Rapport sur la mission humanitaire exploratoire au Burkina Faso organise par L’Association Bourguignonne des Burkinabes –ABBBernard Blettery- Corinne Castelnau Cette mission exploratrice s’est donnée pour mission d’analyser les besoins de la population de Fada N’Gouma dans 2 domaines, celui de l’éducation et celui de la santé. Pour cela, 3 pôles ont été retenus : l’école primaire de Tikonti, le Centre de Santé et de Protection Sociale n° 9 (CSPS-9) et le Centre Hospitalier Régional (CHR) de Fada. Le but de cette étude exploratoire est d’individualiser les besoins de la population locale dans ces deux domaines, de façon à les faire prioriser par la population et d’envisager leur réalisation en mutualisant les efforts et les moyens de la population et de l’association. Le CHR Il est l’hôpital de la région qui compte 1, 4 million d’habitant environ, en cas de moyen insuffisant, il peut transférer les malades au CHU à Ougadougou. Cet hôpital régional a une structure pavillonnaire qui, chacun, accueille les patients relevant d’une spécialité. En raison de la diversité des compétences des membres des représentants de l’ABB, il a été décidé d’explorer 4 activités de l’hôpital : la Psychiatrie, l’Odontologie, l’obstétrique et la Médecine. Après une rencontre avec le directeur Général de l’établissement et de son staff de direction qui nous a accueilli et dresser un rapide tableau de son hôpital, chacun a regagné le service de sa spécialité où il a passé en moyenne 4 demis journées en contact avec le personnel soignant et les malades. La Médecine (Corinne, Bernard) Après en avoir discuté, il nous est apparu qu’il valait mieux se contenter d’observer le fonctionnement du service d’urgence qui pourrait nous apporter vraisemblablement plus d’informations qu’un service de Médecine conventionnelle étant donné la brève durée de nôtre séjour. Ce service est situé à l’entrée de l’hôpital, ouvert 24h sur 24, 7jours sur 7, ne reçoit théoriquement que des malades adressés par les CSPS de la ville, et les malades ne peuvent y avoir recours individuellement sauf urgence Situé dans des locaux vétustes, mais identiques à ceux des autres pavillons, les patients peuvent y être gardés en observation pendant environ 24heures, parfois un peu plus si le reste de l’hôpital n’a pas de lit. Il est dirigé par un médecin-chef et un surveillant chef. Il existe 2 médecins affectés à ce service, mais 5 praticiens participent au tour de garde qui est une astreinte à domicile. Un médecin est présent sur place de 7h 30 à 12h30 ou 13 h en fonction du travail, il revient à 15h, jusqu’à 17h. La prise en charge des malades repose sur les épaules des infirmières qui sont présentes par équipe 24h sur 24 et sont les seules personnes soignantes qualifiées pour prendre en charge les malades en dehors de la présence des médecins, elles sont fortement entourées par un important contingent d’élèves infirmières qui sont en première année d’étude et qui ne reste en stage qu’un mois. Ce fort contingent d’élèves infirmières s’explique par une école d’infirmières à proximité. Pendant notre séjour nous avons pu suivre les visites du médecin auprès des patients hospitalisés pendant la nuit, et aller voir comment fonctionnent les 2 structures assurant les examens complémentaires : le laboratoire de biologie et le service de radiologie. Nous avons été aidés pour interpréter nos observations par une jeune infirmière française présente en stage toute la journée. Ce qui frappe comme dans tous les services d’urgence, c’est la grande irrégularité dans le flux des malades, avec des matins calmes et une montée en puissances à partir de 11heures et une diminution d’activité la nuit. De même, au cours de la semaine il nous est signalé un maximum d’activité le lundi et le vendredi. Pour une population de 1.4 million de patients qui peuvent s’y référer, le nombre moyen de malades pouvant s’y référer journellement, est de l’ordre environ de 30 personnes uniquement des adultes, et essentiellement pour des motifs médicaux , nous n’avons pas vu de petite traumatologie qui apparemment serait prise en charge en amont CSPS, ni de grosses pathologies traumatiques en particulier routières, vraisemblablement en raison de l’absence de chirurgien orthopédique, de scanner et de réanimation, il n’est pas possible de ventiler un patient. Au cours de notre passage, nous avons pu voir : une crise d’asthme, 2 ou 3 possibles crise de paludisme, une occlusion, une tumeur du petit bassin possible, un choc septique grave, des morsures de serpent, des coliques nephrétiques Les difficultés relevées : La grande précarité des locaux d’accueil et d’hospitalisation : Chambre à 4 lits qui en raison de la présence des familles des malades nécessaires au nursing de leur parent a tendance à devenir rapidement irrespirable, absence de climatiseur dans ces chambres où l’on ne trouve que des ventilateurs dont l’efficacité est réduite Absence de salle de pansement pour les infirmières, a priori une pièce qui sert à la fois de salle de préparation mais aussi de salle d’accueil des patients, et de salle d’examen La salle d’attente des patients se trouvent dans le couloir, et dehors (on se demande ce qui se passe à la période des pluies. Les difficultés de respecter les consignes d’hygiènes: Irrégularité de l’accès à l’eau qui peut être coupé à tout moment et pour une durée indéterminée être coupée. Utilisation des ventilateurs pour lutter contre la chaleur étouffante des salles Absence de nettoyage régulier des surfaces (sols et murs) Absence de drap de protection sur les lits (sauf si la famille le fournit) les malades reposant à même le matelas sur lesquels les malades se succèdent Les difficultés d’accès au plateau technique par ailleurs, très réduit: les ECBU doivent arriver avant 10 heures du matin. La biochimie, l’hématologie ne sont plus techniquées depuis presque 9 mois, car l’hôpital n’a pas encore pu obtenir son réapprovisionnement en réactif. Il n’y a pas d’ECG dans le service Seules les radios sans produit de contraste peuvent être réalisées : radiographie pulmonaire, radiographie simple de l’abdomen et radio des membres pour contrôle de fracture. Il n’y a pas de scanner ni d’échographe disponible (En réalité en visitant le pavillon de radiologie, on a découvert 2 vieux appareils en panne qui n’ont jamais été réparés, et un appareil neuf sous plastique présent depuis quelques mois jamais utilisé car personne n’a été formée à son utilisation) Les examens pratiqués dans le service ne peuvent être réalisés que si le patient ou sa famille est arrivé à réunir les fonds nécessaires. Toutefois le patient peut se présenter dans un autre établissement privé qui possède des plateaux techniques plus élaborés et dans lequel les réapprovisionnements sont assurés, pour y subir les examens prescrits à l’hôpital mais pour cela, il faut que le malade ou sa famille soit solvable. Le retard à la mise en route des soins: Les malades sont vus par des soignants avec une description clinique des troubles très peu analysés sur le plan séméiologique Il n’ya pas de recherche d’évaluation de la gravité d’un patient sur les signes trouvés à l’interrogatoire ou à l’examen Il n’y a pas de protocole de geste de première urgence à faire avant même l’appel du médecin. Discussion Toutes ces difficultés relevées ci-dessus justifieraient d’une réflexion complète, et complexe qui pour l’instant à mon avis ne rentrent pas dans le cadre de mission dont pourrait se charger l’ABB, car elles remettent en cause toute l’organisation du système de santé et sont de la responsabilité de l’état. Par contre le retard à la prise en charge des patients peut être sinon totalement résorbé, au moins grandement amélioré par des moyens simples qui cette fois peuvent être relativement facilement mis en œuvre par une politique de formation et d’accompagnement dans l’amélioration des connaissances médicales des médecins et du personnel soignant. Pour réaliser, cette action on dispose de deux atouts :: une demande des médecins et un esprit ouvert vers l’enseignement par le médecin chef qui a tout à fait conscience de ce que pourrait lui apporter des collaborateurs mieux formes. Pour mettre en place cette action on dispose de plusieurs moyens : -Abonnement à des revues spécialisées sur la médecine d’urgence, pour les infirmières et pour les médecins. -Envoyer des ouvrages de protocole de prise en charge des urgences. -Proposer des fiches actuellement utilisés par les infirmières dans certains services d’urgence lors du premier interrogatoire d’arrivée. - Organiser des cycles de formation par des urgentistes. - Envoyer un médecin échographiste pour former un radiologue -garder un contact et proposer des échanges par mail entre l’équipe médicale du CHR et nous de façon à pouvoir discuter de cas cliniques ou tout autre sujet médical.