Psychologie sociale. L’approche cognitive des préjugés. Cours 3.
28/12/02
chacune de ces conditions étaient américains (familiers avec les pouces mais pas avec les centimètres) et l’autre
moitié belges (familiers avec les centimètres mais non pas avec les pouces). Corneille et al. n’ont observé l’effet
d’accentuation par rapport à la condition contrôle (“ unclassified ”) que dans les conditions de non familiarité
(américains jugeant en centimètres et belges en pouces). Cette expérience permettrait donc d’expliquer les
échecs répétés des nombreuses tentatives de réplication de l’expérience de Tajfel et Wilkes.
2. La catégorisation ne produit pas forcément un biais cognitif.
Quand est-ce que les gens agissent en fonction d’une auto catégorisation particulière de soi ? Quand et
comment ?
3. L’effet d’homogénéisation de l’exogroupe
L’une des conséquences de la catégorisation sociale est la tendance à percevoir les individus appartenant à un
même groupe comme plus semblables l’un à l’autre que ce qu’ils ne sont “ vraiment ”. Ces impressions inexactes
semblent être dues en partie au fait qu’elles nous permettent d’effectuer des distinctions plus claires entre les
membres de différents exogroupes.
Toutefois, cette tendance est plus marquée pour un exogroupe que pour un endogroupe : on perçoit les membres
d’exogroupes comme plus semblables que les membres de l’endogroupe. C’est ce que l’on qualifie d’effet
d’homogénéisation de l’exogroupe. Par exemple, les hommes ont tendance à percevoir les femmes comme plus
semblables l’une à l’autre que les femmes. Inversement, les femmes perçoivent les hommes comme plus
semblables qu’elle ne perçoivent les hommes.
Dans certains cas, cet effet s’explique par le fait que les individus ont moins de contacts avec les membres de
l’exogroupe qu’avec ceux de l’endogroupe. De ce fait, ils ne peuvent guère prendre connaissance des différences
entre ces individus. Ceci, néanmoins, n’explique pas totalement l’effet. Celui se produit effectivement dans des
groupes artificiels créés en laboratoire (dans quel cas les membres de chaque groupe n’ont eu guère l’occasion
d’interagir) ou lorsque les groupes concernés sont liés au sexe (alors que, bien sûr, on interagit avec des
membres de deux sexes). Comme, si l’on admet que les individus ont tendance à recourir à la catégorisation
sociale de façon presque routinière, ils ne devraient jamais avoir l’occasion de percevoir la cible en termes “
individuels ” et de prendre connaissance de ses traits personnels. Par conséquent, quand on pense à des
exogroupes, on a tendance à les envisager en tant que groupes – en les comparant à nos endogroupes – plutôt
qu’en tant qu’individus. Une autre explication est fournie par la théorie de l’auto-catégorisation (voir plus bas) :
dans les études portant sur ce sujet, l’évaluation de l’exogroupe se faisait dans un contexte intergroupe alors que
l’évaluation de l’endogroupe se faisait dans un contexte intragroupe. Dans un contexte intragroupe, on a plus
tendance à se percevoir en termes individuels et à envisager les différences entre membres de l’endogroupe.
Haslam et al. (1996) ont ainsi montré que lorsque l’évaluation de l’endogroupe s’opérait dans un contexte
intergroupe, l’effet disparaissait.
Dans certains cas, il peut même s’inverser (Simon & Brown, 1988). Cela se produit surtout lorsque la taille de
l’endogroupe est très petite par rapport à celle de l’exogroupe et lorsque l’endogroupe est fort organisé ou que
ses membres y sont fort identifiés. Selon Simon et Brown, l’appartenance à une minorité menace l’identité
sociale. Une façon de répondre à cette menace, consiste à percevoir l’endogroupe comme une entité, composée
de personnes similaires, tout en percevant l’exogroupe comme une agrégat d’individus distincts. En décrivant
plus volontiers l’endogroupe comme une collectivité unie, on mettrait donc plus en valeur la supériorité de
l’endogroupe, en particulier en ce qui concerne le degré de soutien social et la solidarité présents au sein de
celui-ci. En percevant l’endogroupe comme une entité, l’identité sociale des minorités serait donc mise en
valeur.
Pour mettre cette hypothèse à l’épreuve, Simon et Brown ont divisé aléatoirement leurs sujets en deux groupes
soi-disant sur base d’une tâche de perception de couleurs . Il y avait par ailleurs une estimation du nombre de
points sur un tableau. On signalait aux sujets que les membres de leur groupe et ceux de l’exogroupe différaient
dans cette tâche ainsi que sur d’autres dimensions (l’argent dépensé en vacances, le travail scolaire). Leur groupe
constituait soit une minorité, soit une majorité. L’exogroupe également. Il y avait donc quatre conditions
expérimentales. En effet, les membres de minorités percevaient leur groupe comme plus homogène que
l’exogroupe sur deux dimensions (travail scolaire, perception de couleurs) . Cette différence tendait à s’inverser
chez les membres du groupe non minoritaire. On n’obtenait donc l’effet d’homogénéisation que dans ce dernier
cas. En accord avec l’argumentation théorique de Simon et Brown, les membres du groupe minoritaire se
déclaraient également plus identifiés à leur groupe que les membres du groupe majoritaire.
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