Ont contribué à la rédaction de ce dossier : Elisabeth Rallo-Ditche, Valérie Brigot, Frédéric Isoletta
Festival d’Aix-en-Provence
Don Giovanni
Musique de Wolfgang Amadeus Mozart
Livret de Lorenzo Da Ponte
Dossier pédagogique 2013
2
SOMMAIRE
Préambule p.3
Introduction p.5
A) Présentation p.6
1) Synopsis p.6
2) Wolfgang Amadeus Mozart en 1787 p.8
3) Lorenzo Da Ponte p.8
4) Genèse et contexte p.8
5) La création p.9
6) L’espace et le temps p.9
7) Les personnages p.10
Conclusion p.12
B) La production 2013 au Festival d’Aix-en-Provence p.13
1) Distribution p.13
2) Biographies p.13
3) Approche de l’œuvre p.14
C) Pistes Pédagogiques p.17
1) Des clés de lecture pour l’ouverture et la première scène p.17
2) Suggestions d’activités pédagogiques p.17
a) En Education musicale p.17
b) En Arts plastiques p.23
c) En Lettres p.25
d) En Histoire p.25
e) Autres pistes possibles p.25
D) Pour aller plus loin : personnages (les rôles, les voix) p.26
3
Préambule
Costume destiné à M. Garcia pour le rôle de Don Juan dans
l’opéra Don Giovanni - Gottfried Engelmann
Qu’est ce qu’un opéra ? C’est tout simplement la mise en musique d’un
texte théâtral qui serait adapté ou pas d’une œuvre littéraire. Les textes sont
chantés au lieu d’être parlés, déclamés, et sont accompagnés par un orchestre.
(Exemple : Les Noces de Figaro de Mozart, dont le texte a été adapté du Mariage de
Figaro de Beaumarchais par le librettiste Lorenzo Da Ponte).
Le genre a considérablement évolué depuis son apparition vers 1600 en
Italie où les florentins ont la folle idée de vouloir parler en chantant ! Sérieux (Opéra
seria) ou divertissant (Opéra buffa), il peut également s’appeler Drama giocoso
(drame joyeux), Singspiel (divertissement en allemand) et adopter des formes plus
libres jusqu’à nos jours (Opéra de chambre, Fantaisie lyrique). A la fois populaire,
noble et appelé art lyrique, il est un croisement artistique qui peut réunir le chant,
le théâtre, la danse, les arts plastiques, et de nos jours la vidéo, nécessitant un chef
d’orchestre, un orchestre, des chanteurs solistes, un chœur, un metteur en scène,
et parfois un scénographe (costumes et décors font partie d’une production et sont
établis en fonction de la mise en scène). Même si la musique ne change pas (en
dehors de l’interprétation bien r), la mise en scène est aujourd’hui l’enjeu majeur
de nombreuses productions, certaines déchainant les passions et les critiques.
L’orchestre se trouve dans la fosse d’orchestre, tout simplement pour laisser la
place visuellement et scéniquement aux chanteurs se trouvant sur le plateau.
Ecrire un ouvrage lyrique reste un enjeu majeur pour les compositeurs, à
l’instar de cette phrase du romantique germanique Robert Schumann : « Ma prière
du matin et du soir ? Un opéra en allemand ». Certains ne s’y sont jamais frottés
(Chopin, Brahms), d’autres y ont consacré la quasi-totalité de leurs corpus (Rossini,
Verdi, Wagner). A l’époque mozartienne, l’opéra est composé de « numéros » :
arias (soli, duos, trios…), chœurs, récitatifs. Au cours des XIXème et XXème siècles,
la forme continue, c’est-à-dire sans interruption de musique, sera privilégiée par de
nombreux compositeurs. Un récitatif est un genre proche de la voix parlée,
déclamée, et fait avancer l’histoire, se trouvant appuyé par un ensemble réduit
d’instruments (clavecin, basse continue pour le recitativo secco, ponctuations
orchestrales pour le récitatif accompagné) alors que l’aria (air) est une mélodie
accompagnée la voix soliste est escortée par l’orchestre. Au contraire du
récitatif, l’aria peut être sujette à une vocalité exacerbée, mettant en valeur la
virtuosité du soliste.
Le chœur, féminin, masculin ou mixte, se compose de quatre pupitres
différents : soprani et alti chez les femmes, ténors et basses chez les hommes. Les
voix sont donc classées par tessitures, ces dernières définissant l’ambitus de la voix,
c'est-à-dire le registre (hauteur) le chanteur peut chanter, de la note la plus
grave à la plus aig. Le chœur peut représenter le peuple comme une allégorie
(l’enfer, la morale…).
L’ouverture est toujours exclusivement instrumentale, orchestrale. Comme
son nom l’indique, c’est elle qui précède la première scène de l’opéra, laissant le
beau rôle à l’orchestre. Le rideau peut être baissé ou ouvert selon la mise en scène.
Généralement, l’ouverture présente les thèmes principaux présents dans l’œuvre.
Les thèmes sont les mélodies sur lesquelles se base le compositeur pour créer son
morceau. A partir de la fin du XIXème siècle, certaines œuvres ne comportent plus
d’ouverture, comme c’est le cas avec Elektra de Richard Strauss.
4
Le librettiste, homme de lettres, travaille en collaboration avec le
compositeur pour écrire le livret qui peut être adap d’un roman, d’un conte,
d’une pièce de théâtre… et rendre ainsi le sujet, traduit ou pas, proche des attentes
opératiques et vocales du compositeur. Certains compositeurs écrivent eux-mêmes
leurs livrets, à l’instar de Wagner, et parfois Richard Strauss.
De Beethoven à Nino Rota en passant par Chopin, Liszt et Paganini, de
nombreux compositeurs ont repris les thèmes principaux de Don Giovanni,
notamment La ci darem la mano pour en écrire des variations. Avec une
distribution exceptionnelle (Ruggero Raimondi, Jose Van Dam…), le film de Joseph
Losey a naturellement contribué au succès de l’œuvre, même deux cents ans après
sa création. De Kierkegaard à Gounod, en passant par Wagner ou Tchaïkovski,
l’admiration pour Don Giovanni reste sans borne.
© Elisabeth Carecchio
Répétition de Don Giovanni de Mozart
Mise en scène Peter Brook (Festival d’Aix 1998-99)
5
Introduction
Don Giovanni a maintes fois été qualifié d’«Opéra des opéras» (notamment par
Richard Wagner) et fut cité en modèle par de nombreux compositeurs, et ce parmi
les plus illustres. Aimé, il l’est encore et toujours par nombre d’artistes et de
créateurs tant cet ouvrage lyrique dépasse le cadre de la musique, au demeurant si
belle et réussie soit-elle, traitant un sujet théâtral. Car Don Giovanni éclipse le non
moins célèbre Dom Juan de Molière dont il est en partie inspiré.
Personnage déjà mythique et légendaire prêt à tout pour arriver à ses fins, le
gentilhomme sans scrupule et blasphémateur n’est plus Don Juan, il devient Don
Giovanni, dont les principaux arias font rêver les chanteurs à la voix de baryton-
basse. me si le mythe a forcément inspiré d’autres compositeurs à l’instar de
Gluck avec un ballet-pantomime (1761), ou Cazzaniga avec un opéra exactement
contemporain (1787), et Richard Strauss avec un poème symphonique un siècle plus
tard, Don Giovanni surpasse de loin les différentes adaptations qui jalonnent
l’histoire de la musique.
Wolfgang Amadeus Mozart compose avec la complicité, ô combien importante,
du librettiste Lorenzo Da Ponte (qui a alors déjà collaboré avec le maître pour Le
Nozze Di Figaro) une œuvre majeure du grand répertoire lyrique qui fait le bonheur
des scènes du monde entier. Il sait surtout réunir en un seul opéra tout ce qui fait la
réussite de l’art lyrique : le divertissement et le drame, le sérieux et le léger.
Il est de coutume de dire qu’un mauvais livret ne peut pas faire un bon opéra et
ce n’est pas le formidable équilibre du texte qui rassemble habilement des
éléments empruntés aux dramaturges antérieurs qui contredira cette maxime (la
légende dit qu’un certain Casanova, compatriote de Da Ponte aurait donné des
conseils avisés au librettiste et posa touche personnelle…). Ajoutons à cela une
partition l’orchestre, tout en soutenant et laissant les voix s’exprimer sans les
étouffer, prend une place prépondérante dans la signification en s’exprimant et
illustrant le caractère des personnages, quitte à dévoiler un sentiment caché au
cœur de la partition.
Souvent qualifiée de tragique, Don Giovanni n’en est pas moins une œuvre
buffa, divertissante, qui sait parfaitement jouer avec nos émotions et nous
transporter en quelques mesures, quelques notes, quelques mots de la farce au
drame, dans une cohérence parfaite où les personnages trouvent naturellement
leurs places. Don Giovanni condamne bel et bien le libertinage, et ce au XVIIIème
siècle, peut être la plus grande période de naissances de «systèmes» dans l’histoire
de la philosophie, et pourtant il condamne aussi une sorte de morale commune.
Mozart et Da Ponte héritent non seulement de sources qui leur étaient
contemporaines, mais d’un mythe européen, en Espagne au début du XVIIème
siècle sous la plume de Gabriel Tellez, plus connu sous le nom de Tirso de Molina.
Ce sont les Italiens qui ont contribué au passage de Don Juan dans les
autres pays, mais on ne sait pas comment la pièce est passée d’Espagne en Italie,
des comédiens allaient en Espagne, des espagnols jouaient à Naples… Le drame
espagnol est devenu parodique, il a été traduit d’une langue à l’autre et d’un
système théâtral à l’autre, dans la forme de la commedia dell’arte.
On connaît une version de Cicognini à Florence en 1632, le personnage de
Don Juan est superficiel, le rythme plus frénétique et la joie de vivre a disparu.
En 1658, une version est jouée à Paris, avec l’Arlequin célèbre Biancolelli.
La complicité avec Arlequin se développe, les plaisirs sexuels de Don Juan sont mis
en avant, et il est dévalorisé, comparé à un porc. Le comique l’emporte, dans le
goût de la commedia dell’arte, avec force facéties et jeux de scène.
Dorimond et Villiers, en 1660 donnent à Paris Le Festin de Pierre ou le fils
criminel. La pièce insiste sur le conflit entre le père et le fils, la culpabilité du fils et
l’élément comique est moins important. La révolte du fils contre le père était déjà
dans la pièce de Tirso, elle prend ici de l’importance, et redonne de l’épaisseur au
personnage, corrigeant l’effet simplificateur de la commedia dell’arte. Cette
rébellion familiale, un peu « racinienne », efface certains traits du Don Juan
espagnol que Molière va retrouver dans sa pièce, en 1665, gardant aussi des
aspects de la commedia dell’arte qu’il connaît bien.
On ne traitera pas ici du Dom Juan de Molière, bien connu. On soulignera
simplement que Da Ponte connaissait cette pièce et qu’il en a tiré des éléments,
faisant cependant de son Don Giovanni un personnage très différent du héros
cynique et pervers de Molière, comme on le verra par la suite.
Soulignons qu’à cette même époque, un certain Cazanigga, compositeur
célèbre en son temps, présente son Don Giovanni o sia Il convitato di pietra, sur un
livret de Bertati dont saura s’inspirer Da Ponte pour sa collaboration avec Mozart.
Pour conclure cette introduction, laissons la parole à Goethe qui affirmait
en 1791, année de disparition du compositeur autrichien : « Cette œuvre est unique
en son genre et la mort de Mozart ne nous permet plus de rien attendre
d’analogue ».
1 / 27 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !