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thématique
La régulation de la reproduction
saisonnière par la mélatonine nécessite
un Kiss
Melatonin control of seasonal reproduction requires a Kiss
Valérie Simonneaux, Florent G. Revel, Laura Ansel*
»»La survie d’un individu et la pérennité de son espèce dépendent de
sa capacité à s’adapter aux variations cycliques de l’environnement
et à les anticiper.
»»La lumière constitue le marqueur le plus fiable des variations
journalières et annuelles de l’environnement.
»»Les mammifères ont développé un système photoneuroendocrine
impliquant la rétine, les noyaux suprachiasmatiques de
l’hypothalamus – lequel contient l’horloge circadienne principale –
et la glande pinéale, qui sécrète la mélatonine.
»»La mélatonine est synthétisée uniquement pendant la nuit, avec une
durée proportionnelle à celle de la nuit. Les variations annuelles de
la durée du pic nocturne de mélatonine régulent de nombreuses
fonctions physiologiques, dont la reproduction.
»»Chez le hamster doré, modèle animal pour l’étude des rythmes
saisonniers, la mélatonine régule l’expression de Kiss1, un gène
encodant les kisspeptines, qui sont de puissants stimulateurs de
l’axe gonadotrope.
»»En photopériode courte (conditions hivernales), la mélatonine (pic
nocturne long) réduit fortement l’expression de Kiss1 dans le noyau
arqué de l’hypothalamus, ce qui entraîne une inhibition prolongée
de l’axe gonadotrope.
Mots-clés : Reproduction – Saison – Mélatonine – Kisspeptines.
Keywords: Reproduction – Season – Melatonin – Kisspeptins.
indispensable à l’initiation de la puberté et à la régulation de l’axe gonadotrope (3). Cette revue résume
les hypothèses actuelles sur les mécanismes d’action de la mélatonine pour synchroniser l’activité
de reproduction avec les saisons via une régulation
de l’expression du gène Kiss1.
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 3 - mai-juin 2009
* Département de neurobiologie des rythmes, institut de
neurosciences cellulaires et
intégratives, UPR CNRS 3212,
Strasbourg.
109
P o i nt s f o rt s
L’
adaptation aux variations temporelles de
l’environnement est nécessaire pour assurer
la survie des individus et la pérennité des
espèces. Ces phénomènes adaptatifs nécessitent que
les organismes soient capables de lire, de traduire et
d’interpréter les variations physiques de l’environnement en informations nerveuses et/ou endocrines. La
lumière, dont l’intensité change de façon régulière et
reproductible au cours d’une journée et d’une année,
est le principal facteur environnemental utilisé pour
synchroniser les fonctions journalières et saisonnières
(figure 1).
Les mammifères possèdent un système photoneuroendocrine qui permet la traduction des variations
journalières et saisonnières de la lumière en cycles
de sécrétion de différentes hormones, en premier
lieu la mélatonine. Cette hormone est synthétisée
et sécrétée uniquement durant la nuit, avec une
durée proportionnelle à celle de la nuit, qui varie
au cours des saisons. Il est bien établi que la mélatonine, grâce à cette double dynamique temporelle,
est impliquée dans la régulation/synchronisation
de plusieurs fonctions journalières et saisonnières.
Elle intervient dans la régulation du sommeil et de
l’activité générale. Elle régule les cycles de reproduction, de lactation et d’hibernation (1). Le rôle
physiologique majeur de la mélatonine, démontré
dès les années 1960, est de synchroniser avec les
saisons les fonctions physiologiques annuelles, en
particulier la reproduction (2). Cependant, les sites
et les mécanismes d’action de la mélatonine pour
le contrôle saisonnier de l’axe reproducteur sont
longtemps restés inconnus. Récemment, des analyses
génétiques comparées chez des espèces saisonnières
ont permis la découverte de gènes hypothalamiques
associés à la régulation de fonctions saisonnières, en
particulier la reproduction, et dont l’expression est
fortement régulée par la photopériode. Des études
récentes ont montré que l’un d’entre eux, Kiss1, est
dossier
thématique
La mélatonine contrôle la reproduction
saisonnière
Une année
Variations
saisonnières
• Lumière
• Température
• Humidité
• Nourriture
• Agents infectieux
• Maladie
Photopériode
longue
(été)
Photopériode
courte
(hiver)
Figure 1. Au cours d’une année, les variations cycliques des facteurs de l’environnement définissent les saisons.
Les changements annuels de la durée d’éclairement sur 24 heures (photopériode) sont des variations très robustes
et reproductibles. La plupart des organismes utilisent les variations annuelles de la photopériode pour synchroniser
leurs fonctions biologiques avec les saisons.
Mélatonine
Mélatonine circulante
(pg/ml plasma)
Photopériode
courte
(hiver)
Pineal
gland
Photopériode
longue
(été)
Retinohypothalamic
tract
Suprachiasmatic nucleus
(the “biologic clock”)
Superior cervical
ganglion
Figure 2. Les variations journalières et saisonnières de la lumière sont traduites en rythmes de sécrétion de mélatonine
par un système photoneuroendocrine.
La lumière perçue par la rétine synchronise l’activité de l’horloge circadienne biologique localisée dans les noyaux
suprachiasmatiques de l’hypothalamus. Les informations temporelles sont ensuite transmises, via les ganglions
cervicaux supérieurs, à la glande pinéale, qui synthétise et libère la mélatonine. Les concentrations circulantes de
mélatonine présentent un double rythme : journalier (valeurs nocturnes plus élevées) et saisonnier (pic nocturne
plus long en hiver ou photopériode courte).
110
La plupart des organismes restreignent leur fertilité
à une période limitée pour assurer la naissance et le
sevrage des petits au moment le plus favorable de
l’année (généralement le début du printemps). La
majorité des espèces utilise les variations annuelles
de la durée journalière d’éclairement (ou photopériode)
pour connaître les saisons. Les variations annuelles de
la photopériode sont traduites en rythme de sécrétion
de la mélatonine par un système photoneuroendocrine
complexe (figure 2). La rétine reçoit les informations
photoniques et les transmet à l’horloge biologique,
située dans les noyaux suprachiasmatiques de l’hypothalamus, pour y synchroniser son activité circadienne.
Cette information temporelle est ensuite transmise à
diverses structures hypothalamiques, dont les noyaux
paraventriculaires, qui utilisent le système nerveux autonome pour réguler la synthèse de mélatonine par la
glande pinéale. Chez la plupart des mammifères, cette
glande est située près du troisième ventricule, excepté
chez les rongeurs, où elle migre au cours du développement pour se localiser à l’intersection des hémisphères
cérébraux et du cervelet. La mélatonine n’est pas stockée dans les pinéalocytes mais est directement libérée
dans la circulation générale, où sa demi-vie est d’environ
20 minutes. Par conséquent, toute modification de sa
synthèse se traduit immédiatement par une variation
similaire de sa concentration sanguine. Celle-ci est 10
à 20 fois plus élevée la nuit que le jour, et la durée du
pic nocturne est plus longue en hiver (photopériode
courte) qu’en été (photopériode longue). Les variations
annuelles de mélatonine apportent à l’organisme une
représentation robuste et reproductible des variations
de la photopériode, et donc des saisons.
Il est bien établi que les variations photopériodiques de
la durée du pic nocturne de mélatonine synchronisent
la reproduction chez des espèces saisonnières comme
le hamster (4) ou le mouton (5). L’activité de reproduction du hamster syrien, un modèle animal classique en
physiologie saisonnière, est conservée tant qu’il est
élevé en photopériode longue (14 heures de lumière
par jour) ; mais lorsque l’animal est exposé à une photopériode courte (10 heures de lumière par jour), il subit
en 8 semaines une inhibition totale de son activité de
reproduction. Cela se traduit par des taux plasmatiques
réduits de gonadotrophines et d’hormones sexuelles
et par une très forte atrophie des gonades (figure 3).
L’ablation de la glande pinéale avant le transfert en
photopériode courte inhibitrice empêche l’inactivation
de l’axe reproducteur. À l’inverse, l’administration de
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 3 - mai-juin 2009
La régulation de la reproduction saisonnière par la mélatonine nécessite un Kiss
mélatonine exogène mimant un pic nocturne long
de type photopériode courte induit l’inactivation de
l’axe reproducteur.
Bien que le rôle physiologique de la mélatonine dans
le contrôle saisonnier de la reproduction soit expérimentalement bien démontré, les mécanismes cellulaires et moléculaires utilisés par la mélatonine sont
largement inconnus. Il a été montré que la mélatonine
n’agit pas sur les neurones à GnRH et que la réponse
gonadotrope à la GnRH est indépendante de la photopériode (6). Des récepteurs de la mélatonine ont été
identifiés dans plusieurs structures nerveuses, mais avec
des variations interspécifiques considérables et des
niveaux d’expression relativement faibles ne permettant
pas le phénotypage des cellules (7). Néanmoins, des
expériences de lésions ou d’infusion de mélatonine
au niveau de différents sites anatomiques ont montré
que l’hypothalamus médiobasal est un site d’action
possible de la mélatonine pour le contrôle saisonnier
de la reproduction (5, 8).
Afin d’identifier des neurones dont l’expression génique
est régulée par la photopériode, nous avons caractérisé
des gènes de l’hypothalamus médiobasal exprimés
différentiellement entre des hamsters syriens en photopériode longue (sexuellement actifs) et en photopériode courte (sexuellement inhibés). Cette étude nous
a permis d’identifier plusieurs gènes dont l’expression
est inhibée en photopériode courte, en particulier le
gène Kiss1.
Kiss1 joue un rôle central dans le contrôle
saisonnier de la reproduction
par la mélatonine
Le gène Kiss1 code pour une préprotéine de 145 acides aminés ensuite clivée en peptides de différentes
longueurs (de 10 à 54 acides aminés), les kisspeptines,
qui se fixent sur le récepteur GPR54 (ou Kiss1-R) avec la
même haute affinité. C’est en 2003 que le rôle primordial
des kisspeptines dans la régulation neuroendocrine de
la reproduction a été démontré. Une mutation dans le
gène Gpr54 chez des humains (9) ou des souris (10) a
été associée à un hypogonadisme hypogonadotropique, avec un développement sexuel anormal et une
incapacité à entrer en puberté. Depuis, de nombreuses
études ont été réalisées chez les mammifères, dont
les humains, pour établir le rôle et les mécanismes
d’action des kisspeptines dans la régulation de l’axe
gonadotrope (3) [figure 4]. Kiss1 est exprimé dans les
neurones de deux structures hypothalamiques : le noyau
arqué (Arc) et le noyau antéroventral périventriculaire
Photopériode
longue
Pic nocturne
de mélatonine
Photopériode
courte
+ injections
de mélatonine
+ pinéalectomie
On
Off
Off
On
Activité
testiculaire
Figure 3. Les variations photopériodiques du pic nocturne de mélatonine synchronisent l’activité de reproduction
chez les espèces saisonnières.
Chez le hamster syrien mâle, le système reproducteur, représenté ici par la taille des testicules, est actif en photopériode
longue et inactif en photopériode courte. L’injection de mélatonine en photopériode longue inhibe l’activité testiculaire,
tandis que l’ablation de la glande pinéale en photopériode courte stimule l’activité reproductrice.
AVPV
neurones à Kiss1
Arc
neurones à Kiss1
Kp
Kiss1 R
POA
neurones à GnRH
Rétrocontrôle
positif des
hormones
sexuelles
GnRH
Hypophyse
Rétrocontrôle
négatif des
hormones
sexuelles
LH, FSH
Gonades
Figure 4. Les neurones hypothalamiques exprimant le gène Kiss1 sont en amont de l’axe gonadotrope.
Kiss1 est exprimé dans les neurones du noyau arqué (Arc) et dans ceux du noyau antéroventral périventriculaire
(AVPV), qui projettent sur les neurones à GnRH. Les kisspeptines activent la libération de GnRH, qui en retour stimule
la libération des gonadotrophines LH et FSH par l’hypophyse. Les hormones sexuelles exercent un rétrocontrôle positif
dans l’AVPV et un rétrocontrôle négatif dans l’Arc sur l’expression de Kiss1.
(AVPV), cette dernière région étant plus étendue chez
les femelles, chez lesquelles elle participe à la régulation du pic préovulatoire de LH. Les neurones à Kiss1
projettent vers l’aire préoptique et l’éminence médiane
où sont localisés respectivement les neurones à GnRH
et leurs terminaisons. Les kisspeptines stimulent très
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 3 - mai-juin 2009
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Photopériode
longue
thématique
Photopériode
courte
Pic nocturne
de mélatonine
Mélatonine
Neurones Kiss1
de l’Arc
Mélatonine
 Kiss1
 Kiss1
 Kisspeptines
 Kisspeptines
 Testostérone
 Testostérone
 Kiss1
 Kiss1
Activité
testiculaire
Neurones Kiss1
de l’AVPV
Figure 5. La mélatonine en photopériode courte inhibe l’activité reproductrice du hamster syrien via une diminution
de l’expression de Kiss1.
La mélatonine en photopériode courte inhibe l’expression de Kiss1 dans l’Arc, ce qui inactive l’axe gonadotrope et réduit
l’activité testiculaire. La diminution des taux circulants de testostérone lève l’effet rétroactif positif de cette hormone
sexuelle sur l’expression de Kiss1 dans l’AVPV.
efficacement la libération de GnRH dans le système
porte hypothalamo-hypophysaire et, en aval, la sécrétion des gonadotrophines LH et FSH, qui activent les
gonades. Il a également été montré que les neurones
à Kiss1 sont le site des rétrocontrôles négatif (Arc) et
positif (AVPV) des hormones sexuelles.
Les espèces saisonnières sont caractérisées par des
épisodes réguliers d’activation/inactivation de leur
système reproducteur. Nous avons examiné si les kisspeptines pouvaient être impliquées dans le contrôle
saisonnier de la reproduction chez le hamster syrien
(11, 12). Kiss1 est exprimé dans des neurones de l’Arc
et de l’AVPV du hamster syrien mâle et femelle, avec
un dimorphisme sexuel au niveau de l’AVPV. Lorsque
les animaux sont exposés pendant 8 semaines à une
photopériode courte, l’activité reproductrice est inhibée
et l’expression de Kiss1 est fortement réduite dans l’Arc
et l’AVPV. Cependant, la diminution d’expression de
Kiss1 est due à des mécanismes différents dans les deux
structures. Dans l’Arc, l’inhibition est directement liée
à l’augmentation de la production de mélatonine en
photopériode courte et n’est pas due à l’effet rétroactif inhibiteur des hormones sexuelles. Dans l’AVPV, en
revanche, la diminution de l’expression de Kiss1 en
photopériode courte ne dépend pas directement de la
mélatonine mais de la levée de l’effet rétroactif positif
112
des hormones gonadiques. Ainsi, en photopériode
courte, la mélatonine inhibe l’expression de Kiss1, de
façon directe dans l’Arc et indirecte dans l’AVPV, via une
diminution des taux circulants d’hormones sexuelles
(figure 5).
L’administration chronique de kisspeptines est capable
de réactiver l’activité gonadique de hamsters syriens
gardés en photopériode courte à un niveau équivalent
à celle de hamsters gardés en photopériode longue.
Ces observations démontrent que, chez le hamster
syrien, la mélatonine synchronise l’activité de l’axe
gonadotrope avec les saisons en régulant l’expression
des kisspeptines.
L’expression de Kiss1 est aussi régulée par la photopériode chez des modèles saisonniers différents, tels
le hamster sibérien (13) et le mouton (14, 15), ce qui
suggère que le contrôle photopériodique de la reproduction par les kisspeptines est un phénomène général
chez les espèces saisonnières. En revanche, chez le rat,
espèce dont la reproduction n’est pas modulée en fonction des saisons, l’expression de Kiss1 reste constante et
élevée en photopériode longue et courte (11). Il est probable que ce soit également le cas chez l’humain, dont
l’activité de reproduction ne dépend pas directement
de la photopériode. Néanmoins, il est envisageable que
d’autres facteurs environnementaux, métaboliques,
inflammatoires ou pathologiques, susceptibles de varier
au cours des saisons, puissent altérer le fonctionnement
de la reproduction humaine par une action sur le système Kiss1/Kiss1-R. En effet, des études récentes ont
montré que différentes hormones, comme la leptine
et la corticostérone, régulent l’expression de Kiss1 dans
le cerveau de rat (16, 17).
Comment la mélatonine
inhibe-t-elle l’expression de Kiss1 ?
Les structures hypothalamiques Arc et AVPV ne possèdent pas de récepteurs de la mélatonine. Il est probable
que l’effet inhibiteur de la mélatonine sur l’expression
de Kiss1 soit indirect et implique d’autres cellules et
neurotransmetteurs. Or, en plus de Kiss1, nous avons
identifié d’autres gènes, Rfrp et Dio2, dont l’expression
dans l’hypothalamus dépend de la photopériode.
Chez les mammifères, le gène Rfrp (RFamide-related
peptide) code deux peptides, RFRP-1 et RFRP-3, qui,
comme les kisspeptines, appartiennent à la famille des
RF-amides. Chez le hamster syrien sexuellement actif
(photopériode longue), le gène Rfrp est exprimé dans la
région médiobasale de l’hypothalamus, région qui possède des récepteurs de la mélatonine (8). Son expres-
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La régulation de la reproduction saisonnière par la mélatonine nécessite un Kiss
sion est fortement inhibée en photopériode courte
par la mélatonine (18). Or, diverses études indiquent
que l’injection intra-cérébro-ventriculaire du peptide
RFRP-3 altère la libération de LH et/ou la production
de testostérone (19-21). Puisque chez le hamster syrien
l’expression des deux gènes Rfrp et Kiss1 est inhibée par
la mélatonine, et que seule la région qui possède des
neurones à Rfrp contient des récepteurs à la mélatonine,
il est probable que la mélatonine agisse en premier lieu
sur les neurones à Rfrp. Des études sont en cours pour
déterminer si la mélatonine peut agir directement sur
les neurones à Rfrp et si le RFRP-3 altère la production
de LH via un effet sur les neurones à kisspeptines ou
les neurones à GnRH.
Le gène Dio2 code la déiodinase 2, enzyme clé dans la
synthèse de la forme active de l’hormone thyroïdienne
(T3). La déiodinase 2 est exprimée dans un type cellulaire particulier à la base du troisième ventricule, les
tanycytes, où elle régule localement la production de
T3. Chez plusieurs espèces saisonnières, l’expression
de Dio2 est sous le contrôle de la photopériode, via la
mélatonine (22), ce qui permet une régulation fine de
la concentration locale en T3 en fonction des saisons. Il
a été montré récemment chez le mouton que la régulation de l’expression de Dio2 par la mélatonine s’effectue
indirectement. La mélatonine régule la production de
TSH par les cellules de l’adénohypophyse, caractérisée
par une très forte densité de récepteurs de la mélatonine, puis la TSH contrôle à son tour l’expression de
Dio2 et donc la synthèse de T3 par les tanycytes (23).
Par ailleurs, il a été montré que l’administration centrale
de T3 est capable de réguler l’activité de reproduction
chez plusieurs espèces saisonnières (24, 25). À l’heure
actuelle, les cibles cellulaires et moléculaires de la T3
pour le contrôle saisonnier de l’axe gonadotrope ne sont
pas encore connues. La T3 pourrait agir directement
sur les neurones à Kiss1, puisque des récepteurs de
cette hormone sont présents dans l’Arc. La T3 pourrait
également induire des changements morphologiques
au niveau de l’éminence médiane pour réguler la sécrétion de GnRH.
Puberté
Photopériode
Mélatonine
?
État
métabolique
Autres signaux
Kiss1
Kp
Axe
HPG
Kiss1-R
Hormones
sexuelles
Figure 6. Les neurones à Kiss1 intègrent différents facteurs, dont la photopériode via la mélatonine, pour contrôler
l’activité de l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique (HPG).
Conclusion
Chez les espèces saisonnières, l’expression de Kiss1
est régulée par la mélatonine, et l’administration de
kisspeptine chez des individus photo-inhibés est capable de réactiver l’axe gonadotrope. Ces observations
ont permis une avancée majeure dans la compréhension des mécanismes cellulaires et moléculaires soustendant la reproduction saisonnière. Néanmoins, les
interactions précises entre la mélatonine et le système
kisspeptinergique ne sont pas encore complètement
établies. La mélatonine agit probablement en amont
des neurones à Kiss1, sur les neurones à Rfrp et/ou les
tanycytes exprimant les déiodinases. Les neurones à
Kiss1 sont actuellement considérés comme des centres
d’intégration de divers signaux neuroendocrines et
environnementaux pour réguler précisément l’activité
de l’axe gonadotrope. En plus de la mélatonine, d’autres
facteurs (leptine, corticostérone), susceptibles de varier
avec les saisons, sont capables d’altérer l’expression
de Kiss1 et, par conséquent, l’activité de reproduction
(figure 6).
■
>>> Références page 114
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thématique
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Après 6 mois de traitement (durée maximale) en association avec un régime réduit
en calories et pauvre en graisses, on observe
une perte de poids moyenne de 4,4 kg, une
baisse du taux de cholestérol total de 2,4 %
et une diminution moyenne du tour de taille
de 4,5 cm. Les principaux effets indésirables
d’Alli® observés sur le transit intestinal (selles
molles ou plus fréquentes) alertent le patient
que son régime est trop riche en graisses.
Le pharmacien, impliqué pour la première fois
dans la prévention et le traitement du surpoids,
a un rôle majeur à jouer à travers ses conseils
et informations lors de la délivrance du produit qui sera placé derrière le comptoir. Il a,
ainsi, comme mission de délivrer le produit
aux bonnes personnes, de donner des conseils
nutritionnels, d’orienter si nécessaire vers une
consultation médicale et de rappeler la nécessité, lorsqu’on est en surpoids, d’effectuer régulièrement un bilan de santé avec son médecin.
Depuis l’obtention de l’AMM d’Alli® (janvier
2009), GlaxoSmithKline Santé Grand Public a
mis en place auprès des pharmaciens un large
dispositif de formation et d’information.
L’Afssaps a mis en place des mesures de suivi
et de minimisation des risques complémentaires et une fiche d’aide à sa dispensation a
été envoyée à l’ensemble des pharmaciens.
Un programme de soutien a été mis en place
pour accompagner les patients avec un
guide disponible en officine, un site internet
www.alliprogramme.fr et un numéro de
téléphone azur (prix d’un appel local)
0810 320 300.
Le coût d’Alli® est d’environ 2 euros par jour.
MP
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 3 - mai-juin 2009
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