
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 3 - mai-juin 2009
112
dossier thématique
efficacement la libération de GnRH dans le système
porte hypothalamo-hypophysaire et, en aval, la sécré-
tion des gonadotrophines LH et FSH, qui activent les
gonades. Il a également été montré que les neurones
à Kiss1 sont le site des rétrocontrôles négatif (Arc) et
positif (AVPV) des hormones sexuelles.
Les espèces saisonnières sont caractérisées par des
épisodes réguliers d’activation/inactivation de leur
système reproducteur. Nous avons examiné si les kiss-
peptines pouvaient être impliquées dans le contrôle
saisonnier de la reproduction chez le hamster syrien
(11, 12). Kiss1 est exprimé dans des neurones de l’Arc
et de l’AVPV du hamster syrien mâle et femelle, avec
un dimorphisme sexuel au niveau de l’AVPV. Lorsque
les animaux sont exposés pendant 8 semaines à une
photopériode courte, l’activité reproductrice est inhibée
et l’expression de Kiss1 est fortement réduite dans l’Arc
et l’AVPV. Cependant, la diminution d’expression de
Kiss1 est due à des mécanismes différents dans les deux
structures. Dans l’Arc, l’inhibition est directement liée
à l’augmentation de la production de mélatonine en
photopériode courte et n’est pas due à l’effet rétroac-
tif inhibiteur des hormones sexuelles. Dans l’AVPV, en
revanche, la diminution de l’expression de Kiss1 en
photopériode courte ne dépend pas directement de la
mélatonine mais de la levée de l’effet rétroactif positif
des hormones gonadiques. Ainsi, en photopériode
courte, la mélatonine inhibe l’expression de Kiss1, de
façon directe dans l’Arc et indirecte dans l’AVPV, via une
diminution des taux circulants d’hormones sexuelles
(figure 5).
L’administration chronique de kisspeptines est capable
de réactiver l’activité gonadique de hamsters syriens
gardés en photopériode courte à un niveau équivalent
à celle de hamsters gardés en photopériode longue.
Ces observations démontrent que, chez le hamster
syrien, la mélatonine synchronise l’activité de l’axe
gonadotrope avec les saisons en régulant l’expression
des kisspeptines.
L’expression de Kiss1 est aussi régulée par la photo-
période chez des modèles saisonniers différents, tels
le hamster sibérien (13) et le mouton (14, 15), ce qui
suggère que le contrôle photopériodique de la repro-
duction par les kisspeptines est un phénomène général
chez les espèces saisonnières. En revanche, chez le rat,
espèce dont la reproduction n’est pas modulée en fonc-
tion des saisons, l’expression de Kiss1 reste constante et
élevée en photopériode longue et courte (11). Il est pro-
bable que ce soit également le cas chez l’humain, dont
l’activité de reproduction ne dépend pas directement
de la photopériode. Néanmoins, il est envisageable que
d’autres facteurs environnementaux, métaboliques,
inflammatoires ou pathologiques, susceptibles de varier
au cours des saisons, puissent altérer le fonctionnement
de la reproduction humaine par une action sur le sys-
tème Kiss1/Kiss1-R. En effet, des études récentes ont
montré que différentes hormones, comme la leptine
et la corticostérone, régulent l’expression de Kiss1 dans
le cerveau de rat (16, 17).
Comment la mélatonine
inhibe-t-elle l’expression de Kiss1 ?
Les structures hypothalamiques Arc et AVPV ne possè-
dent pas de récepteurs de la mélatonine. Il est probable
que l’effet inhibiteur de la mélatonine sur l’expression
de Kiss1 soit indirect et implique d’autres cellules et
neurotransmetteurs. Or, en plus de Kiss1, nous avons
identifié d’autres gènes, Rfrp et Dio2, dont l’expression
dans l’hypothalamus dépend de la photopériode.
Chez les mammifères, le gène Rfrp (RFamide-related
peptide) code deux peptides, RFRP-1 et RFRP-3, qui,
comme les kisspeptines, appartiennent à la famille des
RF-amides. Chez le hamster syrien sexuellement actif
(photopériode longue), le gène Rfrp est exprimé dans la
région médiobasale de l’hypothalamus, région qui pos-
sède des récepteurs de la mélatonine (8). Son expres-
Figure5. La mélatonine en photopériode courte inhibe l’activité reproductrice du hamster syrien via une diminution
de l’expression de Kiss1.
La mélatonine en photopériode courte inhibe l’expression de Kiss1 dans l’Arc, ce qui inactive l’axe gonadotrope et réduit
l’activité testiculaire. La diminution des taux circulants de testostérone lève l’effet rétroactif positif de cette hormone
sexuelle sur l’expression de Kiss1 dans l’AVPV.
Photopériode
longue Photopériode
courte
Pic nocturne
de mélatonine
Mélatonine Mélatonine
Kiss1 Kiss1
Kiss1 Kiss1
Kisspeptines Kisspeptines
Testostérone Testostérone
Activité
testiculaire
Neurones Kiss1
de l’Arc
Neurones Kiss1
de l’AVPV