali Mac
GRAW ou Joan CRAWFORD dans
des campagnes pour la prévention des
cancers.
En 1985, à la mort de Yul
BRYNNER, à la suite d'un cancer du
poumon, l'AMERICAN CANCER
SOCIETY rendit public un film
publicitaire réalisé quels temps
auparavant.
Il
présentait
Yul
BRYNNER qui "maintenant qu'il était
décédé" comme il le précisait lui-même,
mettait le public solennellement en
garde des méfaits du tabagisme. Ce
témoignage d'outre-tombe avait la
puissance de la plus cruelle des
expériences qu'il nous ait été donné de
voir
et
d'entendre.
Exemple
d'adéquation stratégique ultime et des
plus crédibles. Seule la publicité
pouvait se permettre se revirement. La
boucle était bouclée, les stars
devenaient de leur vivant ou à titre
posthume, les porte-parole des
détracteurs des firmes dont elles
vantèrent jadis les produits8.
__________________
8 - Voir également : "The anti-smoking commercials : a
study of television's impact on behavior" M.T. O'KEEFE,
PUBLIC OPINION QUATERLY, 35 (1972) pp. 242-248
et "Reducing cigarette smoking : an opportunity for
social marketing" Karen FOX et Philip KOTLER,
L'AMERICAN
LUNG
ASSOCIATION
n'est
pas
une
association de lutte contre le
tabagisme, elle tente simplement de
faire prendre conscience aux fumeurs
du lien qui existe entre le tabagisme et
le cancer du poumon. En 1988, la très
créative agence américaine DELLA
FEMINA, TRAVISANO & Partners fut
chargée de réaliser une campagne pour
cette association. Elle était composée
de trois annonces utilisant chacune une
grande star décédée d'un cancer du
poumon. Humphrey BOGART, Desi
ARNAZ et John WAYNE en furent les
témoins. Des accroches aussi directes
que : "Si ce n'était pas à cause des
cigarettes, il pourrait toujours te
regarder, gamin." pour Humphrey
BOGART, "Grâce aux cigarettes, vous
ne pouvez voir Ricky que dans des
rediffusions." pour Desi ARNAZ et
"2.000 balles, 600 flèches, 82
tomahawks and 30 lances n'auraient
pas pu faire ce qu'ont fait les
JOURNAL OF HEALTH CARE MARKETING, 1, d'Hiver
1981, pp. 8-17. En France, on relève la prestation au début
des années 1980, de l'acteur Maurice RISCH dans une
campagne pour la lutte contre le tabagisme et en 1985,
celle en faveur du COMITE FRANCAIS D'EDUCATION
POUR LA SANTE, avec Claire NADEAU. Yves de
GIVRY, Secrétaire Général du Comité National Contre le
Tabagisme a bien voulu me faire part d'une enquête qu'il
avait menée auprès de nombreuses personnalités en 1975
et 1976, complétée une nouvelle étude de réactualisation
en 1986. Conscient de l'effet prescripteur des stars, il leur
avait adressé un rapide questionnaire pour connaître les
raisons qui les poussaient à fumer, ou au contraire qui les
incitaient à ne pas ou ne plus fumer. Aucun secteur
médiatique n'avait été épargné. Des acteurs, aux
chanteurs, en passant par les sportifs, les journalistes, les
réalisateurs, les écrivains,... nul ne fut oublié. Une grande
majorité de non-fumeurs se précisait alors. Même, si
parmi eux, il fallait encore distinguer ceux qui ne
fumaient plus, de ceux qui aspiraient fortement à y
parvenir. La leçon venue des Etats-Unis, avait trouvé
écho parmi les stars françaises.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
180
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
cigarettes." pour John WAYNE, ne
pouvaient laisser le lecteur indifférent.
Les
associations
de
consommateurs tentèrent parfois des
actions de lobbying lorsqu'elles
jugèrent l'effet normalisateur de la
célébrité trop important au regard des
caractéristiques du produit ; ainsi peuton noter au début des années 90, des
protestations
d'associations
de
consommateurs
américains9
à
l'encontre de CAMEL pour lequel le
personnage du chameau Joe était jugé
trop "sympathique aux yeux des jeunes
consommateurs". Les pouvoirs publics
eux aussi interviennent quelque fois.
On relève en Australie à la suite d'un
mouvement
consumériste,
l'intervention
discrète
du
gouvernement, en 1980, pour dissuader
la marque ROTHMANS de continuer à
utiliser le comédien Paul HOGAN10,
comme
porte-parole
dans
une
campagne pour les cigarettes de la
marque, qui remportait un "trop" grand
succès
auprès
des
jeunes
consommateurs. Cette intervention du
gouvernement est parfois beaucoup
plus directe comme par exemple en
France avec la loi de 1976, dite loi VEIL,
et limitant l'accès de la cigarette à
certains media tels que la télévision ou
la radio, complétée en 1990 par la loi
EVIN encore plus draconienne et visant
l'interdiction totale de toute publicité
dès 199311.
"Je n'arrose mes orangers qu'avec
du gin comme ça je n'ai qu'à presser le
jus du fruit directement dans mon
verre" déclara en Décembre 1934,
l'acteur William Claude FIELDS au
magazine Hollywood Reporter
Les
boissons
alcoolisées
représentent le second type de produits
ayant lui aussi recouru au service de
__________________
__________________
9 - Tout débuta dans les premières semaines de l'année
11 - Ces dispositions dotent d'ailleurs de la France d'une
1992 alors que diverses études parues dans JOURNAL
OF THE AMERICAN MEDICAL ASSOCIATION
avançaient que les publicités de CAMEL utilisant le
personnage Joe, incitaient considérablement les jeunes à
fumer. Répondant en écho la deuxième semaine de Mars,
l'AMERICAN MEDICAL ASSOCIATION et le Ministre
de la santé, Antonia NOVELLO, demandèrent que la
F.T.C. (Federal Trade Commission) interdise l'utilisation
publicitaire de ce personnage devenu trop célèbre...
des réglementations les plus sévères de la C.E.E.. Et
malgré le lobby des producteurs de cigarettes,
principalement aux Etats-Unis, ces restrictions sont de
plus en plus nombreuses dans les pays occidentaux,
notamment sous la pression des associations de lutte
contre le tabagisme. Voir notamment sur l'aspect
publicitaire - "Les Justifications d'EVIN" François
BELLANGER, COMMUNICATION CB NEWS N°163
du 2 Avril 1990 ; "L'interdiction qui tue" Laurent BAILLY,
STRATEGIES N°695 du 9 Avril 1990 ; "La Pub part en
fumée, le paquet flambe" Maud DOUARD,
COMMUNICATION CB NEWS N°171 du 4 Juin 1990 ;
"Tabac / Alcool : Comment la pub va s'adapter ?" F.B.,
COMMUNICATION CB NEWS N°171 du 4 Juin 1990 ;
"Loi EVIN : les députés entrent dans la danse" Laurent
BAILLY, STRATEGIES N°706 du 27 Juin 1990 ; "Abus
dangereux de la Loi EVIN" Christian PECHENARD,
STRATEGIES N°730 du 4 Février 1991 ; "Tabac : on
rallume ou on écrase ?" dossier collectif,
COMMUNICATION CB NEWS n°275 du 2 Novembre
1992.
10 - Aucune protestation n'eut lieu lorsqu'il fut utilisé en
1972, car il n'était pas connu du public. En revanche la
popularité de son show sur la chaîne nationale 9 lui valut
également un succès plus important en tant que porteparole publicitaire. Et si la publicité pour les cigarettes
fut interdite à la télévision en 1976, Paul HOGAN
continuait d'être utilisé en presse. Ce qui généra la
constitution d'un groupe anti-tabac. L'annonceur cessa
toute utilisation à partir du 30 Juin 1980. Voir :
"Australian case proves self-regulation can work" Len
BLANKET, ADVERTISING AGE du 2 Juin 1980.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
181
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
célébrités notamment pour leur effet
normalisateur.
Là
encore,
leur
association n'est pas récente. Dans les
premières années de ce siècle, la
comédienne Sarah BERNHARDT
posait
déjà
pour
l'absinthe
TERMINUS.
Depuis,
de
très
nombreuses stars ont été utilisées pour
la promotion de boissons alcoolisées ; à
l'exception bien sûr de celles qui nombreuses - étaient par trop connues
pour leur consommation abusive du
produit et qui n'auraient fait que
détériorer son image. Hormis ce cas
particulier, les célébrités représentaient
là aussi a priori, un facteur très
intéressant pour contourner le risque
psychologique et social très important
qui reste attaché au produit,12 et
pouvant
être
perçu
par
le
consommateur comme un puissant
frein à la consommation.
En 1983, Charles ATKIN et
Martin BLOCK menèrent une enquête
sur l'influence discriminante d'un
porte-parole célèbre, comparé à un
inconnu, pour une publicité de boisson
alcoolisée13.
__________________
12 - Voir au sujet du risque perçu, l'étude du Professeur
Hershey H. FRIEDMAN présentée page 211 ainsi que
Jean-Jacques LAMBIN "Le Marketing stratégique" 2ème
édition, Editions McGRAW HILL, Paris, 1991, page 71
13 - Charles ATKIN et Martin BLOCK "An experiment
revealed the effectiveness of celebrity endorsers".
Résultats présentés dans JOURNAL OF ADVERTISING
RESEARCH Volume 23, n°1, des mois de Février/Mars
1983 pp. 57-61. Hormis ses résultats, le principal intérêt
de cette étude résulte sans doute dans le grand soin
apporté à la composition de l'échantillon. Bien que ne
comportant que 196 éléments, il avait été composé avec
de multiples précautions. En effet, la moitié se composait
d'adolescents de 13 à 17 ans pour analyser la différence de
perception avec la seconde moitié, âgée de 18 à 77 ans et
répartis de manière représentative à l'intérieur de ces
La méthode expérimentale
utilisée consista à tester trois versions
quasiment identiques pour une marque
de whiskey. Dans chacun des trois cas,
la publicité était présentée avec une
célébrité, et avec un porte-parole
inconnu. L'acteur Telly SAVALAS fut
utilisé en opposition à une publicité
présentant un homme inconnu d'âge
moyen selon la même présentation
(tenue vestimentaire, position,...) que
dans la publicité originale. Le même
procédé fut utilisé avec une publicité
utilisant l'ancien basketteur Happy
HAIRSTON et avec le mannequin
Cheryl TIEGS avant qu'elle ne devienne
top-model. Dans ce dernier cas, la
publicité avec porte-parole inconnu,
reprenait Cheryl TIEGS, mais ne la
présentait pas comme un célèbre
mannequin international et ses
cheveux avaient été changés de couleur.
Une
échelle
différentielle
sémantique en 18 points fut utilisée
pour tester la publicité elle-même, une
deux tranches d'âges. Au niveau de la répartition par
sexe, il comportait 49% d'hommes et 51% de femmes.
Considérait également le critère de la race puisque 84%
étaient de race blanche, 12% Noirs, et 4% Chicanos ou
Orientaux. 18% venaient de grandes villes, 30% de villes
moyennes 31% de petites localités ou de zônes rurales.
35% étaient (ou leurs parents) issus de classes moyennes
supérieures, 39% de classes moyennes inférieures et 29%
de classes ouvrières ou de classes inférieures. 30% étaient
pratiquants réguliers, 23% pratiquants occasionnels, 25%
rarement, et 22% jamais. La dispersion géographique
enfin visait une certaine diversification avec 52% du
Michigan, 17% de Californie, 17% de New York et 14% de
Géorgie. Voir également "Does advertising increase
alcohol consumption ?" Jacques C. BOURGEOIS et James
G.
BARNES,
JOURNAL
OF
ADVERTISING
RESEARCH Volume 19 n#4, Août 1979, pp. 19-29, et sur
la liaison célébrités et boissons alcoolisées, "Do
celebrities and alcohol mix ?" Steven W. COLFORD,
ADVERTISING AGE du 25 Février 1985.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
182
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
échelle notée de 1 à 10 pour la
crédibilité de la publicité, l'intention
comportementale, ainsi que pour la
notation du personnage (sur les
critères de compétence, confiance et
attrait physique), et enfin une échelle
en 7 points pour la notation de l'image
du produit.
Lorsque l'on observe dans le
tableau présenté ci-après, les notes
moyennes obtenues par les deux types
de publicités, on s'aperçoit que sur les
18 intitulés proposés, 15 donnent un
score supérieur à la publicité utilisant
un porte-parole célèbre. La somme des
18 échelles utilisées donne à cette
dernière un score total de 76,7
(moyenne 4,26) alors que la publicité
avec un porte-parole inconnu obtient
un score total de 72,3 (moyenne 4,02).
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
183
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Critères d'appréciation
de la publicité
Porte-parole
célèbre
Porte-parole
inconnu
Inutile/utile
3,56
3,42
N'aime pas/aime
4,26
4,00
Mauvais/bon
4,07
3,82
Mauvais goût/bon goût
4,46
4,11
Malhonnête/honnête
3,56
3,90
Déplaisant/plaisant
4,61
4,28
Faux/vrai
3,51
3,65
Pas agréable/agréable
4,39
4,33
Irresponsable/responsable
3,86
4,03
Ennuyeux/intéressant
4,14
3,36
Traditionnel/moderne
4,76
4,38
Pas sexy/sexy
3,86
3,54
Faible/fort
4,81
4,16
Indécent/décent
5,11
5,08
Inefficace/efficace
4,59
3,89
Pas important/important
3,26
2,76
Ivre/sobre
4,90
4,79
Pauvre/riche
4,96
4,79
Charles ATKIN et Martin BLOCK
"An experiment revealed the effectiveness of Celebrity Endorsers"
JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH Février/Mars 1983
Extrait du tableau de la page 59 (moyenne, échelle notée de 1 à 7)
La
différence
n'est
pas
significative en ce qui concerne la
crédibilité de l'annonce en général. En
revanche, la célébrité est perçue comme
plus digne de confiance, plus
compétente et plus attrayante.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
184
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Critères d'appréciation
du porte-parole
Porte-parole
célèbre
Porte-parole
inconnu
Digne de confiance
5,79
5,02
Attrayant
6,08
5,77
Compétent
6,08
5,45
Charles ATKIN et Martin BLOCK
"An experiment revealed the effectiveness of Celebrity Endorsers"
JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH Février/Mars 1983
Extrait du tableau de la page 59 (note moyenne : 1 = faible, 10 = beaucoup)
Il en va de même pour l'image du
produit. Les six attributs utilisés
(aime/n'aime
pas,
mauvais/bon,
déplaisant/plaisant,
pas
agréable/agréable, inférieur/supérieur,
pas sexy/sexy) obtiennent de manière
significative, de meilleures notes avec
l'utilisation d'une célébrité avec un
Sujet d'étude
score total de 24,8 (moyenne 4,14)
qu'avec l'utilisation d'un porte-parole
inconnu avec un score total de 22,2
(moyenne de 3,76), sur une échelle en 7
points. La différence du critère
intentionnel au regard du produit est
favorable à la célébrité, mais pas de
manière significative (2,82 contre 2,36).
Type de
répondants
Porte-parole
célèbre
Porte-parole
inconnu
Publicité
Jeunes
4,23
4,02
(moyenne des 18 critères)
Adultes
4,28
4,19
Crédibilité
de la publicité
Jeunes
4,06
4,12
Adultes
3,57
3,81
Porte-parole
Jeunes
6,03
5,42
(moyenne des 3 critères)
Adultes
5,94
5,41
Image du produit
Jeunes
4,13
3,38
(moyenne des 6 critères)
Adultes
4,16
4,15
Intention
comportementale
Jeunes
2,82
1,98
Adultes
2,83
2,74
Charles ATKIN et Martin BLOCK
"An experiment revealed the effectiveness of Celebrity Endorsers"
JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH Février/Mars 1983
Tableau 2 de la page 60
L'étude comporte également
l'intérêt de proposer un croisement
avec l'âge du répondant. Comme on
pouvait s'y attendre, les résultats
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
185
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
démontrent que les jeunes sont plus
impressionnés par un porte-parole
célèbre
On perçoit alors l'intérêt
d'utiliser une célébrité pour la publicité
d'une boisson alcoolisée, puisque même
l'image du produit obtient une
impression
plus
favorable
du
1
consommateur (notamment chez les
jeunes). Cet impact plus important
chez une population jeune peut
s'expliquer selon les auteurs, au regard
d'une perception plus orientée vers le
porte-parole chez les jeunes et vers le
produit chez une population adulte2.
Enfin,
dernier
fondement
évoqué, le souhait d'utiliser un porteparole célèbre peut provenir de la
volonté de personnifier le produit.
6 - Personnification du produit
En
raison
de
ses
caractéristiques
intrinsèques
ou
environnementales, le produit peut
donc rechercher le facteur de
sympathie porté à la célébrité. Ce
facteur de sympathie est alors utilisé
pour "désensibiliser" le sujet de la
communication. Comme nous l'avons
vu, la célébrité intervient comme une
sorte de normalisateur sur des sujets de
__________________
1 - Voir notamment : "Tapping a new style : Heileman
revamps old style, COLT 45 ads" Ira TEINOWITZ,
ADVERTISING AGE du 11 Avril 1988.
2 - Cette influence plus grande d'une cible jeune est
confirmée par les travaux du Professeur FREIDEN, voir
page 222.
communication parfois délicats. Le
publicitaire peut souhaiter aller au delà
de cette normalisation dans certains
cas, en voulant personnifier le produit.
L'objectif est alors de lier fortement
l'image des deux protagonistes célébrité et produit - de manière à ce
qu'aux yeux du consommateur, l'image
de la célébrité cautionne totalement
celle du produit. Dès lors, celui-ci sera
présent dans l'esprit du consommateur
sous les traits du porte-parole. On
perçoit alors parfaitement ici l'intérêt
d'utiliser la publicité pour contribuer à
orienter / modifier l'attitude du
consommateur envers la marque /
l'annonceur3.
Aux Etats-Unis, en 1986,
THONSON-CGR (aujourd'hui sous le
contrôle de GENERAL ELECTRIC)
demanda à son agence de lancer une
campagne sur le thème très sérieux de
la mammographie. C'est là, un sujet
très délicat. Or, l'utilisation adéquate
d'une célébrité peut permettre de
communiquer sans pour autant
vulgariser un thème très sérieux. Les
photos elles-mêmes ainsi que l'emploi
très sombre du noir et blanc étaient
d'ailleurs là pour rappeler le sérieux de
__________________
3 - Voir notamment à ce sujet, les travaux de Scott
MacKENZIE et Richard LUTZ : "Attitude toward the Ad
as a mediator of advertising effectiveness : determinants
and consequences" Richard J. LUTZ, Scott B.
MacKENZIE et George E. BELCH in ADVANCES IN
CONSUMER RESEARCH, Volume 10, R.P. BAGOZZI et
A.A. MITCHELL, Editions : ASSOCIATION FOR
CONSUMER RESEARCH, Ann Arbor, MI, Etats-Unis,
pp. 532-539. "An empirical examination of the structural
antecedents of attitude toward the Ad in an advertising
pretesting context" Scott B. MacKENZIE et Richard J.
LUTZ, JOURNAL OF MARKETING Volume 53, du mois
d'Avril 1989, pp. 48-65.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
186
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
la communication. Jacques HODEN4 se
souvient de la campagne : "En 1986,
avec
l'agence
LORD
GELLER
FEDERICO EINSTEIN de New York,
nous recherchions un concept de
campagne pour sensibiliser le grand
public et les médecins généralistes au
dépistage. On s'est appuyé sur des
femmes pour présenter la chose. Il faut
savoir que le cancer du sein est le
premier tueur de femmes aux EtatsUnis. Il tue une femme sur 11. Tout le
principe de la campagne consistait à
dire qu'il existait un appareil qui
permettait de dépister le cancer du sein
3 ans avant qu'il ne soit décelable par la
palpation. L'agence nous a présenté
différentes campagnes. Nous en avons
retenu deux. Celle utilisant Lee
REMICK, Angela LANSBURY et
Diahann CARROLL pour les EtatsUnis, la deuxième campagne, pour
l'Europe, indiquait simplement que l'on
pouvait gagner 3 ans dans la détection
du cancer, elle ne faisait pas appel à des
notoriétés.
Pour
la
campagne
américaine, nous avons reçu des
milliers de lettres5." Certes, il est
__________________
4 - Jacques HODEN, Directeur de la Communication de
GENERAL ELECTRIC - C.G.R.. Entretien privé accordé
le 29 Juin 1988.
5 - Il est impossible de comparer les résultats des deux
campagnes, dès lors que les annonces n'étaient pas les
mêmes. D'ailleurs, pour cette approche, il aurait été
nécessaire de recourir à des célébrités françaises, Lee
REMICK, Angela LANSBURY et Diahan CARROL
n'ayant pas une notoriété suffisante pour remplir leur
mission en France. Par ailleurs, les plans media n'avaient
également rien de comparable quantitativement. Une
information obtenue "off-record" expliquait alors que les
souhaits de communication de THOMSON-C.G.R.
avaient été "limités par l'administration" en France, car la
mammographie, prise en charge par la Sécurité Sociale,
était un examen qui coûtait relativement cher...
toujours possible de recourir à un
"consommateur type" pour une
communication de ce type, de manière
à rechercher l'identification. Mais le
recours à des porte-parole célèbres
permettait
de
sensibiliser
aux
avantages de ce produit, sans effrayer.
En personnifiant et humanisant une
technique encore peu / mal connue du
grand-public.
Autre exemple, le cas du
magazine HARMONIE DU COUPLE
lancé en France en 1981. Nicolas
MONNIER6 qui eut la charge de ce
lancement, raconte que "le deal était de
lancer la première encyclopédie
pratique sur la sexualité, pour
apprendre à faire l'amour. Dans l'esprit
collectif des Français, il y a une chose
dont ils sont sûrs, c'est qu'ils peuvent
donner des cours au monde entier sur
ce sujet là, mythiquement j'entends. Ce
qui nous a semblé le plus important
était de dédouaner tout le monde et de
normaliser la chose. Le phénomène
"gare" est totalement parisien. On sait
que l'on peut acheter quelque chose de
façon tout à fait anonyme, même si on
l'achète tous les matins. Il y a 300.000
personnes qui achètent en même temps
que vous et vous ne risquez pas d'être
repéré. Par contre, lorsque vous êtes à
Toulouse et que vous allez chercher
votre exemplaire dans votre quartier,
c'est Madame Denis qui vous reçoit et
qui a l'habitude de vous donner aussi Le
sport-auto, Le monde du tennis, Libé, Nousdeux,...
__________________
6 - Nicolas MONNIER, Président de l'agence de publicité
ALICE. Entretien privé accordé le 14 Avril 1988.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
187
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Donc nous sommes allés
chercher une personnalité pour
normaliser la chose. Se posait alors le
problème
du
choix.
C'était
manifestement une femme, parce que le
seul biais pour ne pas attaquer de front
la prétention collective des Français,
s'était de s'adresser aux femmes. De
toutes façons, les hommes sont
tellement plus coincés que les femmes,
que ne peut entrer dans un foyer
quelque chose qui concerne le sexe et
qui est novateur, que par le biais des
femmes. Pour normaliser, il nous fallait
une femme connue qui n'ait pas le
statut de star mythique parce que dans
ce cas elle ne ferait pas le pont
recherché. Il fallait au contraire que ce
soit quelqu'un de très connu mais qui
ait le statut d'avoir une vie quotidienne
comme tout le monde. Il n'y avait pas
mieux
que
Marie-Christine
BARRAULT, par ce qu'elle dit, par ce
qu'elle vit et par ce qu'elle a tourné
comme films,... elle représentait
exactement cet univers. Là-dessus, on a
vérifié par un test auprès de 800
femmes en lançant un certain nombre
de personnalités, en disant : "elle a une
vie de famille normale, elle aime ses
enfants, elle a une vie sexuelle comme
tout le monde, elle a des besoins
d'argent comme tout le monde,..." pour
vérifier les écarts. On a alors retrouvé
Marie-Christine BARRAULT telle que
notre bon sens l'intuitait. Les éditeurs
anglais n'en voulaient pas, parce que ça
leur paraissait une solution mystère
trop tordue. Néanmoins ils ont plié, et
ça s'est vendu à 1,6 million
d'exemplaires pour le numéro 1."
Le concours des célébrités est
également demandé pour personnifier
et humaniser des grandes causes et
diverses organisations charitables. Ces
organismes souhaitent ainsi bénéficier
d'une image plus facilement introduite
auprès du public. En France, on note
les cas de Pierre BELLEMARE, Alain
DELON, Denise GREY, Jean-Claude
BRIALY, Jean CARMET, Victor
LANOUX, Annie CORDIE ou Nicole
GARCIA pour diverses associations de
lutte contre le cancer7, Jean-Yves
TERLAINT pour MEDECINS SANS
FRONTIERES, Nastassja KINSKI pour
EVIAN/LA CROIX ROUGE8, Isabelle
ADJANI, Christophe LAMBERT et
Michel DRUCKER pour l'A.I.C.F.,
Jean-Paul
BELMONDO
pour
MEDECINS DU MONDE, Denise
GREY en faveur de la Fondation pour
la Recherche Médicale9 ou Charles
AZNAVOUR pour les sinistrés
d'ARMENIE. Ainsi que différentes
entreprises personnelles comme celles
de la chanteuse REGINE dans la lutte
contre la drogue, des acteurs Lino
VENTURA ou Michel CRETON pour
l'aide à l'enfance handicapée, ou de la
chanteuse Line RENAUD dans la lutte
contre le Sida, par exemple. Implication
__________________
7 - Voir notamment "Une grande cause essaie le ton de la
comédie" Philippe LEMAIRE, COMMUNICATION CB
NEWS N°244 du 10 Février 1992, qui expose l'approche
originale suivie par la LIGUE CONTRE LE CANCER en
1992.
8 - Voir notamment "Courrir pour une idée : le pari de
Jean-Yve TERLAIN et de MEDECINS DU SANS
FRONTIERES" Gilles HEURE, STRATEGIES n°482 du
22 Juillet 1985 ; "EVIAN : Une campagne de 6 mois au
profit de LA CROIX ROUGE" Philippe DE L'ESTANG,
COMMUNICATION & BUSINESS N°17 du 19 Janvier
1987.
9 - "Denise GREY se mobilise pour la recherche
médiacale" Maurice DALINVAL, LE FIGARO du 17
Novembre 1988.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
188
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
donc des célébrités françaises, mais
intervention plus limitée toutefois d'un
point de vue publicitaire aujourd'hui,
en comparaison de la participation
massive des stars françaises à ces
campagnes "grandes causes" au début
des années 60. Ce, notamment parce
que d'une manière étrange, leur
intervention n'est pas toujours bien
perçue / appréciée par leur public.
Si l'on observe comparativement
ce qui se passe dans les pays anglosaxons et notamment aux États-unis,
les célébrités très souvent sollicitées
paraissent moins hésiter à s'engager
dans différentes campagnes de
communication en faveur de telle ou
telle cause. Il faut reconnaître par
ailleurs que si c'est un point positif
pour l'image de l'organisme, cela peu
également le devenir pour la célébrité.
On peut rappeler l'exemple déjà
mentionné de Clint EASTWOOD, Lou
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
GOSSETT Jr ou Charles BRONSON
dans une campagne pour le respect des
parcs publics, de James Earl JONES,
Telly SAVALAS ou Edward James
OLMOS participant à des campagnes
de lutte contre la délinquance, de Paul
NEWMAN et sa femme, l'actrice
Joanne WOODWARD pour l'aide aux
enfants déshérités via leur propre
fondation, de Frank SINATRA, Bob
HOPE, Michael LANGDON, George
BURNS et bien d'autres apparaissant
sur des publicités pour la JUVENILE
DIABETES FOUNDATION qui lutte
contre le diabète chez l'enfant, de Jerry
LEWIS extraordinaire promoteur du
TELETHON, de William SHATNER,
Ben VEREEN ou Morgan FAIRCHILD
qui, avec de nombreuses autres stars
participent à la communication de
l'association CARE, de Whoopi
GOLDBERG, Billy CRYSTAL et Robin
WILLIAMS pour la collecte en faveur
des sans-abri organisée par H.B.O., de
Bill COSBY, Lucille BALL, Mike
DOUGLAS, Bob HOPE et Dionne
WARWICK pour la CROIX ROUGE10,
de John LIGHTGOW, Pee Wee
HERMAN,
Scott
BAIO,
Clint
EASTWOOD, Mister T, Michael J.
FOX, Ally SHEEDY, Roy SCHEIDER,
Ronald et Nancy REAGAN11,... dans des
campagnes de lutte contre la drogue12,
__________________
10 - "RED CROSS drive result of research" Anonyme,
ADVERTISING AGE du 15 Janvier 1979.
11 - "N'en prends pas ! Sinon..." Olivier LAMOUR,
STRATEGIES n°541 du 15 Décembre 1986.
12 - "Celebrities join anti-drug campaign" Ronnie
TELZER, ADVERTISING AGE du 27 Avril 1987 ; "AIDS
on agenda for ANPA meeting" Patrick REILLY,
ADVERTISING AGE du 18 Avril 1988. Voir également :
"Experimentation for pretesting public health programs :
The case of the anti-drug abuse campaign" M. RAY et S.
189
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
de Burt LANCASTER, Jeffrey BANKS,
Calvin KLEIN, Kenzo TAKADA, Earvin
Magic JOHNSON, Claire TREVOR,
Liz TAYLOR13 ou Edward ASNER à
nouveau entourés de très nombreuses
autres stars, sur des publicités en
faveur de la lutte contre le Sida14,...
Et ce ne sont là que quelques
exemples à peine représentatifs ne
considérant pas les sportifs15. Aux
Etats-Unis, les stars semblent ainsi
beaucoup plus utiliser l'énorme pouvoir
de représentation, de prescription et de
personnification qu'elles détiennent, au
service d'objectifs non commerciaux
car bien entendu, ces participations
sont
logiquement
effectuées
bénévolement. En 1985, l'agence
américaine FALLON MAC ELLIGOT
eut même l'audace de mettre à profit
l'image de stars décédées, en utilisant
une photographie des tombes de Jimmy
HENDRIX, John BELUSHI, Jim
MORRISON, Brian JONES, Elvis
PRESLEY, Lenny BRUCE, Janis
JOPLIN et Sonny LISTON dans une
campagne de lutte contre la drogue16.
Sur des sujets beaucoup moins
sensibles et parce que leurs produits ne
sont pas toujours matérialisables, les
entreprises de services peuvent
également souhaiter utiliser cette
approche. "Lorsque vous ne pouvez pas
le toucher, vous devez vendre ses
bénéfices"17 mais la tâche n'est pas
toujours aisée18. C'est pourquoi
l'utilisation d'un porte-parole célèbre
peut devenir un vecteur favorable à la
présentation de ces bénéfices, par le
biais de la personnification du
produit19.
__________________
16 - L'accroche percutante de l'annonce était : "Utilisez la
drogue, et vous aussi pourrez avoir un monument
construit à votre nom" !
17 - William J. STANTON et Charles FUTRELL op. cit.
p.498.
18 - "Pour conserver les clients de produits immatériels
WARD, ADVANCES IN CONSUMER RESEARCH, 3
(1976), pp. 278-286.
13 - "Sida : le front britannique" Patricia ROLLAND,
STRATEGIES n°544 du 12 Janvier 1987. Voir également
l'émission "Culture Pub" de Christian BLACHAS du 15
Novembre 1992, production M6/COMMUNICATION
CB NEWS.
14 - Voir également : "Minorities target of new aids
education" Ronald KOTULAK, CHICAGO TRIBUNE du
26 Juillet 1987 et "The politics of AIDS" Bill HEWITT,
NEWSWEEK du 10 Août 1987.
15 - Voir notamment : "Charity reap benefits : When
athletes
give
their
time"
Wally
ADVERTISING AGE du 19 Mai 1980.
TOKARZ,
livrés et consommés régulièrement, il faut leur rappeler
régulièrement ce qu'il obtient. Les promesses faites pour
capter le client doivent être reformulées régulièrement,
alors que ces promesses sont satisfaites. Il faut même, à
intervalles réguliers, amener le client à reprendre
conscience de la source du produit fourni, de crainte qu'il
n'oublie qui est son vendeur anonyme et silencieux."
Theodore LEVITT "L'imagination au service du
Marketing", Editions ECONOMICA, Paris (1985) page
112.
19 - "Nous, en Marketing, parlons depuis des années de
publicité d'image, mais ce n'est pas assez précis pour ce
qui je pense est nécessaire pour un service. J'appelle la
forme de publicité de l'image recherchée par un service, la
«publicité personnage»." "The role of advertising in
service marketing creating relationship" Petit déjeuner de
l'American Marketing Association / New York du 21 Mai
1986, Intervention de Joanne BLACK, vice-Présidente
senior de MASTERCARD INTERNATIONAL.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
190
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Pour symboliser l'importance du
choix d'une bonne assurance et donc
d'un "bon partenaire" qui ne posera
aucun
problème
lors
d'une
indemnisation éventuelle, le Fond
américain F.F.C.I. eut recours en 1986 à
une photo d'un film des comédiens
ABBOTT
et
COSTELLO.
Leur
constante bonne humeur bien connue
humanisait et devait personnifier la
compagnie d'assurance. Aux EtatsUnis, nombreuses furent et sont encore
les sociétés de services qui adoptèrent
cette technique en s'associant même
parfois le concours d'un porte-parole
célèbre,
officiel,
permanent.
AMERICAN
EXPRESS
recourut
pendant plusieurs années au comédien
Karl MALDEN, Jimmy CONNORS
prêta son concours à une autre
compagnie de ce secteur : PAINE
WEBBER.
GREAT
WESTERN
SAVINGS fit appel à John WAYNE,
A.T.T. à Cliff ROBERTSON, les agents
d'assurance indépendants I.I.A.A. à
Raymond BURR, la banque BOWERY
SAVINGS
au
sportif
Joe
DiMAGGIO20,... Mais nous reviendrons
là aussi plus tard, sur le cas du porteparole permanent.
Le transport aérien est l'un des
secteurs caractéristiques des services,
qui a depuis longtemps recours aux
célébrités, notamment aux Etats-Unis.
L'avion fait partie de leur vie
professionnelle et privée, seul moyen de
relier rapidement les différents points
géographiques où s'exercent leurs
activités. Par ailleurs, la célébrité et
__________________
20 - "Advertising pure and simple" Hank SEIDEN,
Editions AMERICAN MANAGEMENT ASSOCIATION,
1976, 1990, page 128.
notamment la star de cinéma, est
également
renommée
pour
ses
exigences en matière de luxe et de
confort personnel. Elle devenait ainsi
un formidable porte-parole pour des
compagnies qui ne pouvaient plus
simplement argumenter sur les prix.
Par son choix, elle allait permettre
d'identifier une compagnie plutôt
qu'une autre, de la personnifier. Les
compagnies aériennes furent très
nombreuses à recourir à cette stratégie,
avec parfois des célébrités très
inattendues, comme par exemple une
annonce originale, réalisée en 1954 pour
PAN AM, et qui présentait Albert
SCHWEITZER nommé Prix Nobel de
la Paix deux ans auparavant. Il y a
même parfois une adéquation subtile
comme l'utilisation en 1978 de l'écrivain
James A. MICHENER par UNITED
AIRLINES pour ses vols à destinations
des îles Hawaii ou encore le surfeur
Robby NAISH, sollicité pour les mêmes
produits par HAWAIIAN AIRLINES.
En
1965,
la
BRITISH
OVERSEAS
AIRWAYS
CORPORATION s'offrit les jambes de
Marlène DIETRICH et AIR FRANCE
les visages de Brigitte BARDOT et
Jeanne MOREAU. La compagnie
française utilisa d'autres stars outreAtlantique, telles que Danny KAY,
Gene KELLY, James STEWART,
Maurice CHEVALIER ou Gregory
PECK. En 1971, IRAN AIR employa
l'acteur Curd JURGENS, BRITISH
AIRWAYS recourut avec succès à un
porte-parole officiel en l'acteur Robert
MORLEY alors TWA échouait en
utilisant un autre acteur britannique,
Peter SELLERS. BRANIFF sollicita
Andy WARHOL et le boxeur Sonny
LISTON.
EASTERN
AIRLINES
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
191
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
engagea Orson WELLES et plus
récemment, WESTERN AIRLINES
s'attacha les services des acteurs
Leonard
NIMOY,
William
SHATNER21, Fred ASTAIRE et Gene
KELLY.
En
1987,
la
compagnie
AUSTRIAN AIRLINES, associée à la
ville de Vienne, eut recours à un plan
du film Tuer n'est pas jouer avec Timothy
DALTON et Maryam D'ABO. En 1988,
CONTINENTAL AIRLINES s'offrit
quant à elle, les services de l'acteur
George BURNS. La LUFTHANSA
détourna en 1989, l'image du Premier
soviétique Michael GORBATCHEV.
Enfin,
dernièrement
CATHAY
PACIFIC
AIRWAYS
utilisa
le
tennisman Michael CHANG, alors
qu'un autre tennisman, Stephan
EDBERG - a l'instar de Bjorn BORG
dans le passé - choisissait SAS. L'acteur
Christophe LAMBERT préféra quant à
lui AIR FRANCE, alors que VIRGIN
ATLANTIC sollicitait le chanteur
compositeur Phil COLLINS ou le
dictateur Manuel NORIEGA (dans un
détournement). Sans oublier le Japon
où l'acteur Richard GERE, la chanteuse
Janet JACKSON et le footballeur Ruud
GULLIT volèrent sur JAPAN AIR
LINES, Frank SINATRA et SNOOPY
sur ALL NIPPON AIRLINES et Julio
IGLESIAS sur la compagnie espagnole
IBERIA qui souhaitait personnifier ses
services aux yeux des consommateurs
japonais. Un grand nombre d'exemples
qui ne sont qu'une illustration très
partielle des associations célébrités /
__________________
21 - Voir également le cas détaillé de la célébrité expert
page 409 pour ce dernier exemple.
compagnies aériennes qui eurent et ont
encore lieu.
Enfin, la personnification du
produit peut être recherchée à des fins
institutionnelles.
C'est
le
cas
particulier du porte-parole officiel
d'une entreprise ou d'un groupe. La
célébrité personnifie alors l'entité
économique aux yeux du public.
Déclinée dans toute la communication
de l'entreprise, elle permet de fédérer
l'ensemble de ses activités sur un
visage. Ce rôle sera détaillé dans le
cadre du chapitre suivant, comme nous
l'avons déjà précisé.
Ainsi, une célébrité n'est pas
simplement recherchée pour son
impact générateur d'attention. Comme
exposé plus haut, divers autres
fondements sont à l'origine de son
utilisation en publicité. Il est par
ailleurs très rare qu'elle ne soit
recherchée que pour l'un de ces
fondements. Et si la recherche d'impact
perdure d'une campagne à l'autre, le
publicitaire d'aujourd'hui est souvent
motivé par d'autres fondements
associés. Maintenant, cette utilisation
correspond aussi à une action sur les
motivations
des
consommateurs.
Divers chercheurs ont d'ailleurs mené
plusieurs études sur ce thème
particulier.
C / Etude des motivations du
consommateur
Etudes et travaux de recherche sur le rôle des
célébrités en publicité
Cette section porte l'intitulé
"Etude
des
motivations
du
consommateur" car nous considérerons
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
192
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
au départ qu'elles sont à la base de la
définition de l'attitude22, elle-même
génératrice du comportement de ce
consommateur. Dans un article célèbre,
Ernst DICHTER expliqua qu'en
publicité, la psychologie de la
recommandation verbale reposait sur
l'étude de deux problèmes introduits
par les deux questions suivantes :
1. Qu'est ce qui motive une
personne à parler d'un
produit ou d'un service ?
2. Qu'est ce qui motive une
personne à écouter une
recommandation puis à agir
en fonction d'elle ?23
Cette section sera composée de
deux parties distinctes. Dans un
premier temps, il sera rappelé
l'enseignement de la recherche d'un
point de vue général, et directement en
liaison avec le sujet de cette thèse. Dans
__________________
22 - Nous n'aborderons la notion d'implication du
consommateur que page 216, avec la présentation du
modèle de Richard E. PETTY et John T. CACIOPPO.
Selon le raisonnement de KRUGMAN, dans le cas d'une
forte implication la communication persuasive agit sur
les données cognitives, puis l'attitude et enfin le
comportement. Alors que dans le cas d'une faible
implication, cette même communication agit sur les
données cognitives puis sur les comportements et enfin
sur l'attitude. Herbert KRUGMAN "The impact of
television advertising : learning without involvement"
PUBLIC OPINION QUATERLY, 29, Automne 1965, pp.
349-346. Voir également Jean-Jacques LAMBIN, 1991, op.
cit. page 115 et suivantes.
23 - Ernest DICHTER "How word-of-mouth advertising
works", HAVARD BUSINESS REVIEW Volume 44, n°6,
Novembre 1966, p. 148. Au cours de son étude sur 488
résultats d'achat, le Docteur DICHTER identifia
notamment que 7,5% pouvaient être attribués à des
témoignages de célébrités.
un second temps, seront présentés les
résultats d'une expérimentation.
1 / L'enseignement général de la
recherche
Aujourd'hui, le consommateur
multi-facettes doit considérer un
nombre
croissant
d'informations,
émanant de multiples et diverses
sources
tantôt
excitant
ses
motivations24, tantôt générant son
refus - un frein - de l'acceptation25. Or,
les variables cognitives ont longtemps
constitué la base de la communication
persuasive comme étant les principaux
médiateurs de l'acceptation26 ou du
refus27 du message publicitaire. Le
chemin empreinté par le consommateur
pour la formation de l'attitude est donc
__________________
24 - Voir également : "Some internal psychological factors
influencing consumer choice" William Mc GUIRE,
JOURNAL OF CONSUMER RESEARCH Volume 2, du
mois de Mars 1976, pp. 302-319.
25 - "Le discours publicitaire dissuade autant qu'il
persuade et il semble que le consommateur soit, sinon
immunisé, du moins un usager assez libre du message
publicitaire" Jean BAUDRILLARD "Le système des
objets" Editions TEL GALLIMARD n°33, Paris (1968) p.
231.
26 - Voir notamment : Peter L. WRIGHT "The cognitive
processes mediating acceptance of advertising"
JOURNAL OF MARKETING RESEARCH, Volume 10,
du mois de Février 1973, pp. 53-62 et Robert B. ZAJONC
et Hazel MARKUS "Affective and cognitive factors in
preferences" JOURNAL OF CONSUMER RESEARCH
Volume 9, du mois de Septembre 1982, pp. 123-131.
27 - Voir notamment : "Factors affecting cognitive
resistance to advertising" Peter L. WRIGHT, JOURNAL
OF CONSUMER RESEARCH Volume 2, du mois de Juin
1975, pp. 1-9.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
193
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
de plus en plus complexe, soumi à de
multiples images28, et de plus en plus
spécifique à chaque individu. "Les
besoins deviennent ambigus au fur et à
mesure que les choix individuels se
multiplient."29 Ce dernier devant faire
face à des intermédiaires plus ou moins
nombreux, plus ou moins influents.
Une
influence
subie,
parfois
inconsciemment, par le consommateur
et tenant notamment à son humeur30,
ses croyances31, au contexte de la
communication32 ou au porte-parole du
message par exemple33.
De nombreux auteurs ont
observé et observent encore les
modalités de la formation de cette
attitude34, conditionnant souvent le
comportement du consommateur35.
Issus du marketing, de la psychologie,
__________________
28 - Selon I. BIEDERMAN, qui utilisa un échantillon pris
dans le dictionnaire WEBSTER, l'homme moyen est en
mesure d'identifier facilement environ 30.000 objets /
images. I. BIEDERMAN "Recognition by components - A
theory
of
Human
image
understanding"
PSYCHOLOGICAL REVIEW, 94 (1987), pp. 115-147.
Simon J. THORPE estime quant à lui que si l'on utilise un
échantillon plus large au départ - du type de
l'enclyclopédie BRITANNICA - on peut estimer de 50 à
60.000 le nombre de ces images et objets, qui toujours
selon l'auteur peuvent représenter "une iconothèque de
"60 à 100.000 possibilités, et ceci dans un délai
[d'identification] très bref, de l'ordre de 100 à 150 ms".
Jean-Marie PRADIER, Derrick de KERCKHOVE, MarieClaude VETTRAINO-SOULARD, Simon J. THORPE,
Herbert ZETTL "Le téléspectateur face à la Publicité"
Rencontres sur "Oeil, cerveau et comportement du T.V.
spectateur", MEDIATOP, Editions NATHAN, Paris
(1989) pp. 63-65. Voir également : "Personality and
persuasion : need for cognition moderates the persistence
and resistance of attitude changes" Curtis P.
HAUGTVEDT et Richard E. PETTY, JOURNAL OF
PERSONALITY AND SOCIAL PSYCHOLOGY Volume
63, n°2, (1992), pp. 308-319, ainsi que "Do consumers
evaluate products by adding or averaging attribute
information ?" C. Michael TROUTMAN et James
SHANTEAU, JOURNAL OF CONSUMER RESEARCH
Volume 3, du mois de Septembre 1976, pp. 101-106, où les
auteurs expliquent que l'évaluation du produit par le
consommateur se fait en définitive, en réalisant une
moyenne des attributs qui lui sont soumis.
29 - "The limits to satisfaction" William LEISS, Editions
UNIVERSITY OF TORONTO, Toronto, Canada, 1976,
pp. 61-63. Voir également : "The varieties of consumption
experience : compraring two typologies of emotion in
consumer behavior" William J. HAVLENA et Morris B.
HOLBROOK, JOURNAL OF CONSUMER RESEARCH
Volume 13, du mois de Décembre 1986, pp. 394-404.
__________________
30 - Voir notamment : "Mood states and consumer
behavior : a critical review" Meryl Paula GARDNER,
JOURNAL OF CONSUMER RESEARCH Volume 12, du
mois de Décembre 1985, pp. 281-300.
31 - Voir notamment : "Are product attribute beliefs the
only mediator of advertising effects on brand attitude ?"
Andrew A. MITCHELL et Jerry C. OLSON, JOURNAL
OF MARKETING RESEARCH Volume 18, du mois
d'Août 1981, pp. 318-332.
32 - Voir notamment : "A description of the affective
quality attributed to environments" James A. RUSSELL
et Geraldine PRATT, JOURNAL OF PERSONALITY
AND SOCIAL PSYCHOLOGY Volume 38, n°2 (1980) pp.
311-322.
33 - Judson MILLS et Elliot ARONSON "Opinion change
as a function of the communicator's attractiveness and
desire to influence" JOURNAL OF PERSONALITY AND
SOCIAL PSYCHOLOGY Volume 1, n°2, (1965) pp. 173177.
34 - Une attitude du consommateur envers la publicité,
puis - ou directement - envers la marque. L'objectif dans
le cas d'une attitude positive envers la publicité au
préalable, étant de transférer ensuite ce sentiment à
l'attention de la marque, en créant ainsi une attitude
favorable à la marque. Voir notamment sur ce point :
"Attitude toward the ad as a mediator of consumer brand
choice" Terence A. SHIMP, JOURNAL OF
ADVERTISING N# 10, du mois de Juin 1981, pp. 9-15.
35 - Voir notamment : James F. ENGEL, Roger D.
BLACKWELL et Paul W. MINIARD "Consumer
behavior", 7ème édition, Editions DRYDEN PRESS,
Hinsdale, Il, (1968, 1993), Etats-Unis.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
194
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
de la sociologie36 ou de l'anthropologie
notamment, ces chercheurs tentent indépendamment le plus souvent, d'où
certains conflits - de comprendre la
logique personnelle, le cheminement
suivi par ce consommateur37, qui le
mène tantôt à l'acte, tantôt au refus de
l'acte. Notre propos n'est pas de
présenter ici, l'ensemble de ces travaux
- parfois contradictoires38 - en la
matière, mais simplement de rappeler
certaines grandes lignes permettant
d'introduire notre sujet.
Pour compléter la présentation
débutée page 93 à propos de la notion
d'impact, citons également parmi les
chercheurs incontournables en matière
de communication persuasive, Carl
HOVLAND39 de l'Université de Yale40,
__________________
et son plus célèbre disciple William Mc
GUIRE41. Concernant les différentes
étapes de ce cheminement, ce dernier
propose notamment un processus en
six étapes - voir schéma ci-après - qui
mène traditionnellement de la prise de
connaissance du message d'information
par le consommateur, jusqu'au
déclenchement de son comportement :
Présentation du message
Attention portée au message
Compréhension, conclusion,
arguments
Soumission à la conclusion
Conservation de la nouvelle
conviction
Comportement sur les bases de la
conviction
William Mc GUIRE
"Behavioral and Management Science"
Collectif, Editions DAVIS H.L. / SILK A.J. Ronald Press (1978), Etats-Unis
D'après la figure 1 de la page 158.
36 - Voir notamment : "The distorted mirror : reflections
of the unintented consequences of advertising" Richard
W. POLLAY, JOURNAL OF MARKETING Volume 50,
du mois d'Avril 1986, pp. 18-36.
37 - Voir notamment : "A behavior modification
perspective on marketing" Walter R. NORD et J. Paul
PETER, JOURNAL OF MARKETING Volume 44, de
Printemps 1980, pp. 36-47.
38 - Leon FESTINGER ne concluait-il pas son étude en
disant : "nous ne pouvons pas supposer sans hésitation
l'existence d'une relation entre le changement de
l'attitude et le comportement". "Behavioral support for
opinion change" Leon FESTINGER, PUBLIC OPINION
QUATERLY, 28, 3, Automne 1964.
39 - Le modèle décrit par Carl HOVLAND repose sur le
principe que si la source utilisée est caractérisée par
l'expérience et la loyauté de l'information, alors la
communication est persuasive. Voir notamment : Carl
HOVLAND et Walter WEIS "The influence of source
credibility on communication effectiveness" PUBLIC
OPINION QUATERLY 15 (1951) pp. 635-650 et Carl
HOVLAND, Irving L. JANIS Harold H. KELLEY
"Communication and persuasion", Editions YALE
UNIVERSITY PRESS (1953), New Haven, Ct, Etats-Unis
40 - On parlera d'ailleurs de l'Ecole de Yale par rapport à
l'Ecole de FISHBEIN.
41 - William Mc GUIRE proposa un modèle selon lequel
l'efficacité du message reposait sur la connaissance, la
ressemblance avec la source et la sympathie éprouvée
pour elle. Ainsi, parce que les sources connues appréciées
et familières au consommateur sont perçues comme
attrayantes, le message est persuasif. Voir notamment :
William Mc GUIRE "Behavioral and Management
Science" Collectif, Editions DAVIS H.L. / SILK A.J.
Ronald Press (1978), Etats-Unis. Voir également : "The
Consumer Mind : How to tailor ad strategies" Richard
VAUGHN, ADVERTISING AGE du 9 Juin 1980 page 45 ;
"How the consumers react to advertising" Fred VAN
RAAIJ,
INTERNATIONAL
JOURNAL
OF
ADVERTISING n°8 (1989) page 263 ; "A review and
critique of the hierarchy of effects in advertising" Thomas
E. BARRY et Daniel J. HOWARD, INTERNATIONAL
JOURNAL OF ADVERTISING n°9 (1990) page 122 ;
Grant Mc CRACKEN "Who is the celebrity endorser ?
Cultural foundations of the endorsement process"
JOURNAL OF CONSUMER RESEARCH Volume 6,
Décembre 1989, page 311.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
195
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Dès lors, une campagne ne sera
efficace que si elle parvient à franchir
avec succès chacune des étapes,
séparant la prise de connaissance avec
le produit et le déclenchement du
comportement. La satisfaction du
consommateur étant souvent le lien
entre ces étapes42 dont les effets sont
hiérarchisés43.
Le
processus
se
complexifie lorsque l'on prend
conscience du fait que l'affectation de
certaines étapes de manière positive
peut entraîner, en contrepartie et sans
que l'on puisse véritablement agir à
l'encontre, une affectation négative des
autres44. Au vu de ces conclusions
Kristian PALDA,45 démontra que ces
étapes pouvaient également intervenir
dans un ordre différent et que dans
divers cas, certaines pouvaient même
ne pas survenir du tout.46 Ainsi l'achat
__________________
42 - Voir notamment : "A cognitive model of the
antecedents and consequences of satisfaction decisions"
Richard L. OLIVER, JOURNAL OF MARKETING
RESEARCH, Volume 17, du mois de Novembre 1980, pp.
460-469.
43 - Robert J. LAVIDGE et Gary A. STEINER op. cit. Voir
également : "Advertising research : The state of the art"
Charles RAMOND, Editions ASSOCIATION OF
NATIONAL ADVERTISERS Inc. (1976), New York,
Etats-Unis, page 15.
peut-il survenir par nécessité, induit
par le style de vie du consommateur,
pour cause d'achats imbriqués, en
souvenir de préférences acquises
pendant l'enfance, comme étant
conforme aux normes de certains
groupes ou par imitation de certains
autres,
exclusivement
sur
recommandations - personnelles ou
non -, en tant que substitut d'autres
produits, ou être fondé sur des bases
superficielles ou aléatoires, comme
l'analysent Richard OLSHAVSKY et
Donald GRANBOIS47.
L'appréhension du processus de
formation ou de modification de
l'attitude48 du consommateur est donc
SCIENCE INSTITUTE, Cambridge, Etats-Unis, 1973,
suggère que cette hiérarchie s'applique essentiellement
aux nouveaux produits qui apparaissent importants aux
yeux du consommateurs. Mais que lorsque les marques
sont relativement indifférenciées et que les produits sont
arrivés à la phase de maturité de leur cycle de vie, la
décision d'achat peut intervenir en premier lieu sous la
pression de conditions de vente personnelles pour n'être
suivie qu'en ensuite, par un changement de l'attitude et
de la compréhension des différents éléments de cette
séquence. Voir également : "Strategic advertising
campaigns" Don E. SCHULTZ, 3ème édition, Editions
NTC BUSINESS BOOKS (1991), Lincolnwood, Ill, EtatsUnis, pp. 221-231.
47 - Dès lors "une part significative des achats peut ne pas
effects : a partial evaluation" JOURNAL OF
MARKETING RESEARCH du mois de Février 1966, pp.
13-24.
être précédée d'un processus de décision" concluent
Richard OLSHAVSKY et Donald GRANBOIS en 1979,
confirmant ainsi les travaux de KASSARJIAN - Harold H.
KASSARJIAN
"Presidential
address
1977
anthropomorphism and parsimony" ADVANCES IN
CONSUMER RESEARCH Volume 5 ed. H. Keith
HUNT, Ann ARBOR, MI : ASSOCIATION FOR
CONSUMER RESEARCH pp. xii-xiv - sur ce sujet.
Richard W. OLSHAVSKY et Donald H. GRANBOIS
"Consumer decision making - fact of fiction ?" JOURNAL
OF CONSUMER RESEARCH Volume 6, du mois de
Septembre 1979, page 98.
46 - Leo BOGART - op. cit. page 372 et 373 - cite à ce
48 - L'un des modèles précurseurs fut décrit par Martin
sujet Michael RAY, qui dans "Marketing communication
and the hierarchy-of-effects" Ed: MARKETING
FISHBEIN. Ce modèle est fondé sur le fait que l'attitude
(A) est prévisible lorsque l'on parvient à déterminer les
196
44 - Voir notamment : "The power of feelings in
understanding advertising effects" Julie A. EDELL et
Marian
CHAPMAN
BURKE,
JOURNAL
OF
CONSUMER RESEARCH Volume 14, du mois de
Décembre 1987, pp. 421-433.
45 - Kristian S. PALDA "The hypothesis of a hierarchy of
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
un phénomène relativement complexe
et dont il est extrêmement difficile,
voire hasardeux d'essayer d'appliquer
d'une manière générale, les résultats à
l'ensemble
des
consommateurs49.
Comment analyser par exemple la
portée de l'expérience de chacun des
consommateurs visés, et l'influence
positive ou négative50 que celle-ci peut
avoir sur leurs motivations et donc a
fortiori sur leur attitude51 ? Comment
considérer également de manière
homogène,
et
scientifiquement
acceptable, la puissance du phénomène
de rétroaction dans la formation de
cette attitude.
critères de choix ainsi que l'ordre de ces critères dans le
processus de décision. Ainsi obtient-on le modèle : A = Σ
Pi Vi où Pi représente l'image de la marque au regard du
critère i et Vi la puissance de critère. Dès lors il est
possible de toucher le consommateur en agissant de cinq
manières différentes. 1 - En modifiant sa perception de la
marque, 2 - En modifiant la valeur des critères, 3 - En
permettant la mémorisation d'informations publicitaires,
4 - En suscitant des réponses cognitives et 5 - En
introduisant un contexte émotionnel. Voir notamment :
"An investigation of the relationships between beliefs
about an object and the attitude toward the object"
HUMAN RELATIONS, n°16 du mois d'Août 1963, pp.
233-240 ainsi que "A consideration of beliefs, attitudes
and their relationship" Ivan D. STEINER et Martin
FISHBEIN, CURRENT STUDIES IN SOCIAL
PSYCHOLOGY, Editions HOLT RINEHART AND
WINSTON (1965), New York, Etats-Unis pp. 107-120 ;
"A consideration of beliefs and their role in attitude
measurements" READINGS IN ATTITUDE THEORY
AND MEASUREMENT, Editions JOHN WILEY &
SONS (1967) pp. 257-266 ; Jean-Michel RONSSE, op. cit.
page 174. Il fut bien sûr contesté par différents auteurs :
citons à simple titre d'exemple le modèle Vector de Olli
T. AHTOLA "The Vector model of preferences : an
alternative to the FISHBEIN model" JOURNAL OF
MARKETING RESEARCH Volume 12, du mois de
Février 1975.
Lorsque le consommateur est
exposé à la publicité, la formation de
son attitude face au message transmis ainsi qu'au regard des conditions dans
lesquelles il lui est transmis - sera
influencé positivement, négativement
ou de manière neutre par un
phénomène
de
rétroaction.
Ce
phénomène est généré par une
connaissance préalable, une association
d'idées, une interprétation directement
reliée par lui au produit ou au message.
Comment contrôler alors l'aspect
positif ou négatif de ce phénomène
pour chacun des consommateurs ? Sur
ce point, David AAKER cite le modèle
construit par Morgan JONES qui
l'utilisa dans un test à propos du
dentifrice CREST aux Etats-Unis. Ce
dentifrice bénéficia d'un témoignage en
sa faveur de la part de l'Association
Dentaire Américaine. Le modèle en
question fut employé peu de temps
après. "JONES nota que CREST était
perçu comme ayant un désavantage sur
le goût qui aurait pu contribuer à la
rétroaction
négative.
L'acheteur
fréquent fut présumé à ce point
49
__________________
- Morris B. HOLBROOK et Elizabeth C.
HIRSCHMAN "The experiential aspects of consumption
: consumer fantasies, feelings and fun" JOURNAL OF
CONSUMER RESEARCH Volume 9, du mois de
Septembre 1989, pp. 132-140.
50 - Voir également : "Cognitive dissonance and
consumer behavior : a review of the evidence" William H.
CUMMINGS et M. VENKATESAN, JOURNAL OF
MARKETING RESEARCH Volume 13 du mois d'Août
1976, pp. 303-308.
51 - "L'expérience peut agir comme un renforcement
positif ou négatif : elle peut apporter des informations et
des sensations agréables, synonymes de réussite comme
elle peut être source d'informations négatives. Elle
déclenchera alors des comportements d'évitement qu'il
importe aussi d'analyser, parfois comme faisant partie
d'un processus de motivation et non pas forcément de
démotivation." Sandra MICHEL "Peut-on gérer les
motivations ?" Editions PUF GESTION, Paris, 1989, p. 83.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
197
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
soucieux de sa santé que l'attrait du
goût était moins important que la
rétroaction positive qui pouvait
exister"52 notamment en ce qui
concerne l'efficacité du dentifrice, à
propos de la prévention des carries par
exemple.
D'autres auteurs parvinrent
même au résultat que la construction
de l'attitude ne pouvait pas être le reflet
d'un processus de décision. Dans cet
esprit, Robert E. SMITH et William R.
SWINYARD53 définissent le choix
__________________
comme
pouvant
dépendre
"d'algorithmes d'origine cognitive ou
d'objectifs
heuristiques
ou
de
connaissances". Leurs travaux portant
sur
l'analyse
comparative
du
consommateur exposé à la publicité, au
regard de celui bénéficiant d'un essai,
ils concluent que "la publicité ne
semble pas pouvoir développer
d'attitudes fortes". Ainsi la publicité
influencerait-elle plus les achats
d'essais
qu'elle
ne
susciterait
d'implication profonde en faveur du
produit, et donc de comportements
durables.
Comment,
dans
ces
conditions, l'utiliser efficacement une
fois le produit lancé, et alors que le
soucis de l'annonceur est de stimuler le
réachat54 et donc une consommation
habituelle et soutenue de son produit ?
Le consommateur ayant déjà eu
connaissance du produit, les résultats
de la mesure de son attitude seront
alors encore plus difficiles à
appréhender, sachant que "l'expérience
avec le produit a affecté son attitude 10
à 1.000 fois plus que son exposition aux
annonces ou aux films publicitaires"55.
D'autre part, l'attitude du
consommateur
est
difficilement
appréhendable au regard même des
__________________
54 - "La question clé est si oui ou non les gens continuent
improve marketing decisions" JOURNAL OF
MARKETING Volume 34 du mois de Juillet 1970, pp. 5257. Morgan J. JONES "A non-stationary probability
diffusion model of consummer brand choice behavior"
Working paper n°146, Western Management Science
Institute, U.C.L.A.
d'acheter une chose après qu'ils l'aient ou que leurs amis
et voisins l'aient utilisée" Andrew S.C. EHRENBERG
"Repetitive advertising and the consumer" JOURNAL
ADVERTISING RESEARCH 14, du mois d'Avril 1974,
page 26. Ce qui fait dire à Andrew S.C. EHRENBERG
que la publicité n'a pas pour fonction de créer de
nouveaux besoins, mais de renforcer des habitudes
d'achat déjà développées.
53 - Robert E. SMITH et William R. SWINYARD,
55
52 - David A. AAKER "Using buyer behavior models to
"Attitude-behavior consistency : the impact of product
trial versus advertising", JOURNAL OF MARKETING
Volume 20, Août 1983, pp. 257-267
- Charles K. RAMOND "Must advertising
communicate to sell ?" HARVARD BUSINESS REVUE
43, 5, de Septembre / Octobre 1965, pp. 152.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
198
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
définitions qui lui sont données. Fort
heureusement, si celles-ci sont
multiples et variées,56 l'objectif reste
cependant le même : attirer l'attention
du consommateur et agir de manière
telle sur son attitude, qu'il soit
persuadé d'adopter un comportement57
donné. C'est la raison pour laquelle
l'attitude fait souvent naturellement
figure de pièce manquante au puzzle.
Car on sait aujourd'hui aisément
utiliser la publicité - entre autre - pour
attirer / capter l'attention du
consommateur. On sait également quel
comportement
achat,
vote,
déplacement, adhésion,... - on souhaite
lui faire adopter. Mais en ce qui
concerne le lien entre ces deux
éléments les automatismes rationnels
simples n'existent pas toujours. Tant la
persuasion du consommateur, et donc
le
déclenchement
de
son
comportement, dépendent d'un dosage
A
l'aide
d'exemples
caractéristiques, nous étudierons dans
le cadre du chapitre IV, les nombreuses
précautions à prendre pour essayer de
rendre le message crédible lorsque l'on
utilise une célébrité58 car bien souvent
"une personne sain d'esprit ne croit pas
réellement à une publicité ou à une
offre promotionnelle ; pas de la manière
que vous croyez un père ou un bon
ami",59 ou encore le sens donné par le
consommateur à la publicité ne
correspond pas à celui recherché par
__________________
__________________
56 - "L'attitude est un processus de médiation groupant
58 - John HOUSEMAN, vieil acteur et producteur
un ensemble d'objets de pensée dans une catégorie
conceptuelle qui évoque des modèles de réponses" écrit
William Mc GUIRE qui détaille ensuite les différentes
approches dans "Attitudes and attitudes changes",
Editions LINDSEY & ACRISON (1985) Etats-Unis,
Chapitre 19 pp. 239 et suivantes. Voir également JeanNoël KAPFERER "Les chemins de la persuasion"
Editions DUNOD ENTREPRISE, Paris (1990).
américain très digne et très distingué fut jugé très
crédible par les consommateurs - ainsi qu'en
considération de l'accroissement de clientèle de
l'annonceur - dans son rôle de porte-parole pour la
compagnie financière SMITH BARNEY au début des
années 80. Sécurisant, il incarnait la posibilité de "faire de
l'argent avec les vielles méthodes". En revanche, le public
ne parvint jamais à croire un instant qu'il pouvait manger
des hamburgers chez McDONALD'S lorsque celui-ci eut
recours à ses services peu de temps après. Il n'était pas du
tout crédible. "It seemed like a good idea at the time"
Christy MARSHALL, FORBES du 28 Décembre 1987.
Voir également l'analyse de ce cas par Shekhar MISRA et
Sharon E. BEATTY "Celebrity spokesperson and brand
congruence : an assessment of recall and affect"
JOURNAL OF BUSINESS RESEARCH, n°21, 1990, page
161, et pour d'autres exemples de cas d'échec :
"Advertising blunders of the rich and famous" John
MOTAVALLI, ADWEEK du 11 Janvier 1988.
57 - Il est impératif de bien dissocier ici l'attitude du
comportement.
L'attitude
n'est
qu'une
étape
intermédiaire pouvant générer, freiner ou simplement
rester deconnectée du comportement recherché. A titre
d'exemple, on pourra citer le cas d'école de la campagne
collective pour la consommation de lait aux Etats-Unis.
Bien qu'ayant eu un grand "succès" et qu'elle parvint à
modifier l'attitude des consommateurs à l'égard du lait, la
consommation du produit continua de baisser.
"Marketing : beef industry turning to ads to change
meat's reputation" Terry MINSKY, THE WALL STREET
JOURNAL du 1er Avril 1982. Voir également : G. Ray
FUNKHOUSER "Le pouvoir de persuasion", Editions
SEUIL, Paris (1989) pp. 57-100.
spécifique à chaque individu et
fonction du produit, entre les éléments
cognitifs, les éléments affectifs et les
éléments conatifs contenus dans le
message. Et William Mc GUIRE de
définir une matrice de persuasion
composée de trois pôles - crédibilité,
attirance et puissance - pour parvenir à
déclencher le comportement souhaité.
59 - Nicholas SAMSTAG "Because you have always told
half-truths" SATURDAY REVIEW Volume 49 du 8
Janvier 1966, p. 112.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
199
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
l'annonceur. Même avec une célébrité
séduisante dans le simple espoir de
susciter un mimétisme recherché par le
consommateur.
Car
"la
source
d'attirance devient critique pour
l'impact persuasif, dans la mesure où le
récepteur est motivé par la mise en
valeur du sens de sa propre réputation
sociale, de son rôle gratifiant d'un point
de vue relationnel, en s'identifiant avec
des sources admirées et introjectant
leurs attitudes"60.
Par ailleurs, d'autres auteurs
nous portent à croire que même la
recherche du porte-parole célèbre le
plus crédible possible ne serait jamais
la solution parfaite. A la fin des années
70, Brian STERNTHAL, Lynn W.
PHILLIPS et Ruby DHOLAKIA
démontrèrent que "la source hautement
crédible réduit l'obtention de contrearguments lorsque les destinataires
sont prédisposés de manière négative à
un attrait, alors qu'une source
faiblement crédible stimule l'obtention
d'arguments supports parmi ceux qui
ont une prédisposition favorable au
message"61. Ainsi, les trois chercheurs
estiment-ils qu'il est parfois plus
judicieux de recourir à une source
faiblement crédible car "lors de
l'utilisation d'une source hautement
__________________
60 - William Mc GUIRE (1985) op. cit. page 264.
"L'attirance physique met en valeur l'impact persuasif
sans tenir compte du sexe de la source ou du récepteur.
Peut-être simplement en raison du fait qu'il n'est pas
simplement motivé par la beauté mais par d'autres
facteurs tels que l'estime, l'intelligence."
61 - Brian STERNTHAL, Lynn W. PHILLIPS et Ruby
DHOLAKIA "The persuasive effect of source credibility :
a situational analysis" PUBLIC OPINION QUATERLY,
42, 3, Automne 1978, p. 307.
crédible, le résultat est incertain quant
à ses modalités d'obtention, il peut être
dû à des dispositions favorables envers
le comportement ou simplement au fait
que les raisons avancées le sont par une
source hautement crédible."
Dans l'optique de ces auteurs,
une forte crédibilité sera considérée
comme
génératrice
du
"signal"
permettant de réduire les raisons qui
motivaient
jusqu'à
lors
le
comportement du consommateur à
l'égard du produit, mais qui ne parvient
pas à "consolider une disposition
favorable à son attention". Lorsque la
source sera faiblement crédible, le
consommateur aura davantage la
possibilité de croire que son attitude
est l'aboutissement de motivations qui
lui sont propres et non de celles
communiquées par la source. C'est la
raison pour laquelle on peut alors
penser que l'attitude sera plus
puissante - car perçue comme plus
personnelle, plus naturelle - que si elle
n'était étayée que par le discours d'une
source externe.
Quand à l'attirance physique de
la source - caractéristique relativement
importante et souvent mise à
contribution lors de l'utilisation de
stars - et de sa possible influence sur le
comportement du consommateur, il est
là aussi très difficile de tirer des
conclusions universelles. Certes, à
l'aide de différents contre-exemples
pourrait-on conclure à l'instar du
Professeur Benoy JOSEPH que
l'attirance physique "n'est pas une
source forte ou particulièrement
importante
d'influence
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
200
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
interpersonnelle"62. Mais comment se
convaincre des résultats des études
allant dans ce sens, dés lors qu'au
regard de l'hypothèse du Professeur
CHAIKEN, on s'aperçoit que dans des
conditions
de
laboratoires
les
répondants se montrèrent plus tentés
"d'adopter
des
fonctionnements
cognitifs hautement logiques, et par
conséquent,
de
sous-utiliser
l'information du caractère attirant dans
la formation de leur opinion"63.
On comprend dès lors, dans
l'optique développée par Peter
DRUCKER64 que l'analyse de cette
attitude conditionne sensiblement la
démarche
marketing
dans
son
ensemble. Mais à l'intérieur de ce vaste
champ de recherche, concentrons nous
maintenant sur l'étape suivante, en
observant
les
principaux
enseignements de la recherche sur le
thème particulier de l'utilisation d'un
porte-parole célèbre.
__________________
62 - W. Benoy JOSEPH "The credibility of physically
attractive
communicators"
JOURNAL
ADVERTISING, Volume 11, n°3, 1982, p.22.
OF
63
- Shelly CHAIKEN "Communicator physical
attractiveness and persuasion' JOURNAL OF
PERSONALITY AND SOCIAL PSYCHOLOGY, n°37,
1979, p. 1395.
64 - "L'objectif du marketing est de rendre la vente
superflue. L'objectif du marketing est de connaître et
comprendre si bien le consommateur que le produit ou le
service lui convienne et se vende lui-même" Peter
DRUCKER "Management : tasks, responsabilities,
practices" Editions HARPER & ROW, New York, EtatsUnis, 1974, page 61. Voir également dans la même optique
"Marketing : a contemporary analysis" Robert D.
BUZZELL, Robert E. M. NOURSE, John B.
MATTHEWS jr. et Theodore LEVITT, Editions
McGRAW-HILL, New York, Etats-Unis, 1972, page 17 :
"la vente concentre son attention sur les besoins du
vendeur, le marketing sur les besoins de l'acheteur".
2 / Recherche sur l'utilisation d'un
porte-parole célèbre :
En 1980, la société d'études
américaine VIDEO STORYBOARD fit
paraître les résultats d'une enquête
menée l'année précédente auprès de
15.000 personnes à qui il fut demandé
quels étaient les films publicitaires qui
les avaient marqués au court des quatre
semaines
précédentes.
Dave
65
VADEHRA - Président de VIDEO
STORYBOARD - estime que pendant
cette période, un Américain moyen est
exposé à plus de 2.500 films
publicitaires. Le classement des 20
premiers est reproduit ci-dessous.
Chacune des marques suivie par
le symbole ☺ utilisait la participation
d'une célébrité dans le film publicitaire
considéré.
Classement VIDEO STORYBOARD
des films publicitaires
diffusés à la télévision américaine (1979/80)
☺
☺
12 - Jell-O ☺
1 - Coca-Cola
2 - Mc Donald's
11 - Schlitz
3 - Pepsi
13 - Levi's
4 - Miller
☺
14 - Ford
☺
__________________
65 - Voir notamment : "COKE, Mc DONALD'S lead
outstanding TV commercials" Dave VADEHRA,
ADVERTISING AGE du 26 Mai 1980. Le classement
présenté est extrait d'une liste dont la compilation tint
compte de trois facteurs : le poids et l'efficacité media
ainsi que le souvenir spontané positif d'un ou plusieurs
films de la même campagne. 5% des répondants
nommèrent une mauvaise marque par rapport au film
dont ils avaient le souvenir (leur vote fut comptabilisé en
faveur de la marque). Un tiers des répondants interrogés
déclara ne se souvenir d'aucun film en particulier.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
201
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
5 - Oscar Mayer
☺
7 - Dr Pepper ☺
8 - Polaroid ☺
9 - Budweiser ☺
6 - Alka Seltzer
10 - Bell Telephone
15 - Purina Cat Chow
16 - Anheuser Busch
17 - Life Cereal
18 - Meow Mix
☺
☺
19 - Purina Dog Chow
20 - Fruit of the Loom
A priori, l'utilisation d'une
célébrité doit permettre de jouer à la
fois sur les trois principales
composantes de l'attitude. Le cognitif,
en n'utilisant pas simplement une
célébrité, mais un porte-parole célèbre,
véhicule d'un message d'information
concret à l'origine. Le conatif, car la
célébrité ne doit pas seulement attirer
l'attention du consommateur, mais
également faciliter le déclenchement du
comportement recherché, en lui
fournissant des éléments en ce sens. Et
bien sûr l'affectif, car elle est surtout
sensée être connue et appréciée par la
cible avant d'apparaître sur une
publicité. Dans ces conditions, ce
dernier élément doit logiquement
permettre de favoriser le passage du
cognitif au conatif, voire de contourner
le cognitif en jouant immédiatement
sur l'émotionnel.
C'est la raison pour laquelle de
nombreux
chercheurs66
__________________
66 - Hershey H. FRIEDMAN et Linda FRIEDMAN - op.
cit. pp. 63-71 - citent le cas de H. RUDOLPH qui en 1947,
dans "Attention and interest factors in advertising",
Editions PRINTERS' INK, New York, montrait déjà à la
suite d'une étude comparative de 6 stratégies
publicitaires, que l'approche testimoniale recourant à
l'utilisation d'une célébité, obtenait les meilleurs scores
auprès du lectorat considéré. Les auteurs mentionnent
par ailleurs le cas de W. FREEMAN en 1957 qui, dans
"The big name", Editions PRINTERS' INK, New York,
faisait état d'une étude menée par Daniel STARCH et son
équipe. Les résultats démontraient qu'en moyenne, les
consommateurs lisaient plus les publicités utilisant le
témoignage d'une célébrité que les publicités sans
principalement aux Etats-Unis étudièrent le problème de l'impact des
célébrités sur les motivations des
consommateurs et le déclenchement ou
non de leur comportement d'achat dans
de meilleures conditions67. Les résultats
de quelques unes de ces études, parmi
les
plus
représentatives68
sont
présentés et analysés ci-après. L'intérêt
de ces études est de pouvoir
appréhender leurs résultats au regard
du sujet de cette thèse. Cependant, ces
résultats ne peuvent être parfaitement
appréciés qu'en ayant connaissance de
la méthodologie suivie pour leur
obtention, qui comporte un intérêt
aussi grand que les résultats eux-
témoignage. On notera également en contrepartie, une
autre analyse de la société d'études américaine VIDEO
STORYBOARD TESTS qui mettait en évidence un
accroissement du désintérêt des consommateurs pour les
spots publicitaires utilisant des célébrités, à la fin des
années 80 aux Etats-Unis. "PEPSI eyes WILLIS, wife"
Patricia WINTERS, ADVERTISING AGE du 6
Novembre 1989.
67 - En 1977, Hershey H. FRIEDMAN, Salvatore
TERMINI et Robert WASHINGTON publiaient dans
JOURNAL OF ADVERTISING Volume 6, pp. 22-24, les
résultats d'une étude sur trois mesures (crédibilité, goût
et intention d'achat) faite sur des échelles divisées de 0 à
10, auprès d'un échantillon d'étudiants. Pour l'occasion,
un expert professionnel, le Président de la compagnie et
un consommateur type avaient été comparés à l'acteur
américain Al PACINO, sur une publicité pour une
marque de vin à base de sangria. Une cinquième publicité
de contrôle était utilisée pour vérification. Sur les trois
mesures, aucun des trois porte-parole n'était apparu
aussi influent que Al PACINO. Comparé à la publicité de
contrôle, ses scores étaient : crédibilité (4,1 contre 2,8),
goût (5,6 contre 4,0) et intention d'achat (3,9 contre 2,7).
68 - Elles sont toutes issues de revues américaines ou
internationales. Diverses recherches, notamment auprès
des deux principaux organismes que sont l'I.R.E.P.
(Institut d'Etudes et de Recherches Publicitaires) et
l'A.D.E.T.E.M. (Association Nationale du Marketing)
n'ont malheureusement pas permis de trouver à ce jour,
similaires études réalisées en France.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
202
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
mêmes. C'est la raison pour laquelle, la
présentation qui suit tentera autant
que possible de donner les détails
méthodologiques qui furent observés.
La première étude présentée
date de 1961 et fut menée par deux
publicitaires américains de l'agence
KENYON & ECKARDT Inc. : Arthur J.
KOVER, Project Supervisor du
Département Recherche et Seymour
LIEBERMAN,
vice-Président
Responsable du groupe Marketing de
l'agence69.
Leur analyse porta sur un
échantillon de 590 propriétaires de
véhicules automobiles. Les répondants
furent sélectionnés sur six marchés
différents de manière à obtenir une
variété quant aux régions et à la taille
des marchés. Puis, l'échantillon fut
divisé selon un procédé aléatoire, en
deux sous-échantillons d'importance
relativement égale. Pour chacun des
échantillons, les répondants se virent
projeter à leur domicile, un des deux
films publicitaires en faveur d'une
marque automobile, conçus pour
l'occasion. Chaque film utilisait un
porte-parole célèbre différent, dont
l'étude ne relate malheureusement pas
les noms. En revanche, les auteurs
précisèrent que ces deux porte-parole
avaient été choisis parce que leur âge,
leur apparence physique ainsi que leurs
manières
personnelles
étaient
différentes.
Le questionnaire comportait
deux parties. La première consistait après projection du film - en utilisant
un échelle de Likert, à poser au
répondant la question suivante :
"Que ressentez-vous au sujet de
la personne présente dans ce
film : Diriez-vous que vous
l'aimez beaucoup, que cous
l'aimez un peu, sans opinion à
son sujet, que vous ne l'aimez
pas, que vous ne l'aimez pas du
tout ?
Dans la seconde partie, le
répondant se voyait remettre une liste
d'adjectifs qu'il devait noter de 0 à 10,
au sujet du porte-parole. Les résultats
furent les suivants :
__________________
69 - "Selecting commercial spokesmen" Arthur J. KOVER
et
Seymour
LIEBERMAN,
JOURNAL
OF
ADVERTISING RESEARCH, Issue N# 5, du mois de
Septembre 1961, pp.22-25.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
203
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Porte-parole
Porte-parole
A
B
Aime beaucoup
36%
31%
Aime un peu
41%
35%
Sans opinion
19%
31%
N'aime pas
4%
2%
N'aime pas du tout
0%
1%
100%
100%
298
292
Echelle d'attitude
TOTAL
Base (nombre de répondants)
Arthur J. KOVER et Seymour LIEBERMAN
"Selecting Commercial Spokeperson"
JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH N#5 Sept. 1961, p.23
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
204
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Porte-parole A
Porte-parole B
Traits de personnalité
Aime le
N'aime pas
Score de
Aime le
N'aime pas
Score de
du porte-parole
porte-parole
le porte-
différence
porte-parole
le porte-
différence
parole
parole
Maturité
8.8
8.2
+06
8.2
7.1
+1.1
Intelligent
8.6
7.8
+0.8
8.6
7.4
+1.2
Sincère
8.9
6.5
+2.4
8.5
6.5
+2.0
Amical
8.7
7.1
+1.6
8.1
7.0
+1.1
Décontracté
8.2
6.6
+1.6
8.0
6.1
+1.9
Convaincant
8.2
6.1
+1.8
8.1
5.7
+2.4
Terre-à-terre
8.4
6.6
+1.8
7.8
5.6
+2.2
Viril
7.8
6.7
+1.1
7.9
6.8
+1.1
Sympathique
7.9
6.3
+1.6
8.2
6.7
+1.5
Fort
7.9
6.5
+1.4
8.0
6.3
+1.7
Cultivé
8.0
6.5
+1.5
7.9
6.1
+1.5
Vif / vivant
7.4
6.0
+1.4
7.6
6.6
+1.0
Bon sens de l'humour
7.8
5.8
+2.0
7.3
5.3
+2.0
Energique
6.5
5.7
+0.8
6.7
5.9
+0.8
Jeune
4.6
3.6
+1.0
6.5
5.4
+1.1
Distant
2.5
3.5
-1.0
1.8
3.0
-1.2
Froid
1.5
3.4
-1.9
1.7
2.8
-1.1
Dépassé
2.1
3.3
-1.2
1.3
2.4
-1.1
Borné
1.5
3.5
-2.0
1.2
2.9
-1.7
Faible
1.9
3.2
-1.3
1.5
2.4
-0.9
Base
232
66
195
97
Arthur J. KOVER et Seymour LIEBERMAN
"Selecting Commercial Spokeperson"
JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH N#5 Sept. 1961,
d'après le tableau de la page 24
On s'aperçoit que - logiquement
- les répondants qui aiment le porteparole donnent des notes plus fortes
aux adjectifs positifs, et que
inversement, ceux qui n'aiment pas le
porte-parole donnent des notes plus
fortes pour les adjectifs négatifs. Les
résultats du calcul du coefficient de
corrélation montrèrent qu'il existait
une corrélation entre les scores de
différence des deux porte-parole.
La dernière étape de l'analyse
consista à calculer les moyennes des
scores de différence, pour trouver les
traits de personnalité les plus
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
205
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
intéressants. Il ressortit que le porteparole idéal pour vendre des
automobiles devait en priorité être
sincère, convaincant, terre-à-terre et
avoir un bon sens de l'humour...
Traits de personnalité
moyenne des
Traits de personnalité
moyenne des
du porte-parole
scores
du porte-parole
scores
Sincère
+2.2
Intelligent
+1.2
Convaincant
+2.1
Viril
+1.1
Terre-à-terre
+2.0
Jeune
+1.1
Bon sens de l'humour
+2.0
Maturité
+0.9
Energique
+0.8
Décontracté
+1.8
Cultivé
+1.7
Distant
-1.1
Sympathique
+1.6
Faible
-1.1
Fort
+1.6
Dépassé
-1.2
Amical
+1.4
Froid
-1.5
Vif / vivant
+1.2
Borné
-1.9
Base
590
Arthur J. KOVER et Seymour LIEBERMAN
"Selecting Commercial Spokeperson"
JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH N#5 Sept. 1961, p.25
Certaines limites sont avancées
par les auteurs qui réservent leurs
conclusions pour le cas de vente
d'automobiles
uniquement,
les
résultats
pouvant
être
fondamentalement différents pour
d'autres produits. En revanche,
précisant que les automobiles des films
A et B étaient différentes, on peut
également s'interroger sur la similitude
ou non des deux scénarii. Dans
l'affirmative, le modèle de la voiture a
peut-être
influencé,
même
inconsciemment, le répondant ? Dans le
cas contraire, un biais n'est-il pas là
aussi possible, au regard du scénario et
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
de son appréciation consciente ou pas,
par le répondant ?
Dans un second temps, on
rappellera qu'il ne s'agissait pas de
qualification spontanée, mais assistée,
et que l'analyse doit être replacée dans
son contexte, à savoir le début des
années 60, aux Etats-Unis.
En 1972, le professeur Joseph
M. KAMEN dirigea une enquête1 sur le
__________________
1 - Ses principaux enseignements furent reproduits en
1975 dans la revue JOURNAL OF ADVERTISING
RESEARCH sous le titre "What a spokesman does for a
sponsor" Joseph M. KAMEN, Professeur de Marketing à
206
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
rôle d'un porte-parole dans la
communication de la compagnie
pétrolière américaine AMOCO Oil alors connue sous le nom de
AMERICAN OIL COMPANY.
L'enquête visait à étudier
l'impact de l'utilisation d'un porteparole célèbre - en l'occurrence le
chanteur musicien Johnny CASH - sur
l'image de la compagnie pétrolière.
L'enquête
est
particulièrement
intéressante, notamment en raison des
moyens qui furent mis en oeuvre pour
analyser
le
phénomène.
La
méthodologie suivie comportait trois
étapes.
La première étape - appelée
monitoring marketing - fut réalisé avec
le concours de NATIONAL FAMILY
OPINION Inc. L'enquête porta sur un
échantillon de 1.500 personnes et fut
menée pendant 21 mois sur deux
régions des Etats-Unis : le Sud-Est et le
Mid-Ouest. Des questionnaires de 12 à
16 pages furent confiés à chaque fois à
la personne qui, dans le ménage, était le
principal acheteur de carburant. Une
partie du questionnaire concernait
directement l'intérêt de l'association
AMOCO / Johnny CASH, pour savoir si
la célébrité était convaincante dans son
rôle. L'enquête portait également sur le
jugement qualitatif des autres marques
(en utilisant des échelles à 7 niveaux) ;
sur le niveau de satisfaction du
consommateur au regard de 7 items
(qualité du produit, variété proposée,
l'Université Indiana Northwest ; Abdul G. AZHARI,
Directeur de la cellule Recherche consommateur à la
compagnie AMOCO Oil ; Judith R. KRAGH, analyste
marketing à la compagnie AMOCO Oil. JOURNAL OF
ADVERTISING RESEARCH, Volume 15, N#2, Avril
1975.
qualité des chemins d'accès, services de
réparation et d'entretien, prix des
carburants, intérêt porté à la
communauté et publicité commerciale)
; sur l'analyse du brand-switching2
pendant les six derniers mois ; sur la
mesure du degré d'appréciation de la
publicité pour les carburants dans sa
région.
Pour la deuxième étape, une
enquête téléphonique fut menée sur un
échantillon d'un peu plus de 1.000
personnes, en Juin 1972 et en Février
1973. La première vague concerna un
échantillon
d'automobilistes
sélectionnés au hasard (mais toujours
également répartis dans les deux
régions retenues). La seconde vague se
concentra sur les 15 métropoles des
régions statistiques standard où
AMOCO effectuait ses plus fortes
ventes. Cette distinction provenait du
fait que les études préalables avaient
révélé que Johnny CASH était
relativement moins bien accepté dans
les grandes métropoles. Chaque groupe
fut également divisé en deux sousgroupes. Chaque sous-groupe se voyait
questionné sur AMOCO, mais sur le
plan comparatif, les concurrents cités
différaient d'un sous-groupe à l'autre.
Enfin, pour la dernière étape, les
chercheurs utilisèrent le raisonnement
de KRUGMAN, pour mener deux
études expérimentales. La première en
Janvier 1972 sur trois groupes de 1.000
personnes : le premier groupe fut
exposé à une animatique neutre, le
second fut questionné sur le logotype
__________________
2 - Passage d'une marque à l'autre.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
207
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
et le troisième sur l'association Johnny
CASH / Logo. Tous les matériels
utilisés étaient en couleur pour éviter
certains biais. La seconde étude, menée
en Septembre 1973, était une analyse
des facteurs deux à deux sur un
échantillon de 1.000 personnes. Avec ou
sans Johnny CASH et avec ou sans
montage des paroles.
Au sujet des biais, notons que les
questions sur Johnny CASH n'étaient
posées que lorsqu'il apparaissait. Ainsi,
concernant les questionnaires où son
cas n'était pas traité, des questions
neutres étaient rajoutées pour obtenir
des longueurs équivalentes. Pour
évaluer l'image du chanteur et celle de
la compagnie, deux listes d'adjectifs -
assortis à chaque fois d'échelles à 5
niveaux - furent proposées aux
répondants, et pour éviter l'effet de
lassitude, Johnny CASH bénéficiait de
34 items, nombre qui fut réduit à 24
pour la publicité AMOCO et à
seulement 17 expressions pour l'analyse
de l'image de marque de la compagnie.
Enfin, au départ, le cas de Johnny
CASH fut étudié parmi celui de 4
autres célébrités (Andy GRAVATELLI,
Arthur GODFREY, Danny THOMAS,
Ed Mac MAHON).
Le tableau de résultats présenté
ci-après montre le changement de
l'image d'AMOCO après l'utilisation de
Johnny CASH, pour la région Sud-Est
et la région Mid-Ouest.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
208
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Différence en pourcentages pour chaque trait de l'image de la compagnie
AMOCO après l'utilisation de Johnny CASH
Sud - Est
Mid-Ouest
Services des détaillants
Préoccupés à satisfaire le client
6
7
Les meilleurs détaillants
5
5
Ont ma totale confiance
3
1
Donnent un excellent service
9
6
Sont très commodes
Orientation client de la compagnie
7
9
Travaille très dur pour satisfaire ses clients
12
13
Recherche constamment des améliorations
12
0
Fait payer des prix honnêtes
Réputation institutionnelle
7
5
Leader de l'industrie des carburants
10
9
A la meilleure essence
12
8
Excellent placement financier
6
7
Excellente compagnie où travailler
2
5
Soucieuse de l'environnement
9
5
Excellente entreprise citoyenne
4
1
Compagnie qui a ma totale confiance
Publicité
7
1
Utilise une publicité divertissante
20
13
12
4
Utilise une publicité informative
Joseph M. KAMEN, Abdul C. AZHARI et Judith R. KRAGH
"What a spokesman does for a sponsor"
JOURNAL OF MARKETING RESEARCH, Vol 15, n°2, Avril 1975, p. 23
Une grande majorité des
répondants trouvèrent Johnny CASH
convaincant dans son rôle de porteparole de la marque AMOCO, soit en
raison de sa personnalité, soit parce
qu'ils trouvaient le discours lui-même
convaincant, soit enfin parce que le
chanteur disposait d'une image comme
étant à l'abri de besoins financiers et
qu'il était perçu comme une source
crédible pour cette raison. A l'inverse
les répondants non convaincus minoritaires - objectèrent soit qu'il
était chanteur et n'avait donc pas de
lien direct avec la vente de carburant,
soit
tout
simplement
qu'ils
n'appréciaient déjà pas le personnage
auparavant.
En définitive, cette étude montra
que le porte-parole célèbre avait
favorisé la croissance du taux de
reconnaissance de la marque AMOCO,
comme étant l'un des trois premiers
investisseurs en publicité sur le marché
du
carburant.
Les
auteurs
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
209
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
reconnaissant que "c'est peut-être là le
principal enseignement à l'utilisation
d'un porte-parole", il fut analysé que
Johnny CASH avait permis une
meilleure sensibilisation à la marque avec une nuance près, concernant les
jeunes hommes automobilistes urbains
pour lesquels les résultats étaient
sensiblement plus faibles1.
Concernant le tableau présenté
ci-dessus, un évident effet de halo
général fut reconnu. Quant aux
résultats moins important de le MidOuest que dans de Sud-Est. Ils peuvent
en partie, aisément s'expliquer par un
effet de plafond généré par une
implantation de la compagnie plus
caractéristique dans cette région des
Etats-Unis.
A l'Eté 1973, l'image de la
publicité de la compagnie s'était
améliorée, comme le montrent les
résultats du tableau présenté cidessous. Les résultats du Mid-Ouest
doivent une fois encore être relativisés
par un effet de plafond. Par ailleurs, il
est à noter que Johnny CASH ne fut
jamais utilisé dans des spots
promotionnels ou pour des produits
annexes (pneus, batteries,...). Enfin,
plus de la moitié des répondants
reconnurent que le porte-parole
convenait bien à la marque, et en tout
état de cause bien mieux que les 4
autres porte-parole potentiels. Ce
dernier point inquiétait - crainte d'un
__________________
1
- On rappellera ici que Johnny CASH est
essentiellement un chanteur de musique "country", ce qui
peut probablement expliquer en partie le phénonème de
rejet de la part d'un population citadine, au moment de
l'avènement de la musique "disco".
effet boomerang - beaucoup AMOCO,
au regard des très nombreuses lettres
de protestation qui furent adressées au
siège, le premier mois de l'exploitation
des films publicitaires avec Johnny
CASH.
Différence en pourcentages des
caractéristiques de
l'image de la publicité de la marque
AMOCO
après l'utilisation de Johnny CASH
Sud - Est Mid -Ouest
Amicale
16
5
Informative
12
1
Sincère
11
2
Divertissante
14
7
Intéressante
11
3
Attirante
2
0
Efficace
12
4
Convaincante
7
6
Originale
8
1
Joseph M. KAMEN, Abdul C. AZHARI et Judith R. KRAGH
"What a spokesman does for a sponsor"
JOURNAL OF MARKETING RESEARCH, Vol 15, n°2, Avril 1975, p. 24
Si l'utilisation de Johnny CASH
apporta indéniablement un plus - tant
quantitatif que qualitatif - à l'image de
la compagnie AMOCO, il faut préciser
que cette innovation publicitaire fut
accompagnée par l'introduction de
nouveaux services, d'une amélioration
de l'esthétisme des stations services,
ainsi que de diverses opérations
promotionnelles, dont l'influence n'est
pas mesurée - si toutefois cela était
possible - par les auteurs.
D'autre part, ce cas fut présenté
comme une innovation. L'apparition le
1er Janvier 1972 sur les petits écrans,
d'une célébrité du monde du spectacle
en tant que porte-parole d'une marque,
se distinguant des témoignages
ponctuels, prestations d'acteur et
autres cautions d'expert. Or, on peut
retrouver différents cas similaires dans
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
210
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
le passé. L'actrice Joan BENNETT
n'avait-elle pas été nommée porteparole officiel et exclusif des parfums
SEVETEEN en 1930 ? Bob HOPE,
porte-parole officiel des lames de rasoir
GEM en 1937 ? Anita LOUISE, porteparole
officiel
des
laboratoires
NAYLIFE en 1940 ? Et plus original le
personnage du célèbre dessinateur Al
CAPP, Li'l ABNER, nommé porteparole officiel des céréales CREAM OF
WHEAT en 1942... Enfin, comment ne
pas penser au cas de Fred ALLEN qui
fut au début des années 40, le célèbre
porte-parole officiel de la compagnie
TEXACO,
l'un
des
principaux
concurrents de AMOCO...? Or, pour
chacun de ces quelques exemples,
l'implication de l'intéressé justifiait le
terme de porte-parole officiel.
L'industrie et la distribution des
carburants a d'ailleurs souvent eu
recours à des célébrités aux Etats-Unis.
Peut-être est-ce en raison du fait que
les stations service sont souvent
perçues comme étant "un collecteur de
taxe à qui chacun est obligé de payer
un péage périodique représentant le
prix de l'utilisation de sa voiture"2. Dès
lors, l'utilisation d'une célébrité était
tout à fait indiquée. Maintenant, quant
au mode d'utilisation du porte-parole
officiel3, notons que deux ans avant la
__________________
2 - "Marketing Myopia" Theodore LEVITT, HARVARD
campagne
AMOCO,
Catherine
DENEUVE entamait officiellement à la
télévision américaine, une "carrière" de
porte-parole officiel du parfum
CHANEL n°5, qui allait durer 8 ans4 !
En 1979,
le Professeur
Hershey H. FRIEDMAN et Linda
FRIEDMAN menèrent une autre étude
sur ce sujet5. Celle-ci est également
intéressante notamment parce qu'elle
prend en considération des risques de
différente nature, concernant les
produits testés et parce qu'elle vérifie le
modèle de Mc GUIRE6.
Les chercheurs isolèrent tout
d'abord trois types de témoignages
publicitaires : la célébrité, connue pour
ses activités autres, telles que ses
spectacles ou ses émissions ; le
professionnel expert, dont l'expérience
et les connaissances sur le produit sont
mises à profit ; et le consommateur
type, utilisateur ordinaire du produit.
Ils convinrent au vu des résultats des
études préalables que "la confiance est
probablement la dimension majeure
sous-jacente à toute source de
crédibilité. Sans elle, toute autre qualité
du porte-parole publicitaire est
incapable de produire un changement
d'attitude". Les auteurs citent alors
publicitaires.Voir sur ce point, l'analyse du porte-parole
officiel présentée page 397.
BUSINESS REVIEW Septembre / Octobre 1975, pp. 44.
4 - "Les belles de CHANEL N°5" Véronique DAHM,
3 - On reprochera la mise en exergue de l'appellation elle-
COMMUNICATION CB NEWS N°193 du 17 Décembre
1990.
même de porte-parole, comme porte-drapeau,
représentant officiel de la compagnie. Nous verrons que
cette appellation correspond à une "implication" de la
célébrité beaucoup plus importante. Son image devenant
peu à peu celle de l'entreprise - et réciproquement fédérant l'ensemble des opérations de communication, et
pas simplement l'apparition au cours de quelques films
5 - Hershey FRIEDMAN et Linda FRIEDMAN firent
paraître les résultats de cette étude sous le titre "Endorser
effectiveness by product type" op. cit., pp. 63-71.
6 - Voir note de bas de page supra, page 195.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
211
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
KELMAN7 pour ce qui est des
processus d'influence sociale générés
par l'utilisation d'un porte-parole.
L'étude devait vérifier ou contredire
cinq hypothèses de base sur la
perception et le souvenir des messages,
le déclenchement du comportement
d'achat, le prix associé au regard du
type de porte-parole. D'une manière
originale et très intéressante, ces
hypothèses furent construites en
tenant compte de cinq risques8 :
+ Le risque financier : la probabilité
de perdre de l'argent en achetant le
produit.
+
Le risque de performance : la
probabilité que le produit ne donne
pas entière satisfaction.
+ Le risque physique : la probabilité
que le produit cause une blessure
physique à l'utilisateur.
+
Le risque psychologique : la
probabilité que le produit ne
__________________
7 - "L'acceptation" est liée à l'honnêteté, la sincérité et
l'expérience alors que "l'identification" est liée à
l'attirance et à la sympathie. L'effet de l'utilisation du
consommateur type se situant entre les deux. KELMAN
Herbert. "Processes of opinion change" PUBLIC
OPINION QUATERLY Volume 25, n°1, Printemps 1961
pp. 57-78.
8 - Voir également : "The role of risk in consumer
behavior : a comprehensive and operational theory of risk
taking in consumer behavior" James W. TAYLOR,
JOURNAL OF MARKETING Volume 38, n°2, du mois
d'Avril 1974, pp. 54-60 et A.E. PITCHER "The role of
branding
in
International
advertising",
INTERNATIONAL JOURNAL OF ADVERTISING
Volume 4, 1985, pages 242-et 243.
corresponde pas bien à l'image
personnelle du consommateur.
+ Le risque social : la probabilité que
l'utilisation du produit affecte la
perception du consommateur par
autrui.
Il fut alors réalisé un "pré-test"
pour déterminer les produits et les
célébrités à utiliser. Dix types de
produits furent proposés assortis
d'échelles en 7 points pour mesurer le
risque perçu. L'échantillon de 50
personnes fut divisé en 5 groupes (1
pour chaque risque) pour éviter l'effet
de halo. Puis, les répondants durent
noter sept célébrités féminines9 sur 4
attributs (connaissance, sympathie,
attirance physique, confiance) toujours
en utilisant des échelles à 7 points.
C'est ainsi que furent retenus : un
aspirateur
(risques
social
et
psychologique bas contre risques
financier, physique et de performance
élevés), des bijoux fantaisie (risques
physique, financier et de performance
bas contre risques psychologique et
social élevés) et une boîte de cookies
(tous risques bas). La célébrité
sélectionnée fut la comédienne Mary
TYLER MOORE10.
__________________
9 - Les sept célébrités retenues n'avaient pas encore
participé à une campagne de publicité au moment de
l'énquête.
10 - Peu connue du lecteur français, l'actrice Mary TYLER
MOORE était particulièrement célèbre à l'époque. De
1970 à 1977, elle avait été l'héroïne principale de 168
épisodes du Mary TYLER MOORE Show, une sitcom
diffusée sur CBS et extrèmement populaire. "Total
Television" Alex McNEIL op. cit. pp.478-479.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
212
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Douze publicités (3 x 4) furent
fabriquées par des professionnels. 3
porte-parole x 3 produits (+ 3 visuels de
contrôle sans porte-parole). Le nom
retenu pour le produit fut MAJESTIC1,
car il était facile à mémoriser,
applicable aux trois produits et assez
"connu" pour pouvoir être associé à une
compagnie existante. Le nom de Joan
GREEN fut utilisé (sauf pour la
célébrité
bien
entendu).
Le
questionnaire se composait de 360
ménagères de la classe moyenne, de la
région de Brooklin et à prédominance
de race blanche. Les répondants étaient
exposés à la publicité puis une
enquêtrice - toujours la même - les
interviewait par téléphone, 48 heures
après, à l'aide d'un questionnaire
utilisant
des
échelles
unidimensionnelles à 6 points à propos
de 20 adjectifs.
Les
résultats
sont
essentiellement basés sur la méthode
MANOVA (analyse multiple de la
variance) et permettent la construction
des graphiques présentés ci-après :
__________________
1 - Toutefois, aucune autre indication n'est donnée quant
à la portée de ce nom et à son influence chez le
répondant. Pouvant apparaître comme un simple détail,
cet élément revêt en définitive une importance énorme
lors de l'étude du comportement du consommateur si l'on
considère la personnalité de chaque marque, a fortiori ici,
dès lors que les auteurs eux-mêmes reconnaissaient que
le nom était "assez connu" pour être utilisé. Mais l'étude
ne fournit aucune autre précision à ce propos. Voir
notamment à ce sujet : "How personnality makes a
difference" Joseph T. PLUMMER in JOURNAL OF
ADVERTISING RESEARCH Volume 24 n°6 de
Décembre 1984 / Janvier 1985, pp. 27-31.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
213
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Hershey H. FRIEDMAN et Linda FRIEDMAN
"Endorser effectiveness by product type"
JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH Vol. 19, n°5, Octobre 1979
D'après les figures 1-4 p.67 et figure 5 p.69
Il est manifeste que la célébrité
est plus efficace que les autres porteparole au niveau du souvenir de la
publicité et du nom de la marque du
Souvenir
de la marque
produit, quel que soit son type, comme
le montrent les résultats du tableau
présenté ci-dessous. Il existe donc bien
une interaction porte-parole / produit.
Porte-parole
Totaux
Célébrité
NON
OUI
Totaux
Autres
24 (38,1%)
39 (61,9%)
129
103 (56,6%)
79 (43,4%)
182
127
118
245
Hershey H. FRIEDMAN et Linda FRIEDMAN
"Endorser effectiveness by product type"
JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH Vol. 19, n°5, Octobre 1979 p.71
Si le risque majeur concernant le
produit est d'origine sociale ou
psychologique, la célébrité est une
bonne solution. En revanche, si ce
risque est essentiellement d'origine
financière, physique ou attrayant à la
performance du produit - et c'est
notamment le cas des produits dits
complexes -, alors le porte-parole
souhaitable s'avère être l'expert.
Maintenant, si aucun risque ne paraît
important, le porte-parole recommandé
est le consommateur type. Comme on
peut le constater sur les quatre
graphiques précédents, la célébrité
obtient de meilleurs scores avec les
bijoux
fantaisie,
l'expert
avec
l'aspirateur et le consommateur type
avec la boîte de cookies.
Enfin, l'étude permis d'infirmer
l'une des hypothèses de départ selon
laquelle, le type de porte-parole
influençait le prix de vente attendu du
produit. Certes, des différences sont
constatées d'un porte-parole à l'autre et
d'un produit à l'autre, mais assez
significatives selon les auteurs, au
terme de l'analyse MANOVA, pour être
considérées (voir résultats du tableau
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
214
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
présenté
ci-dessous,
exprimés
en
dollars).
Moyenne de la mesure
du prix de vente attendu
Porte-parole
Produit
Célébrité
Expert
Consommateur
type
Contrôle
Aspirateur
Cookies
Bijoux fantaisie
124,46
0,78
12,33
114,33
0,71
9,53
91,77
0,71
6,72
105,78
0,72
10,60
Hershey H. FRIEDMAN et Linda FRIEDMAN
"Endorser effectiveness by product type"
JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH Vol. 19, n°5, Octobre 1979 p.70
Les auteurs apportèrent des
limites à leurs recherches expliquant
dans un premier temps qu'il s'agissait
d'une étude de laboratoire. En effet, il
ne faut pas oublier ici le caractère très
régional du test et donc les difficiles
possibilités de généralisation. Ensuite,
les répondants ne furent exposés
qu'une seule fois à la publicité et de
surcroît hors du contexte traditionnel
d'un magazine.
On regrettera les conditions de
laboratoire, principalement au regard
de l'aspect "artificiel"1 des publicités
utilisées. On notera aussi la
caractéristique exclusivement féminine
de l'échantillon, ainsi que des porteparole utilisés. Or, même si son degré
diffère d'un pays à un autre, d'un Etat à
un autre, d'un individu à un autre, on
sait que le sexe d'un porte-parole
publicitaire conditionne en partie la
réaction du consommateur2. D'autre
__________________
1 - Jon B. FREIDEN, op. cit. p. 34.
2 - Voir notamment à ce sujet : Mary C. GILLY "Sex roles
in advertising : a comparison on television
advertisements in Australia, Mexico and the UnitedStates", JOURNAL OF MARKETING Volume 52, n°2,
(Avril 1988) pp. 75-85 et "No sex please, we're skittish"
Warren BERGER, CREATIVITY du 5 Octobre 1992.
part, comme nous l'avons vu, la prise en
considération des différents risques
perçus, par la cible, dote l'étude d'un
intérêt supplémentaire. En revanche, ce
critère du risque perçu, apparaît être
un facteur limitatif à la généralisation
des résultats. En effet, une étude menée
un an auparavant, mais présentée cette
fois dans la revue Journal of Marketing,
faisait
apparaître
de
sensibles
différences d'un pays à l'autre3. Enfin,
on peut s'interroger sur les résultats
qu'aurait obtenus une célébrité déjà
connue pour une ou plusieurs autres
prestations publicitaires.
Cependant, cette étude confirme
les associations porte-parole / produit
auxquelles on pouvait logiquement
s'attendre en fonction de la nature des
__________________
3 - Robert J. HOOVER, Robert T. GREEN et Joel
SAEGERT, "A cross-national study of perceived risk",
JOURNAL OF MARKETING de Juillet 1978, pp. 102-108.
Les auteurs y analysent le risque perçu auprès d'une
population américaine et d'une population mexicaine.
Les résultats sont différents d'une population à l'autre. Le
risque perçu est beaucoup moins important chez les
Mexicains que chez les Américains. Même si les auteurs
expliquent que de plus amples recherches sont
nécessaires sur ce point, il est très important de noter que
la fidelité envers une marque apparaît en général liée à ce
risque perçu.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
215
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
produits et des types de porte-parole
sélectionnés. Mais elle est également
très intéressante au regard du fait
qu'elle est l'une des premières, sinon la
première à comparer avec une précision
statistique, différents types de porteparole. C'est là un centre d'intérêt qui
fut à nouveau retenu cinq ans plus tard,
par Jon B. FREIDEN.
Au début des années 80,
Richard PETTY et John CACIOPPO4
introduisirent une nouvelle approche
de l'analyse de l'attitude et de sa
formation.
L'objectif
de
leurs
recherches était de démontrer que les
études avaient jusqu'à maintenant
porté sur l'analyse d'une route centrale
où le changement d'attitude provenait
de la prise en compte d'informations.
La communication persuasive trouvait
alors ses bases dans la justification
cognitive5 ; dans la compréhension,
__________________
4 - Voir notamment : Richard E. PETTY et John T.
l'apprentissage et la mémorisation
d'informations6 ; dans la nature des
réponses cognitives caractéristiques
apportées par une personne7 ; dans la
manière dont les croyances pouvant
être
considérées
par
le
8
consommateur ,...
Le principe mis en évidence et
testé par Richard PETTY et John
CACIOPPO découle de leur modèle
E.L.M.9. Il se fonde sur l'observation
que les changements d'attitude
surviennent dans certains cas "via une
route périphérique et ils n'ont pas lieu
parce qu'un individu a personnellement
considéré les avantages et les
inconvénients d'une situation, mais
parce que le problème ou l'objet de
l'attitude est associé à des signaux
positifs ou négatifs, ou parce que la
responses" Richard E. PETTY et John T. CACIOPPO,
JOURNAL OF PERSONALITY AND SOCIAL
PSYCHOLOGY Volume 37, n°10, (1979), pp. 1915-1926.
CACIOPPO "Attitudes and persuasion : Classic and
contemporary approaches" Editions WILLIAM C.
BROWN (1981), Dubuque, IA, Etats-Unis ; "Central and
peripheral routes to persuasion : application to
advertising" in ADVANCES AND CONSUMER
PSYCHOLOGY, Rédacteurs : Larry PERCY et Arch
WOODSIDE, Editions LEXINGTON BOOKS (1983),
Lexington, MA, Etats-Unis, pp. 3-23 ; "Communication
and persuasion : central and peripheral routes to attitude
change" Editions SPRINGER / VERLAG (1986), New
York, Etats-Unis.
6 - Voir notamment : William Mc GUIRE "Some internal
5 - Voir notamment : William H. CUMMINGS et M.
BETTMAN "Multiattribute models in marketing : a
bicentennial review" in CONSUMMER AND
INDUSTRIAL BUYING BEHAVIOR, rédacteurs : Arch
WOODSIDE, Jagdish SHETH et Peter D. BENNETT,
Editions ELSEVIER NORTH-HOLLAND (1977), New
York, Etats-Unis, pp. 137-150.
VENKATESAN "Cognitive dissonance and consumer
behavior : a review of the evidence" op. cit. pp. 303-308 ;
"Cognitive effects of false heart-rate feedback" Stuart
VALINS, JOURNAL OF PERSONALITY AND SOCIAL
PSYCHOLOGY Volume 4, n°4, (1966), pp. 400-408 ;
"Effects of message repetition on cognitive responses,
recall and persuasion" John T. CACIOPPO et Richard E.
PETTY, JOURNAL OF PERSONALITY AND SOCIAL
PSYCHOLOGY Volume 37, n°1, (1979), pp. 97-109 ainsi
que "Issue involvement can increase or decrease
persuasion by enhancing message-relevant cognitive
psychological factors inluencing consumer choice"
JOURNAL OF CONSUMER RESEARCH Volume 2, du
mois de Mars 1976, pp. 302-319.
7 - Voir notamment : Peter L. WRIGHT "Message-evoked
thoughts : persuasion research using thought
verbalizations"
JOURNAL
OF
CONSUMMER
RESEARCH Volume 7, du mois de Septembre 1980, pp.
151-175.
8 - Voir notamment : Richard J. LUTZ et James
9 - Elaboration of Likelihood Model (of attitude change)
Richard E. PETTY et John T. CACIOPPO "Attitudes and
persuasion : Classic and contemporary approaches"
(1981) opt. cit.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
216
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
personne tire des conclusions de la
situation prescrite, fondée sur de
simples signaux dans le contexte de
persuasion"10.
Lorsque
la
"probabilité
d'élaboration"
est
élevée,
que
l'implication du consommateur par
rapport au produit et à la nature du
message est importante, l'utilisation de
la route centrale est recommandée.
Dans ce cas, le consommateur tiendra
essentiellement compte des arguments
développés par la publicité - les
réponses cognitives -, ainsi que de la
qualité de ces arguments pour former
son
attitude
et
adopter
un
comportement adéquat. Alors que si
cette probabilité d'élaboration est peu
élevée, qu'en d'autres termes la
situation présente une implication
relativement
faible,
la
route
périphérique est préférable. Autorisant
une modification des croyances plus
rapide,
le
comportement
du
consommateur sera influencé avant
même que son attitude n'ait changé.
On peut dès lors tenter de
résumer cette approche à l'aide du
schéma suivant :
__________________
10 - Richard E. PETTY, John T. CACIOPPO et David
SCHUMANN "Central and peripheral routes to
advertising effectiveness : the moderating role of
involvement" JOURNAL OF CONSUMER RESEARCH,
Volume 10, du mois de Septembre 1983, page 135.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
217
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
communication
persuasive
conception d'un message
choix d'une source et d'un support
route
centrale
route
périphérique
situation de
forte implication
situation de
faible implication
réponses
cognitives
changement
des croyances
changement
des croyances et
de l'attitude
changement
du comportement
changement
du comportement
Persuasion obtenue
d'après les arguments du message
changement
de l'attitude
Persuasion obtenue
d'après des signaux périphériques
Description schématique du modèle E.L.M.
D'après Richard E. PETTY et John T. CACIOPPO "Communication and persuasion : central and peripheral routes to attitude change" Editions SPRINGER /
VERLAG (1986), New York, Etats-Unis ; Michael R. SOLOMON "Consumer behavior" Editions ALLYN AND BACON / SIMON & SCHUSTER Inc. (1992), Needham
Heights, MA, Etats-Unis page 187, et James F. ENGEL, et Roger D. BLACKWELL et Paul W. MINIARD "Consumer behavior" Editions DRYDEN PRESS,
Hinsdale, Il, Etats-Unis, (1968-1993) page 466.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
218
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Dès lors que l'on considère que
"l'affectif n'est pas nécessairement
post-cognitif"1
cette
approche
comporte un intérêt fondamental dans
le cas précis de l'utilisation d'une
célébrité, pour son expérience ou son
attirance physique par exemple. Ce
sont là des "signaux périphériques" qui
auront un impact persuasif beaucoup
plus important et beaucoup plus direct,
lorsque le message publicitaire "jouera"
sur l'affectif. Ce, encore une fois,
lorsque le consommateur sera dans des
conditions d'implication faible.2
Richard PETTY et John CACIOPPO,
présentés ci-après :
Comme l'illustrent parfaitement
les deux schémas issus des travaux de
__________________
1
- Voir notamment : Christian DERBAIX "Le
comportement de l'acheteur : voies d'études pour les
années à venir" RECHERCHE ET APPLICATIONS EN
MARKETING Volume II, n°2, 1987 page 84, qui rappelle
à ce sujet les travaux de Robert ZAJONC réalisés en 1980
et déjà cités dans les pages qui précèdent. Voir également
: Christian DERBAIX et Michel Tuan PHAM "Pour un
développement des mesures de l'affectif en marketing :
synthèse
des
prérequis"
RECHERCHE
ET
APPLICATIONS EN MARKETING Volume IV, n°4,
1989, pp. 71-87.
2 - Voir notamment : Richard E. PETTY, JohnT.
CACCIOPO et Rachel GOLDMAN "Personal
involvement as a determinant of argument-based
persuasion" JOURNAL OF PERSONALITY AND
SOCIAL PSYCHOLOGY, 41, Novembre 1981, pp. 847-855
; Shelly CHAIKEN "Heuristic versus systematic
information processing and the use of source versus
message cues in persuasion" JOURNAL OF
PERSONALITY AND SOCIAL PSYCHOLOGY, 39,
Novembre 1980, pp. 752-766 ; "Effects of ego-involvement
conditions on attitude change to high and low credibility
communicators" Homer H. JOHNSON et John A.
SCILEPPI, JOURNAL OF PERSONALITY AND SOCIAL
PSYCHOLOGY Volume 13, n°1, (1969), pp. 31-36, et
Ramon RHINE et Laurence J. SEVERANCE "Egoinvolvement, discrepancy, source credibility and attitude
change" JOURNAL OF PERSONALITY AND SOCIAL
PSYCHOLOGY, Volume 16, n°2, Octobre 1970, pp. 175190.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
219
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
1.8
porte-parole célèbre
1.2
Attitude
post-message
0.6
porte-parole inconnu
0
-0.6
-1.2
faible implication
forte implication
Attitude produit
1.8
arguments puissants
1.2
Attitude
post-message
0.6
arguments faibles
0
-0.6
-1.2
faible implication
forte implication
Attitude produit
Richard E. PETTY, John T. CACIOPPO et David SCHUMANN
"Central and peripheral routes to advertising effectiveness : the moderating role of involvement"
JOURNAL OF CONSUMER RESEARCH, Volume 10, du mois de Septembre 1983,
D'après le graphique (figure B) de la page142
On notera également les moins
bons résultats obtenus par le porteparole célèbre, qu'un porte-parole
inconnu, dans le cas d'une forte
implication, en ce qui concerne
l'attitude
post-message
consommateur.
du
Remarquons qu'en France, en
1983, Gilles LAURENT et Jean-Noël
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
220
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
KAPFERER proposèrent un nouveau
modèle s'attachant à mesurer cette
implication du consommateur1 dont les
conséquences devaient avoir des
incidences sur la stratégie publicitaire,
comme l'exprime le schéma représenté
ci-dessous. L'hypothèse de base était
que le choix du consommateur
subissait non pas une mais plusieurs
influences, variables suivant le degré
d'implication
de
ce
même
consommateur.
__________________
1 - Pourtant, Jean-Noël KAPFERER et Gilles LAURENT
ne font pas référence aux travaux de Richard E. PETTY,
John T. CACIOPPO dans "Comment mesurer le degré
d'implication
des
consommateurs"
Echanges
d'Expérience de l'Institut de Recherches et d'Etudes
Publicitaires du 20 Avril 1983, Editions IREP, Paris
(Juillet 1983). Voir également sur ce point : "Measuring
consumer involvement profiles" Gilles LAURENT et
Jean-Noël KAPFERER, JOURNAL OF MARKETING
RESEARCH, Volume 22, du mois de Février 1985, pp. 4153 ; "Les profils d'implication" Gilles LAURENT et JeanNoël KAPFERER, RECHERCHE ET APPLICATIONS en
MARKETING, Volume 1, n°1, du mois d'Avril 1986, pp.
41-57 ; "La communication publicitaire" in "La
communication" Cahier Français n°258 - Octobre /
Décembre 1992, LA DOCUMENTATION FRANÇAISE
pp. 39-44 ; mais aussi : "Product involvement and brand
commitment" Mark B. TRAYLOR, JOURNAL OF
ADVERTISING RESEARCH Volume 21, n°6, du mois de
Décembre 1981 pp. 51-56 et "Low involvement strategies
for processing advertisements" Meryl Paula GARDNER,
Andrew A. MITCHELL et J. Edward RUSSO, JOURNAL
OF ADVERTISING Volume 14, n°2 (1985), pp. 4-12
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
221
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
degré d'implication
de la cible dans la
catégorie de produit
Ã
conséquences de
Ã
l'implication :
. processus de
incidences pour la
stratégie publicitaire :
. objectifs
choix entre
. copy-stratégie
marques
. ton
. besoins / attentes
. format
d'information
. média stratégie
. répétition
. réceptivité à
la publicité
. pré-testing
Jean-Noël KAPFERER et Gilles LAURENT
"Comment mesurer le degré d'implication des consommateurs"
Echanges d'Expérience de l'Institut de Recherches et d'Etudes Publicitaires du 20 Avril 1983,
Editions IREP, Paris (Juillet 1983), figure de la page 5
Les auteurs considèrent alors
que cette implication est "un concept
composite ayant plusieurs facettes" que
sont : 1 . le degré d'importance perçue
du produit pour savoir si le choix porte
à conséquence, 2 . le risque perçu
associé au produit (avec le degré
d'importance
des
conséquences
négatives en cas de mauvais choix et la
probabilité subjective d'effectuer un
mauvais choix), 3 . le degré de plaisir
conféré par le produit et 4 . le degré de
valeur de signe attribué au produit, son
achat ou sa consommation. Dès lors
que cette "implication n'est pas une
variable uni-dimensionnelle", il semble
plus adéquat de parler de "profil
d'implication".
En
1983,
reprenant
partiellement ses précédents travaux1,
__________________
1 - "An evaluation of spokeperson and vehicle source
effects in advertising" Jon B. FREIDEN, CURRENT
ISSUES AND RESEARCH IN ADVERTISING (1982) p.
77-87.
le Professeur Jon B. FREIDEN2 mena
une nouvelle étude. Son objectif était
d'analyser l'impression des membres
d'un échantillon de consommateurs,
après exposition à une publicité fictive,
pour savoir :
+
Si la réaction des répondants
étaient différentes suivant le
type de porte-parole utilisé,
+
Si le sexe du porte-parole
influençait les réactions des
répondants,
+
Si de jeunes consommateurs
réagissaient à la présence d'un
porte-parole célèbre de la
__________________
2 - Jon B. FREIDEN est Professeur associé de Marketing à
l'école de commerce de l'Université d'Etat de Floride. Son
étude, déjà citée dans les pages qui précèdent, fut publiée
sous le titre : "Advertising Spokesperson effects : an
examination of endorser type and gender on two
andiences" op. cit., pp. 33-41.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
222
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
même manière que des
consommateurs plus âgés.
Concernant les types de porteparole, l'étude considéra le cas d'une
célébrité, d'un Président de compagnie,
d'un expert et d'un consommateur
type. Elle fut menée au Printemps 1983,
dans une petite SMSA1 du Sud-Ouest,
impliquant 8 points d'enquête. 226
personnes furent interrogées. La souspopulation adulte fut construite à
partir
d'une
grande
variété
d'organismes civiques et culturels2. La
sous-population d'étudiants fut tirée de
quatre classes d'arts libéraux3.
popularité et sincérité. Les publicités
furent distribuées alternativement du
numéro 1 à la numéro 8, accompagnées
d'une fiche d'instructions, ainsi que
d'un questionnaire à auto-administrer.
!
Attention, la graduation des
échelles étant l'inverse de celle utilisée
jusqu'à présent, il faut lire les
graphiques qui suivent, en considérant
que plus le résultat obtenu se
rapproche de 1, meilleur il est, et plus il
se rapproche de 7, plus mauvais il est.
La publicité utilisée consistait
en huit versions d'une annonce pour un
poste de télévision en couleur - dont le
nom de la marque était masqué -,
insérée dans un magazine en noir et
blanc. Le choix du produit fut retenu
comme étant un bien durable, d'intérêt
général. Leur construction était aux
dires de l'auteur, très réaliste. Le choix
des célébrités permit de retenir les
acteurs Paul NEWMAN et Linda
EVANS, à la suite d'un mini-test sur 12
personnes devant noter 10 célébrités en
termes de crédibilité, sympathie,
__________________
1 - région métropolitaine statistique standard
2 - L'auteur était conscient que ce type d'organisations
générerait l'obtention de consommateurs plus aisés et
bénéficiant d'une meilleure éducation que la moyenne
nationale. Mais sur le principe que ce type de
consommateurs est plus souvent recherché par les
annonceurs, cette base fut conservée.
3 - Cette spécialité fut choisie par l'auteur pour éviter le
biais caractéristique dû au choix d'étudiants en
Marketing ou en Publicité, qui peuvent dans un certain
sens être considérés comme des "experts".
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
223
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Porte-parole bien informé
5
4
3
2
1
0
Céléb.
Prés.
Exp.
Cons.
Jeune consommateur
Porte-parole homme
Porte-parole femme
Porte-parole bien informé
6
5
4
3
2
1
0
Céléb.
Prés.
Exp.
Cons.
Consommateur âgé
Porte-parole homme
Porte-parole femme
Porte-parole sympathique
5
4
3
2
1
0
Céléb.
Prés.
Exp.
Cons.
Jeune consommateur
Porte-parole homme
Porte-parole femme
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
224
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Porte-parole sympathique
4
3
2
1
0
Céléb.
Prés.
Exp.
Cons.
Consommateur âgé
Porte-parole homme
Porte-parole femme
Publicité digne de confiance
4
3
2
1
0
Céléb.
Prés.
Exp.
Cons.
Jeune consommateur
Porte-parole homme
Porte-parole femme
Publicité digne de confiance
5
4
3
2
1
0
Céléb.
Prés.
Exp.
Cons.
Consommateur âgé
Porte-parole homme
Porte-parole femme
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
225
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Qualité du produit
3,5
3
2,5
2
1,5
1
0,5
0
Céléb.
Prés.
Exp.
Cons.
Jeune consommateur
Porte-parole homme
Porte-parole femme
Qualité du produit
3,5
3
2,5
2
1,5
1
0,5
0
Céléb.
Prés.
Exp.
Cons.
Consommateur âgé
Porte-parole homme
Porte-parole femme
Jon B. FREIDEN
"Advertising Spokesperson effects : an examination of endorser type and gender on two audiences"
JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH Vol. 24, n°5 de Octobre / Novembre 1984
Graphiques construits d'après les valeurs de la table des moyennes p.38
Indubitablement, les résultats
montrèrent que le type de porte-parole
influençait
la
réponse
du
consommateur. Par ailleurs, en
considérant les variables retenues
(sympathique, digne de confiance,
crédible, objectif, persuasif, bien
informé) aucun type de porte-parole
n'obtint un effet uniformément
favorable sur l'ensemble des facteurs.
"Ainsi, si la célébrité génèra une
performance supérieure en ce qui
concerne
l'attribut
«porte-parole
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
sympathique», elle n'obtint pas de
scores très favorables pour les termes
«porte-parole-bien-informé», «qualité
du produit» et «publicité digne de
confiance» ; l'expert parvint mieux à
créer une attitude positive sur l'attribut
«bien informé» notamment chez les
jeunes consommateurs".1 D'autre part,
__________________
1 - S'il est indéniable qu'aujourd'hui les sportifs sont
essentiellement recherchés pour leur expérience sur tel
ou tel produit, on ne peut s'empêcher de penser à l'étude
qui fut menée au Etats-Unis par ALAN R. NELSON
226
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
les résultats de l'étude laissent à penser
qu'en général le sexe du porte-parole
n'affecte pas réellement l'attitude du
consommateur envers un produit de ce
type, c'est à dire bénéficiant d'un
intérêt général. En revanche, sur
certains critères isolés - tels que «porteparole bien informé» et «publicité
informative» - les résultats font dire à
l'auteur que "dans le doute, il est
préférable d'utiliser un porte-parole
masculin".
Enfin, cette enquête permet de
démontrer que l'attitude exprimée par
les
jeunes
répondants
diffère
substantiellement de celle exprimée
par les répondants plus âgés. Les
jeunes, moins expérimentés, ont ainsi
un jugement plus favorable des stimuli
de la publicité qui furent alors testés.
Traditionnellement,
l'auteur
expose les limites de son étude, en
indiquant essentiellement que ses
résultats ne pouvaient être appliqués à
d'autres media. Mais il explique aussi
de manière très intéressante, qu'il serait
RESEARCH Inc. en 1973 et de rapprocher ses résultats
avec ceux obtenus par le Professeur FREIDEN. Après
avoir constitué un échantillon représentatif de 2.500
hommes, NELSON RESEARCH lui soumit le cas de 192
figures du sport, présentées comme des porte-parole
publicitaires potentiels. Concernant la crédibilité, les
trois premiers cités furent dans l'ordre Stan MUSIAL, 53
ans, qui n'avait pas joué pour les Cardinals de St Louis
depuis 10 ans, Mickey MANTLE, 42 ans, qui s'était battu
avec les Yankees de New York, la dernière fois en 1968, et
Yogi BERRA, le manager des Mets de New York ! Les
plus célèbres étaient le joueur de base-ball Willie MAYS,
le footballeur Joe NAMATH et le boxeur Mahammad
ALI, mais lorsque l'on considérait la crédibilité du porteparole, on retrouvait ces trois dernières célébrités
respectivement à la 31ème, 156ème et 190ème place !
Difficile donc de relier a priori célébrité et crédibilité. Voir
notamment "Who do you trust ?" Anonyme, TIME du 31
Décembre 1973.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
nécessaire d'analyser l'influence du
sexe du répondant au regard de celui
du porte-parole, qu'il serait intéressant
de connaître l'influence non plus de
plusieurs types de porte-parole, mais
de plusieurs types de célébrités2. Et il
indique également qu'il serait utile de
qualifier le souvenir du répondant,
obtenu avec l'utilisation d'un porteparole.
Concernant cette étude on ne
regrettera que deux détails, pour
lesquels il n'est pas fait allusion dans
les limites. Le premier concerne l'étude
elle-même. A l'inverse des travaux qui
furent
exposés
précédemment,
l'utilisation appréciable d'une publicité
contrôle n'a pas été envisagée ici.
D'autre part, en ce qui concerne la
conception "très réaliste" des annonces,
il faut savoir que le porte-parole était
simplement représenté par une petite
photo d'identité dans l'angle supérieur
gauche de la publicité. Cela comporte
l'avantage et l'inconvénient d'une
"distance" entre le produit et le porteparole. Peut-être faut-il relier ce détail
au fait que l'auteur indique dans ses
conclusions, qu'il serait intéressant de
mesurer lors de prochains travaux,
l'influence du degré d'implication du
porte-parole dans la publicité.
Trente années séparent la
première étude présentée dans ces
pages et celle qui suit. Début 1991, une
enquête du Professeur Roobina
OHANIAN3 est venue compléter les
__________________
2 - Voir les travaux du Professeur R. OHANIAN réalisés
en 1991 et présentés pages suivantes.
3 - "The impact of celebrity spokeperson's perceived
image on consumer's intention to purchase" Roobina
227
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
travaux déjà existants. L'objectif initial
était d'analyser ce que plusieurs
références de la littérature identifient
comme étant les trois sources de la
crédibilité : la compétence ou
l'expérience du porte-parole, la
confiance que l'on pouvait lui porter et
son attirance physique4.
La méthodologie suivie par le
Professeur OHANIAN fut la suivante :
Il fut tout d'abord construit un
échantillon de 40 étudiants diplômés à
qui il fut demandé de lister les noms
des célébrités qui leur venaient à
l'esprit, et ce, dans un laps de temps de
3 minutes. Quatre célébrités furent
OHANIAN, Professeur de Marketing à l'Université
Emory, JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH,
Février/Mars 1991, pp.46-54.
4 - De nombreuses études montrèrent que l'attirance
physique du porte-parole était un facteur pouvant
influencer favorablement l'attitude du consommateur à
l'égard du message publicitaire, et par là, son
comportement. Citons simplement Karen DION, Ellen
BERSCHEID et Elaine WALSTER "What is beautiful is
good" JOURNAL OF PERSONALITY AND SOCIAL
PSYCHOLOGY, 1972, Volume 24, n°3, pp. 285-290, qui
testèrent diverses opinions des répondants à propos de
trois photos d'individus plus ou moins attirants. Ainsi
que David LANDY et Harold SIGALL "Beauty is talent :
Task evaluation as a function of the performer's physical
attractivness" JOURNAL OF PERSONALITY AND
SOCIAL PSYCHOLOGY, 1974, Volume 29, n°3 pp.299304 qui testèrent l'opinion des répondants sur le contenu
d'un texte au regard de la photo de l'auteur qui y était
jointe. Dans les deux cas, les personnages physiquement
attirants obtinrent les meilleurs résultats. Toutefois
d'autres études concluent que "la beauté n'est pas un
facteur
significatif
induisant
une
conformité
comportementale" Marjorie J. CABALLERO, James R.
LUMPKIN et Charles S. MADDEN "Using physical
attractiveness as an advertising tool : an empirical test of
the
attraction
phenomenon"
JOURNAL
OF
ADVERTISING RESEARCH, 29, du mois d'Août /
Septembre 1989, page 20. Voir également page 446 les
travaux de Michael KAMINS et Lynn KAHLE.
retenues parmi les plus citées et selon
deux critères annexes : le sexe (deux
femmes et deux hommes) ainsi que leur
participation préalable, ou non à une
publicité commerciale. Furent retenues
selon ces critères :
+ Deux célébrités ayant déjà fait de la
publicité :
- Linda EVANS (actrice)
- John Mc ENROE (tennisman)
+ Deux célébrités n'ayant jamais fait
de publicité :
- Tom SELLECK (acteur)
- MADONNA (chanteuse)
Un autre échantillon, de 38
lycéens cette fois, fut alors questionné
de manière à savoir pour quels
produits, ces célébrités pourraient
logiquement faire la publicité selon
eux. Les cosmétiques et le parfum
furent associés à Linda EVANS, les
raquettes de tennis et les équipements
sportifs furent associés à John Mc
ENROE, l'eau de toilette pour hommes
fut associée à Tom SELLECK5 et des
__________________
5 - L'association par les éléments de l'échantillon, d'une
eau de toilette pour hommes avec Tom SELLECK nous
semble particulièrement intéressante. En effet, si le
Professeur OHANIAN n'y fait pas allusion, rappelons que
Tom SELLECK fut en 1979 et 1980 le porte-parole
remarqué de l'eau de toilette pour hommes CHAZ.
Remarqué, car alors simple top-model, c'est
essentiellement cette prestation qui attira l'attention des
producteurs de la CBS. Quelques mois plus tard il devint
le personnage principal d'une nouvelle série télévisée
Magnum P.I., qui lança sa carrière d'acteur. Voir
notamment : "Model agencies intensifying search for '10'"
et "Major model hunts near wrapup" James P. FORKAN,
ADEVRTISING AGE du 7 Avril 1980.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
228
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
vêtements modernes et/ou une nouvelle
marque de jeans à MADONNA6.
Quatre
questionnaires
contenant trois parties chacun furent
alors développés (un pour chaque
célébrité). La première partie portait
sur la connaissance de la célébrité et
sur l'association de son nom à un
spectacle ou une émission particulière.
La deuxième partie comportait 15
questions munies d'échelles pour
mesurer les trois sources de crédibilité
précitées. Enfin, une troisième partie
présentait un questionnaire visant à
analyser
la
probabilité
de
déclenchement du comportement
d'achat, pour un usage personnel ou
dans l'optique d'offrir un cadeau. 97
éléments de l'échantillon furent
sélectionnés pour des raisons de
répartition géographique, 246 pour leur
appartenance
à
trois
paroisses
différentes et 217 pour le fait qu'ils
étaient
ou
non
diplômés.
L'administration des questionnaires
s'étala sur deux mois et chaque
répondant avait la même probabilité de
recevoir l'un des 4 questionnaires.
Enfin, pour éliminer certains biais,
deux versions du questionnaire furent
proposées, permettant ainsi une
alternance de l'ordre de présentation
des échelles.
Une analyse de la covariance
montra que l'âge et le sexe du
répondant n'avaient pas d'influence sur
l'évaluation des trois sources de
crédibilité, ainsi que sur l'intention
d'achat. En revanche les quatre
célébrités n'obtinrent pas les mêmes
résultats pour chacune des trois
sources analysées, de même que pour
l'intention d'achat.
__________________
6 - A propos de la chanteuse MADONNA, voir également
l'étude menée par Mary WALKER, Lynn LANGMEYER
et Daniel LANGMEYER l'année suivante. La star était
alors opposée au mannequin top-model Christie
BRINKLEY au sujet de trois produits : des serviettes de
bain, des jeans et des magnétoscopes. Utilisant 25
associations semantiques différentielles descriptives, les
auteurs obtiennent des résultats qui relativisent
sensiblement l'impact de la star quant à la perception des
attributs du produit. Mary WALKER, Lynn
LANGMEYER et Daniel LANGMEYER "Celebrity
endorsers : Do you get what you pay for ?" JOURNAL OF
CONSUMER MARKETING Volume 9, n°2 (Printemps
1992) pp. 69-76
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
229
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Roobina OHANIAN "The impact of celebrity spokeperson's perceived image on consumers' intention to
purchase" JOURNAL OF ADVERTISING RESEARCH Février / Mars 1991
Graphiques reproduits d'après les indications présentées p.50
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
230
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Roobina OHANIAN utilisa
ensuite le modèle LISREL1 pour
déterminer l'impact de chaque source
sur l'intention d'achat. Il s'avéra que
l'attirance physique et le caractère de
confiance n'ont pas de lien significatif
avec l'intention d'achat que ce soit pour
une utilisation personnelle ou pour un
cadeau. A l'inverse, la compétence
apparaît comme étant un facteur
influençant l'intention d'achat.
Par ailleurs, l'étude montra que
chaque célébrité "disposait" de sa
propre combinaison des trois sources
de crédibilité.
Enfin, tout en précisant les
précautions d'usage quant aux
__________________
1 - Le Professeur OHANIAN utilisa la méthodologie mise
en évidence par K.G. JORESKOG et D. SORBOM dans
"LISREL 7 : A guide to the program and applications",
Editions SPSS Inc., Chicago, Ilinois, Etats-Unis (1988).
Ledit modèle LISREL y est défini par l'équation
mathématique suitante : η = Γ ξ + ζ où η est un
vecteur colonne (1x1) de l'intention d'achat obtenu
d'après la dérivée de variables dépendantes γ (considère,
se renseigne au sujet de, achète réellement) ; Γ est une
matrice coefficient (3x1) relative à l'indépendance des
sources de crédibilité et de l'intention d'achat ; ξ est un
vecteur colonne (3x1) des éléments de la source de
crédibilité dérivés des variables indépendantes (x)
; ζ est un vecteur colonne (1x1) de l'erreur dans les
équations structurales. On pourra également se reporter
à un précédent article du Professeur OHANIAN, mais
paru cette fois dans JOURNAL OF ADVERTISING
"Construction and Validation of a scale to Measure
Celebrity
Endorsers'
perceived
expertitise,
trustworthyness and attractiveness" Volume 19, n°3
(1990), pp. 39-52. Les détails de la méthodologie suivie y
étaient déjà présentés, expliquant notamment comment
les trois composantes "attirance physique" "confiance" et
"expérience/compétence" pouvaient permettre de
mesurer la source de crédibilité représentée par la
célébrité.
possibles biais ainsi qu'aux risques de
généralisation hâtive à des populations
différentes, le professeur OHANIAN
conclut que la célébrité choisie doit en
définitive être "bien informée, dotée
d'expérience et qualifiée pour parler du
produit" et que "des efforts doivent être
faits pour utiliser des porte-parole
célèbres qui ont un lien direct avec le
produit qu'ils représentent, et [des
porte-parole] qui soient perçus comme
des experts par la cible", mettant en
garde tant les annonceurs que les
publicitaires.
L'intérêt de la sélection des
célébrités était de présenter une actrice
et un acteur, un sportif et une
chanteuse, donc des porte-parole ayant
obtenu leur célébrité par le biais
d'activités différentes. Mais l'on peut
ici s'interroger sur les scores
qu'auraient obtenu Jimmy CONNORS
ou André AGASSI au lieu de John
McENROE, Barbra STREISAND ou
Diana ROSS au lieu de MADONNA2,
Harrison FORD ou Mel GIBSON au
lieu de Tom SELLECK, Elizabeth
TAYLOR ou Sigourney WEAVER au
__________________
2 - Sur la pertinence du choix de MADONNA pour ce
type de test, on notera qu'une enquête nationale réalisée
aux Etats-Unis à la même époque, par la société TOTAL
RESEARCH Corp. et portant sur 54 célébrités, classait
MADONNA parmi les 5 dernières. L'enquête portait sur
un échantillon de 2.000 personnes âgés de 15 ans et plus,
composé de manière aléatoire et interrogé sur la qualité
des célébrités à devenir un porte-parole publicitaire. Les
5 premières furent dans l'ordre Bob HOPE, Bill COSBY,
Walter CRONKITE, George BUSH et Clint
EASTWOOD. Voir à ce sujet "How to find the right
spokesman" Steven W. COLFORD, ADVERTISING AGE
du 28 Octobre 1991.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
231
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
lieu de Linda EVANS ? Peut-on
considérer que la question posée
permettait d'obtenir la célébrité la plus
représentative dans son domaine
d'activité, ou simplement une célébrité
plus célèbre que les autres. Toujours
sur cette sélection, on notera le choix
de
deux
acteurs
ayant
fait
essentiellement carrière à la télévision
et non au cinéma, ainsi que l'absence de
célébrité de couleur.
l'on connaît par ailleurs, l'utilisation
publicitaire de stars telles que Oprah
WINFREY, Tina TURNER ou Bill
COSBY4 on peut s'interroger l'attitude
des répondants dans ce cas. On notera
enfin par ailleurs que MADONNA
n'avait pas encore été utilisée
directement par la publicité, lors de la
réalisation de l'enquête5. Elle le fut
quelques mois plus tard, non pas pour
des jeans ou des vêtements de modes
comme pressentie par les répondants,
mais pour les produits audiovisuels
PIONEER, le magazine VOGUE, et une
campagne en faveur du droit de vote,
aux Etats-Unis ; pour les salons de
beauté ELU SEINU au Japon ; pour la
station de radio N.R.J. en France ; et
pour la boisson DIET PEPSI à
l'international...
GOULD, Norman B. SIGBAND et Cyril E. ZERNER Jr.,
JOURNAL OF MARKETING, Juillet 1970, pp. 20-26.
"Ads appealing to big sity blacks don't necessarily reach
other, Kaiser says" ADVERTISING AGE du 9 Mars 1970.
4 - On relève notamment pour Bill COSBY, une
Or, sur ce dernier point on sait
que
le
comportement
du
3
consommateur est différent . Et lorsque
__________________
3 - Au sein même de la communauté noire, les
généralisations en matière de comportement d'achat sont
hasardeuses. Voir notamment "Advertising and the Black
community" Dorothy COHEN, JOURNAL OF
MARKETING, Octobre 1970, pp. 3-11. La perception
publicitaire générale diffère également sensiblement
selon que le mannequin utilisé est blanc, noir ou que
plusieurs mannequins de différentes couleurs sont
présents. Voir à ce propos "Black consumer reactions to
integrated advertising : an exploratory study" John W.
participation à la communication des ordinateurs TEXAS
INSTRUMENT, des automobiles CHRYSLER puis des
automobiles FORD, de la compagnie financière E.F.
HUTTON, de la boisson COCA-COLA, des chemises
HATHAWAY, de la société INTERNATIONAL PAPER
Cie, des confiseries JELL-O ainsi que des appareils
photographiques et pellicules KODAK. Voir notamment :
"Don't need to graduate to know how to sell, says new
Ph.D. Bill COSBY" Chuck WINGIS, ADVERTISING
AGE du 18 Octobre 1976 ; "COSBY SHOW : Billy et ses
kids" Sophie GRASSIN, L'EXPRESS du 15 au 21 Avril
1988 ; "Bill COSBY, Incorporated" Richard ZOGLIN,
TIME International du 28 Septembre 1987 ; "Classic
summer : COSBY back for major COKE push" Patricia
WINTERS, ADVERTISING AGE du 15 Mai 1989.
5 - A l'exception d'une campagne pour les produits
audiovisuels MITSUBISHI. Mais cette campagne n'ayant
été exploitée qu'au Japon, elle ne biaisait pas l'enquête
considérée.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
232
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
En conclusion générale de ces
différentes recherches, on remarquera
que tous ces auteurs reconnaissent
l'influence privilégiée sur la cible, d'un
porte-parole célèbre, mais que comme
pour toute étude statistique, il convient
d'être très prudent en ce qui concerne
les généralisations. Ces quelques
travaux présentent chronologiquement
un aperçu scientifique des principales
recherches qui furent réalisées sur ce
sujet. On notera cependant que le fait
qu'ils s'orientent tous à des degrés
divers et parfois sur différents points
particuliers, vers l'obtention de
résultats positifs voire supérieurs avec
une célébrité, ne doit néanmoins pas
donner lieu à la présomption d'une
quelconque subjectivité dans le choix
des études présentées. Non seulement
les recherches menées n'ont à ce jour
pas permis de rencontrer de travaux
contradictoires, mais de surcroît,
d'autres études, confirmant elles aussi
cette tendance, seront présentées dans
les prochains chapitres.
3 / Méthodologie de l'expérimentation
DESTOUCHES écrivit dans le
Glorieux que "la critique est aisée et l'art
est difficile". Diverses critiques furent
faîtes à l'encontre des travaux
présentés ci-devant, non pour renier
leurs enseignements, mais pour
montrer que, comme pour toute étude
statistique, leurs résultats comportent
naturellement des limites. Les résultats
de l'étude terrain6 présentée ci-après
__________________
6 - Pour ne pas alourdir cette partie avec les diverses
n'échappent malheureusement pas à
cette règle. Par ailleurs, en raison
notamment
de
son
aspect
expérimental, celle-ci ne prétend pas
rivaliser
avec
les
travaux
susmentionnés, mais en revanche de
jeter les bases de futures recherches sur
ce thème en contribuant à une
meilleure compréhension de cette
approche publicitaire.
Les travaux qui viennent d'être
exposés sont tous d'origine américaine,
probablement en partie du fait des
nombreux cas d'utilisation recensés
aux Etats-Unis. Il ne fut cependant pas
possible à ce jour, de trouver similaires
études réalisées en France, c'est
principalement la raison pour laquelle
il paraissait donc intéressant d'observer
l'attitude du consommateur, de ce côté
de l'Atlantique. Cette expérimentation
utilise
comme
diverses
études
expérimentales,
une
population
estudiantine. Or, maints travaux ont
montré que les étudiants réagissaient
parfois différemment des adultes ou
d'autres cibles7.
Le but n'était pas non plus de
pratiquer une déclinaison des études
qui furent déjà menées aux Etats-Unis
sur ce thème, et dont il a été fait
mention. Certes, nous aurions pu
questionnaire, celle-ci fut remisée à la suite des annexes.
Voir questionnaire d'enquête page 694.
7 - Voir notamment à ce sujet : Donald VINSON et
William LUNDSTROM, "An examination of the external
validity of using students as surrogates in Marketing
Research", PROCEEDINGS OF THE SOUTHERN
MARKETING ASSOCIATION, (1976) ou encore Inder
KHORA et James BENSON "Are students really poor
substitutes for business in behavioral research ?"
JOURNAL OF MARKETING RESEARCH Volume 7,
n°4 (1970) pp. 529-532.
précisions méthodologiques quant à la construction du
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
233
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
imaginer reprendre les techniques du
plan d'échantillonnage de l'une de ces
enquêtes - utilisant elles aussi
fréquemment
une
population
estudiantine -, de manière à
administrer
un
questionnaire
équivalent
sur
des
publicités
semblables. Mais un parallèle parfait
n'aurait jamais pu être réalisé, et ce
pour plusieurs raisons :
b Les publicités testées n'auraient
pas pu être exactement les
mêmes, pour de simples raisons
techniques
(localisation
des
documents,
perception
/
adaptation de documents en
langue anglaise par un public
français,
connaissance
des
produits et des marques soumis à
l'enquête,...),
b Les goûts et les motivations
évoluent rapidement ; il aurait
dès lors fallu pouvoir mener ces
deux enquêtes, de front, de
chaque côté de l'Atlantique,
b Il n'existe pas en France de réel
cas d'utilisation d'une célébrité,
comme porte-parole officiel
d'une entreprise au sens où on
l'entend aux Etats-Unis.
b Les personnages testés ne
pouvaient pas être les mêmes :
l'évocation de l'acteur Telly
SAVALAS8, du chanteur Johnny
__________________
8 - Charles ATKIN and Martin BLOCK op. cit. p.58.
CASH9, ou du sportif John
McENROE10 ne suscite pas la
même réaction auprès du public
français qu'auprès du public
américain,
b Certaines de ces études
obtinrent le soutien financier
des établissements pour lesquels
travaillaient les enseignants
chercheurs, ou de la part de
sociétés de recherches ou
d'annonceurs
plus
particulièrement intéressés. Cela
permit notamment l'utilisation
d'échantillons très représentatifs
et/ou de taille importante.
Nous n'avons donc pas cherché à
isoler telle ou telle tendance nationale
sur les motivations d'un échantillon
représentatif, mais au contraire a-t-on
essayé d'analyser la qualité du souvenir
ainsi que les motivations supports de
ce souvenir, sur un traditionnel petit
groupe de consommateurs d'âges et de
formation semblables, de manière
expérimentale. L'originalité de cette
enquête ne porte donc pas sur la
définition de son échantillon, mais
essentiellement sur le support utilisé, le
mode d'exposition de l'échantillon et le
mode
d'administration
du
questionnaire.
Dès lors, tirant profit de
l'enseignement de la recherche exposé
ci-devant, et au regard des réserves
__________________
9 - Joseph M. KAMEN, Abdul G. AZHARI, Judith R.
KRAGH, op. cit. pp. 17 et suivantes.
10 - Roobina OHANIAN, op. cit. p.47.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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234
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
émises, nous poserons les hypothèses
suivantes pour guider notre recherche :
0 H0 : Les publicités contenues
dans le support testé et qui
utilisent une ou plusieurs
célébrités bénéficient d'un
souvenir spontané supérieur à
celui porté aux publicités
concernant le même type de
produits et n'utilisant pas de
célébrités.
0 H1 : Les publicités contenues
dans le support testé et qui
utilisent une ou plusieurs
célébrités bénéficient d'un
souvenir assisté supérieur à
celui porté aux publicités
concernant le même type de
produits et n'utilisant pas de
célébrités.
0
0
0
0
H2 : L'attitude du répondant
face à une publicité utilisant
une célébrité est différente en
fonction du sexe du répondant.
H3 : L'achat ou la
consommation préalable d'un
produit
n'influence
pas
l'impact sur le répondant,
d'une publicité utilisant une
célébrité.
H4 : La sympathie à l'égard
d'une célébrité n'influence pas
le souvenir de la publicité
utilisant cette célébrité.
H5 : La notoriété du porteparole publicitaire est perçue
comme
étant
l'argument
publicitaire
le
plus
convaincant,
lorsqu'une
publicité utilise une célébrité.
0 H6 : L'acteur demeure encore
aujourd'hui, le type de célébrité
jugé le plus convaincant, dans
l'objectif d'une utilisation
publicitaire.
Dans cette optique, notre
enquête était initialement prévue pour
avoir lieu au mois de Novembre ou de
Décembre 1992, car la fin d'année est
une période où le contenu publicitaire
des magazines11 est alors tel quantitativement et qualitativement -,
qu'un support pouvait très facilement
permettre de réaliser l'étude, selon les
modalités souhaitées. Or, parce qu'un
support adéquat, paru au mois de Juin
1992,
correspondait
aux
caractéristiques recherchées au delà de
nos espérances, ladite enquête put être
menée avec six mois d'avance.
Etait considéré a priori le fait,
que l'emploi d'une fausse publicité, à
l'instar
de
celles
utilisées
habituellement,
comportait
un
inévitable biais très difficilement
maîtrisable. L'objectif était alors simple
: Exposer une population à un support
__________________
11 - Même si un support de la presse écrite est très
souvent utilisé pour ce type d'étude, pour des raisons
pratiques et financières, nous rappellerons que la presse
magazine figure parmi les media auxquels le
consommateur accorde le plus de confiance. Voir
notamment "Consumer perceptions of the media and
their advertising content" Ernest F. LARKIN, JOURNAL
OF ADVERTISING, 8, Printemps 1979 pp. 5-7.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
235
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
réel - comportant des publicités
réelles12 - dans les conditions les plus
"normales" possibles, et tester ensuite
son souvenir publicitaire, ainsi que ses
principales motivations se rapportant à
notre sujet. Une sorte de split-run13 a
posteriori, en contournant le problème
de la fausse revue et en éludant le
besoin d'une seconde exposition à
l'annonce publicitaire. En effet, les
publicités plus particulièrement visées
recourant à l'utilisation d'une célébrité,
il n'était pas souhaité de ré-exposer le
répondant à ces publicités au cours du
questionnaire, le biais potentiel généré
par la célébrité étant jugé trop
incontournable ici. Ce souvenir devait
être au départ le plus "pur" possible,
même s'il était parfois assisté par écrit.
C'est la raison pour laquelle le
__________________
12 - Il est nécessaire d'insister ici sur le fait qu'il s'agissait
bien de publicités réelles, car cela génère naturellement
un autre biais inévitable dû cette fois au fait que le
lecteur pourra avoir déjà rencontré cette même publicité
dans un autre support, une publicité similaire pour la
même marque et/ou le même produit, ou encore une
publicité avec la même célébrité, pour ce qui est des cinq
publicités qui vont nous intéresser plus particulièrement
ici. Nous sommes conscient qu'une étude après une
exposition au message ne procure pas les mêmes résultats
que la même étude après plusieurs expositions au même
message. Voir notamment à ce sujet : les recherches de la
société McCOLLUM-SPIELMAN & Co Inc. "Multiple
exposure test needed to evaluate commercials" paru dans
MARKETING NEWS, du 31 Septembre 1979. Mais c'est
là un biais que nous assumons, au regard du bénéfice
d'utiliser de réelles publicités et donc de contourner ainsi
le biais que nous estimons plus pernicieux de la publicité
fausse ou "artisanale".
13 - Le split-run est un pré-test de création publicitaire
qui consiste à insérer deux messages dans un nombre égal
d'exemplaires d'un même support de manière à mesurer
l'impact de chaque annonce. Voir Pierre GREGORY
"Contrôle de l'efficacité publicitaire" op. cit. ; Bernard
BROCHAND, Jacques LENDREVIE "Le publicitor"
Editions DALLOZ, Paris (1983) p. 341.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
questionnaire est relativement long, de
manière à qualifier au maximum ce
souvenir.
Compte tenu de la date de
parution du support, il n'était plus
possible de mobiliser d'étudiants à
proprement parler, c'est pourquoi
l'échantillon est composé d'élèves d'une
école de commerce - l'Ecole Supérieure
de Gestion, 25 rue Saint-Ambroise,
75011 Paris. Il se compose de 59,6 % de
filles et de 40,4% de garçons, dont l'âge
varie de 20 à 26 ans et issus de 4
classes14 différentes ce qui explique en
partie la tranche d'âges ; l'âge moyen
étant de 21 ans et demi. Dès le départ, il
avait été fait le choix d'un échantillon
d'étudiants15, ne serait-ce que pour des
raisons financières et techniques.
L'étude de cette population comporte
des avantages et des inconvénients.
Nous avons vu que l'extrapolation des
résultats d'une enquête les concernants
était délicate16. En revanche, les
__________________
14 - Classe 1GB4 : 25 élèves, classes de la promotion 2GA :
31 élèves, classes de la promotion 2GB : 31 élèves, classe
3C : 27 élèves. La légère disproportion entre classes
s'explique par le fait que malheureusement les
questionnaires qui n'ont pû être retenus pour une raison
ou pour une autre, l'ont essentiellement été dans les
classes 1GB4 et 3C.
15 - Déjà en 1972, Ben ENIS, Keith COX et James
STAFFORD observaient que plus de la moitié des études
portant sur le comportement du consommateur, utilisait
des échantillons composés d'étudiants. Ben M. ENIS,
Keith K. COX et James E. STAFFORD "Students as
subjects in consumer behavior experiments" JOUNAL
OF MARKETING RESEARCH Volume 9, du mois de
Février 1972, pp. 72-74.
16 - Voir notamment Donald VINSON et William
LUNDSTROM op. cit. ; Inder KHORA et James
BENSON op. cit., et aussi VINSON Donald et William
LUNDSTROM "The use of students as experimental
subjects in Marketing research", JOURNAL OF THE
236
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
réactions de ces étudiants - éléments
potentiels d'une future population de
cadres - obtiennent très souvent
l'attention des annonceurs, pour
lesquels ils représentent une cible
prochaine des plus intéressantes17. La
qualité secondaire de ce type
d'échantillon comparativement à une
population universitaire parisienne, est
que ces éléments ont une origine
géographique beaucoup plus variée. En
revanche, s'il apparaît intéressant de
noter ce critère d'hétérogénéité relative,
ce dernier ne sera pas retenu pour
dresser une éventuelle typologie des
motivations au regard d'une origine
géographique
particulière.
Bien
qu'issus des quatre coins de l'hexagone,
ces étudiants résident pour la plupart à
Paris, le temps de leurs études. La mise
en valeur d'une éventuelle disparité
géographique d'exposition "médiaticosocio-culturelle" était alors biaisée à
l'origine. Quant au biais potentiel
induit par des observateurs "experts"18
en communication et en marketing, il
importait relativement peu ici, au
regard de la nature des questions
posées.
Le support maintenant. Il s'agit
du numéro 2.422 du 1er Juin 1992 du
magazine ELLE19, comportant 182
pages. Il s'agit d'un magazine féminin,
hebdomadaire. Pourquoi ce support ?
Tout d'abord parce que le souvenir
d'une
étude
personnelle
des
caractéristiques du titre quelques
années auparavant, nous incitait à son
choix20. Ensuite, parce que le numéro
sélectionné
avait
l'extraordinaire
avantage de comporter 5 publicités
susceptibles de nous intéresser :
+
1 double page couleur, avec
photographie (deuxième de
couverture)
pour
les
cosmétiques Imanance de
LANCÔME
avec
Isabella
ROSSELLINI (non-citée).
__________________
19 - ELLE est un magazine féminin hebdomadaire orienté
mode, lancé en France en 1945, par Hélène GORDONLAZAREFF. La diffusion O.J.D. (Office de Justification
de la diffusion) France 91 était de 286.406 numéros. La
diffusion totale payée était de 328.636 (diffusion totale :
347.041) numéros avec 41,16% d'abonnés. Le lectorat
(source annonceur 91/92) défini par le Centre d'Etude des
Suports Publicitaires indiquait 2.013.000 lecteurs dont
460.000 hommes (soit environ 23%) et 1.554.000 femmes
(soit environ 77%).
20 - Et que d'autre part, il est reconnu que "le magazine
ACADEMY OF MARKETING SCIENCE Volume 6, n°1,
pp. 114-125, Lawrence C. SOLEY et Leonard N. REID "On
the validity of students as subjects in advertising
experiments"
JOURNAL
OF
ADVERTISING
RESEARCH, Volume 23, n°4, Août/Septembre 1983.
17 - Jon B. FREIDEN, op. cit. p. 35. On notera par ailleurs
que comme nous l'espérions nous obtînmes un
échantillon de répondants n'ayant qu'une faible
connaissance du magazine. 51,75 ne connaissaient pas du
tout le support, 39,47% le lisait une fois par mois ou
moins, 5,26%, deux à trois fois par mois, et 3,51%
seulement, chaque semaine.
18 - Ibid. p. 35.
ELLE s'adresse à la femme post-moderne [...] la lectrice
européenne de ELLE est le prototype de la «combiwoman» multi-facettes, avec de nombreuses et
différentes tâches et responsabilités. Elle n'a pas un style
de vie, mais un kaléidoscope de styles différents qu'elle
peut faire alterner dans l'heure. Pour ELLE, il ne s'agit
donc pas de correspondre à un style de vie précis, mais
d'être le point de rencontre social entre la femme postmoderne et les tendances les plus notables de l'instant, et
cela à chaque numéro, dans chaque pays. L'alchimie de
ELLE est donc moins un produit marchand tangible avec
rubriques, photos et articles, qu'un produit virtuel, un
concept social avec style, tendances et sensations
esthétiques". Olivier BADOT et Bernard COVA, op. cit.
pp.21-22
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237
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
+
1 double page noir et blanc,
avec photographie stock shot
(p. 28 et 29) pour les montres
BREITLING avec Franklin D.
ROOSEVELT et Winston
CHURCHILL (non-cités)1.
__________________
1 - La campagne obtint le Grand Prix A.P.P.M. 92
(Association pour la Promotion de la Presse Magazine)
décerné en Novembre 1992. Voir : "BREITLING, Grand
Prix de la presse magazine" Sabine PAIREAULT,
STRATEGIES n°812 du 4 Décembre 1992.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
+ 1 page simple (gauche) noir et
blanc, avec photographie (p.
38) pour la lingerie féminine
VARIANCE
avec
Gérard
1
LANVIN (non-cité) .
__________________
1 - L'annonce "Gérard LANVIN" avait été précédée par
une annonce similaire, mais avec le joueur de tennis
Yannick NOAH, la semaine précédente.
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
+
1 double page couleur avec
photographie (p. 96 et 97) pour
les
cosmétiques
LES
POLYSIANES avec Jenna De
ROSNAY (citée).
+
1 double page couleur avec
photographie (p. 150 et 151)
pour
un
jeu
concours
HOLLYWOOD chewing-gum
light avec Gabriela SABATINI
(citée indirectement).
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Un numéro du magazine a donc
été confié à un groupe de 132 étudiants
volontaires1, pendant la semaine de
parution en leur demandant de lire /
consulter / parcourir / regarder /... ce
magazine, comme ils avaient l'habitude
de le faire avec ce type de support. Il
était ici impératif que les étudiants
abordent ce magazine dans des
conditions similaires à tout autre
lecteur - hormis le mode d'obtention.
Cette précision était très importante,
tout simplement de manière à ce que
les répondants ne recherchent pas une
information particulière dans l'optique
de l'enquête.
D'autre part, il était impératif
que le support soit obtenu la semaine
réelle de parution. Le contenu
rédactionnel ne devait pas constituer
un biais supplémentaire. En effet, le
support concerné contient comme la
plupart des magazines de ce type, des
pages d'actualité. Il s'agissait de
surcroît, d'un numéro thématique
"spécial mode d'été". Aurait dès lors
constitué un biais de fait, une
administration même décalée de
__________________
1 - Contrairement à certaines études, il ne fut promis
aucun avantage aux étudiants participants volontaires, si
ce n'est la conservation éventuelle du support. Par
ailleurs, en raison de la date de survenance de l''enquête,
les moyennes de fin d'année avaient déjà été
communiquées. Aucun lien ne pouvait donc être fait
entre la participation à l'enquête et l'obtention
potentielle d'un bonus de la part de l'enseignant. On
pouvait donc espérer une implication relativement faible
de la part du lecteur, d'où des conditions plus favorables
à l'influence d'une célébrité. Voir notamment sur ce point
: Richard E. PETTY et John T. CACIOPPO
"Communication and persuasion : central and peripheral
routes to attitude change" Editions SPRINGER /
VERLAG (1986), New York, Etats-Unis pp. 143-146.
quelques semaines avec la semaine
normale de parution.
Concernant ces éventuels - et de
toutes les manières incontournables biais à ce stade de l'exposition, il faut
noter
que
ces
étudiants
ne
connaissaient pas la raison précise de la
perception de ce magazine, et que de ce
fait, ils pouvaient encore moins
imaginer le centre d'intérêt principal de
l'enquête à laquelle ils seraient exposés.
On peut même noter que les deux seuls
élèves
à
avoir
véritablement
spontanément posé la question, étaient
parvenus à la supposition qu'il s'agirait
probablement "d'une analyse de la
construction d'un magazine féminin"
(sic). On peut donc a priori éliminer un
éventuel biais dû à la connaissance
préalable de l'objectif poursuivi, et
donc provenant d'une attention
particulière qui aurait pu être portée
aux 5 publicités visées. Les résultats
moyens de mémorisation spontanée
sont présents au besoin, pour confirmer
cette observation.
S'agissant d'un hebdomadaire, il
fut
décidé
d'administrer
le
questionnaire une semaine, jour pour
jour, après la remise du support. Le
risque pouvait alors être de s'exposer à
un naturel oubli - partiel sinon total de l'information publicitaire contenue
dans le support et qui allait être
analysée. C'est là une caractéristique
importante du mode d'administration
qu'il faut conserver à l'esprit pour
appréhender la nature et la qualité de
l'information recueillie. Mais l'on
rappellera ici, qu'il s'agit d'un public
jeune, relativement cultivé, curieux et
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
241
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
donc assez captif a priori2. Par ailleurs,
une telle administration devait
permettre également de croiser un réel
souvenir
publicitaire
avec
le
déclenchement
d'un
éventuel
comportement à la suite de cette
exposition à l'information publicitaire
contenue dans le magazine.
Dernière précision, les résultats
qui vont suivre portent sur un
échantillon de 114 questionnaires
seulement. Dix-huit questionnaires
"douteux" ont donc été retirés par
mesure de précaution. Dès lors que
l'échantillon était de petite taille, il
apparaissait plus prudent de se défaire
des questionnaires "à risque". Par
questionnaire
"à
risque"
nous
entendions un questionnaire qui ne
présentait pas de lien logique entre les
réponses obtenues à la série n°1 en
spontanée puis en assisté à la série n°2 ;
une incohérence entre les questions 2.A
et 2.B, 2.B et 3.A, 3.B et 3.C, 5.C et 5.D
ou 5.E et 5.F - 2.B, 3.A, 3.C, 5.D et 5.F
servant respectivement de questions
filtres - ; ou encore présentant une
parfaite symétrie des réponses à la
question
5.I.
Cela
exprimait
__________________
2 - Plusieurs auteurs se sont penchés sur la durée des
effets d'une publicité. Passant en revue 70 études, Darral
CLARKE évalua cette durée entre 0,8 mois et 1,368 mois.
"Econometric measurement of the duration of advertising
effect on sales" Darral G. CLARKE, JOURNAL OF
MARKETING RESEARCH 13, du mois de Novembre
1976, pp. 345-357. Toutefois, notons que les travaux de
Nariman DHALLA nuancèrent ces résultats en
démontrant que la durée variait considérablement d'une
catégorie de biens à l'autre, et que pour certaines
catégories - carburants, cigarettes,... -, les résultats
variaient également de manière importante d'une marque
à l'autre. "Assessing the long-term value of advertising"
Nariman K. DHALLA, HARVARD BUSINESS REVIEW
de Janvier / Février 1978, pp. 87-95.
manifestement une certaine "fantaisie"
dans les réponses, et causa le retrait de
9 questionnaires. Sept questionnaires
supplémentaires furent soustraits à
l'étude car les réponses à la question
5.G n'étaient pas utilisables3. Un autre
fut retiré parce que considéré trop
incomplet.
Enfin
un
dernier
questionnaire ne fut pas retenu car ne
comportant pas la première page de la
série n°5 - questions 5.A à 5.F,
probablement
en
raison
d'un
regrettable incident d'assemblage lors
du tirage automatique.
4 / Résultats et analyse
Les résultats seront présentés
dans deux sous-paragraphes, le premier
traitant des résultats généraux de
l'enquête ainsi que du souvenir
spontané puis assisté sur les cinq
marques cibles, le second présentant
les
résultats
spécifiques
ayant
__________________
3 - Cette question concernant directement le sujet
d'étude, ces questionnaires ne pouvaient être considérés.
Après avoir été modifiée à la suite du premier prétest, la
nouvelle formulation n'avait pas semblé poser de
problèmes. La raison qui causa la suppression de 7
questionnaires est que les répondants utilisèrent les
chiffres 1, 2 et 3 pour classer TOUS les types de
personnages proposés, ce qui rendait de ce fait
indiscernable le classement effectué. Ce retrait illustre un
prétest insuffisant sur cette question, ainsi qu'une
rédaction pas assez claire, car on observera par ailleurs
que 19 questionnaires parmi les 114 retenus comportaient
pour cette question soit un classement total de tous les
types proposés, soit des traces de ratures, d'effacements
ou de corrections. On notera également que pour le
questionnaire oté car jugé trop incomplet, le répondant
avait - entre autre - reporté le principe du classement de
la question 5.G sur la question 5.I et ne classant que les 3
principaux arguments.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
242
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
directement trait à l'utilisation d'une
célébrité par la publicité4.
A chaque fois que cela était
possible et à l'instar des études
présentées dans les pages qui
précèdent,
une
représentation
graphique fut jointe aux tableaux de
données. Ces graphiques ont l'avantage
de permettre une lisibilité plus
instantanée des résultats obtenus.
a / Résultats généraux
Le support lui-même a une
grande importance pour l'analyse des
résultats. Or, en raison du format, il
était
impossible
d'en
joindre
durablement un exemplaire à cette
thèse. De manière à pouvoir juger du
contenu publicitaire du support utilisé
ainsi que de l'emplacement des cinq
publicités plus particulièrement visées
par l'enquête, nous proposons dans le
tableau ci-après, le détail de la
pagination publicitaire du magazine.
Les publicités sont classées par ordre
d'apparition :
__________________
4 - Les questionnaires furent dépouillés à l'aide du
logiciel MARKINFO DATASTAT. Mais pour des raisons
de souplesse des calculs et de précisions des résultats, ces
derniers furent obtenus par exportation puis traitement
des données brutes dans le tableur MICROSOFT EXCEL
version 4. Cela permettait avantageusement de
d'exporter ensuite ces résultats directement dans le corps
du texte, ou encore de les retraiter dans l'application de
dessin MICROSOFT DRAW version 1.0 ou dans le
logiciel de dessin MICROSOFT PAINTBRUSH version
3.1, ce que n'autorisait pas le logiciel utilisé pour le
dépouillement.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
243
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Annonceurs
A
B
C
D
E
F
G
Secteurs
LANCÔME
D
2
2C
P
C
LOUIS VUITTON
1
4
G
FT
P
C
BAGAGES
RICCI
1
6
G
FT
P
C
PARFUMS
DIOR
D
8
P
C
COSMETIQUES
ROGER 1 GALLET
D
18
P
C
COSMETIQUES
COSMETIQUES
CHRISTIAN LACROIX
1
20
G
FT
P
C
PARFUMS
NEW WEST
1
23
D
FT
P
C
PARFUMS
VUARNET
1
25
D
FT
P
C
LUNETTES
TED LAPIDUS
1
27
D
FT
P
N
VETEMENTS
BREITLING
D
28
P
N
MONTRES
ELIZABETH ARDEN
1
30
G
FT
P
C
COSMETIQUES
HUIT
1
33
D
FT
P
C
LINGERIE FEMININE
CLARINS
1
35
D
FT
P
C
COSMETIQUES
SANT'ANGELICA
D
26
P
C
ACCESSOIRES PARAMEDICAUX
VARIANCE
1
38
G
FT
P
N
LINGERIE FEMININE
GRASSET
1/3
40
GVE
FT
P
N
EDITION
HEI POA
2/3
41
DVE
FT
P
N
COSMETIQUES
JOLEN
1/3
42
GVE
FT
P
N
COSMETIQUES
COVERMARK
1/3
43
DVE
FT
JEAN-LOUIS DAVID
D
44
GUERLAIN
1
46
G
FT
P
N
COSMETIQUES
P
N
COIFFEURS
P
C
COSMETIQUES
PHILIP MORRIS
1
49
D
FT
P
C
TABAC
JACQUES DESSANGE
1
51
D
FT
P
N
COIFFEURS
CHANTELLE
1
53
D
FT
P
C
MCDONALD'S
1
55
D
FT
DP
NBC
LINEANCE
1
57
D
FT
P
C
COSMETIQUES
CANDEREL
1
58
D
FT
P
C
EDULCORANTS
CANDEREL
1
60
D
FT
P
C
EDULCORANTS
KLORANE
1
63
D
FT
P
C
COSMETIQUES
THAI
1
65
D
FT
P
C
COMPAGNIES AERIENNES
GUCCI
1
HP
D
FT
P
C
INSTITUTIONNELLE
LINGERIE FEMININE
RESTAURATION
ALFRED DUNHILL
D
HP
P
C
SAN DANIELE
D
HP
P
NBC
VETEMENTS
MILLCREEK
1/4
HP
GBE
FT
P
N
COSMETIQUES
CHOPARD
1
HP
D
FT
P
C
MONTRES
PICARDIE
1
HP
D
FT
P
C
REGIONS
ALIMENTAIRE
SOLDES TROIS
1/8
HP
GHI
FT
T
N
VETEMENTS
HELENE GALE
1/8
HP
GHI
FT
T
C
CENTRES BEAUTE
TODAY'S LOOK
1/16
HP
GBI
FT
P
N
COIFFEURS
A CORPS PARFAIT
1/16
HP
GBI
FT
T
C
CENTRES BEAUTE
CENTRE MEDES
1/8
HP
GBI
T
C
CENTRES BEAUTE
PRINTEMPS
1
HP
D
FT
P
C
DISTRIBUTION
PETRO DI ROMA
1
HP
G
FT
P
C
CHAUSSURES
MERCURE DE FRANCE
1/3
68
GVE
FT
P
N
EDITION
MAURICE LACROIX
1
69
D
FT
P
C
MONTRES
FAYARD
1/3
70
GVE
FT
P
N
EDITION
FOLIO
1
71
D
FT
P
C
EDITION
PYGMALION
1/3
72
G
FT
P
N
EDITION
FLAMMARION
1
73
D
FT
P
N
EDITION
CLUB MED
D
74
P
C
VOYAGES
FREEDOM
1
77
P
NBC
D
FT
HYGIENE FEMININE
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
244
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Annonceurs
A
B
YVES ROCHER
D
SHELL
D
S COMME SOIE
1
82
RAY BAN
1
DANIEL BOURDON
1
SISLEY
D
88
CHANEL
1
BIOVIMER
LIERAC
LES POLYSIANES
D
C
D
E
F
G Secteurs
78
P
C
80
P
C
CARBURANTS
COSMETIQUES
G
FT
P
C
VETEMENTS
85
D
FT
P
C
LUNETTES
87
G
FT
P
N
VETEMENTS
P
C
COSMETIQUES
91
D
FT
P
C
COSMETIQUES
1
93
D
FT
T
C
THALASSOTHERAPIE
D
94
P
C PR
COSMETIQUES
96
P
C
COSMETIQUES
ALIMENTAIRE
DISTRIFRANCE - TUO
1
99
HOLLYWOOD
D
150
PIER AUGE
1
152
D
G
FT
FT
P
C
P
C CO
CONFISERIE / CONCOURS
P
C
COSMETIQUES
PEUGEOT
1
155
D
FT
P
C
AUTOMOBILES
LISTEL
1
157
D
FT
P
C
ALIMENTAIRE
SOCO
1
159
D
FT
P
C
BAGAGES
FT
ANTINEA
1
161
D
P
C
LINGERIE FEMININE
MATRA
1
162
G
P
C CO
TELEPHONES
CHAMBOURCY
1
163
D
P
C BR
ALIMENTAIRE
WINSTON LEGEND
1
169
D
FT
D
C
LOISIRS
MINCIR CROQ
1/2
171
GB
FT
P
C
DIETETIQUE
DIVERS
1
172
G
FT
PDT
NBC
NRJ MUSIC
1/2
173
D
FT
P
C
ANNONCES DIVERSES
EDITION n°1
1/3
177
DE
FT
P
NB
EDITION
JEAN-LOUIS DESFORGES
1
179
D
FT
P
NB
COIFFEURS
RASUREL
1
181
D
FT
P
C
LINGERIE FEMININE
GUERLAIN SAMSARA
1
182
4C
P
C
PARFUMS
RADIO
Légendes :
A
Espace occupé par la publicité en page (D = double page)
Localisation (n° de page, HP:Hors pagination)
B
Emplacement (G:Gauche, D:Droite, E:Extérieur, I:Intérieur, V:Vertical, H:horizontal, 2C:deuxième de couverture,...)
C
D
FT : Emplacement face texte
Nature du visuel (P:Photo, D:Dessin, T:Texte)
E
Couleur (C:Couleur, NB:Noir et Blanc)
F
Divers (CO:Concours, BR:Bon de réduction PR:Publi-rédactionnel)
G
En gras
Publicité utilisant une ou plusieurs célébrités
Au regard de cette pagination
publicitaire, la question 1.B a généré
344 citations spontanées, ce qui
représente un peu plus de 3 citations
par répondant. Toutefois, il faut
remarquer que 40 citations portaient
sur des marques qui ne figuraient pas
parmi les 76 principales, recensées dans
ce numéro. Cela donne un pourcentage
d'erreur de 11,63%, que l'on peut
considérer comme très honorable dès
lors que le questionnaire était,
rappelons-le, administré une semaine
après remise et que cette question
sollicitait un souvenir spontané. Vingtneuf des 76 principaux annonceurs ne
furent jamais cités ce qui représente
38,16% des marques présentes dans le
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
245
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
support et 26,45% de l'espace
publicitaire qui ne généra aucun
souvenir spontané.
Les trente premières marques
citées en spontané sont regroupées
dans les tableaux1 présentés cidessous :
__________________
1 - Tous les tableaux présentés jusqu'à la fin du chapitre
ne seront pas sourcés individuellement dès lors qu'ils ont
tous été contruits d'après les résultats de l'enquête.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
246
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Souvenir publicitaire - Citations spontanées en pourcentages (ensemble des répondants)
30%
29%
28%
25%
20%
18%
15%
15%
7% 7%
7%
6% 6%
5%
5% 5%
4% 4%
4%
4%
4%
4% 4% 4%
3% 3%
3%
FOLIO
8%
CHAMBOURCY
9% 9%
RAY BAN
10% 10%
MCDONALD'S
11% 11%
10%
ELIZABETH ARDEN
13%
HOLLYWOOD
LES POLYSIANES
RICCI
TED LAPIDUS
CHANTELLE
CHRISTIAN LACROIX
LOUIS VUITTON
HUIT
ALFRED DUNHILL
DIOR
NEW WEST
CHANEL
CLUB MED
VUARNET
VARIANCE
CANDEREL
GUCCI
PHILIP MORRIS
CLARINS
KLORANE
YVES ROCHER
GUERLAIN
LANCOME
BREITLING
SAMSARA
0%
Note : Les pourcentages figurant au sommet de chaque pile sont arrondis pour des raisons de lisibilité.
On note immédiatement le
détachement très net de la marque
SAMSARA, citée par 28,95% des
répondants et de LANCÔME, citée par
28,07% des répondants. Cette première
place pour SAMSARA peut s'expliquer
en grande partie par le fait que cette
publicité figurait en 4ème de couverture,
emplacement reconnu comme étant le
meilleur d'un support en termes
d'impact.
Les deuxième et troisième places
sont chacune occupées par une
publicité qui nous intéresse plus
particulièrement dans le cadre de cette
étude. En effet, LANCÔME (avec
Isabella ROSSELLINI) fut citée en
spontané par 28,07% des répondants et
BREITLING
(avec
Winston
CHURCHILL
et
Franklin
ROOSEVELT) par 17,54% de ces
mêmes répondants. Certes, l'impact de
la publicité LANCÔME doit-il lui aussi
être modéré par son emplacement
privilégié - double page en deuxième de
couverture -, mais il reste cependant
très élevé comparativement aux autres
marques. Quant au score de la publicité
BREITLING il est lui aussi très élevé
sans qu'a priori un emplacement
particulier puisse l'expliquer en partie.
Le score de la publicité
VARIANCE (avec Gérard LANVIN)
reste important lui aussi, avec 8,77%
des répondants en ayant un souvenir
spontané, avec une simple page, mais
face
texte.
En
revanche,
HOLLYWOOD
(avec
Gabriela
SABATINI) et LES POLYSIANNES
(avec Jenna de ROSNAY) figurent
parmi les moins bons résultats des
marques citées, avec respectivement
3,51% et 2,63% des répondants. Le
pourcentage moyen de répondants se
souvenant d'une marque x présente
dans le magazine étant de 3,51%. A
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
247
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Analysons
maintenant
les
tableaux des résultats par sexe. La
première observation est à l'évidence
une grande différence dans le hitparade des marques dont chacun des
sexes a le souvenir.
l'égard de la publicité HOLLYWOOD,
on peut citer le fait que cette dernière
n'intervenait qu'à la fin du magazine
(page 152/182) bénéficiant peut-être
ainsi d'une attention moindre.
Souvenir publicitaire - Citations spontanées en pourcentages (filles)
30%
29%
28%
25%
20%
18%
15% 15%
15%
12% 12%
10%
10%
9%
7% 7% 7%
6% 6% 6% 6% 6% 6% 6% 6%
4% 4% 4% 4% 4%
5%
3% 3% 3% 3%
1% 1%
LES POLYSIANES
LISTEL
HOLLYWOOD
LINEANCE
FOLIO
HELENE GALE
RICCI
RAY BAN
DIOR
LIERAC
VUARNET
CHANTELLE
PHILIP MORRIS
HUIT
LOUIS VUITTON
ELIZABETH ARDEN
CHANEL
CHRISTIAN LACROIX
ALFRED DUNHILL
VARIANCE
NEW WEST
BREITLING
CLUB MED
GUERLAIN
CANDEREL
GUCCI
CLARINS
YVES ROCHER
KLORANE
SAMSARA
LANCOME
0%
Note : Les pourcentages figurant au sommet de chaque pile sont arrondis pour des raisons de lisibilité.
On notera avec intérêt dans le
tableau
présenté
ci-dessus
et
présentant le souvenir publicitaire du
groupe des filles, l'apparition en 1ère
position de la première des cinq
marques qui nous préoccupent plus
particulièrement, LANCÔME. Déjà très
proche de SAMSARA dans le tableau
du classement général, elle devance
cette dernière dans le souvenir du
groupe des filles. On notera, également
que le souvenir de la marque
BREITLING ne concerne que 8,82%
des répondantes et que la marque
VARIANCE
recule
proportionnellement légèrement avec
7,35% des répondantes. Enfin, le très
mauvais
résultat
des
marques
HOLLYWOOD et LES POLYSIANES 1,47% des répondantes seulement
chacune - les repoussent un peu plus à
la fin du tableau.
Les résultats du tableau
présenté ci-après à propos des 30
premières marques représentatives du
souvenir publicitaire du groupe des
garçons
sont
eux
aussi
très
intéressants.
La 1ère position est occupée par
l'une des publicités contenues dans le
magazine et qui utilisent une célébrité :
BREITLING.
Ainsi,
c'est
manifestement le souvenir du groupe
des garçons qui contribue largement à
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
248
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
attribuer à BRIETLING l'avantage
d'être un produit destiné plus
spécialement aux hommes, ce qui n'est
pas du tout le cas de LANCÔME. Or, la
marque LANCÔME obtient également
de très bons résultats, puis qu'elle
arrive 3ème dans ce classement avec
26,09% des répondants qui en avait le
souvenir.
placer le souvenir de cette marque à la
3ème position dans le classement
général, car elle n'était que la 9ème
marque citée par le groupe des filles.
Mais surtout, on observera que cette
publicité placée à la page 28, obtient
chez le groupe des garçons, le même
résultat que la 4ème de couverture avec
SAMSARA. On pourrait cependant
Souvenir publicitaire - Citations spontanées en pourcentages (garçons)
35%
30%
30% 30%
26%
25%
20%
20%
15%
15%
11% 11% 11%
9%
7%
7%
7%
7%
7%
7%
7%
7%
7%
7%
4%
4%
4%
CLARINS
7%
5%
CHANTELLE
9%
ALFRED DUNHILL
10%
4% 4% 4% 4% 4%
SHELL
RASUREL
ROGER 1 GALLET
LOUIS VUITTON
LES POLYSIANES
HOLLYWOOD
NEW WEST
TED LAPIDUS
MCDONALD'S
JEAN-LOUIS DAVID
HUIT
JACQUES DESSANGE
GUCCI
CLUB MED
CANDEREL
CHAMBOURCY
DIOR
CHANEL
VUARNET
YVES ROCHER
VARIANCE
GUERLAIN
PHILIP MORRIS
LANCOME
SAMSARA
BREITLING
0%
Note : Les pourcentages figurant au sommet de chaque pile sont arrondis pour des raisons de lisibilité.
Dans cette hypothèse d'une
influence de la connotation du produit
et/ou de la marque, on considérera alors
le score encore plus intéressant de la
lingerie féminine VARIANCE qui
obtint le souvenir spontané de 10,87%
des répondants., la plaçant ainsi à la
6ème position de ce classement, ex
aequo avec les marques VUARNET et
YVES ROCHER. Rappelons que dans
le classement du groupe des filles,
VARIANCE n'obtenait que 7,35%, ce
qui la plaçait à la 10ème place seulement,
ex aequo avec les marques CLUB MED
et NEW WEST. C'est donc le souvenir
des garçons qui "tire" vers le haut du
classement, la place du souvenir de
cette marque.
Or, dans ce dernier cas, le
produit n'avait manifestement pas de
connotations masculines. D'ailleurs à
l'étude de l'ensemble des 30 premières
marques dont le groupe des garçons ait
le souvenir, on peut aisément
remarquer que les marques à
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
249
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
connotation masculine ne sont pas
majoritaires1. L'impact relativement
important de cette publicité provient
donc d'une autre origine.
Enfin,
scores
relativement
médiocres
pour
les
marques
HOLLYWOOD et LES POLYSIANES,
même si l'on peut noter que c'est
encore une fois essentiellement le
souvenir des garçons de la publicité
HOLLYWOOD - avec 6,52% - qui tire
la marque, et lui permet de figurer à une
meilleure place dans le classement
général des 30 premières marques.
Si
l'on
représente
graphiquement les résultats obtenus
par chacun des deux sexes pour les
seules cinq marques qui nous vont nous
intéresser plus particulièrement dans la
seconde partie de l'analyse, on obtient
les deux tracés suivants :
__________________
1 - Nous reviendrons page 274 sur l'étude d'une
éventuelle liaison à ce sujet.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
250
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Souvenir spontané d'avoir vu une publicité pour la marque (garçons / filles)
35%
Garçons
30%
Filles
25%
20%
15%
10%
5%
0%
Lancôme
Breitling
Variance
On perçoit alors immédiatement
que pour ces marques, les filles sont à
chaque
fois,
proportionnellement
moins nombreuses que les garçons sur
le plan du souvenir spontané, à
l'exception de la marque LANCÔME,
et que la différence la plus
caractéristique se situe à propos de la
marque BREITLING.
Concernant la question 1.C, à
propos des marques qui selon le
répondant "comportent un éléments
incitant à l'achat", le nombre des
réponses
est
beaucoup
moins
important. On peut dès lors penser que
les répondants ont bien assimilé la
question et plus particulièrement au
Les
Polysianes
Hollywood
regard de la précédente. Faisant appel à
leurs motivations, il semble alors
logique que le nombre de réponses
obtenues soit inférieur à celui de la
question 1.B. Ainsi, seules 75 citations soit moins d'une citation par
répondants - furent obtenues ici, dont 7
portaient sur des marques qui ne
figuraient pas dans le magazine, soit
moins de 10%. Là aussi on peut
considérer qu'il s'agit d'un pourcentage
"d'erreur" très honorable au regard des
conditions d'administration dans le
temps, de cette enquête. On obtient
pour l'ensemble des répondants, le
tableau de résultats présenté ci-dessous
:
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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251
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Publicités incitant à l'achat - Citations spontanées en poucentages
14% 13%
12%
10%
8%
6%
4%
4%
4% 4%
3% 3%
2% 2% 2% 2%
1%
1% 1%
1% 1%
1% 1% 1%
1% 1% 1% 1%
1% 1%
1% 1%
SANT'ANGELICA
2% 2%
ROGER 1 GALLET
2%
PRINTEMPS
3%
2%
S COMME SOIE
RASUREL
LINEANCE
KLORANE
LES POLYSIANES
JEAN-LOUIS DAVID
GUCCI
HOLLYWOOD
FOLIO
CHANTELLE
ANTINEA
CANDEREL
YVES ROCHER
ALFRED DUNHILL
SAMSARA
VARIANCE
LIERAC
HUIT
JACQUES DESSANGE
ELIZABETH ARDEN
MCDONALD'S
CHANEL
CLARINS
BREITLING
CLUB MED
LANCOME
GUERLAIN
0%
Note : Les pourcentages figurant au sommet de chaque pile sont arrondis pour des raisons de lisibilité.
Si l'on considère les 30 premières
marques citées, à l'exemple de la
question précédente, on constate une
différence importante en ce qui
concerne la position de LANCÔME,
qui devient alors de manière très
significative la première marque citée
par 13% des répondants. Alors que
SAMSARA - en 1ère position dans le
classement de la question précédente est reléguée à la 5ème place ex aequo
avec cinq autres marques et seulement
1,75% des répondants l'ayant citée.
Pour expliquer en partie cette
situation, on peut notamment avancer
la raison que le produit Imanance de
LANCÔME revêtait un intérêt
conjoncturel - protection contre "les
méfaits du soleil" - supérieur au parfum
SAMSARA (parfum). Cela peut
d'ailleurs être confirmé par le fait que la
marque GUERLAIN - cosmétiques
protecteurs TERRACOTTA - dépasse
ici SAMSARA (lui aussi produit
GUERLAIN)1.
En revanche, cette hypothèse ne
paraît pas s'appliquer à l'autre marque
de cosmétiques photo-protecteurs, LES
POLYSIANNES, qui recule même par
rapport à son résultat en souvenir
spontané. Elle incite donc a priori
relativement moins à l'achat que sa
concurrente LANCÔME.
Au regard des résultats par sexe,
c'est manifestement ici le sentiment du
groupe des filles qui place LANCÔME
en 1ère position avec 19,12% des
__________________
1 - Concernant les résultats de la marque SAMSARA, on
peut cependant légitiment s'interroger sur la parfaite
distinction par les répondants de la publicité
GUERLAIN (pour les cosmétiques) et la publicité
SAMASARA (lui-aussi produit GUERLAIN et
explicitement présenté comme tel). Difficile de dire donc
si une part des citations "GUERLAIN" n'est pas
attribuable à SAMSARA.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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252
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
convaincre 65% des filles qui avaient le
souvenir spontané de l'avoir remarquée,
ce qui est énorme. Alors qu'elle semble
n'avoir convaincu que 16,67% des
garçons qui avaient eux aussi le
souvenir spontané de l'avoir remarquée.
répondants pour lesquels la publicité
incitait à l'achat. Or, dans le tableau des
résultats du groupe des garçons
présenté plus loin, LANCÔME
n'obtient ce même sentiment que chez
4,34% des répondants. Ainsi, la
publicité LANCÔME est parvenue à
Publicités incitant à l'achat - Citations spontanées en pourcentages (filles)
20% 19%
18%
16%
14%
12%
10%
8%
7%
6%
4%
4%
3% 3%
3%
1% 1% 1% 1%
2%
1% 1%
1% 1% 1%
1% 1%
1% 1%
1% 1%
SHELL
VARIANCE
SAMSARA
SANT'ANGELICA
PRINTEMPS
ROGER 1 GALLET
LIERAC
LES POLYSIANES
HUIT
KLORANE
GUCCI
CLUB MED
BREITLING
CANDEREL
ANTINEA
YVES ROCHER
ELIZABETH ARDEN
CHANEL
CLARINS
LANCOME
GUERLAIN
0%
Note : Les pourcentages figurant au sommet de chaque pile sont arrondis pour des raisons de lisibilité.
Concernant les autres marques
qui
nous
préoccupent
plus
particulièrement et toujours en
considérant le groupe des filles, seules
BREITLING, LES POLYSIANES et
VARIANCE sont citées, mais aucune
ne se détache des 15 marques ex aequo,
chacune citée par 1,47% des
répondantes. Mais là-encore; il paraît
plus intéressant de croiser les résultats
avec ceux de la question précédente.
Ainsi, il apparaît que la publicité pour
la marque LES POLYSIANES a très
bien su convaincre - à 100%1 - les filles
qui avaient eu le souvenir spontané de
la marque.
La publicité pour la marque
BREITLING semble avoir convaincu
16,67% des filles qui en avaient eu le
souvenir. Quant à la publicité de la
marque VARIANCE, 1 fille sur 5 soit
20% de celles qui s'étaient souvenues
__________________
1 - Il est cependant nécessaire de relativiser la portée de
ce taux de "réussite absolu", car le souvenir spontané du
groupe des filles pour la marque LES POLYSIANES ne
représentait qu'une seule répondante.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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253
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Elles ne sont pas exactement les mêmes
que celles citées par le groupe des filles.
En définitive, ce n'est là qu'une
confirmation par le détail, car on
pouvait s'y attendre à la lecture du
classement général présentant une
majorité de très faibles pourcentages.
d'avoir vu la publicité trouvèrent
qu'elle incitait à l'achat.
La première observation à
l'étude du classement obtenu avec le
groupe des garçons concerne les
marques "résiduelles", c'est à dire
n'obtenant que de faibles résultats.
Publicités incitant à l'achat - Citations spontanées en pourcentages (garçons)
7%
7%
7%
7%
6%
5%
4%
4%
4%
2%
2%
2%
2%
ALFRED DUNHILL
CHANEL
CHANTELLE
FOLIO
3%
2% 2% 2% 2% 2% 2% 2% 2% 2%
2%
1%
VARIANCE
SAMSARA
RASUREL
S COMME SOIE
LINEANCE
LIERAC
HUIT
JEAN-LOUIS DAVID
HOLLYWOOD
LANCOME
JACQUES DESSANGE
MCDONALD'S
BREITLING
CLUB MED
0%
Note : Les pourcentages figurant au sommet de chaque pile sont arrondis pour des raisons de lisibilité.
Si l'on procède au même rapport
que sur les résultats du groupe des
filles, on obtient que la publicité pour
la marque BREITLING incite à l'achat
21,43% des garçons qui avaient le
souvenir spontané de l'avoir remarquée
; VARIANCE : 20% et HOLLYWOOD :
33,33%.1 On notera donc en conclusion,
qu'à l'exception de la publicité pour la
marque VARIANCE, l'incitation à
l'achat des autres publicités fut perçue
très différemment d'un sexe à l'autre.
__________________
Tableau récapitulatif des
répondants ayant eu le
souvenir spontané de la
publicité, qui trouvent
qu'elle incitait à l'achat
Lancôme
Breitling
Variance
Les Polysianes
Hollywood
Filles
Garçons
65,00%
16,67%
20,00%
100,00%
-
16,67%
21,43%
20,00%
33,33%
1 - Il paraît là aussi nécessaire de relativiser la portée de ce
taux de 33,33%, car le souvenir spontané du groupe des
garçons pour la marque HOLLYWOOD ne représentait
que trois répondants.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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254
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Pour compléter cette réponse, la
question 1.D devait identifier les
comportements d'achat déclenchés.
Seuls 18 répondants (15,79%) admirent
qu'une des publicités contenues dans le
support avait déclenché chez eux un
Marques ayant
déclenché
un comportement
Lancôme
Mac Donald's
Club Med
Huit
Klorane
hors magazine
produit non cité
% de
l'ensemble
des
répondants
% des
répondants
incités à
l'achat
par la publicité
5,26%
1,75%
1,75%
1,75%
0,88%
2,63%
1,75%
40,00%
66,67%
66,67%
100,00%
100,00%
-
En définitive, nous constatons
que rédigé sous cette forme, ce type de
question se prête difficilement à une
enquête par questionnaire comportant
un grand nombre de questions. Dans le
cadre qui nous intéresse ici, même si
LANCÔME se détache - logiquement
Part de
l'espace
publicitaire
Secteurs d'activité
COSMETIQUES
ALIMENTAIRE
VETEMENTS
LINGERIE FEMININE
COIFFEURS
MONTRES
PARFUMS
EDITION
ACCESSOIRES PARAMEDICAUX
BAGAGES
CARBURANTS
EDULCORANTS
LUNETTES
VOYAGES
ANNONCES DIVERSES
27,63%
8,57%
6,27%
6,12%
4,97%
4,90%
4,90%
4,47%
2,45%
2,45%
2,45%
2,45%
2,45%
2,45%
1,22%
comportement, ce qui à notre avis est
très/trop faible pour être significatif
quant aux marques citées. Pour
illustration, on notera que les réponses
concernaient :
par rapport aux résultats précédents très nettement, ces réponses ne seront
pas retenues pour le reste de l'analyse.
De manière à relativiser les
résultats obtenus pour chacune des
marques visées, il semblait intéressant
de considérer la répartition de l'espace
publicitaire du support. Si l'on fait
abstraction
du
coefficient
multiplicateur dû à l'emplacement de la
publicité et qu'il est difficile
d'apprécier
avec
précision
et
objectivité, l'espace publicitaire des
"81,7" pages de publicité contenues dans
ce support se répartissait de la manière
suivante :
Secteurs d'activité
AUTOMOBILES
CHAUSSURES
COMPAGNIES AERIENNES
DISTRIBUTION
INSTITUTIONNEL
LOISIRS
HYGIENE FEMININE
REGIONS
RESTAURATION
TABAC
TELEPHONIE
THALASSOTHERAPIE
DIETETIQUE
RADIO
CENTRES BEAUTE
Part de
l'espace
publicitaire
1,22%
1,22%
1,22%
1,22%
1,22%
1,22%
1,22%
1,22%
1,22%
1,22%
1,22%
1,22%
0,61%
0,61%
0,38%
En gras : Secteurs d'appartenance des cinq publicités visées.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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255
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Ce qui donne la répartition graphique suivante :
Répartition de l'espace publicitaire par secteurs, du magazine ELLE du 1er Juin 1992
RESTAURATION, et suivants
HYGIENE FEMININE REGIONS
LOISIRS
INSTITUTIONNEL
COSMETIQUES
DISTRIBUTION
COMPAGNIES AERIENNES
CHAUSSURES
AUTOMOBILES
ANNONCES DIVERSES
VOYAGES
LUNETTES
EDULCORANTS
CARBURANTS
BAGAGES
ACCESSOIRES PARAMEDICAUX
ALIMENTAIRE
EDITION
PARFUMS
VETEMENTS
MONTRES
COIFFEURS
LINGERIE FEMININE
En éclaté : secteurs d'appartenance des cinq publicités visées
Cela renforce l'idée que le score
de LANCÔME est excellent, car
l'espace publicitaire occupé par des
produits cosmétiques représentait
27,63% de l'espace publicitaire total,
avec 18 annonceurs de ce secteur (dont
6 présents avec une double page).
Confirmation également du bon score
de BREITLING qui "luttait" contre
deux autres annonceurs (CHOPARD et
MAURICE LACROIX). Toutefois,
dans ce dernier cas, il faut reconnaître
la plus faible notoriété des deux autres
annonceurs,
et
préciser
qu'ils
n'utilisaient chacun qu'une seule page.
Concernant
VARIANCE,
on
remarquera, que la marque "affrontait"
4
autres
annonceurs
(HUIT,
ANTINEA,
CHANTELLE
et
RASUREL) tous également présents
avec une simple page. On notera que
cela
n'empêche
cependant
pas
VARIANCE de se détacher nettement
par rapport à ses concurrents, sur le 1er
graphique du souvenir publicitaire. En
revanche, il obtient le même résultat 1,75% - d'incitation à l'achat que la
marque HUIT et sont tous les deux
talonnés par les trois autres marques
qui obtiennent chacune 0,88%.
Si l'on observe maintenant les
résultats obtenus à la question 2.A sur
le souvenir d'avoir vu une publicité
pour une marque des différents types
de produits proposés par la question,
pour les trois secteurs qui nous
intéressent, on obtient le tableau
suivant :
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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256
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Souvenir assisté de l'ensemble des
répondants d'avoir vu une publicité
certains
presque
croient
sûrs
pour une marque de
ensemble
Non
d'accord
ne savent
pas
Lingerie Féminine
72,81%
15,79%
7,02%
95,61%
1,75%
2,63%
Montres
47,37%
20,18%
14,04%
81,58%
4,39%
14,04%
Cosmétiques
84,21%
8,77%
4,39%
97,37%
0,88%
1,75%
Chewing gum1
0,88%
-
-
0,88%
-
-
70,00%. Les trois types étudiés ici étant
donc largement au dessus de la
moyenne.
En général, les résultats des
secteurs qui nous intéressent sont très
élevés. Ce qui semble a priori logique au
regard de l'espace publicitaire - parmi
les plus importants - occupé par
chacun de ces secteurs. Le pourcentage
moyen de souvenir assisté pour
l'ensemble des répondants, à propos de
10 types de produits - 5 types ne
figuraient pas parmi les annonceurs présents dans le support était de
Souvenir assisté du groupe des
filles d'avoir vu une publicité pour
certaines
Lorsque l'on observe les
résultats calculés pour chacun des deux
sexes, on s'aperçoit que les garçons ont
- pour les trois principaux types de
produits qui nous intéressent - un
souvenir plus fort que celui des filles.
presque
croient
sures
une marque de
filles
Non
d'accord
ne savent
pas
Lingerie Féminine
73,53%
13,24%
7,35%
94,12%
2,94%
2,94%
Montres
39,71%
16,18%
20,59%
76,47%
5,88%
17,65%
Cosmétiques
85,29%
5,88%
5,88%
97,06%
-
2,94%
Chewing gum
-
-
-
-
-
-
Le pourcentage moyen du
souvenir assisté pour le groupe des
Souvenir assisté du groupe des
garçons d'avoir vu une publicité
certains
presque
filles, à propos des types de produits
présents dans le support était : 68,24%
croient
sûrs
pour une marque de
ensemble
Non
d'accord
ne savent
pas
Lingerie Féminine
71,74%
19,57%
6,52%
97,83%
-
2,17%
Montres
58,70%
26,09%
4,35%
89,13%
2,17%
8,70%
Cosmétiques
82,61%
13,04%
2,17%
97,83%
2,17%
-
__________________
1 - Ce type de produits ne devait pas être testé à l'origine - voir l'élaboration du questionnaire page 684 à propos de la
question 2.A - mais il se trouve que l'un des répondants a utilisé la 16ème ligne de la question 2.A pour le mentionner.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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257
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Chewing gum
100,00%
-
Le pourcentage moyen du souvenir
assisté pour le groupe des garçons, à
propos des types de produits présents
dans le support était : 72,61%
Excellents dans l'ensemble, ces
résultats sont assez difficiles à
interpréter, c'est pourquoi la question
2.A était directement complétée par la
Souvenir assisté de l'ensemble des
répondants d'avoir vu une publicité
certains
presque
-
-
question 2.B. Or, on constate que tous
ces résultats faiblissent lorsque l'on
observe plus précisément le souvenir
d'avoir vu une publicité pour une
marque
précise.
Les
marques
présentées dans le tableau ci-dessous,
le sont dans leur ordre d'apparition à
l'intérieur du magazine :
croient
sûrs
pour la marque
-
100,00%
ensemble
Non
d'accord
ne savent
pas
Lancôme
50,88%
18,42%
15,79%
85,09%
3,51%
11,40%
Breitling
44,74%
8,77%
15,79%
69,30%
7,89%
22,81%
Variance
23,68%
14,91%
23,68%
62,28%
14,04%
23,68%
Les Polysianes
19,30%
7,02%
14,04%
40,35%
29,82%
29,82%
Hollywood
14,91%
10,53%
12,28%
37,72%
35,09%
27,19%
Bien que restant élevés dans
l'ensemble, on notera que ces résultats
diminuent, plus la publicité se trouve
insérée vers la fin du magazine. Une
représentation graphique permet de
considérer cette observation de
manière encore plus instantanée.
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258
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Souvenir assisté d'avoir vu une publicité pour la marque (ensemble des répondants)
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
Breitling
Variance
Si le trend descendant est
manifeste - presque régulier ! - pour
Souvenir assisté du groupe des
garçons d'avoir vu une publicité
certains
presque
Les
Polysianes
l'ensemble des répondants, mais il en va
différemment lorsque l'on analyse le
souvenir assisté de chacun des sexes.
croient
sûrs
pour la marque
Hollywood
garçons
Non
d'accord
ne savent
pas
Lancôme
43,48%
26,09%
10,87%
80,43%
4,35%
15,22%
Breitling
60,87%
10,87%
21,74%
93,48%
-
6,52%
Variance
17,39%
19,57%
21,74%
58,70%
6,52%
34,78%
6,52%
13,04%
17,39%
36,96%
28,26%
34,78%
10,87%
17,39%
26,09%
54,35%
21,74%
23,91%
certaines
presque
croient
filles
Non
ne savent
Les Polysianes
Hollywood
Souvenir assisté du groupe des
filles d'avoir vu une publicité pour
sures
la marque
d'accord
pas
Lancôme
55,88%
13,24%
19,12%
88,24%
2,94%
8,82%
Breitling
33,82%
7,35%
11,76%
52,94%
13,24%
33,82%
Variance
27,94%
11,76%
25,00%
64,71%
19,12%
16,18%
Les Polysianes
27,94%
2,94%
11,76%
42,65%
30,88%
26,47%
Hollywood
17,65%
5,88%
2,94%
26,47%
44,12%
29,41%
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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259
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
BREITLING et HOLLYWOOD. On
notera à ce sujet qu'aucun garçon ne
répondit "non" à la question concernant
BREITLING. Si l'on superpose sur le
même graphique les résultats des deux
groupes, on perçoit immédiatement le
déséquilibre qui existe sur ces deux
dernières marques :
Alors que ce souvenir est
relativement le même pour le groupe
des filles que pour celui des garçons
pour
les
marques
LANCÔME,
VARIANCE et LES POLYSIANES avec un souvenir proportionnellement
légèrement meilleur pour le groupe des
filles que pour celui des garçons -, il est
foncièrement différent sur les marques
Souvenir assisté d'avoir vu une publicité pour la marque (garçons / filles)
100%
Garçons
90%
Filles
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
Breitling
Variance
Au regard du fait que le souvenir du
groupe
des
garçons
est
significativement meilleur que celui du
groupe des filles pour les publicités des
marques
BREITLING
et
HOLLYWOOD, on émettra dès à
présent l'hypothèse que peut-être le
personnage célèbre utilisé a-t-il eu plus
d'impact auprès de la population
masculine qu'auprès de la population
féminine. Nous reviendrons sur ce
point particulier dans les pages qui
suivent en proposant notamment pour
chacun des sexes, une analyse de
Les
Polysianes
Hollywood
l'indice de sympathie de ces
personnages célèbres et en pratiquant
une analyse croisée du souvenir
spontané de la marque et de celui de la
célébrité.
De manière intrinsèque pour
chacune des marques, ces résultats ne
comportent que peu d'intérêt, si ce
n'est de reconnaître au passage les très
bons scores de souvenir assisté des
marques VARIANCE, BREITLING et
LANCÔME. En revanche, associé aux
résultats de la question 1.B sur le
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
260
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
souvenir spontané, il permet de
constater l'évolution par rapport au
souvenir assisté pour les cinq marques
Souvenir d'avoir vu une
publicité pour la marque
qui
nous
intéressent
particulièrement :
plus
évolution du
nombre de
répondants en %
% des répondants
en spontané
% des répondants
en assisté
Lancôme
28,07%
85,09%
+ 203,12%
Breitling
17,54%
69,30%
+ 295,00%
Variance
8,77%
62,28%
+ 610,00%
Les Polysianes
2,63%
40,35%
+ 1.433,33%
Hollywood
3,51%
37,72%
+ 975,00%
Pourcentage moyen
3,51%
54,70%*
-
(*) au regard de la liste proposée à la question 2.B et pour les marques présentes dans le support. (de manière à pouvoir servir
de comparaison "équitable", toutes les autres marques prises en considération, utilisaient au minimum une page entière).
Bien
que
subissant
des
évolutions
extraordinaires
en
pourcentages, on notera que même en
assisté, le souvenir des répondants est
inférieur à la moyenne - au regard des
marques de la liste qui étaient
présentes dans le support - pour les
publicités
des
marques
LES
POLYSIANNES et HOLLYWOOD.
Toujours présentées dans le tableau
suivant leur ordre d'apparition dans le
support, on notera également que les
marques bénéficient d'une évolution
plus importante lorsqu'elles se situent
Souvenir d'avoir vu une
publicité pour la marque
dans les dernières pages du magazine.
Ces chiffres très élevés sont également
rendus possibles en grande partie en
raison du fait que le souvenir spontané
pour ces marques était très bas au
départ.
Si l'on observe le même tableau
pour chacun des deux sexes, on
constate que les évolutions ne sont pas
les mêmes. Seule la marque LANCÔME
bénéficie d'une évolution sensiblement
identique d'un sexe à l'autre avec 200%
pour les filles et 208,33% pour les
garçons.
évolution du
nombre de
filles en %
% des filles
en spontané
% des filles
en assisté
Lancôme
29,41%
88,24%
+ 200,00%
Breitling
8,82%
52,94%
+ 500,00%
Variance
7,35%
64,71%
+ 780,00%
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261
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Les Polysianes
1,47%
42,65%
+ 2.800,00%
Hollywood
1,47%
26,47%
+ 1.700,00%
% des garçons
en spontané
% des garçons
en assisté
évolution du
nombre de
garçons en %
Lancôme
26,09%
80,43%
+ 208,33%
Breitling
30,43%
93,48%
+ 207,14%
Variance
10,87%
58,70%
+ 440,00%
Les Polysianes
4,35%
36,96%
+ 750,00%
Hollywood
6,52%
54,35%
+ 733,33%
Souvenir d'avoir vu une
publicité pour la marque
que les pourcentages du groupe des
filles en souvenir spontané étaient dans
l'ensemble plus bas - hormis pour la
publicité LANCÔME - que ceux des
garçons. On perçoit encore plus
aisément cette énorme différence entre
le souvenir spontané et le souvenir
assisté,
par
le
biais
d'une
représentation graphique :
En revanche, on s'aperçoit que
concernant les marques BREITLING,
LES POLYSIANES et HOLLYWOOD,
les filles ont vu leur souvenir évoluer du
spontané à l'assisté, d'une manière
beaucoup plus forte que celui des
garçons. Ce qui une fois encore
s'explique en partie en raison du fait
Comparaison souvenir assisté / souvenir spontané du groupe des filles
page 2
page 28
page 38
90%
page 96
page 150
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
souvenir assisté
Breitling
Variance
souvenir spontané
Les Polysianes
Hollywood
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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262
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Comparaison souvenir assisté / souvenir spontané du groupe des garçons
page 2
page 28
page 38
100%
page 96
page 150
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
souvenir assisté
Breitling
Variance
souvenir spontané
Les Polysianes
Hollywood
En revanche, si l'on présente
conjointement les résultats obtenus en
souvenir assisté et en souvenir
spontané
pour
l'ensemble
des
répondants sans tenir compte des
sexes, il se produit une sorte de
"lissage" des résultats d'un sexe à
l'autre. Cela permet de percevoir
d'autant mieux un phénomène de
souvenir apparemment lié en partie à
l'emplacement de la publicité dans le
magazine.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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263
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Comparaison souvenir assisté / souvenir spontané de l'ensemble des répondants
page 2
page 28
page 38
90%
page 96
page 150
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
souvenir assisté
Breitling
Variance
souvenir spontané
Les Polysiannes
Hollywood
Plus, la publicité est située vers
la fin du magazine moins elle semble
générer un souvenir - spontané comme
assisté1 - de la part du répondant.
Considérant le fait qu'une petite moitié
de l'échantillon avait déclaré avoir
commencé à lire le magazine par la
première page, il paraissait intéressant
de vérifier si au delà de l'emplacement
de la publicité dans le support, la raison
de cette différence quant au souvenir
n'était pas lié à la manière dont le
répondant avait déclaré avoir lu le
magazine.
__________________
1 - Exception faite de la très légère augmentation du
résultat du souvenir spontané de la marque
HOLLYWOOD par rapport à la marque LES
POLYSIANES.
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264
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Début de lecture
du magazine
Par la
1ère page
Par la
fin
Au
hasard
A l'aide du
sommaire
Ensemble de l'échantillon
47,37%
7,89%
35,97%
8,77%
Pour vérifier cette éventuelle
liaison, nous avons pratiqué un test du
χ²1 sur les deux sous-échantillons
composés des lecteurs ayant commencé
par la première page d'un côté, et sur
les autres lecteurs de l'autre. Observons
dans un premier temps les résultats du
test du χ² pour la notoriété spontanée.
En ce qui concerne la marque
LANCÔME, les totaux lignes sont
légèrement différents en raison du fait
que nous avons regroupé les
répondants qui avaient déclaré avoir lu
le magazine à l'aide du sommaire avec
ceux qui déclaraient avoir commencé
par la première page. La publicité
LANCÔME se trouvant entre la
première page et le sommaire, cela
semblait nécessaire pour éviter la
formation d'un biais. On notera
d'ailleurs que cela ne modifie pas les
résultats en notoriété spontanée, mais
seulement en notoriété assistée.
__________________
1 - Table de distribution disponible page 705.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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265
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Notoriété spontanée
Lancôme
Identif.
Non-
Notoriété spontanée
Total
Breitling
Identif.
Identif.
21
41
62
Par la 1ère p.
Autres
11
41
52
Total
32
82
114
9
45
54
Autres
11
49
60
Total
20
94
114
χ² calculé
χ² théorique
: 2,265
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
: 0,05457
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
Notoriété spontanée
Variance
Total
Identif.
Par la 1ère p.
χ² calculé
χ² théorique
Non-
Identif.
Non-
Notoriété spontanée
Total
Polysianes
Identif.
Identif.
Non-
Total
Identif.
Par la 1ère p.
3
51
54
Par la 1ère p.
3
51
54
Autres
7
53
60
Autres
0
60
60
10
104
114
Total
3
111
114
Total
χ² calculé
χ² théorique
χ² calculé
χ² théorique
: 1,326
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
: 3,423
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
Notoriété spontanée
Hollywood
Identif.
Non-
Total
Identif.
Par la 1ère p.
2
52
54
Autres
2
58
60
Total
4
110
114
χ² calculé
χ² théorique
: 0,0115
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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266
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Dès lors, si à la lecture du
graphique proposé ci-dessus, le
souvenir spontané semble lié à
l'emplacement de la publicité dans le
support, en revanche, au regard des
résultats de ce test, ce souvenir n'est a
priori pas lié à la manière dont les
répondants ont commencé à lire le
magazine. On retiendra cependant la
valeur du χ² calculé, obtenue pour la
notoriété spontanée de la publicité
pour la marque LES POLYSIANES. Il
est proche ce celle du χ² théorique. Et
même si l'absence de dépendance
perdure, la publicité LES POLYSIANES
est celle - parmi les cinq annonces
considérées - pour laquelle la situation
est la moins "nette".
Observons
maintenant
les
résultats en matière de notoriété
assistée.
Notoriété assistée
Lancôme
Identif.
Non-
Notoriété assistée
Total
Breitling
Identif.
Identif.
Non-
Total
Identif.
Par la 1ère p.
54
8
62
Par la 1ère p.
42
12
54
Autres
43
9
52
Autres
37
23
60
Total
97
17
114
Total
79
35
114
χ² calculé
χ² théorique
χ² calculé
χ² théorique
: 0,432
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
Notoriété assistée
Variance
: 3,467
Identif.
Non-
Notoriété assistée
Total
Polysianes
Identif.
Identif.
Non-
Total
Identif.
Par la 1ère p.
34
20
54
Par la 1ère p.
23
31
54
Autres
37
23
60
Autres
46
14
60
Total
71
43
114
Total
69
45
114
χ² calculé
χ² théorique
: 0,0203
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
χ² calculé
χ² théorique
: 13,811
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Dépendance
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267
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Notoriété assistée
Hollywood
Identif.
Non-
Total
Identif.
Par la 1ère p.
22
32
54
Autres
21
39
60
Total
43
71
114
χ² calculé
χ² théorique
: 0,398
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
A la lecture des résultats, on
s'aperçoit que seul le souvenir de la
publicité pour les cosmétiques LES
POLYSIANES avec Jenna de ROSNAY
apparaît comme étant lié à la manière
dont les répondants ont abordé le
magazine. Le cas est également
intéressant au regard de l'observation
que nous faisions concernant cette
même publicité, mais au sujet cette fois
des résultats portant sur la notoriété
spontanée.
Comment
peut-on
essayer
d'expliquer ce phénomène ? Nous
proposons l'observation suivante :
Cette publicité est l'avantdernière, avant le cahier rédactionnel
"spécial mode d'Eté" inséré entre les
pages 100 et 149. Pour les lecteurs qui
ont commencé à lire le magazine par la
première page, elle arrive alors après
une longue liste d'informations
publicitaires - 59 annonceurs la
précèdent. Alors que pour les lecteurs
qui ont commencé par la fin du
support, elle n'est que le 16ème
annonceur principal, d'où un parasitage
moindre. Par ailleurs elle intervient toujours pour les lecteurs qui ont
commencé par la dernière page - en
deuxième position seulement, après le
cahier rédactionnel "spécial mode
d'Eté". D'où un parasitage encore plus
faible. Pour renforcer cette hypothèse
on indiquera que le seul répondant
ayant cité la publicité pour la marque
DISTRIFRANCE - TUO, n'avait pas
non plus commencé par la première
page. Or cette publicité est la première
à la sortie du cahier "Spécial mode
d'Eté" si l'on commence par la fin, ou la
dernière des 62 premières annonces
publicitaires si l'on commence par la
première
page1.
Toutefois
une
vérification statistique permet de
réfuter cette hypothèse. En effet, 100%
des répondants ayant eu le souvenir
__________________
1 - Il n'est pas possible de faire également le parallèle avec
les résultats de notoriété assistée pour la publicité de
cette marque, car elle ne figurait pas dans la liste des 20
marques proposées à la question 2.B.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
268
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
En ce qui concerne maintenant
l'identification précise des produits des
cinq marques qui nous intéressent, les
résultats de la question 3.A permettent
l'obtention du tableau de résultats
figurant ci-dessous. Les marques sont
toujours présentées dans l'ordre
d'apparition des publicités dans le
support.
spontané de la publicité LES
POLYSIANES
déclarèrent
avoir
commencé à lire le support par la
première page. Quant aux répondants
ayant eu le souvenir assisté de la
publicité, ils se répartissent de manière
parfaitement égale : 50% ayant déclaré
avoir commencé à lire le magazine par
la première page, 50% différemment.
Identification spontanée du produit par
Bon
Mauvais
Ne savaient
produit
produit
pas
Lancôme
53,51%
3,51%
42,98%
Breitling
62,28%
-
37,72%
Variance
47,37%
0,88%
51,75%
Les Polysianes
30,70%
-
69,30%
Hollywood
38,60%
-
61,40%
l'ensemble des répondants, si souvenir
de la publicité
On
constate
que
dans
l'ensemble, les répondants ayant eu le
souvenir d'avoir vu la publicité, se
trompent très peu sur l'identification
spontanée du produit. Les éléments
retenus de l'échantillon paraissent
donc avoir "joué le jeu", et s'être
rabattus sur la proposition "ne sait pas"
lorsqu'ils n'avaient plus souvenir du
produit. On expliquera en partie les
3,51% d'erreur de la publicité
LANCÔME par le fait qu'il s'agit d'un
annonceur
très
important,
communicant tout au long de l'année et
pour des produits cosmétiques ou des
parfums, toujours avec Isabella
ROSSELLINI. Or, sur ce dernier point,
le "mauvais produit" cité est à chaque
fois un parfum. On peut dès lors
s'interroger pour savoir si ce n'est pas
la participation d'Isabella ROSSELLINI
à la communication de la dernière
fragrance de LANCÔME - Trésor - qui
parasita en partie ce souvenir.
Toutefois, rien ne permet de le vérifier
ici.
Ces résultats permettent de
construire le graphique suivant :
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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269
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Identification du produit si souvenir de la publicité (ensemble des répondants)
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
Breitling
Variance
Les
Polysianes
Hollywood
mais cela ne suffit pas à expliquer un
aussi bon résultat.
C'est donc la publicité pour la
marque BREITLING avec Winston
CHURCHILL
et
Franklin
ROOSEVELT qui obtint le meilleur
pourcentage
d'identification
du
produit. Rappelons qu'utilisant une
double page noir et blanc, l'annonce
consacrait les 2/3 de sa page de droite à
la présentation visuelle du produit,
En superposant maintenant la
courbe du souvenir assisté avec celle de
l'identification du produit on découvre
pour chacune des marques les
déperditions qui se produisirent.
Comparaison du souvenir de la publicité et de l'identification du produit (ensemble)
90%
Identification du produit
80%
Souvenir assisté
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
Breitling
Variance
Les
Polysianes
Hollywood
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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270
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
On constate que seuls les répondants
qui avaient identifié la publicité pour la
marque HOLLYWOOD semblent être
en général parfaitement en mesure
d'identifier le produit. Ce résultat est à
notre avis très logique si l'on considère
que la communication de la marque de
chewing gum a de tout temps consisté
à associer le type de produit au nom de
la marque, qui serait sans cela
relativement
générique.
D'où
l'enchaînement
"naturel"
:
HOLLYWOOD CHEWING GUM.
Cette hypothèse sera confirmée par les
résultats concernant le groupe des filles
présentés ci-après.
Les quatre autres marques
perdent du terrain lorsqu'il s'agit
Identification du produit si
souvenir assisté de la
publicité
d'identifier le produit par rapport au
souvenir assisté d'avoir vu la publicité.
Le cas le plus significatif étant celui de
la publicité de la marque LANCÔME
qui avait bénéficié du souvenir assisté
de 85,09% des répondants, mais pour
laquelle, seuls 53,51% des répondants
étaient en mesure de nommer le
produit bénéficiant de la publicité.
A l'analyse comparative des
deux sexes à propos de l'identification
du produit, on note quelques
différences importantes, notamment en
ce qui concerne la publicité pour le
marque BRIETLING. Celle-ci est
considérablement mieux identifiée par
le groupe des garçons que par celui des
filles.
Filles
Garçons
Lancôme
52,94%
54,35%
Breitling
48,53%
82,61%
Variance
51,47%
41,30%
Les Polysianes
36,76%
21,74%
Hollywood
41,18%
34,78%
Pour les autres marques,
LANCÔME est identifiée dans les
mêmes conditions par le groupe des
filles que par le groupe des garçons proportionnellement au nombre de
répondants dans chacun des groupes -
alors que les marques VARIANCE, LES
POLYSIANES et HOLLYWOOD sont
mieux
identifiées
toujours
proportionnellement - par les filles que
par les garçons.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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271
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Identification du produit si souvenir assisté de la publicité (Garçons / filles)
90%
Garçons
80%
Filles
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
Breitling
Variance
Les
Polysianes
Hollywood
courbe de souvenir assisté de la marque
avec celui de l'identification du produit
pour chacune de ces marques, on
obtient les graphiques suivants :
Si maintenant, à l'exemple de la
manipulation
pratiquée
pour
l'ensemble
des
répondants,
on
superpose pour chacun des sexes, la
Comparaison souvenir de la marque / identification du produit (filles)
90%
Souvenir assisté
80%
Identification du produit
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
Breitling
Variance
Concernant le groupe des filles,
le résultat le plus intéressant est de
constater que les deux tracés se
Les
Polysianes
Hollywood
croisent pour la publicité de la marque
HOLLYWOOD. Cela exprime une
certaine contradiction. En effet cela
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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272
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
qui concerne la publicité pour la
marque LANCÔME, pour laquelle
seules 52,94% des répondantes furent
en mesure d'identifier correctement le
produit, alors que 88,24% d'entre elles
avaient déclaré avoir le souvenir assisté - d'avoir vu une publicité pour la
marque dans le magazine. Sur
l'ensemble des cinq marques et pour le
groupe des filles, les résultats de
l'identification du produit par rapport
au souvenir assisté d'avoir vu la
publicité, baissent de 16,04%, ce qui
signifie qu'en moyenne, 8,82% des
répondantes ayant eu le souvenir
d'avoir vu une publicité de la marque
ne furent pas en mesure d'identifier son
produit.
signifie que parmi le groupe des filles, il
s'est trouvé plus de répondantes pour
identifier le produit au regard du nom
de la marque, que pour se souvenir de
cette même marque de manière
assistée. Cela ne fait que confirmer
l'hypothèse que nous émettions au
sujet de l'association relativement
automatique
dans
l'esprit
des
consommateurs visés pas le produit,
entre "HOLLYWOOD" et "Chewing
Gum". Hypothèse également confortée
par le fait que la marque
HOLLYWOOD est par ailleurs leader
sur son secteur. Voir à ce sujet page
275, l'analyse des consommateurs /
utilisateurs préalables des produits de
chacune des marques étudiées, qui
apporte
une
confirmation
supplémentaire à cette hypothèse.
L'analyse comparative de ces
mêmes résultats pour le groupe des
garçons génère le graphique suivant :
On observera enfin, la perte de
terrain relativement importante en ce
Comparaison souvenir de la marque / identification du produit (garçons)
100%
Souvenir assisté
90%
Identification du produit
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
Breitling
Variance
Les deux tracés se suivent
presque régulièrement à un niveau
différent, ce qui signifie qu'il n'y pas de
Les
Polysianes
Hollywood
contradiction
entre
les
deux
informations telles que nous l'avions
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
273
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
constaté pour les résultats du groupe
des filles.
De même que pour le groupe des
filles, les résultats sur l'identification
du produit par rapport au souvenir
d'avoir vu une publicité pour la
marque, perdent du terrain, avec une
perte plus importante pour la marque
LANCÔME. En revanche, cette perte
de terrain semble a priori plus
importante pour le groupe des garçons
que pour celui des filles. Sur l'ensemble
des cinq marques étudiées, les résultats
de l'identification du produit par
rapport au souvenir assisté d'avoir vu la
publicité, baissent de 27,52%, ce qui
signifie qu'en moyenne, 17,87% des
répondants ayant eu le souvenir d'avoir
vu une publicité pour la marque ne
furent pas en mesure d'identifier son
On
suivants :
obtient
les
Lancôme
Bon
Faux/nsp
Garçons
25
Filles
Total
χ² calculé
χ² théorique
produit afférent. On ne peut cependant
pas comparer ce pourcentage avec celui
obtenu pour le groupe des filles dans de
bonnes conditions, en raison du
résultat "contradictoire" sur la publicité
de la marque HOLLYWOOD pour ce
dernier groupe.
Trois des publicités dont les
marques sont étudiées - LANCÔME,
VARIANCE et LES POLYSIANES s'adressent
a
priori
plus
particulièrement à un public féminin en
considérant la nature du produit ellemême. Il devenait alors intéressant de
pratiquer à nouveau un test du χ² pour
savoir s'il existait un lien entre le fait
d'identifier le produit des publicités de
ces marques et le sexe du répondant.
résultats
Total
Breitling
Bon
21
46
Garçons
38
8
46
36
32
68
Filles
33
35
68
61
53
114
Total
71
68
114
Total
χ² calculé
χ² théorique
: 0,022
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
Faux/nsp
Total
: 13,57
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Dépendance
Variance
Bon
Faux/nsp
Garçons
19
27
Filles
35
Total
54
Total
Polysianes
Bon
Faux/nsp
46
Garçons
10
36
46
33
68
Filles
25
43
68
60
114
Total
35
79
114
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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274
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
χ² calculé
χ² théorique
χ² calculé
χ² théorique
: 1,14
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
Hollywood
Bon
Faux/nsp
Garçons
16
30
46
Filles
28
40
68
Total
44
70
114
χ² calculé
χ² théorique
: 2,91
Total
: 0,47
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
montre, alors que seulement 48,53%
des filles l'avaient fait.
Ainsi, à l'étude des résultats du
test du χ² et contrairement à
l'hypothèse émise sur les produits à
connotation féminine, il apparaît que
seul le cas des montres BREITLING fait
preuve d'une dépendance entre les
deux variables : identification du
produit et sexe du répondant. On
rappellera que 82,61% des garçons
avaient identifié correctement la
Garçons
Filles
acheteurs
acheteuses
Concernant l'achat et/ou la
consommation/utilisation
préalable
d'un produit de la marque, observons
les résultats de la question de la série
n°4, au sujet des marques qui nous
intéressent. On obtient le tableau de
résultats suivants :
Total
Garçons
Filles
consommateurs
consommatrices
/ utilisateurs
/ utilisatrices
Total
Lancôme
21,74%
57,35%
42,98%
47,83%
38,24%
42,11%
Breitling
2,17%
1,47%
1,75%
6,52%
-
2,53%
Variance
10,87%
36,76%
26,32%
-
39,71%
23,68%
Polysianes
6,52%
4,41%
5,26%
4,35%
7,35%
6,14%
Hollywood
93,48%
91,18%
92,11%
93,48%
100,00%
97,37%
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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275
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Si l'on traduit ces résultats
graphiquement,
on
obtient
la
représentation suivante :
Analyse de l'achat préalable de produits des marques concernées
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
acheteurs
30%
acheteuses
20%
10%
0%
acheteuses
Lancôme
Breitling
Variance
acheteurs
Les
Polysianes
On notera avec un intérêt
particulier les résultats de la marque de
lingerie féminine VARIANCE. Certes,
très logiquement on s'aperçoit sur le
graphique proposé ci-après, qu'aucun
garçon n'utilise de produits de cette
marque. En revanche, 10,87% des
garçons ont déclaré avoir déjà acheté
des produits de la marque. Dès lors, les
bons résultats de la marque
VARIANCE aidé notamment par le
souvenir du groupe des garçons - alors
que cinq marques concurrentes étaient
présentes dans le support - trouvent ici
une part d'explication. En revanche, à
propos de l'explication sur le fond de
ces résultats, nous n'avons pas
d'hypothèse particulière à émettre.
Quant aux filles, près de 4 sur 10
déclarèrent avoir déjà porté / utilisé des
Hollywood
produits de la marque VARIANCE. On
peut donc penser que leur attention
était plus facilement captée par une
publicité en faveur de ladite marque.
L'analyse inverse est possible en
ce qui concerne la marque de chewing
gums HOLLYWOOD. Les résultats
sont à l'image de ceux que l'on pouvait
espérer d'une marque leader sur son
marché, avec des taux d'achat et
d'utilisation dépassant 90% à chaque
fois. Cela conforte en partie l'hypothèse
selon laquelle le fait que la publicité
était insérée dans les dernières pages
du magazine, et qu'il ne s'agissait pas
d'une publicité traditionnelle, a pu lui
valoir de mauvais résultats lors des
précédentes questions.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
276
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Analyse de la consommation / utilisation de produits des différentes marques concernées
100%
90%
80%
70%
60%
50%
utilisateurs
40%
30%
utilisatrices
20%
10%
0%
utilisatrices
Lancôme
Breitling
Variance
utilisateurs
Les
Polysianes
Les résultats de la marque
BREITLING sont eux aussi très
intéressants, car l'on aurait pu penser
que les très bons résultats en souvenir
spontané, ainsi qu'en identification du
produit auraient pu provenir d'un
"biais" dû à une connaissance directe et
préalable du produit. Il n'en est rien a
priori. Seuls 6,52%1 des garçons
"utilisent" directement cette marque de
montres. Quant aux 1,47% des filles qui
déclarèrent avoir déjà acheté une
montre de cette marque, on peut
raisonnablement émettre l'hypothèse
qu'il s'agissait d'un cadeau, dès lors
qu'il n'y a aucune utilisatrice déclarée
__________________
1 - Seuls 2,17% des garçons déclarèrent être à la fois
acheteur et utilisateurs préalables d'une montre de
marque BREITLING, les 4,35% restant n'étant
qu'utilisateurs préalables.
Hollywood
et que les résultats sur l'identification
du produit ne présentent aucune erreur
sur cette marque.
Enfin, concernant la marque
LANCÔME, on notera que les garçons
sont proportionnellement légèrement
plus nombreux à déclarer avoir déjà
utilisé le produit. Rappelons ici qu'il ne
s'agissait
pas
de
cosmétiques
ordinaires, mais d'une protection
solaire, ce qui peut contribuer à
expliquer cette différence.
Si l'on essaie maintenant de
croiser l'information obtenue à propos
du souvenir assisté sur la marque par
rapport
à
l'utilisation
ou
la
consommation préalable du produit, on
obtient les résultats présentés ci-après.
On appellera "contact" le fait que le
répondant ait déjà consommé ou acheté
un produit de la marque considérée.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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277
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
rapport au souvenir assisté des
éléments
du
groupe
considéré
préalablement acheteurs ou utilisateurs
d'un produit de la marque.
Nous reproduirons à chaque fois, le
tracé du souvenir assisté de la marque
pour l'ensemble du groupe considéré,
de manière à percevoir sa valeur par
Ensemble des
répondants
Achat ou consommation
préalable du produit
souvenir assisté de la
marque
souvenir assisté si
contact préalable
Lancôme
49,12%
85,09%
47,36%
Breitling
3,51%
69,30%
2,63%
Variance
28,07%
62,28%
18,42%
Les Polysianes
8,77%
40,35%
4,39%
Hollywood
99,12%
37,72%
36,84%
Comparaison du souvenir assisté de la marque et de l'achat ou la consommation préalable
du produit (ensemble des répondants)
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
consommation ou achat
préalable
Breitling
Variance
Les
Polysianes
souvenir assisté de la
marque
Le tracé des points représentant
le souvenir assisté de la marque au cas
où un contact préalable avait été
déclaré par le répondant (ronds gris),
se trouve systématiquement en dessous
de celle de la consommation ou de
l'achat préalable. Ce qui signifie que
tous les consommateurs ou acheteurs
préalables n'ont pas eu le souvenir
d'avoir vu une publicité pour le produit
Hollywood
souvenir assisté si contact
préalable
considéré. Le cas le plus manifeste
étant celui pour la publicité de la
marque HOLLYWOOD. D'un autre
côte on remarquera que tous ceux qui
ont eu le souvenir d'avoir vu la
publicité
pour
la
marque
HOLLYWOOD étaient consommateurs
ou acheteurs préalables de chewing
gums de la marque (superposition des
points sur le graphique).
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
278
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
La même analyse pour chacun des deux sexes procure les résultats suivants :
Groupe des
filles
Achat ou consommation
préalable du produit
souvenir assisté de la
marque
souvenir assisté si
contact préalable
Lancôme
64,71%
88,24%
61,76%
Breitling
1,47%
52,94%
-
Variance
39,71%
64,71%
26,47%
7,35%
42,65%
4,41%
100,00%
26,47%
26,47%
Les Polysianes
Hollywood
Comparaison du souvenir assisté de la marque et de l'achat ou la consommation préalable
du produit (groupe des filles)
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
consommation ou achat
préalable
Breitling
Variance
Les
Polysianes
souvenir assisté de la
marque
Concernant
le
graphique
représentatif des réponses du groupe
des filles, on notera que l'écart se creuse
légèrement
pour
la
marque
VARIANCE, entre la consommation ou
l'achat préalable du produit et le
souvenir d'avoir vu une publicité par
Hollywood
souvenir assisté si contact
préalable
des utilisatrices ou acheteuses
préalables. Il en va de même pour la
publicité HOLLYWOOD, mais cela est
en partie dû dès le départ à un souvenir
assisté de la marque plus mauvais chez
les filles que chez les garçons.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
279
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Groupe des
garçons
Achat ou consommation
préalable du produit
souvenir assisté de la
marque
souvenir assisté si
contact préalable
Lancôme
26,09%
80,43%
26,09%
Breitling
6,52%
93,48%
6,52%
Variance
10,87%
58,70%
6,52%
Les Polysianes
10,87%
36,96%
4,35%
Hollywood
97,83%
54,35%
52,17%
Comparaison du souvenir assisté de la marque et de l'achat ou la consommation préalable
du produit (groupe des garçons)
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
consommation ou achat
préalable
Breitling
Variance
Les
Polysianes
souvenir assisté de la
marque
Cas intéressant en ce qui
concerne l'étude du graphique
illustrant les réponses du groupe des
garçons, on remarque une parfaite
superposition des points représentant
la consommation ou l'achat préalable
d'une part et le souvenir assisté des
acheteurs ou utilisateurs d'autre part,
pour les marques LANCÔME et
BREITLING. Cela signifie que tous les
utilisateurs
/
consommateurs
Hollywood
souvenir assisté si contact
préalable
préalables de produits de chacune de
ces marques, eurent le souvenir d'avoir
vu une publicité pour la marque
respective.
Il paraissait intéressant de
pratiquer la même analyse comparative
avec cette fois, les résultats sur le
souvenir spontané des répondants pour
chacune de ces marques :
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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280
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Ensemble
des répondants
Achat ou consommation
préalable du produit
souvenir spontané
de la marque
souvenir spontané si
contact préalable
Lancôme
49,12%
28,07%
16,67%
Breitling
3,51%
17,54%
1,75%
Variance
28,07%
8,77%
1,75%
8,77%
2,63%
-
99,12%
3,51%
3,51%
Les Polysianes
Hollywood
Comparaison du souvenir spontané de la marque et de l'achat ou la consommation
préalable du produit (ensemble des répondants)
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
consommation ou achat
préalable
Breitling
Variance
Les
Polysianes
souvenir spontané de la
marque
Toujours en faisant abstraction
des résultats obtenus sur la marque
HOLLYWOOD pour les raisons
évoquées précédemment quant au
produit lui-même et à la position de
leadership de la marque, on remarquera
immédiatement sur le graphique que
les deux tracés - consommation / achat
préalable et souvenir spontané si
contact préalable - semblent moins liés
pour
les
marques
LANCÔME,
VARIANCE et dans une moindre
mesure LES POLYSIANES. Mais
surtout, on s'aperçoit qu'à l'exception
de la publicité pour la marque
Hollywood
souvenir spontané si contact
préalable
BREITLING, le tracé du souvenir
spontané général de la marque passe en
dessous de celui des acheteurs /
consommateurs de la marque, ce qui
n'était pas le cas à propos du souvenir
assisté.
Le fait qu'aucun acheteurs /
consommateurs préalables de la
marque
de
cosmétiques
LES
POLYSIANES n'ait eu le souvenir
spontané d'avoir vu une publicité pour
cette marque doit être relativisé au
regard du fait que le taux de souvenir
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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281
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
d'impact, au regard du très faible
pourcentage d'acheteurs / utilisateurs
préalables de la marque. Elle a su
séduire
l'échantillon
de
jeunes
étudiants utilisé en attirant leur
attention.
spontané général était déjà très bas à
l'origine (2,63%).
C'est ici manifestement la
publicité pour la marque BREITLING
qui obtient le meilleur résultat
Observons maintenant les résultats pour chacun des deux sexes :
Groupe
des filles
Achat ou consommation
préalable du produit
souvenir spontané
de la marque
souvenir spontané si
contact préalable
Lancôme
64,71%
29,41%
19,12%
Breitling
1,47%
8,82%
-
Variance
39,71%
7,35%
-
7,35%
1,47%
-
100,00%
1,47%
1,47%
Les Polysianes
Hollywood
Comparaison du souvenir spontané de la marque et de l'achat ou la consommation
préalable du produit (groupe des filles)
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
consommation ou achat
préalable
Breitling
Variance
Les
Polysianes
souvenir spontané de la
marque
A l'observation du graphique qui
précède, deux enseignements semblent
importants. Le premier concerne le
tracé des points représentant le
souvenir spontané des utilisatrices /
Hollywood
souvenir spontané si contact
préalable
consommatrices préalables du produit,
pour les marques BREITLING,
VARIANCE et LES POLYSIANES - la
marque HOLLYWOOD étant une
nouvelle fois écartée au regard du trop
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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282
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
faible
nombre
de
répondants
considérés. Il se situe très précisément
sur l'axe des abscisses, ce qui signifie
qu'aucune des consommatrices /
utilisatrices préalables de ces marques
n'eut le souvenir spontané d'avoir vu
une publicité pour ces marques. Si le
phénomène
est
en
partie
compréhensible pour la marque
BREITLING pour laquelle seulement
1,47% des filles interrogées avaient
déclaré avoir déjà acheté une montre de
cette marque, et dans une moindre
mesure pour la marque LES
POLYSIANES pour laquelle seulement
7,35% des filles interrogées avaient
déclaré avoir déjà acheté ou utilisé les
cosmétiques, ces résultats sont très
étranges en ce qui concerne la marque
Groupe
des garçons
VARIANCE. En effet, près de 4 filles
sur 10 déclarèrent avoir déjà acheté ou
utilisé un produit de la marque et pas
une seule ne se souvint spontanément
d'avoir vu la publicité avec Gérard
LANVIN dans les pages du support !
D'une certaine manière, la même
observation pourrait être faite à l'égard
de la publicité pour la marque
LANCÔME, pour laquelle seulement
29,55% des utilisatrices ou acheteuses
préalables se souvinrent spontanément
d'avoir vu une publicité pour la
marque.
Le groupe des garçons génère
une nouvelle fois l'obtention de
résultats très différents :
Achat ou consommation
préalable du produit
souvenir spontané
de la marque
souvenir spontané si
contact préalable
Lancôme
26,09%
26,09%
13,04%
Breitling
6,52%
30,43%
4,35%
Variance
10,87%
10,87%
4,35%
Les Polysianes
10,87%
4,35%
-
Hollywood
97,83%
6,52%
6,52%
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283
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Comparaison du souvenir spontané de la marque et de l'achat ou la consommation
préalable du produit (groupe des garçons)
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Lancôme
consommation ou achat
préalable
Breitling
Variance
Les
Polysianes
souvenir spontané de la
marque
Concernant
le
graphique
illustrant les réponses du groupe des
garçons,
on
remarquera
immédiatement la superposition des
tracés des points représentant la
consommation ou l'achat préalable du
bien d'une part et le souvenir spontané
général d'autre part, pour les publicités
des
marques
LANCÔME
et
VARIANCE. Mais cela signifie
simplement que les consommateurs /
acheteurs préalables de cosmétiques
LANCÔMES et de lingerie VARIANCE
sont respectivement aussi nombreux
que ceux qui eurent respectivement le
souvenir d'avoir vu une publicité pour
chacune de ces marques. Car le rond
gris du souvenir spontané des
acheteurs / utilisateurs préalables est
situé en dessous. Ce qui signifie qu'une
Hollywood
souvenir spontané si contact
préalable
fois de plus les utilisateurs / acheteurs
préalables de ces marques n'eurent pas
tous les souvenir d'avoir vu une
publicité pour ladite marque. En
revanche, concernant la publicité de la
marque HOLLYWOOD, tous les
garçons qui eurent le souvenir d'avoir
vu une publicité pour la marque,
étaient consommateurs / acheteurs
préalables
de
chewing-gums
HOLLYWOOD.
Si l'on pratique maintenant le
test du χ² sur ces données, on obtient
les résultats présentés ci-dessous. Nous
entendrons toujours par "contact
direct" le fait que le répondant ait
déclaré avoir préalablement acheté ou
utilisé le produit de la marque.
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284
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
souvenir spontané
Lancôme
Identif.
Non-
souvenir assisté
Total
Lancôme
Identif.
Identif.
Non-
Total
Identif.
contact direct
19
37
56
contact direct
54
2
56
pas de contact
13
45
58
pas de contact
43
15
58
Total
32
82
114
Total
97
17
114
χ² calculé
χ² théorique
χ² calculé
χ² théorique
: 1,870
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Dépendance
souvenir spontané
Breitling
: 11,156
Identif.
Non-
souvenir assisté
Total
Breitling
Identif.
Identif.
Non-
Total
Identif.
contact direct
2
2
4
contact direct
3
1
4
pas de contact
18
92
110
pas de contact
76
34
110
Total
20
94
114
Total
79
35
114
χ² calculé
χ² théorique
: 3,018
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
χ² calculé
χ² théorique
: 0,063
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
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285
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
souvenir spontané
Variance
Identif.
Non-
souvenir assisté
Total
Variance
Identif.
Identif.
Non-
Total
Identif.
contact direct
2
29
31
contact direct
21
10
31
pas de contact
8
75
83
pas de contact
50
33
83
10
104
114
Total
71
43
114
Total
χ² calculé
χ² théorique
χ² calculé
χ² théorique
: 0,286
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
souvenir spontané
Polysianes
: 0,054
Identif.
Non-
souvenir assisté
Total
Polysianes
Identif.
Identif.
Non-
Total
Identif.
contact direct
0
9
9
contact direct
5
4
9
pas de contact
3
102
105
pas de contact
41
64
105
Total
3
111
114
Total
46
68
114
χ² calculé
χ² théorique
: 0,264
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
χ² calculé
χ² théorique
: 0,938
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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286
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
souvenir spontané
Hollywood
Identif.
Non-
souvenir assisté
Total
Hollywood
Identif.
Identif.
Non-
Total
Identif.
contact direct
4
109
113
contact direct
42
71
113
pas de contact
0
1
1
pas de contact
1
0
1
Total
4
110
114
43
71
114
χ² calculé
χ² théorique
: 0,036
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
Total
χ² calculé
χ² théorique
: 1,665
: 3,84
Degré de liberté : 1
Risque d'erreur : 5%
Pas de dépendance
Ainsi, seul le souvenir assisté de
la marque LANCÔME semble être lié à
un achat ou une utilisation préalable,
96,42% des répondants qui déclarèrent
avoir eu un contact préalable avec le
produit furent en mesure de se souvenir
- en assisté - avoir vu une publicité
LANCÔME dans les pages du support.
Toutes les autres marques voient leur
souvenir spontané comme assisté,
détaché de tout lien avec un contact
direct préalable avec le produit, au
regard de ce test.
Concernant
l'analyse
des
résultats des questions 5.B à 5.D - sur
l'attitude du lecteurs au regard de
certaines
caractéristiques
des
publicités -, il est nécessaire de rappeler
qu'il s'agit d'une expérimentation sur la
manière dont les personnes interrogées
décrivent elles-mêmes leur attitude et
non sur l'observation de leur attitude.
Celle-ci fera l'objet d'une prochaine
enquête, dont l'orientation sera en
partie définie par les enseignements de
la présente. S'agissant de résultats
généraux, nous n'attacherons pas de
réelle importance ici au le degré
d'accord ou de désaccord du répondant
exprimé par les échelles.
Au sujet de l'utilisation d'une
photographie par la publicité, on
obtient le tableau de résultats et la
représentation graphique corollaire
suivants :
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287
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Répondants pensant être plus
attirés par une publicité utilisant
une photographie
D'accord
Garçons
Filles
Ensemble
78,26%
89,71%
85,09%
2,17%
1,47%
1,75%
17,39%
8,82%
12,28%
2,17%
-
0,88%
Pas d'accord
Indifférents
Ne savent pas
Garçons plus attirés par une publicité
utilisant une photographie
Filles plus attirées par une publicité
utilisant une photographie
2%
18%
1%
90%
D'accord
9%
2%
78%
Pas d'accord
Indifférents
Ne savent pas
Une très nette majorité de
répondants se déclarèrent être plus
attirés par une publicité qui comporte
une photographie ; majorité supérieure
et plus déterminée en ce qui concerne
le groupe des filles. On rappellera que
les cinq publicités utilisant une
célébrité et qui nous intéressent plus
particulièrement ici, comportaient
toutes une photographie.
A l'origine, lors de la
construction du questionnaire, les
questions 5.C et 5.D. étaient
essentiellement là pour servir de
D'accord
Pas d'accord
Indifférentes
Ne savent pas
questions filtres sur l'attention du
répondant
portée
à
l'autoadministration du questionnaire. Ce
qui explique la parfaite compatibilité
des résultats obtenus d'un côté pour la
photographie en couleur, pour la
photographie en noir et blanc de
l'autre, dès lors que les questionnaires
"à risque" ont été ôtés. A ce sujet,
l'ensemble des répondants se dit être
plus attiré par une publicité en couleur
que par une publicité en noir et blanc,
comme l'expriment les résultats et les
représentations graphiques proposées
ci-dessous.
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288
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Garçons attirés par
Filles attirées par
Ensemble attiré par
Couleur
N et B
Couleur
N et B
Couleur
N et B
D'accord
60,87%
32,61%
58,82%
36,76%
59,65%
35,09%
Pas d'accord
10,87%
26,09%
20,59%
26,47%
16,67%
26,32%
Indifférents
28,26%
36,96%
20,59%
32,35%
23,68%
34,21%
-
4,35%
-
4,41%
-
4,39%
Ne savent pas
Garçons plus attirés par une publicité
utilisant une photographie couleur
Garçons plus attirés par une publicité
utilisant une photographie noir et blanc
4%
28%
33%
37%
61%
11%
26%
D'accord
Pas d'accord
Indifférents
Ne savent pas
Filles plus attirées par une publicité
utilisant une photographie couleur
D'accord
Pas d'accord
Indifférents
Ne savent pas
Filles plus attirées par une publicité
utilisant une photographie noir et blanc
5%
24%
35%
34%
60%
16%
26%
D'accord
Pas d'accord
Indifférentes
Ne savent pas
On remarquera cependant que
les garçons sont plus nombreux à être
indifférents que les filles, que ce soit
pour la couleur ou pour le noir et blanc.
Toutefois on peut s'interroger de savoir
D'accord
Pas d'accord
Indifférentes
Ne savent pas
si les réponses à l'attirance du noir et
blanc ne sont pas en partie biaisées par
le conditionnement dû à la réponse
apportée à la question précédente. Au
vu des résultats, nous pensons qu'il
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289
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
pourra être intéressant de renouveler ce
type de questions dans une prochaine
enquête,
en
fractionnement
l'échantillon en deux sous-groupes, de
manière à alterner la présentation des
deux questions, à l'instar de ce qui fut
pratiqué pour les questions 5.G et 5.I
suscitant un classement.
Ces observations concluent les
résultats généraux obtenus à l'aide de
cette enquête. Nous allons dès lors
pouvoir
analyser
les
résultats
spécifiques à l'objet de cette thèse.
des résultats. Mais cette approche
permet
également
une
analyse
comparative graphique plus rapide des
résultats obtenus pour chacun des
deux sexes, et d'un argument à l'autre,
au regard de la question considérée1.
Les premiers résultats traités
sous cet angle sont ceux obtenus à la
question 5.E sur l'attention portée à
une publicité si la présence d'un
personnage célèbre était détectée par le
répondant. On obtient les résultats
suivants :
b / Résultats spécifiques
A propos maintenant de
l'utilisation de célébrités par la
publicité, les questions 5.E et 5.F furent
utilisées pour connaître le sentiment
des répondants sur l'attention qu'ils
pensaient porter à des publicités
utilisant des célébrités. De même que
pour les questions 5.B à 5.D, il ne s'agit
pas de déduire ici une attitude, mais la
perception par le répondant lui-même
d'une motivation ou d'un frein dont il
aurait conscience.
Bien que nécessaires pour
obtenir une information plus précise,
les pourcentages n'expriment pas
immédiatement l'attitude générale
constatée. Plutôt que les histogrammes
à multiples épaisseurs, nous proposons
donc ici une construction sous forme
de radars, tous de mêmes dimensions,
tous orientés de la même manière et
reprenant les cinq niveaux de réponse
proposés par les échelles de LIKERT
utilisées ici. Ils comportent l'avantage
d'autoriser une appréciation plus facile
__________________
1 - La construction manuelle des surfaces de réponses
explique le léger décalage sur certains radars (graphes
multi-polaires), mais n'altère pas l'interprétation visuelle
générale. Nous utiliserons cette représentation graphique
à chaque fois pour exprimer les sentiments des
répondants à l'égard des publicités recourant à des
célébrités. Puis, pour bien distinguer les deux, nous
reviendrons à l'utilisation des secteurs lorsqu'il s'agira de
présenter le sentiment des répondants à l'égard des
célébrités elles-mêmes.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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290
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Répondants déclarant regarder systématiquement une publicité utilisant une célébrité
Répondants
Tout à fait
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Plutôt pas
d'accord
Pas du tout
d'accord
Filles
27,94%
47,06%
11,76%
5,88%
7,35%
Garçons
17,39%
63,04%
10,87%
8,70%
-
Ensemble
23,68%
53,51%
11,40%
7,02%
4,39%
Regardent systématiquement
la publicité si elle utilise une célébrité
(groupe des filles)
Regardent systématiquement
la publicité si elle utilise une célébrité
(groupe des garçons)
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
On s'aperçoit immédiatement
que les garçons comme les filles sont en
majorité d'accord pour dire qu'ils
portent
systématiquement
leur
attention sur une publicité, dès lors que
celle-ci utilise le concours d'une
célébrité. On notera cependant que le
sentiment des filles semble plus
tranché que celui des garçons, car la
surface de réponses s'étire plus vers le
haut que sur le radar des filles alors que
sur celui des garçons, il semble fuir vers
la droite. Nous constaterons d'ailleurs
plus tard que les filles furent
proportionnellement plus nombreuses
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
que les garçons à avoir le souvenir
spontané d'avoir vu une célébrité dans
les pages publicitaires du support.
Pour affiner quelque peu
l'attitude du lecteur face à une
publicité utilisant une célébrité, la
question 5.F venait compléter les
résultats de la question précédente. Il
était alors demandé au répondant si
l'attention qu'il portait à cette publicité
allait jusqu'à la prise de connaissance
du nom du produit. On parvient au
tableau de résultats suivant :
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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291
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Répondants déclarant regarder systématiquement le nom du produit
d'une publicité utilisant une célébrité
Répondants
Tout à fait
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Plutôt pas
d'accord
Pas du tout
d'accord
Filles
26,47%
44,12%
13,24%
11,76%
4,41%
Garçons
17,39%
52,17%
19,57%
8,70%
2,17%
Ensemble
22,81%
47,37%
15,79%
10,53%
3,51%
Regardent systématiquement
le nom du produit d'une publicité
si elle utilise une célébrité
(groupe des filles)
Regardent systématiquement
le nom du produit d'une publicité
si elle utilise une célébrité
(groupe des garçons)
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
A l'étude simultanée des deux
tableaux, on constate que l'ensemble
des répondants se déclare attentif de
manière sensible, à une publicité, ainsi
qu'au produit qu'elle concerne, lorsque
celle-ci utilise un personnage célèbre.
Même si une fois encore le sentiment
des filles est plus net que celui des
garçons au sujet du produit plus
particulièrement,
on
observera
toutefois un léger tassement des
résultats
dans
l'ensemble.
Le
pourcentage des répondants se
déclarant attentifs diminue, aussi bien
chez les garçons que chez les filles. Et la
part des indifférents est alors
légèrement plus importante chez les
garçons que chez les filles.
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
D'ailleurs, le comportement des
garçons est en moyenne plus homogène
que celui des filles sur ce sujet. En effet,
si l'on observe le score moyen ainsi que
la variance de ces scores, pour ces deux
questions et chacun des deux groupes
(avec pour échelle la notation suivante1
: "tout à fait d'accord" : 2, "d'accord" : 1,
"Indifférent" : 0, "plutôt pas d'accord" : 1 et "pas d'accord du tout" : -2), on
obtient les résultats suivants :
__________________
1 - Cette notation sera systématiquement retenue par la
suite, lorsque la question concernée utilise une échelle de
LIKERT, de manière à permettre des comparaisons quant
à la dispersion des réponses des répondants.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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292
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Regardent la publicité
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
0,82
0,89
0,85
Variance
1,28
0,63
1,01
Ecart-type
1,13
0,80
1,01
Ce qui nous donne alors la
confirmation que dans l'ensemble, les
filles comme les garçons sont d'accord
pour
dire
qu'ils
regardent
systématiquement
une
publicité
lorsque la présence d'un personnage
célèbre est repéré. On notera que les
scores moyens sont d'ailleurs peu
différents d'un sexe à l'autre (filles :
0,82 ; garçons : 0,89). En revanche,
l'analyse de la variance donne des
résultats sensiblement différents d'un
sexe à l'autre, mettant en lumière un
comportement
beaucoup
plus
homogène de la population masculine
(variance : 0,62) comparativement à la
population féminine (variance : 1,26)
Effectuant la même analyse sur
les résultats de la question suivante
(5.F), traitant cette fois de l'attention
portée au nom du produit plus
particulièrement, on obtient le tableau
de résultats suivant :
Regardent le nom du
produit
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
0,76
0,74
0,75
Variance
1,23
0,86
1,07
Ecart-type
1,11
0,93
1,04
On observera qu'une fois encore
le score moyen calculé exprimant
l'accord pour chacun des deux sexes
diffère peu, mais qu'en revanche,
l'analyse de la variance montre une
nouvelle fois des réponses beaucoup
plus hétérogènes de la part de la
population féminine, que de la part de
la population masculine. On rappellera
par ailleurs, que les deux questions
portant sur des thèmes connexes, se
suivaient dans l'ordre de présentation,
ce qui peut en partie expliquer des
résultats peu différents d'une question
à l'autre. Toutefois, on obtient
cependant d'une part confirmation que
lors de la présence d'un personnage
célèbre,
l'attention
portée
systématiquement au nom du produit
plus particulièrement est légèrement
moindre,
que
celle
portée
systématiquement à la publicité en
général, et ce, pour chacun des deux
sexes (filles : 0,82 / 0,76 ; garçons : 0,89 /
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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293
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
0,74). D'autre part, on remarque un
léger "tassement" de la variance chez les
filles de la question 5.E à la question 5.F
(1,28 / 1,23), alors qu'elle augmente chez
les garçons (0,63 / 0,86), bien que
toujours moins importante que celle
calculée pour le groupe des filles. D'où
une réaction moins homogène chez les
garçons, quant à l'attention portée au
nom du produit par rapport à celle
concernant l'attention portée en
général à la publicité.
Poursuivant l'étude avec les
résultats de la question 5.G, nous
pouvons alors déterminer le type de
personnages
célèbres
le
plus
convaincant à leurs yeux, lorsqu'il
s'agit de l'utiliser pour une publicité.
Avant d'analyser le classement obtenu,
il est nécessaire de préciser que lorsque
la question fut rédigée, nous avions
décidé de nous conformer à l'usage, en
offrant une alternative par le biais
d'une 11ème possibilité - autre choix - au
cas où le type de personnages célèbres
le plus crédible en publicité aux yeux
du répondant, ne figurerait pas dans les
dix proposés. Ce, alors que nous
pensions couvrir la totalité des
principaux types de personnages
célèbres envisageables. A l'origine, ce
11ème choix n'avait donc pas d'autre
objectif que d'éviter un éventuel biais
dû à la contrariété potentielle du
répondant pour lequel on aurait omis
un type de personnages célèbres qui lui
était cher.
Or, le dépouillement nous révéla
avec surprise une utilisation de cette
alternative, largement supérieure à celle
escomptée. Surprise d'autant plus
grande qu'à la suite du pré-test nous
avions limité aux trois principaux, le
nombre des types de personnages à
classer. En définitive, 18,42% des
questionnaires retenus incluaient ce
personnage célèbre du "11ème type",
dans leur classement. Ce pourcentage
nous semble très élevé dès lors qu'il
illustre une démarche active de la part
du répondant. Dès lors qu'il s'agit d'une
utilisation spontanée en marge de 10
propositions déjà faîtes, on peut
légitimement penser que ce 11ème
personnage
célèbre
aurait
probablement
retenu
l'attention
d'autres répondants s'il avait été
proposé dès le départ. Ces résultats
devront donc être considérés dans cette
optique et il sera impératif de l'intégrer
dans les prochaines enquêtes sur ce
thème.
Impératif en effet, car les 18,42%
de questionnaires qui utilisèrent ce
11ème type, le firent de surcroît tous
sans exception pour le même type : le
top-model, parfois cité comme
"mannequin célèbre". Dans les pages qui
précèdentnous avons indiqué la
prépondérance
grandissante
notamment depuis la fin des années 801
, de ces nouvelles stars, en publicité.
Mais c'était sans imaginer l'impact que
semble déjà avoir ces visages et ces
corps de rêve. Rappelons cependant
que cette enquête ne portait pas sur un
échantillon
représentatif
de
la
population nationale, mais à dessein
sur un groupe d'étudiants d'âges et
formations semblables. Toutefois, il
n'en demeure pas moins que c'est là un
enseignement
de
cette
expérimentation, des plus intéressants.
__________________
1 - Voir notamment la note de bas de page qui y est
consacrée page 42.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
294
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Les classements obtenus pour
l'ensemble des répondants, nous
fournissent
suivant :
le
classement
général
CLASSEMENT GENERAL
Rang
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
Type de personnage
Nb de points
Acteur
215
Sportif
150
Journaliste
56
Personnage de fiction
55
Personnage Historique
52
Top-model
46
Musicien
40
Chanteur
38
Grand-cuisinier
19
Homme politique
7
Animateur
6
C'est donc sans grande surprise
que nous constatons que l'acteur se
détache très sensiblement des autres
types de célébrités, et qu'il est suivi par
le sportif1. Même s'il n'est pas possible
d'extrapoler ces résultats, nous
pensons que certains répondants ont
pu être influencés par l'habitude, c'est à
dire par les principaux types de porteparole célèbres qu'ils rencontrent en
publicité.
En revanche, nous fûmes surpris
de trouver respectivement en 4ème et
__________________
1 - Sans surprise, car l'acteur est comme nous l'avons vu
page 45, le type de porte-parole célèbre qui fut le plus
utilisé à ce jour, suivi par le sportif dont l'utilisation
augmente proportionnellement depuis quelques années.
5ème position, les types : "personnage
historique" et "personnage de fiction"
devançant notamment les types plus
"classiques" que sont le musicien, le
chanteur et l'animateur, beaucoup plus
utilisés par la publicité. On pourra dès
lors s'interroger à l'avenir sur l'intérêt
de recourir à ces trois types de porteparole, plutôt qu'à un personnage
historique ou encore à un personnage
de fiction encore peu utilisé
aujourd'hui.
Cet étonnement est également à
considérer au regard des résultats
obtenus à la question 5.I sur les
arguments d'une publicité utilisant une
célébrité, jugés les plus convaincants
par les répondants, que nous
présenterons page 353.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
295
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
En revanche, ce classement reste
compréhensible lorsque l'on observe les
résultats obtenus aux questions 5.K et
5.L sur l'utilisation par la publicité de
personnages célèbres décédés et de
personnages de fiction. Ces deux
dernières questions avaient été
incorporées au questionnaire en raison
de l'apparition de plus en plus
fréquente dans les écrans publicitaires
télévisés - et à un degré moindre dans
les autres media - français et étrangers,
de films utilisant tantôt des célébrités
décédées, tantôt des célébrités par le
biais des personnages de fiction qu'elles
avaient interprétés.
On parvint à l'obtention des
résultats suivants :
Répondants déclarant accepter qu'une publicité utilise un personnage célèbre décédé
Répondants
Tout à fait
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Plutôt pas
d'accord
Pas du tout
d'accord
Filles
41,18%
26,47%
17,65%
10,29%
4,41%
Garçons
30,43%
30,43%
26,09%
6,52%
6,52%
Ensemble
36,84%
28,07%
21,05%
8,77%
5,26%
Acceptent qu'une publicité utilise un
personnage célèbre décédé
(groupe des filles)
Acceptent qu'une publicité utilise un
personnage célèbre décédé
(groupe des garçons)
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Si le sentiment du groupe des
filles apparaît une nouvelle fois plus
nettement en faveur de l'acceptation du
principe (score moyen de 0,90 contre
0,72), que celui des garçons, les
répondants se disent favorables dans
l'ensemble
à
l'utilisation
de
personnages célèbres décédés.
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
On notera cependant une
variance relativement importante pour
chacun des deux groupes, comme le
montrent les résultats du tableau
présenté ci-dessous. Ce qui exprime
une nouvelle fois, une relative
hétérogénéité des réponses sur
l'acceptation de l'idée (hétérogénéité
légèrement plus prononcée chez les
filles que chez les garçons).
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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296
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Acceptent l'idée
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
0,90
0,72
0,82
Variance
1,39
1,33
1,37
Ecart-type
1,18
1,15
1,17
Maintenant, on remarquera
d'autre part que lorsque les répondants
se voient demander s'ils apprécient voir tableau et graphiques présentés cidessous - ce même principe, on observe
un léger tassement de la surface de
réponses sur les radars.
Bien qu'exprimant toujours un
avis favorable comme au sujet de
l'acceptation du principe d'utilisation,
les résultats sont plus nuancés sur
l'appréciation. Alors que 64,91% des
répondants se déclaraient d'accord en
général sur le principe d'utilisation, ils
ne sont plus que 57,02% pour
l'apprécier. Ce chiffre reste cependant
supérieur à la moyenne ce qui peut en
partie contribuer à expliquer la 5ème
position de ce type de personnages
célèbres dans le classement général,
ainsi bien entendu que la publicité
pour les montres BREITLING avec
Winston CHURCHILL et Franklin
ROSSEVELT ait été autant remarquée
par les répondants. Les résultats sont
les suivants :
Répondants déclarant apprécier qu'une publicité utilise un personnage célèbre décédé
Répondants
Tout à fait
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Plutôt pas
d'accord
Filles
26,47%
30,88%
25,00%
13,24%
4,41%
Garçons
23,91%
32,61%
23,91%
8,70%
10,87%
Ensemble
25,44%
31,58%
24,56%
11,40%
7,02%
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
Pas du tout
d'accord
297
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Apprécient qu'une publicité utilise un
personnage célèbre décédé
(groupe des filles)
Apprécient qu'une publicité utilise un
personnage célèbre décédé
(groupes des garçons)
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
pas du tout
d'accord
Indifférents
Les surfaces de réponses
rapprochant plus du carré ou
pentagone que du "triangle élancé"
pouvait logiquement craindre que
Plutôt
d'accord
Plutôt pas
d'accord
se
du
on
les
Indifférents
réponses obtenues proviennent de
sentiments très contrastés. C'est ce que
confirme le tableau d'analyse de la
variance présenté ci-dessous.
Apprécient l'idée
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
0,62
0,50
0,57
Variance
1,29
1,55
1,40
Ecart-type
1,14
1,25
1,18
Le score moyen confirme un
accord moins puissant (filles : 0,90 /
0,62 ; garçons : 0,72 / 0,50) qu'en ce qui
concerne l'acceptation de l'idée ellemême. Quant à l'analyse de la variance,
elle exprime à nouveau un sentiment
très contrasté au sein de chacun des
groupes (filles : 1,39 / 1,29 ; garçons : 1,33
/ 1,55) même si l'on note un tassement
de cette hétérogénéité chez les filles et
au contraire une accentuation chez les
garçons.
Concernant maintenant, le type :
"personnage de fiction", les résultats
sont encore plus nettement favorables,
pour l'acceptation comme pour
l'appréciation du principe d'utilisation.
Comme on peut le constater à la lecture
des résultats présentés ci-dessous, les
surfaces de réponses semblent toutes
fuir très nettement vers le sommet des
radars par la droite.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
298
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Répondants déclarant accepter qu'une publicité utilise un personnage de fiction
Répondants
Tout à fait
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Plutôt pas
d'accord
Pas du tout
d'accord
Filles
42,65%
38,24%
16,18%
2,94%
-
Garçons
52,17%
39,13%
6,52%
2,17%
-
Ensemble
46,49%
38,60%
12,28%
2,63%
-
Acceptent qu'une publicité utilise un
personnage de fiction
(groupe des filles)
Acceptent qu'une publicité utilise un
personnage de fiction
(groupe des garçons)
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Indifférentes
On obtient donc un sentiment
très tranché en faveur de ce principe,
car aucun répondant ne se déclare "pas
du tout d'accord" sur le principe
d'utilisation. Par ailleurs, on notera que
ce sont cette fois les garçons (score
moyen : 1,41) qui se montrent plus
nettement favorables que les filles
(score moyen : 1,21) au principe
d'utilisation d'un personnage de fiction.
Indifférents
80,89% des filles déclarent accepter ce
principe, alors que 91,30% des garçons
sont d'accord ou tout à fait d'accord ; la
surface de réponses des garçons fuyant
plus vers le sommet que celle des filles.
Cette observation graphique est
d'ailleurs confirmée par l'analyse du
score moyen et de la variance présentée
ci-dessous :
Acceptent l'idée
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
1,21
1,41
1,29
Variance
0,66
0,50
0,61
Ecart-type
0,81
0,72
0,78
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
299
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Supérieur à 1, le score moyen
confirme parfaitement un accord
presque total de chacun des sexes sur
l'acceptation de l'idée, avec un score
moyen légèrement plus élevé chez les
garçons que chez les filles. Quant à la
l'analyse de la variance, elle reflète un
sentiment beaucoup plus homogène
que celui constaté sur l'utilisation de
personnages décédés, lors de la
question précédente. On notera
cependant que le score moyen
légèrement plus élevé du groupe des
filles s'accompagne d'une variance elle
aussi légèrement plus forte que celle
calculée pour le groupe des garçons.
Cet avis légèrement plus
favorable pour le groupe des garçons
que pour celui des filles se confirme à
l'étude des résultats concernant
l'appréciation du principe cette fois,
comme le montrent les résultats
suivants :
Répondants déclarant apprécier qu'une publicité utilise un personnage de fiction
Répondants
Tout à fait
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Plutôt pas
d'accord
Pas du tout
d'accord
Filles
44,12%
30,88%
17,65%
5,88%
1,47%
Garçons
69,57%
19,57%
6,52%
4,35%
-
Ensemble
54,39%
26,32%
13,16%
5,26%
0,88%
Apprécient qu'une publicité utilise un
personnage de fiction
(groupe des filles)
Apprécient qu'une publicité utilise un
personnage de fiction
(groupe des garçons)
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférentes
A l'étude des radars présentés
ci-dessus, on peut aisément observer
un sentiment général très favorable à
propos de l'appréciation de l'utilisation
d'un personnage de fiction dans une
publicité.
Toutefois,
là
encore
l'appréciation du groupe des garçons
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
est plus manifeste que celui des filles,
dans lequel un plus grand nombre de
répondants se déclarent indifférents.
89,14% des garçons disent apprécier ce
principe en général alors que "seuls"
75% des filles ont le même sentiment.
On peut apporter confirmation à cette
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
300
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
observation en présentant le calcul du
score moyen :
Apprécient l'idée
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
1,10
1,54
1,28
Variance
0,97
0,64
0,89
Ecart-type
0,99
0,80
0,94
Le score moyen calculé pour le
groupe des filles diminue (1,21 / 1,10)
par rapport à celui obtenu pour la
question sur l'acceptation de l'idée.
Alors que celui calculé pour le groupe
des garçons augmente (1,41 / 1,54)
toujours par rapport à celui obtenu à la
question précédente. On notera enfin
que l'analyse de la variance révèle cette
fois-ci une augmentation pour chacun
des deux sexes, ce qui exprime un avis
moins homogène quant à l'appréciation
de l'idée que pour l'acceptation ellemême. Toutefois, c'est cette fois le
groupe des filles qui fait preuve d'un
sentiment plus hétérogène, même si
dans l'ensemble cette hétérogénéité est
moins importante que celle constatée à
propos de l'utilisation d'une célébrité
décédée.
Ces résultats sont des plus
intéressants dans le cadre de l'étude du
classement des différents types de
personnages célèbres jugés les plus
convaincants et qui nous préoccupait
initialement. Car en effet, ils
contribuent à expliquer en partie la
différence qui existe entre le
classement proposé par les garçons et
celui donné par les filles, notamment en
ce qui concerne les personnages de
fiction comme nous allons le constater.
Poursuivons donc l'analyse de
ces classements du type de personnages
célèbres au regard du sexe du
répondant. Compte tenu du fait que
l'échantillon comportait plus de filles
que de garçons, la prise en
considération du nombre de points
n'était plus significative ici. Dès lors,
pour
permettre
une
meilleure
comparaison du classement réalisé par
chacun des sexes, le nombre de points à
été ramené proportionnellement à un
pourcentage des points distribués par
chacun de ces sexes.
On obtient alors pour chacun
des deux sexes, les résultats suivants :
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
301
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Classement par les filles
Rang
1
2
3
4
5
5
7
7
9
10
11
Type de personnage
Classement par les garçons
Part
des points
Acteur
33,82%
Sportif
16,91%
Journaliste
10,05%
Personnage historique
8,09%
Personnage de fiction
7,11%
Chanteur
7,11%
Musicien
5,39%
Top-model
5,39%
Grand cuisinier
4,66%
Homme politique
0,98%
Animateur
0,49%
Les deux classements sont très
sensiblement différents ce qui signifie
donc que chacun des sexes n'attache
pas la même valeur à chacun des types
de porte-parole célèbres proposés.
Alors
que
les
garçons
considèrent les sportifs comme les
porte-parole publicitaires les plus
convaincants, suivis de près par les
acteurs, le binôme de tête est inversé
chez les filles. De surcroît, la seconde
position des sportifs chez les filles se
Rang
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
Type de personnage
Part
des points
Sportif
29,35%
Acteur
27,90%
Personnage de fiction
9,42%
Top-model
8,70%
Personnage historique
6,88%
Musicien
6,52%
Journaliste
5,43%
Chanteur
3,26%
Animateur
1,45%
Homme politique
1,09%
Grand cuisinier
-
trouve très loin derrière celle les
acteurs, alors que pour le groupe des
garçons, les deux types de personnages
obtiennent une part des points peu
différente. Sur ce dernier point nous
apporterons un élément d'explication
avec l'analyse croisée permettant de
comparer les résultats au regard du
sexe du répondant et de la version du
questionnaire auquel il était exposé.
On notera également avec
intérêt que les grands cuisiniers ne
furent jamais cités par les garçons alors
qu'ils apparaissent en 9ème position
dans le classement des filles avec 4,66%
des points ; que les journalistes
obtiennent moitié moins de points chez
les garçons que chez les filles ; et avec
amusement, que les top-models se
placent en 4ème position avec 8,70% des
points chez les garçons, mais en 7ème
position ex aequo seulement chez les
filles avec 5,39% des points.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
302
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Dès lors que nous recherchions
des
volontaires
pour
cette
expérimentation, il était a priori difficile
d'obtenir un nombre identique de filles
que de garçons, notamment au regard
du support auquel les répondants
allaient être exposés, qui lui-même
comme nous l'avons vu, ne comporte
pas dans la réalité, autant de lecteurs
que de lectrices. En revanche, dès lors
que deux versions du questionnaire1
étaient utilisées, il était impératif
d'obtenir des groupes de taille
sensiblement équivalente de manière à
permettre une analyse comparative
dans
de
bonnes
conditions.
Malheureusement, après le filtrage des
questionnaires "à risques" les deux
groupes de 66 questionnaires de
chacune des versions devinrent 58
questionnaires de la version A et 56 de
la version B. Cependant, compte tenu
de la différence relativement faible, le
test sur l'ordre fut maintenu.
__________________
1 - Voir en annexes le détail de l'élaboration du
questionnaire page 684.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
303
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Tableau de répartition
Version A
Version B
Filles
37
31
68
Garçons
21
25
46
Total
58
56
114
Comme détaillé dans l'analyse
de la construction du questionnaire,
l'ordre proposé par chacune des deux
versions consistait simplement en une
permutation complète des différents
types proposés :
Ordre des propositions
de la version A
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
Sportif
Chanteur
Personnage historique
Animateur
Acteur
Homme politique
Grand-cuisinier
Journaliste
Musicien
Personnage de fiction
Autre : . . . . . . . . . . . . . . . . .
Total
Ordre des propositions
de la version B
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
Personnage de fiction
Musicien
Journaliste
Grand-cuisinier
Homme politique
Acteur
Animateur
Personnage historique
Chanteur
Sportif
Autre : . . . . . . . . . . . . . . . . .
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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304
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Les classements et la répartition
des points obtenus pour l'ensemble des
répondants furent les suivants :
Classement par l'ensemble des répondants
version A du questionnaire
Rang
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
Type de personnage
Part
des points
Acteur
30,17%
Sportif
24,14%
Journaliste
8,91%
Personnage historique
7,18%
Personnage de fiction
6,90%
Top-model
6,61%
Musicien
5,75%
Chanteur
5,17%
Grand cuisinier
3,74%
Homme politique
1,44%
Animateur
-
Classement par l'ensemble des répondants
version B du questionnaire
Rang
1
2
3
4
5
6
7
7
9
9
11
Type de personnage
Part
des points
Acteur
32,74%
Sportif
19,64%
Personnage de fiction
9,23%
Personnage historique
8,04%
Journaliste
7,44%
Top-model
6,85%
Musicien
5,95%
Chanteur
5,95%
Grand cuisinier
1,79%
Animateur
1,79%
Homme politique
0,60%
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
305
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Or, nous savions à l'étude des
résultats par sexes, que c'est
essentiellement le classement du
groupe des filles qui permit au type
"journaliste" de figurer à la troisième
place du classement général. Par
ailleurs, nous savions qu'un plus grand
nombre de filles furent exposées à la
version A qu'à la version B. Cela nous
incita à pousser l'analyse sur un double
croisement des données, par sexe et par
type de version de questionnaire.
Au regard des différences relativement
peu importantes entre la version A et la
version B, nous avancerons la
conclusion que l'ordre des propositions
n'a a priori pas véritablement influencé
le classement proposé par l'ensemble
des répondants, pour cette question.
Seul le saut du type "journaliste" de la
5ème place pour la version B à la 3ème
place pour la version A semblait
difficilement explicable.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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306
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
On obtient alors les résultats suivants :
Classement par les filles
version A du questionnaire
Rang
1
2
3
4
5
5
7
8
9
10
11
Type de personnage
Classement par les filles
version B du questionnaire
Part
des points
Acteur
27,48%
Sportif
18,92%
Journaliste
11,26%
Personnage historique
9,46%
Personnage de fiction
6,76%
Chanteur
6,76%
Musicien
6,31%
Grand cuisinier
5,86%
Top-model
5,41%
Homme politique
1,80%
Animateur
-
Quelques
différences
sont
perceptibles dans le classement du
groupe des filles suivant qu'elles furent
exposées à la version A ou à la version
B. Ces différences sont en partie dues
au très grand nombre de filles qui,
exposées à la version B du
questionnaire, choisirent le type
"acteur" comme étant le type de porte-
Rang
1
2
3
4
4
6
7
8
9
10
11
Type de personnage
Part
des points
Acteur
41,40%
Sportif
14,52%
Journaliste
8,60%
Personnage de fiction
7,53%
Chanteur
7,53%
Personnage historique
6,45%
Top-model
5,38%
Musicien
4,30%
Grand cuisinier
3,23%
Animateur
1,08%
Homme politique
-
parole célèbre le plus convaincant.
Nous n'avons aucune explication à
fournir sur ce gonflement du
pourcentage quant à la construction de
la question, dès lors que le type "acteur"
est justement l'un des deux types situés
au milieu, dans l'ordre des propositions
faites par la version A comme dans
celui de la version B.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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307
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Classement par les garçons
version A du questionnaire
Rang
1
2
3
4
5
5
7
8
9
10
11
Type de personnage
Classement par les garçons
version B du questionnaire
Part
des points
Acteur
34,92%
Sportif
33,33%
Top-model
8,73%
Personnage de fiction
7,14%
Musicien
4,76%
Journaliste
4,76%
Personnage historique
3,17%
Chanteur
2,38%
Homme politique
0,79%
Grand cuisinier
-
Animateur
-
Rang
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
Type de personnage
Part
des points
Sportif
26,00%
Acteur
22,00%
Personnage de fiction
11,33%
Personnage historique
10,00%
Top-model
8,67%
Musicien
8,00%
Journaliste
6,00%
Chanteur
4,00%
Animateur
2,67%
Homme politique
1,33%
Grand cuisinier
-
place du classement. A l'étude des deux
groupes dans leur ensemble, nous
avions observé que si les filles
indiquaient de manière sensible que
l'acteur était à leurs yeux le type de
porte-parole
célèbre
le
plus
convaincant, les garçons trouvaient
qu'il s'agissait du sportif. Or, à l'étude
du groupe des garçons pour chacune
des fractions exposées à l'une ou l'autre
des versions du questionnaire, on
trouve l'explication du fait qu'ils
placent le sportif en tête de classement,
mais immédiatement suivi par l'acteur.
Le classement effectué par le
groupe des garçons suivant la version
du questionnaire est plus intéressant.
En effet, il présente une information
importante à propos de la première
En effet, seuls les garçons
exposés à la version B placent le sportif
en première position, alors que ceux
exposés à la version A rejoignent sur ce
point le sentiment des filles, en plaçant
l'acteur en première position, certes,
immédiatement suivi par le sportif.
Faut-il y voir une influence des garçons
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
308
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
prochaines études, d'obtenir des
échantillons de tailles rigoureusement
identiques
par
version
de
questionnaire, de manière à éviter ce
genre de biais.
par l'ordre des propositions des types
de porte-parole ? Cela semble difficile à
établir dès lors que le sportif arrive en
tête du classement des garçons exposés
à la version B du questionnaire, version
qui justement présente le type "sportif"
en dernière position, juste avant la 11ème
possibilité "autre". En revanche, le fait
que les garçons exposés à la version B
du questionnaire soient plus nombreux
que ceux exposés à la version A
contribue à différencier le classement
général des garçons au regard de celui
des filles. D'où l'impératif pour nos
A
présent
et
plus
particulièrement au sujet des publicités
contenues dans ce magazine, une très
nette majorité de répondants (64,04%)
répondirent y avoir vu des publicités
avec
des
personnages
qu'ils
connaissaient (question 3.B).
Publicités avec des personnages connus
Attitude
Garçons
Filles
Ensemble
D'accord
60,87%
66,18%
64,04%
Pas d'accord
13,04%
10,29%
11,04%
Ne savent pas
26,09%
23,53%
24,56%
Souvenir spontané de publicités avec des personnages connus
70%
60%
50%
D'accord
40%
Ne savent pas
30%
Pas d'accord
20%
10%
0%
Garçons
Filles
Ensemble
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309
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
tournoi des Internationaux de tennis
de ROLAND GARROS. De la même
manière, on pouvait craindre a priori,
que Isabella ROSSELLINI plus topmodel qu'actrice de cinéma à ce jour, ne
puisse être identifiée de manière
nominative par tous les répondants qui
connaissaient son visage. Ou encore
que Jenna de ROSNAY bénéficie de la
capitalisation du souvenir créée par la
diffusion à la télévision au moment de
l'enquête, d'un film publicitaire avec
elle pour LES POLYSIANES. Autant de
biais qu'il était très difficile de
maîtriser.
Et l'on s'aperçoit également à
l'observation du graphique, que les
filles étaient proportionnellement,
légèrement plus nombreuses que les
garçons à penser que le magazine
comportait des publicités, dont elles
connaissaient les personnages.
De manière à juger une fois
encore du souvenir spontané des
répondants à propos de ces
personnages connus et reconnus ici, les
répondants étaient également sollicités
pour identifier nommément les
personnages qu'ils pensaient avoir
reconnus (question 3.C).
Toutes ces craintes allaient en
définitive s'effacer les unes après les
autres pour laisser place à des résultats
parfois très surprenants. Des résultats
relativement bons dans l'ensemble pour
une question de souvenir spontané de
ce type, et où l'on constate que le
souvenir des filles est légèrement
supérieur à celui des garçons, pour 4
des 6 personnages célèbres utilisés par
une publicité dans ce magazine.
Lorsque l'on pose ce type de
question pour établir un souvenir
spontané, on s'expose toujours au biais
de la notoriété subjective des
personnages étudiés. Certes, nous nous
adressions à un public jeune ce qui
réduit en partie ce biais, mais l'on
pouvait par exemple craindre que le
souvenir de la joueuse Gabriela
SABATINI soit excessivement élevé en
raison de la proximité temporelle du
Souvenir spontané de personnages connus
Célébrités
Garçons
Filles
Ensemble
Oui
Non
Oui
Non
Oui
Non
Isabella Rossellini
32,61%
67,39%
38,24%
61,76%
35,96%
64,04%
Winston Churchill
21,74%
78,26%
7,35%
92,65%
13,16%
86,84%
Franklin Roosevelt
2,17%
97,83%
1,47%
98,53%
1,75%
98,25%
Gérard Lanvin
21,74%
78,26%
26,47%
73,53%
24,56%
75,44%
Jenna de Rosnay
13,04%
86,96%
23,53%
76,47%
19,30%
80,70%
Gabriela Sabatini
8,70%
91,30%
7,35%
92,65%
7,89%
92,11%
Autre (absent)
4,35%
95,65%
13,24%
79,41%
9,65%
90,35%
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
310
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
L'étude graphique
résultats
permet
de
immédiatement
sur
de ces
constater
quel(s)
personnage(s)
les
différences
surviennent entre les deux sexes :
Souvenir spontané de personnages connus
40%
35%
30%
Isabella Rossellini
Gérard Lanvin
25%
Jenna de Rosnay
Winston Churchill
20%
Autre
15%
Gabriela Sabatini
Franklin Roosevelt
10%
5%
0%
Garçons
Filles
Même si la publicité LANCÔME
figurait en deuxième de couverture, on
notera le très bon résultat de l'actrice
mannequin Isabella ROSSELLINI avec
35,96%
des
répondants
qui
connaissaient son nom et se souvinrent
spontanément l'avoir vue dans les
pages du support. Un résultat
supérieur chez les filles que chez les
garçons, qu'il est possible d'attribuer
en partie à la publicité elle-même,
puisque comme nous l'avons vu dans
les pages qui précèdent, celle-ci obtint
de meilleurs résultats en souvenir
spontané comme en souvenir assisté,
chez les filles que chez les garçons.
Très bon souvenir spontané
également de l'acteur Gérard LANVIN
Ensemble
avec 24,56% des répondants ayant le
souvenir de l'avoir vu. Ce, alors lors
qu'il figurait sur une publicité simple
page - et non double comme les 4
autres -, au surplus située à gauche, et
dès lors qu'il n'était pas cité. A
nouveau, la population féminine fut
proportionnellement plus nombreuse
que la population masculine à s'en
souvenir. Le score de la véliplanchiste
Jenna de ROSNAY - notamment chez
les filles - fut également très bon. Très
bon, mais surtout très largement
supérieur au résultat obtenu par la
marque. Rappelons également pour
modérer ces meilleurs résultats obtenus
par la population féminine, qu'il
s'agissait dans ces trois cas de produits
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
311
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
qui leur étaient plus particulièrement
destinés.
Mais le cas le plus intéressant
est sans doute celui des hommes
politiques Winston CHURCHILL et
Franklin ROOSEVELT, utilisés par la
marque de montres BREITLING.
Winston CHURCHILL obtint un très
bon score de souvenir spontané de
13,16% en général ; score atteignant
même 21,74% auprès de la population
masculine, beaucoup plus touchée a
priori que la population féminine
(7,35%). Mais le phénomène le plus
marquant demeure l'extraordinaire
impact
du
Premier
Ministre
britannique par rapport au Président
des États-unis d'alors, Franklin
ROOSEVELT. Ce dernier n'obtint le
souvenir que de 1,75% des répondants,
avec une "majorité" de garçons. Or, le
cas
devient
particulièrement
intéressant lorsque l'on se souvient que
les deux personnages ont la même
importance, sur la photographie
d'archives, détournée par la publicité.
Certes, l'emplacement central de
Winston CHURCHILL est peut-être
plus favorable à l'impact que celui de
Franklin ROOSEVELT, et il est le seul
des deux personnages à "s'exprimer".
Mais nous pensons qu'il s'agit plus
probablement d'une méconnaissance
relative de la part de l'échantillon, du
visage de Franklin ROOSEVELT par
rapport à celui de Winston
CHURCHILL, plus directement lié à
l'Histoire de la France. Rappelons, que
les personnages n'étaient pas nommés.
Quant à Gabriela SABATINI,
avec 7,89%, son résultat demeure l'un
des plus mauvais, peut-être parce
qu'une fois encore la publicité était
située en fin de support. Mais l'on peut
penser que ce résultat est également dû
au fait que la photographie de la
joueuse
de
tennis
faisant
indirectement l'objet du jeu concours n'était pas immédiatement identifiable.
Le résultat reste cependant très faible
au regard de l'hypothèse émise au
départ, sur un éventuel parasitage
favorable des Internationaux de tennis
de ROLAND GARROS.
A propos de la rubrique "autre",
elle regroupe toutes les citations de
personnages
célèbres
que
les
répondants (9,65%) pensaient avoir
rencontrés dans le magazine, mais qui
n'y figuraient pas. On retiendra ici, une
meilleure qualité du souvenir chez les
garçons que chez les filles, beaucoup
plus nombreuses à avoir eu le souvenir
d'un personnage inexistant. Mais dans
l'ensemble et toujours considération
faite des modalités d'administration du
questionnaire, ce "taux d'erreur" ne
nous semble pas excessif. Par ordre
d'apparition les citations erronées
portèrent sur Paulina PORIZKOVA - le
mannequin vedette des cosmétiques
ESTEE
LAUDER,
absent
des
annonceurs du magazine - (3 citations),
Catherine DENEUVE (2 citations),
Gabrielle LAZURE, Carole BOUQUET,
Yves ROCHER, Johnny HALLYDAY,
Ingrid
BERGMAN
et
Michael
DOUGLAS (1 citation chacun).
Si l'on observe à présent les
résultats de l'analyse comparative du
souvenir spontané respectif de
personnages connus au regard de ceux
obtenus à la question 1.B, sur le
souvenir spontané de la marque, on
obtient les tableaux et les graphiques
présentés ci-dessous. L'utilisation de
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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312
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
de la célébrité afférente, pour chacun
des deux sexes.
graphiques permet à nouveau une
analyse comparative immédiate entre le
souvenir spontané de la marque et celui
Analyse comparative souvenir spontané : marque / célébrité
Garçons
Filles
Total
Marque Lancôme
26,09%
29,41%
28,07%
Isabella Rossellini
32,61%
38,24%
35,96%
40%
35%
30%
25%
20%
Marque Lancôme
15%
Isabella Rossellini
10%
5%
0%
Isabella Rossellini
Garçons
Marque Lancôme
Filles
Total
Dans le cas de la publicité pour
la marque LANCÔME présentée cidevant, on constate manifestement que
le nom de la célébrité génère plus
facilement le souvenir spontané que le
nom de la marque elle-même. Nous
rappellerons ici que la question sur le
souvenir spontané de personnages
connus (question 3.C) intervenait bien
après celle sur le souvenir spontané de
marques publicitaires (question 1.B) et
qu'il était impossible au répondant de
revenir en arrière pour corriger ou
compléter éventuellement ses réponses
précédentes.
Il n'en reste pas moins que les
résultats demeurent extrêmement bons
pour une célébrité, qui comme nous
l'avons déjà dit, est essentiellement
top-model et donc pour laquelle a priori
le consommateur moyen a rarement
connaissance de son nom. Maintenant,
on peut également ajouter que ces
résultats ne peuvent en aucun cas ici
exprimer une nuisance du souvenir de
la célébrité par rapport à celui de la
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313
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
marque, dès lors que Isabella
ROSSELLINI est sous contrat exclusif
pour
LANCÔME1.
L'association
Isabella ROSSELLINI / LANCÔME ne
peut normalement pas être parasitée
par d'autres prestations publicitaires.
Concernant
maintenant
la
publicité pour la marque BREITLING
qui utilisait les personnages de
Winston CHURCHILL et Franklin D.
ROOSEVELT :
__________________
1 - Voir à ce sujet page 397, le détail du cas du porte-
parole officiel.
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314
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Analyse comparative souvenir spontané : marque / célébrité
Garçons
Filles
Total
Marque Breitling
30,43%
8,82%
17,54%
Winston Churchill
21,74%
7,35%
13,16%
2,17%
1,47%
1,75%
Franklin Roosevelt
35%
30%
25%
20%
Franklin Roosevelt
15%
Winston Churchill
10%
Marque Breitling
5%
Marque Breitling
0%
Winston Churchill
Garçons
Franklin Roosevelt
Filles
Total
La situation est inversée dans le
cas de la publicité pour la marque
BREITLING, dont nous avons déjà
souligné les excellents résultats. Ici, le
souvenir spontané du nom de la
marque l'emporte sur celui des
personnages historiques célèbres qui
furent utilisés. Au titre des éléments
pouvant contribuer à expliquer cette
situation, nous avancerons le fait que
Winston CHURCHILL et Franklin D.
ROOSEVELT sont des personnages
historiques, et que par conséquent leur
médiatisation actuelle est résiduelle,
comparativement à celle des autres
célébrités qui font ici l'objet d'une
étude. Certes, le public jeune auquel
s'adressait ce questionnaire était sensé
connaître ces figures de l'Histoire
relativement récente, mais les Français
dans leur ensemble ayant déjà des
difficultés à se souvenir de leurs
propres Présidents, peut-être ne fallaitil pas dès le départ trop espérer pour
ces deux hommes politiques étrangers.
On
pourra
cependant
s'interroger sur la disproportion des
résultats
concernant
Winston
CHURCHILL, d'un groupe à l'autre.
Pourquoi les garçons furent-ils à ce
point plus sensibles au souvenir du
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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315
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Premier Ministre britannique que les
filles ? Les garçons sont-ils réellement
plus sensibles à l'Histoire que les filles ?
Difficile de trouver une explication
rationnelle à cette différence, d'autant
plus que dans le classement des types
de personnages célèbres jugés les plus
convaincants et présenté ci-dessus, le
type "personnage historique" intervient
relativement à la même position et
sensiblement avec le même résultat
d'un groupe à l'autre (5ème position
avec 6,88% chez les garçons et 4ème
position avec 6,93% chez les filles).
Analyse comparative souvenir spontané : marque / célébrité
Garçons
Filles
Total
Marque Variance
10,87%
7,35%
8,77%
Gérard Lanvin
21,74%
26,47%
24,56%
30%
25%
20%
15%
Marque Variance
10%
Gérard Lanvin
5%
0%
Gérard Lanvin
Garçons
Marque Variance
Filles
Total
Nouvelle inversion de situation
pour la publicité de la marque
VARIANCE avec l'acteur Gérard
LANVIN. C'est ici à nouveau la
célébrité qui obtint le souvenir
spontané d'un nombre supérieur de
répondants, au regard de ceux qui se
souvinrent spontanément du nom de la
marque.
On notera cependant avec
intérêt de l'analyse comparative des
deux sexes. En effet, si les garçons sont
proportionnellement plus nombreux
que les filles à citer spontanément le
nom de la marque VARIANCE, ces
dernières sont proportionnellement
plus nombreuses que les garçons à citer
spontanément le nom de l'acteur
Gérard LANVIN. Ce, alors que le
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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316
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
publicité se tromperait-elle de cible ?
produit est très féminin a priori. La
Analyse comparative souvenir spontané : marque / célébrité
Garçons
Filles
Total
4,35%
1,47%
2,63%
13,04%
23,53%
19,30%
Marque Les Polysianes
Jenna de Rosnay
25%
20%
15%
Marque Les Polysianes
10%
Jenna de Rosnay
5%
0%
Jenna de Rosnay
Garçons
Marque Les Polysianes
Filles
Total
Il est possible - à une moindre
échelle - de faire le même constat pour
la publicité de la marque LES
POLYSIANES avec Jenna de ROSNAY.
Le souvenir spontané de la célébrité
utilisée devance largement celui de la
marque. Publicitairement parlant, les
résultats
sont
encore
plus
catastrophiques pour les filles que pour
les garçons, tant l'écart entre le nombre
de
celles
qui
mentionnèrent
spontanément le nom de la célébrité et
celui de celles qui se souvinrent
spontanément de celui de la marque est
grand.
Par ailleurs, à l'instar de la
publicité pour la marque VARIANCE,
les garçons sont proportionnellement
plus nombreux à se souvenir
spontanément de la marque que les
filles. Alors que ces dernières se
souviennent
spontanément
proportionnellement plus de Jenna de
ROSNAY que les garçons. Ces résultats
pour VARIANCE comme pour LES
POLYSIANES nous apparaissent assez
étranges, dès lors que s'agissant de
produits à connotation féminine dans
les deux cas, l'on aurait pu sans
surprise s'attendre au résultat inverse.
A savoir que les garçons qui ne sont a
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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317
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
publicitaire, que le nom de la marque
elle-même. Or, dans les deux cas, cette
hypothèse est démentie
priori pas visés directement par ces
produits mémorisent spontanément et
toujours
proportionnellement,
davantage le nom du porte-parole
!
Analyse comparative souvenir spontané : marque / célébrité
Garçons
Filles
Total
Marque Hollywood
6,52%
1,47%
3,51%
Gabriela Sabatini
8,70%
7,35%
7,89%
9%
8%
7%
6%
5%
4%
Marque Hollywood
3%
Gabriela Sabatini
2%
1%
0%
Gabriela Sabatini
Garçons
Marque Hollywood
Filles
Total
Résultats encore plus décevants pour la
publicité de la marque HOLLYWOOD
avec la joueuse de tennis Gabriela
SABATINI, où encore une fois le
souvenir spontané de la marque est
devancé par celui de la célébrité.
Observons cependant une nouvelle fois
- voir échelle du graphique - que tous
les résultats de cette association sont
par ailleurs très faibles - en nombre de
répondants - et donc moins significatifs
que ceux des premières associations
étudiées.
Concernant ces 5 publicités, il
apparaît donc que dans l'ensemble la
célébrité ait un impact supérieur à la
publicité elle-même, toujours en termes
de souvenir spontané. Mais, il est
impossible de généraliser sur le terme
de "célébrité" car dans le cas de la
marque BREITLING, on constate au
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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318
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
correspondante, parmi les répondants
qui se rappelèrent spontanément avoir
vu la marque concernée. Puis dans un
second temps, la part des répondants
qui se souvinrent de la marque comme
étant présente publicitairement dans le
support, parmi ceux qui eurent le
souvenir spontané de la célébrité
correspondante.
contraire que le souvenir spontané de la
publicité elle-même est supérieur à
celui-ci des célébrités très particulières
utilisées ici.
Pratiquons maintenant une
double analyse croisée de manière à
comparer la part de ceux qui eurent le
souvenir spontané de la célébrité
souvenir spontané de la célébrité SI
souvenir spontané de la marque
Filles
Garçons
Ensemble
Isabella Rossellini si Lancôme
75,00%
66,67%
71,88%
Winston Churchill si Breitling
33,33%
50,00%
45,00%
Franklin Roosevelt si Breitling
-
7,14%
5,00%
Gérard Lanvin si Variance
60,00%
80,00%
70,00%
Jenna de Rosnay si Les Polysianes
16,67%
28,57%
23,08%
-
33,33%
25,00%
Gabriela Sabatini si Hollywood
Analyse croisée
du souvenir spontané de la célébrité si souvenir spontané de la marque
80,00%
70,00%
60,00%
50,00%
40,00%
30,00%
20,00%
10,00%
0,00%
Isabella
Rossellini
si
Lancôme
Winston
Churchill si
Breitling
Filles
Gérard
Lanvin si
Variance
Franklin
Roosevelt
si Breitling
Garçons
Jenna de
Rosnay si
Les
Polysianes
Gabriela
Sabatini si
Hollywood
Ensemble
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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319
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Le graphique précédent illustre
clairement le fait qu'une large majorité
des répondants qui se souvinrent
spontanément d'avoir vu une publicité
pour la marque LANCÔME, se
rappelèrent également spontanément
d'avoir vu le top-model Isabella
ROSSELLINI (avec un pourcentage
légèrement meilleur pour les filles que
pour les garçons). Il en va de même
pour la publicité de la marque
VARIANCE et de l'acteur Gérard
LANVIN (avec cette fois une part plus
importante chez les garçons que chez
les filles). Concernant la publicité pour
la marque BREITLING, la moitié des
garçons qui en eurent le souvenir, se
souvinrent également du personnage de
Winston CHURCHILL, alors que ce
dernier n'était cité que par un tiers des
filles s'étant rappelé de la marque. En
revanche, confirmation nous est
donnée, de l'impact très limité du
personnage de Franklin ROOSEVELT
que seuls nommèrent 7,14% des
garçons qui eurent le souvenir de la
marque, alors qu'aucune fille ayant eu
ce souvenir ne cita ce nom.
Or, dans le cas de ce dernier
personnage, on se souvient que 1,47%
de l'ensemble du groupe des filles en
eurent le souvenir spontané. Ce qui
constitue un phénomène particulier, en
ce sens où dans l'ensemble le
personnage de Franklin ROOSEVELT
retint peu l'attention des répondantes.
Mais de surcroît, ces résultats
montrent qu'il ne retint l'attention que
de filles n'ayant pas eu le souvenir
spontané de la marque. Le peu de
répondantes concernées ne nous
permet pas d'affirmer que le
personnage historique "vampirisa" le
nom de la marque aux yeux des filles,
mais constitue cependant un cas très
intéressant.
Mauvaise performance relative
également de la véliplanchiste Jenna de
ROSNAY dont la présence ne fut
mémorisée que par 28,57% des garçons
qui se souvinrent de la marque et
16,67% des filles. Quant à Gabriela
SABATINI, à l'exemple de Franklin
ROOSEVELT, aucune fille ne s'en
souvint, alors qu'un tiers des garçons
qui se rappelèrent de la marque, eurent
également le souvenir de la joueuse de
tennis. On rappellera toutefois à
nouveau ici que le nombre de
répondants considérés dans le cas de la
marque HOLLYWOOD était très peu
important.
Toutefois, on observera avec
intérêt - à l'instar de ce qui avait été
constaté pour Franklin ROOSEVELT
et BREITLING et pour le même groupe
des filles - que 7,35% avaient eu le
souvenir spontané d'avoir vu Gabriela
SABATINI dans les pages du magazine.
Ce qui signifie une nouvelle fois, que
toutes les filles qui eurent le souvenir
spontané de la joueuse de tennis,
n'eurent pas le souvenir de la marque
HOLLYWOOD.
On remarquera enfin - à la seule
exception d'Isabella ROSSELLINI pour
LANCÔME - que dans l'ensemble, les
garçons qui eurent le souvenir
spontané de la marque eurent plus
facilement que les filles le souvenir
spontané
de
la
célébrité
correspondante.
Si l'on inverse maintenant
l'analyse croisée, en recherchant la part
des répondants qui eurent le souvenir
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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320
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
de la marque, parmi ceux qui citèrent
spontanément le nom de la célébrité
souvenir spontané de la marque SI
souvenir spontané de la célébrité
correspondante, on obtient le tableau
de résultats et le graphique suivants :
Filles
Garçons
Ensemble
Lancôme si Isabella Rossellini
57,69%
53,33%
74,19%
Breitling si Winston Churchill
40,00%
70,00%
60,00%
Breitling si Franklin Roosevelt
-
100,00%
50,00%
16,67%
40,00%
25,00%
6,25%
40,00%
14,29%
-
25,00%
11,11%
Variance si Gérard Lanvin
Les Polysianes si Jenna de Rosnay
Hollywood si Gabriela Sabatini
Analyse croisée
du souvenir spontané de la marque si souvenir spontané de la célébrité
100,00%
90,00%
80,00%
70,00%
60,00%
50,00%
40,00%
30,00%
20,00%
10,00%
0,00%
Lancôme
si Isabella
Rossellini
Breitling si
Winston
Churchill
Breitling si
Franklin
Roosevelt
Filles
La
première
information
communiquée par ce dernier graphique
- par rapport à celui de l'analyse croisée
précédente - est l'obtention de résultats
sensiblement plus différents d'un sexe
à l'autre ; notamment au regard du
souvenir de la marque BREITLING,
Variance
si Gérard
Lanvin
Garçons
Polysianes
si Jenna
de Rosnay
Hollywood
si
Gabriela
Sabatini
Ensemble
parmi ceux qui eurent le souvenir du
personnage de Franklin ROOSEVELT.
Mais là encore, cela concerne un trop
petit nombre de répondants pour être
considéré
comme
réellement
significatif.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
321
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
En revanche, il apparaît toujours à l'exception de la marque
LANCÔME et d'Isabella ROSSELLINI
- que dans l'ensemble, le souvenir de la
marque par les garçons ayant eu le
souvenir de la célébrité soit
sensiblement meilleur que celui des
filles répondant aux mêmes critères.
On notera également avec
intérêt une nouvelle fois pour
l'ensemble des répondants, la tendance
décroissante des résultats, plus la
publicité est située vers la fin du
support. Ce qui signifie que plus la
publicité est éloignée du début du
magazine, moins le souvenir spontané
de la marque existe chez les répondants
qui eurent le souvenir spontanée de la
célébrité.
Or,
ce
phénomène
n'apparaissait pas sur le graphique de
l'analyse croisée précédente.
Si l'on superpose maintenant le
tracé des deux analyses croisées, on
obtient les représentations suivantes :
Analyse comparative
du souvenir spontané de la marque si souvenir spontané de la célébrité
et du souvenir spontané de la célébrité si souvenir spontané de la marque
(ensemble des répondants)
80,00%
70,00%
60,00%
50,00%
40,00%
30,00%
20,00%
10,00%
0,00%
Isabella
Rossellini /
Lancôme
Winston
Churchill /
Breitling
Franklin
Roosevelt /
Breitling
célébrité si marque
Pour l'ensemble des répondants,
on s'aperçoit instantanément que seule
l'association LANCÔME / Isabella
ROSSELINI obtient une part des
répondants ayant eu le souvenir
spontané de la marque si ils se
rappelaient spontanément avoir vu la
Gérard
Lanvin /
Variance
Jenna de
Rosnay /
Polysianes
Gabriela
Sabatini /
Hollywood
marque si célébrité
célébrité correspondante, relativement
identique à la part des répondants
ayant eu le souvenir spontané de la
célébrité si ils se rappelaient
spontanément avoir vu la marque
correspondante. Le "transfert" célébrité
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
322
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
/ marque et réciproquement, fonctionne
bien dans l'esprit des répondants.
Toutes les autres publicités
génèrent des résultats différents
suivant le sens suivi par l'analyse
croisée. Ce qui montre bien que la
réaction des répondants quant au
souvenir des deux éléments principaux
qui nous intéressait - marque et
célébrité - ne fut pas la même, avec
parfois des comportements presque
opposés. Ainsi, il est manifeste que le
souvenir spontané de Franklin
ROOSEVELT générait un bon souvenir
spontané de la marque BREITLING,
alors que le souvenir spontané de la
marque VARIANCE si les répondants
se souvenaient de Gérard LANVIN
était bien moins bon que celui de
Gérard LANVIN lui-même si les
répondants
se
souvenait
de
VARIANCE.
D'ailleurs, on perçoit ici
immédiatement que les trois premières
associations génèrent un meilleur
souvenir spontané de la célébrité dans
le cas d'un souvenir spontané de la
marque ; alors qu'à l'inverse, les trois
dernières associations expriment un
meilleur souvenir spontané de la
marque dans le cas d'un souvenir de la
célébrité.
Au regard de l'emplacement de
la publicité dans le support, cela
pourrait signifier que l'association
"marque si célébrité" est plus favorable
lorsque la publicité est insérée dans les
premières pages du magazine. Mais un
test du type split-run serait ici
nécessaire pour vérifier pleinement
cette hypothèse. Faute de pourvoir
disposer
de
cette
étude
complémentaire, on notera cependant
que pour l'ensemble des répondants, le
souvenir spontané de la marque dans le
cas du souvenir spontané de la
célébrité, est proportionnellement plus
important que le souvenir spontané de
la célébrité dans le cas du souvenir
spontané de la marque, à propos des
trois
premières
associations
(LANCÔME / Isabella ROSSELLINI,
BREITLING / Winston CHURCHILL
et
BREITLING
/
Franklin
ROOSEVELT). On constate le
phénomène inverse dans le cas des trois
dernières associations (VARIANCE /
Gérard LANVIN, LES POLYSIANES /
Jenna
de
ROSNAY,
Gabriela
SABATINI / HOLLYWOOD).
Quant à l'analyse de la
superposition de ces deux tracés pour
chacun des deux sexes, elle met en
évidence des résultats sensiblement
différents d'un sexe à l'autre.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
323
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Analyse comparative
du souvenir spontané de la marque si souvenir spontané de la célébrité
et du souvenir spontané de la célébrité si souvenir spontané de la marque
(groupe des filles)
80,00%
70,00%
60,00%
50,00%
40,00%
30,00%
20,00%
10,00%
0,00%
Isabella
Rossellini /
Lancôme
Winston
Churchill /
Breitling
Franklin
Roosevelt /
Breitling
célébrité si marque
Concernant le groupe des filles,
il apparaît qu'à l'exception de
l'association BREITLING / Winston
CHURCHILL, le souvenir des deux
éléments - marque et célébrité - se fait
mieux dès lors que l'on considère
l'ensemble des répondantes qui ont eu
le souvenir spontané de la marque, que
si l'on considère au départ l'ensemble
des répondantes qui ont eu le souvenir
spontané de la célébrité. Cela montre
qu'a priori pour le groupe des filles, le
souvenir de la marque génère plus
facilement celui de la célébrité, que
l'inverse.
L'exemple
le
plus
caractéristique
étant
celui
de
l'association VARIANCE / Gérard
LANVIN.
Par ailleurs, on retrouve
également l'expression des très
mauvais résultats à propos des
Gérard
Lanvin /
Variance
Jenna de
Rosnay /
Polysianes
Gabriela
Sabatini /
Hollywood
marque si célébrité
associations Franklin ROOSEVELT /
BREITLING et Gabriela SABATINI /
HOLLYWOOD. L'absence de résultats
illustre ici l'absence de lien dans l'esprit
des filles, entre la célébrité et la
marque. Le graphique exprime
immédiatement le fait que le souvenir
spontané de l'une ou l'autre n'a, dans
aucun cas, engendré le souvenir
spontané du second élément.
A propos du groupe des garçons,
le graphique illustre le fait que le
souvenir spontané de la marque
BREITLING, lors du souvenir spontané
de Winston CHURCHILL est moins
important que celui de la marque, lors
du souvenir de Franklin ROOSEVELT.
Alors que l'inverse se produit pour ces
deux personnages au sujet du souvenir
de la célébrité, lors du souvenir de la
marque.
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Analyse comparative
du souvenir spontané de la marque si souvenir spontané de la célébrité
et du souvenir spontané de la célébrité si souvenir spontané de la marque
(groupe des garçons)
100,00%
90,00%
80,00%
70,00%
60,00%
50,00%
40,00%
30,00%
20,00%
10,00%
0,00%
Isabella
Rossellini /
Lancôme
Winston
Churchill /
Breitling
Franklin
Roosevelt /
Breitling
célébrité si marque
Cela signifie que le souvenir de
la marque était proportionnellement
beaucoup plus facilement lié au
souvenir de Franklin ROOSEVELT.
Alors que c'est le souvenir de Winston
CHURCHILL
qui
semble
proportionnellement beaucoup plus
facilement lié au souvenir de
BREITLING. Cela prouve si besoin
était, ô combien deux personnages
célèbres de même type - a priori
d'importance semblable - peuvent
générer des réactions très différentes
d'un personnage à l'autre, et même d'un
répondant à l'autre - notamment au
regard du sexe de ce répondant.
On constate également un
meilleur lien pour le groupe des
garçons que pour le groupe des filles à
Gérard
Lanvin /
Variance
Jenna de
Rosnay /
Polysianes
Gabriela
Sabatini /
Hollywood
marque si célébrité
propos de associations HOLLYWOOD
/ Gabriela SABATINI et Jenna de
ROSNAY / LES POLYSIANES quel que
soit le sens de l'analyse croisée ; en ne
manquant pas de noter cependant pour
ce dernier, que le souvenir de la marque
dans le cas du souvenir spontané de la
célébrité, est meilleur que celui de la
célébrité dans le cas du souvenir
spontané de la marque pour le groupe
des garçons. Alors que l'inverse se
produisit pour le groupe des filles. Cela
pourrait signifier a priori que la marque
LES
POLYSIANES
est
proportionnellement plus facilement
liée à la célébrité, que Jenna de
ROSNAY à la marque pour les filles.
Alors que pour les filles c'est
proportionnellement
Jenna
de
ROSNAY qui est plus facilement liée à
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
pour l'ensemble des répondants et pour
chacun des deux sexes, les résultats
présentés ci-après. Le tracé labellé
"produit ou marque" représente
l'ensemble des répondants ayant
identifié partiellement ou totalement la
prestation publicitaire de la célébrité.
Les trois autres tracés sont totalement
indépendants les uns des autres.
la marque, que LES POLYSIANES à la
célébrité.
Et si l'on poursuit l'analyse en
observant maintenant les résultats
obtenus à la question 5.M, pour
connaître le lien fait par les répondants
entre le nom de la célébrité et une
marque et/ou un produit, on obtient
Ensemble des répondants
identification
du
produit
noms proposés
Identification
de la
marque
Identification de
la marque et du
produit
Identification de
la marque ou du
produit
Isabella Rossellini
3,51%
46,49%
10,53%
60,53%
Winston Churchill
8,77%
25,44%
16,67%
50,88%
Franklin Roosevelt
6,14%
14,04%
9,65%
29,82%
Gérard Lanvin
10,53%
13,16%
10,53%
34,21%
Jenna de Rosnay
21,05%
14,04%
5,26%
40,35%
Gabriela Sabatini
1,75%
14,91%
10,53%
27,19%
Ensemble des répondants
70%
60%
50%
Produit
40%
Marque
Produit + marque
30%
Produit ou marque
20%
10%
0%
Isabella
Rossellini
Winston
Churchill
Franklin
Roosevelt
Gérard
Lanvin
Jenna de
Rosnay
Gabriela
Sabatini
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326
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Ces nouveaux résultats nous
enseignent que dans l'ensemble - sauf
cas de la publicité pour les cosmétiques
LES POLYSIANES - les répondants ont
plus de facilité à identifier la marque
que le produit auquel se rapporte
précisément la publicité. Attention, il
est toutefois nécessaire de considérer
les résultats obtenus sur le nom
d'Isabella ROSSELLINI avec prudence.
Bien que l'intitulé de la question
spécifiait que celle-ci portait sur le
contenu du magazine, rappelons
qu'Isabella ROSSELLINI est le
mannequin vedette des produits
LANCÔME depuis plusieurs années.
Comment dès lors ne pas retenir ce
biais pour contribuer à expliquer en
partie les très bons résultats du triplé
Isabella ROSSELLINI / cosmétiques /
LANCÔME.
les différences sont moins importantes
d'une célébrité à l'autre. Et l'on
observera avec intérêt les résultats
obtenus sur le nom de Jenna de
ROSNAY et sur celui de Gabriela
SABATINI, qui dans l'ensemble
(produit ou marque) surpassent
largement ceux obtenus jusqu'à présent
respectivement par les marques LES
POLYSIANES et HOLLYWOOD. Cela
pourrait signifier que la notoriété
spontanée de Jenna de ROSNAY - voire
son identification physique - reste à
parfaire, mais que son association avec
des cosmétiques et même directement
avec la marque LES POLYSIANES est
déjà assimilée par l'ensemble des
répondants. Dans le cas de Gabriela
SABATINI, la publicité - jeu concours répondait
à
une
conception
particulière.
On remarquera également qu'en
ce qui concerne l'identification
complète "type de produit + marque",
Si l'on étudie à présent ces
mêmes résultats, mais au regard de
chacun des deux sexes :
Groupe de garçons
noms proposés
identification
du
produit
Identification
de la
marque
Identification de
la marque et du
produit
Identification de
la marque ou du
produit
Isabella Rossellini
4,35%
39,13%
6,52%
50,00%
Winston Churchill
4,35%
34,78%
30,43%
69,57%
Franklin Roosevelt
2,17%
19,57%
19,57%
41,30%
Gérard Lanvin
15,22%
8,70%
6,52%
30,43%
Jenna de Rosnay
23,91%
13,04%
-
36,96%
Gabriela Sabatini
-
13,04%
13,04%
26,09%
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327
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Groupe des garçons
70%
60%
50%
Produit
40%
Marque
Produit + marque
30%
Produit ou marque
20%
10%
0%
Isabella
Rossellini
Winston
Churchill
Franklin
Roosevelt
Gérard
Lanvin
Jenna de
Rosnay
Maintenant,
la
meilleure
identification du produit et/ou de la
marque par le groupe des filles peut
paraître très compréhensible au regard
de la nature du produit et de sa cible
naturelle. Cette logique peut également
s'appliquer aux triplés Jenna de
ROSNAY / cosmétiques / LES
POLYSIANES et Gérard LANVIN /
lingerie féminine / VARIANCE.
Toutefois, on retiendra avec intérêt que
les différences entre les deux sexes sont
ici beaucoup plus faibles, bien qu'une
meilleure identification soit à mettre
une nouvelle fois au bénéfice du groupe
des filles.
Concernant
plus
particulièrement
la
marque
1
VARIANCE , on notera cependant que
__________________
1 - Les répondants ayant correctement identifié le produit
et la marque se rapportant au nom de la célébrité ne
seront pas retenus dans ce cas, car pouvant être ajoutés
Gabriela
Sabatini
le groupe des garçons identifia
proportionnellement plus facilement le
produit (15,22%) que la marque
(8,70%), alors que le groupe de filles
identifia plus facilement la marque
(16,18%) elle-même que le produit
(7,35%). On peut émettre à nouveau
l'idée que la population masculine
n'étant pas directement visée par le
produit - même si 10,87% des garçons
avaient déclaré à la question 4.A, avoir
déjà acheté un produit de la marque
auparavant - elle aura sans doute porté
son attention sur la publicité en
général, sans attacher une grande
importance à l'annonceur lui-même.
Alors que dans le cas de la population
féminine - pour laquelle 36,76%
déclaraient avoir déjà acheté, et 39,71%
avoir déjà utilisé un produit de la
marque - l'identification de la marque
VARIANCE, voire de la marque et du
aussi bien au groupe identificateur de produit seulement,
qu'à celui n'ayant identifié que la marque.
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328
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
produit était plus naturelle, donc plus
facile.
Groupe de filles
noms proposés
identification
du
produit
Identification
de la
marque
Identification de
la marque et du
produit
Identification de
la marque ou du
produit
Isabella Rossellini
2,94%
51,47%
13,24%
67,65%
Winston Churchill
11,76%
19,12%
7,35%
38,24%
Franklin Roosevelt
8,82%
10,29%
2,94%
22,06%
Gérard Lanvin
7,35%
16,18%
13,24%
36,76%
Jenna de Rosnay
19,12%
14,71%
8,82%
42,65%
Gabriela Sabatini
2,94%
16,18%
8,82%
27,94%
Groupe des filles
70%
60%
50%
Produit
40%
Marque
Produit + marque
30%
Produit ou marque
20%
10%
0%
Isabella
Rossellini
Winston
Churchill
Franklin
Roosevelt
Gérard
Lanvin
Jenna de
Rosnay
En revanche les moins bons
résultats du souvenir spontané de
personnages connus par les filles en ce
qui concerne Winston CHURCHILL et
Franklin ROOSEVELT pour les
montres
BREITLING,
sont
ici
confirmés par une bien moins bonne
identification du produit ou de la
Gabriela
Sabatini
marque par les filles que par les
garçons. Quant à l'identification
Gabriela SABATINI / HOLLYWOOD /
Chewing-gum ou concours, elle récolte
une nouvelle fois de mauvais résultats,
sans qu'une différence importante soit
constatée entre le groupe des filles et
celui des garçons.
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329
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Complétons cette analyse en
observant maintenant les résultats du
sentiment
de
sympathie1
des
répondants à l'égard des célébrités
proposées dans le cadre de la question
5.A.
__________________
1 - A l'instar des autres échelles utilisées jusqu'à présent,
un coefficient 2 a été affecté à chaque réponse "très
sympathique", 1 à chaque réponse "sympathique", -1 à
chaque réponse "pas sympathique", -2 à chaque réponse
"pas du tout sympathique", et le coefficient 0 aux autres
réponses. Par ailleurs, nous ne retiendrons pour l'analyse,
que les six célébrités réellement présentes dans les pages
du support. Les cas additionnels de Florence ARTHAUD,
Johnny HALLYDAY et Nathalie BOURRIEZ ne seront
considérés que dans le cadre des classsements, pour
permettre une vue d'ensemble.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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330
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Ensemble des répondants
Isabella
Rossellini
Winston
Churchill
Franklin
Roosevelt
Gérard
Lanvin
Jenna de
Rosnay
Gabriela
Sabatini
Inconnu(e)
10,53%
1,75%
0,88%
1,75%
1,75%
-
Très sympathique
47,37%
9,65%
7,89%
37,72%
50,00%
1,75%
Sympathique
29,82%
45,61%
35,96%
37,72%
35,09%
24,56%
Sans opinion
12,28%
34,21%
50,00%
10,53%
6,14%
24,56%
Pas sympathique
-
7,02%
4,39%
11,40%
6,14%
38,60%
Pas du tout sympathique
-
1,75%
0,88%
0,88%
0,88%
10,53%
Nous pouvons très simplement
utiliser une représentation graphique
pour visualiser la dispersion ou au
contraire la concentration de ce
sentiment à l'égard de chaque célébrité.
De façon à rendre l'analyse des
graphiques présentés ci-dessous, plus
aisée, les motifs ont été choisis de
manière à lier l'intensité du sentiment
des répondants à la densité des motifs.
Plus les motifs sont clairs, plus la
célébrité paraît sympathique.
Inconnu(e)
Très sympathique
Sympathique
Sans opinion
Pas sympathique
Pas du tout sympathique
Sentiment de l'ensemble des répondants
Sentiment de l'ensemble des répondants
à l'égard de Isabella ROSSELLINI
à l'égard de Winston CHURCHILL
12%
11%
7%
2%
2%
10%
34%
30%
47%
45%
Variance : 0,69
Variance : 0,64
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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331
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Sentiment de l'ensemble des répondants
Sentiment de l'ensemble des répondants
à l'égard de Franklin ROOSEVELT
à l'égard de Gérard LANVIN
1%
4%
1%
8%
11%
1%
2%
11%
37%
36%
50%
38%
Variance : 1,04
Variance : 0,55
Sentiment de l'ensemble des répondants
Sentiment de l'ensemble des répondants
à l'égard de Jenna de ROSNAY
à l'égard de Gabriela SABATINI
6%
6%
1% 2%
10%
2%
25%
50%
35%
38%
25%
Variance : 1,00
Variance : 0,83
Soit
à
l'observation
des
graphiques, soit en considérant le
calcul de la variance présenté pour
chacune des célébrités considérées, on
constate que c'est le personnage de
Franklin ROOSEVELT qui génère le
sentiment le plus homogène de la part
des répondants - en raison notamment
de l'influence de la part importante de
"sans opinion" : 50% - ; et qu'à l'opposé,
Gérard LANVIN semble être la
célébrité sur laquelle les sentiments
sont les plus partagés.
Toutefois, bien que très utiles
pour nous autoriser à juger de la
dispersion des sentiments portés à ces
diverses célébrités, ces informations ne
nous permettent pas de savoir par
exemple qu'elle est la célébrité la plus
sympathique aux yeux des répondants.
Pour reprendre le cas caractéristique de
Franklin ROOSEVELT pour lequel le
sentiment des répondants semblait le
plus homogène, si l'on observe le
contenu du graphique, on se rend
immédiatement compte que le
sentiment majoritaire des répondants
est justement de ne pas avoir d'opinion
à son sujet. D'où l'intérêt de calculer un
indice de sympathie pour obtenir un
classement des différentes célébrités.
On obtient alors les résultats suivants :
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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332
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Ensemble des répondants
Jenna de
ROSNAY
145
Isabella
ROSSELLINI
142
Gérard
LANVIN
114
Gabriela
SABATINI
106
Florence
ARTHAUD
68
Winston
CHURCHILL
62
Franklin
ROOSEVELT
52
Nathalie
BOURRIEZ
4
Johnny
HALLYDAY
-36
-50
0
50
100
150
Indice de sympathie
Echelle
Pas du tout
Pas
garçons
sympathique
sympathique
Nombre de points
-115 et moins
de 0 à -114
Jenna de ROSNAY et Isabella
ROSSELLINI furent perçues par les
éléments de l'échantillon comme étant
très sympathiques, Gérard LANVIN,
Gabriela
SABATINI,
Florence
ARTHAUD, Winston CHURCHILL et
Franklin ROOSEVELT comme étant
sympathiques - Gérard LANVIN étant
à la limite du très sympathique. On
notera que la célébrité inventée
recueille néanmoins 4 points, 2 filles et
un garçon pensant la connaître. Le fait
que Winston CHURCHILL obtienne
un meilleur indice de sympathie que
sympathique
Très
sympathique
de 0 à 114
115 et plus
Franklin ROOSEVELT, s'explique en
partie par la meilleure connaissance a
priori du personnage lui-même, telle
qu'elle fut mise en évidence au cours
des
résultats
aux
questions
précédentes. On rappellera que le nom
du chanteur Johnny HALLYDAY1 avait
__________________
1 - Le choix de ces deux célébrités avait été dicté par le
fait qu'un film publicitaire les utilisant était exploité à la
télévision, au moment de l'étude (Florence ARTHAUD /
TAILLEFINE ; Johnny HALLYDAY / LEGAL).
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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333
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
été ajouté à dessein, mais il ne nous
intéresse pas particulièrement ici. On
remarquera cependant avec surprise,
l'indice de sympathie extrêmement
mauvais obtenu par la star française du
rock and roll, auprès de ce jeune public.
Si l'on pratique les mêmes
calculs pour chacun des deux sexes, on
obtient les résultats présentés ci-après.
En ce qui concerne tout d'abord
l'analyse de la dispersion :
Isabella
Winston
Franklin
Gérard
Jenna de
Gabriela
Rossellini
Churchill
Roosevelt
Lanvin
Rosnay
Sabatini
8,82%
2,94%
1,47%
2,94%
1,47%
2,94%
Très sympathique
51,47%
8,82%
7,35%
41,18%
39,71%
20,59%
Sympathique
30,88%
39,71%
30,88%
30,88%
7,35%
42,65%
Sans opinion
8,82%
38,24%
55,88%
13,24%
39,71%
25,00%
Pas sympathique
-
8,82%
4,41%
10,29%
10,29%
4,41%
Pas du tout sympathique
-
1,47%
-
1,47%
1,47%
4,41%
Groupe des filles
Inconnu(e)
Isabella
Winston
Franklin
Gérard
Jenna de
Gabriela
Rossellini
Churchill
Roosevelt
Lanvin
Rosnay
Sabatini
Inconnu(e)
13,04%
-
-
-
2,17%
-
Très sympathique
41,30%
10,87%
8,70%
32,61%
65,22%
47,83%
Sympathique
28,26%
54,35%
43,48%
47,83%
4,35%
39,13%
Sans opinion
17,39%
28,26%
41,30%
6,52%
28,26%
6,52%
Pas sympathique
-
4,35%
4,35%
13,04%
-
4,35%
Pas du tout sympathique
-
2,17%
2,17%
-
-
2,17%
Groupe des garçons
Ce qui permet la construction
des graphiques suivants :
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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334
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Sentiment du groupe des filles
Sentiment du groupe des garçons
à l'égard de Isabella ROSSELLINI
à l'égard de Isabella ROSSELLINI
9%
9%
13%
17%
31%
51%
Variance : 0,58
28%
42%
Variance : 0,71
Sentiment du groupe des filles
Sentiment du groupe des garçons
à l'égard de Winston CHURCHILL
à l'égard de Winston CHURCHILL
9%
1% 3%
4%
9%
2%
11%
28%
38%
40%
55%
Variance : 0,69
Variance : 0,65
Sentiment du groupe des filles
Sentiment du groupe des garçons
à l'égard de Franklin ROOSEVELT
à l'égard de Franklin ROOSEVELT
4% 1%
4%
7%
2%
9%
31%
41%
44%
57%
Variance : 0,48
Variance : 0,64
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
335
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Sentiment du groupe des filles
Sentiment du groupe des garçons
à l'égard de Gérard LANVIN
à l'égard de Gérard LANVIN
10%
1% 3%
13%
33%
7%
13%
42%
31%
47%
Variance : 1,12
Variance : 0,91
Sentiment du groupe des filles
Sentiment du groupe des garçons
à l'égard de Jenna de ROSNAY
à l'égard de Jenna de ROSNAY
10%
1% 1%
2%
28%
41%
4%
40%
66%
7%
Variance : 1,03
Variance : 0,37
Sentiment du groupe des filles
Sentiment du groupe des garçons
à l'égard de Gabriela SABATINI
à l'égard de Gabriela SABATINI
4%
4% 3%
7%
21%
4%
2%
25%
48%
39%
43%
Variance : 0,97
Variance : 0,84
L'analyse de la dispersion du
sentiment porté à chacune des
célébrités au regard du sexe du
répondant, confirme la mise en valeur
d'un sentiment assez hétérogène dans
l'ensemble, pour chacun des deux
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
336
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
d'une part, et de Jenna de ROSNAY
d'autre part.
sexes. Les deux célébrités obtenant le
sentiment "le plus unanime" étant
Franklin ROOSEVELT de la part du
groupe des filles et Jenna de ROSNAY
de la part du groupe des garçons. On
remarquera à l'opposé, le sentiment
très dispersé de la part du groupe des
filles à l'égard de Gérard LANVIN
Mais là aussi, il semblait
intéressant de compléter cette analyse,
avec un calcul de l'indice de sympathie
porté à ces célébrités par chacun des
deux sexes. On obtient les classements
suivants :
Groupe des filles
Isabella
ROSSELLINI
91
Jenna de
ROSNAY
72
Gérard
LANVIN
68
Gabriela
SABATINI
48
Florence
ARTHAUD
33
Winston
CHURCHILL
31
Franklin
ROOSEVELT
28
Nathalie
BOURRIEZ
2
Johnny
HALLYDAY
-40
-27
-20
0
20
40
60
80
100
Indice de sympathie
Echelle
filles
Pas du tout
sympathique
Pas
sympathique
sympathique
Très
sympathique
Nombre de points
-68 et moins
de 0 à -68
de 0 à 68
69 et plus
L'analyse des indices de
sympathie en fonction du sexe du
répondant procure un bas de
classement similaire pour les garçons et
les filles. En revanche, les quatre
premières places sont différentes d'un
sexe à l'autre. Gérard LANVIN est dans
les deux cas à la limite du sympathique
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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337
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Concernant la première place en indice
de sympathie, Isabella ROSSELLINI se
détache nettement chez les filles, alors
que les points obtenus par le groupe
des garçons, y positionne la
véliplanchiste Jenna de ROSNAY.
et du très sympathique. Mais Gabriela
SABATINI
est
trouvée
très
sympathique par les garçons ce qui la
positionne à la deuxième place, alors
que le groupe des filles la trouve
seulement sympathique, ce qui la
positionne à la quatrième place.
Groupe des garçons
Jenna de
ROSNAY
73
Gabriela
SABATINI
58
Isabella
ROSSELLINI
51
Gérard
LANVIN
46
Florence
ARTHAUD
35
Winston
CHURCHILL
31
Franklin
ROOSEVELT
24
Nathalie
BOURRIEZ
2
Johnny
HALLYDAY
-20
-9
0
20
40
60
80
Indice de sympathie
Echelle
garçons
Pas du tout
sympathique
Pas
sympathique
sympathique
Très
sympathique
Nombre de points
-47 et moins
de 0 à -46
de 0 à 46
47 et plus
Il était également possible
d'affiner ces résultats en les croisant
avec ceux obtenus aux questions de
souvenir spontané et de souvenir
assisté de la publicité de la marque
correspondante, pour savoir si le
sentiment à l'égard d'une célébrité
influençait systématiquement l'un
et/ou l'autre de ces souvenirs.
On obtient alors le tableau
suivant :
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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338
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Isabella
Winston
Franklin
Gérard
Jenna de
Gabriela
Rossellini
Churchill
Roosevelt
Lanvin
Rosnay
Sabatini
-
-
-
-
-
-
Très sympathique
85,00%
-
16,67%
60,00%
100,00%
-
Sympathique
15,00%
66,67%
33,33%
-
-
100,00%
Sans opinion
-
33,33%
50,00%
40,00%
-
-
Pas sympathique
-
-
-
-
-
-
Pas du tout sympathique
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
Très sympathique
58,33%
14,29%
14,29%
20,00%
100,00%
100,00%
Sympathique
33,33%
64,29%
57,14%
80,00%
-
-
Sans opinion
8,33%
14,29%
28,57%
-
-
-
Pas sympathique
-
7,14%
-
-
-
-
Pas du tout sympathique
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
Très sympathique
75,00%
10,00%
15,00%
40,00%
100,00%
75,00%
Sympathique
21,88%
65,00%
50,00%
40,00%
-
25,00%
Sans opinion
3,13%
20,00%
35,00%
20,00%
-
-
Pas sympathique
-
5,00%
-
-
-
-
Pas du tout sympathique
-
-
-
-
-
-
Sentiment à l'égard de la
célébrité si souvenir spontané
de la publicité correspondante
Filles
Inconnu
Garçons
Inconnu
Ensemble
Inconnu
La même analyse pratiquée sur
les résultats du souvenir assisté permet
la construction du tableau suivant :
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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339
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Isabella
Winston
Franklin
Gérard
Jenna de
Gabriela
Rossellini
Churchill
Roosevelt
Lanvin
Rosnay
Sabatini
7,14%
-
-
4,55%
3,45%
-
Très sympathique
58,93%
2,78%
5,56%
52,27%
41,38%
16,67%
Sympathique
26,79%
41,67%
25,00%
20,45%
48,28%
55,56%
Sans opinion
7,14%
47,22%
63,89%
9,09%
6,90%
16,67%
Pas sympathique
-
8,33%
5,56%
11,36%
-
5,56%
Pas du tout sympathique
-
-
-
2,27%
-
5,56%
8,51%
-
-
-
-
-
Très sympathique
34,04%
9,30%
9,30%
37,04%
76,47%
52,00%
Sympathique
27,66%
53,49%
44,19%
40,74%
23,53%
44,00%
Sans opinion
29,79%
30,23%
41,86%
11,11%
-
4,00%
Pas sympathique
-
4,65%
2,33%
11,11%
-
-
Pas du tout sympathique
-
2,33%
2,33%
-
-
-
7,77%
-
-
2,82%
2,17%
-
Très sympathique
47,57%
6,33%
7,59%
46,48%
54,35%
21,92%
Sympathique
27,18%
48,10%
35,44%
28,17%
39,13%
28,77%
Sans opinion
17,48%
37,97%
51,90%
9,86%
4,35%
5,48%
Pas sympathique
-
6,33%
3,80%
11,27%
-
1,37%
Pas du tout sympathique
-
1,27%
1,27%
1,41%
-
1,37%
Sentiment à l'égard de la
célébrité si souvenir assisté
de la publicité correspondante
Filles
Inconnu
Garçons
Inconnu
Ensemble
Inconnu
On
peut
obtenir
une
interprétation plus rapide de ces
résultats à l'aide des graphiques
présentés ci-dessous. Ils illustrent le
sentiment des seuls répondants ayant
eu le souvenir - spontané : graphique de
gauche, et assisté : graphique de droite
- d'avoir vu une publicité pour la
marque correspondant à la célébrité
considérée.
Pour
chacun
des
graphiques, nous avons calculé la
valeur de la variance1 correspondant à
chaque fois là-encore à la l'analyse de la
"dispersion des sentiments" à l'égard
des célébrités considérées.
__________________
1 - Attention, le calcul de la variance est donné ici à
simple titre d'illustration dans le cas du souvenir
spontané d'avoir vu une publicité pour les marques LES
POLYSIANES et HOLLYWOOD, car le nombre de
réponses obtenu est trop peu important pour rendre
cette appréciation significative.
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340
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Nous utiliserons les mêmes
motifs que précédemment pour les
représentations
graphiques,
pour
faciliter d'éventuelles comparaisons.
Ainsi, plus le motif des différents
secteurs est clair, plus la célébrité est
jugée sympathique.
Inconnu(e)
Très sympathique
Sympathique
Sans opinion
Pas sympathique
Pas du tout sympathique
Sentiment à l'égard de Isabella ROSSELLINI, des répondants
Sentiment à l'égard de Isabella ROSSELLINI, des répondants
qui ont eu le souvenir spontané de la publicité LANCÔME
qui ont eu le souvenir assisté de la publicité LANCÔME
3%
17%
22%
8%
27%
48%
75%
Variance : 0,57
Variance : 0,26
Alors que l'indice général de
sympathie du top-model Isabella
ROSSELLINI était de 142 points, les
répondants
ayant
identifié
spontanément la marque LANCÔME
lui accordent un indice de sympathie
de 195,94 points1 et les répondants
ayant eu le souvenir assisté de la
marque, un indice de sympathie de
154,45 points. Cela signifie que les
répondants ayant identifié la publicité
LANCÔME de manière assistée ou
__________________
spontanée, éprouvaient un sentiment
de sympathie plus grand à l'égard
d'Isabella ROSSELLINI.
Quant au calcul de la variance, il
fournit - quel que soit le souvenir
considéré - des valeurs moins élevées
que pour l'ensemble des répondants
(0,64). Cela signifie que le sentiment à
l'égard d'Isabella ROSSELLINI, des
éléments considérés, était ici à chaque
fois plus homogène, que celui de
l'ensemble des répondants, ce qui en
définitive peut sembler logique.
1 - De manière à permettre la comparaison, cet indice fut
à chaque fois là-aussi, ramené proportionnellement au
nombre de répondants considérés par rapport au nombre
total de répondants.
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341
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Sentiment à l'égard de Winston CHURCHILL, des répondants
Sentiment à l'égard de Winston CHURCHILL, des répondants
qui ont eu le souvenir spontané de la publicité BREITLING
qui ont eu le souvenir assisté de la publicité BREITLING
5%
6%
10%
1%
6%
20%
38%
49%
65%
Variance : 0,46
Variance : 0,52
Le personnage de Winston
CHURCHILL avait obtenu un indice
général de sympathie de 62 points.
L'indice représentant le sentiment des
répondants ayant eu le souvenir
spontané de la marque est de 91,20
points et celui des répondants ayant eu
le souvenir assisté de la marque : 59,16
points. On remarquera ici avec intérêt
que si le sentiment des répondants
ayant eu le souvenir spontané de la
publicité BRETLING, à l'égard de
Winston CHURCHILL est plus
favorable que celui de l'ensemble des
répondants, ce n'est pas le cas de ceux
qui eurent le souvenir assisté de la
marque.
L'analyse de la variance nous
procure une fois de plus des résultats
moins élevés que pour l'ensemble des
répondants (0,69) et donc un
sentiment à l'égard du personnage dans les deux cas -, là aussi plus
homogène que pour l'ensemble des
répondants.
Sentiment à l'égard de Franklin ROOSEVELT, des répondants
Sentiment à l'égard de Franklin ROOSEVELT, des répondants
qui ont eu le souvenir spontané de la publicité BREITLING
qui ont eu le souvenir assisté de la publicité BREITLING
4%
15%
1%
8%
35%
35%
52%
50%
Variance : 0,46
Variance : 0,55
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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342
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
L'indice général de sympathie à
l'égard de Franklin ROOSEVELT était
de 52 points. Le sentiment à l'égard du
même personnage, des répondants
ayant eu le souvenir spontané de la
marque est de 91,20 points - soit le
même que celui obtenu par Winston
CHURCHILL. Le sentiment des
répondants ayant eu le souvenir assisté
de la marque est de 50,51 points. On
retrouve donc la même situation que
pour le personnage célèbre précédent,
en ce sens que les répondants ayant eu
le souvenir assisté de la marque, ont, à
l'égard de Franklin ROOSEVELT, un
sentiment plus défavorable
l'ensemble de répondants.
que
A
l'instar
de
Winston
CHURCHILL, le calcul de la variance à
propos du sentiment à l'égard de
Franklin ROOSEVELT de la part des
répondants considérés génère des
valeurs une nouvelle fois inférieures ou
égales à celle obtenue pour l'ensemble
des répondants (0,55) à l'égard du
même personnage. Le sentiment des
répondants considérés ici est donc plus
homogène.
Sentiment à l'égard de Gérard LANVIN, des répondants qui ont
Sentiment à l'égard de Gérard LANVIN, des répondants qui ont
eu le souvenir spontané de la publicité VARIANCE
eu le souvenir assisté de la publicité VARIANCE
11%
20%
1%
3%
10%
40%
47%
28%
40%
Variance : 0,56
Variance : 1,23
Le sentiment général à l'égard de
l'acteur Gérard LANVIN était de 114
points. Les répondants ayant eu le
souvenir spontané de la marque
éprouvent pour lui un sentiment égal à
102,60 points. Quant aux répondants
ayant eu le souvenir assisté de la
marque, ils éprouvent pour lui un
sentiment égal à 122,01 points. Le cas de
l'association Gérard LANVIN /
VARIANCE est donc l'inverse des deux
précédents. Ici, l'acteur bénéficie d'un
sentiment plus favorable de la part de
l'ensemble des répondants, que de la
part de ceux qui eurent le souvenir
spontané de la marque. Alors que ce
sentiment est plus favorable de la part
des répondants qui eurent le souvenir
assisté de la marque, que celui de
l'ensemble des répondants.
Au sujet du calcul de la variance,
seuls les répondants ayant eu le
souvenir spontané de la marque ont un
souvenir plus homogène, à l'égard de
l'acteur, que l'ensemble des répondants
(1,04). Bien que toujours favorable, le
sentiment à l'égard de Gérard LANVIN
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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343
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
étant beaucoup plus partagé au sein
des répondants ayant eu le souvenir
assisté de la marque.
Sentiment à l'égard de Jenna de ROSNAY, des répondants qui
Sentiment à l'égard de Jenna de ROSNAY, des répondants qui
ont eu le souvenir spontané de la publicité LES POLYSIANES
ont eu le souvenir assisté de la publicité LES POLYSIANES
4%
2%
39%
55%
100%
Variance : 0
Variance : 0,38
Alors que Jenna de ROSNAY
obtenait la première place du
classement général pour l'ensemble des
répondants avec un indice égale à 145
points, elle obtient de la part des
répondants ayant eu le souvenir
spontané de la marque, un indice égale
à 228 points. En revanche l'indice de
sympathie
obtenu
auprès
des
répondants ayant eu le souvenir assisté
de la marque redescend - bien que
toujours très élevé - à 173,48. Mais l'on
rappellera ici - comme pour Gabriela
SABATINI et HOLLYWOOD - que les
répondants ayant eu le souvenir
spontané de la marque étaient peu
nombreux.
La valeur de la variance
concernant les répondants ayant eu le
souvenir assisté de la marque est
sensiblement inférieure à celle de
l'ensemble des répondant (0,83),
exprimant de ce fait un sentiment plus
homogène à l'égard de Jenna de
ROSNAY, de la part des éléments
considérés.
Sentiment à l'égard de Gabriela SABATINI, des répondants qui
Sentiment à l'égard de Gabriela SABATINI, des répondants qui
ont eu le souvenir spontané de la publicité HOLLYWOOD
ont eu le souvenir assisté de la publicité HOLLYWOOD
9%
25%
2% 2%
37%
75%
Variance : 0,19
50%
Variance : 0,83
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344
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
L'indice général de sympathie à
l'égard de Gabriela SABATINI pour
l'ensemble des répondants était égal à
106 points. Le même indice pour les
répondants
ayant
identifié
spontanément la marque est égal à
199,50 points, et celui calculé pour les
répondants ayant eu le souvenir assisté
de la marque, égal à 137,86 points. Ce
qui exprime un sentiment évoluant de
la même manière que pour Jenna de
ROSNAY, avec deux indices supérieurs
à celui obtenu pour l'ensemble des
répondants ; avec toutefois pour les
répondants ayant eu le souvenir
spontané, un indice inférieur à celui de
ceux ayant eu un souvenir assisté de la
marque. Enfin, on retiendra également
que le sentiment à l'égard de la joueuse
de tennis était plus homogène chez les
répondants considérés dans chaque cas
ici, que pour l'ensemble des personnes
soumises à l'enquête (1,00).
A l'exception de l'acteur Gérard
LANVIN, le sentiment général des
répondants est plus favorable à l'égard
de la célébrité chez les répondants qui
ont eu le souvenir spontané de la
marque, que chez ceux qui ont eu le
souvenir assisté de cette même marque.
Malheureusement le contre-exemple de
Gérard LANVIN pour VARIANCE
notamment, nous interdit de tirer toute
conclusion ici quant à un impact
supérieur d'une publicité utilisant une
célébrité lorsque celle-ci évoque un
sentiment de sympathie chez le lecteur.
Nous rappellerons toutefois par
ailleurs, qu'il s'agissait également de la
seule célébrité pour laquelle le calcul de
la variance donnait une valeur plus
élevée pour les répondants ayant eu le
souvenir assisté de la marque que pour
l'ensemble des répondants.
Concernant toujours l'analyse de
la variance, l'autre observation
concernant l'ensemble des répondants
à propos de cette analyse croisée, réside
dans la plus grande hétérogénéité des
sentiments portés à l'égard des
célébrités, lorsque l'on considère le
souvenir assisté au regard du souvenir
spontané. Cette observation étant en
partie fondée sur le fait qu'un plus
grand nombre de répondants était alors
logiquement considéré à chaque fois.
En revanche, d'une célébrité à
l'autre, l'analyse de la variance nous
procure une information intéressante
sur cette hétérogénéité du sentiment.
En effet, il apparaît également très
clairement sur les graphiques, que
certaines célébrités provoquent un
sentiment beaucoup plus partagé que
d'autres, à leur égard. A l'étude de
l'ensemble des répondants ayant eu
respectivement le souvenir de la
marque, c'est l'acteur Gérard LANVIN
- variance de 1,23 pour les répondants
qui ont eu le souvenir spontané - qui
bien que bénéficiant d'un sentiment
positif dans l'ensemble, génère la plus
grande hétérogénéité. Alors que c'est la
véliplanchiste Jenna de ROSNAY qui
bénéficie du sentiment le plus
homogène, chez les répondants ayant
eu le souvenir assisté de la marque.
Cette importance de la valeur de
la variance, notamment dans le cas de
l'acteur Gérard LANVIN, nous incita à
construire
des
représentations
graphiques et à analyser les indices de
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345
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
sympathie, pour chacun des deux sexes
afin de vérifier si le sexe pouvait être un
facteur expliquant ces variations1 :
__________________
1 - Nous conserverons la présentation utilisée jusqu'à lors,
en présentant sur les graphiques de gauche, les
répondants ayant eu le souvenir spontané de la marque et
à droite, ceux qui en eurent le souvenir assisté. Par
ailleurs, les graphiques concernant le groupe des filles
précèderont toujours ceux concernant le groupe des
garçons.
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Sentiment à l'égard de Isabella ROSSELINI, des filles qui ont eu
Sentiment à l'égard de Isabella ROSSELINI, des filles qui ont eu
le souvenir spontané de la publicité LANCÔME
le souvenir assisté de la publicité LANCÔME
7%
15%
7%
27%
59%
85%
Variance : 0,13
Variance : 0,50
Sentiment à l'égard de Isabella ROSSELLINI, des garçons qui
Sentiment à l'égard de Isabella ROSSELLINI, des garçons qui
ont eu le souvenir spontané de la publicité LANCÔME
ont eu le souvenir assisté de la publicité LANCÔME
8%
9%
30%
33%
33%
59%
28%
Variance : 0,42
Variance : 0,68
Concernant
l'association
Isabella ROSSELLINI / LANCÔME, on
remarque que le sentiment à l'égard du
top-model, des garçons ayant eu le
souvenir - spontané ou assisté - d'avoir
vu une publicité de la marque est
beaucoup moins homogène que celui
du groupe des filles. Dans les deux cas
la variance est plus élevée. En revanche,
que ce soit le groupe des filles ou celui
des garçons, pour les répondants ayant
eu le souvenir spontané (filles : 125,80
points ; garçons : 69 points) ou le
souvenir assisté (filles : 98,36 points ;
garçons : 55,95 points) de la marque,
l'indice de sympathie porté à Isabella
ROSSELLINI est à chaque fois
respectivement plus favorable que celui
de l'ensemble des filles (91 points) et
que celui de l'ensemble des garçons (51
points) .
Concernant l'analyse de la
variance, pour chacun des deux sexes
et quelque soit le souvenir considéré,
les valeurs de la variance sont à chaque
fois inférieures à celles obtenues pour le
groupe des filles d'une part (0,58) et
pour le groupe des garçons d'autre part
(0,71).
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347
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Sentiment à l'égard de Winston CHURCHILL, des filles qui ont
Sentiment à l'égard de Winston CHURCHILL, des filles qui ont
eu le souvenir spontané de la publicité BREITLING
eu le souvenir assisté de la publicité BREITLING
3%
8%
33%
42%
67%
Variance : 0,22
47%
Variance : 0,46
Sentiment à l'égard de Winston CHURCHILL, des garçons qui
Sentiment à l'égard de Winston CHURCHILL, des garçons qui
ont eu le souvenir spontané de la publicité BREITLING
ont eu le souvenir assisté de la publicité BREITLING
7%
5%
14%
2%
9%
14%
30%
54%
65%
Variance : 0,55
Variance : 0,65
A l'instar de l'association
étudiée précédemment, le sentiment à
l'égard du personnage de Winston
CHURCHILL est plus homogène chez
les filles que chez les garçons, pour
lesquels le calcul de la variance donne
des résultats plus élevés.
garçons (31 points). Mais cet indice
exprime d'un autre côté, un sentiment
moins favorable de la part des éléments
ayant eu le souvenir assisté (filles :
26,44 points ; garçons : 28,88 points) de
la marque, que pour l'ensemble des
répondants de chacun des deux sexes.
En revanche, l'indice de
sympathie est plus favorable pour
chacun des sexes pour les éléments
ayant eu le souvenir spontané de la
marque (filles : 45,33 points ; garçons :
39,43 points) que pour l'ensemble des
filles (31 points) ou pour l'ensemble des
A l'exemple de l'analyse de la
célébrité précédente, le sentiment des
filles comme celui des garçons
considérés ici est plus homogène, que
celui de l'ensemble des filles d'une part
(variance : 0,69) et que l'ensemble des
garçons (variance : 0,65) d'autre part.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
348
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Sentiment à l'égard de Franklin ROOSEVELT, des filles qui ont
Sentiment à l'égard de Franklin ROOSEVELT, des filles qui ont
eu le souvenir spontané de la publicité BREITLING
eu le souvenir assisté de la publicité BREITLING
6%
17%
6%
25%
50%
33%
Variance : 0,56
63%
Variance : 0,43
Sentiment à l'égard de Franklin ROOSEVELT, des garçons qui
Sentiment à l'égard de Franklin ROOSEVELT, des garçons qui
ont eu le souvenir spontané de la publicité BREITLING
ont eu le souvenir assisté de la publicité BREITLING
2%
14%
2%
9%
29%
42%
45%
57%
Variance : 0,41
Variance : 0,62
Concernant le personnage de
Franklin ROOSEVELT si le sentiment
des garçons est toujours plus
hétérogène que celui des filles, pour les
éléments ayant eu le souvenir assisté de
la marque, en revanche c'est le
sentiment des filles à l'égard du
personnage qui est le plus hétérogène si
l'on considère les éléments ayant eu le
souvenir spontané de la marque.
Cas
intéressant
sur
la
comparaison des indices de sympathie,
les indices obtenus par Franklin
ROOSEVELT des filles ayant eu le
souvenir spontané (33,67 points) de la
marque, comme de celles ayant eu le
souvenir assisté (20,78 points) de cette
même marque est moins favorable que
celui de l'ensemble des filles à l'égard
du personnage (28 points). Alors que
pour le groupe des garçons on constate
purement et simplement l'inverse. En
ce sens, le sentiment de l'ensemble des
garçons (24 points) est moins favorable
que celui de ceux ayant eu le souvenir
spontané (39,43 points) de la marque
ou de celui de ceux ayant eu le souvenir
assisté (25,67 points) de cette même
marque.
A l'inverse des deux précédentes
célébrités, l'analyse de la variance
révèle un sentiment moins homogène
de la part des filles ayant eu le souvenir
spontané
de
la
marque
comparativement à l'ensemble des filles
(variance : 0,48) soumises à l'enquête.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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349
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Sentiment à l'égard de Gérard LANVIN, des filles qui ont eu le
Sentiment à l'égard de Gérard LANVIN, des filles qui ont eu le
souvenir spontané de la publicité VARIANCE
souvenir assisté de la publicité VARIANCE
11%
2%
5%
9%
40%
60%
53%
20%
Variance : 0,96
Variance : 1,40
Sentiment à l'égard de Gérard LANVIN, des garçons qui ont eu
Sentiment à l'égard de Gérard LANVIN, des garçons qui ont eu
le souvenir spontané de la publicité VARIANCE
le souvenir assisté de la publicité VARIANCE
11%
20%
11%
80%
37%
41%
Variance : 0,16
Variance : 0,92
Que l'on considère les éléments
ayant eu le souvenir spontané ou ceux
ayant eu le souvenir assisté de la
marque, les filles éprouvent un
sentiment très hétérogène à l'égard de
Gérard LANVIN, par rapport à celui
éprouvé par les garçons, même si le
calcul de la variance reste élevé pour
ces derniers dans le cas des éléments
ayant eu le souvenir assisté de la
marque VARIANCE. On retiendra
d'ailleurs sur ce dernier point, la
modification considérable de la valeur
de la variance que l'on considère les
éléments ayant eu le souvenir spontané
ou ceux ayant eu le souvenir assisté de
la marque.
Concernant la valeur des indices
de sympathie, que l'on considère les
éléments ayant eu le souvenir spontané
(filles : 81,60 points ; garçons : 55,20
points) ou le souvenir assisté (filles :
74,18 points ; garçons : 47,70 points) de
la
marque,
les
indices
sont
respectivement plus favorables pour
chacun des deux sexes que ceux
obtenus par l'ensemble des filles (68
points) et par l'ensemble des garçons
(46 points). Le phénomène est d'autant
plus remarquable au vu des précisions
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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350
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
sur la valeur de la variance - dans
chacun des cas - faites précédemment.
Dans le cas de cette association,
le calcul de la variance indique que c'est
cette fois le groupe des filles ayant eu le
souvenir assisté de la marque qui
génère une variance supérieure à celle
obtenue par l'ensemble des répondants
du même sexe (1,12).
Sentiment à l'égard de Jenna de ROSNAY, des filles qui ont eu
Sentiment à l'égard de Jenna de ROSNAY, des filles qui ont eu
le souvenir spontané de la publicité LES POLYSIANES
le souvenir assisté de la publicité LES POLYSIANES
7%
3%
41%
49%
100%
Variance : 0
Variance : 0,45
Sentiment à l'égard de Jenna de ROSNAY, des garçons qui ont
Sentiment à l'égard de Jenna de ROSNAY, des garçons qui ont
eu le souvenir spontané de la publicité LES POLYSIANES
eu le souvenir assisté de la publicité LES POLYSIANES
24%
76%
100%
Variance : 0
Variance : 0,18
Le sentiment à l'égard de Jenna
de ROSNAY, des garçons, est une
nouvelle fois plus homogène que celui
des filles, comme le confirme le calcul
de la variance.
A propos de la valeur de l'indice
de
sympathie,
celui-ci
est
respectivement plus élevé pour chacun
des sexes (filles : 89,10 ; garçons : 81,18)
lorsque l'on considère les éléments de
chacun des groupes, ayant eu le
souvenir assisté de la marque, que celui
de l'ensemble des filles (72 points) et
que celui de l'ensemble des garçons (73
points). On ne retiendra pas ici pour
l'analyse, l'indice de 68 points pour les
filles et 46 points pour les garçons,
obtenus en considérant les éléments
ayant eu le souvenir spontané de la
marque, toujours en raison du trop
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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351
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
faible
nombre
concernés.
de
répondants
Ici, le calcul de la variance
indique à nouveau des valeurs
inférieures à celles obtenues par
l'ensemble des filles d'une part (1,03) et
par l'ensemble des garçons d'autre part
(0,37) et ce, quel que soit le souvenir
considéré. Cela exprime donc dans ce
cas, un souvenir plus homogène de la
part des répondants de chacun des
sexes et qui ont eu le souvenir spontané et/ou assisté - de la marque,
que celui de l'ensemble des répondants
de chacun des deux sexes.
Sentiment à l'égard de Gabriela SABATINI, des filles qui ont eu
Sentiment à l'égard de Gabriela SABATINI, des filles qui ont eu
le souvenir spontané de la publicité HOLLYWOOD
le souvenir assisté de la publicité HOLLYWOOD
6%
6%
16%
17%
55%
100%
Variance : 0
Variance : 1,27
Sentiment à l'égard de Gabriela SABATINI, des garçons qui ont
Sentiment à l'égard de Gabriela SABATINI, des garçons qui ont
eu le souvenir spontané de la publicité HOLLYWOOD
eu le souvenir assisté de la publicité HOLLYWOOD
4%
44%
52%
100%
Variance : 0
Variance : 0,31
Une dernière fois et de manière
encore plus manifeste, le sentiment des
garçons à l'égard de Gabriela
SABATINI,
est
beaucoup
plus
homogène que celui des filles. On
notera cependant toujours à l'étude de
la variance, que les filles ayant eu le
souvenir assisté de la marque
éprouvent un sentiment beaucoup plus
hétérogène à l'égard de la joueuse de
tennis, que l'ensemble des répondantes
(variance : 0,97) alors que ce dernier
était déjà relativement hétérogène.
Concernant les indices de
sympathie, à l'instar de l'analyse
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352
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
précédente faite à propos de Jenna de
ROSNAY, nous ne considérerons pas
les indices de 68 points pour les filles et
92 points pour les garçons, au sujet des
éléments ayant eu le souvenir spontané
de la marque, car les répondants étaient
là aussi trop peu nombreux. En
revanche, concernant les éléments
ayant eu le souvenir assisté de la
marque, on note qu'encore une fois
l'indice de sympathie des filles (49,11
points) comme celui des garçons (68,08
points) est plus favorable à ceux de
l'ensemble des éléments de chacun des
deux sexes (filles : 48 points ; garçons :
58 points).
Ainsi, nous constatons que dans
la majorité des cas le sentiment à
l'égard d'une célébrité est plus
favorable de la part de ceux qui eurent
le souvenir de la marque. Ce qui semble
logique, dès lors que ce que l'esprit
apprécie, l'esprit le mémorise plus
facilement.
En
revanche
nous
observerons qu'il existe quelques
exceptions qui nous interdisent toute
généralisation à ce sujet.
A propos des arguments jugés
convaincants (question 5.I) par les
répondants lors de l'utilisation d'un
personnage célèbre, on obtient les
résultats présentés ci-après. Pour
chaque argument et pour chacun des
deux sexes, il sera présenté les résultats
en pourcentages par rapport aux 5
points de l'échelle, puis le score moyen
accompagné de la variance et de l'écarttype de manière à pleinement percevoir
la dispersion des réponses.
Puis, nous utiliserons à nouveau
ici une construction graphique sous
forme de radars, toujours de mêmes
dimensions et orientés à l'identique, de
manière à autoriser une appréciation
visuelle plus immédiate des résultats.
La notoriété du personnage, est
généralement le premier argument
avancé, lors de l'utilisation d'une
célébrité.
La notoriété du personnage
Répondants
Tout à fait
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Plutôt pas
d'accord
Pas du tout
d'accord
Filles
55,88%
30,88%
8,82%
2,94%
1,47%
Garçons
43,48%
50,00%
4,35%
2,17%
-
Ensemble
50,88%
38,60%
7,02%
2,63%
0,88%
Notoriété
Groupe des filles
Notoriété
Groupe des garçons
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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353
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
pas du tout
d'accord
Indifférents
Plutôt
d'accord
Plutôt pas
d'accord
On constate un sentiment
favorable dans l'ensemble, à propos de
cette notoriété du personnage en tant
qu'argument convaincant, même si l'on
perçoit que le groupe des filles semble
plus catégorique que celui des garçons.
En effet la surface de réponses est
beaucoup plus étroite sur le radar des
filles que sur celui des garçons et
semble fuir vers le sommet, alors que
celui des garçons s'étend vers la droite.
Notoriété
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
1,37
1,35
1,36
Variance
0,76
0,44
0,63
Ecart-type
0,87
0,67
0,80
Si l'on observe le tableau des
scores moyens en revanche, peu de
différence entre les deux sexes. C'est
donc au niveau de la variance qu'il faut
Indifférents
rechercher l'explication. On constate
en effet que le sentiment des filles est
plus hétérogène que celui des garçons
sur l'aspect convaincant de la notoriété.
La crédibilité personnelle du personnage
Répondants
Tout à fait
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Plutôt pas
d'accord
Pas du tout
d'accord
Filles
42,65%
47,06%
2,94%
7,35%
-
Garçons
43,48%
43,48%
6,52%
4,35%
2,17%
Ensemble
42,98%
45,61%
4,39%
6,14%
0,88%
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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354
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Crédibilité
Crédibilité
Groupe des filles
Groupe des garçons
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt
d'accord
Plutôt pas
d'accord
pas du tout
d'accord
Indifférents
Plutôt
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Surfaces de réponses presque
identiques d'un groupe à l'autre, ce qui
exprime un sentiment - ainsi qu'une
intensité de ce sentiment - relativement
semblable et largement positive dans
l'ensemble, chez les filles comme chez
les garçons.
Crédibilité
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
1,25
1,22
1,24
Variance
0,69
0,82
0,74
Ecart-type
0,83
0,92
0,86
A nouveau des scores moyens
peu différents donc. En revanche,
concernant
cette
crédibilité
personnelle du personnage, ce sont
cette fois les filles qui se montrent plus
homogènes
dans
leur
réponse,
comparativement aux garçons.
Crédibilité accordée
Indifférents
à un personnage célèbre
Indifférents
Nous pouvons affiner les
résultats de cet argument à l'aide du
traitement de la question 5.J sur le sexe
du personnage célèbre.
célébrité
célébrité
Ne
féminine
masculine
savent pas
en fonction du sexe
Filles
51,47%
26,47%
19,12%
2,94%
Garçons
54,35%
41,30%
4,35%
-
Ensemble
52,63%
32,46%
13,16%
1,75%
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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355
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Crédibilité accordée à une célébrité utilisée par la publicité, en fonction du sexe de la célébrité
(ensemble des répondants)
60%
50%
40%
30%
Filles
20%
Garçons
10%
Ensemble
0%
indifférents
célébrité
féminine
Ensemble
célébrité
masculine
Garçons
ne savent pas
Filles
Une proportion relativement
équivalente de garçons et de filles - un
peu plus de la moitié - se déclare
indifférente sur le sexe d'une célébrité
utilisée par la publicité, quant à sa
crédibilité. En revanche, Il apparaît
particulièrement
intéressant
de
remarquer que les garçons sont
relativement
sensiblement
plus
nombreux que les filles à accorder de la
crédibilité à une célébrité du sexe
opposé, 41,30% contre 19,12%.
On peut d'ailleurs mettre en
évidence encore plus nettement la
crédibilité prépondérante accordée à
un porte-parole féminin, par rapport à
un porte-parole masculin, en ne
considérant que les répondants qui
reconnurent être sensibles au sexe du
porte-parole, sur ce critère. Rappelons
toutefois qu'il s'agit d'un sentiment
exprimé et non constaté. On obtient
cependant les résultats et la
représentation graphique suivants :
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
356
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Crédibilité accordée à un personnage
célébrité
célébrité
célèbre en fonction du sexe, par les
féminine
masculine
Filles
58,06%
41,94%
Garçons
90,48%
9,52%
Ensemble
71,15%
28,85%
répondants sensibles à ce facteur
Crédibilité accordée à une célébrité utilisée par la publicité, en fonction du sexe de la célébrité
(répondants ayant reconnu être sensibles à ce facteur)
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Filles
Garçons
Ensemble
Ensemble
célébrité
féminine
Garçons
célébrité
masculine
Filles
On notera avec intérêt le
pourcentage très élevé en ce qui
concerne le groupe des garçons, où
90,48% dirent accorder plus de
crédibilité à un porte-parole célèbre
féminin. Ainsi, pour l'ensemble des
résultats, 7 répondants sur 10 dirent
attacher plus de crédibilité à une
célébrité féminine, ce qui confirme les
résultats obtenus aux Etats-Unis en
1981 par Harold SPIELMAN et sur
lesquels nous reviendrons page 448.
Le domaine d'expérience du personnage sur le produit
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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357
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Répondants
Tout à fait
Plutôt
d'accord
d'accord
Filles
39,71%
29,41%
Garçons
43,48%
Ensemble
41,23%
Indifférents
Plutôt pas
Pas du tout
d'accord
d'accord
13,24%
10,29%
7,35%
23,91%
15,22%
13,04%
4,35%
27,19%
14,04%
11,40%
6,14%
Domaine d'expérience
Domaine d'expérience
Groupe des filles
Groupe des garçons
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Indifférents
Certes,
une
majorité
de
répondants apparaît se déclarer
d'accord pour dire que le domaine
d'expérience du personnage est un
argument convaincant (score moyen :
0,86). En revanche, il est également
manifeste que cet argument ne suffira
pas pour convaincre l'ensemble des
répondants, car on voit bien que les
surfaces de réponses se prolongent
légèrement également en bas et à droite
des radars, ce qui exprime la présence
d'individus ne pensant pas qu'il s'agit
d'un argument convaincant, ou encore
qu'ils y sont indifférents. Phénomène
confirmé par le calcul de la variance.
Domaine
d'expérience
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
0,84
0,89
0,86
Variance
1,58
1,49
1,54
Ecart-type
1,26
1,22
1,24
Scores moyens sensiblement
équivalents pour chacun des deux
sexes. En revanche, l'analyse de la
variance fait ressortir un perception
très hétérogène au sein de chacun des
Indifférents
groupe (légèrement plus accentuée
pour le groupe des filles) quant à
l'aspect convaincant du domaine
d'expérience du personnage sur le
produit concerné.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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358
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
La qualité de la mise en scène
Répondants
Tout à fait
Plutôt
d'accord
d'accord
35,29%
42,65%
14,71%
7,35%
-
2,17%
54,35%
28,26%
13,04%
2,17%
21,93%
47,37%
20,18%
9,65%
0,88%
Filles
Garçons
Ensemble
Indifférents
Plutôt pas
Pas du tout
d'accord
d'accord
Mise en scène
Mise en scène
Groupe des filles
Groupe des garçons
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Pour la qualité de la mise en
scène, les filles se déclarent d'accord en
général à 77,94% (dont 35,29% tout à
fait d'accord) alors que seulement
56,52% les garçons sont d'accord en
général (dont 2,17% uniquement, tout à
fait d'accord). Graphiquement, on
constate bien d'ailleurs sur les radars
que la surface de réponses du groupe
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
des garçons est nettement plus aplatie
et se répand plus vers le bas à droite,
exprimant la présence d'indifférents
plus nombreux chez les garçons. Seraitce à dire que les filles interrogées
attachent plus d'importance à la
présentation du message que les
garçons ?
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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359
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Qualité de la
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
1,06
0,41
0,80
Variance
0,79
0,68
0,85
Ecart-type
0,89
0,82
0,92
mise en scène
L'observation des scores moyens
confirme
cette
différence
très
importante entre les deux sexes, alors
que l'analyse de la variance génère des
résultats peu différents d'un groupe à
l'autre. C'est donc a priori un résultat
significatif du sentiment du groupe de
filles interrogé.
L'image du personnage perçue par le répondant
Répondants
Tout à fait
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Plutôt pas
d'accord
Pas du tout
d'accord
Filles
58,82%
32,35%
4,41%
4,41%
-
Garçons
58,70%
34,78%
6,52%
-
-
Ensemble
58,77%
33,33%
5,26%
2,63%
-
Image du personnage
Groupe des filles
Image du personnage
Groupe des garçons
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Cas intéressant en ce qui
concerne l'image du personnage, car
alors que le sentiment de chacun des
groupes était légèrement différent
comme nous l'avons vu, à propos de la
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
notoriété du personnage ; les surfaces
de réponses des deux radars sont ici
presque les mêmes, ce qui exprime un
sentiment relativement identique d'un
sexe à l'autre et avec la même intensité
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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360
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
pour chacun des groupes. Toutefois, il
se trouve quelques 4,41% des filles qui
se déclarèrent "plutôt pas d'accord" sur
l'aspect convaincant de l'argument,
alors que pas un seul garçon ne se dit
en opposition avec cet aspect de
l'image du personnage.
Image
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
1,46
1,52
1,48
Variance
0,60
0,38
0,51
Ecart-type
0,78
0,62
0,72
On notera d'ailleurs que la
valeur de la variance confirme cette
différence dès lors qu'elle est à nouveau
plus élevée pour le groupe des filles que
pour celui des garçons. Enfin, nous
pourrions dès à présent émettre
l'hypothèse que cet argument semble
avoir a priori plus d'importance aux
yeux de chacun des groupes, que la
simple notoriété. Ce, si l'on compare les
scores moyens (filles : 1,37 / 1,46 ;
garçons : 1,35 / 1,52). Nous vérifierons
cette hypothèse plus tard à l'aide des
classements.
La qualité du témoignage direct du personnage
Répondants
Tout à fait
d'accord
Plutôt
d'accord
Indifférents
Plutôt pas
d'accord
Pas du tout
d'accord
Filles
16,18%
48,53%
17,65%
13,24%
4,41%
Garçons
23,91%
34,78%
23,91%
17,39%
-
Ensemble
19,30%
42,98%
20,18%
14,91%
2,63%
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
361
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Qualité du témoignage
Qualité du témoignage
Groupe des filles
Groupe des garçons
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
pas du tout
d'accord
Indifférents
Plutôt
d'accord
Plutôt pas
d'accord
A propos de la qualité du
témoignage du personnage, les
sentiments à l'intérieur du groupe des
garçons semblent plus partagés, même
si contrairement au groupe des filles,
aucun d'entre eux ne se déclare "pas du
tout d'accord" à propos de l'aspect
convaincant de cet argument.
Témoignage
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
0,59
0,65
0,59
Variance
1,10
1,05
1,08
Ecart-type
1,05
1,03
1,04
L'étude de cet argument illustre
parfaitement la complémentarité de
l'analyse statistique de la variance
d'une part, et de l'analyse graphique
d'autre part. En effet, alors que l'analyse
graphique présentait des surfaces de
réponses sensiblement différentes, les
calculs statistiques complémentaires
expriment une valeur élevée de la
Indifférents
variance et d'une importance à peu près
équivalente pour chacun des deux
groupes, les scores moyens étant eux
aussi peu différents. Rappelons que
l'analyse de la variance fournit une
analyse quantitative de la dispersion et
non qualitative, ce qu'expriment dans
un certain sens le score moyen et la
représentation graphique.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
362
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
L'identification possible du répondant au personnage
Répondants
Tout à fait
Plutôt
d'accord
d'accord
Filles
30,88%
29,41%
Garçons
10,87%
Ensemble
22,81%
Indifférents
Plutôt pas
Pas du tout
d'accord
d'accord
20,59%
14,71%
4,41%
52,17%
10,87%
15,22%
10,87%
38,60%
16,67%
14,91%
7,02%
Identification au personnage
Identification au personnage
Groupe des filles
Groupe des garçons
Tout à fait
d'accord
Tout à fait
d'accord
pas du tout
d'accord
Plutôt pas
d'accord
Plutôt
d'accord
pas du tout
d'accord
Indifférents
Plutôt
d'accord
Plutôt pas
d'accord
On retrouve en partie une
différence - à propos de l'intensité du
sentiment du groupe - à propos de
l'identification possible au personnage :
60,29% des filles se déclarent d'accord
en général (dont 30,88% tout à fait
d'accord). Mais si 63,04% des garçons
sont d'accord en général, seulement
10,87% sont tout à fait d'accord.
Identification
Filles
Garçons
Ensemble
Score moyen
0,68
0,37
0,55
Variance
1,40
1,41
1,42
Ecart-type
1,18
1,19
1,19
Ce que confirme l'analyse
statistique en nous procurant une
valeur de la variance relativement
élevée - mais d'importance égale - pour
chacun des deux groupes, pour des
Indifférents
scores relativement faibles et mêmes
très faibles pour le groupe des garçons.
Cela exprime manifestement le
sentiment d'un ensemble d'arguments
pour lesquels les répondants sont en
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
363
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
moyenne faiblement d'accord sur leur
aspect convaincant, lors de l'utilisation
En revanche, comme le rappelle
le tableau récapitulatif présenté ci-
tableau
récapitulatif
Notoriété du
porte-parole
d'une célébrité en publicité.
dessous, ce sentiment est perçu très
différemment d'un argument à l'autre
et même d'un sexe à l'autre.
Crédibilité du Expérience du Qualité de la
porte-parole
porte-parole
mise en
scène
Image du
porte-parole
Qualité du
témoignage
Possibilité
d'identification
Filles
Score moyen
1,37
1,25
0,84
1,06
1,46
0,59
0,68
Variance
0,77
0,70
1,60
0,80
0,61
1,11
1,42
Ecart type
0,88
0,84
1,27
0,90
0,78
1,05
1,19
Score moyen
1,35
1,22
0,89
0,41
1,52
0,65
0,37
Variance
0,45
0,84
1,52
0,69
0,39
1,08
1,44
Ecart type
0,67
0,92
1,23
0,83
0,62
1,04
1,20
Score moyen
1,36
1,24
0,86
0,80
1,48
0,61
0,55
Variance
0,64
0,75
1,56
0,85
0,52
1,09
1,44
Ecart type
0,80
0,87
1,25
0,92
0,72
1,04
1,20
Garçons
Ensemble
Si l'on essaie maintenant de
calculer un score général pour chacun
des deux sexes, de l'ensemble des sept
arguments soumis aux répondants, on
obtient les résultats ci-après :
Ensemble des sept
arguments
Filles
Garçons
Ensemble
Score général moyen
1,03
0,92
0,99
Variance
1,09
1,08
1,09
Ecart type
1,04
1,04
1,04
Attention à l'interprétation ici.
On constate que la valeur de la variance
est quasiment identique d'un groupe à
l'autre, et que les scores moyens eux
mêmes sont peu différents. Ce calcul
est caractéristique d'une sorte d'effet
de lissage des résultats, qui masque
diverses hétérogénéités spécifiques à
chacun des arguments considérés
indépendamment, et que nous avons
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364
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
mises en valeur dans les pages qui
précèdent.
ces arguments qui était sollicité dans la
seconde partie de la question.
Supérieurs à zéro, ces scores
généraux moyens signifient donc
simplement que dans l'ensemble, les
répondants perçoivent les différents
arguments proposés comme étant
convaincants - aucun n'obtenant d'avis
de désaccord manifeste - mais que des
différences persistent d'un groupe à
l'autre et même ici d'un argument à
l'autre. Les arguments pour lesquels le
plus grand nombre de répondants sont
d'accord en général pour penser qu'ils
sont convaincants, sont l'image perçue
du personnage, sa notoriété et sa
crédibilité personnelle. Mais cela ne
nous permet cependant pas de dire
qu'ils sont les plus importants les uns
par rapport aux autres, aux yeux de ces
mêmes répondants. Il faut pour cela
compléter ces observations avec les
résultats obtenus sur le classement de
On obtient alors des résultats
quelque peu différents, puisque pour
l'ensemble des répondants, il apparaît
nettement que l'argument le plus
convaincant à leurs yeux est le domaine
d'expérience du personnage célèbre qui n'obtenait qu'un score d'ensemble
de 0,86 quant à sa perception
d'argument convaincant. Même si
comme nous l'avons vu, l'on reconnaît
en général aux répondants d'une
enquête, un comportement plus
logique qu'au naturel, cela exprime
néanmoins ici la recherche d'un lien
entre le produit et son porte-parole d'une adéquation stratégique - pour
considérer plus aisément l'information,
pour convaincre plus facilement le
répondant de la validité des arguments
avancés par le message publicitaire.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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365
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Classement général
par l'ensemble des répondants
Rang
Arguments
Nb.
Point
s
1
2
3
4
5
6
7
Domaine d'expérience
613
Identification possible
534
Qualité du témoignage direct
519
Image perçue du personnage
455
Crédibilité personnelle
383
Notoriété
352
Qualité de la mise en scène
336
Dans l'ensemble les répondants
s'étaient montrés d'accord à 68,42%
avec le fait que cet argument était
convaincant, ce qui n'était pas le
meilleur résultat et de loin (image du
personnage perçue par le répondant :
92,10% d'accord dans l'ensemble).
Maintenant, rappelons que sans
tenir compte de la qualité de la
réalisation publicitaire et en supposant
que le produit était en adéquation aux
yeux du répondant avec le personnage
célèbre qui le présente, le type de
célébrité jugé le plus convaincant par
ces mêmes répondants était les acteurs.
Si l'on relie ces résultats avec le
classement obtenu pour les arguments
jugés convaincants, nous pourrions
nous interroger pour savoir quel peut
bien être alors aux yeux des
répondants, le domaine d'expérience où
les acteurs sont les plus convaincants.
Il apparaît intéressant ici d'introduire
les principaux résultats recueillis à la
question 5.H1, sur les genres de
produits pour lesquels un type de
porte-parole est jugé le plus
convaincant. Observons les graphiques
ci-dessous
qui présentent les 10
premiers types de produits cités de
manière spontanée :
__________________
1 - Cette question appelait une réponse spontanée. Les
filles se montrèrent proportionnellement plus inspirées
que les garçons sur cette question. Leur groupe
comprenant 68 répondants fournit 95 réponses, soit un
coefficient d'environ 1,4, alors que le groupe des garçons
comprenant 46 répondants ne fournit que 45 réponses,
soit un coefficient inférieur à 1.
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© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
366
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Produits pour lesquels un acteur est le plus convaincant (ensemble des répondants)
45,61%
Parfums
Cosmétiques
25,44%
Vêtements
25,44%
Films
3,51%
Tout
2,63%
Produits de Luxe
2,63%
Voyages
1,75%
Sous-vêtements
1,75%
Humanitaire
1,75%
Cigarettes
1,75%
0,00%
5,00%
10,00%
15,00%
20,00%
25,00%
30,00%
35,00%
40,00%
45,00%
50,00%
Quant aux résultats par sexe, on
relève en définitive peu de différences
pour les principaux produits.
Produits pour lesquels un acteur est le plus convaincant (groupe des filles)
45,59%
Parfums
30,88%
Cosmétiques
29,41%
Vêtements
Films
5,88%
Tout
2,94%
Produits de Luxe
2,94%
Voyages
2,94%
Sous-vêtements
2,94%
Humanitaire
2,94%
Cigarettes
2,94%
0,00%
5,00%
10,00%
15,00%
20,00%
25,00%
30,00%
35,00%
40,00%
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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45,00%
50,00%
367
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
premiers choix soient les mêmes pour
les garçons et les filles est très
significatif, dès lors qu'il s'agissait
d'une question ouverte.
Les trois produits se détachant
très nettement, et ce, aussi bien chez
les garçons que chez les filles, sont les
parfums, les cosmétiques et les
vêtements. Le fait que ces trois
Produits pour lesquels un acteur est le plus convaincant (groupe des garçons)
45,65%
Parfums
19,57%
Vêtements
17,39%
Cosmétiques
Tout
2,17%
Produits de Luxe
2,17%
Paires de lunettes
2,17%
Déodorants
2,17%
Dentifrice
2,17%
Automobiles
2,17%
Produits alimentaires
2,17%
0,00%
5,00%
10,00%
15,00%
20,00%
Dans ces conditions, il semble
que les répondants soient logiques avec
eux-mêmes pour la combinaison des
réponses fournies à ces trois questions.
En effet, on peut penser que ces trois
types de produits puissent être du
domaine d'expérience des acteurs. On
remarquera toutefois avec intérêt le fait
que le parfum se détache très
nettement en tête de ces produits pour
lesquels l'acteur est jugé le plus
convaincant.
Avec
intérêt,
car
l'expérience des cas d'association
rencontrés dans le passé ou encore
25,00%
30,00%
35,00%
40,00%
45,00%
50,00%
exploités actuellement montre que très
rares sont les exemples de succès1.
Cela
signifierait-il
qu'un
obstacle sépare la perception d'une
association produit / porte-parole
célèbre comme étant convaincante et le
déclenchement du comportement
d'achat ? Le raisonnement peut
difficilement être posé en ces termes
simplificateurs, car nous constaterons
plus tard qu'en ce qui concerne le
secteur des parfums, la célébrité est
souvent un excellent facteur d'impact
__________________
1 - Voir infra la présentation de plusieurs exemples dans
le cadre du chapitre IV, page 536.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
368
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
pour inciter à un achat d'essai, mais il
reste ensuite au produit à faire ses
preuves. De surcroît, le marché des
parfums - qui peut s'avérer très
rémunérateur cependant - est sollicité
par de très nombreuses marques qui
détournent parfois le consommateur de
la fidélité à une fragrance habituelle
particulière.
Le sportif ayant obtenu 150
points au classement général des types
de porte-parole les plus convaincants
de la question 5.G, il paraissait
également intéressant de faire le
rapprochement avec les réponses
obtenues sur les types de produits2, au
regard des arguments jugés eux aussi
comme étant les plus convaincants par
les répondants. A l'instar de l'acteur, on
obtient les graphiques suivants :
__________________
2 - Le sportif généra un plus grand nombre de réponses
spontanées que l'acteur chez les filles avec 91 réponses
soit un coefficient 1,5, alors que le groupe des garçons ne
suscita que 45 réponses, soit le même coefficient inférieur
à 1, que pour l'acteur.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
369
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Produits pour lesquels un sportif est le plus convaincant (ensemble des répondants)
45,61%
Accessoires de sport
34,21%
Vêtements de sport
11,40%
Boissons
10,53%
Aliments énergétiques
Produits alimentaires
4,39%
Parfum
4,39%
Lunettes
1,75%
Cosmétiques
1,75%
Chewing gums
1,75%
Humanitaire
0,88%
0,00%
5,00%
10,00%
15,00%
20,00%
A la différence des classements
générés sur le type "acteur," on observe
25,00%
30,00%
35,00%
40,00%
45,00%
50,00%
quelques différences à l'étude des
résultats par sexe :
Produits pour lesquels un sportif est le plus convaincant (groupe des filles)
45,59%
Accessoires de sport
38,24%
Vêtements de sport
19,12%
Boissons
8,82%
Aliments énergétiques
7,35%
Parfum
5,88%
Produits alimentaires
Cosmétiques
2,94%
Chewing gums
2,94%
Lunettes
1,47%
Humanitaire
1,47%
0,00%
5,00%
10,00%
15,00%
20,00%
25,00%
30,00%
35,00%
40,00%
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
45,00%
50,00%
370
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
plus convaincant, les accessoires et les
vêtements de sport, et ce pour chacun
des deux sexes.
Très logiquement, on retrouve
en tête des citations spontanées de
produits pour lesquels le sportif est
perçu comme étant publicitairement le
Produits pour lesquels un sportif est le plus convaincant (groupe des garçons)
45,65%
Accessoires de sport
28,26%
Vêtements de sport
13,04%
Aliments énergétiques
Rasoirs
2,17%
Produits alimentaires
2,17%
Montres
2,17%
Parapharmacie
2,17%
Lunettes
2,17%
0,00%
5,00%
10,00%
15,00%
20,00%
Il y a donc une certaine logique
là encore entre les réponses obtenues et
le fait que l'argument jugé le plus
convaincant
soit
le
domaine
d'expérience de la célébrité. Il y a
encore plus manifestement ici une
adéquation stratégique, un lien très
direct recherché entre le domaine
d'expérience du porte-parole et la
catégorie de produits dont il est
susceptible de vanter les mérites.
Toutefois, on relèvera qu'un peu
plus de 19% des filles perçoivent le
sportif comme un porte-parole
convaincant pour une boisson, alors
que ce produit n'est jamais cité par les
garçons. Des garçons qui présentent
25,00%
30,00%
35,00%
40,00%
45,00%
50,00%
d'ailleurs un éventail de produits
beaucoup plus restreint, puisque seuls
9 types de produits permettent selon
eux un témoignage convaincant du
sportif.
Si l'on observe maintenant les
résultats obtenus pour chacun des
sexes, on se rend compte que l'ordre de
prise en considération des arguments
n'est pas tout à fait identique. De même
que pour les résultats par sexe de la
question 5.G, nous utiliserons ici un
classement au regard de la part (en
pourcentages) des points distribués par
chaque groupe, de manière à permettre
une comparaison plus aisée.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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371
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Classements par les filles
Rang
Arguments
Classement par les garçons
% des
Rang
Arguments
Points
1
2
3
4
5
6
7
Domaine d'expérience
18,86%
Qualité du témoignage direct
17,02%
Identification possible
16,28%
Image perçue du personnage
13,18%
Qualité de la mise en scène
11,87%
Notoriété
11,61%
Crédibilité personnelle
11,19%
% des
Points
1
2
3
4
5
6
7
Domaine d'expérience
19,72%
Identification possible
17,39%
Image perçue du personnage
15,84%
Qualité du témoignage direct
15,14%
Crédibilité personnelle
13,20%
Notoriété
10,17%
Qualité de la mise en scène
8,54%
Les filles comme les garçons
considèrent que le premier argument
est le domaine d'expérience, ce qui
explique dans une certaine mesure que
ce dernier soit nettement en tête dans
le classement général. En revanche,
hormis le classement de la notoriété à la
6ème position, les arguments ne sont
pas considérés dans le même ordre par
chacun des sexes. On notera en
définitive deux groupes secondaires
d'arguments : les positions 2, 3 et 4 et
les positions 5, 6 et 7. Groupes
secondaires à l'intérieur desquels on
retrouve les mêmes arguments pour
chacun des sexes. Toutefois, l'ordre
d'apparition à l'intérieur de ces deux
groupes secondaires n'est pas le même.
Ayant utilisé deux versions du
questionnaire, il était intéressant de
comparer là aussi les résultats obtenus
pour chacune des versions1.
__________________
1 - Pour plus de détails sur la construction de la question
5.I, se reporter en annexes page 684.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
372
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
1
2
3
4
5
6
7
Ordre des arguments
Ordre des arguments
proposé par la version A
proposé par la version B
1
2
3
4
5
6
7
Notoriété
Crédibilité personnelle
Domaine d'expérience
Qualité de la mise en scène
Image perçue du personnage
Qualité du témoignage direct
Identification possible
Classement par l'ensemble des répondants
version A du questionnaire
Rang
1
2
3
4
5
6
7
Arguments
% des
Points
Domaine d'expérience
18,66%
Identification possible
17,73%
Qualité du témoignage direct
16,63%
Image perçue du personnage
14,10%
Notoriété
11,51%
Crédibilité personnelle
10,90%
Qualité de la mise en scène
10,47%
L'observation des résultats est
d'autant plus intéressante que l'on
retrouve, quelle que soit la version,
l'argument "Domaine d'expérience du
personnage" en 1ère position, alors que
celui-ci était proposé en 3ème choix
dans la version A et en 5ème choix dans
la version B. Cela exprime une certaine
homogénéité des réponses au regard
d'une attention certaine portée à
l'ensemble des arguments proposés,
quelle que soit la version rencontrée.
Identification possible
Qualité du témoignage direct
Image perçue du personnage
Qualité de la mise en scène
Domaine d'expérience
Crédibilité personnelle
Notoriété
Classement par l'ensemble des répondants
Version B du questionnaire
Rang
1
2
3
4
5
6
7
Arguments
% des
Points
Domaine d'expérience
19,77%
Qualité du témoignage direct
15,88%
Identification possible
15,69%
Image perçue du personnage
14,41%
Crédibilité personnelle
13,14%
Qualité de la mise en scène
10,59%
Notoriété
10,52%
On rappellera également qu'il
est parfois à redouter dans ce type de
classement que la première proposition
bénéficie d'un avantage dû à son arrivée
en tête de liste. Or, dans le cas présent,
l'argument "Identification possible au
personnage" arrive en 2de position dans
le classement des répondants exposés à
la version A, alors qu'il était proposé en
fin de liste. Et il arrive en 3ème position
dans le classement des répondants
exposés à la version B - soit un rang
plus tard que dans le classement
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
373
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
précédent - alors qu'il était proposé en
tête de liste par cette version.
Bien que les versions soient
différentes, on retrouve les deux
groupes
d'arguments
secondaires
identifiés précédemment. Ils présentent
une nouvelle fois, un ordre différent des
arguments qui les composent, et un
ordre également différent de ceux
obtenus à la lecture des classements
effectués par chacun des deux sexes, à
Classement par les filles
Classement par les filles
version A du questionnaire
Version B du questionnaire
Rang
1
2
3
4
4
5
6
l'exception du 1er groupe secondaire du
classement des répondants à la version
B et de celui du classement effectué par
les filles. Peut-on dès lors en conclure
que les filles furent a priori très
majoritairement exposées à la version B
du questionnaire ? Non, car c'est
justement l'inverse qui se produisit :
seules 45,59% d'entre elles furent
exposées à la version B alors que
54,41% le furent à la version A.
Arguments
% des
Points
Domaine d'expérience
18,53%
Qualité du témoignage direct
17,37%
Identification possible
16,89%
Notoriété
13,03%
Image perçue du personnage
13,03%
Qualité de la mise en scène
11,39%
Crédibilité personnelle
9,75%
On notera cependant avec
intérêt le fort recul de la 4ème place
(version A du questionnaire) à la 7ème
place (version B du questionnaire) de
l'argument "Notoriété" qui était
proposé en 1ère position dans la version
A, mais en dernière - donc 7ème position dans la version B.
Rang
1
2
3
4
5
6
7
Arguments
% des
Points
Domaine d'expérience
19,24%
Qualité du témoignage direct
16,59%
Identification possible
15,55%
Image perçue du personnage
13,36%
Crédibilité personnelle
12,90%
Qualité de la mise en scène
12,44%
Notoriété
9,91%
L'analyse spécifique du groupe
des garçons est également intéressante,
car pour la première fois, l'argument
"Domaine d'expérience du personnage"
n'apparaît pas pour chacune des
versions, en tête du classement.
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374
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Classement par les garçons
Classement par les garçons
version A du questionnaire
Version B du questionnaire
Rang
Arguments
% des
Rang
Arguments
Points
1
2
3
4
5
6
6
Identification possible
19,22%
Domaine d'expérience
18,88%
Image perçue du personnage
15,99%
Qualité du témoignage direct
15,31%
Crédibilité personnelle
12,93%
Notoriété
8,84%
Qualité de la mise en scène
8,84%
Certes, la part des points
attribués est peu différente entre les
arguments "Identification possible avec
le
personnage"
et
"Domaine
d'expérience du personnage" mais elle
suffit dans le cas des répondants
exposés à la version A, pour inverser la
tête du classement constaté jusqu'à
lors. Alors que la différence de la part
des points accordés à chacun de ces
deux arguments par les répondants
exposés à la version B est plus
significative d'une hiérarchie beaucoup
plus distincte.
En revanche, on ne peut làencore expliquer cette différence par
l'observation de l'enseignement de la
recherche indiquant une préférence
relative au premier item proposé par la
version d'exposition du questionnaire,
car l'argument "Identification possible
avec le personnage" arrive en tête dans
le classement des répondants exposés à
la version A du questionnaire, où cet
argument est justement proposé en fin
de liste.
% des
Points
1
2
3
4
5
6
7
Domaine d'expérience
20,43%
Identification possible
15,86%
Image perçue du personnage
15,71%
Qualité du témoignage direct
15,00%
Crédibilité personnelle
13,43%
Notoriété
11,29%
Qualité de la mise en scène
8,29%
Toutefois,
constatant
une
nouvelle fois l'inverse des observations
mises en avant par la littérature, on
peut émettre une suggestion au regard
de la construction de la question 5.I.
Rappelons que de manière à ne pas
altérer l'utilisation des échelles par le
répondant, la sous-question du
classement ne survenait qu'après la
dernière échelle1. Or, si l'on considère
que le premier argument rencontré
bénéficie d'un avantage quant au
classement, cela signifierait que les
répondants ont en général repris la liste
des arguments proposés, du bas vers le
haut de la page. Cette hypothèse serait
également confirmée par le fait que
l'argument "Domaine d'expérience du
personnage" est situé plus tôt dans
l'ordre des propositions de la version B
que dans celui de la version A, toujours
dans l'optique où l'on déplace l'oeil du
bas vers le haut de la page. Or, c'est
bien par les garçons exposés à la
__________________
1 - Voir l'exemplaire des deux versions du questionnaire
présenté en annexes page 694
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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375
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
version B que cet argument est
nettement classé en tête des arguments
convaincants.
Un autre enseignement très
intéressant de l'analyse du groupe des
garçons au regard de leur exposition à
la version A ou à la version B du
questionnaire tient au fait que hormis
les deux premières places, le
classement des 5 autres arguments est
identique, quelle que soit la version du
questionnaire à laquelle le répondant
ait été exposé2. Cela exprime
manifestement
une
certaine
homogénéité
de
la
population
masculine étudiée, sur cette question.
5 - Conclusions
Au regard des hypothèses posées
en introduction, quels enseignements
généraux peut-on tirer de cette
expérimentation ?
0 H0 : Les publicités contenues dans le
support testé et qui utilisent une ou
plusieurs célébrités bénéficient d'un
souvenir spontané supérieur à celui
porté aux publicités concernant le
même type de produits et n'utilisant
pas de célébrités.
A l'étude des résultats qui
précèdent nous avons observé la
présence en deuxième et troisième
position des publicités LANCÔME et
BREITLING, qui bénéficiaient de notre
attention parce qu'utilisant des
célébrités3. Elles sont toutefois
devancées par la publicité placée en
4ème de couverture, ce qui ne permet
pas de dire que d'une manière absolue,
une publicité utilisant une célébrité
obtient un meilleur souvenir spontané.
En revanche au regard de
l'hypothèse que nous avions formulée,
les résultats mettent en évidence que
c'est à chaque fois une publicité
utilisant une célébrité qui se trouve en
tête des citations spontanées, par
rapport
aux
autres
publicités
concernant le même type de produits,
et présentes dans le support.
Certes, le résultat du souvenir
spontané pour la publicité pour la
marque LES POLYSIANES avec Jenna
De ROSNAY est relativement mauvais.
Il s'agissait pourtant d'une double page,
en couleur de surcroît, et sur laquelle la
célébrité était clairement nommée.
Mais
nous
restons
conscient
qu'utilisant un support réel spécifique,
de
nombreux
autres
facteurs
(emplacement de la publicité4, surface
__________________
3 - On pourrait en partie expliquer le résultat
__________________
2 - Avec toutefois la nuance que les arguments
"Notoriété" et "Qualité de la mise en scène" sont à égalité
dans le classement des répondants exposés à la version A,
et ordonnés avec une préférence à l'argument "Notoriété"
dans le classement des répondants exposés à la version B.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
relativement mauvais obtenu par la publicité pour le jeu
concours de la marque HOLLYWOOD, par le fait que la
célébrité - Gabriela SABATINI - n'était pas directement
citée, et à la limite, peut-être même difficilement
identifiable par les lecteurs.
4 - On notera sur ce point particulier que la publicité
pour la marque CHANEL insérée page 91, donc proche de
la publicité pour la marque LES POLYSIANES (située
page 96) obtint un taux de souvenir spontané de 7,02%
376
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
publicitaire utilisée, approche du
support par le répondant, sexe et
intérêt du répondant par rapport à la
nature
même
du
support,...)
conditionnent ces résultats.
Nous retiendrons également que
c'est une publicité utilisant une
célébrité - LANCÔME avec Isabella
ROSSELLINI - qui est arrivé en tête des
citations spontanées des publicités
incitant le plus à l'achat. Et enfin, que
c'est à nouveau la première marque à
être citée parmi celles ayant déclenché
un comportement d'achat entre
l'exposition à la publicité et
l'administration du questionnaire.
Si l'on observe le tableau
récapitulatif présenté ci-dessous, on
s'aperçoit aisément que les publicités
qui faisaient l'objet de cette étude ne
figurent pas systématiquement toutes
en tête de tableau, la première place
étant même occupée une nouvelle fois
par la marque GUERLAIN, dont la
publicité était située en 4ème de
couverture (parfum SAMSARA) et en
page 46 (protection solaire).
0 H1 : Les publicités contenues dans le
support testé et qui utilisent une ou
plusieurs célébrités bénéficient d'un
souvenir assisté supérieur, à celui
porté aux publicités n'utilisant pas de
célébrités.
Rappelons que la question 2.B
comportait vingt marques, proposées
au répondant, et que parmi ces vingt
marques, figuraient les cinq dont la
publicité nous intéressait plus
particulièrement, neuf qui avaient été
tirées au hasard parmi les annonceurs
du support dont l'espace publicitaire
était au moins égale à une pleine page,
et enfin six présentant le nom de
marques pour lesquelles il n'était pas
fait de publicité dans le support utilisé.
pour l'ensemble. Alors que de surcroît cette publicité
n'utilisait qu'une page simple.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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377
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Marques
Ensemble
Filles
Garçons
Guerlain
86,84%
85,29%
89,13%
Lancôme
85,09%
88,24%
80,43%
Breitling
69,30%
52,94%
93,48%
Canderel
69,30%
70,59%
67,39%
Yves Rocher
69,30%
66,18%
73,91%
Variance
62,28%
64,71%
58,70%
Vuarnet
58,77%
55,88%
63,04%
Folio
49,12%
52,94%
43,48%
Elizabeth Arden
44,74%
52,94%
32,61%
Kloranne
43,86%
55,88%
26,09%
Les Polysianes
40,35%
42,65%
36,96%
Hollywood
37,72%
26,47%
54,35%
Mac Donald's
28,95%
23,53%
36,96%
Listel
20,18%
20,59%
41,30%
Taux moyen
54,70%
54,20%
56,99%
Si nous ne pouvons pas conclure
par l'affirmative l'hypothèse H1, on
notera cependant que lorsque l'on
considère les résultats des différentes
marques proposées, en fonction du sexe
du répondant, la première place est en
revanche à chaque fois occupée par
l'une des publicités qui utilisaient une
célébrité - LANCÔME pour les filles et
BREITLING pour les garçons. Mais les
autres marques n'obtiennent pas toutes
d'aussi bons résultats. Et si l'on calcule
le taux moyen de ce souvenir assisté
pour les différentes marques dont la
publicité était faite dans le magazine,
on observe que les publicités des
marques LES POLYSIANES et
HOLLYWOOD n'atteignent même pas
ce niveau.
Ainsi, ces résultats nous
autorisent à dire que l'utilisation d'une
célébrité ne permet pas à une marque
d'obtenir systématiquement un taux de
souvenir assisté supérieur à celui des
autres
marques
soumises
à
l'expérimentation, dont les publicités
figuraient dans le support, et qui
n'utilisaient pas de célébrités.
0 H2 : L'attitude du répondant face à
une publicité utilisant une célébrité
est différente en fonction du sexe du
répondant.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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378
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Au regard des différents
résultats obtenus, il est manifeste que
le groupe des garçons n'a pas réagi
scrupuleusement de la même manière
que celui des filles, sur différents
points.
On peut d'ailleurs observer dans
un premier temps que l'attitude de
chacun des sexes était différente à
propos des célébrités elles-mêmes. Le
classement des types de célébrités
jugées les plus convaincants dans
Célébrités jugées les plus
sympathiques par les filles
l'optique d'une utilisation publicitaire
était différent d'un groupe à l'autre. Le
sportif étant jugé par les garçons
comme étant le plus convaincant des
différents types de célébrités proposés,
alors que les filles plaçaient l'acteur en
tête du classement. Même en
considérant les indices de sympathie,
obtenus pour les différentes célébrités
exploitées à des fins publicitaires dans
le support utilisé, le classement était lui
aussi significativement différent d'un
sexe à l'autre.
Célébrités jugées les plus
sympathiques par les garçons
1 - Isabella ROSSELLINI
1 - Jenna de ROSNAY
2 - Jenna de ROSNAY
2 - Gabriela SABATINI
3 - Gérard LANVIN
3 - Isabella ROSSELLINI
A propos des publicités plus
particulièrement visées par l'enquête,
nous rappellerons qu'aucune n'obtint le
même score de souvenir spontané d'un
groupe à l'autre. Et si certaines
marques comme LANCÔME obtenait 29,41% de souvenir spontané chez les
filles et 26,09% chez les garçons - des
scores peu différents donc entre les
deux sexes -, en revanche d'autres
marques comme BREITLING - 8,82%
de souvenir spontané chez les filles et
30,43% chez les garçons - suscitaient
un taux de souvenir très différent. Le
souvenir assisté du groupe des garçons
était légèrement plus faible que celui
des filles pour les marques LANCÔME,
VARIANCE1 et LES POLYSIANES. En
revanche, il était très sensiblement
supérieur
pour
les
marques
BREITLING et HOLLYWOOD.
On retrouve également des
résultats très différents d'un sexe à
__________________
1 - Un post-test sur 200 femmes eut lieu du 1er au 4 Juin
1992 pour la campagne VARIANCE. Toutes les
personnes interrogées lisaient au moins un des supports
Femme actuelle et Elle qui avaient été utilisés et des quotas
de répartition par âge - 20-24 ans : 25%, 25-34 ans : 40%,
35-49 ans : 25% et 50-60 ans : 10% -. VARIANCE obtient
5% de notoriété spontanée, un score de reconnaissance
de 26% et un score d'agrément de 54% pour l'annonce
Gérard LANVIN. Rappelons que l'annonce "Gérard
LANVIN" avait été précédée par une annonce similaire,
mais avec le joueur de tennis Yannick NOAH, la semaine
précédente. (source annonceur et agence - 1992)
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379
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
l'autre lorsque l'on observe les résultats
de l'identification du produit et/ou de
sa marque par rapport au nom de la
célébrité qui était proposé. Si 50,00%
des garçons furent en mesure
d'identifier le nom du produit ou de la
marque LANCÔME par rapport au
nom d'Isabella ROSSELLINI, les filles
furent 67,65%.
Plus significatives encore sont
les réponses obtenues sur les noms de
Winston CHURCHILL et Franklin D.
ROOSEVELT. 22,06% des filles furent
capables d'identifier le nom du produit
ou de la marque BREITLING sur la
proposition du nom de Franklin D.
ROOSEVELT, et 38,24% sur celui de
Winston CHURCHILL. Alors que les
garçons furent 41,30% a identifier
correctement la marque ou le nom du
produit à la proposition du nom de
Franklin D. ROOSEVELT et 69,57% à
la proposition du nom de Winston
CHURCHILL.
Le souvenir spontané pour ces
deux personnalités - et plus
particulièrement dans le cas de
Winston CHURCHILL - était déjà très
différent d'un sexe à l'autre, puisque si
21,74% des garçons eurent le souvenir
spontané d'avoir vu le Premier Ministre
britannique sur une publicité contenue
dans le magazine, seuls 7,35% des filles
s'en souvinrent spontanément. .
Or, comme nous l'avions vu, il
est ici impossible de généraliser en
indiquant que le type de montres
commercialisées par BREITLING étant
destiné à un public masculin, il était
logique de retrouver un souvenir de
meilleure qualité chez les garçons que
chez les filles, car une autre publicité
nous fournit un contre-exemple. En
effet, l'étude du même objet - analyse
comparative du souvenir spontané de la
marque et de la célébrité - pour la
publicité VARIANCE montre que
10,87% des garçons se souvinrent
spontanément d'avoir vu une publicité
pour VARIANCE dans le support, alors
que seules 7,35% des filles en eurent le
souvenir. Or, la lingerie féminine n'était
pas a priori un produit destiné à un
public de consommateurs masculins. Et
l'on retrouvait ce même avantage - à
moindre échelle - dans le cas de la
marque LES POLYSIANES pour
laquelle 4,35% des garçons avaient le
souvenir d'avoir vu une publicité, pour
seulement 1,47% des filles.
Quant aux sept arguments
testés à propos de la prestation
publicitaire d'une célébrité, pour savoir
quels étaient ceux qui étaient le plus
convaincants, on retrouve là-encore des
divergences importantes sur certains
d'entre eux, d'un sexe à l'autre.
C'est notamment le cas de la
possibilité d'identification à la
personnalité utilisée. Le groupe des
filles (score moyen : 0,68) est plus
nettement d'accord dans l'ensemble
que celui des garçons (score moyen :
0,37). Même s'il faut reconnaître dans
ce
dernier
cas
une
variance
relativement élevée pour chacun des
sexes (groupe de filles : 1,42 ; groupe
des garçons : 1,44). On peut également
citer le cas encore plus significatif de la
qualité de la mise en scène. Le groupe
des filles (score moyen : 1,06) est
nettement d'accord avec l'aspect
convaincant de cet argument, alors que
les garçons (score moyen : 0,41) sont
très
faiblement
d'accord
dans
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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380
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
l'ensemble à propos de ce même
argument.
Ainsi, même si l'on peut déplorer
une variance relativement importante
(groupe des filles : 1,09 ; groupe des
garçons : 1,08) pour l'analyse
d'ensemble de ces sept arguments, il
n'en reste pas moins que le score moyen
du groupe des filles (1,03) est plus élevé
que celui des garçons (0,92). Cela
exprime - sous réserve bien entendu
des
hétérogénéités
spécifiques
présentées dans les pages qui précèdent
- dans une certaine mesure que le
groupe des filles semble plus sensible
aux sept arguments proposés, que le
groupe des garçons.
D'ailleurs, si l'on analyse dans un
second temps les résultats du
classement de ces arguments pour
chacun des deux groupes, on s'aperçoit
que le principal argument est le
domaine d'expérience, mais qu'au delà,
les avis diffèrent d'un sexe à l'autre, sur
l'ordre d'importance de ces arguments.
Ainsi, ne pouvons nous que
conclure par l'affirmative l'hypothèse
H2. Alors qu'appartenant à un groupe
de consommateurs dont l'âge et la
formation étaient peu différents pour
chacun des individus, le répondant
réagit différemment à une publicité
utilisant une célébrité, suivant qu'il est
du sexe masculin ou du sexe féminin.
Et cela ne paraît par ailleurs pas être
fonction de l'appartenance ou non à la
cible naturelle du produit.
0
H3 : L'achat ou la consommation
préalable d'un produit n'influence
pas l'impact sur le répondant, d'une
publicité utilisant une célébrité.
Au regard des résultats obtenus
à la question de la série n°4, croisés
avec ceux de la question 1.B puis 2.B, il
est possible de conclure l'hypothèse H3
par l'affirmative. Seul le cas de la
publicité LANCÔME - et de surcroît
pour ce qui est du souvenir assisté
uniquement - permet de mettre
statistiquement en évidence à l'aide du
test du χ², un lien entre le contact
direct préalable avec le produit et le
souvenir assisté de la marque par le
répondant. Tous les tests pratiqués sur
les résultats des autres publicités
expriment au contraire une absence de
lien entre le contact préalable avec le
produit et le souvenir spontané ou
assisté d'avoir vu une publicité pour la
marque correspondante, dans les pages
du support.
Au surplus, si l'on compare les
résultats obtenus pour les publicités
des
marques
BREITLING
et
HOLLYWOOD, on constate que les
réactions sont complètement opposées.
Ainsi, alors que la marque de chewing
gums bénéficie d'un taux de 92,11%
d'acheteurs et d'un taux de 97,37%
pour les consommateurs préalables du
produit, elle n'obtint le souvenir
spontané que de 3,51% des répondants,
et le souvenir assisté de 37,72%. En
revanche, seuls 1,75% des répondants
déclarèrent avoir déjà acheté une
montre, et 2,63% dirent l'utiliser, parmi
ceux qui eurent le souvenir spontané de
la marque BREITLING. Or, cette
marque obtint le souvenir spontané de
17,54% des répondants et le souvenir
assisté de 69,30%.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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381
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
La
vérification
de
cette
hypothèse nous permet également de
considérer que les résultats aux trois
précédentes hypothèses peuvent être
pris en compte, sans craindre le biais
du parasitage d'un contact préalable
avec le produit concerné.
0
H4 : La sympathie à l'égard d'une
célébrité n'influence pas le souvenir de
la publicité utilisant cette célébrité.
Diverses études menées aux
Etats-Unis mirent en évidence le fait
que la sympathie à l'égard d'une
célébrité n'était pas un critère
influençant l'impact obtenu par une
publicité l'utilisant2. L'analyse qui
précède à ce sujet fut menée aussi bien
à propos du souvenir spontané que du
souvenir assisté, et pour chacune des
célébrités présentes dans le support.
L'absence de constat d'une
relation systématique à ce propos nous
permet également de conclure cette
hypothèse par l'affirmative. Certes
Gabriela
SABATINI,
Jenna
de
ROSNAY
ou
encore
Isabella
ROSSELLINI obtiennent des indices de
sympathie plus élevés chez les
répondants ayant eu le souvenir
spontané ou assisté de la publicité, que
chez l'ensemble des répondants. Mais
la même observation ne peut être faîte à
propos de Winston CHURCHILL et
Franklin
ROOSEVELT
pour
__________________
2 - Voir notamment les travaux de Michael KAMINS
(1990) présentés page 447.
BREITLING, ou à propos de Gérard
LANVIN
pour
VARIANCE.
L'association BREITLING / Franklin
ROOSEVELT / Winston CHURCILL
montrant bien qu'une célébrité peut
être attirante sans pour autant paraître
sympathique
aux
yeux
des
consommateurs.
On observe simplement une
variance plus faible concernant les
résultats
obtenus
auprès
des
répondants ayant eu le souvenir
spontané, par rapport à ceux ayant eu
le souvenir assisté de la publicité. Cet
écart étant en partie dû au nombre de
répondants
logiquement
moins
important dans le premier cas que dans
le second.
On ne peut s'empêcher de
penser ici au cas d'école bien connu du
personnage de Mr. WHIPPLE3 qui fut
utilisé pendant de nombreuses années
aux Etats-Unis pour le papier toilette
CHARMIN
de
PROCTER
&
GAMBLE. Les films publicitaires
réalisés se montrèrent très efficaces en
termes d'impact et de résultats sur les
ventes, alors qu'une majorité de
consommateurs déclaraient détester
cette publicité et ce personnage4.
__________________
3 - Voir à ce propos : "Marketing : As Mr. WHIPPLE
shows, ad stars can bring long-term sales gains"
Lawrence INGRASSIA, THE WALL STREET JOURNAL
du 12 Février 1981.
4 - Voir notamment : "Marketing : Ring around the collar'
ads irritate many yet get results" Bill ABRAMS, THE
WALL STREET JOURNAL du 4 Octobre 1982.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
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382
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
0
H5 : La notoriété du porte-parole
publicitaire est perçue comme étant
l'argument publicitaire le plus
convaincant, lorsqu'une publicité
utilise une célébrité.
Cette hypothèse nous semblait
importante à vérifier, car lorsque nous
interrogeâmes divers professionnels de
la communication publicitaire, la
notoriété de la célébrité fut
systématiquement mise en avant
comme étant la raison essentielle
motivant son utilisation. D'ailleurs, la
notoriété fut longtemps dans le passé
l'un, sinon l'unique motif d'utilisation
d'une star en vue d'obtenir de l'impact
auprès des consommateurs.
Classement des arguments
Rang
+
1
2
3
4
5
6
7
jugés convaincants,
par l'ensemble des répondants
Domaine d'expérience
Identification possible
Qualité du témoignage direct
Image perçue du personnage
Crédibilité personnelle
Notoriété
Qualité de la mise en scène
Or, à l'étude du classement
réalisé par les répondants à propos des
arguments jugés les plus convaincants rappelé dans tableau récapitulatif
présenté ci-dessus -, lors de l'utilisation
d'une célébrité par la publicité, il
ressort que la notoriété arrive en fin de
liste, tout juste avant la qualité de la
mise en scène.
Certes, nous avons constaté que
des différences existaient d'un sexe à
l'autre, et même dans certains cas d'une
version du questionnaire à l'autre. Mais
ces différences ne remettent jamais en
question le fait que la notoriété ne
semble pas être un argument majeur
aux yeux des répondants.
Certains publicitaires tels que
Jacques SEGUELA1 présentèrent les
années 90, comme la fin de la publicité
spectacle et le retour des valeurs ; le
fond reprenant ses droits sur la forme
trop souvent privilégiée la décennie
précédente. Or, le peu d'attachement à
cet argument nous permettant de
rejeter l'hypothèse H5, il semble que le
consommateur soit en partie lui aussi
de cet avis. Par ailleurs, il est manifeste
qu'en plaçant en tête de classement - et
de manière très significative - le
__________________
1 - Entretien privé accordé le 31 Janvier 1989.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
383
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
domaine d'expérience de la célébrité,
comme étant l'argument jugé le plus
convaincant, les répondants confirment
totalement cette tendance.
0
H6 : L'acteur demeure encore
aujourd'hui, le type de célébrité jugé
le plus convaincant, dans l'objectif
d'une utilisation publicitaire.
Nous avions constaté dans le
cadre du chapitre I, que l'acteur avait
été dans le passé, le type de célébrité le
plus utilisé par la publicité. Or,
disposant
d'un
échantillon
de
population très jeune, il paraissait
intéressant de les interroger pour
savoir quel était selon eux le type de
célébrité
le
plus
convaincant
aujourd'hui, dans l'optique d'une
utilisation publicitaire.
Rappelons qu'à de nombreuses
reprises, le calcul de la variance révéla
une dispersion importante des
réponses d'un sexe à l'autre, voire à
l'intérieur d'un même groupe, signifiant
ainsi un sentiment très hétérogène
parmi les répondants. Que de surcroît,
la présence heureuse dans le support,
de cinq publicités utilisant une ou
plusieurs célébrités, nous permis de
confirmer que les réactions des
répondants, d'un type de célébrité
(acteur contre sportive, personnage
historique contre top-model,...) à
l'autre, voire d'une célébrité à l'autre
pour un même type (Winston
CHURCHILL
contre
Franklin
ROOSEVELT par exemple), pouvaient
générer des résultats forts différents.
Enfin, à l'instar de ce qui ce
produisit pour le sujet de l'hypothèse
H5 nous avons constaté des différences
d'un sexe à l'autre et d'une version de
questionnaire à l'autre.
Mais comme le montre le
tableau
récapitulatif
ci-dessous,
l'acteur est toujours le type de célébrité
jugé le plus convaincant, par les
répondants soumis à l'étude. Ce qui
permet donc de conclure par
l'affirmative la présente hypothèse.
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
384
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Rang
Classement des types de
personnage par l'ensemble
des répondants
+
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
Acteur
Sportif
Journaliste
Personnage de fiction
Personnage Historique
Top-model
Musicien
Chanteur
Grand-cuisinier
Homme politique
Animateur
Ainsi, cette étude contribue-telle à condamner le principe
d'utilisation à l'aveugle d'une célébrité,
pour la simple et unique raison qu'elle
est une célébrité. Chaque type de
célébrité et plus précisément, chaque
célébrité est un cas unique, doté de
caractéristiques spécifiques, agissant et
générant des résultats différents d'un
produit à l'autre, d'une cible à l'autre,
d'un mode d'utilisation à l'autre.
C'est la raison pour laquelle, au
regard de ces conclusions, nous allons
pouvoir à présent détailler le fait que
son choix doit être très strictement
conditionné
par
la
stratégie
publicitaire, et non l'inverse !
Chapitre II : Fondements marketing de l'utilisation d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
385
Doctorat de l'Université Paris 1 - Panthéon Sorbonne
Thèse de Sciences de Gestion - Spécialisation Marketing
présentée et soutenue publiquement le 29 Janvier 1993 par Jean-Marc LEHU
ORIGINES ET MODES
D'UTILISATION
DES CÉLÉBRITÉS
PAR LA PUBLICITÉ
tome 2/2
Président du Jury : M. le Professeur Henri MERCILLON
(Professeur à l'Université PARIS 1 - Panthéon Sorbonne)
Suffragants 
M. le Professeur Pierre GREGORY
(Professeur à l'Université PARIS 1 - Panthéon Sorbonne)
Mlle le Professeur Claire OPSOMER
(Professeur à l'Université PARIS 1 - Panthéon Sorbonne)
M. le Professeur Jean-Claude GILARDI
(Professeur à l'Université de NANCY II - Pôle Lorraine de Gestion)
Mme Claudine de FRANCE
(Chargée de Recherches au Centre National de la Recherche Scientifique)
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Sommaire - Tome 2
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
A / Définition du rôle publicitaire de la célébrité
390
393
1 - Le témoin
2 - Le porte-parole officiel
3 - Le bénéficiaire d'un contrat de sponsoring
4 - L'expert
394
5 - Le manager
6 - L'acteur
430
B / Caractéristiques de la célébrité recherchée
397
399
409
439
445
1 - Sexe et âge de la célébrité
448
2 - Porte-parole unique ou porte-parole multiples
3 - Utilisation des droits dérivés
469
C / Elaboration du contrat
478
485
1 - Dispositions légales
486
2 - Caractéristiques du contrat
3 - L'agent artistique
4 - Coût de la célébrité
499
Chapitre IV : Analyse du mode et des règles
d'utilisation d'une célébrité
A / Risques publicitaires à éviter
503
506
524
527
387
Sommaire tome 2
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
1 - La vampirisation du message
2 - L'absence de crédibilité
3 - La non identification du porte-parole
B / Précautions et caractéristiques d'exploitation
1 - Précautions pour la célébrité
2 - Précautions pour l'annonceur
3 - Durée d'utilisation et supports adéquats
C / Evocation publicitaire de la célébrité
1 - Sosies et imitations
2 - Le principe du détournement
3 - Les astuces publicitaires
528
536
559
571
571
577
586
597
598
607
620
Conclusions générales
627
Annexes
633
Annexe n°1 : Stars de bandes dessinées
1 - Le cas Droopy / Rank Xerox
2 - Le cas Astérix et Obélix
3 - Le cas Tintin
4 - Le cas Peanuts
Annexe n°2 : Le cas de la montre Rolex
634
635
636
639
642
645
1 - L'huître la plus chère du monde
2 - Sélection des porte-parole
3 - Succès de la campagne
645
4 - Concurrence
651
646
649
388
Sommaire tome 2
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Annexe n°3 : Le cas de la carte American Express
1 - Do you know me ?
2 - Evolution : la campagne Portraits
3 - Adaptation : communication hexagonale
4 - Concurrence et détournements
656
657
662
664
665
Annexe n°4 : Le cas du savon Lux
669
1 - Origine de l'axe de la campagne
2 - Le choix des stars
670
3 - Pérennité et succès de la campagne
679
Questionnaire d'enquête
674
684
A / Construction du questionnaire
684
B / Versions A et B du questionnaire d'enquête
694
Table de distribution du χ²
705
Lexique
707
Références bibliographiques
728
. Principaux ouvrages et travaux de recherches
. Principaux articles de presse
729
756
Index +
787
Informations pratiques
808
389
Sommaire tome 2
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
III
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
A / Définition du rôle publicitaire de la célébrité
390
393
1 - Le témoin
2 - Le porte-parole officiel
3 - Le bénéficiaire d'un contrat de sponsoring
394
4 - L'expert
5 - Le manager
6 - L'acteur
409
B / Caractéristiques de la célébrité recherchée
397
399
430
439
445
1 - Sexe et âge de la célébrité
448
2 - Porte-parole unique ou porte-parole multiples
3 - Utilisation des droits dérivés
469
C / Élaboration du contrat
478
485
1 - Dispositions légales
486
2 - Caractéristiques du contrat
3 - L'agent artistique
4 - Coût de la célébrité
499
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
503
506
390
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
III
"La vedette d'aujourd'hui est souvent le clochard de demain"
Groucho MARX
"Groucho and Me" 1959.
Analyse du choix d'une célébrité
***
En 1986, l'acteur américain Andy
GRIFFITH, fut choisi par l'agence J.
WALTER THOMPSON1 de Chicago
pour faciliter le repositionnement des
110 produits de la société KRAFT,
spécialisée dans le fromage sous toutes
ses formes. En raison de la bataille sur
les prix que menaient ses concurrents,
KRAFT souhaitait expliquer à des
consommateurs très sensibles à cet
argument, que son prix légèrement
supérieur provenait d'une qualité elle
aussi supérieure. Compte tenu de
l'importance
stratégique
de
la
campagne, elle fut dotée d'un budget de
Un an plus tard en France, le
comédien Bernard BLIER fut choisi
pour participer à trois films pour le
camembert PRESIDENT. Il fallait
montrer que le fromage était bon et que
l'on pouvait en manger à toute heure.
__________________
__________________
1 - La société KRAFT est cliente de l'agence J. WALTER
2 - "KRAFT spells out new tack in its cheese advertising"
THOMPSON depuis 1922.
Julie FRANZ, ADVERTISING AGE du 8 Septembre 1986.
24 millions de dollars. A ce niveau,
l'attention portée au choix de la
célébrité est capitale. Parce qu'il
représentait exactement les qualités
"naturelles, honnêtes et crédibles" du
produit, l'acteur américain Andy
GRIFFITH fut choisi parmi plus de
400 autres stars2 !
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
391
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Un film montrait le comédien au petit
déjeuner dans sa cuisine, un autre au
dîner en compagnie de deux invités, et
enfin dans la journée à son bureau de
travail3. Proposé à l'agence PUBLICIS
par son fils, le metteur en scène
Bertrand BLIER, Bernard BLIER ne fut
pas simplement choisi pour son talent
de comédien ; encore fallait-il
quelqu'un de sympathique et crédible
au yeux du public pour une telle
prestation.
Pour affiner son choix, l'agence
fit alors réaliser un sondage par la
société d'études IPSOS. Il en ressortit
que 60 % des Français faisaient
confiance à l'acteur, mais surtout que
85 % le trouvaient sympathique. Son
choix était alors tout indiqué. "On
l'imaginait parfaitement bon vivant,
bien français, un peu iconoclaste,... et la
pub disait ça, commente Jean-Michel
CARLO4, la personnalité et le caractère
de Bernard BLIER étaient totalement
au service du produit. Le message était
cohérent et c'est comme ça que ça
marche."
A l'exception de l'objectif
aveugle5 consistant à faire appel à une
__________________
3 - Voir notamment "Bernard BLIER plébiscité pour
Président" Anonyme, STRATEGIES N°546 du 26 Janvier
1987 et "Le Camembert PRESIDENT s'abandonne a un
anti-héros", Anonyme, MEDIAS N°178 du 6 Mars 1987.
4 - Entretien privé accordé le 28 Avril 1988.
5 - Pour l'anecdote, on citera le contre-exemple raconté
par Stephen FOX, dans "The mirror makers : A history of
American advertising and its creators" op. cit. page 157, à
propos de la sélection d'une star pour un programme
radiophonique en 1934. "Y&R [YOUNG & RUBICAM]
réussit son premier hit en prime time avec un spectacle
star quelle qu'elle soit pour avoir de
l'impact quel qu'il soit, le choix
(casting) de la star revêt une
importance considérable, fondamental
pour le bon déroulement et l'efficacité
de la communication. Pour le choix
d'un mannequin "inconnu", le casting
est déjà important puisque l'heureux
élu incarnera le lien entre le produit et
le consommateur. Dans le cas d'une
star, le fait que celle-ci soit par
définition déjà connue de la cible,
implique de plus amples précautions
encore. "Si elle est bien choisie, les
valeurs qu'elle incarne ne peuvent que
retomber sur votre marque [...] Ce qui
importe c'est que le choix réponde bien
plus
qu'à
une
attente
du
consommateur, à une adéquation entre
le produit et ce qui est proposé par ces
vedettes" considère Michel ROGALE6.
Et Jean-Michel CARLO7 de
compléter en expliquant que "si le
produit est mal choisi, cela peut
temporairement nuire [à la star]. Ça
peut se passer en France, où les stars
sont beaucoup plus soucieuses de leur
image et demandent des cachets
de variétés pour JELL-O en 1934. «Jack BENNY fut
retenu parce qu'il était disponible» se rappelle Lou
BROCKWAY. Des comédiens plus populaires tels que
Will ROGERS et Eddie CANTOR étaient enchaînés à
des contrats à long-terme. «Nous fûmes très francs avec
notre client en lui présentant Benny. Nous lui dîmes qu'il
n'était ni notre premier choix, ni le deuxième, ni même le
troisième, mais qu'il était disponible et qu'il avait un bon
registre, sinon remarquable» raconte BROCKWAY.
GENERAL FOODS fut d'accord pour dépenser 7.500 $
par semaine pour les coûts de production et de diffusion.
Après trois mois, les ventes de JELL-O grimpèrent et le
pari fut déclaré comme étant un succès."
6 - Entretien privé accordé le 12 Juillet 1988.
7 - Entretien privé accordé le 28 Avril 1988.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
392
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
extraordinaires. Mais Alice SAPRITCH
pour JEX FOUR, je suis sûr que ça lui a
rendu service. Pourquoi ? Parce que
l'idée était formidable, le film était bien
fait, et la façon dont on la faisait
tourner était le côté iconoclaste de
SAPRITCH. Si l'on avait mis Catherine
DENEUVE pour faire ça, cela aurait été
une catastrophe. Il faut faire attention
dans le choix d'une personnalité. Il faut
qu'elle ait un rapport direct avec le
concept visé ou le produit."
En définitive, nous pensons que
le premier critère de ce choix dépendra
directement du degré d'intervention de
la célébrité dans la communication, de
son rôle. D'où la nécessité impérieuse
de la définition préliminaire en des
termes précis de ce rôle que devra
assurer la célébrité. Cette approche
nous semble plus logique d'un point du
vue marketing, que la définition de
types de célébrités eux-mêmes8.
A
/
Définition
du
rôle
publicitaire de la célébrité
Si pour le spectateur profane,
l'utilisation par la publicité d'une
célébrité, reste toujours l'utilisation par
la publicité d'une célébrité, il en va tout
autrement dans la réalité, où l'on
distingue différentes approches, et
__________________
8 - Voir notamment Jack G. KAIKATI "Celebrity
advertising : A review and synthesis", INTERNATIONAL
JOURNAL OF ADVERTISING du mois de Juin 1987,
page 94, qui définit 4 types de célébrités. La célébrité
authentique, les sosies, les chefs d'entrepises, les
évocations indirectes.
surtout différents degrés d'implication
de la célébrité. Si le principal mode
d'utilisation des célébrités dans le
monde demeure le témoignage, son
intervention peut également se faire en
tant que porte-parole officiel de
l'annonceur, expert, bénéficiaire d'un
contrat de sponsoring, ou simple acteur
dont les qualités dans l'Art dramatique
sont ainsi sollicitées. Ce sont là autant
de rôles représentatifs d'un degré
d'implication très différent pour la
célébrité.
Cette définition du rôle
publicitaire de la célébrité est une étape
préliminaire capitale, ne serait-ce que
parce que ce rôle lui-même contribue
déjà à expliquer en partie l'objectif
poursuivi. Ainsi, nous avons vu
précédemment que les célébrités
utilisées en tant que témoin ou porteparole temporaire d'un produit
pouvaient être d'excellents moyens de
dynamiser les ventes d'un produit,
notamment lors d'un lancement. Or,
ces mêmes études ont également
montré que l'on ne pouvait espérer
aboutir aux mêmes résultats avec une
opération de sponsoring9 par exemple.
"C'est pour cela qu'une fois que
l'on a déterminé le cadre, le champ
__________________
9 - Les travaux de N. WAIT - "Sponsorship in context"
Thèse de Doctorat, Cranfield Institut of Management,
1979, non publiée - et E. QUINN - "Sponsorship as a
Marketing Tool", thèse de MBS, Dublin, non publiée,
1982 - sont cités à ce sujet par Frédéric ANNE et
Emmanuel J. CHERON dans "Mesure de l'efficacité du
sponsoring : une analyse des effets intermédiaires sur
l'audience directe de l'événement" REVUE FRANCAISE
DU MARKETING n°131, 1991/1 pp.69-81. Voir également
: "Sports Marketing" Special Report, Collectif,
ADVERTISING AGE du 27 Août 1979.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
393
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
d'exercice du comédien ou de la
comédienne, à ce moment là on regarde
quels sont ceux qui correspondent à
cela. Je crois que le pire c'est de monter
à cheval sur la notoriété du comédien et
de s'en servir à tous prix. C'est à dire la
forcer à rentrer dans nos problèmes ou
notre problématique. Mais je crois que
le public ne fonctionne jamais, il y a
toujours refus. La réussite d'un
morceau de communication, c'est que
celui ou ceux qui la reçoivent le
considèrent comme évident. Il doit y
avoir de l'harmonie dans le propos de
communication"
analyse
Jean
10
FELDMAN de l'agence F.C.A.!
1 - Le témoin
Le cas du témoignage de la
célébrité va souvent de pair avec
l'utilisation simultanée ou successive
de plusieurs porte-parole, car la
célébrité n'est pas ici recherchée pour
une connaissance / une expérience
particulière11, mais simplement parce
qu'elle est connue du public ciblé et
qu'à ce titre, elle bénéficie d'une
certaine "autorité". Il est également le
cas qui fut le plus utilisé dans le passé.
"Ce n'est pas moi qui les choisissais,
c'était la foule et leur talent" nous
raconta
Marcel
BLEUSTEINBLANCHET12 à propos de la sélection
__________________
10
- Jean FELDMAN, P.D.G. de l'agence de
communication F.C.A.!. Entretien privé accordé le 13
Avril 1988.
11 - Voir à ce sujet le cas de l'expert page 409.
12 - Entretien privé accordé le 23 Mai 1991.
de ces porte-parole
particuliers.
publicitaires
Le témoignage est l'une des
approches qui nécessite le moins
d'attention dans le choix de la célébrité
puisqu'en définitive, celle-ci est
généralement choisie pour l'unique et
simple raison qu'elle est célèbre. Seule
cette célébrité est mise en valeur et il
importe
peu
qu'elle
n'ait
éventuellement pas de rapport direct
avec le produit dont elle fait la
promotion. L'intérêt est de sélectionner
si possible une célébrité motivé par le
produit ou la marque et qui continuera
d'être son témoin, même après sa
prestation publicitaire13. Un porteparole célèbre est générateur d'impact
par son nom, son statut et/ou son
image, et sa présence suffit même
parfois à susciter au delà de l'attention,
l'identification et/ou le déclenchement
du comportement. En France, en 1964,
la marque de lunettes SOL-AMOR
utilisa de multiples stars pour
présenter ses montures. Citons pour
l'exemple, Gilbert BECAUD, Françoise
HARDY,
Marcel
MOULOUDJI,
Isabelle AUBRAY, Michèle MORGAN,
Maurice
CHEVALIER,
Hugues
AUFFRAY ou Juliette GRECO. Aucun
__________________
13 - Voir notamment : "How testimonials succeed in a
personal referreal market" Douglas B. LEWIS, BUSINESS
MARKETING du mois d'Avril 1984. Le principe est
encore plus valable dans le cas des "infomercials" ou
"informercials" - contraction de "information" et
"commercials", film publicitaire de longue durée utilisé en
night time ou sur le cable, dès les années 50 et dont l'un
des pionniers est le célèbre inventeur / présentateur Ron
POPEIL - pour lesquels les célébrités furent
abondamment utilisées au début des années 90 aux
Etats-Unis. Dans ce cas, le lien célébrité / argumentaire /
produit est encore plus puissant dans l'esprit du
consommateur.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
394
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
lien particulier, aucun message
spécifique de la part des porte-parole,
utilisés comme simples capteurs
d'attention.
Depuis 1973, WOOLITE fait
appel aux stars pour vendre sa lessive.
A
priori,
l'approche
semblait
complètement absurde. Des stars avec
de la lessive, quel rapport ? Et même si
Maurice BIRAUD avait vanté les
mérites
DASH
aux
ménagères
françaises de 1967, Guy GROSSO,
Michel MODO et Jacques BALLUTIN
ceux de BONUX, c'était la plupart du
temps sur un ton humoristique et d'une
manière très ponctuelle. Pour une
approche crédible, restait un gap entre
le statut de star et la lessive qui pouvait
s'avérer
préjudiciable
à
la
14
communication . Or, même si les stars
étaient parfois filmées dans leur
intimité, elles permettaient de faire
preuve
d'originalité
dans
une
communication lessivière trop souvent
rébarbative. Leur simple témoignage
suffisait à doter le produit de la
séduction nécessaire à son succès. "Le
fait de choisir des vedettes pour vanter
les mérites de WOOLITE pouvait
paraître paradoxal. La lessive et les
stars paraissent deux concepts
antinomiques. Mais cela se justifiait par
__________________
14 - Si l'image de Sarah BERNHARDT recommandait la
lessive BI-VEGETAL au début de ce siècle, on notera que
nombreuses sont les stars américaines à s'être un jour
mises les mains dans la lessive. LUX lui-même pour la
déclinaison en paillettes de son savon utilisa dès la fin des
années 1920 / début des années 1930, Ruby KEELER,
Alice FAYE puis Glenda FARRELL, Dorothy JORDAN,
Loretta YOUNG. D'autres marques s'en inspirèrent
comme IVORY avec Denna DURBIN, AXION avec
Arthur GODFFREY ou encore BORAX avec Ronald
REAGAN.
le fait que ce que nous cherchions à
vendre ce n'était pas de la propreté
mais de la séduction, de la beauté. Cela
fonctionnait alors très bien avec
l'univers féminin des stars".15
Scores IPSOS
Miou-Miou / WOOLITE
Impact
. Score brut
. Score spécifique
. Score prouvé
. Score de reconnaissance
Agrément
. Positif
. Négatif
. Indifférent
Mai
1985
84
35
52
84
53
20
27
"Film de Pub"
Philippe BENOIT, Patrick LE BRIGAN, Didier TRUCHOT
Editions GALLIMARD, Paris (1988) p. 130
"C'est la même stratégie que
LUX, observe Jean-Michel CARLO16,
avec d'autres types de femmes. Moins
stars, moins hollywoodiennes, plus
proches, plus quotidiennes, qui vivent
plus. Je pense que là on voit que l'effet
d'entraînement marche. Ça dure depuis
15 ans, c'est au service du produit". De
Christine DELAROCHE (1974) à
Emmanuelle BEART (1988), on trouve
Sylvie VARTAN (1976-77 et 1978),
Brigitte FOSSEY (1976-77), Jane
BIRKIN (1976-77), Marie-Christine
BARRAULT
(1978),
Romy
SCHNEIDER (1978), Marlène JOBERT
(1979, 1983 et 1985), Anne PARILLAUD
(1980 et 1982), Isabelle ADJANI (1980,
__________________
15 - Dominique CHEVALLIER, Directeur Général Adjoint
et Directeur de la Création chez R.S.C.G., "Films de Pub"
Philippe BENOIT, Patrick Le BRIGAND et Didier
TRUCHOT, op. cit. p. 130.
16 - Entretien privé accordé le 28 Avril 1988.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
395
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
1982 et 1985), Géraldine CHAPLIN
(1981), Catherine DENEUVE (1982 et
1986/87), Annie GIRARDOT (1984),
Clio GOLDSMITH (1984), MIOU
MIOU (1985 et 1986/87) dont le tableau
de scores IPSOS est présenté ci-dessus,
Sophie DUEZ (1986/87), Nathalie
BAYE (1986/87), ainsi que Jacques
DUTRONC (1984). En 1989, Charlotte
De TURCKHEIM renouvelait très
habilement et de manière humoristique
le style du témoignage employé
auparavant17.
Aux
Etats-Unis,
les
cas
d'utilisation d'une célébrité pour son
simple témoignage, et/ou son pouvoir
d'incitation à l'identification sont
beaucoup plus nombreux, toujours en
raison de la relative simplicité de cette
stratégie.
Simplicité
qui
n'est
cependant
pas
nécessairement
synonyme de résultats au dessous de la
moyenne. A titre d'exemple, citons le
cas d'école du début des années 1950 de
la marque américaine WHITMAN'S
qui eut recours avec succès à de
multiples stars pour présenter ses
boîtes de chocolats. Burt LANCASTER,
Douglas FAIRBANKS Jr, Elizabeth
TAYLOR, Humphrey BOGART, Sue et
Alan LADD, Esther WILLIAMS, James
STEWART, Robert YOUNG, Van
JOHNSON, Jeanne CRAIN John
WAYNE, Deborah KERR, Bob HOPE,
Dorothy LAMOUR et Bing CROSBY
__________________
17 - Quatre films de 30 secondes - "Mère-Fille", "2
copines", "Belle-mère" et "La voisine" - furent produits.
Mais en 1991, l'agence réorienta la communication vers le
produit et ses qualités, abandonnant l'utilisation de stars.
"WOOLITE a changé de fil conducteur" Philippe
LEFEVRE, COMMUNICATION / CB NEWS n°235 du 2
Décembre 1991.
entre autres apparurent, sur les
annonces publicitaires du chocolatier.
L'objectif de ces annonces très
esthétiques était alors tout simplement
d'utiliser le témoignage de ces stars
pour pousser le consommateur à l'achat
de chocolats WHITMAN'S, sans autres
raisons particulières que celle qu'elles
étaient sensées consommer ces
confiseries elles aussi. Le principal
problème pouvant surgir lors de
l'utilisation de cette approche, est bien
entendu, l'effacement du produit au
profit de la célébrité ou l'impression
flagrante d'un "placage" de celle-ci en
contrepartie
d'une
évidente
compensation financière. Mais on
rencontre
assez
rarement
cet
inconvénient dans la communication
commerciale américaine, notamment en
raison de l'abondance des stars en
publicité et parce que ces dernières
sont reconnues pour bénéficier en
général d'un a priori favorable du
consommateur.
En France, pour un tout autre
produit : le saucisson, Olivier
BENSIMON18 nous expliqua qu'avec
"COCHONOU, les acteurs jouent leur
rôle, ils ne sont plus simplement des
Monsieur Loyal ou des hommes
sandwich. BRASSEUR joue du
BRASSEUR avant de jouer du
COCHONOU, pareil pour CARMET.
Et ça, ça me semble particulièrement
intéressant. Ils ne sont pas au service
du produit, il sont d'abord eux-mêmes,
au service du produit. Le saucisson est
__________________
18 - Entretien privé accordé le 25 Mars 1988. Analyse du
cas COCHONOU avec les acteurs Claude BRASSEUR et
Jean CARMET.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
396
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
un produit éminemment populaire,
BRASSEUR et CARMET ne sont pas
des gens éminemment populaires euxmêmes, mais enfin, ils s'adressent à des
gens populaires. Ils sont appréciés,
nous le savons, par une clientèle
populaire, et l'idée qu'ils jouent est
particulièrement
attractive
et
originale".
Pour justifier un peu plus la
rémunération de la célébrité - disent
avec ironie ses détracteurs -, de manière
à ce qu'elle ne masque pas le message
par une mémorisation de son nom ou
de sa prestation publicitaire au dépend
du produit lui-même, il est possible de
s'associer les services d'un porte-parole
célèbre d'une façon plus permanente et
plus surtout plus officielle. Cela crée un
lien plus solide avec le produit et rend
d'autant plus crédibles ses propos sur
le produit ou en faveur de l'annonceur.
C'est le cas du porte-parole officiel.
2 - Le porte-parole officiel
En Europe, et notamment en
France, on rencontre encore très peu ce
type de "mariage". Les célébrités
paraissent quelque peu effrayées de se
lier aussi intimement avec un
annonceur. Et les seuls cas que l'on
pourrait relever sont en définitive des
porte-parole officiel de fait, c'est à dire
des célébrités qui par leurs nombreuses
apparitions dans la communication
d'un produit, finissent par en devenir
virtuellement un porte-parole quasi
officiel. En France, le cas le plus
caractéristique demeure celui du
chanteur CARLOS dans divers films
pour la boisson OASIS. Il sera détaillé
dans le cadre de la section B.
Aux Etats-Unis en revanche, les
annonceurs ont parfaitement compris
les avantages d'une telle approche de la
célébrité, et celle-ci participe plus
volontiers à une communication pour
laquelle sa prestation apparaît moins
comme la simple cerise sur un gâteau à
la crème. On peut citer le cas de l'acteur
Jesse WHITE19 qui fut pendant 21 ans
le représentant de la compagnie
MAYTAG, de l'animateur vedette Ed
Mac MAHON pendant plus de 15 ans
au service de la bière ANHEUSERUSH, Yul BRYNNER qui fut pendant
plusieurs années à travers le monde, le
porte-parole officiel des pellicules FUJI
et des appareils photographiques
FUJICA, Charlton HESTON pour
CONTEL, David LEISURE pour les
automobiles
ISUZU,
George
KENNEDY pour les climatiseurs
YORK, le pilote d'essai Chuck
YAEGER pour les accessoires ACDELCO de la société GENERAL
MOTORS, le sportif Jim PALMER
pour les sous-vêtements JOCKEY, les
acteurs Cliff ROBERTSON pour le
géant des télécommunications A.T.T.,
Jack
KLUGMAN
pour
les
photocopieurs CANON ou encore
Raymond BURR pour l'Association des
Assureurs Américains Indépendants.
Ce dernier cas est des plus
intéressants en raison de l'engagement
__________________
19 - Voir notamment : "More than just a passing fancy"
Ainsworth HOWARD, ADVERTISING AGE du 30
Juillet 1979 et "Life after MAYTAG : Jesse WHITE heads
for
footlights"
Maurine
CHRISTOPHER,
ADVERTISING AGE du 3 Avril 1989.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
397
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
total de la star. Aux Etats-Unis, les
agents d'assurance indépendants sont
regroupés au sein de l'INDEPENDENT
INSURANCE AGENTS OF AMERICA
(I.I.A.A.). Dans les années 60, l'I.I.A.A.
eut épisodiquement recours à diverses
célébrités pour assurer sa publicité,
parmi lesquelles on retrouve les acteurs
William
HOLDEN
et
Robert
VAUGHN ainsi que différentes
personnalités du monde du sport
comme le joueur de base-ball Brooks
ROBINSON, le footballeur Bart
STARR ou le golfeur professionnel Gay
BREWER. En 1982, elle décida de
s'associer les services d'une seule et
unique personnalité, de façon à
accroître la crédibilité de son discours.
Après avoir sélectionné plus d'une
vingtaine de célébrités dont les
caractéristiques correspondaient aux
objectifs de communication, son choix
s'arrêta sur le nom de l'acteur Raymond
BURR. Malgré une courte carrière
cinématographique, c'est la télévision
qui lui donna son réel succès, et plus
particulièrement les séries Ironside
(L'homme de fer) et Perry Mason où son
interprétation reste mémorable. Par
l'image extrêmement respectable et
respectée qu'il avait véhiculée dans ces
deux
séries20,
il
correspondait
parfaitement
aux
souhaits
de
l'annonceur. De plus, "Monsieur BURR
a foi en ce qu'il vend : l'agent
d'assurance indépendant" nous précisa
__________________
20 - Il incarna un avocat talentueux dans 271 épisodes de
Perry Mason (du 21 Septembre 1957 au 4 Septembre 1966
sur CBS). Il reprit son rôle le 1er Décembre 1981 pour une
série de téléfilms. Il interprétait le rôle du Chef des
Inspecteurs du département de police de San francisco
dans 195 épisodes de Ironside (du 14 Septembre 1967 au 16
Janvier 1975 sur NBC). "Total Television" Alex McNEIL
op. cit. pp.376 et 595-596.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
Donald O. MILLER21, "il avait lui-même
personnellement utilisé les services
d'un agent d'assurance indépendant
pendant plus de 30 années". C'est ainsi
qu'il est devenu le visage de l'I.I.A.A..
Son rôle de porte-parole de le
cantonne
pas
à
une
simple
participation à un spot de publicité.
Bien entendu, il apparaît sur le petit
écran au nom de l'I.I.A.A., mais, et c'est
là l'intérêt de cet exemple, on l'entend
également à la radio, il apparaît aussi
sur les documents de marketing direct,
sur les dépliants, sur les présentoirs de
P.L.V., dans les pages jaunes des
annuaires, sur la newsletter de l'I.I.A.A.
et naturellement sur les différentes
campagnes d'incentive. Une telle
implication ne peut que bénéficier à la
crédibilité de la communication. Par
ailleurs, constituant le lien entre
chaque
élément
de
cette
communication, il permet à la marque
une capitalisation de son image et ainsi,
une identification immédiate de
l'I.I.A.A. par le consommateur.
Et c'est bien là le principal
avantage à l'utilisation d'un porteparole officiel. "A chaque fois que le
porte-parole apparaît dans un spot ou
autre part, il doit rappeler les
associations passées avec l'annonceur
et stimuler le souvenir des messages
passés. Il doit relier les nouveaux
messages avec les anciens et ainsi
construire une image de marque unie,
cohérente, continue et consistante"22.
__________________
21 - Donald O. MILLER est Directeur de la publicité à
l'Independent Insurance Agents of America.
22 - "What a spokesman does for a sponsor" Joseph M.
KAMEN, Abdul G. AZHARI, Judith R. KRAGH, op. cit.,
398
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
L'intérêt de ce type d'utilisation, est de
fédérer l'ensemble des opérations de
communication derrière les traits d'un
seul et même visage. NIPPON STEEL
l'a bien compris avec l'actrice
Sigourney WEAVER, de même que
L'OREAL avec l'actrice / top-model
Isabella ROSSELLINI23. Du rapport
annuel à la campagne institutionnelle24,
en passant par la communication
commerciale de la majorité des
produits LANCÔME, le porte-parole
est le lien qui permet immédiatement consciemment
ou
pas
au
consommateur de décoder le message
quant à l'identité de l'émetteur.
On perçoit dès lors aisément le
soin qu'il est nécessaire d'apporter au
choix de ce porte-parole officiel, tant
l'image de la marque sera liée à celle de
pp. 23-24. Voir également : "The practice of public
relations" Fraser P. SEITEL, 5ième édition, Editions
MacMILLAN (1992), New York, Etats-Unis, Chapitre 11,
pp. 283-293.
la célébrité. Compte tenu de
l'exploitation sur le moyen, voire long
terme, de la célébrité, la recherche
d'adéquation stratégique prend ici tout
son sens. C'est également la raison pour
laquelle il est toujours préférable, pour
l'annonceur
de
s'assurer
impérativement
dans
ce
cas,
l'exclusivité totale de la célébrité ;
même après la fin du contrat
d'exploitation. Toute apparition pour
un autre annonceur ne pourrait que
parasiter, voire phagocyter, une partie
de l'image ainsi construite.25
Une troisième approche permet
de
gommer
totalement
toute
connotation négative pouvant surgir au
sujet de la rémunération de la célébrité :
le contrat de sponsoring. Il est
également parfois choisi à la base pour
pallier un univers publicitaire saturé26.
3 - Le bénéficiaire d'un contrat de
sponsoring
23 - Isabella ROSSELLINI devint mannequin vedette
pour LANCÔME France en mars 1983. C'est Lindsay
OWEN-JONES, alors Vice-P.D.G. du groupe L'OREAL,
qui fit ce choix lors d'un séjours aux Etats-Unis. Isabella
ROSSELLINI signa alors un contrat de 5 ans pour 2
millions de dollars, ce qui faisait d'elle le mannequin le
plus payé au monde. La marque L'OREAL elle-même
utilisa pour symbole dès le début des années 90, une
autre actrice mannequin : Andy Mac DOWELL. Voir
notamment : "L'OREAL Parfumerie étend son univers de
marques" Léna ROSE, POINTS DE VENTE n°470, du 3
Juin 1992.
24 - "La publicité corporate doit avoir le même charme et
le même but que la publicité produit : vous devez non pas
convaincre les institutions financières mais l'ensemble du
public." explique Sean O'CONNOR - Responsable du
budget HANSON - à propos de la participation de
l'actrice Glenda JACKSON. Interview extraite de l'article
"Quand Glenda JACKSON fait de la pub" Isabelle
MUSNIK, COMMUNICATION CB NEWS N°180 du 17
Septembre 1990.
Oubliée aujourd'hui, la radiation
des compétitions officielles de l'athlète
Guy DRUT en 1976, pour avoir accepté
__________________
25 - Lorsqu'en 1984 Catherine DENEUVE lança son
parfum "Deneuve by Catherine", elle choisit bien entendu
les Etat-Unis, où elle était assurée de jouir d'une
capitalisation immédiate de 8 années de bons et loyaux
services au profit du N° 5 de CHANEL. Même après 6
années d'absence, sa présence au travers de plus de 53
films (réalisés par les plus grands metteurs en scène tels
que Richard AVEDON ou Helmut NEWTON) et
d'innombrables annonces presse, était encore dans la
mémoire de la cible.
26 - Frédéric ANNE, Emmanuel J. CHERON, op. cit p.69.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
399
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
quelques milliers de francs lors d'une
rencontre post-olympique27
Certes, cette stratégie n'est pas
adaptable à n'importe quelle célébrité
et surtout à n'importe quel produit.
Seules les stars du sport peuvent
généralement en bénéficier dans les
meilleures conditions, à quelques
exceptions anecdotiques près, comme
le producteur Eddie BARCLAY qui en
1988 trouva le moyen de faire
sponsoriser son nouveau mariage par le
constructeur d'électroménager, MIELE.
"Eddie
BARCLAY
a
beaucoup
d'humour, de même que sa femme, et
MIELE trouva notre proposition très
drôle. D'ailleurs, il y eut de nombreuses
retombées presse" commenta Alain
MAROUANI28.
Le principe est des plus simples.
Le sportif accepte pour parrain un
annonceur décidé à investir dans son
avenir et/ou ses capacités29. Le
principal avantage pour la future star
est qu'elle perçoit de la part de son
parrain une rémunération (fixe,
variable selon ses résultats, ou mixte).
Cet apport financier lui permet dans le
meilleur des cas de se concentrer
exclusivement à sa discipline de
prédilection, sans se soucier de ses
ressources, alors qu'il est encore
débutant30. Lorsque ses résultats lui
permettent d'empocher les gains mis en
jeu lors des compétitions, matchs et
autres tournois, les versements de son
ou ses sponsors constituent alors un
appréciable complément de revenu. En
contrepartie, le sponsor a la possibilité
d'améliorer son image, son statut
d'entreprise citoyenne31 et même sa
notoriété, lorsque le sportif remporte
des victoires. Il demande également en
général l'utilisation exclusive de son
matériel s'il est en rapport avec la
discipline du sportif, et/ou l'apposition
d'un écusson à son nom, son sigle ou
son logo sur les vêtements du sportif,
__________________
McENROE : troisième set gagné" M.D., LE FIGARO du 9
Mars 1991.
27 - "L'argent des dieux du stades" Eric WATTEZ,
30 - C'est notamment la raison pour laquelle ces contrats
CAPITAL n°11 du mois d'Août 1992.
de sponsoring coûtent au départ, en valeur absolue, très
chers aux sponsors, car ils leur faut s'assurer l'utilisation
de leurs produits par le plus grand nombre d'espoirs
possible, pour avoir une chance de monter avec l'élu sur
le podium. Ensuite, c'est en valeur relative - lorsque le
sportif a remporté la victoire et que ses exigences sont
"différentes" - que ces contrats deviennent très onéreux.
Voir notamment "Waxing sales with a downhill race"
Stephen KOEPP, Thomas McCARROLL et Robert C.
WURMSTEDT, TIME du 6 Février 1984 ; "Athletes'
agents sound alarm" Brian MORAN, ADVERTISING
AGE du 22 Juin 1987.
28 - Alain MAROUANI, Directeur aux Productions
EDDIE BARCLAY, Agent. Entretien privé accordé le 12
Avril 1989.
29 - Voir notamment sur ce point : "A word from the
sponsors" Anonyme, TIME du 30 Juin 1980 ; "Sports
Marketing : special report" Collectif, ADVERTISING
AGE du 5 Mars 1990 ; "JORDAN stars for GATORADE"
Bob GARFIELD, ADVERTISING AGE du 12 Août 1991 ;
"La course à l'athlète" Hélène CONSTANTY, TERTIEL de
Mars 1987 sur le contrat Stéphane CARISTAN / BNP ;
"Quand le tennis rackette la publicité" Guillonne de
LAFORCADE, STRATEGIES n°564 du 1er Juin 1987 ;
"Saint MARADONNA" Philippe BOGGIO, LE MONDE
du 6 Décembre 1988 ; "88 Olympic Games less than
golden : 1988 Olympic gold medalists' endorsements"
Dossier
spécial
"Sports
Marketing",
collectif,
ADVERTISING AGE du 13 Mars 1989 ; "PERRIER-
31 - Voir notamment le développement du cas de la
politique de sponsoring de la compagnie pétrolière ELF
AQUITAINE, par son Directeur de la Communication "Le sponsoring sportif chez ELF AQUITAINE" JeanPierre LABRO, REVUE FRANCAISE DU MARKETING
n°115 1987/5 pp. 53-58.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
400
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
sans oublier la potentielle participation
du sportif à la communication
publicitaire voire à la communication
interne32.
Rappelons que le sponsor se
distingue du mécène notamment par
l'objectif commercial poursuivi. Les
voeux de Gaïus Clinius MAECENAS
sont ici totalement oubliés, rentabilité
oblige33. Le sponsor peut alors
demander au sportif de participer à sa
communication
publicitaire,
notamment en fonction du respect du
principe du double budget34. Soit de
façon passive et indirecte en utilisant
des photographies de ses matchs ou ses
concours pour les annonces présentant
les produits du sponsor. Ce fut par
exemple le cas de J.V.C. qui fut l'un des
sponsors de Bjorn BORG et utilisa
longtemps des photos de championnat
du tennisman qui portait un bandeau
__________________
32 - Pierre SAHOUN "Sponsoring, mode d'emploi"
Editions CHOTARD & Associés, Paris (1986) p.109-116,
167. Voir également "Hawking tall : marketers discover
Manute Bol" Mari E. RECIO, BUSINESSWEEK du 28
Avril 1986.
33 - "Le sponsoring s'inscrit dans une politique de
communication de l'entreprise où la valeur
philanthropique accordée au sport est faible. La somme
des dépenses, consacrées au sport, laisse entrevoir un
objectif plus rentable." Nathalie RAGOT, "Sport : logique
sportive - logique d'entreprise" REVUE FRANCAISE du
MARKETING n°138 - 1992/3, p. 102.
34 - Frédéric ANNE, Emmanuel J. CHERON, op. cit. p.71
et 80. Voir également : GREGORY Pierre "Sponsoring et
Mécénat
:
Instruments
de
communication
institutionnelle" REVUE FRANÇAISE DE GESTION du
mois de Septembre-Octobre 1984, pp. 163-175 ; "America's
corp. : CONNER pushes for logos" Patrick McGEEHAN,
ADVERTISING AGE du 29 Février 1988, sur le cas
particulier du skipper Dennis CONNER et ses sponsors
PEPSI COLA, PHILIP MORRIS et MERRILL LYNCH
dans le cadre de la course nautique America's Cup.
sur lequel on pouvait lire les trois
lettres du sigle de la compagnie
japonaise. Notons également le cas des
outils MAKITA, sponsor du tennisman
Miloslav MECIR, ou encore des
photocopieurs MITA, sponsor de
l'athlète médaillée olympique Joan
BENOIT SAMUELSON.
En France, à la fin des années 80,
en tant que sponsor de la Fédération
Nationale du sport universitaire, la
société MANNESMAN TALLY utilisa
pour sa communication publicitaire,
des sportifs tels que Cécile NOWAKS,
Bruno MARIE-ROSE ou Catherine
PLEWINSKI35. "C'est un cas qui tient à
la personnalité du président de
MANNESMAN TALLY France, très
impliqué dans l'élaboration de l'activité
publicitaire de son groupe, ce qui est
rare aujourd'hui." nous expliqua
Richard DEROURE36, du groupe
DOLCI-DIRE alors en charge de sa
communication. "Cet homme est par
ailleurs un grand sportif et un homme
qui a pour lui-même une façon
personnelle de vivre, avec un esprit de
compétition. Cette attitude l'a amené à
affecter une partie non négligeable de
son budget au sponsoring de plusieurs
sportifs. A partir de là, ayant consacré
des sommes importantes à cette
activité, il a souhaité que nos
campagnes soient le prolongement de
__________________
35 - Au regard des résultats aux Jeux Olympiques de
Barcelonne en 1992, il est regrettable que MANNESMAN
TALLY ait interrompu l'utilisation de cet axe, car
considérant la médiatisation grandissante de la
manifestation sportive, une médaille aux J.O. est toujours
une source de communication valorisante pour
l'annonceur sponsor, à l'externe comme à l'interne.
36 - Entretien privé accordé le 17 Mai 1988.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
401
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
cette décision. Notre mission fut de
faire en sorte que l'on débouche
néanmoins sur une communication qui
soit vendeuse". Les exemples sont
nombreux : le skieur Ingemar
STENMARK pour la compagnie 3M, le
boxeur Muhammad ALI pour les bons
municipaux américains F.G.C.I., la
joueuse de tennis Chris EVERT pour
les vêtements ELLESSE, le pilote
automobile Jean ALESI pour les
matériels informatiques EPSON, le
boxeur Ray Sugar LEONARD pour la
bière ADOLPH COORS, les joueurs de
tennis Yannick NOAH pour LE COQ
SPORTIF et Gabriela SABATINI pour
les automobiles SEAT,...
Le sport étant un vecteur de
prescription très fort chez les jeunes
consommateurs,
cela
explique
également en partie, la participation de
plusieurs marques de cigarettes à ces
contrats de sponsoring, tentant
d'échapper aux diverses restrictions
légales dans les media traditionnels37.
Ces produits restent toutefois encore
interdits de Jeux Olympiques ou le
sponsoring est pourtant devenue la
"discipline" la plus pratiquée38. Sponsor
__________________
officiel des Jeux Olympiques de 1984, la
chaîne de magasins 7-ELEVEN confia à
son agence YOUNG & RUBICAM, le
soin de réalisé plusieurs films
publicitaires mettant en scène divers
grands sportifs dont ils était le sponsor
tels que le perchiste Billy OLSON et le
célèbre discobole Al OERTER sur le
thème : "Le rêve commence avec la
liberté"39. En 1992, cette stratégie fut
également suivie par les confiseries
MARS et M&M, utilisant de jeunes
espoirs sportifs. Ce ne sont là que deux
exemples parmi les plus représentatifs.
Lorsque, l'annonceur est également
sponsor officiel d'une manifestation, et
il se doit alors d'utiliser cette occasion
pour capitaliser sur ses deux
investissements en organisant une
campagne de publicité permettant la
synergie et exprimant encore un peu
plus son image dynamique. Car c'est là
l'un des avantages sur le plan de la
communication, l'entreprise sponsor
essaye de tirer partie du dynamisme de
ces sportifs.
Le sponsoring sportif est
d'ailleurs une approche publicitaire en
pleine expansion puisque sur les trois
dernières Olympiades le montant des
recettes du C.I.O.40 en matière de
37 - On peut citer les cas de l'emblème MARLBORO très
étroitement associé à l'écurie de course automobile MAC
LAREN, le CAMEL Trophy et le Raid GAULOISES, le
tournoi de tennis VIRGINIA SLIMS, le championnat de
Bowling LUCKY STRIKE, le tournoi de rodéo
WINSTON,... Voir notamment "WARNING : Sports
stars may be hazardous to your health" résumé d'après un
article de Jason DePARLE, paru dans WASHINGTON
MONTHLY, READER's DIGEST du mois de Janvier
1990.
38 - Voir notamment "Japon : 50 sponsors très motivés"
Antigone SCHILLING, COMMUNICATION CB NEWS
n°265 du 16 Juillet 1992. "Tous [les sponsors]
reconnaissent qu'un produit se vend mieux s'il est
estampillé de l'emblème olympique" Nathalie HAMOU
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
"Barcelone : le triomphe du sport-business / Quand le
marketing olympique explose" LA TRIBUNE du 24
Juillet 1992.
39 - "Les 4 grands films américains", Anonyme, MEDIAS
n°82 du 23 Juillet 1984.
40 - Le Comité International Olympique, via la société
ISL Marketing qui se charge de la commercialisation de
l'emblème olympique. Voir notamment : Israel D.
NEBENZAHL et Eugene D. JAFFE "The effectiveness of
sponsored events in promoting a country's image",
INTERNATIONAL JOURNAL OF ADVERTISING
Volume 10, 1991, pp. 223-237 et "Sponsors lash Olympic
402
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
sponsoring sont passées de 189 millions
de dollars en 1984 (Los Angeles) à 225
millions de dollars en 1988 (Séoul),
pour atteindre 564 millions de dollars
en 1992 (Barcelone). Mais gageons
qu'avec l'augmentation - l'explosion du prix des tickets d'entrée atteignant
parfois 300% pour les sponsors qui
seront présents à Atlanta, on dépassera
encore largement ces résultats en 1996.
Le monopole de l'olympisme n'a pas de
prix...
La participation active du
sportif à la communication publicitaire
peut d'autre part constituer un moyen
de rapprocher le sportif du produit,
lorsque ce dernier n'a pas réellement de
rapport direct avec sa discipline. C'est
ainsi que le coureur moto Giaccomo
AGOSTINI participa directement à la
publicité pour la boisson GINI, les
joueurs de tennis Boris BECKER pour
les
appareils
photographiques
POLAROID, Steffi GRAF pour les
automobiles OPEL, Jimmy CONNORS
pour
la
compagnie
financière
américaine PAINE WEBBER, le
coureur cycliste Eddy MERCKX pour
la lessive ARIEL, les athlètes Ben
JOHNSON
pour
la
collective
finlandaise du lait et Carl LEWIS pour
l'audiovisuel
PANASONIC,
les
footballeurs Ruud GULLIT pour la
compagnie aérienne JAPAN AIR
LINES, Michel PLATINI pour les
téléviseurs THOMSON, Jean-Pierre
PAPIN pour les rasoir BIC, Diego
MARADONA pour la bière japonaise
ASAHI, la navigatrice Florence
ARTHAUD
pour
les
yaourts
TAILLEFINE,...
ambushers" Joe MANDESE et Alison
ADVERTISING AGE du 17 Février 1992.
FAHEY,
Cette implication plus directe
du sportif dans la communication du
sponsor est de plus en plus souvent
recherchée aujourd'hui, car elle donne
plus de naturel à la communication,
que la simple apposition d'une photo
de compétition ou d'entraînement sur
l'annonce. La communication croît en
crédibilité dès lors que l'implication
réelle du sportif peut être perçue par le
consommateur.
Du côté des célébrités du monde
sportif, il faut cependant relativiser le
potentiel
et
surtout
l'attrait
commercial de chaque discipline. Quel
judoka, quel tireur à l'arc, quel
gymnaste, quel escrimeur aussi
médaillé soit-il, pourrait rivaliser avec
par exemple, les 130 millions de revenus
annuels en 1991 du basketteur
américain
Michael
JORDAN,
provenant de contrats commerciaux41 ?
On peut émettre deux raisons à cela. La
première réside dans le fait que la
plupart de ces sportifs n'utilisent pas
d'équipements que l'on puisse destiner
__________________
41 - Pour avoir un aperçu de l'irrésistible ascension de
l'utilisation publicitaire du joueur de basket américain,
de 1985 à 1992, voir notamment : "Air JORDAN takes off"
Anonyme, NEWSWEEK du 17 Juin 1985 ; "Air JORDANS
: how much JORDAN how much AIR ?" H.F.
RUBINSTEIN, SPORT MAGAZINE du mois de Mars
1986 ; "Jordan's Wilson deal nest him $1 million"
Anonyme, JET du 2 Novembre 1987 ; "Air JORDAN has
the BULLS walking on the cloud" M.D. O'NEAL,
BUSINESSWEEK du 12 Décembre 1988 ; "Michael Jordan
calls criticism a bum rap" Anonyme, JET du 7 Mai 1990 ;
"JORDAN stars for GATORADE" Bob GARFIELD,
ADVERTISING AGE du 12 Août 1991 ; "Michael Mania !
Why it's not easy being America's biggest sports hero"
Collectif, SPORTS ILLUSTRATED FOR KIDS du mois
de Mai 1992 ; "JORDAN stars in spanish undies spot"
John POLLACK, ADVERTISING AGE du 26 Octobre
1992.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
403
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
à des marchés de masse. A combien se
monte les marchés de la vente de barres
parallèles, d'arcs de compétition, de
fleurets ou kimonos, comparativement
à ceux de la chaussure de sport, du
short, du survêtement ou même de la
raquette et des balles de tennis ? Rien
de comparable ici. La seule possibilité
résiduelle pour ces sportifs, est de
devenir à ce point célèbres, qu'ils
deviendront
potentiellement
(commercialement) intéressants, même
pour un sponsor dont le produit n'a
rien à voir avec la discipline considérée.
On retrouve ici, l'une des
conditions incontournables de la
célébrité de la star : sa médiatisation, et
c'est là, la seconde raison pouvant
expliquer
les
différences
entre
disciplines. Il y des sports de télévision et
des sports confidentiels. Or, les oubliés
du petit écran, le sont aussi la plupart
du temps des sponsors qui n'y trouvent
pas un intérêt aussi grand. La
retransmission d'une compétition ou
d'un tournoi, un reportage sportif, un
sujet lors d'un journal télévisé,
l'interview d'un sportif,... sont autant
d'occasions pour le sponsor de voir son
nom bénéficier d'une présentation
supplémentaire sans frais, à des
millions de consommateurs potentiels.
En France, même si le C.S.A. (Conseil
Supérieur de l'Audiovisuel), au nom
notamment
de
la
déontologie,
recommande que ces publicités
indirectes soient limitées au minimum
incontournable, aucun coureur cycliste,
aucun tennisman, aucun athlète,...
n'oublierait de réajuster son maillot,
son blouson ou sa casquette à l'effigie
de son ou ses sponsors, avant de passer
devant les caméras.
Seuls les Jeux Olympiques42
permettaient il y a quelques années
encore, aux champions de ces
disciplines délaissées, de séduire
quelques annonceurs passionnés pour
des contrats de courte durée. Mais l'on
peut penser que, depuis que
l'amateurisme prôné si chèrement par
Pierre de COUBERTIN est remisé, au
profit
de
manifestations
commercialement plus porteuses avec
la
participation
de
sportifs
professionnels, cette disproportion
entre disciplines ne va pas cesser de
croître. Revers de la médaille pour les
sportifs,
cette
commercialisation
extrême des vedettes du sport doit être
rentable pour l'annonceur43. Pas
question d'être le sponsor d'un perdant
au regard des dépenses engagées44. Et
aujourd'hui, pour de nombreux
"sportifs", lorsqu'ils ne montent pas sur
le podium, peu importe de perdre une
__________________
42 - Certains pays récompensent leurs sportifs méritants.
Ainsi par exemple, en 1992, aux Jeux Olympiques de
Barcelone, la France payait 80.000 F. une médaille de
bronze, 150.000 F. une médaille d'argent et 250.000 F.
une médaille d'or ; exonérés d'impôts, ces montants sont
versés par le Fonds National pour le Développement du
Sport. En revanche, le Comité Olympique Américain,
estimant déjà très avantageuses les rémunérations
procurées par les contrats de sponsoring publicitaire, ne
versait aucune récompense. "J.O. : le salaire de la victoire /
Les Etats qui versent le salaire de la sueur" Richard
LOYANT et Etienne MOATTI, LA TRIBUNE du 3 Août
1992.
43 - Principalement en terme de notoriété et d'image.
Voir "La mesure de l'efficacité du Marketing" Frédéric
ANNE, REVUE FRANCAISE DU MARKETING n°138 1992/3, pp. 123-136.
44 - Voir notamment : "Applications of consumer
behavior : redaings and exercises" Gail TOM, Editions
PRENTICE-HALL Inc. (1984), Englewood Cliffs, NJ,
Etats-Unis, pp. 79-80.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
404
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
médaille, la catastrophe se situe au
niveau des centaines de milliers, voire
des millions de dollars de contrats
publicitaires qui vont inéluctablement
leur échapper45. Enfin, les sponsors
recherchent bien entendu de plus en
plus le sportif dont la discipline
bénéficie de l'attention d'un public qui
correspond le mieux possible à sa cible
en termes d'âge, de sexe ou encore de
catégorie socioprofessionnelle46.
Bien que cette approche soit
essentiellement réservée au monde du
sport, on constate également l'intérêt
des annonceurs pour séduire de jeunes
vedettes de la chanson et s'associer à la
production de l'un de leurs disques, de
l'un de leurs concerts ou d'un vidéoclip. En France, le magazine NOUS
DEUX participa au premier disque de
la chanteuse EMMANUELLE, les jeux
d'assemblage LEGO devinrent parrain
pour le groupe LES AVIONS, le
CREDIT AGRICOLE sponsor du
groupe GOLD, les cosmétiques NIVEA
du groupe NIAGARA, LUSTUCRU
pour LES ABLETTES, THOMSON
pour Jeanne MAS,... En Mai 1987, la
__________________
45 - Voir à ce sujet : "After the games, cash" Jerry ADLER,
Martin KASINDORF, Daniel PEDERSEN, Richard
MANNING et John McCORMICK in NEWSWEEK du
20 Août 1984 ; "Navy's Robinson sets sail - Shoe, ball
endorsements
close"
Steven
W.
COLFORD,
ADVERTISING AGE du 21 Septembre 1987.
46 - Ainsi en France en 1992, le cyclisme correspondait un
cible masculine de plus de 50 ans, l'athlétisme à une cible
mixte (à tendance féminine) âgée de 15 à 34 ans, le
patinage à une cible féminine composée de femmes
actives et de ménagères, la boxe à une cible mixte (à
tendance masculine) âgée de 15 à 49 ans,... Voir sur ce
sujet l'étude IDEMEDIA TV / MEDIAMETRIE in "Le
sport cherche ses marques" Caroline de MALET,
MARKETING MIX n° 67 du mois de Novembre 1992.
chanteuse LIO apparut sur des
publicités PHILIPS47 pour le movingsound réalisées par l'agence PUBLICIS.
Choisie à la suite de tests effectués
auprès de lycéens parce que le produit
s'adressait essentiellement aux 12-16
ans, LIO correspondait parfaitement à
la cible du produit. PHILIPS quant à
lui, participa activement au spectacle
de la chanteuse à l'Olympia, cette
année-là. "Cela s'insérait dans la
stratégie de la marque et pas seulement
dans la stratégie de communication"
nous expliqua Christian VIAL48, de
l'agence PUBLICIS qui conçut la
campagne, "il est logique que PHILIPS,
un des grands spécialistes mondiaux du
son, s'associe à la musique via le
sponsoring"49.
Ainsi,
nombreux
sont
aujourd'hui les chanteurs confirmés qui
__________________
47 - "PHILIPS : c'est déjà demain pour LIO" Christine
HALARY, STRATEGIES n°561 du 11 Mai 1987 ; "Moving
sound et moving star" N.V., L'ECHO DE LA PRESSE ET
DE LA PUBLICITE du 13 Mai 1987.
48 - Entretien privé accordé le 7 Avril 1988.
49 - PHILIPS est depuis 1985, le sponsor officiel des
concerts du groupe DIRE STRAITS. A l'origine, le
contrat avait été signé pour promouvoir le disque
compact du groupe néerlandais qui souhaitait se
détacher de l'image "ringarde" (sic) que subissait
PHILIPS en matière de matériel audio. Les cibles
réciproques des deux produits - 20-45 ans - coïncidaient.
"Nous pouvons approcher les médias beaucoup plus
facilement que si nous n'avions pas DIRE STRAITS.
Nous avons calculé que chaque dollar investi dans ce type
de publicité a un rendement dix fois supérieur à celui de
la publicité classique pour des produits PHILIPS"
explique Steven KOK, Responsable de la communication
du département audio de PHILIPS Consumer
Electronics. "PHILIPS et DIRE STRAITS unis par les
liens du marketing" R. DE GRAAF, HET FINANCIEELE
DAGBLAD, dont la traduction est parue dans
COURRIER INTERNATIONAL N°85 du 18 Juin 1992.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
405
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
recherchent ce type d'associations
lucratives.
que se livrent les compagnies COCACOLA et PEPSI-COLA52. S'il est
toujours difficile de départager ces
deux géants sur le goût de leur boisson
fétiche, malgré les tests d'importance
nationale du "PEPSI Challenge" que
PEPSI-COLA diffusa sur les antennes
américaines dans les années 70, les
deux limonadiers sont captivants par le
combat qu'ils se livrent sur le terrain
des célébrités. Toutefois, le rapport de
force entre COCA-COLA et PEPSICOLA est totalement différent d'un
pays à l'autre. En France par exemple,
la communication publicitaire des deux
géants ne nous permet pas à l'heure
actuelle, d'assister encore en détail à ce
combat de stars53. Il n'en va pas de
même aux Etats-Unis.
Aux Etats-Unis, on peut citer le
cas du chanteur Phil COLLINS ou
Steve WINWOOD dont la bière
MICHELOB50 fut le sponsor, les
cigarettes
CAMEL
pour
Eric
51
CLAPTON,... Mais l'exemple le plus
intéressant qui nous vient une fois de
plus des Etats-Unis, est probablement
le combat titanesque et international
__________________
__________________
50 - Steve BLOUNT et Lisa WALKER, 1988, op. cit. pp.
52 - Voir notamment : "Big gain for MONTANA in
126-137. Voir également : "KOOP's swan song : Celebrity
beers ads could feel new heat" Steven W. COLFORD,
ADVERTISING AGE du 22 Mai 1989., à propos de
l'inquiétude des pouvoirs publics américains sur le
puissant effet normalisateur que peuvent avoir ces stars.
endorsements bowol" Scott DONATON, Patricia
WINTERS et Cleveland HORTON, ADVERTISING
AGE du 30 Janvier 1989 ; "PEPSI cals COKE ads
misleading" Patrica WINTERS, ADVERTISING AGE du
30 Janvier 1989 ; "PEPSI/COCA : La comparative par
excellence"
Jean-Sébastien
STEHLI,
COMMUNICATION CB NEWS N°192 du 10 Décembre
1990 et sur l'historique de cette guerre : l'émission
"Bubbles war" John PILGER, DAILY MIRROR /
CENTRAL INDEPENDANT TELEVISION P.L.C. (1984).
51 - Sur le rôle de ces nouveaux Médicis des temps
modernes, on pourra notamment se reporter à l'article
"Wing - Tip Rock and Roll : Companies and stars benefit
from sponsorships, but, for some, a sellout stigma
remains" John SCHWARTZ et Harry HURT III,
NEWSWEEK du 26 Septembre 1988. Voir également :
"REEBOK scores with 'BOSS' : Concert tie-in turns into
marketing bonanza" Judith GRAHAM, ADVERTISING
AGE du 18 Juillet 1988.
53 - "COCA-COLA : 99 ans pour changer" Sylvianne
STEIN, L'EXPRESS du 7 au 13 Juin 1985, "COKE's brash
new European strategy" Patricia SELLERS, FORTUNE
INTERNATIONAL, Volume 122, n°4 du 13 Août 1990.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
musique. Si vous regardez les films
COCA aux Etats-Unis, le problème est
de rester dans l'air du temps".
"J'ai travaillé aux Etats-Unis sur
COCA-COLA. C'est une marque qui vit
du show-business" analyse Vincent
NEGRE54. "Leur marketing est lié à une
image qui a terriblement besoin de
rester contemporaine. Le grand danger
pour une marque comme ça, c'est de se
figer dans une époque passée quelle
qu'elle soit. Contrairement à la France,
il est extrêmement dangereux de rester
dans un quelconque stéréotype
américain. Ce serait une menace
d'extinction. Il faut constamment être
en phase avec la nouvelle génération,
les jeunes de 12-14 ans qui mettent une
pièce de 25 cents dans une machine
pour avoir une boîte de COKE, pensent
et vivent dans un univers de musique.
Les ados, leur premier intérêt est
toujours la musique, c'est pour cela que
l'on voit chez ces marques là une
utilisation intense des vedettes de la
__________________
54
- Vincent NEGRE, P.D.G. du groupe de
communication LINTAS France. Entretien privé accordé
le 2 Mai 1988.
Dès l'émergence des stars,
COCA-COLA les utilisa de façon
intermittente pour la publicité de sa
boisson
gazeuse.
Johnny
WEISSMULLER
et
Maureen
O'SULLIVAN,
Jean
HARLOW,
Jeannette Mac DONALD, Maurice
CHEVALIER, Greta GARBO, Joan
CRAWFORD,... Pour se convaincre
que cette utilisation n'est pas récente, il
suffit de se remémorer par exemple la
célèbre affiche de 193355 qui regroupait
autour du metteur en scène George
CUKOR, les principaux acteurs de son
excellent film Dinner at Eight. On
pouvait y reconnaître Edmund LOWE,
George
CUKOR,
Lionel
BARRYMORE,
Jean
HARLOW,
Phillips HOLMES, Madge EVANS,
Louise CLOSSER HALE, Billie BURKE,
Marie DRESSLER, Karen MORLEY et
Grant MITCHELL.
Alors que la communication
s'était par la suite retournée de part et
d'autre, essentiellement vers le
produit56, on assiste depuis quelques
années et pour le plaisir du
consommateur amateur, à une bataille
__________________
55 - Voir notamment : Donald HAVER "David O.
SELZNICK'S HOLLYWOOD" Editions SECKER &
WARBURG (1980), Londres, Grande-Bretagne, page 131.
56 - A l'exception de quelques campagnes secondaires,
notamment chez PEPSI-COLA où, dans les années 1950,
Phill BAKER, Constance MOORE, Lucille BALL,
Broderick CRAWFORD, William BENDIX, Joseph
COTTEN, Richard DIX ou Joan BLONDELL par
exemple, furent les porte-parole d'une campagne pressemagazine.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
407
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
de stars notamment sur les versions
diététiques de la boisson57. Et les
agences LINTAS (COCA-COLA) et
B.B.D.O. (PEPSI-COLA) d'être les
grands stratèges de cette "guerre des
colas".
Toutefois, avant de commenter
leur générique respectif, observons que
ni l'un ni l'autre ne se cantonne sur le
terrain des stars58. Si celui-ci nous
__________________
57 - Si ni COCA-COLA ni PEPSI-COLA n'eurent
abondamment recours aux stars dans les périodes fastes
des années 40 et 50, c'est tout simplement qu'un
troisième prétendant, ROYAL CROWN, avait fait
sienne, cette approche publicitaire. Ne regroupait-il pas
alors sous sa bannière Gary COOPER, Lucille BALL, Jane
WYMAN, Elizabeth SCOTT, Lauren BACALL, Barbara
STANWICK, Jeanne CRAIN, Steve ALLEN, Bing
CROSBY, Sonja HENIE, Mona FREEMAN, Irene
DUNNE, Carole LANDIS, Ronald REAGAN, Paulette
GODDARD, Claudette COLBERT, Betty GRABBLE,
Linda DARNELL, Ann RUTHERFORD, Alida VALLI,
Hedy LAMARR, Virginia MAYO, Bob HOPE, Shirley
TEMPLE, Jerry LEWIS, Rita HAYWORTH, Ginger
ROGERS, Betty HUTTON, Shelley WINTERS, Gene
TIERNEY et Loretta YOUNG notamment. Générique
qu'il aurait été difficile de surpasser. Pour l'anecdote,
notons qu'une grande star dirigea même l'un de ces
géants du cola. En 1959 au décès d'Alfred STEELE, le
grand patron de PEPSI-COLA, c'est sa femme Joan
CRAWFORD, qui le remplaça et devint l'ambassadrice
de la firme. Se souvenait-elle alors que par une ironie du
sort, elle avait été en 1933 le porte-parole publicitaire de
COCA-COLA et en 1946 celui de ROYAL CROWN
COLA ? Cette stratégie fut manifestement profitable à la
marque ROYAL CROWN car l'on retrouve une analyse
des parts de marché de 1950 à 1964 dans le livre de Jules
BACKMAN "Advertising & competition", Editions NEW
YORK UNIVERSITY PRESS (1967), New York, EtatsUnis, page 107. Alors que la part de marché de COCACOLA baissait de 48,0% à 37,5%, celle de ROYAL
CROWN COLA progressait de 5,1% à 10,5%. Voir
également : "Celebrity cocktail : soft drink ads showing
lots of new talent" Collectif, ADVERTISING AGE du 17
Novembre 1980.
58 - Dave VADEHRA, de la société d'études VIDEO
STORY BOARD, osbervait au sujet de l'utilisation de
célébrités par les deux grandes marques - dans un article
intéresse plus spécialement ici, il ne fait
que compléter une communication
tantôt axée sur le produit et sa
consommation,
tantôt
sur
la
comparaison avec le concurrent.
Maintenant, si COCA-COLA semble
s'intéresser plus particulièrement au
monde du sport avec des stars comme
Boris BECKER, Marvin HAGLER,
Bruce WEITZ, Hugo SANCHEZ,
Michael JORDAN, et des footballeurs
américains tels que Joe GREEN,
Charles MANN, John ELWAY ou
Ronnie LOTT, il dut bien se résoudre à
solliciter aussi le monde de la musique
et de la chanson avec Julio IGLESIAS59,
Tom JONES, Ray CHARLES, Huey
LEWIS, George MICHAEL60 ou THE
NEW KIDS ON THE BLOCK,
recourant également au sponsoring de
concerts avec Whitney HOUSTON,
Elton JOHN, Eric CLAPTON ou JeanJacques GOLDMAN entre autres.
PEPSI-COLA avait quant à lui dès le
départ, opté stratégiquement pour la
musique devenant le sponsor de stars
aussi
prestigieuses
que
Tina
TURNER61, David BOWIE, Glenn
FREY,
Lionel
RITCHIE,
Rod
paru dans le magazine américain ADVERTISING AGE,
"PEPSI eyes WILLIS, wife" Patricia WINTERS, le 6
Novembre 1989 -, que "si l'un des deux le fait, l'autre doit
également le faire. Ils n'ont pas le choix." Voir à propos de
la guerre des colas, Hank SEIDEN, op. cit., pp. 59-67.
59 - "Julio I. le plus grand dealer de COKE du monde"
Collectif, CREATION n°1 du mois de Janvier 1985.
60 - "George MICHAEL's spot for DIET COKE lacks pop"
Bob GARFIELD, ADVERTISING AGE du 13 Février
1989.
61 - "Tina COLA et PEPSI TURNER : Voyage de noces
européen" Philippe LEFEVRE, COMMUNICATION &
BUSINESS N° 18 du 26 Janvier 1987, .
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
408
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
STEWART,
MADONNA62
ou
l'incontournable Michael JACKSON63.
PEPSI-COLA pratique également ce
sponsoring musical avec des stars
locales des pays dans lesquels il est
présent64, Evandro MESQUITA au
Brésil, Emmanuel au Mexique,
ANCHALEE en Thaïlande, Gino
PADILLA aux Philippines,... Ces stars
sont alors souvent associées à une
grande star américaine, comme Tina
TURNER, lors de leurs prestations
publicitaires65.
__________________
62 - Il est intéressant de noter que lors de la remise en
compétition par le groupe PERNOD de son budget
ORANGINA en 1987, l'une des agences (P.B.E.)
participant à la spéculative avait pressentie - et obtenu
son accord - MADONNA pour devenir le nouveau porteparole de la boisson en France. Nous travaillions alors
pour cette agence et la star avait donné son accord. Mais
la décision du groupe PERNOD voulut qu'une autre
agence (PUBLICIS-SUCCESS SLAD) se voit attribuer le
budget. Pour sa participation à la communication PEPSI
voir notamment : "PEPSI should offer prayer to
MADONNA" Bob GARFIELD, ADVERTISING AGE du 6
Mars 1989.
63 - "Son marché : le monde" François CUEL, MEDIAS
N°74 du 30 Mars 1984 ; "Michael PEPSI JACKSON"
Collectif, ADVERTISING AGE du 28 Septembre 1987 ;
ENRICO Roger et Jesse KORNBLUTH "The other guy
blinked, how Pepsi won the Cola Wars" Editions
BANTAM (1986), New York, Etats-Unis, chapitres 7 et 8.
64 - Aux Etats-Unis, PEPSI-COLA offrit également des
contrats de sponsoring à des chanteurs ou des groupes
représentatifs de la minorité hispanique et peu connus,
tels que MENUDO, CHAYANE ou encore MIAMI
SOUND MACHINE, en contre-partie de leur
participation à la communication publicitaire de la
boisson. Ce fut pour la plupart un véritable tremplin vers
la gloire - internationale parfois. Voir notamment :
"PEPSI breaks the sound barrier" Ed FITCH,
ADVERTISING AGE du 27 Février 1989.
65 - "Nous nous battons contre COKE dans 130, 140 pays.
Nous sommes n°1 dans près de 40 pays et nous sommes
n°2 dans les autres, c'est pourquoi nous avons besoin
d'une campagne qui soit très flexible" expliquait Robert
WALKER, Vice-Président du Marketing et des ventes
Si au delà de l'impact "naturel",
l'objectif de l'utilisation d'une célébrité
dans la publicité est avant tout de
convaincre, il pourra être intéressant de
rechercher un quatrième type de porteparole, reconnu pour sa connaissance /
sa maîtrise du sujet, bref, un expert.
4 - L'expert
Pour dépasser le stade de
l'impact, l'une des principales qualités
que doit avoir la célébrité est comme
nous l'avons vu, d'être crédible auprès
du public auquel elle s'adresse66. Si ce
dernier suppose un instant qu'elle n'a
aucun lien avec le produit dont elle est
le porte-parole ; si l'espace d'une
seconde, naît dans son esprit que la
relation financière qui l'unit au produit
est la seule existante, le charme est
rompu, la banalité publicitaire refait
surface, l'objectif de séduction /
déclenchement du comportement ne
sera jamais atteint.
Aujourd'hui, dans la grande
majorité des cas d'utilisation de
célébrités, pour vanter les mérites d'un
produit ou d'un service, le publicitaire
s'efforce de prendre ce critère en
considération, car il est l'un des
éléments moteurs permettant de
générer une attitude favorable du
pour l'International. "PEPSI spotlights Tina TURNER
overseas new $20 million pitch from O&M" Nancy
GIGES, ADVERTISING AGE du 10 Mars 1986. Voir
également "Son partenaire : une boisson gazeuse"
Philippe BLOCH, MEDIAS n°74 du 30 Mars 1984.
66 - Voir également Hershey FRIEDMAN et Linda
FRIEDMAN, op. cit. (1979).
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
409
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
consommateur, à l'égard du produit67.
Plus encore lorsque le degré
d'implication du consommateur est
faible68. L'objectif est alors de trouver le
ou les porte-parole qui en raison de leur
profession, leur passion, leurs qualités
ou tout simplement les attributs et
connotations qui leur sont attachés,
apporteront le maximum de crédibilité
au message. L'un des plus sûrs moyens
de parvenir à associer célébrité, produit
et crédibilité est de recourir à la
célébrité-expert.
Mais qu'est-ce qu'une célébritéexpert ?
La
célébrité-expert
est
justement celle qui par sa profession,
ses différentes activités ou l'image dont
elle
bénéficie,
symbolise
immédiatement dans l'esprit du public,
le ou les liens qui l'ont amenée à
devenir le porte-parole du produit ou
du service concerné. En tant qu'expert,
elle met ainsi son savoir et son
expérience au service du produit. Il ne
reste plus au publicitaire qu'à révéler
au consommateur, les qualités du
produit, par l'intermédiaire de cette
expérience. Plus le produit sera
sophistiqué, technique, plus les
messages factuels, argumentés et précis
__________________
67 - "The effet of salesman similarity and expertise on
consumer purchasing behavior" Arch G. WOODSIDE et
William J. DAVENPORT Jr., JOURNAL OF
MARKETING RESEARCH, Volume XI (Mai 1974) p.
201.
68 - Voir notamment : "Personnal involvement as a
determinant of argument-based persuasion" Richard E.
PETTY, John T. CACIOPPO, Rachel GOLDMAN,
JOURNAL OF PERSONALITY AND SOCIAL
PSYCHOLOGY Volume 41, n°5, (1981), page 852.
seront attendus de la part du
consommateur. Les attributs qualitatifs
émotionnels ne sont plus ici les
premiers recherchés, comme ils
l'étaient pour des produits comme les
cosmétiques ou les cigarettes69.
De tout temps, les publicitaires
souhaitant utiliser une personnalité
pour sa crédibilité en plus de son
impact, ont recherché les célébritésexpert susceptibles de convaincre le
public, parce qu'elles sont celles qui
comportent le plus faible risque de
rejet. En 1910, par exemple, les
machines parlantes de la marque
GRAMOPHONE, utilisaient la caution
de cinq ténors et de deux cantatrices
célèbres. Par l'apposition de leur
photographie accompagnée de leur
nom, la marque utilisait leur expérience
pour attester que ses machines
parlantes étaient "vraiment parfaites"
en affirmant : "Les artistes les plus
célèbres de notre époque en ont
témoigné hautement. Ils ne chantent
qu'au GRAMOPHONE". Parmi ces
personnalités, figurait le grand ténor
italien Enrico CARUSO, au sommet de
la gloire et devenu quelques années
auparavant,
Premier
Ténor
au
Metropolitan Opera de New York. Qui
mieux que des chanteurs célèbres de ce
talent pouvaient attester de la qualité
de reproduction sonore du produit ?
Parmi les célébrités dont le
savoir et l'expérience furent les plus
sollicités par la publicité, on distingue
__________________
69 - Voir notamment Morris HOLBROOK "Beyond
Attitude structure : toward informational determinants
of attitude" JOURNAL OF MARKETING RESEARCH
15, du mois de Novembre 1978, page 554.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
410
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
principalement cinq catégories de
porte-parole. Il s'agit des producteurs
de ces produits - les managers, dont le
cas sera traité séparément dans le
paragraphe suivant -, des sportifs, des
musiciens, des grands cuisiniers notamment en France -, et des acteurs,
ou plus exactement comme nous le
constaterons,
des
personnages
symboles qu'ils incarnèrent à l'écran et
dont l'expérience ne serait être mise en
doute par la cible...
séparation, 2 : l'initiation, 3 : le retour.
Cela lui permet de définir une matrice
tridimensionnelle représentant les
différentes combinaisons possibles.
Les sportifs.
Nous ne traiterons ici que de la
publicité faîte pour des articles
pouvant bénéficier de l'expérience des
différents sportifs célèbres. En ce sens,
nous ne reviendrons pas sur l'aspect
contrat
de
sponsoring
vu
précédemment. Ces sportifs, ces "héros
du stade" sont aujourd'hui devenus redevenus ? - de véritables et
incontestables stars, connues et
reconnues au même titre, et parfois
plus que les stars de cinéma ellesmêmes. Reprenant l'analyse du
psychologue Carl Gustav JUNG, Alf H.
WALLE70 observe que les trois
composantes du héros universel de
légende peuvent s'appliquer aux
sportifs célèbres d'aujourd'hui. 1 : la
Ainsi, trois types d'initiation
seraient possibles selon le Professeur
WALLE, le héros Blitzkrieg dont la
célébrité est rapide, quasi instantanée ;
le héros esclave dont les capacités ne
sont pas exploitées et à qui un ancien
peut parfois venir en aide ; et l'étranger
mystérieux aux prouesses nonhéraldiques. Une fois établi, le sportif
peut alors rencontrer des obstacles tels
que des blessures physiques, des
faiblesses psychologiques ou encore un
vieillissement rapide. Lors de la
troisième et dernière phase, le héros
peut enfin retrouver ses prouesses
d'antan, surmonter les suspicions à son
égard ou encore contrecarrer les
assauts du temps.
__________________
70 - Professeur à l'Université de Akron aux Etats-Unis,
Alf H. WALLE s'est essentiellement servi du cas du
quaterback professionnel du football américain et de
celui du joueur de baseball, pour son étude. Toutefois,
l'intérêt de son analyse nous porte à penser qu'elle
pourrait s'appliquer à d'autres disciplines sans obstacles
majeurs quant à sa déclinaison. Voir notamment : Alf H.
WALLE "Archetypes, athletes and advertising : a Jungian
approach to promotion" JOURNAL OF CONSUMER
MARKETING Volume 3, n°4 (Automne 1986) pp. 21-29.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
411
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Variantes des archétypes de la légende du quaterback
Séparation
Physiologique
Psychologique
Viéillissement
Prouesses retrouvées
Doute intelligemment surmonté
Héros
Blitzkrieg
Viéillissement contourné
Héros
esclave
Retour
Etranger
mystérieux
Initiation
Alf H. WALLE
"Archetypes, athletes and advertising : a Jungian approach to promotion"
JOURNAL OF CONSUMER MARKETING Vol. 3, n°4 (Automne 1986)
D'après la figure n°1 de la page 24
Il est entendu qu'aujourd'hui,
tous les sportifs de haut niveau dont la
discipline est médiatisée, ont un ou
plusieurs
sponsors
et
qu'en
contrepartie de ces contrats, les
sportifs sont amenés à prêter leur
image
à
des
fins
purement
commerciales et pour des produits où
leur expérience reste à définir, comme
par exemple le coureur automobile
Jacky STEWART pour le whisky
GLENFIDDICH, le tennisman Yannick
NOAH pour les jeans C17 ou encore
l'audiovisuel HITACHI, le joueur de
basket-ball Michael JORDAN pour les
automobiles CHEVROLET, le golfeur
Arnold
PALMER
pour
les
photocopieurs APECO, le coureur Jesse
OWENS pour le bourbon JIM BEAM,
le skieur Franck PICCARD pour les
pellicules FUJI,... Ces contrats de
sponsoring ne nous intéressent pas ici
en tant que tels.
Maintenant, pourquoi utiliser
un sportif-expert, et quel sportif ?
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
412
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
que Jean-Michel CARLO2 appelle "la
proximité immédiate entre la marque et
une vedette".
Compte tenu du développement
de l'information, les sportifs et
notamment pour certains sports tels
que le tennis, le football, la course
automobile, le base-ball au Etats-Unis
ou le cyclisme en France, n'ont pas
échappé à une forte médiatisation.
Celle-ci a pour résultante de faire
connaître le champion non seulement
aux sportifs amateurs, licenciés ou pas
du sport concerné, mais aussi à ceux
que nous appellerons les sportifs
occasionnels, qui, bien que ne
pratiquant pas le sport en question de
manière assidue, n'en sont pas moins
consommateurs
de
vêtements,
chaussures et autres équipements
divers. Ces stars sportives devenaient
dès lors de formidables prescripteurs,
munis
d'une
expérience
de
professionnels que la publicité
s'empressa de mettre à profit1. C'est ce
__________________
1 - Sans oublier le fait que pour une cible de jeunes
Ici plus qu'ailleurs, l'exclusivité
est indispensable pour un même type
de produit. Alors que l'on a vu par
exemple en France, le comédien Claude
BRASSEUR participer successivement
à la publicité ou à la promotion des
marques
automobiles
VOLVO,
RENAULT et MERCEDES, il ne peut
en aller de même dans le monde du
sport où les différentes marques leaders
s'arrachent parfois à prix d'or
l'exclusivité des grands champions.
Lorsque le coureur automobile Alain
PROST apporta son expérience du
monde de l'automobile à la marque
MIDAS, il était absolument nécessaire
de s'assurer de cette exclusivité.
souvent des modèles. "Les grands annonceurs
recherchent des athlètes dont le rôle puisse faire
s'échapper leurs fans de leur vie quotidienne" expliquait
Leigh STEINBERG, l'un des agents les plus importants
aux Etats-Unis. "Air JORDAN takes off" Anonyme,
NEWSWEEK du 17 Juin 1985 ; "Heroes getting squeezed"
Brian MORAN, ADVERTISING AGE du 17 Août 1987.
Voir également "Smooth sailing up madison avenue"
Annetta MILLER et Maggie MALONE, NEWSWEEK du
30 Mars 1987 ; "NIKE, REEBOK staging their own
Olympic battle" Joe MANDESE, Gary LEVIN,
ADVERTISING AGE du 3 Août 1992 ; "It's a whole new
GODZILLA" Alice Z. CUNEO, ADVERTISING AGE du
14 Septembre 1992.
2 - Entretien privé accordé le 28 Avril 1988.
consommateurs, ces sportifs de haut niveau deviennent
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
413
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Certains publicitaires, comme
Jean-François
VARIOT3,
pensent
cependant qu'il y avait "une confusion
générale, une superposition de PROST
et de la profession, un problème de
crédibilité grave. Il essaye de faire
passer la caution, le label, mais ça ne
passe pas et il y a du brouillage. Il y a
un gap tel entre la technicité d'une
formule 1 et la façon dont Alain PROST
exprime son soutien à MIDAS, que ça
ne passe pas. La relation entre la
personnalité et la marque n'est pas
évidente". Mais tests à l'appui, Michel
VADON4 - de l'agence FAURE,
VADON, FOREST, BRIDOUX qui eut
la charge du budget - observe que la
crédibilité était due au contraire à cette
expérience du pilote : "cette
collaboration avec MIDAS a accéléré la
notoriété
sans
aucune
erreur
d'attribution. Alain PROST cautionne
le produit, il vient appuyer le message.
Ce n'est que si la star vient appuyer un
concept, que les gens restituent la
marque".
d'expert du pilote en débutant par un
"plagiat" de testimonial traditionnel
pour des couche culottes, des
savonnettes ou des robots de cuisine5.
"C'est conceptuel, intelligent parce que
son expérience dans le domaine de la
voiture est une évidence. D'autre part,
je trouve que c'est assez malin de
prendre le contre-pied au départ, pour
exprimer sa crédibilité dans son
domaine" complète Jean-François
MINNE6, de l'agence T.B.W.A..
Pourquoi Jean-Claude ROBYN7,
de l'agence Mac CANN-ERICKSON, at-il utilisé le pilote automobile pour la
marqe américaine de pneus GOOD
YEAR ? Pour l'impact certes, mais
surtout pour la caution de l'expert. "La
réponse est simple, explique-t-il, c'est
parce qu'il était champion du monde.
Certainement l'un des coureurs
automobiles les plus connus dans le
monde, et certainement le coureur
automobile, le champion le plus connu
en France en matière de course
automobile. On vend des pneus, Eagle
NCT, qui sont des pneus très
performants et particulièrement au
niveau de la tenue de route. Si vous
avez vu le film, il vaut mieux qu'ils
tiennent la route. On a donc fait un film
spectacle. Mais la notion de rêve
intervient aussi, parce que lorsque l'on
voit ce jeune gardien de parking qui
descend au volant de cette voiture en
prenant tous les risques... Il y a je crois
En 1988, quatre films viendront
d'ailleurs mettre l'accent sur la qualité
__________________
__________________
5 - "MIDAS : Plein pot" Isabelle Sophie LECORNE,
STRATEGIES N°599 du 14 Mars 1988.
3 - Entretien privé accordé le 24 Mai 1988.
6 - Entretien privé accordé le 20 Avril 1988.
4 - Entretien privé accordé le 4 Juin 1991.
7 - Entretien privé accordé le 7 Avril 1988.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
414
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
une crédibilité lorsque Alain PROST
dit : «Oui, les pneus Eagle NCT, ça
compte !», et les recommande. Il faut
connaître Alain PROST, ce n'est pas
quelqu'un qui pour de l'argent dirait
n'importe quoi, pour n'importe quel
produit8. Du reste, il fait très peu de
publicité. En fait, tout le message est là.
Je crois que c'est une caution, ça
apporte une valeur ajoutée à la marque,
c'est la caution d'un spécialiste."
Cette
expérience
peut
indéniablement porter ses fruits auprès
du public. D'ailleurs, rapidement
perçus comme des prescripteurs
potentiels auprès de nombreux
consommateurs9, les pilotes de course
automobile ont dès leur apparition,
suscités l'intérêt des publicitaires,
mettant cette expérience au service de
la promotion des produits dont ils
avaient la charge. Les pneus
ENGLEBERT (devenus UNIROYAL),
les pneus GENERAL TIRES, les
bougies CHAMPION, las batteries
AUTO-LITE, ou encore les lubrifiants
__________________
8 - En Novembre 1992, Alain PROST participa à la
communication des produits ELF. Il déclara alors au
magazine COMMUNICATION CB NEWS ; "Je suis fan
d'ELF et des techniciens en général qui contribuent à
l'amélioration de la compétitivité en sport auto. Donc je
me sens parfaitement à l'aise pour défendre la marque et
ses produits [...] En fait, j'ai fait peu de pub. Je n'ai tourné
que pour MIDAS, GOODYEAR et maintenant ELF. On
peut ajouter AGIP, mais il ne s'agissait que de l'utilisation
de mon nom, sans que j'apparaisse physiquement.
Toujours dans l'univers automobile, parce que c'est là que
j'ai une crédibilité. Mais j'ai refusé beaucoup de
propositions publicitaires." "PROST : une bonne
communication s'appuie sur une réalité" propos recueillis
par Philippe LEFEVRE, COMMUNICATION CB
NEWS, n°276 du 9 Novembre 1992.
9 - James F. ENGEL, Roger D. BLACKWELL et Paul W.
MINIARD "Consumer behavior" op. cit. page 471.
KERVOLINE
et
MOBILOIL
notamment, utilisèrent ce type
d'expérience.
Mais aujourd'hui, les sportifs les
plus sollicités par la publicité pour leur
expérience, sont différents d'un pays à
l'autre10. En France, on utilise
volontiers les joueurs de football, alors
qu'aux Etats-Unis on préférera les
joueurs de base-ball ou de basket-ball.
Au plan mondial, les sportifs les plus
sollicités par la publicité à l'heure
actuelle, sont probablement les
pratiquants de la forme évoluée du jeu
de paume, le tennis. Le marché des
consommateurs
potentiels,
professionnels ou amateurs, s'étant
développé au rythme de la très large
démocratisation de ce sport, les
sponsors des grands joueurs ont tous
inclus
dans
leur
contrat,
la
participation de ces derniers à des
campagnes de publicité.
__________________
10 - Partout dans le monde, les sportifs mettent ainsi leur
expérience essentiellement au service de matériels,
d'équipements ou de produits, qu'en fonction de leurs
activités ils sont amenés à utiliser. Parce qu'on le
surnomme POPEYE et qu'il est très célèbre au Japon,
l'agence DENTSU utilisa en 1983, le golfeur professionnel
Masahiro KURAMOTO pour le baume anti-fatigue de
son client HISAMITSU SEIYAKU. La campagne jouait ici
totalement sur l'expérience du sportif, propre à générer la
caution du produit. "Vous aussi vous serez capables de
faire des exploits comme le champion KURAMOTO en
prenant l'habitude de conditionner vos muscles avec AIR
SALON PASS" arguait la voix off du film. La première
année, les ventes furent multipliées environ par deux.
Elles quadruplèrent en trois ans. De par son expérience
"universellement reconnue au Japon", Masahiro
KURAMOTO parvint même à convaincre une cible plus
jeune, jusqu'alors insensible à la communication. Voir
également "Banking on heroes" Rob HUGUES,
INTERNATIONAL MANAGEMENT d'Octobre 1989.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
415
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Les exemples sont légion et
permettent par ailleurs de mettre une
nouvelle fois en évidence, une
composante essentielle de cette
association joueurs / annonceurs :
l'indispensable victoire. Celle que se
doivent d'obtenir les athlètes pour
justifier ces rémunérations extrasportives, dépassant parfois de très loin
les gains qu'ils peuvent espérer obtenir
en remportant la victoire aux diverses
manifestations
auxquelles
ils
participent.
L'équation commerciale est très
simple. Si le consommateur fait
confiance à l'expérience des joueurs de
haut niveau pour le choix de son
équipement personnel, il ne faut
cependant pas négliger l'idée que dans
son esprit, la réussite du joueur est en
partie due au matériel employé.
Attention : c'est là une arme à double
tranchant
que
les
annonceurs
connaissent bien. Tant que le joueur est
glorieux, l'annonceur peut en tirer
profit car ses résultats sont
"manifestement" le reflet d'une
expérience sur le choix du matériel11.
__________________
11 - Pour l'anecdote, Pierre LEMONNIER, Président de
l'agence IMPACT (entretien privé le 29 Mars 1988), nous
raconta comment un sportif, Jimmy CONNORS, l'avait
étonné : "Les stars du tennis maculent leurs chemises
avec n'importe quoi d'illisible. Prêtes à tout parce que
jeunesse passe vite dans ce circuit-là. Mais pas JIMBO. Il
y a 20 ans, il a cru dans une WILSON à petit tamis (une
création géniale de René LACOSTE). Les grands tamis
sont arrivés ; puis les moyens. CONNORS est resté fidèle
à son petit panier. Il restait ainsi l'un des cinq meilleurs
du monde. Mais personne n'achetait plus de WILSON
comme la sienne : il a perdu son contrat puisque son
sponsor n'était plus en mesure de financer ce modèle.
Seigneur et fier de l'être, CONNORS a joué gratuitement
jusqu'en 1986 avec sa vieille raquette. Comme quoi un
boulimique du dollar peut être désintéressé. Inutile
d'ajouter que, pour les amateurs avertis, sachant cela,
Mais dès que son étoile pâlit, les
équipements
utilisés
prennent
immédiatement l'image de ceux d'un
perdant.
L'annonceur ne tarde alors pas à
dénoncer son contrat pour porter son
attention sur une autre star naissante
ou confirmée, mais dont l'éclat n'est pas
encore terni par l'échec. Lorsque
l'athlète américain Carl LEWIS fut
accusé de dopage, NIKE n'attendit pas
le résultat des analyses - qui au surplus
se révélèrent négatives - pour rompre
ses relations avec le quadruple
champion olympique. Cela explique en
partie pourquoi les sportifs arrivés au
sommet de leur gloire, sont avides de
contrats publicitaires, la célébrité en ce
qui les concerne étant d'une durée de
plus en plus courte12. En 1992, à la fin
des Jeux Olympiques de Barcelone, la
gymnaste américaine Mary Lou
CONNORS reste une conscience qui n'aura pas de prix
pour ses prochains sponsors. Voir également :
"CONNORS catches on - finally : Tennis star snares
endorsements with major companies. Patrick
McGEEHAN, ADVERTISING AGE du 21 Mars
1988"EVERT's grand slam : Tennis star still hitting aces
with off-court endorsements" Tim HARPER,
ADVERTISING AGE du 27 Juin 1988 ; COURTING
SUCCESS : AGASSI skyrockets to fame - GRAF aces
endorsement
game"
Patrick
McGEEHAN,
ADVERTISING AGE du 29 Aoùt 1988.
12 - Voir notamment "After the Games, cash" Jerry
ADLER, Martin KASINDORF, Daniel PEDERSEN,
Richard MANNING et John McCORMICK in
NEWSWEEK du 20 Août 1984. Voir également "HIV
revelation tests Magic's ad appeal" Collectif,
ADVERTISING AGE du 11 Novembre 1991 et
"JOHNSON's ad magic may be back" Christy FISHER,
ADVERTISING AGE du 20 Avril 1992, à propos des
doutes sur la poursuite de la carrière du basketteur
américain Earvin "Magic" JOHNSON après qu'il eut
révélé sa séropositivité à la presse.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
416
ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
RETTON13 fit paraître une lettre
ouverte à l'attention des sportifs
nouvellement médaillés pour leur
recommander la prudence.
1 . Choisissez des entreprises de
qualité, dont la réputation est bonne
Elle se résumait en 10 conseils
essentiels.
3 . Recherchez un produit auquel on
croit
2 . Portez attention à l'adéquation avec
le produit
4 . Prenez garde aux sur-participations
publicitaires
5 . Apprenez à connaître l'entreprise et
le produit
6 . Apprenez à communiquer
7 . Contrôlez la manière dont vous êtes
utilisé(e)
8 . Ne soyez pas éblouis par les dollars
(contrôlez votre image)
9 . Impliquez-vous et aimez le produit
10 . Considérez-le comme une
expérience enrichissante.
Source :"Advice to Olympians : becoming 'perfect 10' as a
spokesperson"
Mary-Lou RETTON, D'après la lettre parue dans ADVERTISING AGE du
10 Août 1992
__________________
13 - Mary Lou RETTON fut la première Américaine à
remporter une médaille d'or en gymnastique, aux Jeux
Olympiques de 1984. Elle est devenue un exemple depuis,
pour la gestion de sa carrière post-sportive en tant que
porte-parole célèbre de diverses sociétés (GENERAL
MILLS, McDONALD'S, J.C.PENNEY, SEARS,...). Voir
notamment à son sujet "Mary Lou RETTON" D.
DONAHUE, PEOPLE WEEKLY du 24 Décembre 1984 ;
"Olympic Gold's Lost luster" Kim FOLTZ et Linda
TIBBETTS, NEWSWEEK du 1er Juillet 1985 ; "The
champion of breakfasts" D. LEVINE, SPORT
MAGAZINE du 21 Janvier 1986 ; "Advice to Olympians :
becoming 'perfect 10' as a spokesperson" Mary-Lou
RETTON, ADVERTISING AGE du 10 Août 1992, et plus
généralement sur les de ces sportifs au sein de l'entreprise
: "Sporting chances zap competitors" Tom EISENHART,
BUSINESS MARKETING du mois de Janvier 1988.
C'est pourquoi dans le cas
particulier des sportifs, il est impératif
de multiplier les porte-parole pour
éviter un lien trop fort avec un nom en
particulier. La marque de raquettes
DONNAY vit ses parts de marcher
fondre à vue d'oeil lorsque son
tennisman fétiche, le suédois Bjorn
BORG, abandonna la compétition.
Restant par ailleurs, attaché aux
raquettes en bois, alors que ses
concurrents optaient pour de nouveaux
matériaux tels que la fibre de carbone,
DONNAY, ne tarda pas à éprouver de
grosses difficultés. Bien que beaucoup
plus coûteuse au départ, le recours à
plusieurs sportifs sans cesse renouvelés
est une solution qui permet une
transition et une rotation beaucoup
plus souple vis-à-vis du public.
Aujourd'hui, engagées dans un
inlassable dépistage, les grandes marques
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
telles NIKE14, ADIDAS, REEBOK, LE
COQ SPORTIF, FILA, PUMA, L.A.
GEAR, CONVERSE,...15 s'associent les
services d'un maximum de champions,
dans toutes les disciplines ayant les
faveurs du public, donc des media, pour
faciliter
la
transition
et
le
renouvellement déjà mentionnés, mais
aussi pour réduire les risques en se
diversifiant16. Cette recherche de
futures stars n'est d'ailleurs pas sans
rappeler celle des talent-scouts
d'Hollywood.
Ainsi assiste-t-on aujourd'hui au
même type de lutte publicitaire que
celui évoqué plus haut entre PEPSICOLA et COCA-COLA. Citons pour
l'anecdote, le cas NIKE / ADIDAS en
__________________
14 - "NIKE tira beaucoup de profits de ses efforts pour
associer dans l'esprit du public ses produits à des athlètes
célèbres. Le premier d'entre eux fut en 1973, un héros
local, le coureur de fond de l'Oregon et détenteur du
record du monde, Steve PREFONTAINE. Puis la même
année, la vedette de tennis, Ilie NASTASE et le vainqueur
du marathon de Boston, Jon ANDERSON, devinrent des
promoteurs de la marque. En 1974, le tableau d'honneur
s'enrichit du vainqueur de Wimbledon, Jimmy
CONNORS" "12 idées de génie auxquelles personne ne
croyait" "11 - NIKE le Cendrillon de la piste" P. Ranganath
NAYAK et John M. KETTERINGHAM, Editions FIRST,
Paris (1987) page 319.
15 - Sans oublier la montée en puissance des fabricants
japonais. Des noms comme MIZUNO ou ASICS, encore
inconnus il y a quelques années, sont inéluctablement
promis à un avenir sur le devant de la scène sportive. Bien
qu'encore très discrêts sur le plan de la publicité,
n'arrivaient-ils pas respectivement 2ème et 3ème en
nombre de médailles d'or en athlétisme, tout juste
derrière l'américain NIKE, aux Jeux Olympiques de
Barcelone ? "JO : la percé des sponsors japonais / NIKE et
le japonais MIZUNO sont les vrais vainqueurs des JO"
Géraldine MEIGNAN, LA TRIBUNE du 12 Août 1992.
1984.
L'athlète
canadien
Ben
JOHNSON avait un rival américain,
Carl LEWIS. Or, comme pour illustrer
encore plus la concurrence de ces deux
hommes les plus rapides du monde, ils
avaient pour sponsors des marques
elles aussi concurrentes sur le marché
mondial, Carl LEWIS étant alors
équipé par NIKE, Ben JOHNSON par
ADIDAS. Sensiblement de même
niveau, les deux champions se volaient
à eux-mêmes et presque à tour de rôle,
victoires et records. Ainsi, les pendules
que Ben JOHNSON remettait à l'heure
dans la campagne YOUNG &
RUBICAM, n'étaient pas tant celles
des juges arbitres que celles de l'agence
T.B.W.A. qui avait quelques temps
auparavant, réalisé une campagne pour
NIKE avec Carl LEWIS.
Et Jean-François MINNE17, de
l'agence T.B.W.A., de souligner que
"c'est la récupération d'un événement
qui rentre dans le cadre de la
campagne. Nous l'avons utilisé dans
l'Equipe, sur une page, au moment où il a
gagné le 100 mètres. Vous savez, c'est
assez évident, Carl LEWIS utilise des
NIKE18, donc le lien entre la pertinence,
le sportif et la chaussure est évident.
Cependant, nous n'avons pas dit tout
bêtement NIKE a gagné le 100 mètres,
ou, il portait des NIKE. On a essayé de
mettre le lecteur de notre côté avec la
mention : «Carl, arrête, on va se faire
remarquer». Et c'était signé NIKE."
__________________
17 - Entretien privé accordé le 20 Avril 1988.
16 - "PUMA leaves red-ink tracks" Laurel WENTZ et
18 - Voir également Stephen KESSLER "CHIAT/DAY :
Dagmar
MUSSEY,
ADVERTISING
INTERNATIONAL du 19 Octobre 1987.
The first twenty years" Editions RIZZOLI (1990), New
York, Etats-Unis, pp. 170-183.
AGE
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
A
l'agence
YOUNG
&
RUBICAM, Jean-Michel CARLO19
apporta quelques précisions sur la
campagne : "Ben JOHNSON, équipé par
ADIDAS, avait battu le record du
monde que tout le monde pensait
imbattable. Au passage, il avait même
battu Carl LEWIS. Il avait battu un
record tellement formidable que c'était
un moyen de dire ADIDAS gagne, en
ayant le plus grand record du monde.
Et puis il y avait eu, il y a quelques
temps, une pub T.B.W.A. pour NIKE, le
concurrent mondial de ADIDAS, et qui
aux Jeux Olympiques, avait dit «Arrête
Carl, on va se faire remarquer».
L'exploitation du record est un truc
très simple. Il ne faut pas oublier que
ces pubs sont faites dans la nuit pour
passer le lendemain matin, puisque
c'est sur les résultats. Si les champions
sont chez ADIDAS plus que le véhicule
publicitaire de la marque, sa raison
d'être, le coeur de ADIDAS, le problème
devient alors de les utiliser de façon
intéressante, sinon cela devient d'une
banalité totale".
__________________
19 - Entretien privé accordé le 28 Avril 1988.
Dernier cas d'utilisation des
sportifs pour leur expérience, lorsqu'ils
sont sollicités non plus en fonction de
la discipline pratiquée et/ou du
matériel utilisé, mais en tant que
sportif. Ainsi sont-ils également très
demandés pour tout produit dont la
consommation a pour but d'entretenir
la forme physique. Là encore les
exemples sont très nombreux. Le
joueur de Base-ball Joe DiMAGGIO fut
ainsi le prescripteur des céréales
WHEATIES GENERAL MILLS. Le
tennisman Ivan LENDL a pendant
plusieurs années été le témoin des
qualités nutritives des produits
JACQUET. Ce fut également le cas du
tennisman John Mc ENROE pour les
produits
laitiers
SVELTY
de
CHAMBOURCY, de la véliplanchiste
Jenna De ROSNAY et du motocycliste
Cyril NEVEU pour les céréales
GERBLE,
du
navigateur
Loïc
COURTEAU
pour
la
boisson
énergétique ATHLON, des joueuses de
tennis Martina NAVRATILOVA et
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
Chris EVERT pour les céréales
GENERAL FOODS, de la nageuse
Murielle HERMINE pour le fromage
FLORMAIGRE, de Smead JOLLEY
pour les céréales NABISCO, de JeanClaude KILLY pour l'eau d'EVIAN,...
Les musiciens
Les musiciens célèbres sont eux
aussi
de
formidables
experts
prescripteurs. Et si l'on entend le terme
musicien dans sa plus large acceptation,
on s'aperçoit rapidement que les
virtuoses, mais aussi les compositeurs
et les chanteurs furent très nombreux à
présenter les qualités d'un produit dont
leur expérience suffisait à lui conférer
toutes les vertus escomptées et
attendues par la cible. En introduction
de ce paragraphe, nous présentions déjà
le cas de la société GRAMOPHONE et
de l'utilisation de célèbres chanteurs
tels Enrico CARUSO. La même société,
spécialisée dans tout ce qui a trait à la
musique, eut recours en 1930, au
témoignage de l'un des fidèles de
TCHAIKOVSKI,
le
compositeur
pianiste Sergheï RACHMANINOV.
Ainsi, vingt ans plus tard, la publicité
portait à nouveau sur les machines
parlantes commercialisées par la société,
mais également sur les principales
oeuvres du Maître, disponibles sur
disque.
Nombreuses furent les sociétés
dont l'activité était liée à la musique,
qui essayèrent de s'attacher les
témoignages
des
plus
grands
compositeurs de l'époque, gage ultime
de la reconnaissance d'une très grande
qualité, et d'une très haute fiabilité. Dès
1924, AEOLIAN, le grand fabricant de
pianos
PIANOLA
DUO-ART
présentait sur ses publicités la caution
de compositeurs tels que Edvard
GRIEG,
Camille
SAINT-SAENS,
Claude DEBUSSY, Gabriel FAURE,
Gustave CHARPENTIER, Giaccomo
PUCCINI, ainsi que celles de
nombreux chanteurs et de nombreux
virtuoses.
L'une
des
plus
célèbres
campagnes ayant recouru à l'utilisation
de virtuoses reste sans doute la
campagne américaine exploitée à
l'international et lancée en 1951, par un
autre fabricant de pianos, STEINWAY.
Mettant en scène les plus grands
Maîtres tels que Clifford CURZON,
Rudolph SERKIN, Eugene LIST,
Friedrick GULDA et bien sûr Vladimir
HOROWITZ.
Les
annonces
présentaient une photographie des
divers porte-parole à leur instrument,
un piano STEINWAY, "l'instrument
des Immortels".
Mais le recours à des célébritésexpert appartenant au monde la
musique ne concerne pas uniquement
la musique dite classique. Nombreuses
sont les sociétés - japonaises
notamment - fabricantes d'instruments
de musique ou de matériels Hi-Fi, qui
recherchèrent
elles
aussi
cette
expérience pour leurs produits. C'est
ainsi par exemple que J.V.C. utilisa
Lionel HAMPTON, Dizzy GILLESPIE,
Steve RAY VAUGHAN ou encore B.B.
KING, que SONY s'associa les services
des compositeurs George BENSON et
Giorgio MORODER, que TECHNICS
engagea
Johnny
CASH,
Lionel
HAMPTON et Chuck MANGIONE,
que AKAI lui préféra Quincy JONES
qui lui même choisit récemment
HITACHI, que les cassettes AXIA et
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
l'audiovisuel SANYO recoururent au
groupe BON JOVI, que PANASONIC
sollicita le groupe EARTH WIND AND
FIRE pour sa gamme audio ou encore
que SANSUI utilisa Elton JOHN.
Lorsque
l'expérience
est
mondialement reconnue et que la
célébrité permet de sensibiliser une
cible importante, ces campagnes
peuvent facilement être utilisées,
déclinées à un niveau international. Ce
fut par exemple le cas du fabricant
américain MEMOREX qui utilisa
longtemps, à la fin des années 70, la
caution de Count BASIE, de Jimmy
HENDRIX, de Duke ELLINGTON,
mais surtout celle de la chanteuse Ella
FITZGERALD,
dans
diverses
campagnes sur la fidélité de
reproduction de ses cassettes audio.
Chacun se souvient de la voix de la
grande chanteuse noire qui, au naturel
comme d'après son enregistrement
fidèlement reproduit sur cassette
MEMOREX, brisait un verre à pied.
Derniers exemples anecdotiques,
le cas des marques PIONEER et T.D.K.
qui utilisèrent respectivement les
chanteurs
compositeurs
Ray
CHARLES aux Etats-Unis et Stevie
WONDER au Japon. L'intérêt de
présenter ces deux campagnes réside
essentiellement dans le fait qu'elles
faisaient appel à l'expérience de ces
deux célébrités en tant que musiciens,
mais elles mettaient également à profit
leur handicap personnel. En effet, ces
deux génies de la musique étant
aveugles, ils apportaient en plus,
l'expérience de leur handicap qui veut
que leurs autres sens, et plus
particulièrement l'ouïe, soient plus
développés que chez le commun des
mortels. La campagne PIONEER
utilisait Ray CHARLES pour attester
de la qualité des enregistrements lus
sur platines laser. La campagne
japonaise T.D.K. quant à elle, recourait
à Stevie WONDER pour la promotion
de ses cassettes audio20.
Les grands cuisiniers
Il est une autre profession,
notamment
en
France,
dont
l'expérience fait foi et à qui, la publicité
fit appel à maintes reprises : les grands
cuisiniers. Mais là aussi, ne nous
éloignons pas du sujet. Il ne s'agit ici de
cuisiniers tels que ceux qui apparurent
au hasard des campagnes dans les
publicités pour les potages ROYCO, la
levure
VAHINE,
les
biscuits
DELACRE, les poêles TEFAL ou encore
les cocottes VISION par exemple. Si
l'expérience du cuisinier sous diverses
__________________
20 - Voir notamment : "Love light in flight" Dossier
spécial, Collectif, CREATION n°24 de Février 1987.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
© Jean-marc Lehu, 1993 - Thèse de Doctorat, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
formes est souvent là aussi mise à
profit, ces cas ne nous intéressent pas
ici, en raison de leur recours à un
comédien anonyme vêtu d'un tablier et
d'une toque. Point de célébrité ici donc.
Mais il est par ailleurs des
grands cuisiniers, ceux que l'on nomme
également les Grands Chefs de la
Cuisine française, comme Raymond
OLIVER, Gaston LENOTRE ou Paul
BOCUSE, qui avec quelques autres
prêtèrent par exemple leur image à des
publicités pour le SAVOUR CLUB
dont ils font partie, ou encore Michel
GUERARD pour la ligne de produits
"les Cuisinés" qu'il présente chez
FINDUS.
Pays
de
tradition
gastronomique incontesté, la France
s'est dotée depuis que l'homme mange
au lieu de se nourrir, de nombreux
maîtres queue plus respectables les uns
que les autres. Ces hommes - la gent
féminine ayant beaucoup de difficultés
à se faire reconnaître -, dont les
succulentes réalisations, au même titre
que leurs étoiles et fourchettes dans les
différents guides sont le gage de leur
expérience, ne pouvaient bien entendu
échapper au pantagruélique appétit de
la publicité. De fait, ils devinrent eux
aussi les porte-parole célèbres de
produits pouvant largement bénéficier
de cette expérience dans l'art culinaire.
Alors que certains bénéficient
d'une très large couverture médiatique,
la profession demeure toutefois
beaucoup moins sollicitée que les
milieux du spectacle. Or, cette
caractéristique
est
un
atout
supplémentaire pour le publicitaire.
Car, cette distance qu'ont su conserver
les grands chefs avec le monde des
lumières imaginaires, ne donne que
plus de poids à leur témoignage
publicitaire. Ils n'apparaissent pas
comme
acteurs
comédiens
commerciaux l'espace d'un spot
publicitaire -, mais comme experts,
garants
d'une
authenticité
gastronomique qui les honore. C'est
cette authenticité, cette expérience,
puissante caution, que les publicitaires
sont allés chercher, et parfois de père
en fils.
Ainsi retrouve-t-on le Grand
Chef Raymond OLIVER garant des
bienfaits du petit déjeuner BANANIA,
des services de table en porcelaine de
Limoges, mais surtout, attestant de la
qualité et de la robustesse des
cuisinières AUER. Hormis quelques
innovations
technologiques
vite
communes, les cuisinières sont
devenues à l'instar de bien d'autres
produits de consommation, la proie de
la
banalisation
industrielle,
développant peu à peu l'image de
produits presque génériques. En raison
du faible nombre de constructeurs
comparativement à celui des marques
proposées sur le marché, mais surtout
parce qu'une certaine standardisation a
su s'imposer. C'est en partie la raison
pour laquelle, certaines marques firent
appel à la caution de ceux qui ne
pouvaient exiger de par leur profession
et leur expérience, que du matériel de
qualité. C'est ainsi que l'on retrouva
quelques années plus tard Michel
OLIVER, fils du précédent, grand
cuisinier lui aussi, mais ayant opté pour
les cuisinières de la marque SAUTER.
Un autre Grand Chef fut lui
aussi, et pendant plusieurs années, le
porte-parole d'une autre grande
marque de cuisinières. Paul BOCUSE,
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
apparut en effet pour la marque
ROSIERES, dans diverses campagnes
développées par l'agence R.S.C.G.. Là
aussi, le Grand Chef lyonnais attestait
de la qualité des cuisinières ROSIERES
soit en apparaissant et signant les
annonces presse magazine, soit en
prêtant son concours à la réalisation de
spots télévisés. Paul BOCUSE, en
raison de son talent et de sa très
importante
médiatisation
est
probablement à ce jour le plus sollicité
des Grands Chefs français, puisqu'il
accorda notamment, l'utilisation de son
image en faveur de campagne pour le
fromage LION REYBIER, au profit des
eaux VICHY CELESTINS, à la célèbre
collection de portraits pour les
appareils photo HASSELBLAD ou
encore à une gamme de produits en
conserves WILLIAM SAURIN, dont il
était à l'origine.
Car en effet, les fabricants de
cuisinières ne sont pas les seuls à
pouvoir tirer profit de la notoriété et de
l'expérience des Grands Chefs. Ainsi,
l'agence D.M.B.&B. associa le temps de
la campagne presse magazine "Chef et
toqué de riz", la marque UNCLE BEN'S
à l'image de divers Grands cuisiniers
dont Pascal TINGAUD, Emile JUNG,
Luce
BODINAUX
et
Gérald
PASSEDAT. Les différentes annonces
utilisaient toutes une photographie
d'un plat dont la recette était donnée
par le Grand Chef dans les pages
suivantes du magazine. Une recette à
base de riz UNCLE BEN'S, bien
évidemment, dont la réussite était
garantie par le porte-parole de
l'annonce. Tous associés aux "Relais
Châteaux", ces Grands Chefs avaient
par ailleurs l'avantage de voir présenter
en contrepartie, l'adresse de leur
restaurant sur l'annonce.
Même
si
l'acteur
Paul
NEWMAN21 revêtit un jour, une tenue
de maître queue pour la publicité des
vinaigrettes qui portent son nom, il
s'agit là d'une anecdote et non d'un
exemple d'expérience mise à profit. En
revanche, tout acteur cache en lui de
multiples
experts
que
l'oeil
commercialement
exercé
du
publicitaire a parfaitement su déceler.
Les acteurs et les actrices, ou tout au
moins les plus talentueux d'entre eux
ne sont-ils pas des experts de la
commedia dell'arte ?
Les personnages
Mais pour quel(s) produit(s) un
acteur pourrait-il apporter son
expérience de comédien ? Du
maquillage peut-être ? Comme nous
l'avons vu, Max FACTOR qui fut à
l'origine maquilleur de stars de cinéma,
compris très vite les débouchés
potentiels sur le plan commercial, d'une
telle
expérience.
Hormis
cette
composante néanmoins essentielle d'un
personnage, il ne faut pas perdre de vue
que la comédie reste avant tout de la
simulation, aussi forte et aussi bien
interprétée soit-elle. Or, qui dit
simulation, dit quelque part, absence
de vérité, et de fait, manque de
__________________
21 - Et lorsqu'en 1991, il participa à la campagne italienne
des pâtes BARILLA, il revêtait un habit de Père Noël et
était plus Paul NEWMAN jouant un rôle. Voir
notamment "BARILLA puts NEWMAN into Santa Claus
suit" Anna MASERA, ADVERTISING AGE du 11
Novembre 1991 et "Depardieu met la main à la pâtes"
Philippe LEMAIRE, COMMUNICATION CB NEWS
n°276 du 9 Novembre 1992.
Chapitre III : Analyse du choix d'une célébrité
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ORIGINES ET MODES D'UTILISATION DES CÉLÉBRITÉS PAR LA PUBLICITÉ
crédibilité. Le monde du septième Art
serait-il alors le seul dont l'expérience,
ne puisse être explicitement mise en
valeur par la publicité ?
envoya un jour quérir parce que leur
expérience pouvait être exploitée en
plus de leur célébrité, lors d'une
campagne. Ainsi, le réalisateur Frank
CAPRA et l'actrice Joan CRAWFORD
attestèrent de la qualité des appareils
photo
STEREO
REALIST
qui
procuraient des photographies en trois
dimensions, le metteur en scène David
LYNCH de la qualité des caméras
PANAVISION, le réalisateur Akira
KUROSAWA et le directeur de la
photographie David WATKIN de la
sensibilité de la pellicule AGFAGEVAERT. Photographiés par Norman
SEEFF, les metteurs en scène John
HUSTON, Ridley SCOTT, Billy
WILDER, Martin SCORSESE, Jim
HENSON et Bob FOSSE, testèrent la
qualité de reproduction des téléviseurs
à écran géant du fabricant japonais
MITSUBISHI22
;
les
géniaux
producteurs Menahem GOLAN et
Yoram GLOBUS confirmèrent la
qualité des pellicules EASTMAN
KODAK dans une publicité parue en
1986 dans le quotidien américain
VARIETY Daily23.
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